Partie II
Ecrit par Ornelia de SOUZA
Des vociférations retentirent réveillant Degla.Il percevait distinctement les voix de ses femmes qui se disputaient violemment. De peur qu'elles n'alertent les voisins, il se dépêcha de sortir pour voir ce qui se passait. Juste non loin de son gîte, Mariam et Clotilde se bagarraient comme des chiffonnières. Elles hurlèrent et elles étaient encouragés par les autres femmes qui les entouraient. Clotilde dominait Mariam qui s'était retrouvée à terre chevauchée par sa rivale. Le vieux Degla se hâta de rejoindre les femmes. Il leur cria d'arrêter mais sa voix était à peine audible. Elles se frappèrent de plus belle. Degla renonçant à les séparer s'éloignait lorsqu'une sandale lui cogna la tête. Il manqua de tomber mais s'accrocha à un arbre. La douleur fut si lancinante qu'il crut s'évanouir. Une larme lui échappa. Une larme à la fois de douleur et de tristesse face à sa situation. Il en voulait à ses odieuses femmes mais il s'en voulait encore plus de les avoir laissés entrer dans sa vie. Il en avait marre de cette vie et il se disait que tôt ou tard l'une d'entre elles allait finir par le tuer par excès de jalousie ou par vengeance. Elles se haïssaient profondément mais elles le haïssaient encore plus.
Il se retourna d'un geste rapide et fit signe à Thérèse de l'approcher. Celle ci hâta le pas et approcha son mari.
-Qu'est-ce qu'il y a ? demanda Thérèse
-Si elles finissent de se frapper,je veux toute vous voir. Je serai dans ma chambre.
Sur ceux,il retourna se coucher. Il rêva de ces beaux jours, de ces jours où sa santé était parfaite et où son coeur battait devant chaque femme qu'il rencontrait. Il chérissait ces souvenirs là par-dessus tout.
Le soir à son réveil, les femmes s'étaient réunies et l'attendait devant sa chambre. Elles se disputaient encore et son apparition n'y changea rien. Elles n'avaient plus aucun respect pour lui. Il secoua la tête, prit un siège, s'assit et entreprit d'attendre qu'elles aient finis leur chicane. Au bout d'un moment n'observant pas de réactions de la part de leur époux, elles s'arrêtèrent, se tut et s'assirent.
-Alors pourquoi tu nous as fait venir ici ? beugla Kissi irritée. Nous on a à faire.
-Très bien! s'exclama Degla. Maintenant que vous avez fini de vous injurier entre vous, vous trouvez maintenant que vous avez à faire?
-Ah pardon! Le vieux parle pour que nous on s'en aille
-C'est ça Kissi... C'est ça même! Tu es si malpolie...Tu es ma grande déception toi. Je t'ai épousé en voulant faire de toi...
-Tu m'as épousé?! l'interrompit brusquement Kissi. Tu as aussi épousé cinq autres femmes. Cinq! Degla, lorsque tu es venue me chercher chez mes parents ce n'est pas la vie à laquelle je m'attendais. Ce n'est pas la vie que tu m'avais promis et maintenant tu m'exiges du respect?
-Kissi ça suffit! Tu es libre d'être mapolie. Totalement malpolie à partir d'aujourd'hui. Tu m'entends? Aujourd'hui vous toutes vous allez ramassés vos affaires et vos enfants et dégagez de chez moi.
Un silence de sourd s'abattit aussitôt sur la petite assemblée. Personne ne pipa mot. Inès qui ne comprenait rien à la situation fut la première à parler.
-Je ne comprends pas
-Ma petite tu as bien compris... Toi et tes aînés vous ramasserez vos affaires ainsi que vos enfants et vous rentrez chez vos parents.
-Comment ça Degla? hurla Kissi. On ne bougera pas d'un pouce. Ça ne va pas chez toi? Moi je reste ici et il faudra plus qu'une grue pour me déplacer. Degla tu as menti. Je ne bougerai pas.
Elle se leva et poussa du bout des doigts la tête du vieil homme. Degla se leva porter par la colère, retira son soulier et l'abattit violemment sur la nuque de Kissi. A partir de cet instant là,les coups tombait telle un orage. Kissi criait mais n'arrivait plus à se défendre comme les autres fois tellement la rage de Degla lui conférait une force surhumaine. Elle se roula par terre. Il s'agenouilla auprès d'elle et continua à la battre. Les autres femmes apeurées et n'ayant jamais vu Degla dans cet état se dispersèrent. Degla battit Kissi jusqu'à ce qu'il n'est plus de force et qu'elle soit couverte d'ecchymoses et de blessures. Lorsqu'il en eut finit,il se rechaussa et retourna dans sa chambre. Le message était passé. Il ne voulait plus de femmes. Cette nuit là même Kissi et trois de ces femmes s'en allèrent avec leurs filles. Inès elle,demeura dans sa chambre avec son bébé. Elle se disait que la décision de Degla n'avait rien à avoir avec elle. Elle n'était là que depuis très peu. Neuf mois en tout et elle n'avait rien fait de mal à l'encontre de son mari. Elle ne pouvait donc pas payer pour les fautes des autres femmes.
Le lendemain de cette scène, elle sortit de sa chambre se fit à manger et remarqua le grand vide dans la concession. Elle prépara donc le petit déjeuner de Degla et entreprit de le lui apporter. Elle toqua à sa porte et y entra sans attendre une réponse. Elle découvrit le vieil homme au lit. Il s'étonna de la voir mais ne dit mot.
-Chéri je t'ai apporté ton petit déjeuner.
Il avait sûrement faim car il ne fit aucun commentaire et se mit à manger ce qu'elle lui avait préparé. Elle alla prendre sa fille dont elle entendit les pleurs puis revint auprès de Degla. Lorsqu'il eut fini il daigna enfin poser son regard sur elle.
-Que fais-tu encore ici? lui demanda t-il
-Comment ça ce que je fais ici? Je t'ai apporté ton petit déjeuner.
-Je te demande pourquoi tu n'es pas partit comme les autres?
-Je pense que moi je n'ai rien fait et puis je dois te donner ton petit garçon...
-Je ne veux plus de femmes,ni d'enfants... Inès je t'ai demandé de retourner chez toi avec ta fille.
Elle expira bruyamment.
-Mais c'est ici chez moi; fit-elle. Je ne peux pas retourner chez mes parents et jeter l'opprobre sur ma famille. Degla tu m'as épousé. Je n'ai même pas eu le temps de remplir mon rôle de femme auprès de toi que tu veux me renvoyer?
-Crois moi,tu as largement eu le temps...
-Notre fille Degla. Elle s'appelle Safi et elle est belle comme une fleur.... Regarde la! dit-elle en tendant le poupon à son père.
-Assez! ordonna Degla. Retourne chez tes parents maintenant avant que je ne m'emporte.
-Je ne peux pas. Degla je suis une femme différente de tes autres femmes. Je suis belle et jeune et en plus je t'ai donné Safi qui...
-Safi par ci,Safi par là...Qu'est-ce qu'elle a ta fille? Qu'est-ce qu'elle a que je n'ai jamais vu? J'ai tellement de filles que je ne peux te citer leurs prénoms à toutes. Ta fille est belle tu crois? J'ai eu une fille avec une femme de l'autre monde. Une femme à la peau blanche comme tes dents. Une femme mince comme une planche et aux cheveux aussi longs que tes jambes. Qu'est-ce que ta fille a que toutes mes filles réunies n'ont pas déjà?
Inès resta silencieuse devant tant de mépris pour sa progéniture. Elle savait pourtant que si elle ne se défendait pas,elle serait obligé de rentrer chez son père. Or jamais auparavant une femme n'avait été chassé de chez son époux dans sa famille. Son père n'accepterait jamais cela.
-Et moi? continua t-elle. Je t'ai donné ma jeunesse,ma loyauté, ma...
Le vieux éclata d'un rire si soudain qu'Inès se tut.
-Je suis une jeune mariée ! cria la jeune mère. Je suis une jeune mère et je ne peux pas retourner chez ma famille pour aucune raison.
-Aucune raison ? !rugit Degla. La raison est que tu es comme toutes les autres femmes. Une incapable ! Une femme stérile! Stérile car tu ne peux avoir de garçon. Et cette chose que tu tiens dans ta main n'est pas un enfant. C'est juste un être inférieur comme toi. Une chose qui est là sur terre pour assister un homme. La preuve vivante c'est toi. Qu'est-ce que tu fais en ce moment?Tu me supplies de te garder comme domestique,comme aide ménagère parce que je ne te veux pas. Je ne veux pas de toi et même si j'avais besoin d'aide pour faire mes besoins, je ne voudrais toujours pas de toi être inférieur. Et tu me parles de jeunesse et de loyauté mais tu ne représentes en rien tout cela. Ton père m'a juré que les oracles avaient prédit que tu ne porterais que des garçons mais regarde ce que tu tiens entre tes bras. Et toutes mes femmes étaient vierges et douces à leurs arrivées ici. Est-ce que toi tu l'étais? Tu m'as demandé de garder le silence sur ton impureté mais tu n'es rien de plus qu'une souillure que j'ai recueillis dans ma maison .
Inès laissa échapper une larme devant tant de dédain. Tout son être tremblait! Ce discours venait de l'ébranler. Un être inférieur ! Est-ce que c'était ce qu'elle était? Elle n'en revenait pas. Il était vrai qu'elle n'avait jamais vu plus loin ... On l'avait élevé pour être une femme,une mère et rien de plus. Un être serviable! C'était ce qu'elle était et rien de plus. Elle observa son enfant et observa Degla. Elle vit toute cette haine dans ces yeux et alors elle se jura que jamais sa fille ne serait comme elle: un être inférieur. Elle se jura que jamais sa fille ne serait confronté au mépris d'un homme.
Sans un mot elle se leva, retourna dans sa chambre, fit sa valise et sortit de la maison du vieux Degla. Elle se disait qu'avec tant de méchancetés, il finirait ses derniers jours seul et sans amour. Tel un robot, elle se dirigea vers le grand marché valise et bébé en mains et à elle prit un taxi pour le village voisin,le village de son père.