Partie XXX

Ecrit par Ornelia de SOUZA

Trente minutes déjà que Dine avait soi-disant surpris Safi au lit avec Oumar. Chacun y allait de son idée. Candie et Maman Dine affirmaient qu'elles étaient au courant depuis belle lurette. Les domestiques ricanaient et s'offusquaient à voix basse mais assez perceptible pour les protagonistes. Dine avait ordonné à Oumar de s'agenouiller dans la cours en attendant la police. Safi pleurait silencieusement. Elle craignait pour sa vie tellement elle méconnaissait Dine. Il marchait de long en large le point serré.


-Moi j'ai toujours su que cette fille ne pouvait pas fermer des cuisses; commenta Maman Dine. Elle n'a pas grande éducation. Tu te rappelles mon enfant? Je te l'avais dit

-Assez maman! hurla Dine en croisant le regard de Safi

-Dine...

-Toi tais toi! ordonna Maman Dine. Qu'est-ce qu'une fille comme toi a encore à dire ?


Safi supplia Dine du regard. Elle avait besoin de lui parler, besoin qu'ils s'expliquent tout les deux en privée. Elle n'arrivait pas à croire qu'il la pense capable d'être infidèle. Elle comprenait sa réaction. Il ne détestait rien de plus au monde que l'infidélité mais elle ne l'avait pas trompé. Il fallait qu'il le comprenne.


-Dine je t'en prie écoute moi

-Quoi Safi?

-Je t'en prie! supplia t-elle


Dine s'avança vers elle et lui saisit le bras puis l'éloigna de la petite foule. Il voulait lui donner une chance. Il voulait qu'elle s'explique, qu'elle lui dise pourquoi elle avait trahit sa confiance.


-Je ne t'ai pas trompé Dine! Je le jure sur la tête de nos enfants. C'est Candie...

-Ça suffit! Je ne veux plus écouter un seul mot de plus. Candie Candie Candie. Tu l'accuses de tout tes maux. Tu m'as accusé de te tromper avec elle mais aujourd'hui qui ai-je surpris dans le lit d'un homme? Safi tu m'as déçu.

-Écoute moi! C'est elle qui nous a piégé. Elle....


Safi fut interrompu par la sirène de police. Les policiers étaient là. Maman Dine ordonna aux domestiques d'ouvrir le portail. Safi tressailit. Que comptaient-ils faire d'elle? Elle n'allait certainement pas être jeté en prison pour soupçon d'infidélité. Ce n'était pas légal. Deux agents de police armés pénétrèrent dans la cours à la suite des domestiques. Oumar qui semblait s'être résigné depuis quelques minutes releva la tête. 


-Bienvenue Mr l'agent; dit Maman Dine. C'est moi qui vous ai appelé. 

-Bonjour Messieurs; dit Dine en s'avançant pour leur serrer la main. Nous sommes les propriétaires de la maison. Cet homme ci est notre gardien mais il a pénétrer notre demeure et a dérobé cet objet de valeur.


Dine enleva la montre qui se trouvait à son poignet et le tendit aux policiers. Oumar paniquait. Il ne pouvait plus rester silencieux. Ce qui se tramait n'était pas de moindre effet. Dine comptait l'accuser à tort et le faire enfermer.


-Ce n'est pas vrai! cria Oumar en se levant. Je n'ai rien dérobé.

-Agenouillez-vous! grogna un des officiers de police.

-Cet objet a une très grande valeur; continua Dine comme si Oumar ne l'avait jamais interrompu. Je veux porter plainte.

-Très bien; fit l'officier qui semblait le plus gradé. Embarquez le!

-Non! Vous ne pouvez pas faire ça ! C'est faux! Mr Dine, je n'ai rien fait! Safi, dis la vérité!


Safi tressaillit. Oumar était en position difficile. Elle devait le défendre. Elle ne pouvait pas laisser Dine agir de la sorte. Elle était à moitié caché derrière ce dernier alors elle lui prit le bras. 


-Je ne t'ai pas connu ainsi Dine! Tu ne peux pas être aussi méchant et mauvais. Tu sais très bien qu'il n'a rien fait alors arrête je t'en supplie. Dis la vérité maintenant !

-Tu vas prendre la défense de ton amant? murmura Dine entre ses dents suffisamment bas pour que les officiers ne l'entendent pas.


Safi lui lâcha aussitôt le bras. Elle savait ce que ça voulait dire. Si elle contestait les dires de Dine maintenant, elle serait directement déclaré coupable. Prendre la défense d'Oumar signifiait qu'ils étaient amants. Elle ne pouvait pas s'enfoncer ainsi. Oumar attendrait. Elle pouvait toujours convaincre Dine plus tard d'innocenter Oumar mais sur le coup elle ne pouvait rien. Elle eut honte de sa lâcheté mais elle le faisait pour ses enfants.

Elle baissa la tête pour fuire le regard d'Oumar lorsque les officiers le redressèrent et lui mirent les menottes. 


-Tu ne peux pas les laisser faire Safi! implora à nouveau Oumar. Tu sais que je n'ai rien fait. Je ne mérite pas ça. Tu sais que je n'ai personne sur cette terre alors pourquoi les laisses-tu me faire ça ? Mr Dine, je vous en prie! Dites leur la vérité.


Un coup sourd indiqua à Safi que l'un des policiers venait de le frapper avec sa matraque. Safi serra les dents. Elle souleva la tête assez tôt pour voir le policier trainer Oumar vers l'extérieur.


-Mon Seigneur, pardonne moi ce péché ! murmura t-elle


Dine l'entendit car il lui jeta un regard assassin. 


-Monsieur, vous devez passer au poste de police pour porter plainte en bonne et due forme! 

-Très bien! J'ai quelques affaires à régler ici et ensuite je viendrai. Je laisse ma servante vous raccompagner. 


Il fit signe à l'une des domestiques qui suivit l'officier et referma le portail derrière lui. Safi savait parfaitement que c'était elle les affaires dont Dine voulait s'occuper. Allait-il la battre? Il fallait qu'elle lui explique ce qui c'était passé en réalité. Candie avait réussi son coup. Un peu en retrait elle souriait de toutes ses dents à Safi qui était totalement désespérée.


-Et toi? demanda Dine. Qu'as-tu à dire pour ta défense ? 

-Dine je n'ai rien fait. Sur la tête de mes enfants qui sont les seuls que je possède dans ma vie, crois moi. Jamais je ne te ferais ça ! conclut t-elle en l'agrippant par le bras.


Dine se pencha sur la mère de ses enfants et lui posa un doux baiser sur le front. Une larme échappa au jeune homme et tomba sur la joue de Safi. Il souffrait de cette fausse découverte mais il se refusait à la croire. Comment pouvait-il ignorer ce que ses yeux avaient vu? Il a toujours voulu excuser le comportement de Safi mais là il ne pouvait plus malgré l'amour qu'il lui portait. Elle lui avait transpercé le cœur. Il la prit dans ses bras une dernière fois avant de se retourner vers sa mère et Candie.


-Foutez la dehors!leur lança t-il avant de dépasser Safi la tête haute mais le cœur à terre

-NON... NON... NON DINE! AIE PITIÉ ! hurla Safi désemparée en s'élançant à sa poursuite


Dine ne lui concéda même pas un seul regard et avant que Safi n'ait eu l'occasion d'aller plus loin, Maman Dine la tira violemment par le bras et la poussa vers le portail. Candie derrière observait ses ongles d'un air triomphant. 


-Dehors maintenant !

-Je ne vais pas sortir! refusa Safi. Je ne m'en irai pas d'ici sans mes enfants.


Maman Dine et Candie éclatèrent d'un rire entendu et aigu. Safi perçut le danger. Elles ne comptaient pas lui rendre ses enfants. Safi vit rouge. Cette fois-ci elle n'allait pas se laisser faire.


-Je vous ai laissé me blesser comme bon vous semblait parce que je pensais que vous m'aimeriez ensuite. Parce que je pensais que vous prendriez ma loyauté pour de l'amour. Je pensais que vous n'auriez pas d'autres choix que de m'accepter comme votre fille mais vous non. Vous n'êtes pas le genre de femme à aimer. Même votre fils Dine vous ne l'aimez pas parce que sinon vous penseriez à son bien-être. Vous ne pensez qu'à vous espèce de mégère. Vous êtes une méchante femme et...


Une gifle sonnante ferma le clapet de Safi. Maman Dine venait de la frapper.


-J'ai toujours rêvé de faire ça ; ricana Maman Dine en s'adressant à Candie. 


Safi ragea. Elle hurla un bon coup et poussa Maman Dine.Elle lui rendit sa gifle sans retenue. Elle était devenue folle, folle de rage. Elle n'allait pas leur permettre de lui prendre ses enfants.


-Tu m'as frappé ? lui dit Maman Dine en se tenant la joue. Je ne vais pas t'epargner


La dame en chair se jeta sur la jeune femme menue. Suivant sa menace, elle ne l'épargna pas. Elle la gifla au moins quinze fois sans s'arrêter. Comme si une force nouvelle l'habitait, Safi ne laissa pas couler une seule larme. Son unique but était de traverser le mur que représentait Maman Dine pour récupérer ses enfants. 

Maman Dine pressée d'en finir saisie Safi par la peau du cou comme si elle prenait un pauvre chat. Elle la poussa hors de la maison comme si elle accomplissait une simple formalité. Candie et les domestiques suivaient toujours la scène.

Safi voulut entrer de nouveau mais Maman Dine la repoussa si violemment qu'elle s'affala au sol. Elle se releva immédiatement.


-Maman je vous en prie! implora t-elle. Oubliez ce que je viens de dire. Je vous en prie. Vous êtes une mère aussi. Comprenez moi! Candie, s'il te plaît ! Je ne veux plus de Dine! Garde le mais mes enfants rendez les moi...

-Désolée ! murmura Candie avant de  se retourner et de s'en aller.


Mamam Dine la méprisa pendant un instant puis elle cracha à ses pieds avant de refermer le portail sans état d'âme. Safi se jeta automatiquement sur la barrière en fer et frappa plusieurs coups de manière désespérée. Elle n'allait pas les laisser faire. Ils devaient lui rendre ses enfants. Elle n'allaient pas se laisser faire. Elle frappa jusqu'à ce qu'elle s'entaille la main. Les voisins l'observaient avec tristesse. 

Personne ne daigna lui ouvrir le portail. Elle se faisait pitié à elle même. Elle ne savait plus quoi faire. C'est alors qu'elle pensa à sa mère. Elle avait toujours été là pour elle et elle n'avait jamais laissé personne abuser d'elle. Safi était convaincue que sa mère l'aiderait à récupérer ses petits.

Elle appela donc un zem rapidement même si elle n'avait pas un franc en poche.  Elle savait que tous ses soucis prendraient fin dès que sa mère interviendrait. Le Zem fila comme s'il était présent dans l'esprit de Safi. Quelques minutes plus tard, il se gara devant l'ancienne habitation de Safi. Safi pria le zem d'attendre et se rua à l'intérieur de la maison.


-Maman! Maman! appela t-elle.


Aucune réponse ! Dès que Safi poussa la porte de la pièce principale, elle aperçut les pieds de sa mère qui dépassait légèrement la longueur d'un canapé. Safi se dirigea vers sa mère. Un vent glacial lui traversa le dos. Inès avait l'air de dormir paisiblement avec un léger rictus qui déformait sa bouche. Mais à sa couleur pâle, Safi savait qu'elle ne dormait pas. Elle s'approcha et la prit dans ses bras sans réfléchir. L rigidité et le manque de chaleur du corps ne l'étonnèrent guère car elle le savait. Elle comprenait maintenant ses impressions de ce petit matin. Sa mère était morte et elle l'avait ressentie. Inès était morte.


-Non maman! Ne me fais pas ça s'il te plaît. Tu ne peux pas partir sans me pardonner. Tu ne peux pas partir sans voir tes petits enfants.


Safi serra le corps inerte de sa mère contre elle. Elle s'en voulut de ne pas avoir décroché ses derniers appels. Elle voulait certainement lui demander de l'aide mais la fille indigne qu'elle était avait décidé de l'ignorer. Elle avait laissé sa mère mourir. Elle avait tué sa mère.


-Safi?! fit une voix familière. Que fais-tu ici? Eh ben si je savais que j'allais te trouver ici, je n'aurais pas tarder à venir. Ma mère m'a envoyer voir la tienne et c'est une sacrée surprise de te voir ici.


Il s'agissait de Rachelle, la vieille amie de Safi qui sembla heureuse de la revoir mais le regard empli de larmes que Safi lui adressa l'inquieta directement. Elle n'eut pas le temps de la questionner que Safi courut se réfugier dans ses bras.


-Ma mère est morte Rachelle!  Ma mère est morte!

-Oh mon Dieu! s'exclama Rachelle en jetant un regard au corps d'Inès.


Elle ne tarda point là et sortit Safi hors de la maison. Au dehors, le Zem était toujours là et réclamait d'être payé. Rachelle le régla immédiatement et se retourna vers Safi.


-Calme toi Safi! Tu n'es pas seule! Je suis là !


Cris de femmes