Point final

Ecrit par Ibiki

- Nayanka -

Le jour - ji,  le fameux jour.  Nous y sommes.  Je suis juste là,  comme anesthésiée. Les gens bougent,  ils montent ils descendent.  Nous sommes à  Pouma,  village natal de Lucas. Je suis assise sur un banc,  j'attends l'heure du l'office religieuse pour me diriger vers les autres.

Les amis et certains membres de la famille sont déjà installés sous les tentes. Ils parlent sûrement du déroulement de la cérémonie traditionnelle.  Je n'ai pas envie de les rejoindre.  J'attends la messe. 

Sophia s'avance vers moi.  Ma fille a maigri,  elle est toute pâle.  Le creux de ses joies m'étonne encore. Mon bébé est devenue un adulte. Prendre soin de moi, son frère et faradji.  Mon poussin a beaucoup porté sur ses frêles épaules. 

- Mami Inès voudrait que tu viennes t'asseoir à la place qui t'es réservée. Elle insiste. 

- C'est obligé ?

- il paraît que c'est la coutume.  C'est les palabres... 

- J'en ai pas envie... 

- Je sais...  Mais il faut qu'on y aille... 

Elle me regarde et sourit.

-Sophia... 

- Aller,  on y va... 

Je me lève et la suis sans grand enthousiasme.  Mama Inès me fait signe, elle indique le siège auprès d'elle. Je m'y asseois. 

- Tu es obligée d'etre la,  tu es la veuve...  

- Je veux juste que ça finisse..  J'en peux plus... 

- Je sais...  Moi aussi.  Surtout que je connais les comportements bizarroïdes de ma belle-famille. 

- Ah bon ? 

- Nayanka,  ils sont difficiles... 

- Ça m'étonnerait que tout ça finisse sans incident... 

On éclate de rire.  Un oncle de Lucas nous jette un regard noir.  Mama Inès chuchote :

- voilà !  Je te l'ai dit... 

La cérémonie traditionnelle commence.  Les différents membres des familles parlent.  D'une oreille distraite j'écoute ce qui ce dit.  Jusqu'au moment où un de ses oncles demande les vraies causes de sa mort.  Il est sérieux ?  Tssssp. 

- Je voudrais les vraies causes de la mort de notre fils.!!  Laissez-nous Lee choses d'accident là.  Nous voulons la vérité.  Dites-nous ! Nous avons cherchez,  et savons que sa mort viens de sa propre maison !  De son foyer !  Que sa femme nous dise,. 

- Quoi ??? 

 

- Mama Inès -

Quand  Isidore parle,  il ne veut  jamais s'arrêter.  Il trouve toujours des choses à  dire. À chaque fois il finit par accuser une personne ou plutôt désigner le coupable de la mort. Toujours le même scénario. Il va accuser qui cette fois-ci ?  Il ne m'a jamais appréciée. M'accuser de la mort de mon fils.  Il serait capable de le faire. À la mort de Robert il l'a fait mais pas pendant les cérémonies. Pfff. 

Je guette sur la gauche, je vois Gérald.  Il est assis. Des lunettes noires sur son visage cachent sûrement la tristesse de ses yeux. 

- Nous avons cherché et nous savons que sa mort vient de sa propre maison,  de son propre foyer. Que sa femme nous dise ! 

Pardon ?  

- Quoi ?  Crie pratiquement Nayanka. 

- Qu'elle nous dise ! Pourquoi tu as tué notre fils,? 

- Le tuer ???  Tonton Isidore ?  

Elle se lève,  j'essaie de la retenir.  Rien n'y fait.  Elle est déchaînée.  Elle s'avance vers Isidore. 

- Nayanka ce sont les hommes qui parlent. 

Elle ne m'écoute pas. 

- que je l'ai tué ?  Alors que c'est lui qui m'a tué ?  Ça fils que tu pleures aujourd'hui n'était pas bon envers moi !  Il était méchant !  Il a passé son temps à me faire souffrir !  Il nous a abandonné mes enfants et moi !  Je suis venue te voir ici à Pouma,  tonton Isidore tu m'as dit quoi ? Aujourd'hui tu viens dire que je l'ai tué ?  Ce n'était un secret pour personne nous étions en plein divorce parce que je n'en pouvais plus !  Oui j'en avais marre de vivre tout ça !  Votre fils que vous pleurer m'a fait du mal et vous tous ici le savez.  Mais pour quelle foutue raison tu m'accuses ? 

- Calme-toi...

- Non mama Inès !  J'écoute ce qui se dit depuis, les chuchotements, les regards.. Je fais semblant de ne rien entendre ou voir,  j'ignore tout.  Mais là c'est trop !  Tonton Isidore...  Votre fils m'a tellement fait souffrir que le pleurer aujourd'hui est comme se l'hypocrisie !  

Gérald se lève et vient la serrer contre lui.  Il lui glisse dans l'oreille des mots. Elle éclate en sanglots et s'effondre.  

- Pourquoi ?  Tonton Gérald  pourquoi ? 

Il la regarde. La relève de terre et s'en va avec elle. 


- Sophia-

ce spectacle me laisse sans voix. Maman est dans tous ses états.  La souffrance que je lis dans ses yeux est tellement douloureux que des larmes  glissent sur mes joues. 

Faradji gazouille,  il est triste.  Je ne sais pas s'il sait ce qui ce passe. 

Il paraît que les enfants ressentent la tristesse.  Fara, ça peut être son cas. Il est si triste.  

- Ça va aller Sophia. 

-Nathaniel..  Je sais...  Mais c'est si dur.  Regarde mama.  Elle est... 

- Je sais.  Mais on doit être là pour elle... 

J'ai vu Nathaniel pleurer une seule fois.  Le jour où je lui ai dit que papa a fait un accident.  Peut-être qu'il pleure souvent en cachette je ne sais pas.  Mais c'est lui qui me soutient. 

La vie est injuste...  Et encore plus pour le petit à venir... Et même Faradji. Il a au moins des photos avec lui.  

Seigneur pourquoi ? C'est si difficile...  

on a calmé l'assistante.  Grand père Gérald est assis à côté de mama et lui tient la main.  Il est différent je ne saurait dire comment mais.. 

La prédication du prêtre ne fut pas longue.  J'ak même l'impression que c'est un peu vite passé.  

Ce moment que je crains le plus.  Un cortège porte le cercueil de papa. Tonton Jimmy et quelques autres oncles ont l'air très éprouvé. On avance lentement vers la tombe creusée. Je suis derrière mama,  je tiens toujours Fara contre moi,  Nathaniel tient la main de mama. 

J'ai l'impression que mes jambes n'avancent pas assez. Je respire bizarrement.  Je ne sais pas,  c'est comme si une boule bloquait ma poitrine.  Des vertiges me tiennent. Grand père Gérald,  me demande si ça va. 

- Oui..  Ça va.. 

- Donne-moi le petit... 

Je lui remets Fara. Il me prend par la main. On fait quelques pas.  Mes jambes deviennent plus lourdes.  Mon cœur bat si fort. 

- Papi... Je.. 

- Oui... 

- je ne vais pas bien... 

- trésor,  fait un effort...  S'il te plaît... 

Je ravale la salive.  Ma gorge est si sèche. Des sensations de chaleur. J'avance vers la dernière demeure de mon père. Je me fraie un passage entre les personnes et je me retrouve derrière Mami.

Le prêtre asperge de l'eau bénie  le cercueil et la tombe.  

- Tu es né poursuiere et tu retourneras poussière... Que Dieu, son fils unique Jésus et les anges t'acceuillent et ta permettent de veiller sur ce qui sont encore sur la terre des vivants. 

On descend le cercueil de papa,  mama crie de toutes ses forces. Je suis prise d'un vertige, des sensations de chaleur forte.  Ma gorge devient plus sèche que tout à l'heure.  Mes paupières pèsent...  Ma vue s'assombrit, je veux lutter mais... 


-Nayanka-

Assise sur un banc,  j'attends qu'elle vienne.  Je ne sais pas vraiment à qui m'attendre.  Je ne sais pas qui elle est, mais ma visite ici est très importante... Je vois une jeune femme aux traits fins s'avancer Vers moi.  Elle adore un sourire. Elle est très jolie. On ne dirait pas qu'elle vit en prison. 

- bonjour...  Je suis Annicka. 

- ah d'accord,  je suis...

- Nayanka,  je sais.  Je vous connais,  j'ai déjà eu à vous voir quelques fois... Comment va mon prince ? Je peux voir des photos ?  S'il vous plaît... 

Je lui montre des photos de Fara, des larmes de joie inondent son visage. 

- Il est beau,  il a grandi,  il est heureux...  Mon bébé... Merci de prendre soin de lui

Elle me remet mon téléphone, et son visage s'assombrit.  Une larme roule sur sa joue. Fara a ses yeux, le même marron... 

Elle reprend :

- J'aurais voulu assister à son enterrement,  c'est le père de mon unique enfant...  Je ne pouvais pas...  J'ai demandé,  mais je ne suis pas un membre proche de la famille...  

- J'imagine... 

- Je ne pourrais jamais comprendre la peine que vous ressentez.  Mes condoléances...  Soyez forte..  Snif.. 

- merci... 

- snif...  Vous êtes là pour me parler de Faradji,  n'est-ce pas..  Vous voulez me le remettre c'est ça ? 

- ...

Elle me prend les mains. 

- Je vous en prie,  je sais que je ne peux pas vous demander une telle chose. 

-... 

- Je vous en prie...  

Je ne comptais pas me séparer de Fara,  il était juste important que sa mère me le confie. Il est un membre de notre famille. Je n'ai pas le cœur de me séparer de lui. 

- D'accord... 

- merci,  merci beaucoup,  jamais je ne vous remercierai assez... Apprenez lui les valeurs de la vie, l'amour, le bien,  faites de lui in homme... 

Elle pose des bisous sur mes mains qu'elle tient encore et les serre fort contre elle les paupières fermées. 

C'est peut-être bizarre mais je ressens de la tendresse pour elle à cet instant.. 


Ça fait deux mois que...  Ça fait deux mois que Lucas est parti. Nous sommes retournés à la maison. Nous nous consolons mutuellement.  Mama Inès est plus proche de moi. On s'entend bien. Tonton Gérald est régulier à la maison. Il veut vivre le plus de moments possibles avec nous.  Je pense qu'il n'est plus en colère contre mama Inès. Fara fait ses premiers pas... 

Et mon ventre ?  Il s'arrondit. Carole se moque de moi,  une vieille femme enceinte... 

Et si la douleur est partie ?  Non. Je souffre toujours autant, chaque nuit je pleure. Je me dis que si j'avais accepté accepté de parler avec lui,  si j'étais restée à la maison, et si je lui avait donné cette dernière chance qu'il  demandait ?  Peut-être il serait toujours là avec nous.

Et toi qu'aurais-tu fais à ma place ? 

Le malheur de t'avoir perdu ne me fera jamais oublié le bonheur  de t'avoir connu Lucas...



L'homme de ma femme