Portraits de femmes : Assa Ba - 1
Ecrit par Pullar Debô
Assa ? Assa, tu es avec nous ?
Oui, mes excuses. Je… Je vous écoute.
C’est un projet innovateur, mais ce que, ECO-Team nous demande dans le cadre du financement de leur projet est assez risqué. Je vous ai envoyé plutôt le document par mail afin que nous soyons tous au même niveau d’information et comprenions les risques liés à cette procédure, si jamais on s’engage auprès d’eux.
Une étude a-t-elle été faite en amont par nos experts ?
C’est en cours. Ils désirent également faire un audit financier sur le groupe avant de nous faire part de leurs avis. Nous devrions avoir leur rapport d’investigation pour cette fin de la semaine. Mais avant, il serait judicieux, je pense, de suspendre toutes réunions ou rencontres avec les membres d’ECO-Team pour qu’il n’y est pas de prise de décision hâtive.
Penses-tu être influençable Kadi ?
Tu as tapé aux fenêtres sans succès, j’ai démoli une porte pour entrer. Qui est le plus influençable Ben ?
Ben et Kadi sont mes jeunes collaborateurs. Bourrés de talents, prétentieux, efficaces, esprits compétiteurs, autant d’adjectifs qui les qualifient et qui font qu’ils peinent à s’entendre.
Vous pourrez vous chamailler quand vous serez sortis de cette salle de réunion. Mais avant, faites-moi plaisir, épargnez-moi vos crises de débutants. Je veux un compte rendu des derniers échanges, un point exhaustif sur l’accord en cours d’établissement, et une étude de risques à l’interne. Ben, je veux que tu t’en occupes et que le fruit soit irréprochable.
Je travaille sur…
Je n’ai pas demandé ton avis et ce n’était pas une proposition. Kadi, où en sommes-nous par rapport à la coordination de ta dernière activité de prospection ?
Euh, j’ai été absorbé par ce nouveau contrat d’ECO-Team, mais je te fais un retour pour la fin de la journée.
Début d’après-midi, je préfère. Si nous avons parcouru tous les points de cette réunion, je vous remercie.
Mon téléphone vibre, j’y jette brièvement un coup d’œil et ramène mon attention vers mes deux collaborateurs qui s’apprêtaient à quitter mon bureau.
Au fait, vous devez chercher à connaître et à comprendre les risques liés à la gestion des priorités. C’est très important. ECO-Team n’est pas le seul gros projet de la banque. Il y’a en plein, mais pour une raison lambda, vous avez déporté toute votre attention et votre énergie sur ça, alors que vous avez des projets en cours, qui ne valent pas autant financièrement mais qui restent des étapes clés dans la stratégie de développement d’axes de financement. Restez concentrés, et au lieu de chercher à savoir qui est le meilleur parmi vous deux, essayez déjà d’être assez confiant pour mener un projet à bien. Dites à Tenin de venir et fermez la porte après vous.
Tenin est mon assistante. Une jeune femme, brillante et efficace, du haut de ses vingt-et-quatre ans. Le téléphone vibre encore. L’écran affiche Kadia.Pro. Je décroche.
Ma tasse de café ?
Pile à l’heure. Et chaud !
Comment tu vas ?
Bien. Déjeuner aujourd’hui ? J’ai quelque chose à te raconter !
Comme d’habitude… Je ne peux pas, désolée, nous sommes mercredi et je déjeune avec Omar.
Si seulement tout le monde avait votre chance ! Ces années de mariage et la flamme reste vive. Tu es tombée sur le jackpot.
Il est tombé sur le jackpot… Alors qu’est-ce tu veux me raconter ?
Boff, rien d’intéressant. J’ai rencontré quelqu’un.
Encore ?
Tu aurais pu te priver de ce « encore ». Eh oui ! Mais au risque de passer pour une cougar, j’ai bien envie de lui demander son âge.
Pourquoi, est-ce qu’il est au stade des baskets et casquette à l’envers ?
Ce n’est pas drôle. Mais tu sais quoi ? Je ne serais pas la première ?
En tout cas, tu ne seras pas la première. Je refuse que ma seule meilleure amie sorte avec un homme plus jeune qu’elle.
On ne parle pas la même langue aujourd’hui. Je te laisse à ton boulot.
Tu pourrais venir diner vendredi ?
Ça fait longtemps que nous n’avions pas fait de sortie toutes les deux ? On pourrait aller prendre un verre ?
D’accord. Va pour ce vendredi.
Super ! Bonne journée et salut à Omar.
Je n’y manquerais pas. Portes-toi bien.
Alors que je raccroche, je me rappelle à quel point mon amitié avec Kadia, m’était précieuse. Toutes ces années, ensemble, à traverser les moments les plus fous de notre vie, sans jamais manquer d’être là l’une pour l’autre. Trente ans d'amitié.
Tu m’as fait appeler ?
Tenin. Entre. Tu devais m’apporter le document du service RH, ils n’ont toujours pas trouvé un directeur d’agence digne de ce nom dans ce pays ?
Je suppose qu’ils sont si méticuleux, qu’il est difficile de passer entre les mailles du filet. Mais bon, après, c’est dans le soucis de s’aligner avec ton profil type d’un bon directeur d’agence qu’ils trainent autant…
Je ne suis pourtant pas difficile ?
Difficile, non… Efficace, oui. Certains peuvent confondre.
Merci pour la machine à café.
Oh ça. C’est parce que je déprimais de voir l’autre ici, c’était démodé.
Ça faisait de très bons cafés. C’est le plus important.
Innovons… Innovons. Mais bon, je vais les bousculer un peu. J’espère que tu as noté ton rendez-vous avec Mr Ayesé.
Mr Ayesé ?
Oui, l’entrepreneur ghanéen. Celui qui a des usines de chips dans la zone industrielle…
POP’Chips ?
C’est cela.
Ce serait bien que je réussisse à le convaincre d’ouvrir un compte chez nous. Il vient tout juste de s’installer, et parait qu’il pèse lourd au Ghana. Ça peut nous rapporter gros. Est-ce que ton homme de main a trouvé quelque chose qui pourrait nous aider ?
Rien d’inquiétant. C’est un homme bien investi dans les affaires, très réglo pour les types de son genre. A toi de bien tenir ta canne. Tu as un gros poisson dans ton filet.
Ne t’inquiète surtout pas. Je le poserais sur la barque.
J’y vais ! Et si t’as besoin…
Je t’appelle. Merci Tenin.
Assise dans ce bureau, je regarde au loin, dans mes pensées. Je me dis que ma vie était parfaite.
Je m’appelle Assa Ba. J’ai trente-quatre ans. Heureuse épouse d’Omar Keita et mère comblée de deux jumelles, Adam et Awa, onze ans. Je suis aussi la Directrice Générale de la BID (Banque Internationale de Développement) au Mali. Je vous l’ai dit : ma vie est parfaite. Et c’est surement ce que vous vous dites aussi ou presque.
Les filles sont tout ce que nous avons de plus cher dans notre vie. Elles sont notre point d’ancrage. Et si notre mariage fait tant envier, c’est parce qu’avec le temps nous avons masqué tant de choses que nous avions fini par croire nous aussi à un ménage parfait. Et notre entourage aussi, y a cru.
J’imagine combien désire être à ma place, comme si me voir triste, est une grande injustice face à ce qu’elles traversent chaque jour. Ne m’enviez pas.
Douze ans de mariage, et après la naissance des filles, nous avions essayé tant bien que mal d’avoir d’autres enfants mais en vain. Au fil du temps, la frustration s’est installée. Ce sont des choses qui ne se disent pas. Pas même, souvent à une meilleure amie, surtout pas, quand elle prend ton couple pour exemple.
Quand j’ai rencontré Omar, il était tout ce qu’il est aujourd’hui : beau, séduisant, irrésistible et aimé. Il avait la côte, comme on dit. C’était à la fac, et je n’avais pas vraiment le profil que ce genre d’homme recherche, mais pourtant, nous sommes tombés amoureux.
J’étais timide, jolie mais réservée, une intello qui se cachait derrière ses cheveux nappy et ses livres. Ce n’était pas le coup de foudre. Nous venions de deux mondes différents. Le coup de foudre, c’était des mois après, à une soirée, la première et la dernière de toute l’histoire de ma vie estudiantine.
Ce fut ma première robe courte, ma première paire de chaussures à talons atteignant les dix centimètres, ma première perruque, mon premier « makeup », mes premiers faux ongles… Une autre moi.
Quand il m’a vu, entouré d’une dizaine de filles toutes aussi belles les unes que les autres, il s’est avancé vers moi et alors que j’ignorais qu’il connaissait mon nom, il a soufflé à mon oreille « Tu es plus jolie quand tu ne rajoutes rien, mais là, t’es pas mal aussi » Après ça, il m’a attiré dehors et on a parlé de tout et de rien, comme si depuis toujours nous nous connaissions. On s’est aimé, on s’est marié. Mais l’amour, ce n’est pas tout…
Avec le temps, cet être, qu’on aime, devient si familier qu’on s’habitue à lui comme l’on le ferait avec un voisin. La flamme vive perd ses couleurs, il ne reste plus que les traces de la bougie éteinte. C’est ça le mariage.
On sait la chaleur que procure cette bougie, la passion, le désir, l’amour… On sait à quel point sa lumière est belle et rassurante. Elle réchauffe les cœurs et le lit. Puis un beau jour, elle s’éteint, vous remarquez alors que le temps n’épargne rien et qu’elle a fait le sien. Mais malgré tout, vous accrochez à ses fruits, parce qu’ils sont la seule preuve que vous vous êtes aimés, puisqu’il ne s’agira plus d’amour, mais, de comme un accord rester, attachés l’un à l’autre, sur la barque, jusqu’au pont final. Avoir quelqu’un pour combler ton décor. Je ne sais pas si ce que je ressens pour mon mari, peut être considéré comme de l’amour, mais je tiens assez lui pour être incapable de me désister à notre vie. Même si ça n’a pas toujours été facile et que sa famille m’a toujours traité comme la perle rare. Je reste reconnaissante pour tout ça.
Je parcours quelques dossiers et demande à Tenin, de faire livrer un plateau de viennoiseries chez Amsa, ma belle-sœur et l’ainée d’Omar. Cette femme est juste adorable et bienveillante.
L’heure du déjeuner est vite arrivée. On a l’habitude de se retrouver au « Karma ». Un restaurant chic du centre-ville qui sert du tout. Ça va de la cuisine maghrébine, à la cuisine mexicaine, une petite trouvaille d’Omar.
Quand je gagne le lieu, même table, même serveur. J’aperçois un Omar, très concentré sur son téléphone, qu’il ne me voit pas venir. Je me rappelle cette phrase de Kadia : « Tu me diras tout ce que tu veux, une vérité non discutable : Omar est si bel homme que tu devrais l’enfermer » Mon homme se conserve bien. C’est un fait, du haut de ses trente-et-neuf ans. Et souvent je crois bien, qu’il en use. Je ne préfère tout simplement pas me faire des idées.
Dix minutes de retard ?
J’ai été prise par les embouteillages. Je suis désolée. (En lui offrant un bisou chaste)
Tu es resplendissante, Mme Keita, même essoufflée.
Merci…
Je me suis permis de commander. Les sushis, ça te va ?
Parfait !
Quand je m’assoie, il avance une main et de son pouce droit, caresse tout doucement le dos de ma main.
Et le boulot ?
Ça va. J’apprends à déléguer et ça me fait moins de boulot et moins de pression. J’essaie de lâcher prise sur la perfection.
Génial ! Tu as bonne mine chaque jour un peu plus… J’ai eu une idée ce matin. Serait-il possible pour toi de prendre quelques jours ? Deux feront l’affaire. Je voudrais qu’on sorte un peu, on peut partir à Abidjan ?
Et les enfants ?
Elles iront chez Amsa…
On pourrait les amener ? ça leur fera du bien aussi de sortir de la ville et de respirer un autre air.
Assa… Je veux qu’on y aille que tous les deux… Tu me manques. Je ne désire t’avoir que pour moi tout seul. Ton incorrigible égoïste de mari, veut passer du temps avec toi et loin de tout.
Je pousse un soupir et répond par un sourire. Je reconnais qu’il est un éternel romantique. Je n’en suis pas une. Mais je sais aussi que ce genre d’initiative ne lui prend pas souvent. Il est plutôt du genre, diner le week-end et cinéma le vendredi soir avec les enfants.
Il y’a un an, nous avions suivi une thérapie de couple. Au Mali, c’est assez rare. Moi-même j’y étais sceptique. Comment une personne, qui ignore tout de nous, peut-elle nous aider ? Pourtant de l’aide, on en avait besoin. On ne communiquait plus.
Je sortais tôt, il rentrait tard. Nous ne faisions plus l’amour du tout. Rien ne nous attirait l’un vers l’autre. Et quand on se retrouvait en famille, on se focalisait sur la présence des enfants pour échanger quelques blagues, pour contenir le vide. Ça marchait.
Le psy a dit que c’était le fruit de la routine. Mais surtout, que le fait d’essayer d’avoir d’autres enfants à tout prix, avait tué l’envie et le désir, que nous avions l’un pour l’autre. Dix ans, à passer de méthodes en méthodes sans succès. J’ai baissé les bras, mais lui, il voulait continuer à essayer.
J’étais fatiguée. Naturellement et artificiellement, nous avions tout tenté. Des médocs, des piqûres, tout… On a tripoté mon corps comme un spécimen de laboratoire. J’étais épuisée. Moralement et physiquement. Je n’avais pas été diagnostiquée stérile après une grossesse, et lui, non plus n’avait aucun problème. Seulement, ce que les spécialistes ne s’expliquaient pas, c’était qu’on n’arrivait pas à faire un enfant.
Birame, mon ainé, pédiatre, mettait de côté la science au profit de la religion. « Dieu est Celui qui donne, votre foi est testée par votre patience » et Amsa, fidèle à son optimisme répétait : « Vous avez été doublement bénis ! N’est-ce pas merveilleux ? Il existe des couples qui peinent à avoir un seul enfant, et vous, vous avez deux merveilleuses filles, vous avez pourtant envie de vous détruire ? »
Alors je ne voulais plus essayer. J’ai arrêté tous les traitements, mis fin à mes rendez-vous à la clinique et notre planning intensif de faire l’amour à plus de six fois par semaines. C’étaient des séances de jambes en l’air dénouées de toute passion, mais respectées dans un but précis.
Omar n’a pas apprécié, mais c’était de mon corps qu’il ne s’agissait pas d’une expérience scientifique. Il a commencé par s’éloigner en m’ignorant. Il restait dans sa bulle. Et si au départ cela m’atteignait et que je faisais des efforts pour aller vers lui. A un moment, j’ai aussi arrêté de m’en soucier. Mon orgueil a pris le dessus et notre vie de couple en a payé le prix. C’était une période difficile, mais jamais je n’ai cessé d’aimer mon mari.
Et quand ça a commencé à jouer sur les filles, Kadia m’a conseillé un psychologue. Efficace, elle disait. Omar n’a pas voulu dès le départ. Le problème c’était moi qui voulais cesser d’essayer pas lui. Puis il a cédé un jour, quand Amsa lui en a parlé : « Vous n’êtes peut-être pas des blancs mais vous n’en êtes pas loin avec vos habitudes et votre comportement. Si ça peut l’aider et que tu tiens à elle, mets-y du tien ». Il l’a fait.
Un an après la thérapie, je sais qu’il n’a pas totalement lâché prise. Un week-end à deux, une soirée à deux, des voyages à deux… Autant d’occasions pour essayer.
J’ai énormément de boulots ces temps-ci. Kadi et Ben ne sont pas totalement autonomes. Ils ont besoin…
De toi ? J’ai moi-aussi besoin de toi. Est-ce que ça compte ?
Omar…
D’accord. D’accord, je te laisse le temps d’y réfléchir. Rien ne presse. (Il pose une bise sur ma main). Je t’aime.
Je t’aime aussi.
« Partager ses sentiments, faire comprendre à l’autre qu’on tient à lui, compte pour la stabilité d’un couple. Essayez d’être communicatifs sur ce que vous ressentez à votre partenaire, pour qu’il ou elle, ait une certaine confiance en la relation ». Ça, on l’applique tous les jours.
Au cours du déjeuner nous avons de son nouveau projet immobilier : une cité vers l’aéroport, sur la route de Senou. Il avait longtemps hésité avant de se lancer.
Une cité viable, sécurisée et remplie de villas luxueuses. Soixante en tout. En plus j’ai prévu d’y construire un parc, un mini-terrain de foot, une salle de gym super équipée, et une grande piscine pour les habitants de la cité.
Oh tu vois grand ! C’est génial. Et pour le financement ?
Nous y voilà…
Quoi ?
Non rien… Le projet est bien structuré, ne t’inquiètes pas.
Je ne m’inquiète pas, je m’intéresse, c’est tout. Si tout est bon, c’est parfait. Et quand est-ce que tu débutes les travaux ?
Dans un mois. Je risque d’être très pris.
Je comprends… Il faut que j’y aille, j’ai rendez-vous avec un potentiel nouveau client de la banque.
D’accord. Je reste pour un thé et je rejoins le bureau après.
Ok. On se voit à la maison.
A ce soir.
Je lui fais une bise et regagne ma voiture sur le parking. J’aime ces mercredis, où je passe les pauses-déjeuners avec lui. Mais je les sais aussi très contenues, maitrisées. Nous ne débordons jamais dans la conversation, cherchant à éviter toute raison de se disputer.
L’après-midi est vite passé. J’ai reçu Mr Ayesé, le promoteur de l’usine POP’Chips. Un homme sûr de lui et certainement, un dragueur raté. J’ai réussi à le convaincre d’ouvrir un compte dans notre banque en échange d’un déjeuner demain. Je lui ai tout de même précisé que j’étais mariée mais il n’a pas hésité.
Est-ce qu’un jour j’ai douté de la fidélité d’Omar ? Pas une seule fois, et je peux me le permettre, il ne m’a donné aucune raison de douter de lui. Il est toujours présent, attentionné, romantique et investi. Même si nous avons passé des moments difficiles, je sais qu’il m’a toujours été fidèle. La tromperie ne s’est jamais installée dans notre couple, et je peux, peut-être, passer pour une naïve, mais je préfère croire qu’on ne s’abaissera jamais aussi bas.
Pas comme pour ce lâche de Youssouf, l’ex-mari de Kadia. Un véritable Donjuan, coureur de jupon. Le pire, il ne s’en cachait pas. On a longtemps supplié, Kadia, de rester, de soutenir son couple et de tenir bon. On lui rabâché qu’il est vilain pour une femme de finir divorcée, car elle perd de sa côte et de sa valeur. On l’a convaincu qu’elle ne serait rien sans lui, et qu’une femme, peu importe ce qui se passe, reste fidèle à son couple et pour ses enfants, doit être capable de tout supporter.
Elle a tenu pourtant. Pour Ibou, son petit garçon, elle a supporté tous les affronts. Quand elle rentrait chez et qu’elle croisait la maitresse de son mari sortir de son salon. Elles n’avaient pas la décence de la saluer, ni de lui montrer un quelconque respect. Et pourquoi le feraient-elles ? Youssouf, lui-même, ne lui témoignait aucun respect.
Elle avait tenu parce que sa famille ne lui avait pas laissé de choix et à l’époque, elle n’occupait pas ce poste de Directrice Financière d’AKAZONE. Elle n’était qu’un simple agent. Comment partir avec un enfant, quand on sait qu’on ne peut l’élever convenablement et veiller à ce qu’il ne manque de rien. Ou quand son mari est tout simplement avocat. Toutes ces raisons ont fait qu’elle s’est tu sur son mal.
Mais un jour, elle a éclaté comme un ballon qu’on aurait trop rempli d’air. Personne ne l’a vu venir. Personne, sauf moi. Je l’ai toujours encouragé à prendre sa vie en main et à ne pas se laisser faire. « Ma famille ne voudra jamais de moi, toi, c’est différent Assa. Tout le monde a l’esprit tellement ouvert chez vous. Et puis comment les gens me traiteront ». Je lui ai fait comprendre que peu importe ce que les autres pensent de nous, le plus important, c’est ce qu’on veut de bien pour soi-même. Le reste, n’est que garniture.
On est allé au tribunal. Avec la meilleure avocate de la ville et nous avons démoli leur défense et obtenu la garde d’Ibou et le versement d’une pension. Aujourd’hui, elle est libre et vit sa vie comme elle l’entend. Même si souvent certaines choses peuvent encore la blesser…