Prendre une décision

Ecrit par Fleur de l'ogouée

Sandra Mbourou

 

En ce moment avec tout ce que Mélanie vit je n’ai même pas le temps de m’apitoyer sur mon sort, toute cette histoire avec la femme du ministre et ses sœurs, maintenant que tout est redevenu calme Lydia pourra se concentrer sur cette histoire. Elle tient mordicus à ce procès, mais moi j’opte pour une négociation à l’amiable, je veux passer à autre chose. Aujourd’hui je vais à la fac pour justifier mes absences et voir dans quelle mesure je pourrais repasser les examens que j’ai rater. Les gens chuchotent quand je passe, on me pointe du doigt, je sais bien que tout le monde est au courant de mes petits problèmes, mais sincèrement je n’en ai rien à foutre. J’ai jouée et j’ai perdu, c’est comme ça le jeu. La directrice administrative et le responsable académique ont étés très compréhensibles, ils vont me programmer une session de compos dans deux semaines, je vais pouvoir sauver mon semestre. En sortant je tombe sur les filles de ma classe, elles jacassent comme des idiotes, je cherche Hervé dans l’école. Je l’aperçois enfin assis à la comptine avec une fille d’une autre filière, je ne sais pas pourquoi ça me fait un petit quelque chose, je m’approche et je lui dis bonjour, il semble étonné de me voir. Il s’excuse auprès de sa partenaire si souriante et m’entraine dehors

-Tu vas bien ? ça fait plaisir de te revoir sans tout ses bandages et ces perfusions

-Je vais bien, si tu répondais à mes messages tu le saurais

-Ecoute Sandra ce n’est pas facile d’être ami avec toi, j’étais en colère.

-On ne va pas parler ici, tu as du temps libre avant le prochain cours ?

-Tu arrives et tu chamboule tout comme d’hab.

Il rentre prendre ses affaires et nous allons dans un petit restaurant pas loin. On commande des trucs à grignoter, moi une crêpe au chocolat et pour lui une salade de fruit. Il m’avoue ce que les filles m’ont dit plusieurs mois auparavant, il m’aime, il est amoureux de moi et il a toujours détesté le fait que je passe d’homme en homme. Je suis émue mais je ne pense pas que l’amour est fait pour moi, c’est un homme bon et gentille je finirais par lui briser le cœur.

     

Mélanie Mbourou

 

Cet après-midi je sors avec tous les enfants on ira au cinéma puis manger un bout. Je ne sais pas ce que je vais dire aux gens quand ils vont me demander qui est la petite, ce sera vraiment gênant, j’ai déjà du mal avec cette situation je ne voudrais pas que les gens en rajoutent. J’ai mis une petite robe fleurie avec une paire de sandales compensées, un petit style bohème, j’essaie de sortir la tête de l’eau, toutes mes péripéties m’ont fait perdre confiance en moi, mais je vais reprendre du poil de la bête. En route ils sont tous joyeux, Maëlle monopolise la parole comme à son habitude, Mélissa et Yvan l’écoute attentivement, elle raconte une histoire à dormir debout, je n’arrête pas de rire, c’est un vrai cas cette petite. La file pour les tickets n’est pas longue, pendant ce temps ils achètent des trucs à grignoter, moi c’est seulement mes pop-corn sucrés que je veux. On va regarder la nouvelle version du roi lion, même moi je suis impatiente. La séance s’est bien déroulée bien, c’était extraordinaire. Miss Maëlle chante déjà toutes les chansons dans un anglais très approximative, Mélissa et Yvan qui sont d’habitude si calme en font de même, je me balade avec une troupe de choristes en herbes. Nous allons chez le glacier où nous allons tout le temps, pendant tout le trajet j’ai droit à une reprise musicale du film, je n’arrête pas de rire, il est temps que mes bébés prennent des cours d’anglais renforcée parce que là c’est une catastrophe, ils chantent dans une langue inconnue, nous sommes détendus, l’ambiance est bonne, ils sont mignons tous les trois. Pendant que les enfants choisissent leurs parfums de glaces je croise une ancienne camarade de la Fac

-Mélanie ? Mélanie Mbourou. Que ça fait plaisir de te voir

-Hey Odette comment va tu ? Il y a longtemps hein

-Je vais bien ma belle, tu sais que je vis maintenant en France avec mon blanc là je suis juste là pour renouveler le passeport et toi ? Tu deviens quoi ?

-J’ai mes agences de voyages et mes enfants

-J’avais appris pour ton mari je suis vraiment navré, vous étiez le couple dont tout le monde rêvait. Les trois ce sont tes enfants ?

- Oui mes filles et mon garçon

-Ils te ressemblent bien, bon ma belle ça m’a fait plaisir de te revoir. Gros bisous

 

En vrai ce n’était pas si compliqué que je le pensais, les gens n’ont pas à savoir quels sont les liens que j’ai avec la petite, c’est la fille de mon mari donc par extension c’est la mienne, pour le temps qu’elle fera avec nous je n’aurais pas de justification à fournir à qui que ce soit, les secrets de familles sont faits pour être conservés en famille. Après une bonne glace, nous allons chez maman, elle est toujours ravie de voir les petits et comme Sandra y est, je vais profiter à faire le kongossa. Mamie gâteau s’occupe de ses petits enfants pendant que Sandra et moi profitons à nous éclipser, on appelle Lydia pour pas avoir de problème avec elle. On se retrouve dans le petit bar resto où on avait croisé Bradley une fois, je balaie la salle du regard mais il n’y est pas, on a si souvent l’habitude de se croiser que je suis un peu déçue de pas le voir, c’est drôle. On commande lance une première tournée de liqueur, Martini pour Sandra et moi, du Baileys pour Lydia, on ne va pas se saouler aujourd’hui juste un verre ou deux, l’abus d’alcool ne résout rien. Sandra nous raconte quelque chose que Lydia et moi savions déjà, Hervé son ami est amoureux d’elle, le pauvre il ne sait pas qu’aimer une fille Mbourou c’est compliqué, elle nous dit ne pas vouloir de relation, on comprend et on ne la force pas à revoir sa décision. Non pas qu’on ne pense pas Hervé n’est pas un bon gars, juste qu’avec le recul mettre sa bouche dans les amourettes des autres ce n’est pas évident.

Pendant qu’en enchaîne avec le deuxième tournée, la dame avec qui Bradley était ici la dernière fois fait son entrée, je la reconnais de suite elle a un si beau teint noir ébène, elle est avec un monsieur quarantaine révolue mais bien entretenue. Apparemment monsieur Bradley a été déclassé, bien fait pour lui.

   

Samira Moussirou épouse Lebouma

 

En rentrant je l’aperçois avec ses sœurs, nous n’avons jamais officiellement été présentés donc je m’abstiens d’aller vers elle, d’ailleurs mon mari dit que je salue trop de personnes, il me surnomme la mairesse de Libreville. D’habitude on ne fréquente pas ce genre d’endroit ensemble mais je voulais qu’il goute le fameux poisson braisé de la maman là, il est plus grand restaurant avec chef étoilé, moi la petite fille du ghetto, je suis passe partout, c’est d’ailleurs notre plus gros point commun à Bradley et à moi, nous sommes des personnes qui ont beaucoup dû se battre dans la vie. C’est un ami en or devenu un frère. Je l’envois un message pour l’embêter

‘’ Je suis en face de ta nana Mélanie’’

Brad : Ne me fatigue pas avec les gos du passé

-Excuse moi oh, monsieur du présent, en tout cas elle est très belle tu rates

-Je suis avec Hyrimia, la femme de ma vie

 

Je n’ai même pas répondu, ce n’est pas que je n’aime pas sa nouvelle petite amie, mais elle est jeune, a eu 26ans cette année, pendant que lui a 37ans, d’accord l’amour n’a pas d’âge, mais ils vivent tout les deux dans deux sphères différentes, elle veut des promotions et travailler à travers le monde et lui veut se caser et fonder une famille. Je suis contente pour lui néanmoins, on pourra tout dire mais il avait de vrais sentiments pour sa Mélanie, il parlait sans cesse d’elle, voulait faire les choses bien, puis il y a eu cette sorcière de Tatiana Ndong une enfant comme ça qui passe son temps à fréquenter les marabouts, je sais qu’elle a encore de l’emprise sur lui, Dieu merci pour l’instant elle ne s’approche pas de lui. Je vais continuer à prier pour que ses satanés charmes n’agissent plus.

           

Mélanie Mbourou

 

On continue notre petite soirée, vers 21h je vais déposer Sandra chez maman, les petits on déjà pris leur douche et dîner. Les bouchons nous prennent une bonne demie heure à braver, arriver avec la fatigue je vais directement les mettre au lit rejoint chacun son petit coin de sommeil. Après une petite douche, je me pose dans la chambre pour lire, je m’ennuie un peu. C’est étrange mais la période avec Jérôme me manque, je vivais à 100 à l’heure, j’agissais d’abord et je réfléchissais après, la vie était tellement trépidante. Mais hélas il n’était pas le bon, un loup qui s’est déguisé en agneau pour me dévorer au sens littéral du terme, nous aurions pu être heureux si nous nous étions rencontrés dans un autre contexte ça aurait été merveilleux, bref je chasse toutes ses pensées et je me mets au lit, laissons le passé où il est.

Dernier jour avec les trois enfants à la maison, je les laisse jouer ensemble et profiter les uns des autres. La maman de Thomas va passer la nuit ici et demain au petit matin j’irai les accompagner au port, finalement elles iront en bateau jusqu’à une ville, puis de là-bas prendront la voiture pour aller au village. Je la regarde et elle a les mêmes expressions du visage que Thomas, comme on dit le sang ne ment pas. Tout à l’heure nous irons faire les courses, on va prendre des choses qu’elles pourront emporter au village. Après un petit déjeuner copieux, les enfants s’apprêtent et nous nous mettons en route pour Mbolo, en passant on s’arrête à un déstockage où ils vendent pas mal de vêtements pour enfants, je vais lui faire une petite garde de robe, elle est si maigrichonne et pâle, j’aurais dû l’emmener voir le pédiatre des jumeaux, mais ce n’est pas bien grave. On a trouvé pas mal de petits articles sympas pour Mélissa. Puis on va faire les courses on profite à acheter des affaires pour la maison aussi. Ils sont tellement surexcités ces enfants, à courir partout et à remplir le cadi à rebord, ils pensent que je ramasse l’argent. En rentrant, on fait la cuisine tous ensemble, on rigole et ensuite on mange dans la bonne humeur. Pendant qu’ils jouent ensemble, moi je commence à faire la valise de la petite, tout est bien rangés et repassés, les courses je les mets dans une petite glacière.

Il est 20h bientôt la maman de Thomas sera là, demain le départ c’est 4h. Maëlle est triste, elle s’attache trop vite cette petite, mais la vie d’adulte est plus compliquée que ça, gardé l’enfant d’autrui ce n’est pas facile, je refuse de me retrouver dans une équation impossible. Elle ira avec sa grand-mère c’est mieux.

La veuve