Quand les ancêtres tranchent...

Ecrit par Saria

***Trois mois et demi plus tard***

***Cotonou***

***Tobi***

C’est la sonnerie de mon téléphone qui me réveille. Je me redresse tout doucement pour ne pas réveiller Maï qui dormait dans mes bras. Oui vous avez bien compris, elle a réintégré le lit conjugal pour ma plus grande joie d’ailleurs. Elle est à presque cinq mois de grossesse et elle vraiment belle avec son ventre. Le seul souci est qu’elle se fatigue vite en ce moment.

Moi (chuchotant) : Allô ?

Ade : Allô Broda ?...Duro a accouché d’un garçon ce matin !

Moi : Ah OK…Euh … ils vont bien ?

Ade : Oui…ça a été pénible…tu la connais mais tout est sous contrôle…Son père nous a tous tenu en éveil toute la nuit je te dis…Bref…C’est bon…

Moi : Je suppose qu’on peut faire le test de paternité non ?!

Ade : oui nous avons lancé la requête, les médecins sont informés…Il faudra 5 à 10 jours pour les résultats… je te tiens informé.

Moi : Merci frérot.

Je ne sais pas comment prendre la nouvelle que mon frère vient de m’apporter. Une chose est sûre je voudrais que cet enfant ne soit pas le mien. Sinon ça va être dur avec Maïté même si elle a déjà rapporté la preuve de son self-control.

 

***Une semaine plus tard***

J’étais nerveux, ça fait une semaine que nous attendons les résultats du test de paternité. Je n’en dors plus ! En plus ce sont ces résultats que nous attendons pour procéder aux rites de sortie du bébé s’il est le mien bien-sûr. Des rites pour consacrer le statut princier du nouveau-né.


C’est Ibu qui me rapporte la nouvelle : le fils de Durossimi est le mien !

Moi : Je suppose que Père a lancé les démarches pour le rituel ?

Ibu : Hum…Non pas encore…Le père de Durossimi exige des excuses avant toute chose…Donc on vous attend au palais.


Je passe mes mains sur mon visage. Le ciel me tombait sur la tête ! Je me lève et prend mes clés de voiture. J’ai besoin d’air, dans quel guêpier je me suis fourré ? Oui j’avoue je panique ! Cette fille est une épine dans mon pied. Je sais qu’elle me fera payer chaque mot, chaque commentaire sur sa grossesse. Le pire dans cette histoire, c’est que Maïté mon épouse légitime attend une fille, non seulement l’enfant de Duro est plus âgé que le sien mais elle a donné la vie à un garçon. Ce qui pourrait lui donner des droits.

 

***Quelques semaines plus tard***

***Iseyin-Oyo State***

***Palais Royal***

***Ade***

On était tous réunis dans l’une des cours intérieures du palais. Toute la famille était là sauf Tola et Maïté. Le premier pour des raisons professionnelles, la dernière par pure diplomatie. Il y avait également Duro, son père et je crois une tante à elle.

 L’oracle (Ifa) avait choisi ce jour pour que le nouveau-né soit purifié. Il est formellement interdit de parler à quiconque ce matin-là avant le début de la cérémonie car toute parole doit être insufflée par les ancêtres ou les dieux ayant envoyé l’enfant dans le monde des vivants.

La veille on remplit une calebasse d’eau de source qu’on expose pour son « renouvellement » à la rosée matinale sur la cour de la maison du Babalao non loin de la case des ancêtres. Puis Ifa est consulté pour connaître le sort et l’ancêtre réincarné de l’enfant, l’utilisation de l’hysope est prévu pour enlever toute souillure qu’il aurait rapporté de l’autre côté. A la fin le « gbandja »* ayant servi à la cérémonie est distribué aux participants pour les mettre en communion avec le nouveau-né.

Ifa désigne le membre de la famille censé porter l’enfant nu  et faire des tours de la case des ancêtres à la cour trois fois puisqu’il s’agit d’un garçon et quatre si ça avait été une fille. L’eau de la calebasse est jetée sur le toit au moment du dernier passage, de sorte à ce qu’elle tombe sur le nouveau-né qui pousse un cri comme au moment de sa naissance. Il est ainsi réveillé à la lumière du jour, aux lois et aux forces de la nature, complètement purifié des souillures de ses parents et de ses ancêtre... il naît de nouveau. Cette eau dissipe également la puissance d'un potentiel ennemi ou le mauvais œil. Chaque membre de la famille énonce des bénédictions sur lui et sur sa vie. C’est après ça que le nom choisit est annoncé, soufflé d'abord dans les oreilles du bébé avant d'être dit au public.

Le bébé a été mis dans les bras de son grand-père paternel, c’est lui que l’oracle a choisi. Le Babalao officie et énonce le panégyrique de notre lignée. Lors du 3ème et dernier passage l’eau fût jetée, mais dès qu’elle retombe sur le nouveau-né il pousse un hurlement sinistre avant de se taire dans une plainte.

 

Makarimi (choqué): Il ne bouge plus ! Il ne bouge plus ! Hééééééééé !


Tout le monde se précipite un cercle se forme autour de lui, le corps du nouveau-né était sans vie. Durossimi pousse un cri d’animal blessé et tombe sur ses genoux. Le Babalao s’approche touche le petit corps et secoue tristement la tête en annonçant :


Babalao : les ancêtres ne l’ont pas reconnu…Cet enfant n’est pas de la lignée royale

L’assemblée : huuuum !

Babalao : Les ancêtres ont tranché ! Majesté…l’enfant n’est pas celui du prince ! Il n’est pas des vôtres et la sanction est claire.

Durossimi (se jetant sur son père) : Assassin, tu as tué mon fils ! Assassin…Tu m’as dit que c’était juste une routine ! Oh mon bébé !


Elle faisait peine à voir ! Elle hurlait en se roulant parterre ! Seun et la Reine l’entraîne vers le palais. Tobi avait posé ses deux mains sur sa tête. Le choc se lisait sur tous les visages. Les prêtresses entonne un champ mortuaire et emmène le petit corps sans vie vers la demeure du Babalao.

Le Roi demande que Makarimi soit mis aux arrêts en attendant de passer devant le Conseil !

*gbandja : kola en yoruba

PS : Donnez-moi des ailes pour m’envoler avec vous ! Likez et surtout commentez !

Pute...et Maman