Remise en question
Ecrit par lpbk
Le trajet jusqu’à l’appartement d’André se
fait en silence. Un silence lourd de tout.
De souvenirs.
D’attente.
D’envie.
De désir.
Heureusement que mon chauffeur du jour
avait mis la climatisation car je pense que je me serais totalement liquéfiée à
ses côtés, sur le siège en cuir de sa Porshe Cayenne.
Lorsque nous arrivons devant son immeuble,
André se gare en double-file et un voiturier accourt pour prendre sa place.
Sans un mot, nous nous dirigeons vers
‘ascenseur que j’ai déjà pris à plusieurs reprises. Aujourd’hui, pas de groom
pour m’accompagner. Nous sommes seuls. Je nous revois il y a quelques semaines
déjà nous embrassant si passionnément en ce même lieu.
Visiblement, je ne suis pas la seule à y
songer car André me fixe et ses yeux reflètent autant de désir que les miens.
Je prends une profonde inspiration,
essayant de calmer le rythme de mon cœur et m’aperçoit, par la même, que mes
seins se gonflent, ne faisant qu’attirer et attiser un peu plus son regard. Je
relâche rapidement tout l’air contenu dans mes poumons et je sens que je
m’empourpre violement. Il va me prendre pour une aguicheuse.
— Après toi.
Je le précède à l’intérieur de son
appartement et lorsque les portes de la cabine se referment, je sais au plus
profond de moi, que nous sommes seuls. Enfin seuls !
— Mélanie, murmure-t-il d’une voix rauque.
Je me retourne pour lui faire face. Et je
vois, je sens qu’il est temps.
Temps de renouer.
Temps de lâcher prise.
Temps de se laisser guider.
J’avance de quelques pas dans sa direction
et me hisse sur la pointe des pieds jusqu’à être à hauteur de ses yeux.
Je sens son souffle, erratique. Qui
n’attend qu’un geste de moi. Et je n’en peux plus.je cède et l’embrasse. Je
prends l’initiative pour cette fois et glisse mes mains sur sa tête. Je
m’agrippe à lui comme s’il s’agissait d’une bouée de secours que j’avais peur
de lâcher.
Ses bras ne tardent pas à s’enrouler
autour de moi. Rapidement, ses mains empoignent mes fesses et je sens l’ampleur
de son désir contre moi, qui palpite d’anticipation.
Oui, André. Oui, j’ai envie de toi. Oui,
fais-moi l’amour.
Et même si je ne le dis pas à haute voix,
André semble le deviner. Il me soulève comme si j’étais aussi légère qu’une
plume et je noue mes jambes autour de sa taille. Nos lèvres ne se quittent pas,
elles semblent souder l’une à l’autre comme les sont nos corps.
Je retrouve enfin toutes ses sensations,
perdues depuis si longtemps et je gémis. De bonheur. De frustration car nous
n’allons pas assez vite à mon goût.
Mon amant se meut et, en jetant un œil
autour de moi, je m’aperçois qu’il m’emmène dans une partie de son appartement
que je ne connais pas encore. Nous longeons un couloir d’une blancheur
impeccable où s’alignent plusieurs portes. André s’arrête devant l’une d’entre
elles et d’un léger coup de pied, ouvre le battant, dévoilant une chambre à
coucher, typiquement masculine.
Je n’ai pas le temps de m’attarder sur la
décoration que déjà, je me retrouve allongée sur le lit, qui sent la délicieuse
odeur musquée de l’homme que j’aime. Que j’aime ? Vraiment ?
Non, que je désire. Je n’aime pas André.
Je ne peux pas l’aimer. C’est trop tôt. Beaucoup trop tôt pour ce genre de
sentiments.
Oui, je désire André, rien de plus.
Heureusement, il me tire de mes pensées,
en s’accroupissant devant moi pour dénouer mes baskets, qui tombent sur le sol
dans un bruit mat, et retirer mon pantalon.
Ses cheveux chatouillent mes cuisses
lorsqu’il remonte le long de mes jambes tout en y laissant une trainée brûlante
de mordillements et de baisers. Je gémis à nouveau. Toujours aussi impatiente.
J’ai l’impression que mon chemisier a
perdu plusieurs tailles et qu’il forme un étau comprimant ma poitrine qui ne
demande qu’à jaillir sous les yeux de mon amant. J’arrache plus que je ne
défais les boutons qui le referment et soupire de soulagement lorsqu’il s’ouvre
entièrement, dévoilant mes seins comprimés dans mon soutien-gorge noir, tout
simple.
Même si j’avais vaguement songé à ce
scénario, je n’ai pas voulu y donner corps et ai opté pour la simplicité dans
toute ma tenue. Mon haut s’accorde donc avec mon bas, une petite culotte, noire
elle aussi.
Mon amant ne semble pas s’en formaliser et
à travers l’étoffe, me mordille les tétons qui pointent vers lui, fièrement.
Implorant toute son attention.
Ses attentions qui me font justement
cambrer les hanches, allant à sa rencontre.
Je me sens totalement nue sous le regard
d’André alors que lui n’a perdu que ses chaussures dans l’opération. Mes mains
s’activent sur sa chemise mais tremblent tellement que je m’énerve. Impossible
de retirer ses fichus boutons, qui ne veulent pas céder. Finalement, face à mon
dilemme, son propriétaire décide purement et simplement de la passer au-dessus
de sa tête et la lance à travers la chambre, hors de portée.
Son jean suit bientôt le même chemin. Nous
sommes peau contre peau. Seuls nos sous-vêtements forment encore une barrière.
André semble s’en rendre compte en même
temps que moi. Pendant quelques instants, je le vois lutter autant que moi pour
reprendre le contrôle de la situation. Nos respirations sont saccadées, donnant
l’impression que nous venons de courir un marathon. Mon amant penche la tête
sur le côté, examinant la scène sous ses yeux : devons-nous
continuer ? semble-t-il demander.
Je mets fin à ce combat intérieur, en
posant une main sur son torse et en relevant légèrement les hanches, collant
mon bassin à son sexe que je sens toujours aussi dur sous son boxer.
Avec un grognement animal, mon amant fond
sur moi et nous reprenons où nous nous sommes arrêtés. Comme si notre dernière
fois remontait à hier. Et non à plus de douze ans de cela.
Nos corps se reconnaissent. Et bientôt,
ils ne forment plus qu’un.
S’emboitant, comme autrefois, à la
perfection. Et lorsque nous jouissons, c’est en harmonie.
Une seule chose à changer : c’est
meilleur, aujourd’hui !
Il semble que nous nous soyons
mutuellement assoupis, rassasiés par cette partie de jambes en l’air. Lorsque
je me réveille d’un sommeil réparateur, André est allongé à mes côtés, un bras
en travers de ma poitrine.
Et c’est à ce moment-là que la réalité me
revient en pleine face.
Vous connaissez ce moment, n’est-ce
pas ? Celui où vous vous dites que vous venez de faire une connerie
monumentale. Malgré tout, vous ne parvenez pas vraiment à le regretter.
Je sais que je n’aurais pas dû coucher
avec André. Il va penser que nous allons reprendre les choses où elles se sont
arrêtées. Mais je ne peux pas !
Ma vie a changé. Nos vie ont changé.
Nous nous connaissons à peine. Je ne suis
plus la Mélanie de dix-huit ans et il n’est plus le André que j’ai connu. Nous
ne pouvons rattraper ce temps perdu. Il ne reviendra pas, même si nous faisons
tous les efforts pour. Et nous ne pouvons redevenir ceux que nous étions, car
nous avons vécu.
Le seul aspect de notre précédente
relation qui demeure inchangé est ce désir, cette passion intense qui nous
consume et que nous n’arrivons pas à brider et à laquelle nous ne parvenons ou
ne voulons pas résister.
Du regard, je cherche mes vêtements
éparpillés partout dans la pièce. J’aperçois mon jean sur la table de chevet,
mon chemisier sur une commode et mes espadrilles au pied du lit. Impossible de
retrouver mes dessous.
Tant pis ! Je ne veux pas
m’attarder !
Je réussis à me dégager de son bras et
glisse doucement en travers du lit jusqu’à atteindre le bord. Je me lève aussi
légèrement que possible et attrape mes fringues.
Je me faufile dans le couloir.
Heureusement la porte ne grince pas en même temps, me direz-vous, un gars
blindé comme André ne doit jamais avoir de porte qui grince. Et vous auriez
bien raison de me le dire. Mais sur le moment, je n’y pense pas et ai vraiment
peur de le réveiller si le battant venait à se montrer grincheux.
Je m’esquisse dans le salon et m’habille
rapidement. J’attrape mon sac à main et mon blazer qui trainent dans l’entrée
et file aussi vite que si j’avais le diable aux fesses.
En sortant de l’immeuble, le voiturier me
hèle un taxi. Soulagée par cette attention, je lui file le pourboire le plus
généreux qui soit et grimpe en voiture. La portière à peine refermée, je donne
mon adresse au chauffeur qui se hâte de rejoindre la circulation de cette fin
de journée.
Je m’effondre contre la banquette. Et
respire véritablement pour la première fois depuis que je me suis réveillée aux
côtés de mon amant, plutôt de mon ex-amant.
Merde Mélanie ! Qu’as-tu encore
fait ?
Car je ne peux et ne veux pas me voiler la
face. André voulait me parler clairement. Ses intentions semblaient pures et
devaient l’être, car il a hésité avant que je ne lui signifie mon consentement
pour continuer. Il n’a rien fait sans mon autorisation enthousiaste. Et c’est
même moi qui l’ai poussé à aller plus loin.
Je n’ai pas su résister à cette tension et
maintenant, je m’en mords les
doigts !
Mélanie, 17h24
Hello les filles. Quoi de prévu ce soir ? Une pizza et des mojitos
à la maison, ça vous tente ?
J’ai besoin de parler à Astride et
Coralie. De leur demander leur avis. Et aussi de les voir, tout simplement car
j’ai l’impression de ne pas leur
accorder assez de temps, ces dernières semaines.
Je ferme les yeux quelques secondes, le temps de reprendre mes esprits
et sens mon téléphone vibrer. Deux fois. Ou plutôt trois.
Coralie, 17h26 :
Coucou ma belle. Diner ce soir… Désolé mais la soirée sera sans moi. On
s’appelle bientôt ? Smack !
Astride, 17h27 :
Salut Mélanie. Ça va depuis ? Pas possible pour moi ce soir. Déjà
des projets. On se voit ce week-end ? Bisous.
Astride, 17h27 :
Je suis bête ! Je sais que c’est le week-end du mariage d’Olivia.
Désolée. Pas mal de soucis en tête ces derniers temps. On en reparle
prochainement. Ciao !
Elles sont sérieuses ? Je suis au
fond du gouffre et elles ont des projets. Elles pourraient faire l’effort de se
libérer pour une fois ! Non ?! Elles doivent me soutenir. C’est tout
de même à cause d’elles que je suis dans ce bourbier. Bon, peut-être pas
totalement mais en partie…
Je jette mon smartphone dans mon sac,
soupire longuement et m’adosse à nouveau au siège du taxi, en fermant les yeux.
Il va falloir que je me débrouille toute
seule.
Première étape : éviter André au
maximum, au moins jusqu’à samedi.
Lorsque le mariage sera terminé, nous
pourrons parler. D’ici là, je dois me focaliser sur mon travail et occulter
toute vision de son corps d’Apollon dénudé, que j’ai adoré chevaucher… Je m’égare
déjà !
Deuxième étape : euh… il n’y en a
pas. Il faut donc juste que j’élimine la menace « André » pendant
quatre petites journées et tout ira bien.
Enfin, j’avoue que c’est plus facile à
dire qu’à faire.