Rendez-vous avec André

Ecrit par lpbk

A mon réveil, mon smartphone m’indique que la journée est déjà largement entamée. Et que quelques personnes ne peuvent pas se passer de moi.

Des messages des filles pour prendre de mes nouvelles mais aussi d’André. Ça m’étonne un peu mais ça me fait aussi plaisir car il se soucie de me savoir en santé. Bon après, peut-être qu’il s’y intéresse uniquement par rapport au mariage. D’autant que je suis son employée. D’autres d’Ethan qui me demande comment s’est terminée la soirée et qui veut savoir si je vais bien.

Deux de ma mère qui désire savoir ce que je deviens. Il faut que je fasse faire un saut chez elle pour en apprendre un peu plus sur André et les Felton, toutefois cela devra attendre.

Sidonie me renouvelle ses vœux de prompts rétablissements. Ce couple est adorable. Je suis heureuse de les avoir rencontrés et j’espère organiser la cérémonie de leurs rêves. Je veux les combler comme ils le méritent.

Les suivants sont uniquement pour le travail : des réponses à des propositions de travail, des demandes de l’imprimeur… Je m’y attarderais plus tard.

Je vérifie aussi mes mails et parmi la montagne de messages professionnels, l’un d’entre eux attire particulièrement mon attention.

Je ne m’y attendais absolument pas. Je ne sais qu’en penser.

Dois-je le supprimer sans le lire ? Ou prendre la peine de l’ouvrir pour voir ce qu’il a à me dire ?

Finalement, ma curiosité l’emporte et je clique sur le message de Numéro Cinq.

Franck : Bonjour Mélanie,

C’est Franck, mais tu t’en doutes… Bien vu, puisque ton prénom est noté.

Je suppose qu’après la soirée d’hier, tu ne veux plus rien avoir à faire avec moi. Effectivement… Je tenais tout de même à te présenter mes plus plates excuses pour la façon dont s’est achevée cette soirée.

J’étais sous l’emprise de l’alcool et je sais que cela n’excuse pas tout. Il se trouve que j’étais extrêmement nerveux. Je venais de recevoir une mauvaise nouvelle en arrivant au restaurant et j’avais l’impression d’être en compétition avec Ethan et Alex alors que ce sont deux mecs supers. Je me suis donc comportée comme le dernier des crétins alors que vous êtes tous géniaux.

Je ne suis pas du tout ce genre d’hommes. Ceux qui pensent pouvoir tout se permettre avec une femme. Je sais que tu étais aussi ivre que moi, et je n’aurais pas dû essayer de profiter de la situation.

Tu es une femme géniale. J’ai beaucoup apprécié de passer du temps ensemble et j’aimerais me faire réellement pardonner. Si tu me penses sincère et je peux t’affirmer que je le suis, n’hésite pas à me recontacter. Je veux te montrer qui je suis vraiment, pas un imbécile imbu de lui-même et prenant ce qui ne lui est pas dû.

J’espère avoir de tes nouvelles prochainement. Si ce n’est pas le cas, je comprendrais et il ne me restera qu’à te souhaiter le meilleur dans ta quête de l’amour car tu mérites un homme qui te comblera.

Amicalement. Franck.

Je suis surprise par ce message. Il n’a pas tort : nous étions aussi gris l’un que l’autre, et j’avoue que j’ai ma part de responsabilités dans ce « quiproquo ». Je lui ai tout de même envoyé des signaux pour ensuite me défiler.

Son message semble bienveillant. Et j’ai du mal à ne pas croire en son honnêteté.

Je préfère tout de même me laisser le temps de la réflexion. Je ne veux pas prendre de décision hâtive et la regretter par la suite.

Je réponds aux textos des filles, à ceux d’Ethan et de Sidonie, mais zappe intentionnellement ceux d’André. Je lui répondrais plus tard, et puis de toute façon, nous nous voyons ce soir.

Je regarde l’heure et m’aperçois qu’il est déjà midi passé. Je ne me sens pas tout à fait remise de mes excès de la veille, toutefois je me sens bien mieux qu’avant mon petit somme.

André avait peut-être de bonnes intentions avec son hamburger, et je lui ai été reconnaissante sur le coup puisque j’ai été rassasiée. Seulement maintenant, j’ai encore plus faim. J’appelle donc un petit restaurant situé à quelques minutes de chez moi. Il propose une carte spécialement pour les livraisons ; le choix est tellement varié que j’hésite. Tout a l’air délicieux.

J’opte finalement pour une salade césar au sel noir. Elle parait copieuse et après le burger, je dois faire attention.

Après avoir raccroché, je file prendre une seconde douche, qui me fait un bien fou. L’eau, qui coule sur ma peau semble emporter avec elle une partie de mes maux.

J’ai à peine le temps de me sécher et de me rhabiller que le livreur est déjà là. Timing presque parfait ! J’avale la salade en quelques bouchées, la faisant passer en buvant régulièrement de l’eau. Je consulte, par la même occasion, mes mails professionnels.

Madame Mballa, la couturière chez qui j’ai déposé la robe de Sidonie, me confirme que celle-ci est terminée et que nous pouvons venir, avec ma cliente, pour les derniers essayages voire directement la récupérer. Le travail de L’idée à coudre est toujours de qualité ; de plus il est effectué en un temps record. Je lui tire mon chapeau à cette femme.

Un second mail me fait atteindre le nirvana. Jacques, le traiteur français, me confirme la commande des Felton. En prime, il me propose une petite réduction si nous convenons d’un arrangement futur pour au moins trois autres cérémonies. Je ne peux qu’accepter. Ses plats étaient aussi excellents les uns que les autres, ses prestations comblent mes attentes, et ses prix sont abordables. Bien sûr je ne pourrais proposer ses services qu’à une partie de ma clientèle ; malgré tout, je veux travailler avec lui.

Je confirme à Anaïs et Olivia ma présence demain après-midi pour revoir les différents bouquets, les décorations de tables, du lieu de cérémonie ainsi que leur maison.

Certains mails, peu intéressant professionnellement parlant, passent à la trappe. D’autres attirent mon attention. En effet, lorsque j’ai débuté il y a quelques années, j’avais mis des annonces dans divers magazines et boutique spécialisés dans les mariages et autres cérémonies, posté des publicités sur les réseaux sociaux, bref j’avais commencé à me créer un petit nom dans ce vaste monde. Ainsi, de jeunes entrepreneurs me vantent leurs services, leurs prix, selon eux « imbattables ».

J’imprime les mails, profils et toute la documentation que je trouve sur ceux qui me paraissent crédibles et sérieux.

Je suis tellement prise dans mon élan que je ne vois pas l’heure défiler et que je parviens même à oublier le mal de tête qui me taraudait. Heureusement que mon smartphone est là pour me rappeler à l’ordre de temps en temps. Celui-ci émet le son caractéristique de la réception d’un message.

André, 17h24 :

J’espère que tu t’es reposée et que tu vas mieux depuis ce matin. Si c’est le cas, toujours d’accord pour ce soir ?

Mince. Je l’avais un peu zappé. Enfin pas tout à fait si je peux être honnête. Malgré tout, plongée comme je l’étais dans les derniers préparatifs des Diwouta et les diverses propositions, je n’ai pas pensé à la soirée à venir.

Mélanie, 17h29 :

Beaucoup mieux, merci. Quelle heure ce soir ? Où ?

La réponse ne tarde pas à arriver. A croire qu’il attendait mon message…

André, 17h31 :

Génial. Retrouve-moi chez moi à 19h. Ne t’inquiète pas pour ta tenue, sois toi-même.

Ne pas m’inquiéter pour ma tenue ? N’importe quoi ! Toutes les femmes se soucient de leur apparence, aussi bien vestimentaire que générale, surtout lorsqu’elles ont un rendez-vous avec un client… et ex-petit-ami.

Il ne me reste donc qu’une heure trente ou un peu moins pour me préparer et faire bonne impression.

Je constitue trois tenues, chics mais détendues.

Je marie un caraco bleu nuit, au col couvert de fine dentelles de même couleur avec un jean mom dans les mêmes tons mais un peu plus clair. J’allie l’ensemble à une paire de baskets couleur blanches.

La suivante est composé, là encore d’une blouse lâche mais blanche cette fois, le buste et les manches sont composées d’un panneau en dentelle transparente et le col s’ouvre par deux cordes nouées. Je lui associe un jean noir et une pièce d’escarpins à lacets.

Pour la dernière, mon choix se porte sur une combinaison tailleur noire. La fermeture à gros boutons du haut met en valeur le col en V. tout comme la corde de serrage qui affine ma taille. Une paire de sandales à talons hauts parfait cet ensemble.

Je me sens à l’aise dans ces trois tenues, qui flattent d’ailleurs ma silhouette. Cependant, la combinaison pourrait me faire paraitre trop sérieuse alors qu’il m’a précisé d’être « moi-même ». Je la mets donc de côté, et hésite entre les deux autres tenues.

J’adore la seconde tenue que j’ai sélectionnée, cependant les escarpins… Je ne sais pas. J’ai la sensation qu’ils font « too much », pas assez détendu.

Mon choix final se porte donc sur la première tenue que j’avais composée. Je me sens bien, assez chic mais pas trop, et surtout décontractée.

Je laisse mes cheveux libres sur mes épaules et me farde légèrement. J’attrape un blazer et l’enfile avant de sortir pour héler un taxi. Mon cœur bat à cent à l’heure. J’ai revu André, je sais à quoi m’attendre mais malgré tout, je suis extrêmement nerveuse. Nous serons seule à seul, toute une soirée durant. A moins qu’il ne m’emmène au restaurant. Mais j’avoue que cette seconde option me déplait. Je décide de ne pas m’attarder sur ce point. 

Lorsque le taxi me dépose devant son immeuble, je prends une longue bouffée d’air frais et souffle un grand coup. Tout se passera bien. Il n’y a pas de raison de s’en faire.

Le réceptionniste m’accueille avec les questions habituelles, il vérifie que suis bien attendue puis appelle un groom qui m’escorte jusqu’au penthouse.

Quand j’accède enfin à l’appartement d’André, personne n’est là pour m’accueillir. Je suis déconcertée car les deux fois où je suis venue, Marguerite était là pour me montrer le chemin vers son employeur. J’avance, hésitante, vers le salon et décide de l’appeler :

     André… C’est Mélanie. Euh…

Je me sens ridicule à déambuler comme une intruse alors qu’il m’a invitée.

     Mélanie ! Désolé, j’étais sous la douche, me fait sursauter une voix dans mon dos.

En me retournant, je découvre une vision qui me coupe le souffle.

Littéralement.

Mes souvenirs étaient donc fiables. André n’a vraiment pas changé.

30 ans... et célibat...