Ressentiments.

Ecrit par Farida IB


Mariam KEITA épouse DIOMANDE…


Je décharge les fagots de bois sur la tête de ma mère après que mon père ait déchargé les miens avant d’étirer mon cou dans les deux sens. Ce sont des activités que je peine à faire bien que ce soit avec plaisir parce qu’il faut le dire, ça m’a manqué de le faire (rire). Baba (mon père) rentre ensuite dans la petite case faisant office de magasin pour ranger ses outils de champs puis reviens s’asseoir sur son fauteuil en rotin sous le grand manguier à quelques pas de leur chambre. Je suis N’nan (ma mère) à la cuisine de fortune pour la préparation du dîner. Ça fait quelques semaines que je suis arrivée. Au début, c’était difficile, mais avec la facilité que j’ai à m’adapter à toutes les situations et avec le concours de la chaleur familiale, j’ai déjà trouvé mes marques. Ce n’est pas le luxe dont j’ai l’habitude, la maison est décatie et rustique, quoiqu’elle garde encore sa convivialité d’antan qui me rend indéniablement heureuse.


Comme vous l’aurez sûrement deviné, je suis revenue chez mes parents, c’est quelque chose que j’aurai dû faire depuis des années d’ailleurs. Il faut dire que je n’ai jamais eu le toupet de prendre ce risque et surtout que j’avais peur de me faire rabrouer par mon père parce qu’il n’y est pas allé de mains mortes par le passé. Il a fallu le faire pour me rendre compte qu’il s’est assagi avec l’âge au point de m’accueillir avec des larmes aux yeux en disant que le bon Dieu s’était finalement résolu à mettre fin à ses supplices en me ramenant à lui avant sa mort. Les retrouvailles ont été très émouvantes, c’était le festival du pardon et des pleurs ici (rire). J’étais néanmoins très heureuse de les retrouver encore en vie malgré qu’ils ne soient plus très en forme et on comprend que c’est l’effet du temps. C’est vraiment une grâce pour moi de savoir que mes parents n’ont pas quitté cette terre avec des ressentiments à mon égard.  


Mes frères aussi vont bien, ils ont tous devenus de véritables hommes maintenant. Il y a six parmi eux qui sont respectivement à Ouaga et à Bobo, les trois autres sont encore ici près des parents. Notre aîné vit avec sa femme et ses enfants à l’autre bout du village, disons qu’ils ont tous fondé leurs familles sauf le benjamin qui continue ses études à l’université de Ouaga paraît-il. Le seul d’ailleurs qui a autant évolué dans les études, les autres, ce sont tôt lancés dans les travaux champêtres ou le secteur informel. Je n'ai eu que l'occasion de revoir les trois qui sont encore ici, une rencontre familiale est par ailleurs prévue dans quelques jours à cet effet. Toutefois, j’ai eu l’occasion de parler à tout le monde via téléphone.  


Ces dernières semaines ont été très éprouvantes pour moi, j’ai pris le large deux semaines après mon hospitalisation sur le coup de la colère, j’étais déçue par la trahison de Salifou. Vous n’imaginez pas ce que ça fait d’aimer un homme, de le vénérer, de lui dédier sa vie pour qu’en retour, il vous fasse un tour aussi perfide (soupir). En dehors de ce fait, il y a aussi mon avortement et tout ce que ça a entraîné du coup, c’était plus que ce que je pouvais supporter. Il fallait que je parte pour mon propre équilibre émotionnel. Je suis consciente que ça jouera sur la psychologie de mes enfants, surtout en ce qui concerne Kismat qui a encore beaucoup besoin de moi, mais il fallait que je me retrouve seule pour bien réfléchir sur le devenir de mon couple. J’ai donc dormi à l’hôtel le premier soir, c’est en pensant à ma mère et sa capacité à rester toutes ces années auprès de mon père malgré son caractère despotique que j’ai pris la décision de les retrouver. J’étais déterminée à me faire pardonner par mon père, car il me fallait une panacée pour l'avancée de mon couple. Encore que jusque-là tout porte à croire que j’ai pris la bonne décision.


Nous nous retrouvons après le dîner assis sur une natte devant ma chambre, celle là même que j'ai occupée pendant toutes mes années auprès d'eux. Nous sommes en pleine saison sèche et dedans, la chaleur a atteint son paroxysme. Je dors peu la nuit, il n’y a pas de l’électricité pour pouvoir me procurer un simple ventilateur. Je suis tenue de composer avec tout ça en attendant de me réhabituer à cette vie, enfin jusqu’à ce que je ne prenne une décision définitive. 


C’est la voix de ma mère qui me sort de mes pensées.


N’nan : Mariam, je te parle.


Moi : je t’écoute N’nan.


N’nan : je disais que la prochaine fois que tu iras à la montagne, je te suivrai. Je voudrais parler à tes enfants.


Moi : j’aurai également aimé que vous leur parler baba et toi, le problème c’est que vous ne pourrez plus escalader une montagne. Toi avec ton problème de dos et baba avec sa canne, à moins qu’on vous porte.


Mon père sort de la case au même moment et s’assoit avec les garçons.


Baba : tu peux quand même les faire venir pour que nous fassions connaissance.


Moi : ils sont en pleine année scolaire, je les ferais venir pendant les vacances.


Baba (arquant un sourcil) : parce que tu comptes séjourner avec nous jusque-là ? Il reste plus de deux mois, une femme ne doit pas abandonner son foyer aussi longtemps que ça. Qui s’occupera de ton mari pendant ce temps ?


N’nan s’insurgeant : tu dis quoi comme ça baba ? Il n’est pas encore venu s’excuser pour ce qu’il a fait !


Baba : est-ce que ta fille lui a donné l’opportunité de le faire ? Selon ce qu’elle m’a dit, elle n’a même pas attendu qu’il lui donne des explications. Si Salifou demeure le jeune homme que j’ai vu grandir dans ce village, c’est qu’il a eu une bonne raison de le faire.


Moi étonnée : selon moi il n’y a aucune raison valable pour tromper celle qu’on dit aimer, avec qui on a fait des enfants, si bonne que cette raison soit.


N’nan : vraiment ! Il lui a fait un enfant à 14 ans baba, il a gâché sa vie. Elle aurait pu devenir une personnalité de ce pays.


Baba (secouant la tête) : il ne l’a pas forcé, elle est partie elle-même lui écarté ses jambes soit disant qu'elle l'aime, passant outre mon opposition farouche ! D’ailleurs, elle aurait pu choisir devenir autre chose qu’une femme au foyer, et d’après elle, il en a les moyens.


Ensuite, c’était devenu un clash entre mon père et ma mère, chacun campé sur sa position. 


*

*


Cynthia Clark…


Moi (hurlant depuis le bas des escaliers) : AGBEKO tu descend tout de suite ou tu me rejoins en ville.


Austine criant à son tour : une minute !


Je retourne m’asseoir sur le canapé en piaffant d’impatience. Nous avons prévu faire du shopping ce matin et je suis prête depuis une heure pour y aller, mais il fallait que madame joue à la belle au bois dormant. Elle a appris dans ses escapades hier que Jennifer Lopez sera en concert ce soir à l’auditorium de Santa Cruz et Joe est d’accord pour nous amener donc nous avons décidé de faire un shopping spécial pour l’évènement (loleuhh). Ce n’est pas tous les jours qu’on rencontre son idole. J-Lo, c’est une artiste doublée d’actrice qui nous inspire Austine et moi depuis fort longtemps. C’est la raison pour laquelle je me suis réveillée aux aurores. Enfin, c’est plus parce que j’ai eu du mal à dormir cette nuit.   


Joe (sortant de la cuisine une boite de céréale dans la main) : le petit-déjeuner est prêt, tu peux commencer en attendant qu’elle finisse de se préparer.


Moi le fixant : merci, je n’ai pas faim.


Joe : il faut prendre au moins un jus de fruit, tu n’a rien mangé non plus dans la soirée d’hier.


Moi bourrue : je te dis que je n’ai pas faim !


Il plisse le front et me regarde simplement avant de faire volte-face. Austine descend au même moment et me regarde perplexe.


Austine : je pensais que tu étais déjà prête ?


Moi : bien sûr, on y va si tu veux.


Austine (indexant mes pieds) : ne me dis pas que tu veux me suivre avec ces chaussures.


Moi (moi baissant la tête pour les regarder) : ils ont quoi mes babouches ?


Austine : ma fille ici, on représente toute une nation, ne viens pas me foutre la honte !


Moi riant : en même temps, personne ne sait d’où on vient.


Austine : je le sais et c’est ça qui importe.


Moi (me levant) : lol, je monte les changer.


Austine : tu as intérêt, bon moi, je vais manger un bout. J’ai une faim de loup ce matin (reniflant l’odeur des œufs mêlée au jambon en l’air) ça sent bon par ici.

Toi, tu ne manges pas ? 


Moi : je n’ai pas faim.


Austine (ton suspicieux) : hmmm


Moi (arquant le sourcil) : quoi ? 


Austine : tu fais une diète ? Hier non plus tu n’as pas mangé.


Moi : je n’en ai pas envie, c’est tout.


Austine : en tout cas !


Elle le dit pendant que je monte me chercher une nouvelle paire de chaussures. Je me suis levée du pied gauche ce matin, déjà que j’ai eu du mal à dormir avec la frustration que Joe à laisser dans mon corps krkrkr... Franchement, j’ai du mal à le comprendre, je sais que j’ai moi-même dit ici que je ne voulais pas du sexe entre nous, mais ça, c’était avant de me rendre compte de la personne qu’il est. Je ne m’attendais pas du tout à ce qu’il me prenne au mot et malgré que je fasse tout pour rectifier le tir, le type est calé sur sa position. Appréciez vous-même, dormir à côté d’un mec avec un sex-appeal inexorable qui te donne chaud seulement en te fixant ce n’est pas du tout évident de ne pas avoir envie de lui sauter dessus. Le pire, c’est que depuis qu’on est là, on est tout le temps collé, il ne me laisse même pas une seconde à moi et Austine qui se prête au jeu en disparaissant à tout bout de champ tchiipp !! Là, je sens seulement que je suis à bout, j’ai passé l’âge de jouer au chat et à la souris !! 


Voix d’Austine depuis le salon : tu descends aujourd’hui ou quoi ?


Lorsque je redescends, je prends ma sacoche puis devance Austine vers la porte d’entrée. 


Moi (au passage) : je ne t’attends plus une seule seconde.


Austine : tu as quel problème ? Laisse-moi dire au revoir à Joe tout de même.


Moi : ok fais vite !


Joe (dans le vestibule de la porte de la cuisine) : les filles, soyez prudentes s’il vous plaît.


Moi cinglant : tu n’as pas besoin de nous le rappeler, nous ne sommes quand même pas des enfants !


Je fais obstruction de voir le regard réprobateur que me lance Austine et ouvre la porte d’entrée pour me retrouver devant le portillon ensuite. Quand Austine arrive, elle me pince les oreilles et me donne une tape.


Austine : je peux savoir ce qui t’a pris de lui parler ainsi ? 


Moi : il abuse le mec !


Austine (pendant qu’on marche vers la voiture) : mais encore ? D’habitude, vous êtes là à vous bisouter à longueur de journée et là, tu lui lances des piques et pars même sans dire au revoir. What's going on ? (qu’est-ce qui se passe ?)


Moi maugréant : tous ses règlements à non sens commencent vraiment à m’agacer. Nous ne sommes quand même pas ses enfants !


On arrive au niveau de la voiture qu’on loue pour le séjour, elle s’installe au volant pendant que je contourne pour m’asseoir sur le siège passager avant. Elle démarre ensuite avant de parler.


Austine : il s’inquiète, tu comprends que nous sommes ici sous sa responsabilité ?


Moi : il en fait de trop, tu t’imagines qu’il fait un rapport détaillé à ton père ?


Elle me lance un regard intrigué avant de se recentrer sur la route.


Austine : je ne suis pas au courant de ça, enfin, je lui envoie des photos de nous tout comme à maman et à mes cousines.


Moi : il ne s’agit pas de simples photos, il me l’a dit lui-même qu’ils sont en permanence en contact.


Austine : je vois, néanmoins, il faut voir le bon côté des choses. Il veut rassurer la seule figure paternelle que tu as, ce que je trouve louable soit dit en passant. Au lieu de tirer la tronche comprend le bien-fondé de sa démarche.


Moi : pff il m’énerve juste !!


Elle me regarde encore avant d’ajouter autre chose.


Austine : si ce n’est que ça, je crois qu’une petite discussion avec lui fera l’affaire. Je n’aime pas ce malaise entre vous, ça me manque déjà toutes ces étincelles autour de vous. C’est ce qui me permet de tenir.


Moi : lol, en même temps, tu n’es jamais là. 


Austine (sourire au coin des lèvres) : en même temps, vous n’avez pas besoin de moi, en plus, je dois vivre ma vie.


Moi : oui, c’est ça !


On passe ensuite sur d’autres sujets jusqu’à ce qu’on arrive au centre commercial devant lequel elle gare et nous descendons ensuite. Pendant qu’on marche vers la porte d’entrée, j’aperçois par la vitre la silhouette des deux types flippant du bus que j’ai revu à la plage. Ça commence à devenir plus qu’une impression, on dirait vraiment qu’ils me suivent. Je me retiens quand même de le dire à Austine avant qu’elle ne me traite de parano. Je décide de faire fie de cela et de profiter de mes achats. On explore minutieusement la galerie et comme d’habitude nous avons l’embarras de choix, nous ne voulons vraiment pas brimer le dressing code sur l’île (rire) parce qu’il faut le dire, tout est joli et sexy ici.


Austine (l’air d’être à bout de force) : si ça ne tenait qu’à moi j’aurai tout embarqué pour choisir après, c’est carrément le paradis des fringues ici.


Moi riant : vraiment, il nous faut l’aide d’une experte.


Austine : comme la Annickmachinchose ?


Moi : pfff, quelle poisse. (touchant le bois de l’étagère) Ne prononce pas ce genre de noms les matins.


Austine soupirant : la vie est quand même bizarre, je sympathise avec une fille un jour dans une boutique et les jours suivants elle s’enfuit avec mon fiancé.


Moi : je me suis toujours demandé si cette rencontre était préméditée ou s'il s'avérait vraiment que ce soit une incroyable coïncidence.


Austine (haussant l’épaule) : n'y pense même plus ma chère.


On se dirige par la suite vers l’isoloir pour essayer les fringues qu’on a choisies. C’est après ça qu’on arrive à éliminer tous ceux qui ne feront pas l’affaire, toutefois il y a une robe en cuir noire très moulante sur laquelle nous avons une divergence d’opinions. Je ne suis pas trop portée dessus parce que trop courte, alors qu’Austine me demande de la prendre.


Austine argumentant : ça te rend vachement sexy, ça serait bien pour une soirée en amoureux.


Moi catégorique : non, c’est trop court ! Ça ne laisse pas place à l’imagination.


Austine : justement, c’est le but, tu penses assister à ce genre de soirée en salopette ?


Moi (secouant la tête amusée) : pour qu’il découvre directe la porte du paradis ?


Austine : pourquoi se compliquer la vie ? On a dit soirée romantique pas une veillée de prière et si toi-même tu vas là-bas ce n’est pas pour jouer les prudes. Il faut souvent mettre des choses pour  ressusciter ton homme, comme ça lorsqu’il verra ça dehors, il ne sera plus impressionné.


Moi (roulant les yeux) : c’est bon, je la prends, épargne-moi s'il te plaît ton évangélisation sur les principes du couple. 


Austine (pouffant de rire) : au moins ça a marché krkrkr…


Elle finit de choisir hilare puis nous passons au comptoir pour le payement. Nous sortons du centre commercial avec les bras chargés, je vois deux jeunes arriver en tenant des propos salaces avec des grimaces à l’appui. Le temps de mettre nos paquets dans le capot, ils se font happer par les deux types intrigants. Je regarde la scène le visage contracté, mais vraiment, ils ont quel droit d’agresser des gens comme ça en pleine rue ? 


On arrive à la maison à l’heure du déjeuner et trouve la table déjà apprêtée, il y a même l’odeur de la bonne nourriture qui flotte dans l’air et mon ventre se met automatiquement à gargouiller. Je décide alors d’oublier ma grève de faim et me joins à eux à table après avoir rangé les courses. On mange sous les racontars d’Austine et de Joe qui lève par moment des regards inquisiteurs à mon encontre. Lorsqu’on finit de manger, on débarrasse puis j’aide Austine à laver les ustensiles qu’on a utilisés. Elle propose d’aller après une petite sieste dans un salon pour nous faire une beauté, proposition à laquelle j’adhère. On se sépare ensuite devant le palier de nos portes qui sont en face l’une de l’autre. J’ouvre la porte et trouve Joe allongé sur le lit dans un pantalon jogging, laissant sa virilité débordante là en l’air. Un spectacle qui donne l’eau à la bouche comme ça tchiippp. Je me rends dans le dressing et prends un short plus un haut sans manches avant de me diriger vers la salle de bain sans broncher. Je prends un bain rapide et m’habille avant de sortir le rejoindre sur le lit. Il suit ma progression en me détaillant de la tête au pied puis détourne son regard comme si de rien était. Même s’il faut dire que le short déborde à peine mes fesses, je l’ai surpris plusieurs fois en train de me déshabiller du regard, c’est pour ça que j’ai encore plus du mal à comprendre son attitude. 


Joe (se tournant vers moi) : bébé 


Moi : hmmm


Joe : pourquoi tu me boudes ?


Moi : je ne te boude pas, je suis simplement de mauvaise humeur.


Joe : ah ok.


Il me tourne le dos sans plus, je peste contre lui dans mon cœur un moment avant de m’endormir. 


……


Joe (hurlant depuis la salle de séjour) : dépêchez-vous les filles, nous allons rater la moitié du spectacle.


Nous deux en même temps : on arrive !!


Joe : ah les femmes !!


Je mets une dernière touche de gloss et me mire une dernière fois avant de descendre. Je le retrouve en train de faire des va-et-vient dans la salle en maugréant contre les femmes et leur retard (rire).


Moi (le ton rieur) : bebou, je suis prête.


Il se retourne et se fige net sur place, les yeux et la bouche grands ouverts. Il prend d’abord le temps de me reluquer de la tête aux pieds avant de s’attarder sur la courbe de mes jambes. En fait, j’ai mis la robe qu'Austine m’a forcée à prendre dans la journée, l’idée m’est venu de le tester un peu et de voir jusqu’où il me résistera. Austine descend et passe derrière lui en poussant son menton du doigt.


Austine : bro, bave pas comme ça sur ma sœur !


La salle fut prise d’un rire général. Elle se tourne ensuite vers moi et me regarde genre (pourquoi tu as mis cette robe) je hausse simplement les épaules. 


Joe (passant son regard d’Austine à moi) : je vois que vous avez sorti les derniers sexy du placard mais, nous allons à un concert d’une trentaine de personnes au plus, pas au Coachella. 


Moi : un concert de J-Lo ? C’est l’évènement de l’année dear, la bombe latino elle-même quoi !? Je n’aurai pas tous les jours l’occasion d’assister à ses concerts ! 


Joe mdr : je comprends que c’est votre idole et que vous voulez lui ressemblez ce soir, cependant (me fixant) tu n’as pas autre chose à te mettre qui dévoile moins tes jambes ?


Austine renchérissant : vraiment !


Moi (plissant le front) : pourquoi devrais-je me changer ? Je trouve que ça concorde avec l’endroit où nous allons en plus c’est ce qui me plaît de porter.


Joe (me regardant avec insistance) : je te trouve juste beaucoup trop délurée, ça laisse peu de place à l’imagination.


Moi (soutenant son regard) : et en quoi est-ce que c’est mauvais d’être pimpante par moment ? (extrapolant) Ça fait quoi en fait si j’ai moi-même décidé de laisser les autres rincer un peu leurs yeux puisque de toute façon vous ne savez rien faire d’autres vous les hommes ? 


Austine : oh ? 


Il secoue la tête, mais ne dit rien, il se dirige ensuite vers la porte d’entrée suivie d’Austine. Je les suis au pas en boudant dans mon for intérieur, il me rebute trop par son attitude à vouloir tout contrôler. Tchipp !!  


Il nous aide à nous installer lorsqu’on arrive au niveau du véhicule. Je m’assois à l’avant et Austine prend place derrière. Le trajet vers l’auditorium se passe dans un silence absolu. Il y a Joe qui est concentré sur sa conduite arborant un profil tendu, et même Austine qui d’habitude anime la galerie reste muette comme une tombe à part les regards appuyés que sens parfois qu’elle pose sur moi. On arrive sur place une vingtaine de minutes plus tard et c’est pendant qu’on attend Joe qui cherche un créneau pour se garer qu’elle profite pour se lancer.


Austine : c’était quoi ça ? Tu vas finalement me dire ce qui se passe ?


Moi soupire agacée: je t’ai dit qu’il n’y a rien.


Austine : ne me le fais pas à moi, tu l’as carrément envoyé paître toute à l’heure à la maison. Sa réaction est tout à fait justifiée, pourquoi tu n’as plus porté la combi que nous avion choisi ?


Moi : c’était sur un coup de tête après avoir effectivement trouvé la robe très bien sur moi.


Austine : Cynthia si j’ai encouragé cet achat, c’est pour une soirée à deux et non pour t’exposer aux yeux du monde.


Un groupe de jeunes passe en ce moment en sifflotant et ne se gênent pas de me reluquer lorsqu’ils arrivent à notre niveau.


Austine : tu me vois les choses comme ça ? Je ne sais pas ce que tu veux revendiquer par cette attitude, mais sache que ça ne te réussit pas. Tu n’as pas besoin de le prendre de haut chaque fois qu’il prend une décision qui à mon avis va toujours dans ton intérêt.


Je soupire, mais ne réponds pas.


Austine : Cynthia qu’est-ce qui se passe ? 


Moi (la petite voix) : rien !


Austine : à d’autres ! Accouches, tu as une dent contre lui ?


Moi (balayant l’air d’un revers de main) : laisse tomber (au tac) bon, on fait comment ? 


Austine : on ne fait rien, tu n’avais qu’à te changer comme te l’avait dit Joe. Je ne me vois pas refaire le trajet vers la maison pour revenir ici.


Moi : même pour ta sister tu ne ferais pas ça ?


Austine (ton péremptoire) : no way, tu n’as qu’à t’en prendre à toi-même.


Moi (faisant la moue) : de toute façon, tu es toujours d’accord avec lui.


Austine (remuant la tête dans tous les sens) : tu n’y es pas du tout.


Moi (une grimace de la main) : si, tu t’es érigée en son avocat et je passe tout le temps pour la mauvaise.


Austinen(écarquillant les yeux) : tu as tort de me dire cela, tu me connais bien et tu sais que je me range toujours du côté de la vérité. 


Je veux parler, mais Joe arrive en ce moment, il nous regarde dubitatif.


Joe : il y a un problème ? 


Moi : non


Austine : aucun problème, une petite discussion entre filles.


Joe (souriant au coin des lèvres) : je parie que vous critiquez déjà les tenues des autres filles.


Moi (forçant le sourire) : tu devines bien.


Joe (secouant la tête) : ah les femmes !


Austine : c’est ton nouveau refrain ?


Il rit franchement en nous devançant, je secoue la tête débitée devant son fair-play.


Austine (à ma taille) : cette discussion n’est pas terminée. 


Je hoche simplement la tête. 


Nous passons la grille de sécurité installée pour l’occasion en montrant nos bracelets. Nous traversons la foule dans l’intention de nous mettre devant l’estrade pour avoir une bonne vue sur la scène. Je sens une main qui me touche sensuellement l'entrejambe un instant pendant notre progression, mais lorsque je me retourne, je ne vois personne. Je continue sans y prêter attention, je l’ai moi-même cherché ces attouchements je ne peux que m’en prendre à moi seule comme l’a dit Austine (soupir). 


Nous étions dans tous nos états lorsque J-Lo fit son entrée sur la scène, j’étais tellement en rut que Joe a été obligé de me canaliser en me maintenant dans ses bras. Je conçois de laisser mon ressentiment de côté et savourer ces instants magiques. Nous nous sommes mis à bouger sur son titre ″Alive″.


                 Time goes slowly now in my life

                 Fear no more of what I'm not sure

                  Searching to fill your soul

                  The strength to stand alone

                  The power of not knowing and letting go

                   I guess I've found my way

                   It's simple when it's right

                   Feeling lucky just to be here tonight

                   And happy just to be me and be alive…



Bon là maintenant, on se roule une pelle, laissez, c’est trop fort. La chanson là dit tout krkrkr…

Amour & Raison