Retrouvailles
Ecrit par Lyzam90
Roby grandissait en sagesse et maturité mais demeurait très introvertie. Contrairement aux autres élèves de son âge, elle n'avait pour ainsi dire pas de vie en dehors du lycée. La jeune fille était l'aînée d'une fratrie de quatre enfants. Son frère Obi et ses deux sœurs Kimia et Lyam recevaient tout comme elle, de leurs deux parents, une éducation très strictes fondée sur des préceptes chrétiens.
Néanmoins, il faisait particulièrement bon vivre dans leur maisonnée. Il n'était pas rare d'entendre au loin tous les membres de la famille MABIKA rire en chœur ou débattre sans once de violence sur un quelconque sujet, dans leur maison en demi-dure, située dans l'un quartier chaud de la capitale. Le couple MABIKA qui comptabilisait vingt ans de vie commune prenait plaisir à inculquer à leur progéniture l'amour de l'essentiel. Monsieur MABIKA, un homme robuste d'une quarantaine d'années, officier de la gendarmerie nationale, dirigeait les siens tantôt d'une main de fer tantôt d'un gant de velours. Son épouse, Madame MABIKA, femme au foyer, se plaisait à œuvrer chaque jour pour l'épanouissement de sa famille. Tous deux pouvaient compter sur le concours de Roby qui pour les siens aurait tenté de décrocher la lune sans hésiter.
Très souvent, l'adolescente était surprise par la grandeur du fossé entre la vision de la vie qu'elle partageait avec les siens et la dure réalité qui sévissait à l'extérieur. Elle en avait d'ailleurs pris conscience dans son milieu scolaire, car s'il est vrai que les élèves semblaient tous liés c'était à des degrés divers et parfois seulement apparents. Chaque jour, elle devait se battre pour survivre dans cette jungle où seuls les élèves les plus branchés régnaient en maîtres souverains des lieux. Ces filles et ces garçons pour la plupart était issu d'un milieu aisé et avait les moyens de briller. Tous les matins, c'était un défilé de hautes pointures qui s'organisait naturellement du portail à chaque salle de classe, comme sortis d'un catalogue ces mannequins de circonstances frôlaient la perfection. Leurs uniformes semblaient toujours plus éclatants à tel point qu'il était possible de les distinguer des autres même dans la foule. Mais Roby ne nourrissait pour ainsi dire aucun complexe face à eux, elle était focalisée sur son objectif de réussite, sur la satisfaction des attentes de ses parents et se complaisait dans sa bulle.
C'est ainsi que le 5 octobre 20.. Roby dû reprendre le chemin de l'école après trois long mois de vacances. C'est sans surprise qu'elle se retrouva à nouveau dans l'ambiance des années précédentes, chacun regagnant sa place pour une nouvelle année de coexistence pacifique officiellement appelée année académique.
En arrivant devant le seuil de la salle de classe où elle devait avoir son premier cours, Roby s’étonna de voir autant d’élèves présents. Elle s’empressa d’entrer et s’installa sur un table-banc vide. L’enseignant ne tarda pas à les rejoindre. En une fraction de secondes l’ambiance de foire fut changée en silence monastique. À présent, tous les élèves suivaient du regard cet homme relativement jeune et de taille moyenne. Il saisit un bout de craie et inscrivit en grands caractères sur le tableau « Monsieur Williams ».Puis d’une voix calme il lança :
-C’est ainsi que vous m’appellerez. Ici, je suis la seule voix autorisée pendant mes heures de cours. Celui qui voudra se frotter à moi le regrettera. Je suis un personnage grossier et délicat, je vous prie de m’accepter comme je suis. Sortez vos cahiers, nous allons procéder à une révision générale.
Étrangement, c’est sans broncher que toute la classe s’exécuta. Pendant quelques minutes les bruits de fermetures, de cahiers, règles et stylos firent écho dans la salle laissant émerger l’odeur de fournitures neuves comme à chaque rentrée. Monsieur Williams commença son cours en rappelant les éléments essentiels de l’étude d’un texte argumentatif. Au bout d’une heure, il consenti à interroger son public sur les éventuels difficultés auxquelles il était confronté face à cet exercice. Brusquement, il se mit à regarder dans la direction de Roby qui se mit à paniquer parce qu’elle avait toujours craint d’être désignée ainsi. Mais quelqu’un se mit à parler dans son dos. À l’écoute de cette voix son sang se glaça, elle l’aurait reconnu même cent ans après. Elle se retourna et vit qu’il était bien là, c’était lui, son Rony…La jeune fille se mit à sourire intérieurement, persuadée que c’était un signe du destin…