Thomas

Ecrit par Gigi Amab

J'arrête pas de penser à cette fille. Je sais pas ce qui m'arrive. Ça fait pourtant plusieurs semaines que je l'ai rencontrée au baptême de la petite Inaya mais j'ai son visage gravé dans ma tête et son joli prénom qui sifflote comme une chanson: Viani, Viani, Viani. C'est tout ce que je sais d'elle... à part qu'elle est la meilleure amie de Kimia, l'épouse de mon ami d'enfance Ludovic et qu'ils l'ont choisie pour être la marraine de leur fille Inaya. Elle doit vraiment être spéciale à leurs yeux, tellement spéciale que Ludo, mon vieil ami d'enfance avec qui j'ai fait les 400 coups a catégoriquement refusé de me filer son numéro malgré ma lourde insistance. Je suis pourtant revenu à la charge encore et encore en espérant qu'il céderait et j'ai passé une partie de mes samedis chez lui en croyant l'y revoir mais rien. Je crois que ça vient de Kimia, elle lui a certainement interdit de me donner son numéro. Cette Kimia, des fois j'ai envie de lui tordre le cou parce qu'elle se mêle de tout mais je l'aime bien. Elle a vraiment fait du bon boulot avec mon ami Ludo. Qui l'eût cru ? Ce don Juan invétéré avait fini par se caser et fonder sa petite famille avec la femme qu'il aimait plus que tout. Je n'ai certes pas été témoin de leur histoire, ayant fait mes études à l'étranger après avoir obtenu une bourse après mon baccalauréat pour aller poursuivre mes études de médecine en Europe, mais je peux constater le profond lien qui unit ces deux là. Ils se sont bien trouvés. Alors pourquoi veulent-ils me mettre des bâtons dans les roues pour m'empêcher d'approcher la belle Viani ?  Bon j'avoue que je n'ai pas une excellente réputation auprès des femmes, un an à peine après mon retour au pays et j'ai déjà collectionné un paquet de filles. En même temps c'est pas vraiment de ma faute, la plupart d'entre elles s'est littéralement jetée dans mes bras, j'ai même pas eu besoin de fournir le moindre effort, elles étaient toutes cuites. Et puis pour ma décharge je précise que je ne leur avais rien promis, à part un plaisir mutuel. Je peux comprendre que Kimia et Ludo se méfient de moi mais cette Viani est différente. Je sais ça fait cliché mais elle est vraiment différente celle là et je sais pas pourquoi. J'ai beau ne l'avoir vue qu'une fois et avoir à peine échangé avec elle lors du baptême chez les Bell ( Ludo et Kimia) mais elle m'a fait beaucoup d'effet. Il faut que je la revois. Je lui ai laissé un message vocal il y a déjà plusieurs jours mais elle ne m'a toujours pas répondu. L'a-t-elle écouté au moins ? Qui écoute encore les messages vocaux de son répondeur ?  Si seulement j'avais eu son numéro de portable je serai fixé. Sacré Ludo, s'il a bien voulu me donner son numéro après m'avoir fait tourner en bourrique pendant des semaines, il ne m'a donné que celui de son téléphone fixe, soi disant pour que je me débrouille avec, quand on veut quelque chose on se bat pour l'avoir et on se débrouille avec ce qu'on a. Depuis quand est-il devenu aussi chiant, celui là ? Bref j'ai déjà quelque chose et c'est mieux que rien. Mais alors pourquoi ne me rappelle-t-elle pas ? Ça fait déjà plusieurs jours que je lui ai laissé ce message vocal et toujours pas de réponse. Ma patience commence à être à bout. Si elle ne me rappelle pas d'ici la fin de la semaine je l'oublie et je passe à une autre. Elle a beau être spéciale je ne vais pas non plus lui courir après comme un adolescent.

- Docteur Evina, le bloc opératoire B est prêt pour la césarienne de Mme Talla, dit l'infirmière qui venait de pousser la porte de mon bureau et qui m'avait extirpé de mes pensées.

- Ah oui. Appelez Monsieur Ilembé l'anesthésiste et dites lui que la césarienne c'est dans 30 minutes. Il doit être en rhéa.

- Ok doc.

C'est pas tout mais il faut que je m'apprête pour mon opération, me dis je à moi même. Une nouvelle vie verra le jour par mes mains si Dieu le permet. Le devoir t'appelle, Dr Evina.







-Dr Evina, lâchez moi ce téléphone et venez manger, vos patients ne vont pas s'enfuir!

- J'arrive, mamanou.

Ma mère adorait m'appeler Dr Evina, elle était tellement fière de son fils. Il y avait de quoi. Une petite couturière qui était restée veuve très jeune et qui avait réussi à élever trois enfants avec ses petits moyens. Trois enfants qui avaient plutôt bien réussi dans la vie. L'aîné, lui, était médecin. Le cadet était ingénieur en Europe et la petite dernière étudiait à la prestigieuse Ecole Nationale d'Administration et de Magistrature du pays pour devenir Inspecteur des impôts plus tard. Qui l'eût cru ? Les trois orphelins de la couturière étaient des personnes accomplies et tout ça grace aux sacrifices de sa mère. Il ne put s'empêcher de faire un bisou à la joue à sa mère en s'installant à table.

- Je devrais te gronder plus souvent, si ça me vaut des bisous à chaque fois, dit sa mère en rigolant.

- Très drôle mamanou, répondit-il en souriant à son tour. Je vais faire la prière. Seigneur bénis ce repas, la femme formidable qui l'a préparé et procure du pain à ceux qui n'en ont pas. Ainsi soit-il.

- Amen.

- Mamanou, Gaby ne vient pas manger avec nous ou elle fait encore un de ses régimes à la con ? Demanda-t-il.

- Ta soeur est restée réviser avec ses camarades à l'école, ils ont des partiels la semaine prochaine. Ne te l'a-t-elle pas dit quand elle est passée chez toi le week end pour prendre son argent de poche?

- Ah oui, j'ai complètement oublié. Je sortais de l'hôpital et j'étais exténué. Je parie qu'elle va encore cartonner à ses examens comme d'hab.

- Avec la grâce de Dieu mon fils.


Deux heures plus tard je garais dans mon parking.

- Bonsoir Bello. Ça va ?

- Bonsoir patron, ça va très bien . Le travail s'est bien passé ? Me dit le gardien en prenant mon sac.

- Quand on ne perd aucun patient et qu'on donne naissance à un bébé bien portant la journée est toujours belle.

- C'est parce que le patron est un grand docteur qui a fréquenté chez les blancs, répondit le gardien.

J'éclatais de rire. On a tendance à voir les gens qui ont étudié en Europe comme de vrais messies en Afrique. 

- C'est pas parce qu'on a étudié en Europe qu'on est un meilleur médecin que les autres, Bello. On travaille bien quand on aime son métier, d'accord ? Lui dis-je en me dirigeant vers la porte.

- C'est quand même vrai hein, patron. Quand on voit comment les gens nous répondent mal dans les bureaux ici on comprend que les gens ne sont pas contents de travailler, vous avez raison.

- Tu as mangé n'est ce pas ? 

- Oui patron, Tita m'a servi.

 -  C'est bien. Je vais me lever à 5h pour aller au sport, tu vas nettoyer la voiture à mon retour. Ok?

- Compris patron.

- À demain Bello.

- Dormez bien patron.

Je refermais le salon quand j'entendis.

- Bonsoir monsieur.

- Bonsoir Tita. Tu es encore debout ? 

- Oui monsieur, je regardais mes séries.

- Ok. Elle dort déjà ? 

- Oui depuis longtemps monsieur. Elle vous a demandé.

- J'magine. Cette semaine n'a pas été facile à la clinique. Je vais me coucher. Bonne nuit Tita.

- Bonne nuit monsieur .




Je descendais la colline du Mont Fébé en courant quand j'entendis une voix familière crier mon prénom:

- Thomas !! Thomas !!!!!!!

J'enlevais mes écouteurs et je me retournais quand soudain j'aperçus la dernière personne que j'espérais voir





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