10. La douleur de trop
Write by SSS
......dans la peau de Eugenio DA Silva........
J'ai couru à l'hôpital comme un forcené. J'y ai trouvé Maman Yani dans tout ses états. Moi aussi je dégouline de sueur. Elle n'a pas l'air enchantée quand elle me voit mais elle m'accueille quand même. Yani est en salle d'opération entrain de subir une césarienne. Sa mère ne tient plus en place dans la salle d'attente.
- Elle: Eh Dieu ma fille! Seigneur pitié soit avec ma fille.
- Moi:( lui touchant l'épaule) maman calmez vous ça va aller. Tout va bien se passer, ils vont s'en sortir.
- Elle: Retire vite ta main de mon épaule!!! La seule raison pour laquelle je t'ai averti est que tu es le père de cet enfant, ni plus ni moins. C'est à cause de toi que ma fille a autant souffert et que son bébé en a pâti. Maintenant ils sont entre la vie et la mort. Tu as intérêt à prier, beaucoup prier. Sinon s'il leur arrive quoi que ce soit Monsieur je ne sais quoi, je te tue! Tu m'entend?? Je finis avec toi!
Je ne peux que me taire. Après tout elle a raison. Tout ce désordre émotionnel vient d'abord de moi...
J'essaie de rester calmement assis sur le banc mais à l'intérieur de moi ça bouillone carrément. J'ai tellement peur que ça se passe mal, qu'il leur arrive quelque chose. Le film de notre vie à deux passe carrément devant mes yeux: notre rencontre, nos rancards secrets, notre mariage, notre première fois....tout. Je dois l'admettre, je l'aime et je m'en voudrais toute ma vie s'il lui arrivait quelque malheur.
Les minutes passent comme des mois. Mais un docteur finit par sortir de la salle d'opérations, tout en sueur. Maman et moi se précipitons sur lui:
- Elle: Docteur comment vont ma fille et le bébé? Pitié dites moi que ça va.
- Lui( soupirant): Calmez vous madame, votre fille s'en est bien sorti. Elle est actuellement inconsciente mais vous pourrez bientôt aller la voir.
- Elle: Et le bébé??? Il va bien?
- Lui: Je vous l'avait déjà dit, le bébé était assez faible de constitution, et le fait qu'il soit toujours en vie est un miracle divin. Le fait qu'il soit prématuré n'arrange pas du tout les choses, il est donc extrêmement fragile; on l'a mis dans une couveuse et il est suivi de très près. Je vous avertirai quand vous pourrez les voir tout les deux.
- Elle: Merci beaucoup Docteur....tu vois? Tu vois ce que tu as fait? À cause de toi, ton enfant est dans cet état! Mais bon, tu dois toujours penser qu'il n'est pas le tien!
- Moi: Non je....
- Elle: Le voilà née! Tu peux faire tout les tests dont tu as besoin pour être enfin convaincu que c'est ton gosse! Je n'aurai jamais dû laisser ma fille t'épouser.
Elle éclate en sanglots. C'est dur de voir une mère pleurer pour son enfant ainsi. Surtout qu'au fond, je me sens coupable de ses pleurs et incapable de lui apporter du soulagement.
Quelques heures plus tard, on nous autorise enfin à les voir tout les deux. Maman Yani court pour aller voir sa fille. Moi je vais au niveau de la couveuse, histoire de voir l'enfant. C'est un petit garçon tout minuscule. Dès que je le vois, mon cœur se fend en mille morceaux; un sentiment que je n'avais jamais ressenti auparavant m'envahit tout entier, accompagné d'une tendresse énorme. On lui a branché tellement de fil, de sondes et de cathéters qu'on voit à peine sa peau toute frippée. Ça me touche tellement que j'ai les larmes aux yeux. C'est mon fils, mon cœur n'en doute pas.
Je dois faire ces foutus tests ADN au plus vite, il faut que je sois situé. Je contacte rapidement un laboratoire spécialisé dans le domaine pour qu'ils envoient quelqu'un ici à l'hôpital faire les prélèvements. Le prix est certes élevé mais je paierais ce qu'il faut. Dans trois jours au plus je dois savoir.
En attendant le laborantin, je vais voir Yani dans sa chambre. Elle est encore endormie. Elle est tellement jolie quand elle dort. Mais qu'est ce qu'elle a maigri! Elle a des cernes foncés et les joues légèrement creusées. La voir ainsi me fait tellement mal, je me sens coupable. J'ai peut-être été trop dur avec elle ... Je regarde ses lèvres, si charnues, si généreuses. Je ne peux m'empêcher d'y poser les miennes, mais tout doucement pour ne pas la réveiller. C'est douloureux mais je lui en veux tellement pour sa trahison, mon cœur est partagé.
J'ai dû attendre deux heures environ avant que le technicien de laboratoire ne vienne à l'hôpital. Avec l'autorisation du médecin, il a prélevé quelques millilitres de sang du bébé et a fait pareil avec moi. Maman Yani ne semble pas d'accord.
- Elle: Tu es quand même méchant hein! L'enfant vient à peine de naître que tu veux déjà faire des analyses comme ça. Jusqu'où tu veux aller avec ta sorcellerie hein?
- Moi: Maman je ne veux pas mal vous parler. Si vous n'avez rien à cacher, pourquoi faire autant de bruit? On fera ce test et tout le monde sera fixé. Les échantillons ont déjà été prélevés et dans deux jours on saura si votre fille a menti ou pas.
- Elle: Tu vas regretter tout ça je te jure! Tu verras bien.
Ouais c'est ça, on verra bien. Pour l'instant je dois rentrer, j'ai laissé des dossiers très importants en instance . En plus il y a Leila à la maison, elle doit être entrain de se plaindre encore. Au fond j'ai mal de laisser Yani et le bébé mais j'ai pas le choix, je reviendrai demain.
À peine je rentre que Madame Leila commence ses jérémiades.
- Elle: Ah bon hein? Donc tu m'abandonnes ici et tu disparais dans la nature pour revenir tard le soir? Je t'ai appelé plusieurs fois aujourd'hui mais Monsieur était trop occupé pour répondre. Tu n'étais même pas au bureau! Où étais-tu hein? Tu t'en fous de moi n'est ce pas? Et s'il m'étais arrivé quelque chose?? Et si....
- Moi: Non mais tu vas la fermer pour une fois??? J'en ai marre à la fin. Je ne suis pas ton gosse et je ne suis pas à ton service non plus. Tu es la première femme à tomber enceinte dans ce monde? Tu me fatigue! Écoute moi bien: je vais où je veux, comme je le veux; je n'ai aucun compte à te rendre. Pour info j'étais avec Yani , elle vient de donner naissance. S'il te plaît je n'ai pas besoin de ton avis.
- Elle: Mais elle t'a trompé, cet enfant n'est pas de toi....
- Moi: Ça c'est mon problème! Le tien c'est de prendre soin de notre fille à naître et de toi même. Le reste je gère. Maintenant si tu veux bien m'excuser, je monte me reposer un peu. Bonne soirée.
Je la dépasse et je monte dans les escaliers. Je pense que pour le moment elle va se calmer. Dans ma chambre j'essaie de trouver le sommeil mais en vain. Je prends l'ordinateur pour travailler un peu mais mon cerveau n'y est pas. J'appelle le numéro de Yani plus de huit fois mais personne ne prend.
Je n'arrive pas à dormir toute la nuit. Je pense à elle, au petit. Leila essaie de se rapprocher de moi dans le lit mais je n'ai aucune envie de la sentir, c'est le cadet de mes soucis. Je l'ignore.
Le lendemain, je me rend très tôt au bureau pour éviter ma "femme". Je passe toute la journée au boulot, la tête dans les dossiers. J'essaie d'avoir des nouvelles de Yani et du bébé mais là encore, personne ne prend. Je commence par vraiment m'inquiéter. Quoi qu'il en soit, demain j'aurai les résultats du test et j'irai les voir à l'hôpital. J'espère tellement qu'il soit positif, et que Yani me laissera me rapprocher de lui.
******* le lendemain *******
Je me suis levé vers cinq heures du matin alors que Leila dormait encore à poings serrés. Je me suis lavé, parfumé et vêtu de ma tenue de jogging, il fallait que je courre pour décompresser un peu.
Mais je suis à peine sorti de la maison que je reçois un appel de ma secrétaire:
- Elle: Bonjour Monsieur Da Silva. Toutes mes excuses pour le dérangement matinal mais comme vous le savez, je suis allé très tôt au bureau ce matin pour finir le rapport que vous m'avez confié hier. Donc, j'étais bien entrain de travailler comme vous m'aviez demandé....
- Moi: S'il te plaît viens en aux fait.
- Elle: Euh voilà, le laboratoire d'analyse biomédicale a appelé au bureau mais comme vous n'êtes pas là j'ai décroché. Ils ont dit de vous dire que les résultats étaient prêts et déjà envoyés dans votre boîte mail.
- Moi: Ah je vois. Merci Claudia.
Ouf je suis stressé. Les résultats sont disponibles. Et s'ils étaient négatifs? Et si ce n'était pas mon fils? Je préfère ne pas y penser.
Je prend mon Android, ma main tremble presque. J'ouvre ma boîte Gmail. Les résultats y sont effectivement. J'ai peur. Mon cœur bat fort sous ma poitrine. Mon doigt hésite le message....mais il le faut. Allez Eugenio, du courage.
Positif! Il est positif! Mon cœur manque un battement. Waoh je suis père! Je suis père! C'est mon fils! Il m'attend à l'hôpital! Ma femme et mon fils m'attendent à l'hôpital. Il faut que je les vois! Il faut que je les embrasse, que je les prenne dans mes bras.
Je héle vite un taxi et je fonce vers l'hôpital. Il roule très vite et en dix minutes je suis devant l'hôpital. Mon cœur bat encore plus fort. J'entre en trombe dans les couloirs en cherchant la chambre de Yani. Mais dès que j'y arrive, j'entends des pleurs, des cris , des lamentations. Mais qu'est ce qui peut bien se passer ? On devrait pourtant être en joie actuellement.
Dès que je pousse la porte, je vois Yani par terre, qui crie et pleure toute les larmes de son corps. Sa mère également pleure, elle essaie de consoler sa fille en vain. Je suis dans l'incompréhension totale.
- Moi: Mais qu'est ce qu'il y a, pourquoi vous pleurez ? Qu'est ce qu'il se passe???
Maman Yani me regarde dans les yeux quelques instants, comme si elle cherchait ses mots.
- Elle: Eugenio......l'enfant......l'enfant n'est plus. Il a rendu l'âme cette nuit...il est mort...
- Moi:(choqué) quoi??? Non, non c'est pas vrai, c'est pas possible!!!