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Write by Lilly Rose AGNOURET
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Maman veut continuer la
conversation, mais elle est appelée par les cris des petites.
« Elles ont faim. »
Grand-mère nous dit au revoir
après avoir donné le biberon à Jade.
Je dresse la table du salon,
alors que Julien arrive dans le salon et prend une de ses nièces dans les bras.
« Elles feront des malheurs
ces petites ! Comment peuvent-elle être aussi jolies ! »
« Aussi jolie que ta fameuse
Pamela-Jo ! », le taquine la vieille.
« Maman, pardon, oublie ce prénom-là.
C'était juste une aventure ! »
« Ecoutez-le ! », fait maman,
« Il se prend pour un homme. »
« Mais, je suis un homme. Et
un vrai. C'est pour ça que cette Pamela-Jo meurt pour moi. »
« Pardon, ne me fais pas mal
aux oreilles.
Il est 21 heures et je suis
dans la chambre après avoir mangé. Les petites sont couchées et maman regarde
les infos sur Africa 24. Julien travaille dans sa chambre. Je pianote des mots
à mon Miro chéri, sur WhatsApp. Je suis tellement absorbée par l'amour que tout
autour de moi disparaît. J'entends soudain :
« Tania, tu peux pas savoir
combien ça fait mal, là. J'essaie de rester stoïque en me disant que la vie
continue, mais le regard des autres me fait drôlement souffrir. Combien de
temps leur faudra t-il pour oublier Peter Malonga ? Combien de temps, encore,
l'associeront ils à moi ? »
Pupuce vient de rentrer de
chez Solange, une amie de classe. Elles font les 2KPI ensemble. Elle est
complètement déboussolée. Je l'ai souvent vu pleurer, mais là, aucune larme.
Son visage est serein, mais je ressens sa tristesse.
« Que s'est-il passé ? Je
pensais que tu étais allée travailler ? »
« Je travaillais, en effet.
Mais les filles du groupe ont passé deux heures à s'intéresser à la nouvelle
vie de Peter. Elles ont vu la fameuse photo. Elles ont dû passer la moitié du
temps à se demander comment j'ai pu tomber amoureuse de lui. C'est à peine si
elles ne m'ont pas traité d'idiote. Pourtant dans le lot, il y en a bien deux
ou trois qui ont couché avec lui. Dis, on va tout le temps me fatiguer les
oreilles avec ce type ? Même parti, il fait couler beaucoup d'encre. »
Je ne sais quoi répondre à
Pupuce. Elle est tellement épuisée, qu'elle s'affale sur le lit, les yeux fixés
au plafond.
« Imagine donc Sharonna en ce
moment ! », lui fais-je.
« J'ose même pas. Je
n'aimerais pas être à sa place. Tout comme je ne souhaite à personne d'être à
la mienne. La vie a un drôle de sens de l'humour. Je pense que finalement, je
vais partir d'ici. »
« Ah bon ! Tu es décidé ? »
« Oui. Ça me fera du bien.
Cette ville est beaucoup trop petite. Même lorsque tu pètes dans le secret de
ta salle de bain, tout le monde est au courant à la minute. J'ai envie
d'oublier Peter Malonga, Reaponda, Port-Gentil. J'ai envie d'oublier que j'ai
été folle amoureuse de cet imbécile. »
« C'est le père de tes
enfants. »
« Raison pour laquelle, il
faut que je parte. Je vivrais à l'étranger des choses excitantes qui me
permettront de prendre de la distance et surtout, de pardonner et accepter
Peter comme il est. »
« Tu deviens raisonnable,
Pupuce ! »
« Oh, j'ai passé une heure à
longer le bord de mer. Je me suis dit que je me priverai de quelque chose en
restant ici. La vie continue. Et tu sais, il y a cette douleur qui reste là en
dedans de moi. »
« De quelle douleur parles-tu
? »
« Oh ! J'ai lu pas mal de
romans. A force, on finit par rêver. On se dit que tout ce qu'elle invente dans
leurs histoires doit forcément se réaliser dans la réalité. Je ne demandais pas
grand chose à la vie. J'étais naïve de penser que Peter changerait. Mais
bon...recevoir un bouquet de roses de sa part à la maternité, m'aurait
réconcilié avec la vie ! Je n'ai pas connu ça. Et ça me fait mal. Ni roses, ni
boîtes de chocolats. Qu'est-ce que cela lui enlevait d'attendre que les petites
viennent au monde ? »
« Il avait ses plans. Et il
lui fallait agir vite. Il a volé, ne l'oublie pas. Il fallait agir vite. »
« Oui, comme tu dis. Il a volé
le cœur de plusieurs filles. Il vit aujourd'hui le grand bonheur, d'après lui.
Il se fout pas mal que cela fasse souffrir. Bref, j'ai besoin de changement. »
« Je te croirai quand tu seras
dans l'avion. Tu es encore capable de changer d'avis. »
Elle me regarde et sourit
tristement.
« Dis-moi, elle est vraiment
amoureux d'elle, hein ! Il aime vraiment la mère de Sharonna. »
« Je crois que oui, Pupuce.
Jamais il n'aurait publié cette photo sur Facebook, sinon ! »
« Je mérite quelqu'un qui
mettra ma photo en profil sur Facebook ou Whatsapp. C'est bête, mais bon... »
Je laisse Pupuce toute seule
dans la chambre, car je sens qu'elle a besoin d'intimité.
Je vais me réfugier dans la
chambre de maman et reste là à observer les petites qui dorment sur le lit de
leur grand-mère. Je suis tellement habituée à leur présence, que je me demande
comment je ferai quand je serai loin. Oui, quand je serai loin de Port-Gentil,
comment me sentirai-je ? Il n'y aura plus maman, plus les délires de Julien. Et
papa me manquera, lui aussi. Bref, c'est ça la vie. Tout le monde au moment du
départ ressent sûrement le même déchirement. Nous avons encore l'espace des
examens, des résultats et des vacances pour nous préparer à ce départ.
Lundi 13 juillet, Miro a ses
résultats. Bien sûr, monsieur mon chéri a décrocher son bac d'office. Il ne
craignait même pas l'échec. Antoine, lui aussi a eu son bac. Pour fêter cela,
ils nous invitent au restaurant, Marc-Elise et moi. Nous avons choisi d'aller à
Planète Grill parce que mademoiselle ma copine veut une pizza et moi des
grillades. La salle est bondée.
Les garçons parlent de tout et
de rien. Ils sont heureux d'avoir leur examen.
« Je prends l'avion pour Paris
dans deux semaines », nous annonce Antoine. « Je vais en vacances pour la
première fois en Thaïlande avec mes parents. Ma mère n'a pas remis les pieds
dans son pays depuis mes 6 ans. »
« Oh ! Et toi ? Tu y as déjà
été ? »
« Non ! C'est la première
fois. Ma grand-mère a vécu trois ans avec nous quand j'étais enfant. Elle est
décédée maintenant. Mon grand-père est mort avant ma naissance. La sœur de ma
mère est mariée à un Américain et vit aux USA. Donc, ma mère ne se sent plus
vraiment d'attaches pour la Thaïlande. »
« Ok ! », conclut Marc-Elise.
Elle m'envoie un sms dans
lequel elle m'annonce que cette nuit, elle en fini avec Antoine. Je lui
réponds, qu'on a cours demain. Mademoiselle me dit que ce n'est pas un souci et
qu'Antoine doit avoir un souvenir du Gabon.
En tout cas, je préfère
arrêter là. Elle me donnera les détails demain.
Nous continuons de manger en
rigolant. J'ose demander à Antoine avec quel genre de fille, il a l'habitude de
sortir. Il me répond franchement :
« Mes deux exs sont blanches.
Je ne suis jamais sorti avec une fille d'une autre couleur. Pourquoi ? »
« Simple curiosité », lui
fais-je.
« Port-Gentil va beaucoup me
manquer ! Mes parents sont encore là pour deux ans, mais je ne sais pas si j'y
reviendrai. », fait Antoine.
« Oh ! Donc tu t'en vas
vraiment définitivement ! », fais-je étonnée.
Je ne comprends pas ce que ma
copine trouve de palpitant à coucher avec ce garçon dont elle sait qu'elle ne
reverra plus. Je lui envoie un sms. Elle me répond qu'elle veut coucher avec
lui, pour le fun. Yo !!!! C'est à ce niveau-là ?
Quand Miro me raccompagne à la
maison, il descend avec moi. Nous trouvons maman au salon. Comme chaque nuit
avant de s'endormir, elle regarde les informations comme pour s'assurer de
l'état du monde avant de fermer l'œil. Elle tient Ruby dans ses bras.
« Cette petite coquine est
bien la chaleur humaine. Elle ne dort bien que dans mes bras », fait-elle à
Miro qui embrase la petite sur le front.
Je les laisse tous les deux,
après avoir servi un verre d'eau à Miro. Je vais dans la chambre enlever mes
chaussures et ma robe. J'enfile la plus belle de mes robes de nuit et me dirige
vers le berceau de Jade, qui se trouve dans la chambre de maman, pour
l'embrasser. Pupuce n'est pas encore rentrée. Julien est là, qui veille sur le
sommeil de mlle la princesse.
Quand je reviens vers le
salon, avant même que je n'ouvre la porte du couloir, j'entends Miro dire à ma
mère :
« Ma mère m'a dit de vous
demander la procédure. Elle dit que ça se fait ! »
Je me demande de quoi ils
parlent, ces deux-là : Ma mère répond simplement :
« On en parle posément demain,
d'accord. »
J'arrive dans le salon et Miro
prend congé de maman. Je le raccompagne jusqu'au portail.
« Je t'aime Tania Akendengué.
Bonne nuit trésor. »
« Je t'aime dix fois plus. »
Je rentre et vais directement
prendre une douche. Ensuite, je me jette sur le lit avec l'intention de dormir
comme un bébé. Je suis pourtant réveillée par le bip de mon téléphone. Je
regarde et me rends compte que c'est Marc-Elise qui envoie un message à notre
groupe de fille. C'est un groupe sur WhatsApp. Nous sommes 21 là-dedans. Nous
nous balançons des infos et des bêtises pour rigoler. Je souhaite bonne nuit à
tout le monde et ne s'appesantis pas plus là-dessus. J'ai sommeil.
Portant, en rentrant deux
heures plus tard, Pupuce me réveille énergiquement.
« Elle est complètement tarée,
Marc-Elise. Elle est en plein ébat sexuel avec son Thaïlandais-là et toute la
ville est au courant ! »
« C'est quoi cette histoire !
», fais-je endormie.
« Elle était tellement pressée
de baiser qu'elle ne s'est même pas rendue compte qu'elle a fait une mauvaise
manip devant l'ordi de son type. Elle nous a envoyé un message vidéo
enregistrée via Facebook avant de dormi, histoire de faire la belle devant la
webcam du fameux Antoine. Figure-toi qu'elle a oublié d'arrêter l'ordi et que
la caméra continue de filmer. »
Yo ! C'est quoi ce bims' ?
Là, je suis totalement
réveillée. Pupuce me tend son téléphone. Je me rends compte qu'elle ne blague
pas. Les images parlent d'elles-mêmes. »
« Mais comment as-tu eu ces
images ? »
« Tu connais les enfants des
riches, non ? Tous leurs appareils sont connectés les uns aux autres. Un ami
d'Antoine a dû recevoir le film et l'a balancé aux autres ! Moi c'est Jileska
qui vient de m'envoyer le truc. Elle l'a reçu de Cristal, l'amie de Miro. »
« Donc, ça veut dire que Miro
aussi l'a vu ? », fais-je.
« C'est sûr ! Elle voulait
jouer la belle alors que la technologie la dépasse ! Vraiment, cette go du
Tranfo ! »