53-
Write by Lilly Rose AGNOURET
1-
"Mon Dieu, mon Dieu! Que
vais-je devenir? Enceinte!!!!!!!!"
"Sache que tu es morte.
Parce que Kaba ne va pas te rater. Une fois qu'elle apprendra la nouvelle, elle
prendra soit son couteau de cuisine pour t'éventrer soit son balai pour te
rosser. Dans les deux cas, elle te foutra à la porte de sa maison."
"Snif! Une fois qu'elle
apprendra la nouvelle, elle prendra soit son couteau de cuisine pour t'éventrer
soit son balai pour te rosser."
"De rien, ma chère
Pupuce. Tu savais les conséquences, non! Nous sommes allées là-bas pour nous
amuser, faire les folles sur la piste de danse. Pas pour aller coucher, ma
belle!"
"Snif! Je ...je...j'étais
loin de me douter que tout cela finirait ainsi. Je...Que vais-je devenir."
"Une fois morte, plus de
souci. Tu as au ciel ou en enfer. Et l'affaire est réglée."
"Merci pour ton soutien,
Tania."
"Y a pas de quoi. Si
jamais Kaba t'épargne, tu auras appris une leçon : on ne couche pas sans capote
à moins d'être complètement conne! On nous l'a appris en classe, non?"
"Je... C'est facile à
dire, Hein! Je voudrais t'y voir toi dans le feu de l'action, penser à une
capote à ce moment-là!"
"Sois pas bête Pupuce!
Nous sommes de grande fille! Ne me dis pas qu'à 17 ans, tu es incapable de
prononcer le mot CAPOTE! T'as eu honte de quoi???"
"De rien... Tu peux pas
comprendre. Je pensais pourtant que tu étais ma frangine... Mais je constate
que je n'ai plus personne sur qui compter."
"Ma go, le bac c'est là,
à la fin de l'année. Nous n'avons plus que six mois à tenir. Ensuite, on s'envole
pour l'Afrique du Sud, pour la liberté. Plus de Kaba ni de papa Jimmy pour nous
emmerder. Et au lieu d'être patiente, tout ce que tu as trouvé d'intéressant à
faire, c'est d'aller écarter tes jambes sur le banc d'une salle de classe et
laisser Peter éjaculer dans ton vagin!"
"Mais... je... je."
"Tu bégayais aussi comme
ça quand il t'a proposé de le suivre dans cette salle de classe! Pupuce, nous
avons fait le mur pour aller danser, tu comprends. Nous sommes allées là-bas
pour DANSER. Pas pour coucher. Et surtout pas sans capote. Et surtout pas avec
un imbécile, même trop mignon, qui couche avec toutes les fille qui lui tombent
dans les bras."
"C'est mon mec,
Tania."
"Et cela ne l'empêche pas
de se taper d'autre fille. Je te signale qu'une fois la fête finie, il a
atterri dans le lit de Roseline. Elle l'a raconté à tout le monde. C'est ça le
type dont tu es amoureuse. Que dire? C'est ça le type dont tu es
enceinte."
"Merci pour ton
soutien!"
"Oh, tu ne me remercieras
jamais assez. Bien, je te laisse. Il faut que j'aille à la morgue pour
commander ton cercueil, ma belle. Car lorsque Kaba va te tomber dessus, il ne
restera plus que des miettes de toi. Je les mettrai dans ce cercueil. Et
t'inquiète, tu auras un bel enterrement. Salut, ma vieille.
"Tania!"
"Quoi, Tania? Il faut
bien que j'aille réfléchir à une solution pour te sortir de là, non!"
"De quoi parles-tu?"
"Je ne sais pas, moi. Là,
j'ai l'esprit un peu embrouillé. Mais la nuit porte conseil, dit-on. Alors, à
demain Pupuce."
La nuit est tombée depuis longtemps
au moment où j'abandonne Pupuce dans sa chambre. Elle a décidé d'y rester
enfermée jusqu'au jugement dernier. C'est mieux pour elle, car lorsque Kaba
apprendra la nouvelle, l'Apocalypse aura lieu au même moment.
Qui est Kaba? C'est notre
mère. En fait, en regardant un dessin animé il y a quelques années, le nom de
la sorcière dans le film nous a marqué. Cette sorcière se nomme Karaba. Nous
avons tout de suite pensé à celle qui nous a mise au monde. Mais pour ne pas
qu'elle se sente insulté en apprenant l'affaire, nous avons coupé le nom et
l'appelons simplement Kaba. Pourquoi ? Parce qu'elle ressemble à une lionne
toujours prête à bondir sur sa proie. Et parce que tout le monde dans la
famille et dans le quartier l'a craint plus que tout. Donc, voilà, on l'appelle
Kaba au lieu de Karaba. Bref, toute une histoire.
J'ai dit que c'est notre mère,
oui. Mais elle ne m'a pas élevée. Je suis Tania. Ma sœur Pupuce et moi, sommes
jumelles. Nous sommes nées en mi-mai, il y a 18 ans maintenant. À l'annonce de cette
grossesse, Nzigou Etienne, notre géniteur, a pris la poudre d'escampette et est
allé se terrer du côté de Mbigou, dans le sud du Gabon. C'est ainsi que notre
mère, qui en réalité se prénomme Agnès, s'est retrouvée toute seule, sans
travail, sans argent, avec une grossesse gémellaire de 5 mois.
Est alors arrivé dans sa vie,
le sauveur, du nom de Malgloire Akendengue. Il a payé la layette et tous les
frais médicaux pour le suivi de la grossesse. Et à notre naissance, il nous a
officiellement reconnues à la mairie du 2nd arrondissement de Port-Gentil.
Je suis Tania Akendengue.
Pupuce se nomme Marjorie Akendengue. Mais comme le sort s'acharnait encore,
madame notre mère a abandonné, monsieur notre très cher père, car il la
violentait sérieusement, au point de lui casser le bras, après avoir pris une
cuite, un samedi, au bar du coin. Son bras cassé et son œil au beurre noir,
Kaba a quitté monsieur Magloire Akendengue et a cogné, à 3h du matin chez sa
sœur Bernadette, avec une valise et deux bébés de 3 mois dans les bras. C'est
là que ma vie devait commencer. Pour le meilleur.
Quand 3 mois plus tard, Jimmy
Mbeng est arrivé dans la vie de Kaba, elle lui a fait chanté la sérénade un an
durant. Elle ne voulait surtout pas revivre les mêmes histoires qu'avant. Alors,
elle a fait traîner l'affaire en longueur avant de lui dire oui. Nous avions 1
an et demi Pupuce et moi, quand la famille Mbeng est descendue de l'estuaire
pour venir enlever notre mère à sa vie de célibat. Elle s'est mariée à la
coutume, à la mairie et à l'église. Alors, elle a fait traîner l'affaire en
longueur avant de lui dire oui. Et est très strict dans sa vie au quotidien et
dans sa manière de nous élever.
Et moi alors?
Avant que le mariage de Kaba
ne soit célébrer, ma tante Bernadette, qui en fait s'occupait de nous plus que
ne le faisait Kaba, s'est mise à genoux devant sa sœur. Une nuit durant, elle
l'a suppliée de lui laisser un enfant. Kaba n'a pas joué la difficile: elle a
dit oui. Elle m'a alors donnée à sa sœur, qui malheureusement était stérile.
C'est ainsi que la tante Bernadette, est devenue ma man à moi; et Kaba est
restée celle de Pupuce.
Et je ne m'en porte pas plus
mal; car lorsque Kaba rugit, pupuce atterri toujours dans la maison de
Bernadette.
Donc pour moi, maman c'est
Bernadette. Et Papa, c'est le cher monsieur Akendengue, qui malgré toute la
boisson qu'il ingère chaque jour, joue son rôle de paternel. Il paie notre
scolarité et il nous donne chaque mois 35mille francs d'argent de poche, pour
que nous puissions payer le taxi pour se rendre au lycée.
Ma sœur et moi sommes en
classe de terminale au lycée Raponda Walker. La scolarité lui coûte plutôt
cher, mais comme nous sommes ses uniques enfants, il fait de son mieux.
Monsieur notre papa est magasinier dans une compagnie pétrolière. Il est
célibataire, par la force des choses: monsieur cogne dur sur les femmes
lorsqu'il est ivre. Qui peut supporter un tel homme !
Un jour, quand nous avions 10
ans, nous étions passées lui dire bonjour. Ses parents étaient là dans la cour.
Il y avait réunion de famille parce que trop c'était trop, aux dires de nos
tantes paternelles. Il fallait trouver une solution à la situation de Magloire
Akendengue. Beaucoup d'idées ont fusé. Et quelqu'un a décidé qu'il devait se
faire initier au rite OKUYI. Yo!
Pupuce et moi nous avons ri ;
pourtant nous n'avions que 10 ans! Lui, se faire initier??? Nous pensions déjà,
avec notre espièglerie, que se serait Okouyi qui aurait peur de notre père et
qui s'enfuirait en le voyant.
Cela n'a pas raté. Les
provisions ont été acheté, le passage pour Lambaréné, payé. Le vendredi matin
au port d'embarquement, la famille à attendu notre père en vain. Il avait été
hospitalisé la veille à l'hôpital Paul Igamba. Quelqu'un l'avait ramassé en
route, en état d'ébriété avancé.
C'est notre père. Nous
demandons tous les jours à Kaba de prier pour que Dieu jeté un regard
compatissant sur lui et le remette sur de bons rails. Mais Kaba, n'en a plus
rien à foutre de notre paternel et elle nous répond immanquablement : ce
soûlard, même en enfer, il n'en voudrait pas, car il est capable d'éteindre les
flammes par son haleine avinée.
Yo!
Que dire après ça!?
2-
Je vis avec ma mère au château
d'eau, juste en face de l'église St Paul. Ma mère est instructrice dans une
école primaire privée. Elle a élevé deux enfants : mon frère Julien et moi.
Julien est l'enfant laissé par Berthe, la sœur cadette de maman. Il avait 4 ans
quand sa mère est morte. Il en a 14 aujourd'hui. Nous sommes très proches lui
et moi. Pour rien au monde, je n'aurais quitté ma mère pour retourner vivre
avec Kaba. Cela même si quand j'ai eu 12 ans, les gens de la famille éloignée,
ont voulu mettre leurs bouches dans nos histoires. Ils pensaient foutre le
désordre entre nous et créer la discorde en me racontant tout : ma venue au
monde, comment Kaba m'avait abandonnée à sa sœur et patati et patata. Ils
s'attendaient à ce que je me révolte et devienne impolie envers ma mère. Mais
ça n'a pas été le cas. Je savais que même si je n'étais pas sortie de son
ventre, cette femme m'aimait plus que tout. Je l'aime bien quand elle est dans
ses bons jours ;
Ma relation avec Kaba? Elle
est celle d'une fille envers sa tante. Je l'aime bien quand elle est dans ses
bons jours ; je la fuis quand elle pète les plombs.
Cette femme est dingue. Quand
elle se fâche, tout le quartier peut brûler. Et vous voulez que moi Tania, je
dise que c'est ma mère! Autant me casser une jambe.
Chaque fois que je vais passer
la journée chez elle, et cela, depuis que je suis petite, elle me rappelle
systématiquement que je dois rentrer chez moi. Bref...
Kaba et son époux, que nous
appelons papa Jimmy, vivent dans la Cité Rose. Il travaille à la maintenance
chez Total Gabon. Une fois mariés, ils ont aligné 7 gosses. Ne me demandez pas
comment ils s'y sont pris. La dernière, Angelline, a tout juste 3 ans. Elle est
belle comme un ange. Elle est venue clore le ballet des visites à la maternité.
Les autres, six garçons. Heureusement pour Kaba, ils sont brillants à l'école.
C'est ainsi que le premier, Eric, a eu le bac à 16 ans, un an avant nous ses
grandes sœurs. Monsieur est en Afrique du Sud en ce moment. Il nous envoie des
Whatsapp pour nous raconter sa vie. Tout pour nous rendre dingues et nous
donner la volonté de bien faire et de se casser enfin de Port-Gentil.
Avec les moyens de ma mère,
qui est célibataire, je ne sais pas où je vais atterrir. Mais je prie Dieu pour
aller à l'étranger. Comme ça, je ne vais pas rester derrière alors que les
autres auront des choses à raconter tant ils auront visité le monde. Je
travaille mon père depuis la 3ème. Il sait que je ne vais pas le lâcher. Je
veux aller à l'étranger. Au Ghana ou en Afrique du Sud. Et comme il est encore
en vie et qu'il ne boit pas complètement son salaire en fin de mois, il va
contribuer à ma réussite. Je ne suis pas Tania si je n'arrive pas à Pretoria.
Le plan, c'est que Pupuce et
moi, nous prenions le même avion à la fin de l'année. Mais là... Cette fille
est même comment!? De nous deux, elle est la plus sage. Moi, la plus folle.
Kaba se réjouit depuis des années du fait que j'ai atterri dans les bras de sa
sœur Bernadette. Elle m'aurait, selon ses dires, casser les deux jambes depuis
bien longtemps, si j'habitais chez elle. Elle ne se prive pas pour m'insulter
de long en large chaque fois qu'elle me rencontre en route, bras dessus bras
dessous avec mon mec, Miro. C'est un beau métis de chez métis. Avec des
fossettes et des cheveux frisés. Il ressemble à cet acteur qui joue dans la
série Les experts. Il va au lycée français. Son père, italien, est le directeur
d'une société de la place. Sa mère est congolaise ; ne me demandez pas où nous
nous sommes rencontrés, car je serais obligée de vous raconter mes coups
fourrés.
Bref...je vais en boîte de
nuit depuis que j'ai 14 ans. C'est comme ça! Ma mère n'en sais rien. Je fais le
mur, une fois par mois depuis que j'ai 14 ans. J'aime la musique.
Depuis que je suis toute
petite, j'ai cet instinct de danseuse. Elle m'aurait, selon ses dires, casser
les deux jambes depuis bien longtemps, si j'habitais chez elle. Mais de qui tient-elle
le don de la danse ?
C'était toujours moi la reine
sur la piste. Les tontons tournaient autour de moi et m'encourageaient en me
mettant des billets de 500 cfa sur le visage. Autant dire que j'en ai gagné des
compétitions de danse quand j'allais en vacances au village chez la grand-mère
Ziza.
Donc, c'est ainsi qu'il y a
deux ans, en arrivant en boite de nuit, je me fais alpaguer par ce type aux
yeux vert, beau comme un dieu grec. Qui allait laisser l'affaire ! Malgré mes
16 ans, j'ai dit au type : à partir d'aujourd'hui, c'est ton pied mon pied. Je
lui colle aux basques comme un chewgum. Lui et moi c'est pour la vie. Et je ne
blague pas. Je claque la fille qui ose s'approcher de lui. Chacun son chacun.
Je ne sais pas comment on fera
une fois que j'aurai le bac, mais pour l'instant, nous sommes bien ensemble. Et
j'ai mis ma mère Bernadette dans la confidence. Et elle m'a simplement répondu
: "n'oublie pas les capotes; il serait bête que tu tombes enceinte
maintenant!"
Et il fallait que cette zozote
que j'ai comme sœur, aille se vautrer avec son imbécile de Peter! Et
mademoiselle a oublié la capote. Comment Est-ce possible d'être
aussi....huuuuuuummmm! Je suis tellement énervée que j'ai envie de hurler.
C'était la première fois, la
toute première fois que j'emmenais ma sœur dans mes coups fourrés. Elle voulait
danser dans les bras du fameux Peter. Je l'ai invité à venir passer le weekend
à la maison. Sitôt que madame Bernadette, ma mère, s'est endormie, nous avons
pris la poudre d'escampette. J'ai répété les règles d'or à ma sœur :
1- On flirt, uniquement.
2- On ne couche pas.
3- Si jamais, il insiste, on
dit qu'on a nos règles.
4- S'il insiste plus, on lance
des appels de phare à sa copine ou à sa grande sœur.
5- s'il insiste malgré tout,
on le plaque sur la piste de danse.
Qu'est-ce qu'elle n'a pas
compris dans tout le vocabulaire que je me suis évertuée à lui sortir??? elle a
réussi à se préserver jusque-là. Madame est la première de la classe. Elle a
toujours marché droit. Même les petits trucs que je fais en cachette, elle a
toujours eu peur d'essayer. Et là...elle décide de perdre sa virginité dans une
salle de classe !
Je suis effondrée. Je sais que
quand Kaba apprendra l'affaire, elle viendra me couper le cou. Elle me l'a déjà
dit : "Tu essaies d'entraîner ma fille dans tes conneries et tu ne me
reconnaîtras pas, car toi et moi, nous allons porter des shorts et nous battre
là, dans cette cour. "Tu essaies d'entraîner ma fille dans tes conneries
et tu ne me reconnaîtras pas, car toi et moi, nous allons porter des shorts et
nous battre là, dans cette cour. C'est vous dire combien de personnes
assisteront au spectacle.
En fait, j'ai dit à Pupuce que
je vais commander son cercueil, mais c'est un cercueil xxl qu'il faut, car Kaba
va nous enterrer toutes les deux.
Qui va dormir cette nuit!
Après une telle nouvelle, même si j'avale toute une bouteille de black Jack,
l'affaire va rester là, pendue en plein sur mon visage. Comment ma sœur a pu
être aussi bête ? Une fille aussi brillante ! Avec tous les gars de son niveau
qui sont là à lui tourner autour, elle préfère aller sortir avec ce cancre de
Peter qui repasse le bac pour la 4ème fois? Il a la côte au lycée. Les filles
lui tombent dans les bras. Il n'a pas besoin de faire d'effort. Le gars est
beau, tellement beau, que... pardon, je ne l'ai même pas regardé ! Un
rigolo complet. Monsieur pense que parce qu'il est le meilleur basketteur de la
ville, il a le droit de faire tomber les petites comme il veut. Il va avoir 20
ans, et tout ce qui l'intéresse, c'est de battre le record de filles passées
dans son lit. Et c'est d'un type comme ça que ma sœur est tombée amoureuse !
Comme quoi, LES CONTRAIRES S'ATTIRENT VRAIMENT!
Je suis dépassée.
Comment va t-on se sortir de
ce guêpier ?
3-
Je tourne en rond dans ma chambre.
Mon frère Julien dort déjà. Je me glisse dans sa chambre et m'assois sur son
lit. Je le réveille.
"Eh, capitaine, j'ai
besoin de te parler."
"Je dors, repasse demain
matin.
"Please, fais pas le
beau! Le moment est mal choisi."
"Quoi encore. S'il te plaît,
j'ai pas envie d'entendre tes bêtises au sujet de ton gars, pardon."
"C'est plus grave que ça.
C'est une question de mort ou de mort."
"En fait, c'est déjà
mort, et tu espères qu'une parole de moi ramènera la situation à la vie, n'est-ce
pas."
"Tu comprends toujours
tout, frangin. C'est pour ça que je t'aime."
"Eh Tania, je te signale
que je n'ai que 14 ans. Je ne sais encore rien sur la vie."
"A d'autres, capitaine. Écoute-moi
au moins."
"Fais court, s'il te
plaît. Le sommeil t'attend."
"Voilà, la frangine est
enceinte."
"Qui, toi! Oh, c'est pas
grave! Le boss de ton gars est DG. Il s'occupera de tout. Alors, laisse-moi
dormir."
"Mais, non, patate! Il
s'agit pas de moi. C'est pupuce."
"Oh, oh, oh, oh!
Laisse-moi d'abord faire mes prières. Avant de te répondre. Agnambiè*, c'est
vrai ce que tu dis là?"
"Est ce que j'ai le
visage de quelqu'un qui cherche à blaguer! L'heure est grave."
"Attends frangine, je
vais compter ce qu'il y a dans ma tirelire et je cours de ce pas à CASEPGA
acheter un cercueil. Pupuce et toi, considérez que vous êtes mortes. Quand Kaba
va apprendre sa, soit elle vous pend, soi elle vous égorge. Dans les deux cas,
vous aurez besoin d'un cercueil. Et comme vous êtes jumelles, autant nous faire
faire des économies, un seul cercueil, et une photo, vous vous ressemblez
tellement!"
"Merci pour ton
soutien".
"De rien, frangine.
D'habitude, j'ai de bonnes idées pour résoudre les problèmes. Mais dans cette
histoire, je ne mettrai pas mon nez que je sais que ça finira par un carnage.
Mais vraiment, Pupuce n'a pas peur du feu !"
"Je me suis fait la même
réflexion."
Je me demande comment cela a pu arriver. La
bêtise qu'on attend de toi, c'est elle qui l'a fait !"
"Merci pour le compliment
! Je sais que je suis boucanière, mais de là à attendre le pire venant de moi,
il y a un fossé."
"Non, ma vieille joue pas
avec moi. On se connaît. Donc comme ça, tu as entraîné la frangine dans tes
chemins de traverses et tu l'as perdue en route."
"Comment sais-tu que
c'est moi qui l'ai entrainée."
"Tu m'a raconté la
soirée, Tania. Tu m'as dit que vous vous êtes perdue de vue. C'est faux!"
"Oh, pardon, ne remues
pas le couteau dans la plaie. Je me demande comment cela a pu arriver."
"Toi aussi, quand tu
emmenés la frangine comme ça, explique-lui le bizz. Mais s'il te plaît,
surtout, n'essayez pas d'arranger ça toutes les deux."
Toutes les capotes que maman t'achète là, tu
aurais pu lui en refiler une. N'enfonce pas plus le couteau."
"Bon, bon. Le seul truc
que je vois là, c'est dormir cette nuit. Repose ta tête. Et demain, il faut
qu'on en parle à maman. Il n'y a qu'elle qui pourra trouver une solution. Mais
s'il te plaît, surtout n'essayez pas d'arranger ça toutes les deux. S'il te
plaît."
"Pourquoi dis-tu
ça?"
"Je le dis parce que je
connais ces tours de passe-passe que les filles utilisent maintenant pour
enlever les grossesses. N'y pensez même pas! Si jamais vous le faites, je ne
vous parle plus."
"Ok, ok. Je n'y avais
même pas pensé. D'accord. Je vais dormir."
"Au fait, quand a t-elle
su qu'elle est enceinte ?"
"Cet après-midi. C'est
moi qui ai acheté les deux tests de grossesse qu'elle a fait."
"Oh! C'est bête. Vous
avez le bac à la fin de l'année. Qu'est-ce qui lui est passé par la tête?"
"Je me suis posée la même
question et je n'ai pas de réponse."
"Ah, les novices, c'est
comme ça. A force de rester enfermée dans la maison de Kaba, elle a goûté à la
liberté une fois et voilà!"
"Merci d'enfoncer le
clou."
"Non, frangine, excuse-moi.
C'est que je tombe des nues."
"Et moi donc."
Qui va dormir cette nuit!
Qui m'a dit d'emmener Pupuce à
cette fête?
D'habitude elle vient dormir à
la maison. Quand j'escalade la fenêtre de ma chambre pour aller dans mes
choses, mademoiselle reste sagement dormir tellement elle a peur du coup de
poing de Kaba. Et cette nuit-là, je lui ai dit qu'elle devait cesser d'avoir
peur. Et voilà...la peur et partie et le bébé est rentré.
Qui peut dormir cette nuit.
Je vois déjà les grosses
fesses de Kaba sur mon petit corps.
Mamaooooo! Qui m'a dit
d'emmener la fille de l'autre à cette fête.
C'était beau.
Le préau avait été décoré.
La musique était percutante.
Le vent venait nous
chatouiller les pores alors qu'on se trémoussait sur la piste.
Fallait me voir! Qui pouvait
m'attraper.
Qui peut m'attraper quand
P-square dose à fond dans la sono et que les lumière-là, encense la piste.
Je n'avais plus le temps de
personne.
La musique me fait cet effet.
Et même mon cavalier, le mec
le plus beau de Port-Gentil, avait du mal à suivre mon rythme.
Et j'étais tellement lancé que
je ne me suis pas rendu compte que ma teubée de sœur suivait cet ANIMAL de
PETER NKOUENDI dans une salle de classe.
Vraiment... J'ai mal à la
tête.
Pas la peine de prendre
efferalgan, ça ne passera pas.
Il faut que j'appelle ma
grande copine Jileska Ngome, pour qu'elle me trouve deux trois solutions pour
me remettre les idées en place.
"Frangine, c'est quoi ce
dérangement à 23 h. Y en a qui pionce"
"Arrête ton char et
réveille toi."
"Allez, dis-moi tout.
Qu'est ce que le beau Miro t'a encore dit."
"Là, il ne s'agit pas de
Miro. En fait, j'ai juste besoin que tu me remontes le moral en me racontant
des conneries."
"Oh, là! Il est 23h. A
moins que tu n'aies envie de te suicider, tu n'as pas le droit de me déranger à
cette heure."
"Vas mourir."
"Je t'aimmmme oh.."
Jileska a au moins le mérite
de me faire rire à chaque fois.
Je décide de passer en mode
whatsapp avec mon chéri, mon Miro.
"Hey, baby!"
"Oui, ma belle. Tu dors
pas."
"Non, besoin de tes
baisers."
"Oh, gourmande"
"Je t'aime."
"Dix fois plus."
"Bonne nuit."
"A demain. Je t'embrasse
fort mon ange."
Et là, le sommeil m'emporte.
Nous sommes en 2015 et la
barbarie existe encore.
Je me suis levée ce matin avec
la pêche.
Je me suis dit, pas la peine
de tergiverser.
Je me suis directement rendue
dans la chambre de Bernadette.
Elle faisait son lit comme
tous les dimanches à sept heures.
Elle faisait son lit comme
tous les dimanches à sept heures.
"il faut qu'on parle,
maman."
"Qu'est-ce qu'il y a? m'a
t-elle répondu paniquée.
"Euh...Je..."
"Parle! Je
t'écoute."
"Promets-moi d'abord que
tu ne vas pas te fâcher."
"C'est promis.
Maintenant, parle."
"Voilà, euh..."
"Tania Akendengue, je
t'écoute.
"Je...bon, voilà...il y
que Pupuce...euh..."
"Oui."
"Elle est enceinte,
maman."
"Ce n'est pas vrai!
Pupuce. Tu dois te tromper de personne. Ne serait-ce pas toi, par hasard."
"Merci pour la confiance,
eh!"
"Arrête ton char et
raconte."
"Elle est enceinte.
Voilà."
"Comment ça, voilà! C'est
ce que tu diras à ta tante quand elle demandera des explications ?"
"Mais pourquoi me
demandera t-elle des explications, maman? Qu'est-ce que j'ai à voir dans tout
ça."
"Oh, arrête espèce de
poltronne. Ta sœur ne peut pas en arriver à cette extrémité sans ton aide.
C'est toi la filoute dans l'affaire."
"Maman, je te promets que
..."
"N'en rajoutes
pas."N'en rajoutes pas. C'est sûrement toi qui tenais la lampe torche
pendant qu'elle faisait ses bêtises ! Je vous connais."
"Bien, étant donné que tu
m'as déjà crucifiée, on fait comment pour se sortir de là?"
"Et bien, il va falloir
avancer avec intelligence. Je connais ma sœur, elle sortira son couteau pour
vous vous égorger comme des porcs, une fois qu'elle saura la nouvelle. Il faut
que je réfléchisse."
Là, elle s'est arrêtée de
parler. Elle a fait les cent pas dans la chambre, dix longues minutes. Puis:
"Je vais à l'église. Toi,
tu ne bouges pas d'ici. Appelle ta sœur, qu'elle vienne ici cet après-midi. Je
veux discuter avec elle. Mais s'il vous plait, enlevez-vous déjà de la tête
toutes idées d'avortement. Je ne mange pas de ce pain."
"Ok, la vieille. On y a
même pas pensé."
"Ok. Dieu n'a mis aucun
enfant dans mon ventre ; alors jamais je n'aiderai quiconque à en tuer
un."
"Ok, la vieille.
Peace!"
"Peace, toi même. Sors de
ma chambre et va faire le ménage."
4-
La vieille est partie pour la
messe de 8 heures. Je suis restée à faire le ménage en musique. J'écoutais
Davido à fond. Mon frère Julien est sorti de sa chambre à 10 heures.
"Je vais au Cap avec des
amis. A ce soir. Tu me raconteras. Ciao."
"Et la vieille, elle
t'étrangle à quel moment ? A ton retour ? Dépêche-toi de faire la vaisselle
avant de partir. J'ai balayé toute la maison ainsi que la cour."
"Oh! Franchement, c'est
pas cool ça! Fais-le pour moi, please."
"Pas de please, qui
tienne. Fais la vaisselle avant de partir sinon je te vends à la vieille."
"C'est pas top, ça! Il
faut que je me trouve une petite amie. Elle viendra t'aider pour les travaux de
la maison."
"Tu es vraiment malade.
Parce que monsieur est trop paresseux, il faut qu'on l'aide, c'est ça?
J'aimerais bien voir la fille qui acceptera ça."
"Laisse, elles tombent
toutes pour moi. C'est parce que j'ai trop de respect pour mon corps, que je
n'ai pas encore cédé. Mais dans deux ans, la vieille n'aura plus de souci à se
faire. Elles vont s'aligner devant la maison pour venir faire le ménage et la
cuisine ici."
"C'est ça! Rêve
toujours!"
Je suis tranquillement là
faisant mon ménage quand j'entends cogner au portail. Je me dépêche de me mirer
un coup avant d'aller ouvrir.
Et heureusement que je me suis
mirée.
Qui est devant mon portail
avec un large sourire aux lèvres ?
Miro.
"Hey, salut beauté. Je
passais te faire un coucou."
"Tu es fou ou quoi? Ma
mère ne va pas tarder. Je te signale qu'elle est à l'église juste en
face."
"Et alors. Je me fous pas
mal qu'elle nous vois ensemble ! Comme ça, elle verra que je suis fou de
toi."
Ce type-là est même comment !
Est-ce que c'est le moment de se faire flinguer par Bernadette ? Pardon, je ne
veux pas de bruit aujourd'hui. Avec l'affaire de Tania, Pupuce, elle va se dire
que c'est contagieux et que moi aussi, je ne vais pas tarder à tomber enceinte.
Donc, vite vite. Je roule deux pelles à mon mec et puis, je le remets très vite
dans la Pajero, que conduit son chauffeur.
"Dans 6 mois, tu ne
pourras plus me rembarrer, ma belle."
"t'as bien dit dans 6
mois, mon beau. Pour l'instant, rentre tranquillement chez toi. On se voit à
17h. Même endroit.
"Je t'aime, beauté."
La voiture partie, je souffle
un bon coup.
Je repars à la maison.
Madame ma mère arrive 2
minutes plus tard.
"Tania Akendengue,
peux-tu me dire qui tu embrassais devant mon portail ?"
Et merde ! Il faut une
explication de texte ! Je suis nulle en français le dimanche matin...
"Alors, mademoiselle. Qui
est ce jeune homme."
"C'est
que...maman...je...bon, c'est mon copain, voilà!"
"Tu n'as pas besoin de
crier. La prochaine fois qu'il viendra ici, fais-le assoir au salon. Je veux
discuter avec lui."
"Mais maman, c'est quoi
cette affaire. On est juste comme ça. Maintenant, tu parles de discuter avec
lui."
"Ta sœur aussi est juste
COMME CA avec le type avec qui elle sort. Et regarde où on en est."
"Mais la vieille, tu dois
comprendre certains codes. On ne présente pas son petit ami à sa vieille, à
moins que..."
"Tu vas devoir déroger
aux règles. Je veux voir ce jeune homme assis dans mon canapé la prochaine fois
qu'il est dans le coin."
"Mais, toi aussi, la
vieille. Est-ce que je t'ai déjà déçue ! Aie confiance en moi."
"J'ai confiance en toi,
ma chérie. C'est en lui que je n'ai pas confiance. Quand je vois une grosse
voiture s'arrêter devant chez moi, j'ai des raisons de m'inquiéter."
"C'est même pas sa
voiture, la vieille."
"Donc, s'il vole les
voitures, j'ai raison de m'inquiéter ?"
"Hummm! Là, tu vas
chercher loin. Bon, d'accord. Je vais lui dire. Mais n'essaie même pas de lui
poser des questions bizarres, hein! Je n'ai pas envie qu'il me fuit juste parce
que ma mère est vieux jeu et veux s'immiscer dans ma vie privée."
"Mais ma chérie, tant que
tu habites sous mon toit, tu n'as pas de vie privée ! La vie privée
commence quand on a le bac."
"Ok, ok, la vieille. Mais
une fois le bac en poche, je crois que je vais faire des choses que tu risques
de regretter."
"Et je vais pouvoir te
fendre le crâne en deux si tu ne réussis pas à l'université."
"Mais franchement maman,
je ne te comprends plus. Tu me dis qu'une fois que j'ai le bac, je peux
profiter de ma liberté. Et maintenant tu veux encore la restreindre???"
"Tu parles un peu trop ma
chérie. Tant que tu es ma fille, tu as l'obligation de réussir. Point à la
ligne."
"Ok, Chef. Je vais faire
à manger. Tu peux te reposer devant la télévision."
"C'est ça. J'ai pas envie
d'avoir une gastrite."
"Huuuummm! La confiance
règne."
Ma mère consent à se reposer
devant une série télé pendant que je m'affaire dans la cuisine. Au menu : un
poulet rôti, des pommes sautées et un bouillon de bongo debout avec du bon
manioc.
Julien arrive dans la cuisine
et me lance: "On se capte tout à l'heure. Les potes m'attendent."
Il est midi quand Albert et
son épouse Georgeline arrivent.
J'ai déjà mis la table.
En règle générale, ils
s'arrêtent de manger avec nous le dimanche, en sortant de l'église. Georgeline
est une amie d'enfance de ma mère. Et Albert, son époux, enseigne dans la même
école que maman. Je connais déjà le sujet de discussion à l'ordre du jour: la
grève des enseignants.
Je pense que je vais manger en
silence. Ça vaudra mieux pour moi.
Qu'il pleuve ou qu'il vente,
dans 6 mois j'aurai mon bac. Et ensuite... quoi? Ah, oui. Après, je vais devoir
honorer la promesse que j'ai faite à Miro. Nous allons faire l'amour pour la
première fois, après la proclamation des résultats. Si j'ai mon bac en poche du
premier coup, je saute le pas.
Jusqu'à présent, je me suis
contentée de flirt. On dit, flirt poussé, il parait. Je lui permets de
m'embrasser, de me caresser les seins, de foutre sa main dans mon string. Et ça
s'arrête là. Je n'ai pas envie que Bernadette fasse une crise cardiaque en me
pinçant un jour nus, au lit avec Miro. Elle a beau jouer la maman évoluée et
m'acheter des capotes et tout, je sais qu'au fond, elle ferait une crise si
elle me voyait dans cette posture. Et puis, je n'ai pas envie de m'ajouter plus
de soucis que je n'en ai déjà. Je veux bien faire la folle en boite de nuit,
danser à n'en plus finir, mais c'est tout...le sexe, ça complique tout. Je l'ai
lu dans les livres. Je le vois à la télévision.
5-
Nous sommes en 2015. Et quand
vous avez une mère complètement folle, elle le reste à vie!
Ainsi donc, nous sommes en
train de manger quand le téléphone de maman sonne. Au bout du fil, Kaba.
On l'entend vociférer même à
50 mètres.
Mais qu'est-ce qui ne va pas
avec cette femme ! Jamais elle ne changera. Est-ce qu'elle a besoin de crier
comme ça au téléphone ?
Comme maman a peur d'avoir mal
aux oreilles, elle tient son téléphone portable à distance. On entend la voix
de Kaba et les invités et moi sommes à terre.
Madame Kaba s'en prend à tout
le monde : Dieu, la lune et la terre ! C'est terrible. Et cela me fous des
frissons dans le dos. Qu'a t-elle? Pourquoi autant de rage? Merde ! Je me mets
à prier en silence pour que tout aille bien pour ma sœur. Pourvu que rien ne
lui soit arrivé !
Cette femme crie tellement au
téléphone, que maman a du mal à lui répondre. Elle parle de tuer quelqu'un. De
quoi s'agit-il?
Maman est obligée de
raccrocher. Elle nous demande de l'accompagner à la cité rose. C'est grave,
d'après elle. Voilà que nous laissons à table, tout le repas. Nous hélons un
taxi et demandons une course pour la cité Rose. Arrivé là, nous nous hâtons
vers la maison de ma chère tante Kaba. Quand nous arrivons là... Un spectacle
inouï nous attend. Même dans mes rêves les plus bêtes, jamais au grand jamais
je n'aurais imaginé cela.
Nous sommes en 2015. Et si
votre mère est conne, il faut dire que c'est à vie.
Je suis obligée de crier.
"Elle est complètement
pétée cette femme ! Mais comment a t-elle fait pour avoir des filles aussi
équilibrée de Pupuce et moi. Elle est dingue maman."
Ni une ni deux, j'entends une
voix qui tonne derrière moi et me lance:
"C'est qui la pétée.
Redis ce que tu viens de dire."
Moi! Redire quoi? Pardon. Je
prends mes distances. Je suis à près de 100 mètres de cette maudite maison,
quand je me mets à crier:
"Tu es dingue mme Mbeng!
Faut te faire soigner."
C'est pas on a dit. Alors que
je pense taper, un rallie sur mes deux pieds, je vois une voiture derrière qui
me suis. La voiture s'arrête à ma hauteur et là, kaba sort de la et me court
après. Mon Dieu, neuf gosses et madame est fine comme une jeunette. La voilà
qui me saisit par le col de ma robe.
"C'est toi qui a entraîné
ta sœur, n'est-ce-pas? Y a que toi pour l'emmener des conneries pareilles. Tu
ne pouvais pas aller te faire baiser toute seule, il fallait que tu
l'entraînes."
Yo! Moi que rester sans voix.
Non seulement, elle me faisait un mal de chien au cou; mais en plus, c'était la
première fois qu'elle se montrait aussi grossière. Quand je pense que je sors
de son ventre, j'ai un malaise. Si au moins, elle me lâchait la robe !
"Tu vas me raconter ce
qui s'est passé, sinon, je te casse la gueule tout de suite."
Mais cette femme a quel problème
? Qui m'a même dit de venir ici! Voilà que les gens s'attroupent autour de la
voiture de Kaba. Ceux qui me connaissent, ri; les autres son outrés.
Il y en a qui osent lancer:
"Mme Mbeng, laisse
l'enfant. On ne règle pas les problèmes."
J'entends alors Kaba lui
répondre :
"Va d'abord t'occuper de
ta femme qui te trompe avec le voisin avant de venir parler de mes affaires, mr
Ossoria."
Yo!!!
Par le col de ma robe, elle me
ramène dans la voiture. Inutile de vous dire que tout le monde a vu mon string.
Je ne sais même plus si je dois être désemparée ou si je dois résister.
Retour à la maison.
Là, dans le manguier qui est
majestueusement à l'entrée de chez elle, Kaba, a attaché ma sœur par les bras
et les jambes. Il y a le soleil haut dans le ciel, et ma pauvre Pupuce est là,
toute nue, attachée, incapable de bouger, elle pleure.
J'ai le cœur défait. J'ai tant
de haine en moi, que j'ai envie d rosser Kaba. Elle me descend de la voiture
comme on traîne un vulgaire chiffon. Là, face à l'incompréhension générale de
ma mère qui cherche une paire de ciseaux pour détacher sa nièce et celle des
petits qui pleurent, je reçois une de ces gifles.
"Donc comme ça, tu as
estimé que le moment était bien choisi pour que ta sœur emmène un enfant au
lieu du bac ?"
Et regifle.
Là, Albert et Georgeline sont
obligés d'intervenir. Ils prennent Kaba par les bras et desserrent ainsi son
emprise sur moi. Vite, je me dépêche d'aller d'en la cuisine. J'en ramène un
couteau. Je vais vers le manguier où ma mère se bat déjà pour détacher Pupuice.
Ma soeur a changé de couleur. Son visage à tourné au violet. Je me demande
depuis quelle heure elle est attachée là.
"Pupuce, comment tu
vas?"
"Je...snif...je...Elle
m'a donné tellement de coups. J'ai mal à la tête."
Nous voilà toutes les deux
pleurant dans les bras l'une de l'autre. Ah, cette Kaba! Si je pouvais lui
foutre des coups.
"Fouttez le camp de chez
moi, les jumelles. Je ne veux plus vous voir ici."
"Mais qu'est-ce qui ne va
pas, mme Mbeng? Tu ne peux pas chasser ta fille comme ça!", s'insurge
Albert.
"Pourquoi pas. Est-ce son
incapable et alcoolique de père qui paie le loyer ici? C'est mon époux qui la
loge gracieusement. Je ne veux plus la voir ou je commets un crime."
"Mais, tu n'es pas
sérieuse!", s'insurge Georgeline.
"Qu'elle s'en aille d'ici
avant que je la tue avec mes coups. Elle pense que là où je suis là, j'ai de
l'argent pour nourrir une autre bouche!"
"Ah! Parce que toutes
celles que tu as dans cette maison, c'est toi qui les nourris ? Tu travailles,
où?", ai-je le courage de dire à cette fichue sorcière de Kaba.
Oyoooo!
J'aurais dû me taire.
La gifle qui atterrit sur ma
figure.
"On y va!", lance
maman. "S'il te plaît, arrête de gifler ma fille sinon, tu ne me
reconnaîtras pas."
"C'est ça, Bernadette. Sors-moi
ces deux bordelles d'ici."
6-
La petite Angelline apporte
une robe à Pupuce. Albert arrête un taxi et nous nous glissons dedans. Voilà
comment ma sœur et moi, nous arrivons chez nous.
Maman met de l'eau chaude dans
une bassine et arrive dans ma chambre, où Pupuce est allongée sur le lit.
"Je vais te masser le
corps. Ca ira mieux après. Ta mère est vraiment restée la même brute qui se
battait à la fin des cours quand nous étions petites ! Un véritable
sauvage."
"Maman, tu es sûre que
vous avez les mêmes parents ! Pourquoi Dieu lui a donné tous ces enfants-là,
alors que toi, tu es plus douce."
"Dieu a un sens de
l'humour bien particuliers, ma chérie."
Maman continue de masser
Pupuce qui ne sais plus ni quoi dire, ni quoi penser. Elle finit par s'endormir.
"Avec la mère qu'elle a,
je me demande pourquoi elle s'est risquée à tomber enceinte", me fait
maman alors que nous sommes au salon.
"Oh, je pense qu'elle n'a
pas réfléchi. Et puis, comme c'était la première fois, elle s'est surement dit
que c'était sans risque."
"Ah, bon ! C'est ce qu'on
vous apprend à l'école ! Que lors du 1er rapport vous n'avez aucun risque de
tomber enceinte ?"
"Non, non, non. Ce n'est
pas ce que je voulais dire."
"Ok. Il va falloir
retourner chez ta tante chercher les affaires de ta sœur."
"Ah ça, non! Elle va me
rouer de coups dès qu'elle me verra arriver. Dis maman, tu es sûre que c'est
sœur?"
"Oh ! Dis pas de bêtises
! Ta sœur aura besoin de ses affaires. Sa mère ne l'acceptera plus chez
elle."
"C'est fou quand même
!" elle avait à peine 20 ans quand elle est tombée enceinte de nous.
Est-ce que Mamie Ziza l'a bastonnée comme elle l'a fait pour Pupuce?"
"Oh! Surement pas. Jamais
ta grand-mère n'aurait fait ce genre de chose. Mais feu ton grand-père, si.
Heureusement qu'il était déjà décédé."
"Mais alors, pourquoi
s'est-elle acharnée sur Pupuce?"
"Parce qu'elle a vu tout
le gâchis que c'est que de tomber enceinte ç cet âge, alors que l'avenir
s'ouvre à elle."
"Ok. Ok."
"Je n'ai pas envie
d'affronter ma sœur aujourd'hui. On ira chez eux demain soir. Il nous faut
récupérer les affaires de Pupuce."
"D'accord maman.
Euh..."
"Oui, je t'écoute,
Tania."
"C'est que...euh..."
"Akendengue, c'est bien
la première fois que tu perds ta langue. Qu'est-ce qui se passe?
"Je vais faire un tour
tout à l'heure avec...enfin...euh!"
"Tu vas faire un tour
avec ce jeune homme qui te bouffait les lèvres tout à l'heure, c'est ça?"
"Maman! Tu as vraiment du
vocabulaire."
"Parle, je
t'écoute."
"C'est que, nous allons
juste faire un tour au bord de mer. J'adore aller me promener là-bas. Mais il
me ramène ensuite. Ne t'inquiète pas."
"Je veux le voir et lui
parler avant que vous ne sortiez."
"Non, la vieille.
J'aurais dû continuer à faire mes choses en secret, quoi!"
"Tu peux parler autant
que tu veux ma chérie, mais tu ne sortiras que si ce jeune homme vient
s'asseoir dans mon canapé."
"Mais, la veille, tu
comprends que c'est un guet-apens! C'est à peine si tu ne lui demandes pas de
me mettre la bague au doigt."
"Trêve de bavardages, ma
fille. Je vais me reposer."
Quand Miro arrive me chercher
à 16h, son chauffeur se gare juste devant mon portail. Je suis dans des
fraîcheurs telles que non, le gars est obligé de s'arrêter un long moment pour
m'admirer. Oui, c'est vrai oh, je suis belle comme ma fausse mère qui m'a mise
au monde. Elle est d'une beauté à couper le souffle. C'est la seule chose que
j'ai héritée d'elle.
"Hey, Bébé. Je vais finir
par être jaloux de ton miroir si ça continue."
"Sans blague Miro. Tu as
vraiment le sens de l'humour mon chéri."
"Viens là que je
t'embrasse!"
Oyo! Si Bernadette regarde par
la fenêtre de sa chambre... Je suis que gênée. Je l'embrasse rapidement et me
sépare de lui. Le gars ne l'entend pas de cette manière. Voilà qu'il se met à
manger mes lèvres, comme dit ma mère.
"Mon cœur, ma maman est
là. Elle regarde par la fenêtre."
"Qu'elle regarde, alors.
Elle verra combien de fois, je suis fou amoureux de sa fille."
Ah, les enfants des blancs!
Nos gars du quartier là, auraient déjà barré dès que j'aurais parlé de ma mère!
Lui, il insiste.
"Elle veut discuter avec
toi avant que nous sortions."
"Oh! Mais je ne peux pas
me présenter devant elle les mains vides. Euh...Attend. Je vais demander à
Samba de m'emmener quelque part, histoire de trouver quelque chose. Je t'aime.
"
Sur ce, il s'en va avec son
chauffeur.
Je retourne alors dans la
maison. Alors que je m'apprête à cogner à la porte de la chambre de ma mère,
elle ouvre.
"Oui, mademoiselle. Que
puis-je faire pour toi?", me demande t-elle avec un sourire.
"Rien. Je voulais
simplement te prévenir que Miro va arriver."
"Qui est Miro ? Le chien
du voisin ?"
"Oh, la vieille, tu
gazes. C'est mon petit ami."
"Ah ! Ok. Je m'installe
au salon, alors. Et ta sœur, où est-elle ?"
"Elle dort encore. Je pense
qu'elle est très secouée."
"Il y a de quoi. Ah, les
jeunes !"
Un quart d'heure plus tard,
monsieur le beau gosse qui fait bouger mon cœur, cogne à la porte d'entrée. Je
vais ouvrir. Et sans cérémonie, monsieur me gobe la bouche devant devant ma mère.
Ce type-là est même comment ? Me
voilà maintenant en train de me battre pour qu'il me lâche. Vraiment !
"Euh, Miro, voici Agnès,
ma maman."
"Oh! Enchanté madame.
Vous êtes resplendissante. Je vois de qui tient Tania."
Le gars-ci !!!
"Assayez-vous jeune
homme.", l'invite maman.
Il lui tend alors la bouteille
de vin blanc qu'il est allé acheter avec Samba, son chauffeur.
"Merci ! Vous avez du
goût, Miro."
"Oh, c'est une qualité
qui me vient de mon père. Il collectionne les grands crus."
Comme j'ai peur que ma mère me
foute la honte devant mon chéri, je décide de m'éclipser et de les laisser
seule.
Je ferme la porte du couloir
qui mène aux chambres, et je garde mon oreille collée derrière.
Et la conversation continue.
C'est donc comme ça que j'apprends que monsieur mon chéri, le plus gosse de
Port-Gentil a des intentions sérieuses envers moi. Huuuuummm! Pardon, je suis
que dépassée. Le type dit carrément qu'il attend que nous ayons le bac à la fin
de l'année et il me passe la bague au doigt.
À ce moment-là, j'entends ma
fragile petite maman dire : "des fiancailles, j'espère. On parle bien de
fiançailles, n'est-ce pas?"
Sans se démonter, Miro lui
répond :
"Votre fille sera ma
femme, peu importe le moment."
Atchoum!
C'est bête ! Je ne peux m'empêcher
d'éternuer. Voir moins
7-
Je rejoins ma sœur dans la
chambre.
Je la trouve assise sur le
lit, un oreiller dans le dos.
"Je pensais que tu
dormais encore.", lui fais-je.
"Je suis réveillée depuis
un moment. J'ai un peu faim, mais je n'ose pas sortir de la chambre. J'ai comme
l'impression que mon corps peut me lâcher à tout moment."
"Tu as si mal que
ça!"
"Les mots sont faibles !
Elle s'est acharnée sur moi, tu sais. Elle a attendu que papa Jimmy soit sorti
pour me rosser de coups."
"Mais, comment a t-elle
su?"
"Oh! Bête comme je suis,
j'ai jeté les deux tests de grossesse dans la poubelle de la salle de bain.
Alors, devine le reste."
"Cette femme est
terrible. Pire qu'un ouragan."
"Où est tante
Bernadette?"
"Figure-toi qu'elle
discute dans le salon avec Miro."
"Oh! Y en a qui ont de la
chance! Pas comme moi. Je viens d'appeler l'auteur de ma grossesse. C'est sa
petite sœur qui m'a répondu. Elle m'a dit qu'il est enfermé dans sa chambre
depuis une heure avec une certaine Sandra. Elle a osé me demander si je suis la
suivante. Comme si elle tenait son agenda."
"Ce type est un con. Te
prends pas la tête pour lui."
"Je suis amoureuse,
Tania. Tu peux le comprendre ça?"
"Non! Je ne peux pas
comprendre que tu sois amoureuse d'un imbécile. Tu vaux mieux que ça Pupuce."
"Et que dirai-je à mon
enfant? Que son père est un idiot!"
"Oh, merde! C'est un
détail que j'avais oublié!"
"Un détail. Ouais...un
détail."
"Ecoute, on va pas se
prendre la tête maintenant. La vie continue. Tu as un toit où te reposer. Maman
prendra soin de toi. Et tout ira bien. On ne change pas nos plans. Tu mets ce
bébé au monde et ensuite, à nous la vie de rêve à Accra."
"Eh ben! Et qui gardera
mon enfant."
"Réfléchis cinq minutes
Pupuce! Maman ne demande que ça, pouponner à nouveau. Elle sera ravie de garder
le petit. Ta vie ne va pas s'arrêter parce que tu auras un enfant!"
"Facile à dire Tania.
J'aimerais t'y voir."
"Je ne serais jamais à ta
place, Pupuce. Je serais incapable de vivre ce que tu ressens à cet instant.
Tout ce que je dis c'est qu'il faut garder l'esprit positif. Tu es une élève
brillante. Tu auras ton bac du premier coup. Ce qui ne sera peut-être pas mon
cas si je ne m'accroche pas plus à mes cahiers."
"Pourquoi ne suis-je pas
comme toi? Tu as toujours les idées claires!"
"Pupuce, tu ne peux pas
être moi. Sinon, tu ne seras jamais la première de la classe. A chacune de nous
ses qualités."
"Mais quand même ! On a
l'impression qu'on est pas née de la même mère. Tu tiens tellement de tante
Bernadette."
"Mama, on ne va pas
commencer à philosopher, tu veux. Ne me dis pas que tu tiens de Kaba et que tu
comptes aligner 9 gosses comme elle!"
"Non, bien sûr! Mais
j'aurais tant aimé être celle que Bernadette a choisi il y a 17 ans."
"Pardon, laisse-mo ma
mère tranquille."
"T'as vu! Tu reconnais
que ta vie est meilleure que la mienne, Tania."
"Tu fais chier, Pupuce.
Bon, je te laisse."
Je la plante là et retourne au
salon.
Je trouve là, ma mère et Miro
en pleine conversation. Ils rigolent comme des personnes qui se connaissent
depuis dix ans.
Huuummmm!
"Je parie que ma mère m'a
foutu la honte en te racontant toutes les bêtises que je faisais enfant."
"Pire que ça, ma jolie!
Elle m'a accordé ta main."
"Non, sans blague."
"Je lui ai tout raconter.
Ton mariage de rêve, là au bord de la mer. Et ta fameuse lune de miel aux
Bermudes."
"Mais tu racontes
n'importe quoi! C'est juste des délires comme ça! On va finir par croire que je
suis une arriviste!"
"C'est beau d'être
jeunes! En tout cas, miro, je suis heureuse de te connaître. Ainsi, ma fille
n'aura plus besoin d'escalader la fenêtre de sa chambre pour aller te
rejoindre."
"Maman! Mon Dieu, j'ai
honte."
"Ma chérie, tu penses
peut-être que je dors et que je n'entends rien, c'est ça!"
Vraiment, cette mère-là!
"C'est bon, maman! Tu m'a
grillée, c'est bon! La honte, quoi!"
"Je vous laisse, les
jeunes. Je vais voir une amie malade. Amusez-vous bien."
Maman s'en va et nous
abandonne dans le salon.
Miro en profite pour
m'embrasser.
"Elle est trop cool, ta
mère."
"Ouais, comme tu dis.
Elle est cool."
"Et si on allait se
promener au bord de mer."
"Un instant. Je vais
mettre mes chaussures et je suis à toi.
"Ok."
Un quart d'heure plus tard,
samba, le chauffeur, nous dépose au bord de mer. Main dans la main, nous
arpentons le rivage. J'aime écouter le bruit des vagues et regarder au loin,
les bateaux en transit. Miro me prend alors dans ses bras.
"Ma mère aimerait que tu
viennes déjeuner à la maison samedi prochain."
"Ah bon! Moi qui pensais
qu'elle ne pouvait pas me sentir."
"Mais pas du tout! Nous
avons parlé de toi hier soir. Elle souhaite mieux te connaître."
"Mais miro, nous avons
déjà déjeuner ensemble 3 fois. Et elle ne retient toujours pas mon
prénom!"
"Tu exagères, ma puce.
Elle sait que je tiens énormément à toi."
"Ok! Samedi, à 11h 30, je
serai chez toi."
"C'est sûr que tu y
seras. J'enverrai Samba te chercher."
"Huuuuummmm! La confiance
règne. Je te promets de ne pas me défiler. Mais dis-moi, que va t-elle inventer
cette fois pour me mettre mal à l'aise ! La dernière fois, le coup des
écrevisses ça a très bien marché."
Là, il éclate de rire.
"Je revois encore ta tête
face à ce plat. Heureusement que mon père t'a dit que tu pouvais manger avec
les doigts."
"Moque-toi de la pauvre
fille du quartier que je suis! Si elle me présente encore ce genre de choses,
je te promets que je ne mangerai qu'un bout de pain."
"Bon, là, j'avoue qu'elle
a pas été cool! Mais je pense que c'est un truc de femme. Vous aimez bien vous
tester. Et elle veut sûrement savoir jusqu'où tu es prête à aller pour avoir
son fils."
"J'irais sur la lune si
tu t'y trouvais. Je t'aime Miro."
"Moi, dix fois
plus."
Pardon, faut pas trop parler!
Le love là, c'est comme ça. Je suis trop maboule de ce type.
Là, ses mains sont maintenant
sous mon tee-shirt. Il cherche quoi, même !
Pardon, il embrasse trop bien.
J'adore foutre mes mains dans ses cheveux. Et j'aime l'entendre me murmurer des
mots doux en italien, là, dans mon oreille.
Et là, il me pose encore la
même question :
"Tu me tortures, tu sais.
Quand fera t-on enfin l'amour."
"Je te l'ai dit, mon
ange. Le jour de la proclamation des résultats du bac."
"Je pense que cette
nuit-là, je te kidnapperai et tu resteras ma prisonnière pendant une
semaine."
"Hummm! Je vois qu'il y
en a qui se surestime. Qu'est-ce que tu pourrais bien me faire pendant une
semaine."
"Laisse-moi te montrer un
avant-gout."
Bouchez vos oreilles et fermez
vos yeux.
Il n'y a rien à voir.
Donc, cinq secondes plus tard,
me voilà, moi Tania Akendengue, couchée là, à même le sable. Il y a la tête
d'un beau gosse métisse qui embrasse la peau, là de mon ventre et monte jusqu'à
mon soutien-gorge.
"C'est bon, c'est
bon...J'ai compris. "
"Et tu n'as encore rien
vu!"
"C'est ça! Je crois qu'il
y en a qui ont un peu trop d'expérience pour le jeune âge."
"Je préfère ne pas te
parler de mes expériences aux USA. Sinon, je suis sûr que tu m'égorgeras."
"Là, tu as raison. Je ne
veux pas entendre parler d'une autre fille. Sinon, je t'étrangle."
"Vraiment, cette
gabonaise! Tu me rends complètement maboule."
"Je préfère ça,
monsieur."
Il est 19h quand le chauffeur
de Miro me dépose devant la maison. Maman n'est pas encore rentrée. Je trouve
Julien et Pupuce qui jouent au scrabble au salon.
"Bonsoir les
jeunes!" fais-je en rentrant.
"Bonsoir, la
vieille.", me répond Julien.
"Tu sors d'où?",
demande Pupuce.
"J'étais au pays des
merveilles avec mon prince charmant."
Je les laisse là et vais
prendre une douche.
À table, une heure plus tard,
maman nous raconte comment elle est allée chez Mr et Mme Mbeng. Kaba était
sortie. Elle a donc discuté avec papa Jimmy. Elle voulait avoir quelques
affaires pour Pupuce et surtout ces cahiers et livres. Papa Jimmy lui a
répondu: "Aucune affaire ne sort de cette maison. Je n'ai pas chassé
Pupuce de chez moi. J'attends donc son retour."
Et Pupuce de dire: "Je ne
retourne pas là-bas. Sa femme va m'achever avec ses coups. Je ne serai en
sécurité là-bas que lorsque Papa Jimmy sera à la maison. Le reste du temps, je
serais à la merci de Kaba. Non, je préfère rester ici. Je vais me débrouiller
pour les cahiers et les livres."
Et maman de conclure que Papa
Jimmy est vraiment atterrée par le fait que son épouse ait pu lever la main sur
sa fille enceinte.
"Il m'a dit que dès que
tu accouches, cet enfant vivra sous son toit."
"Les fangs et les
enfants..." conclut Julien. Voir moins
8-
Dix jours plus tard. Je suis
dans la chambre avec Pupuce. Madame fait la tête depuis l'après-midi. Me voilà
obligée de la secouer pour savoir ce qui ne va pas. Et elle me répond:
"Je ne sais pas si j'irai
jusqu'au bout. Je ne me sens plus motivée comme avant."
"Ca veut dire quoi ça !
La motivation, on la perd si vite ! Je te signale qu'on doit décrocher ce bac à
la fin de l'année. Ensuite, on fly vers d'autres horizons."
"Où irons-nous Tania? Y
arriverai-je ? Tu rêves beaucoup, tu sais. Un peu trop pour moi."
Là, je suis obligée de
m'énerver franchement. Ce n'est pas à moi qu'elle va saper le moral
aujourd'hui. Elle peut tuer son optimisme ; pas le mien.
"Là où tu me vois là,
Marjorie Akendengue, j'ai beaucoup de rêves dans la tête. Je ne sais pas
comment je vais les réaliser, mais je ne m'empêche pas de rêver. Si tu as
décidé que ta vie doit s'arrêter parce que tu es enceinte, c'est ton affaire.
Je t'abandonne là au bord de la route, net."
"Comme tu es méchante
Tania. Je te disais juste que je me sens gêné en classe. je..."
"Gênée de quoi! Ton
ventre ne se voit même pas. Tu diras quoi dans deux mois? Que tu abandonnes
l'école!"
"Non, tu comprends
pas."
"Ah, pardon. Y a rien à
comprendre. Tu as un lit où dormir, tu as à manger à midi, tu a de quoi payer
le taxi pour aller à l'école. C'est quoi le problème ce soir."
"tu ne me comprends
pas."
"Je n'ai pas envie de te
comprendre. Je te signale que ma grande du cœur, Jileska, a eu un enfant en
5ème. Ça n'empêche que nous sommes toutes en terminale aujourd'hui. Tu
t'imagines, elle n'avait que 14 ans!"
"Snif...ce n'est pas
pareil ! Sa mère ne l'a pas mise à la porte, elle."
"Ah! Si je comprends
bien, c'est le sein de Kaba que tu veux retourner téter!!!! Qu'est-ce qui ne va
pas dans ta tête?"
"Ce n'est pas ça! C'est
juste que...snif! J'ai appelé Peter plusieurs fois. Il a changé de numéro de
téléphone. Il ne cherche même pas à savoir si je vais bien."
"Ah, c'est ça! Désolée,
Pupuce. Ca ira. Garde la tête haute. On bosse à fond les cours. On décroche le
bac. Tu accouches. Et on déguerpie de Pog. Il faut qu'on aille ailleurs un peu
voir comment est la vie là-bas."
"Qui te dit que j'ai
envie d'aller ailleurs ? Qui te dis que je ne serais pas mieux ici."
"Mais qu'est-ce qui ne va
pas chez toi! Tu veux maintenant rester ici à cause de cet imbécile qui cours
après tous les jupons à la ronde. Parait même qu'il a engrossé une fille du
collège Évangélique."
Et merde! Avais-je besoin de
lui sortir cela comme ça! Ca fait une semaine que j'ai l'info et voilà que je
la lui balance comme ça!
Et la voilà qui fond en
larmes. Mon dieu, qu'est-ce que je suis allée encore ramasser.
"Tu dis n'importe quoi,
Tania. Tu inventes des histoires juste parce que tu ne le supportes pas."
"Oyooooo!!! C'est quoi
cette affaire. Donc, maintenant, j'invente des histoires! Pardon, je vais
dormir au salon. Tu peux occuper tout le lit?"
Cette fille est même
comment????
Ça fait seulement quelques
jours qu'elle est à la maison et elle se plaint de tout. Elle ose me demander
comment je fais pour faire la vaisselle tous les matins avant d'aller à
l'école. Obligé de lui dire qu'elle n'a qu'à laisser les assiettes et que je
les laverai moi-même. Si la ménagère chez les Mbeng fait tout, chez ma mère à
moi, il n'y a pas de ménagère. Bernadette fait à manger tous les jours. Elle
s'arrange à ce que nous trouvions les marmites prêtes quand nous rentrons de
l'école. Elle s'assure que nous avons de quoi payer le taxi. Et cela me suffit.
Elle ne fait pas autant de bruit que Kaba. Donc, j'étais obligée de dire à ma
princesse de jumelle que si elle est fatiguée de faire la vaisselle le matin,
elle n'a qu'à prendre ses affaires pour retourner dans sa belle maison à la
cité Rose.
Vraiment!!!
Deux semaines plus tard.
Marc-Elise, une frangine du
quartier, m'interpelle alors que je sors de ce cours de philosophie. Elle est
en terminale A2 avec Pupuce.
"Ma go, mais la frangine
ne vient pas en cours depuis 4 jours. J'ai oublié depuis là de te demander si
elle est malade."
"Comment ça, elle ne
vient plus en cours? On quitte la maison, toutes les deux tous les jours? On
arrive ensemble devant l'école."
"Je te dis qu'elle ne
vient pas en classe en ce moment. Le professeur de français a remarqué
l'absence de son élève préférée. Tu sais bien que sans elle en classe, le cours
de français et le cours d'anglais sont nuls!"
"Huuuummmm! C'est quoi
cette histoire?"
"Yo! J'explique,
j'explique et tu ne comprends pas. Je te dis que Pupuce ne vient plus en
classe. Est-ce qu'elle est malade."
"Non, elle n'est pas
malade. Elle veut juste sécher, c'est tout."
"Franchement! Cette
manière de sécher, aussi!!! en terminale. Ca, c'est des trucs qu'on faisait en
4ème. Mais là, c'est la dernière ligne droite!"
"Comme tu dis,
Marc-Elise. Comme tu dis."
Nous marchons ensemble
jusqu'au quartier en nous racontant des bêtises. Avec Marc-Elise, jamais rien
n'est sérieuse. C'est un déconneuse de première. Quand on arrive devant la
maison, elle me dit au revoir et ajoute:
"Pardon, dis à Marjorie
Akendengue que si elle, elle abandonne là, nous c'est même pas la peine de
continuer. Depuis quand la première de la classe par défaitiste pour la
bataille!?"
"Je le lui dirai,
t'inquiète."
Il est quatorze heures. La
maison est silencieuse. Je pense trouver Pupuce à la maison, mais elle n'y est
pas. Donc, cette fille-là me roule tous les jours alors que je la crois en
classe! Comment Est-ce possible? Elle va où? Elle fait quoi?
Je suis là en train de
réfléchir quand maman arrive.
"Oh, bonjour Tania. Où
est ta sœur."
"Ah, la vieille, je vais
pas te mentir. Une copine me dit que Pupuce sèche les cours depuis quelques
jours."
"C'est quoi cette
histoire? Où est-elle?"
"Je n'en ai aucune
idée."
"Oh! Je n'aime pas ça du
tout! Où passe t-elle ses journées ?
"Je n'en ai aucune idée.
Je tombe des nues moi aussi." Voir moins
9-
Maman est tellement inquiète
et frustrée qu'elle me demande d'aller acheter des unités Airtel pour appeler
toutes les amies. La voilà dix minutes après, au téléphone avec de la
grand-mère Ziza pour savoir si ma sœur est passée par le quartier balise. La vieille
au téléphone répond non. C'est vrai que ma sœur ne va pratiquement jamais chez
ma grand-mère. Elle n'aime pas s'enfoncer dans le sable de Port-Gentil. Même
pas pour aller voir la grand-mère. Voilà que cette dernière aussi se met à
paniquer :
"Ah Bernadette, c'est
comment. L'enfant est où?"
Hulmmm! Je vois que maman ne
sais pas quoi dire. Je prends le téléphone et je dis quelques mots à ma
grand-mère, histoire de la calmer.
Ensuite, j'appelle ma combi,
Jileska pour savoir si sa petite sœur Sunita, qui est la confidente de Pupuce,
est au courant de quelque chose.
Elle me répond:
"Attends que j'aille
secouer les puces à ma sœur. Elle va me cracher le morceau."
Ma combi me rappelle dix
minutes plus tard et me balance:
"Vas faire un tour du
côté de Ntchenguà badamier. Tu y trouveras la frangine. Parait qu'elle est chez
le typo."
Oh! Mais qu'est-ce que Pupuce
est allée foutre à Ntchenguè badamier, alors qu'elle doit être en classe!?
"Où est-elle?", me
demande maman.
"Parait qu'elle est chez
une copine du côté de Ntchenguè."
"Ne me mens pas, s'il te
plaît. Chez qui est-elle?"
"J'te dis, la vieille.
Elle est chez une copine."
"Tania, ta sœur, a des
copines de ce côté-ci de la ville. Que va t-elle faire si loin de
Ntchenguè?"
"Euh! Je ne sais quoi te
dire, maman. Je n'en sais rien."
Sceptique, maman me regarde,
l'air de me dire qu'elle n'est pas dupe du tout.
Alors, que je n'ai pas encore
mangé, je demande à Julien qui vient d'arriver, de m'accompagner à ntchenguè.
Je sais même que badamier, c'est quel endroit de La ville !?
"Qu'est-elle allée foutre
là-bas?"
"Elle est allée rejoindre
Peter. Il habite là-bas."
"Vous aussi, les filles!
L'amour va vous mener très loin. Voilà qu'on est obligé de miser 2 mille de
taxi pour aller la chercher ! Elle va me rembourser mon gain."
"Ah, papa, on va discuter
après. Cette affaire-là commence à me dépasser.
Nous voilà dans un taxi en
direction de l'extrémité de la ville. Un endroit que je ne connais même pas. On
dépasse l'hôpital, et je rappelle au chauffeur de nous laisser au bon endroit
parce que nous ne savons pas où nous allons. Là, il me répond avec son accent
béninois :
"Tu viens chercher quoi
ici?"
Obligée de rire.
Nous descendons du taxi.
Julien à le réflexe d'aller vers deux jeunes filles qui discutent en bordure de
route. Il leur demande si elles connaissent Big wave, qui n'est autre que
Peter.
"Pardon, oh! Qui ne
connait pas Big Wave ici. Tu vois, après la poubelle là-bas, tu vas tout droit.
Tu vas arriver chez un malien avec une boutique rouge, tu prends le petit chemin
à gauche du malien. Tu vas tout droit jusqu'au container abandonné là-bas. Tu
demandes seulement. On va te montrer la maison."
C'est si bien indiqué, que
l'on se dit qu'on y arrivera vite. Tu parles. Il y a tellement de sable,
d'herbe et de chemins, qu'à la fin, mon frère se demande si l'on doit continuer
;
"Écoute, Tania, je t'aime
beaucoup Frangine, mais là, mes baskets sont vraiment traumatisées. Qu'est-ce
que la frangine est venue foutre ici? Le sable la décourage quand il s'agit
d'aller voir la grand-mère à la balise ; là, ni le sable, ni l'herbe ne l'ont arrêtée
!!!"
"Je sais que tu es
dépassé. Mais ne m'abandonne pas maintenant."
Lorsque l'on arrive à
destination, mes chaussures ont rendu l'âme. J'ai les pieds tout sale et mal
aux jambes. Le vent venant de l'océan tout proche, me fait frissonner.
On demande à une petite fille
où habite Big Wave. Elle nous répond :
"Mon papa n'est pas là.
Je suis seule avec Grand-Ma et tantine Marjorie."
Donc, ne voici t-il pas que
nous découvrons la tantine Marjorie en question, en train de laver des jeans et
des tee-shirt, là, dans la cour de cette maison inachevée!!!
Laissez-moi vous planter le
décor.
Les murs de la maison ne sont
pas crépis. Des fils électriques se promènent au-dessus de nos têtes. Il n'y a
pas de vitres aux fenêtres ; ce sont des planches de contreplaqués qui servent
de fenêtres et de portes. En fait, tout est en chantier. Et notre sœur est là,
dans un coin, debout devant une table branlante, en train de frotter avec une
brosse, un pantalon plein d'eau mousseuse ! Et elle ose se plaindre quand il
faut faire la vaisselle à la maison, avant d'aller à l'école le matin!!!???
Elle sourit quand elle nous
remarque.
"Oh! Que faites-vous
là?"
"C'est à toi que nous
devons poser la question !" lui lance Julien plein d'incompréhension.
"Qu'est-ce qui ne va pas, Pupuce. Tu deviens maintenant femme de ménage
!"
"Oh, qu'est-ce que tu
racontes! Je suis juste venue laver le linge sale de Peter, c'est tout."
"C'est tout! Dis-moi,
depuis quand, sais-tu laver le linge à la main. Chez ta mère, là-bas, même tes
chemises pour Raponda passent à la machine, alors que Tania et moi lavons à la
main tous les samedis! Donc, tu sais le faire."
"Mais, oh! Ca s'apprend
non!"
"Ecoute, ma grande, je te
respecte, tu comprends. Donc, laisse seulement ce que tu es en train de faire
et on rentre à la maison tout de suite."
"Mais quoi? Partez, je
vous rejoins. Je n'ai pas encore fini. Et j'ai mis une marmite de riz au
feu."
"Tania, attrape-moi sinon
je vais commettre un crime. Depuis quand Akendengue Marjorie sait-elle faire à
manger!!!!!!!" Nous sommes tous les jours à la maison et c'est Tania et
moi qui nous tapons tout le boulot! Et comme par hasard, ici, tu viens faire la
cuisine!!!!! Tu te fous de qui."
"Calme-toi, julien.
Calme-toi."
Mon frère est tellement furax,
qu'il a du mal à se retenir.
"Qu'est-ce qui ne va pas
chez cette fille. On te cherche partout en ville et tu es ici au lieu d'être à
l'école ! Tu es devenue maboule ou tu as oublié que tu es en terminale!? Madame
sèche les cours pour venir laver les caleçons de Big wave!!! Qu'est-ce qui ne
va pas dans ta tête, Pupuce. Qu'est ce qui ne va pas? Tu sais combien de filles
défilent dans le lit de ce gars! Tania, s'il te plaît, dis à ta sœur de se
rincer tranquillement les mains et de me suivre. Sinon, je lui fends le crâne
tout de suite. Si les autres n'ont pas de frères pour les remettre sur les
rails, moi mes sœurs ne lavent pas les caleçons des imbéciles!""
Là, je sens que la situation
est tendue. Mon frère est tellement touché dans son orgueil qu'à tout moment il
peut exploser et rosser Pupuce en oubliant que c'est sa grande sœur.
"Pupuce, pardon. Allons
tranquillement à la maison. Laisse les pantalons de Peter. Une autre fille
viendra les laver."
"Mais, laissez-moi au
moins finir ce que j'ai commencé. Je vous suis après. La marmite va brûler,
sinon."
"Que cette marmite brule
! On y va, Pupuce. N'envenime pas plus l'affaire !"
Yooooo! Je suis moi-même que
dépassée! Me voilà ballotée entre mes deux frères. Je m'attendais à tout sauf à
ça.
"Ah Pupuce, on y va.
Laisse-moi tout ça, tu n'es pas chez toi, ici."
Elle consent enfin à se rincer
les mains. Avant de nous suivre, elle court rapidement dans la maison et crie:
"Grand-ma, je suis
partie, oh!"
Et la Grand-Ma en question de
répondre:
"A demain, ma
fille."
Yoooooo!!!! Voir moins
10-
Dans le silence, nous avançons
dans les chemins de sable de Ntchenguè badamier. Je n'en reviens pas d'être
aussi loin. Que serais-je venue chercher ici???
Julien marche derrière nous.
Il est toujours vert de colère. Moi, je n'ai même pas envie de parler. Mon
ventre chante tellement j'ai fin. J'ai simplement envie d'aller manger ce plat
de feuilles de manioc aux crevettes qui m'attend à la maison. Maintenant, si ma
soeur veut revenir ici demain, faire le ménage, ce ne sera plus mon problème.
Qu'est-ce qui lui passe par la
tête en ce moment! Tu vas quitter si loin de chez toi pour venir te terrer dans
un lieu pareil, par amour??? On aura tout vu. Je m'attendais à tout de sa part.
Mais là...
Quand on arrive en route,
Julien hèle un taxi. On mise de nouveau 2 mille cfa pour qu'il nous dépose
devant la maison.
Dans le taxi, silence. Je
regarde par la vitre. Pupuce, regarde ses chaussures.
En arrivant à la maison, on
trouve la grand-mère Ziza et maman qui nous attendent à la terrasse.
"Akendengue Marjorie, où
étais-tu", lui demande la grand-mère en omiènè.
Elle ne répond pas. Alors,
maman insiste.
"D’où viens-tu
Pupuce?"
"Je...je.."
Elle se met à pleurer.
"Mademoiselle lavait les
caleçons de son gars et elle faisait la cuisine. Tu comprends maman, elle
faisait la cuisine."
"Ah! Pupuce, tu sais
laver le linge à la main! Ce n'est pas dimanche que je t'ai vu soulever une
valise de linge sale pour aller le laisser chez le blanchisseur!"
"Ne parle pas trop,
Bernadette! Laisse-la.", fait grand-mère Ziza.
Pupuce en profite pour aller
se réfugier dans la chambre. Julien prends alors la parole et s'adresse à maman
:
"Madame ma mère, tu vas
dire à Pupuce que je passe mon BEPC à la fin de l'année. Si elle compte aller
tous les jours du côté de Ntchenguè, ne comptez pas sur moi pour aller la
chercher. Qu'est ce qui ne va pas dans la tête de cette fille? Elle est la
première de sa classe depuis des années et là, elle va laver les slips d'un
type qui triple toutes les classes, tellement il est occupé à coucher avec
toutes les filles!"
"Te fâche pas comme ça,
mon chéri!", lui fait la grand-mère. "Il faut lui parler calmement.
Les femmes enceintes, c'est délicat."
"Ah, mamie, je veux bien
comprendre. Mais je t'assure que si elle continue d'aller là-bas, je vais
oublier qu'elle est enceinte."
"Oh, mon chéri! Un homme
doit se contrôler." surenchérit grand-mère Ziza.
"Je dis, hein mme Ziza,
comment peux-tu concevoir que ta petite fille, au lieu de se concentrer sur ses
cahiers, préfère aller laver le linge d'un homme. Et je dois me taire. Jamais.
Elle y met encore les pieds et vous ne me reconnaîtrez pas. Et si ce rigolo
qu'elle va suivre pense qu'il peut s'amuser avec ma soeur comme ça, il me
trouvera devant lui."
Sur ce, Julien va manger. Ma
mère me regarde alors et me demande :
"Qu'est-ce qui ne va pas?
Que faisait-elle là bas?"
"Ah, qu'est ce que je
vais te dire, maman. Elle lavait toute une bassine de linge sale. Et elle
faisait cuire une marmite de riz."
"Depuis quand sait-elle cuisiner?"
s'étonne grand-mère Ziza.
"Depuis que l'amour donne
des ailes.", c'est tout ce que je trouve à répondre.
"Je crois qu'il faut
qu'on convoque la famille de ce jeune homme."
"Et que vont-ils te dire
maman? Qu'ils ont la place chez eux pour une nouvelle bouche à nourrir???"
"Ne sois pas cynique,
Tania. Il faut que je discute au moins avec une personne de là-bas."
"Bonne chance maman. Moi,
je vais manger."
Les jours suivant, julien
accompagne systématiquement Pupuce jusqu'à sa salle de classe. À la récréation,
il vient s'assurer qu'elle est bien là. À la sortie des cours, il l'attend
devant le portail. Je me demande jusqu'à quand cette surveillance rapprochée va
continuer, mais au moins, on est rassuré de savoir que notre sœur va bien en
classe.
Quand arrive la fin du
trimestre, mlle est deuxième de sa classe. Moi, j'obtiens à peine la moyenne.
Je suis en terminale D. Je veux devenir ingénieur. Je serai ingénieur. Je vais
épouser Miro. Lui aussi sera ingénieur. Je vais faire mes études à l'étranger. Et
quand je vais rentrer, je vais acheter une voiture à ma mère.
11-
En parlant de mère, celle de
Peter, alias Big Wave a répondu à l'appel de ma mère. Donc, un samedi, elle est
arrivée chez nous, accompagnée d'une de ses amies. Elle s'est assise dans le
canapé de ma mère et a attendu qu'on lui pose des questions. On aurait dit
qu'elle venait témoigner à un procès. Pupuce était derrière chez notre copine
Marc-Elise. Elles bossaient toutes les deux. Julien était à son match de foot
hebdomadaire.
Donc, j'ai été réquisitionnée
pour faire le service.
La femme était là. À la
regarder, je lui aurais donné 50 ans; pourtant, elle en a que 35 ans. Sa
copine, une femme très bavarde, est du même acabit.
La discussion a commencé après
que la Beaufort et la Regab demandées soient servies.
Je me suis assise sur une
chaise à la table de la salle à manger. Les dames et ma mère étaient dans le
salon. Albert, est arrivé en renfort quelques temps après.
Quand maman annonce la
nouvelle, la mère de Peter commence son discours :
"Ah, cet enfant vient
encore m'ajouter les problèmes ! Ça ne va pas finir, cette histoire ! C'est le
seul garçon que j'ai, mais il ne comprend rien. Je parle à gauche, je parle à
droite et il fait toujours les mêmes bêtises. Il n'a pas pitié de moi. Madame,
vous m'appelez aujourd'hui chez vous là pour dire que votre fille est enceinte.
Mais avant de coucher avec Peter, elle ne s'est pas renseigné !"
"Comment ça, renseignée !
Quand les jeunes se mettent ensemble, ils font des enquêtes d'abord ! C'est ce
que vous voulez me faire comprendre."
"Eh, madame ! Elle aurait
dû poser les questions à gauche à droite, oh! C'est pas seulement le beau corps
et le beau visage que vous voyez là. Oooooh, il est beau oh! Oooooh, c'est un
grand basketteur, oh! C'est ça que les filles suivent. Elles défilent à la
maison-là, défilé, défilé, défilé. Même les draps sales qui sur lesquels il
dort là, sur son matelas, les filles ne voient pas ça. Non, c'est seulement
baiser que les enfants veulent !"
Yoooo! Je manque de m'étouffer
de rire en voyant le visage scandalisé de ma mère. Elle qui ne supporte pas les
écarts de langage, elle est servie.
"Madame, là où vous me
voyez là, j'ai seulement, 35 ans. 35 ans, oh! C'est l'enfant-là qui veut me
faire vieillir avec ses conneries! Dîtes-moi un peu, avec mon petit commerce de
manioc là que je fais au marché de Moukala, je trouve l'argent où pour payer
tous les trousseaux qui me tombent sur la tête."
"Qu'est-ce que cela veut
dire?" demande maman.
"C'est tout ça là, oh!
C'est tout ça là que je disais que votre fille n'a pas posé les questions avant
de venir se jeter dans le lit de mon fils, oh! L'enfant qu'on appelle Peter
Malonga a déjà 3 gosses! Vous me voyez là, que dépassée. Je suis déjà
grand-mère oh!"
"Trois enfants ! À 20 ans
! C'est une blague.", s'étonne Albert.
"Papa, je ne blague pas.
Quand je vous dis que mes soucis commencent du côté de SOGARA là-bas et se
terminent après le carrefour Banco, vous ne me croyez pas. Je suis dépassée là
où vous me voyez. Le mari, y a pas. Le copain, y a pas. Me voilà là avec mon
petit commerce et les 4 bouches qui sont sorties de mon ventre, et que je dois
nourrir. Y a la maman qui est venue du village. Elle est malade, il faut
trouver les médicaments pour la soigner. Elle est là à la maison depuis 3 ans.
Et là, je vais même trouver l'argent où, pour acheter même un silip (slip) à
l'enfant-là que votre fille a dans le ventre !"
"Écoutez, madame, je ne
vous ai pas appelée ici pour vous demander de l'argent. Je voulais simplement
faire votre connaissance." fait ma mère.
"Ok, madame. Donc là, on
a fait connaissance ; oh! Je suis Huguette Malonga, j'habite à badamier,
là-bas. La maison-là, c'est une brique ici, une brique là-bas. C'est comme ça
que j'ai monté les murs-là. C'est mon commerce et mes bricoles partout partout
là chez les blancs-là, qui m'aident à vivre, oh! Maintenant, si votre fille
veut venir aussi partager notre bâton de manioc et une boîte de sardines avec
nous là-bas, elle peut venir. Mais pardon, maman, évitez-moi les maux de tête
et les soucis. Ce n'est pas moi qui envoie l'enfant mettre les grossesses dans
la ville. Là, il était pendant les grandes vacances là-bas à Libreville, sur la
route de Kango chez ma grande sœur. On m'appelle la semaine dernière pour me
dire qu'il a laissé une grossesse là-bas. Que Dieu me pardonne, oh! Tout ça là,
je ne peux pas gérer. J'ai ma petite fille-là, Fidélia qui travaille que bien
trop bien à l'école. C'est là mon avenir. Tout mon argent meurt là-bas chez
elle parce que je sais qu'elle va avoir le BEPC là, les yeux fermés. Je ne peux
pas prendre cet argent-là encore, pour aller donner aux copines de Peter,
excusez-moi oh!"
"Nous vous comprenons,
madame", fait Albert. "Il s'agissait juste d'une prise de contact.
C'est toujours bien de savoir à qui ont a affaire."
"D'accord d'accord. Quand
je vois même votre maison là, je me demande ce que votre fille est venu
chercher dans mon taudis. Elle a vu un écran plat ou même un lit chez moi! Les
filles d'aujourd'hui vraiment ! Elles sont plus bêtes que nous, pardon."
"Pourquoi dîtes-vous ce
genre de chose", s'insurge maman.
"Ah, madame, pardon, oh!
Moi quand j'ai vu la vie de mon père là, qui plantait les tubercules pour nous
payer l'école, j'ai visé juste, oh. J'ai fait les enfants avec un policier, et
puis un professeur. J'ai regardé en haut. Pourquoi votre fille regarde-t-elle
en bas ? Quand elle me voit là, elle peut même me comparer à vous. Aka! Elle a
la maison où il y a le climatiseur. Au lieu de chercher le garçon qui habitent
dans une maison ou y a la piscine, elle vient se jeter là, dans nos marécages
de tchenguè!"
Après une tirade pareille, je
suis à terre. Obligée de quitter le salon pour aller rire dans la cuisine.
Comment quelqu'un peut-il parler de lui ainsi ? Cette femme n'a aucune honte,
on dirait.
"Donc comme ça, le père
de Peter est policier ?", demande Albert qui n'a rien raté de la
conversation.
"Un policier mort
retraité va vous donner quoi ? Vous pouvez aller le chercher du côté de
Tchibanga là-bas. Je vais vous donner son numéro Libertis."
"Ce n'est pas la peine !
Nous avons compris que tout ça vous est égal, madame.", fait maman, qui
semble très touchée par les propos de la mère de Peter.
"Madame, on ne va pas se
fâcher, oh! Si je pouvais, j'allais pouvoir. Mais comme je ne peux pas, je
préfère être claire dès le départ. Je ne pourrai pas. Même si je force, c'est
un petit 100 francs cfa qui vont tomber de ma poche."
Sur ce, la dame et sa copine,
siffle les 3 bières Beaufort et les 3 Regab qu'on leur a offert et elles s'en
vont.
Ma mère est sciée. Elle ne
sait plus quoi dire. Albert prend la parole et la fait sortir de son silence :
"On ne peut pas jeter la
pierre à cette dame, Bernadette. Quand on élève nos enfants aujourd'hui, c'est
avec l'espoir qu’ils évitent les mêmes embûches que nous."
"Tu as raison, Albert.
Mais, je reste quand même sans voix. Je m'attendais à mieux. Tania, viens voir
un instant."
J’arrive alors au salon, l'air
de rien. Je m'assois en face de maman. Elle me demande alors :
"Tu connais ce garçon ?
Ce Peter."
"Connaître, c'est un
grand mot, maman. Ce n'est pas mon pote, mais tout le monde le connaît, quoi.
C'est une star de basket à Pog."
"Ok. Donc c'est ce qu'a
suivi ta sœur."
Là, je préfère ne pas
répondre, car mes réponses peuvent m'emmener très loin. Je me contente de
hausser les épaules.
"Je pense, Bernadette,
que tu dois faire en sorte que la petite réussisse son bac et accouche dans de
bonnes conditions. Il ne faut pas que sa scolarité pâtisse de cette erreur de
jeunesse."
12-
Je suis là dans ma chambre en
train de repasser mes vêtements quand ma sœur arrive en souriant.
"Je vois que vous avez
bien rigolé en révisant vos maths."
"Oh, ce n'est pas
Marc-Elise qui me fait rire. J'étais au téléphone avec Peter. Il devient très
câlin, tu sais !"
"Ah bon! C'est nouveau.
Sa mère était là."
"Oh, maman Julienne était
là ! Pourquoi tu ne m'as pas appelée."
Yoooo! C'est maintenant au
niveau de maman Julienne !
"Je ne savais pas que tu
voulais la voir. Et comme elle avait des choses à régler avec la vieille, u
comprends."
"Ok! Elle est vraiment
trop cool, cette femme. Elle est gentille, elle est simple. Pas comme cette
folle de Kaba qui est prise de tête !"
Je regarde ma sœur sans rien
dire ; elle range ses cahiers et va se coucher sur le lit. Là, je me demande ce
que la mère de Peter aurait dit si elle s'était retrouvé devant la magnifique
Kaba, cette folle qui est belle on dirait et qui est toujours impeccablement
coiffée et maquillée comme si elle allait mourir demain. En plus, si elle a été
impressionnée par le faux climatiseur que nous avons au salon et par l'écran
plat que l'oncle Alexandre, le frère aîné de maman, lui a offert à la fête des
mères il y a 2 ans, qu'aurait-elle dit devant la Rav 4 de Kaba, leurs fauteuils
en cuir dans le salon, leur machine à laver et leur home cinéma ?
Vraiment...
Je suis là dans ma réflexion,
face à ma sœur qui lit un livre de Carol Higgins Clark, quand j'entends cogner
au portail. J'entends mon frère Julien crier : "Maman, papa Jimmy est là.
La porte de la chambre de
maman s'ouvre aussitôt.
Imperturbable, ma sœur reste
couchée et continues sa lecture.
"Tu ne viens pas dire
bonjour à papa Jimmy."
"Non. Dis-lui que je
dors."
"Et puis quoi encore.
Lève tes fesses de ce lit et on y va."
Nous arrivons au salon. Le
mari de Kaba est heureux de nous voir.
"Huum! Mes femmes,
comment allez-vous.
Là, maman prend le relais :
"elles vont très bien.
C'est gentil de t'en préoccuper."
"Mais, Bernadette, je te
l'ai dit. Jamais je n'ai chassé Pupuce de la maison. C'est toi qui veux la
garder ici."
"Ok, ok, on ne va pas se
disputer pour ça. Que puis t'offrir à boire."
"Pardon, donne-moi un
verre de Whisky et ça ira."
Je sers le Whisky en question
et Pupuce et moi retournons dans la chambre. Mademoiselle ma soeur continue sa
lecture sans plus se soucier de ma présence. Parfois, j'ai l’impression que
lorsqu'elle ouvre ses livres, elle s'envole vers un pays imaginaire d'où il est
difficile de la faire sortir. Je préfère donc ne pas l'embêter et continue
tranquillement à repasser mes vêtements.
À table à 20h, maman nous
raconte son entrevue avec Papa Jimmy.
"Il m'a apporté 300 mille
pour que j’achète la layette pour ton bébé." fait-elle à Pupuce.
"Et que dit mme Mbeng
dans tout ça ?", demande Julien.
"Elle dit qu'il ne faut
pas l'embêter. Elle a ses soucis. Elle n'a pas besoin qu'on en rajoute. Ma
fille, heureusement que ce type travaille à Total et que tu te fais suivre
là-bas !"
Pupuce continue de manger sans
rien dire. On a l'impression que c'est de quelqu'un d'autre que nous parlons.
Maman n'en fait pas cas et
préfère écouter julien lui raconter ce qui s'est passé lors de sa dernière
rencontre de football.
"Et devine quoi la
vieille !"
"Oui, je t'écoute,
fiston.
"La semaine prochaine, on
joue contre ses tocards du lycée français."
Se retournant vers moi, il me
dit:
"Ma chère sœur, je
n'aurai pas pitié de ton mec. Je vais lui apprendre ce qu'est le foot."
"Désolée pour toi,
banane, Miro ne joue pas au foot. Il est plutôt karatéka."
"Sans blague... Mais quel
tocard !", fait Julien.
"Tu feras moins le malin
quand il t'aura mis par terre !", lui dit maman.
"Mamooo, les mères des
autres, oooh! Ça discute avec les enfants, ça rigole et tout."
Tous nos regards effarés se
tournent sur Pupuce qui vient de parler.
"Oh! C'est juste un
constat. Quel enfant chez les Mbeng va venir blaguer comme ça avec la vieille
!", conclut Pupuce.
"Ne soyez pas durs avec
ma soeur. Elle a ses humeurs, mais il faut savoir la prendre."
"Ah, la vieille, arrête
ton char. Qui ne connaît pas ta sœur? Quand elle commence avec toi le matin à 6
heures, à minuit, elle est encore sur ton dossier !", fait Julien.
"C'est la vie qui l'a
changée. C'était une fille douce quand nous étions adolescentes."
"Ah bon !", se
contente de lancer Pupuce, très sceptique. Voir moins
13-
Deux semaines plus tard, un
dimanche, alors que maman se prépare pour se rendre à la messe de 8heures, je
suis dans la cuisine quand arrive Pupuce.
"Est-ce que tu peux me
rendre un service, Tania ?"
"Parle, je
t'écoute."
"Voilà, je veux aller
chez Peter. Est-ce que tu peux m'accompagner ?"
"No way! Faut pas abuser,
quoi. Ma chère, c'est pas parce que maman a dit qu'on doit bien te traiter, que
tu vas abuser de ma gentillesse, compris?"
"Comme t'es méchante ! Je
voulais juste..."
"Tu voulais quoi. Je n'ai
que ça à faire. Claquer mes sous pour le taxi ! Tout ça parce que tu ne peux
pas demander à ce type de se déplacer ! C'est quoi cette histoire. Vas-y toute
seule. Ne compte pas sur moi pour me taper tout ce chemin pour aller tenir la
chandelle."
"Je...Je..."
Et madame se met à pleurer.
"Eh eh, eh, eh. Tu ne vas
pas me faire le coup à chaque fois. Pleurer parce que je dis non, pleurer pour
ci, pleurer pour ça. Ça ne marche pas avec moi. Je n'irai pas avec toi à
Nchenguè, un point un trait. Je dois faire la vaisselle, je dois faire à manger
et je dois réviser pour mon devoir de demain. Si ton type ne peut pas se
déplacer pour te voir et ben, qu'il aille au diable."
"Comme t'es méchante,
Pupuce. Je savais pas que tu pouvais dire des choses aussi dures!"
La fille-là a même quel
problème ? À tout ce qu'elle demande, il faut que je dise oui, sinon madame se
met à pleurer ! C'est quoi cette affaire.
"Continue de pleurer ! Je
crois qu'à force de m'énerver comme tu le fais, ton enfant va bien me
ressembler !"
"Comme tu es bête Pupuce
! Nous sommes jumelles, tu veux qu'il ressemble à qui ?"
"Oh, t'as raison. Qu'il
me ressemble, ça vaudra mieux pour lui. Ça lui évitera d'être trop beau comme
son père et e voir à 5 ans, les filles lui courir après à la maternelle."
"Tu as vraiment le sens
de l'humour, chère sœur, malgré ton cœur de pierre."
"C'est fini! Voilà, c'est
comme ça que madame compte me manipuler. Ma belle, regarde-moi bien ; tu peux
chanter autant que tu veux et dire que je ressemble à Kaba quand j'agis comme
ça, moi Tania Akendengue, je ne t'accompagnerai nulle part."
Sur ce, je continue de faire
la vaisselle et madame va bouder dans la chambre.
Julien arrive alors, j'ai fini
de balayer la cour. J'en finis avec le salon et je disparais. J'ai un match cet
aprèm."
"Ok! Moi, je bouge pas.
Je vais réviser cet aprèm."
"Cool! Au fait,
j'oubliais, il faut dire à Pupuce que j'ai vu votre pater hier. Il était sobre,
je crois. Il m'a dit de vous dire, de passer le voir dans la semaine."
"T'es sûr qu'il était
sobre?"
"Oui, j'en suis sûr. Il
était accompagné d'une jeune fille. J'ai pensé que c'était sa nouvelle
copine."
"Ok. Je vais
l’appeler."
"Cool!"
Alors que maman vient dans la
cuisine me dire au revoir, je l'arrête.
"La vieille, Pupuce me
fait une crise de larmes parce qu'elle veut que je l'accompagne à badamiers,
là-bas. Règle ça avant de partir, quoi !"
"Que veut-elle aller y
faire ?"
"Ah! Elle veut aller voir
son type. Parait qu'il a été malade toute la semaine ."
"Oh! Et elle est
infirmière, je suppose ?"
"Ah! Tout ça, je ne
connais pas. Ce que je sais, c'est qu'elle va nous taper une fugue si tu ne
fais rien."
"Ok. Je vais la voir. Où
est-elle ?"
"Dans la chambre. Elle
boude."
"Ok. Je vais régler cela
avant de partir. Je n'ai pas envie d'être en retard à la messe."
"Maman, l'église est
juste de l'autre côté de la route."
"Oui, raison de plus pour
être la première assise au premier rang !"
Elle me laisse-là et va dans
la chambre. Elle en sort 10 minutes plus tard et me lance: "Tania, sors un
sachet d'ailes de poulet fumé. Je les ferais cuire en plus du plat de Nyemboué
que j'ai fait hier soir."
"Yo! C'est comment maman!
Qui va manger tout ça ? Il y a la marmite de poisson salé qui est resté
hier."
"Oh, nous avons un invité
à midi. Il faut bien lui offrir des plats variés à table."
"Un invité ? Qui est-ce ?
"Tu poses trop de
questions, ma fille. Je suis pressée. À tout à l'heure."
La voilà partie. Je sors donc
le poulet demandé et je vais dans la chambre pour savoir ce qui se passe. Quand
j'arrive là, je trouve madame ma sœur en train de balancer des mots au
téléphone. Les je t'aime, les doudou...etc...
Quand elle me voit entrer dans
la chambre, elle lance un au revoir à son interlocuteur qui, bien sûr, j'ai
reconnu."
"Alors?"
"Alors quoi?", me
répond t-elle.
"Tu vas à badamier ou
pas?"
"Toujours en train de
blaguer et de dénigrer les autres. Je te signale que c'est un quartier comme
tous les autres."
"Arrête ton char, tu
veux! Tu y va ou pas."
"Non, figure toi que
Tantine Bernadette a invité mon cœur à manger avec nous à midi."
"C'est une blague."
"Et pourquoi, ce serait
une blague! Je te signale que ton petit cœur, ce cher Miro, vient ici comme un
chef, et il s'assoie dans les fauteuils de tantine et que toi, miss, tu as le
droit de le recevoir à la maison quand bon te chante. Pourquoi ce ne serait pas
la même chose pour moi, dis? Il a quoi de moins que Miro, mon chéri?"
"Eh! Madame l'avocate,
désolée d'avoir posé la question! Pas la peine de monter sur tes grands
chevaux."
"Vous êtes quand même
marrants Julien et toi. Vous êtes là à détester Peter alors que vous le connaissez
à peine ! Je vous signale que je l'aime moi !"
"Ah, mama, c'est quoi mon
problème là-dedans? Tu l'aimes, tu l'aimes pas? Qu'est-ce que j'en ai à foutre.
Est-ce que c'est mon cœur qui souffre."
"Pourquoi penses-tu que
mon cœur souffre, dis-moi? Allez, je t'écoute !"
"La go, tu vois, on ne
voit pas parler jusqu'àààààà! Je ferme ma bouche tranquillement et je retourne
faire mon ménage. D'accord. Ton gars peut venir manger toutes les cuisses de
poulet qu'il veut, ce n'est pas mon affaire. C'est la maison de ma mère, pas la
mienne. Si elle veut nourrir tout le monde, je n'ai rien à redire dessus."
"T'as vu comme tu es
méchante, Tania ! Pourquoi Miro aurait le droit de venir s’asseoir ici et
prendre ses aises dans le canapé de tantine, et pas Peter?"
"Yo! La fille-là, c'est
comment! Ton gars vient, c'est quoi maintenant l'affaire qu'on doit rester là
des heures à discuter !"
"J'en ai marre que vous
le traitiez comme un moins-que-rien. Vous sentez supérieurs à lui, n'est-ce-pas
? Ce n'est pas parce qu'il n'a pas un père plein au as comme Miro, ou une mère
médecin comme la copine de Julien, que vous devez le dénigrer. Je te demande de
le respecter et d'être un peu plus gentille envers lui."
"Ok, c'est noté. Puis-je
retourner dans la cuisine?"
"Non, je n'ai pas terminé.
Je veux que tu me regardes dans les yeux et que tu me promettes de mieux
traiter le père de mon enfant."
"Ecoute Akendengué
Marjorie, j'ai autre chose de plus important à faire là, à l'instant. Donc,
fous moi la paix avec tes foutaises. C'est pas possible d'être aussi prise de
tête. Je faisais comment avant, quand t'habitais pas ici."
"Tu t'ennuyais comme la
mort, car tu n'avais personne avec qui te comparer. Depuis que je suis là, tu
t'amuses à me montrer que Miro est plus gentil parce qu'il t'offre des fleurs.
Que Miro est plus doux parce qu'il dit des mots doux. Que Miro..."
"La go, laisse-moi mon
gars tranquille. Je n'ai jamais autant parlé que depuis que tu es ici avec
toutes tes conneries. Je vais sourire à ton type quand il sera là. Mais s'il ne
change pas de comportement avec toi et continues à t'ignorer comme il le fait
et à courir et coucher avec toutes ces filles au lieu de se préoccuper de ton
état, ça ne changera rien du tout."
Sur ce, je sors de la chambre
et la laisse là. Du coup, je suis chamboulée et me mets à réfléchir. Est-ce que
je snobe vraiment ce Peter ? C'est vrai que je le trouve con et roigolo parce
qu'il use de son charme sur toutes les filles, mais à part cela, je ne le
connais pas vraiment. En fait, bordel comme il est, jamais je n'aurais imaginé
que ma sœur puisse tomber amoureux d'elle. Mais bon, puisqu'ils ont concrétisé
l'affaire, peut-être que je devrais, comme elle le demande, le
"respecter". Donc, je décide de préparer une bonne marmite de riz à
ma façon et de faire sauter les ailes et cuisses de poulet fumés avec des
poivrons et autre petits légumes. Quand maman rentre de la messe à 10 heures
moins dix, elle me trouve affairée dans la cuisine.
"Oh, je vois que t'as pas
mal avancé dans la cuisine. Je vais chez le malien à côté. Ta sœur m'a dit que
son invité ne boit pas de boissons gazeuses, alors je vais chercher des jus
Cérès."
"Ben voyons !"
"Qu'est-ce qu'il y a
Tania ? Tu as quelque chose à dire ?"
"Non, rien. Je préfère me
taire sinon on pensera que je snob le type parce qu'il vit à Ntchenguè
badamier."
"Ah, ta sœur a réussi à
te faire entendre raison ! Sache que tu vas devoir apprendre à l'apprécier ce
Peter. Il est le père de ton futur neveu."
"Franchement la vieille !
Je ne l'avais pas remarqué ?"
Elle s'en va en riant.
14-
Je chantonne en mettant la
table lorsque ma grand-mère Ziza arrive à 11h 30.
"A mama, Itchango sè!
Eroumbè zo éré na rwé?"
" Bonjour Mamie. Pupuce
est dans la chambre."
"Ta sœur ne reste que
dans la chambre! À chaque fois que je viens, c'est la même réponse que tu me
donnes ! Fais là sortir de là."
Je m’exécute et ramène Pupuce
dans le salon. Alors, la grand-mère lui demande comment elle va et ce qu'elle
faisait dans la chambre.
"Je lisais, Mamie."
"Et bien maintenant, tu
vas aider ta sœur à mettre la table."
Elle n'ose même pas bouder,
car elle sait qu'avec la grand-mère, c'est pas la peine.
La table à 6 place. Je mets
des assiettes pour maman, Pupuce, mamie et moi. Et je n'oublie pas celle de
MONSIEUR Peter. Je rajoute une assiette pour Albert, qui aujourd'hui vient sans
son épouse qui est malade. Alors que Mamie tente de mettre un peu de bon sens
dans la tête de ma sœur en lui expliquant qu'elle n'a pas à faire la paresseuse
parce qu'elle est enceinte, quelqu'un cogne au portail.
"J'y vais", crie
Pupuce en pensant que c’est Peter qui est là.
Elle revient déçue et me lance
:
"C'est pour toi,
Tania."
Je sors et retrouve Miro au
portail.
"Comment va la plus douce
?", me fait-il.
"Comment va le plus beau
? Je suis heureuse de te voir là."
Avant de me blottir dans ses
bras, je m'assure bien que les yeux de mamie ne traînent pas dans le coin.
"J'avais envie de te
voir. Mes parents sont en week-end à la Pointe Denis avec un couple d'amis. Je
m'ennuie à la maison."
"Reste manger avec nous,
si tu t'ennuies !" fait madame ma mère qui rentre avec des boissons dans
un sac.
Yoooo! Ça va être rock'N'roll
ce repas.
Au loin, j’aperçois Albert qui
arrive. Il semble un peu inquiet. La tante Georgeline son épouse est
hospitalisée à la clinique Bilie.
"Ils disent que ça va
mieux aujourd'hui. Je viens de la quitter. Le médecin lui demande de se
reposer."
"Que lui est-il arrivé ?"
demande Mamie.
"Oh! Juste une hausse de
tension. Comme d'habitude. Dîtes, jeune homme, je ne vous connais pas. Je suis
Albert un oncle à Tania. Et vous?", fait Albert en avançant le bras tendu
vers Miro.
"Je suis Miro, le petit
ami de Tania."
J'ai les yeux qui fixe le sol
à ce moment-là. J'attends seulement que Mamie rajoute du sel dans l'affaire. Et
ça n'attend pas. Elle s'écrie en langue:
"Oh, Bernadette, où est
ce que ta fille a ramassé ce beau garçon ? J'espère qu'il est bien élevé, hein
!"
Tout le monde éclate de rire,
sauf Miro qui, bien sûr, n'a rien compris.
"La grand-mère de Tania
te trouve très beau", lui dit maman.
"Oh, merci", répond
Miro en rougissant. Et sans transition, il s'assoit face à Albert, au salon, et
la conversation entre eux commence.
Je vais dans la cuisine
histoire d'apprêter les plats à mettre à table. Ma sœur est là dans un coin.
Elle semble soit bouder, soit être impatiente.
"Qu'y a t-il?" lui
fais-je.
"Je savais pas que
t'avais invité Miro."
"Euh, non. Il est venu me
faire un coucou et maman lui a demandé de rester manger avec nous. Y a un
souci?"
"Oui, qu'a t-il à venir
voler la vedette à Peter? Je te signale que c'est mon petit ami qui est attendu
pour ce repas."
"Et je te signale,
Akendengue Marjorie, qu’ici, je suis chez ma mère. Je fais ce que je
veux."
"Ok, ok. Je n'ai plus
faim de toute manière. Je vais dormir."
"Tant mieux pour toi. Ça
nous donnera l'occasion de saucissonner ton mec et d'en apprendre plus sur lui.
Et ne compte pas sur nous pour te laisser à manger."
"T'es trop nulle, Tania
Akendengue. Va au large."
"Pareil pour toi! Tu me
les brises, tu entends."
Sur ce, madame s'en va de la
cuisine en pleurant. Cela alerte maman qui arrive et me demande :
"Qu'est-ce qui se passe encore
?"
"Rien du tout maman. Elle
n'en finit plus avec ses crises de larmes. C'est vraiment chiant !"
"Mademoiselle Akendengue,
dis-moi quelque chose. Pourquoi Julien et toi dîtes que Peter est un cancre ?
Il n'a que 20 ans et c'est pas trop vieux pour la terminale."
"Oh, c'est juste qu'il ne
peut pas avoir 20 ans s'il a fait 2 fois la 5ème, 2 fois la 3ème et qu'il
repasse le bac pour la 3ème fois cette année !"
Ça veut dire quoi ça !?"
"Mais maman, ça veut dire
qu'il est né au moins 5 ans avant la date inscrite sur son dossier
scolaire."
"Oh! C'est fort ça !"
s'étonne maman.
"Très fort, mais très
courant aussi.", fais-je en sortant de la cuisine.
Quand je dépose le premier
plat à table, je me rends compte que le fameux Peter est arrivé. Il est vêtu
comme un basketteur, avec la tenue intégrale de Allen Iverson, un basketteur
que monsieur adule. Il me sourit quand il me voit. Comme si lui et moi on a
gardé les vaches ensemble.
Je ne lui ai jamais parlé.
Jamais serré la main. En fait, rien que le voir m'énerve car il a fait tomber
beaucoup de mes copines du collège. Ils les a soit sautées soit bécoquettées.
Donc...je reste gonflée à la vue de la grossesse de Pupuce. Mes fameuses
copines, elles, ont eu "la chance" de ne pas tomber enceinte.
"Bonjour Tania. On dit quoi
?", me fait il en souriant.
Mon Dieu, si je pouvais baffer
ce type et sa gueule de con!!!
"On est là. Rien de
spécial."
Je vois ma sœur qui sort du
couloir des chambres avec le sourire. Elle vient s’asseoir là, sur le canapé, à
côté de son type. Pardon...
Comme nous sommes en nombre
impair, Albert décide que les femmes ainsi que Miro, mangeront à table. Il
invite Peter à manger avec lui sur la tablette du salon.
"Ok, ça me va, vous
savez", fait Peter histoire de montrer qu'il est poli.
J'accompagne Miro et Peter se
laver les mains dans la cuisine. Alors, que mon bof a fini, monsieur mon métis
en profite pour me serrer dans ses bras et me foutre un smack.
"Miro, ma grand-mère est là
!"
"Mlle Akendengue, t'as
intérêt à m'embrasser correctement, sinon, je t'assure que je ferai pire devant
ta grand-mère."
Yooo! Pardon, je n'ai pas
envie que la pauvre vieille se casse les yeux !
À table, les plats sont variés
: poisson salé aux aubergines, poisson fumé au Nyemboué, Poulet fumé aux petits
légumes. Avec du Riz, du manioc et e la banane.
"Ah, ça! On dalle pas mal
chez vous ! Vraiment, je suis content d'être là." fait Peter.
Je souris. J'ai envie de dire
au type, mange en silence, pardon.
Manque de pot pour moi, le
type est très bavard. Il discute avec Albert qui se montre très curieux. L'ami
de maman veut en apprendre plus sur le père de l'enfant à naître de Pupuce; il
se lance dans les questions qui intéressent tout le monde, après avoir parlé
football et basket ball.
"Alors, dis-moi jeune
homme. Comment fait-on pour avoir déjà 4 enfants en terminale. Et plus, il
parait."
Sans même réfléchir, Peter
répond avec une franchise désarmante :
"Ce n'est pas de ma
faute, monsieur. Je dis toujours aux filles de prendre leurs précautions, mais
elles se jettent toutes nues dans mon lit sans que je n'ai besoin de faire
d'effort. Quand je rentre chez moi après un match de basket, il y en a quatre,
cinq parfois plus, alignées là devant la maison. Je fais comment moi pour
m'acheter toutes ces capotes !?"
Je ne sais pas si Albert a
voulu faire de l'humour, mais il a eu réponse à sa question !
Je manque de m'étouffer en
tentant de m'empêcher d'éclater de rire.
15-
"Mais, jeune homme ! Le
SIDA dans tout ça ?"
"Ah, monsieur, c'est Dieu
qui me garde, oh !"
J'ai tout d'un coup
l'impression que maman va avoir une attaque. C'est plus qu'elle ne peut
entendre. Elle sort de table pour aller se passer de l'eau au visage. Quand
elle revient, elle souhaite changer de sujet et demande à Miro :
"Tiens, Miro, julien me
disait que vous avez une rencontre de football aujourd'hui ?"
"J'ai arrêté le foot,
madame. Mon beau-frère m'a foutu la honte sur le terrain le week-end dernier.
Je dois dire que Julien a pris un sacré plaisir à me ratatiner pendant le match
amical mercredi dernier."
"C'est bien lui ça ! Je
pense que c'était sa manière de te prévenir que tu dois faire très attention et
qu'il t'a à l’œil", fait maman.
"Oh! Ça, j'ai compris la
leçon. C'est un sacré joueur, ce petit."
"J'éviterai de l'appeler
petit", lui fais-je en riant.
Albert, qui n'démord pas,
revient à la charge sur Peter. J'ai l'impression qu'il se dit qu'étant donné
qu'il l'a devant lui, il doit en profiter.
"Dis-moi, jeune homme, ne
trouves-tu pas que ta mère est bien trop jeune à 35 ans pour être
grand-mère."
"Mais monsieur, ma mère
ne peut pas avoir 35 ans si elle m'a fait à 15 ans et que j'en ai 25
aujourd'hui. C'est l'âge des papiers, ça !"
Là, Albert manque de
s'étouffer. Grand-mère Ziza se lève de table pour lui donner une tape très
forte dans le dos. Maman me regarde comme pour me dire qu'elle n'en croit pas
ses oreilles. Pupuce garde les yeux fixés sur son assiette. Elle est imperturbable.
Miro nous sort de notre mutisme et lance en riant :
"Tu viens d'une sacrée
famille Peter ! En plus d'être un très bon basketteur, tu as beaucoup
d'humour."
L'autre sourit sans comprendre
l'ironie derrière la chose.
"Ah ! Je n'ai pas
l'habitude de mentir, monsieur. Ma mère m'a rectifié l’âge quand je devais
passer le BEPC. Voilà. Elle m'a dit que si elle ne le faisait pas, j'aurais des
soucis pour avoir une bourse d'études après le bac."
"Ah, ok!" fait
Albert qui a retrouvé ses esprits. "Et que comptes-tu suivre comme études
après le bac ?"
"Sincèrement monsieur, il
faut d'abord que j'ai le bac. Une fois que je l'aurai, je vais réfléchir. Parce
que j'ai fait tellement de plans dans ma vie làààà! Rien ne s'est réalisé
jusqu'à présent."
Mama regarde fixement Peter
comme s'il s'agissait d'un extraterrestre. Elle lui lance alors :
"Nous prions pour que tu
décroches ton baccalauréat."
"Que Dieu entende vos
prières madame. Comme ça au moins, je pourrai me casser de Port-Gentil et aller
rejoindre mes frangins qui jouent le basket dans de vraies équipes
professionnelles en France. Ce pays de Gabao là, tue trop les rêves des
enfants. Quel basket on peut jouer ici ?"
Dans tout ce que le type vient
de dire, j'ai seulement noté son intention de se tirer de Port-Gentil. Des
enfants, il en a déjà. Alors, un de plus ou de moins, il a des projets dans la
tête et il les fait en solo, apparemment.
"Je compte moi aussi
aller en France après le baccalauréat", annonce ma sœur. J'ai passé des
tests en ligne pour une école de commerce et ils sont bluffés par mes
résultats.
Yooo! Depuis quand cette fille
a décidé de me rouler et d'aller en France au lieu de me suivre au Ghana ou en
Afrique du Sud!!! Finalement, c'est mieux de faire ses plans toute seule !
"Enfin, j'irai en France
si bien sûr, tantine Bernadette garde le bébé comme elle l'a promis", fait
ma sœur en regardant ma mère avec insistance, comme pour l'hypnotiser.
"Mangez les enfants,
mangez. On parlera du baccalauréat et de l'avenir, lorsque nous aurons le
ventre plein", fait Albert.
C'est en silence que nous
terminons le déjeuner.
Alors que je débarrasse avec
l'aide de Miro, les adultes discutent dans le salon. Pupuce et son chéri
discutent là, derrière la maison. On entend alors quelqu'un entrer et fermer le
portail. Un invité surprise: Kaba.
Elle est pimpante comme à son
habitude. Elle vêtue d'un bel ensemble en bazin rose, avec foulard sur la tête.
Elle porte de jolis escarpins, comme si elle avait rendez-vous à la préfecture
ou dans une autre administration. Même le dimanche, après-midi, cette femme ne
relâche pas ses efforts pour montrer à tous qu'elle a de la classe. Elle arrive
et salue tout le monde.
Maman me demande alors de lui
apporter à boire. Quand Kaba remarque Miro, elle demande à maman de qui il
s'agit. Alors, maman lui répond honnêtement :
"C'est le petit ami de
Tania."
"Ah bon !", s'étonne
Kaba. "Et que fait-il chez toi ? Il a mangé à ta table ? C'est quoi cette
histoire ? Tu encourages maintenant ta fille dans ce genre d'histoire, c'est ça
!"
"Ah, la ferme !», lui
intime la Grand-mère. "Où sont passées tes bonnes manières !"
"Oh ! C'est comme ça
maintenant ! Je dois la fermer parce que les enfants ont maintenant le droit de
tout faire, c'est ça !"
"Hummmm! Agnès Mbeng,
tais-toi un peu ! Depuis quand as-tu perdu tout sens de la répartie ? Tu n'as
pas à parler à ta grande sœur de la sorte.", s'insurge Albert.
"Faites comme si je n'ai
rien dit. De toute manière, je ne fais que passer.", répond Kaba.
"Et qu'est-ce qui
t'emmène par ici ?", demande maman.
"C'est Mbeng qui n'arrête
pas de me faire le bruit à la maison. Il me fatigue les oreilles en répétant
que je dois venir chercher sa "fille" parce qu'il ne l'a pas mise à
la porte. Je viens donc la chercher. Enfin...en fait, non. Je n'ai pas envie de
l'avoir chez moi. Je m'en vais."
"Mais tu n'es pas obligée
de t'en aller maintenant. Reste discuter avec nous."
"Non, je risque de
commettre un crime si je vois cette imbécile qui a eu le culot d'aller se faire
sauter sans capote à quelques mois du bac. Qu'elle aille au diable! Mbeng la veut à la maison, qu'il vienne la
chercher lui-même."
Dès que j'entends cela, je
vais rapidement derrière la maison, histoire de mettre en garde, Pupuce et
Peter. Manque de pot, ils ont contourné la maison et sont à la terrasse,
devant. Et merde et merde et merde. J'entends crier comme si la mort frappait à
la porte :
"ON PEUT SAVOIR CE QUI SE
PASSE ICI?
C'est fort. La tension est
montée d'un coup. Deuxième gifle. Kaba est folle de rage. Ma sœur ne sait plus
où se mettre. J'entends seulement Peter qui menace la mère de sa copine :
"Tu la touches encore et
je te rends les baffes que tu lui donnes !"Tu la touches encore et je te
rends les baffes que tu lui donnes !"
Yooooo!
"Agnès, Agnès",
s'écrie maman. "Qu'est-ce qui ne va pas ? Pourquoi tu gifles l'enfant
?"
"Quoi, pourquoi je la
gifle ! Donc c'est ça que tu trames chez toi ??? Ne serait-ce pas ici par
hasard qu'elle est venue se faire baiser bêtement ? Une fille brillante qui n'a
jamais eu besoin de cours de soutien pour avoir des tableaux d'honneur à
l'école. Il faut bien qu'elle ait été influencée par TA fille, Bernadette. Ton
andouille de Tania, ce canard boiteux qu'il a fallu pousser comme une brouette
à l'école."
Yoooo! Qu'est-ce que je viens
faire dans cette histoire ? Mamooooo!!!!
"Agnès, fous le camp
d'ici s'énerve grand-mère. "Une femme incapable de parler correctement aux
autres n'a rien à faire en face de moi. Fous le camp avant que je
m'énerve."
"Je m'en vais. De toute
manière, ça toujours été comme ça. Tu as toujours cautionné les bêtises de
Bernadette, maman. Ça ne m'étonne pas ! Reste à faire vos magouilles ici. Vous
pouvez la donner en mariage cadeau, c'est pas mon problème."
Sur ce, elle s'en va comme
elle est venue. Et personne ne la retient. Je suis quand même sonnée. Comment
cette femme qui m'a mise au monde peut ainsi me rabaisser ? Elle l'a
systématiquement fait depuis que je suis enfant. Si j'avais vécu avec elle et
mr Mbeng je crois que je n'aurais plus de dents tant elle m'aurait cogné, vu
qu'elle m'a toujours trouvé bête. Il faut vraiment que je décroche ce
baccalauréat à la fin de l'année. Cela lui clouera le bec.
Miro s'est rapproché. Il me
sert dans ses bras et me murmure à l’oreille : "Je t'aime."
Heureusement qu'il est là,
parce qu'à cet instant, j'ai juste envie d'aller m'enfermer dans ma chambre et
ne plus en sortir jusqu'à demain.
"Repartons au
salon," nous intime Albert.
Assis là, dans le canapé, il
s'adresse à Miro :
"Que font tes parents
dans la vie, jeune homme ?"
"Mon père est Directeur
Général d'une boîte pétrolière et ma mère est femme au foyer."
"Yo, mec. Ton père peut
me trouver un petit taf quelque part ! Glisse lui deux mots, pour moi s'il te
plaît."
Vraiment, le type qu'on
appelle Peter...
"Tu cherches quoi comme
p'tit boulot?", lui demande Miro.
"Je sais pas, moi. Ma
mère dit que je dois me débrouiller pour payer les layettes pour les deux
enfants à venir. Il faut que je fasse quelque chose histoire qu'elle arrête de
me prendre la tête."
Albert, qui suit la
conversation avec un intérêt particulier, lance alors à Peter :
"Jeune homme, le travail,
il faut le prendre avec sérieux, d'accord. Il ne s'agit pas d'y aller
simplement avec l'intention de gagner de l'argent vite fait. Il faut le faire
consciencieusement."
"Ah, je vais encore faire
comment ? Je vais m'appliquer. Et si ça casse, ça casse. Je ne vais pas
forcer."
Albert est obligé de se tenir
la tête entre les deux mains tellement il est dépassé par l’imbécillité de
Peter !
16-
Cette nuit-là, couchée sur mon
lit, je reste là les yeux fixés au plafond. Je ne sais quoi penser de cette
journée. Et je suis troublée par l'annonce de Pupuce. À quel moment a t-elle
décidé d'aller étudier en France ? Jamais elle n'en a parlé.
Je suis là, en silence quand
madame arrive dans la chambre. Elle porte une chemise de nuit qui étouffe son
gros ventre.
"Je pensais que tu
dormais déjà."
"Non, je réfléchis."
"Dis plutôt que tu penses
à Miro, oui"
"Et si c'est le cas, je
ne vois pas où est le problème."
"Tu rêves vraiment ma
belle si tu penses que ses parents vont laisser votre histoire empêcher leur
fils de réaliser ses rêves."
"Ça veut dire quoi,
Pupuce?"
"Ça veut dire qu'ils te
tolèrent simplement parce qu'ils sont basés au Gabon en ce moment. L'an
prochain, ils seront dans un autre pays. Et ils ne vont sûrement pas t'emmener
dans leurs bagages."
"Je comprends mieux
pourquoi tu es tombée dans les bras de Peter, ma chère. Vous êtes tous les deux
des imbéciles."
Je me lève du lit et prends la
couverture avec moi. Je vais dormir dans le salon. Je pense que je ne pourrai
pas supporter cette nuit, ni les pleurnicheries de ma sœur, ni sa mauvaise
langue. Je suis vannée. Il faut que je garde l'esprit positif pour la suite.
J'envoie un whatsapp avant de
m'endormir.
"Je T''M"
Et je m'endors en ayant la
sensation que cette année, jamais je ne l'oublierai.
Deux semaines plus tard.
J'ai l'impression que maman a
un enfant de plus dans la maison.
En fait, depuis ce fameux
dimanche que personne n'arrive à oublié, monsieur Peter a du mal à rentrer chez
lui après les cours. De fait, il vient manger tous les jours à la maison en
sortant de Raponda. Donc, quand madame ma sœur arrive à la maison, elle rajoute
une assiette à table pour monsieur mon bof. Il est pile à l'heure13h. Il mange
tranquille et ensuite, retour en cours. Les deux fois où il n'est pas venu à
13h, il était là à 17h. Je pense que la nourriture de ma mère est tellement
bonne, qu'il a dû mal à répondre non aux "invitations" faites par ma
sœur.
Il mange et se rempli bien la
panse. Pourtant ses attentions vis-à-vis de ma sœur n'ont pas très
significatives. Monsieur sort avec Belinda en ce moment. Elle est en 3ème au
collège évangélique. C'est la cousine de Suzanne, une de mes amies de classe.
Je l'ai appris il y a quelques jours. Parait que Belinda raconte à tout le
monde que c'est elle LA TITULAIRE de Peter et que les autres sont des
passe-temps. Bref, j'ai partagé l'info avec Julien. Il m'a répondu :
"Sans blague! Mais moi,
je viens d'apprendre que Peter est avec Shanty, tu sais celle qui rendait Spyke
complètement dingue. Eh ben,figure-toi, que tout le monde les a vus, ou je
devrai dire, entendus faire l'amour dans les toilettes au Gymnase Total après
le match, mercredi dernier. L'affaire a même dégénérée. Il y avait une certaine
Chanice qui elle aussi est une autre des titulaires de ton beau-frère. Elles se
sont franchement rentrées dedans après le match. Les gens ont dû les séparer.
"
"Sans blague, Julien! Tu
rigoles."
"Je te dis que ma source
est fiable. Ton bof là, pardon. Je préfère me taire. Je ne sais pas ce que ta
sœur est partie chercher dedans."
"Tu ferais mieux de ne
pas te poser cette question. Jamais tu n'auras de réponse."
"En tout cas, quand on
parle du loup...monsieur arrive manger. Maman ne s'est pas rendu compte que sa
cuisine est devenue celle des restos du cœur."
"Oh, Julien! Comment
peux-tu dire des choses pareilles!"
"Je le dis parce qu'il ne
manque plus que le type emmène sa valise et s'installe dans ta chambre et
t'oblige à dormir au salon. Je m'en vais faire un tour. Ce type me sors par les
oreilles."
Sur ce, Julien s'en va en
évitant soigneusement Peter qu'il croise au portail.
"Comment va la belle
Tania?", ma fait Peter en me donnant une tape dans le dos.
Depuis quand suis-je devenue
sa potesse!?
"La belle Tania va bien.
Attends, je vais chercher ta chérie. Moi, je vous abandonne. Je vais voir mon
père."
Je vais chercher Pupuce qui
est en train de lire dans la chambre. Elle arrive avec un large sourire au
visage. Je ne m'occupe plus du reste. J'ai rendez-vous avec Magloire
Akendengue, mon cher et tendre père. En chemin, je fais ma prière. J'aimerais
le trouver sobre en arrivant là-bas.
Il habite du côté du quartier
Pavé centre social. Je me tape la route à pince car depuis l'année dernière,
j'économise sur l'argent du taxi que mon père nous donne chaque mois. Je veux
avoir une somme assez conséquente au moment où il faudra faire le bon choix
pour mon avenir. Je me suis renseignée sur les études au Ghana et en Afrique du
Sud. Je sais combien cela peut coûter. Il faut simplement que quelqu'un de bon
cœur, maman ou papa, décide de me suivre dans mon délire. Il faut que je sorte
du Gabon. Il est hors de question que je reste ici pour mes études. Je ne me
vois pas atterrir à l’université des sciences et techniques de Masuku, pour y
aller perdre mon temps. Trop de grèves dans l'enseignement tuent les espoirs
des jeunes.
Je veux faire des études
d'ingénierie. Je veux avoir mon diplôme et être bilingue pour entrer sans
problème dans le secteur pétrolier à Port-Gentil.
Une fois que j'aurais mon
premier emploi, j'envoie ma mère à auto-école et je lui paie une voiture.
Ensuite, je retape la maison dans laquelle nous habitons. C'est la maison que
lui a laissé feu notre grand-père.
J'ai des projets plein la tête
et celui qui est là-haut dans le ciel va m'aider pour les réaliser.
Je suis obligée d'enlever mes
chaussures en empruntant le chemin boueux qui me mène vers la maison de mon
père. Il s'agit d'une petite maison en dur dont la peinture aux murs à besoin
d'être rafraîchie.
Je cogne à la porte d'entrée.
Le paternel me crie d'entrer.
Je le trouve assis dans le
salon. Il semble bien calme et sourit en me voyant entrer.
"Comme vas-tu, ma
fille?"
"Je vais bien papa. Et
toi."
"Ça va très bien. Comme
tu vois, je suis en forme, je suis propre et je n'ai pas bu."
"Je vois ça, le boss. Je
suis contente pour toi. Mais, samedi je viendrai faire un peu de ménage dans
cette maison. Y a trop de désordre, le vieux!"
"Ah laisse! J'ai chassé
la fille qui était là avec moi. Tout ce qu'elle voulait, c'est seulement le
lit, le lit, le lit. Incapable de tenir une maison."
"Mais sinon, le vieux, je
ne suis pas venue t'écouter me raconter tes aventures au lit, où bien."
"Hummm! Mes
filles...toujours en train de faire semblant d'être choquées quand on parle de
sexe et après, ça nous arrive là-bas avec des grossesses !"
"Oh, papa! Arrête un peu!
Ne mélange pas tout. Je ne vais pas venir raconter mes petites histoires avec
toi, ou bien."
"Pardon, tu vas me rendre
sourd avec tout ton français-là. Je sais que je peux compter sur toi. Tu as la
tête sur les épaules. Celle de ta sœur voyage un peu trop entre mars et la
lune."
"Bon, sinon elle te dis
bonjour."
"Arrête de mentir, ma
fille. Ça ne te réussit pas. Cette fille-là et moi, on se rencontre en route.
Elle change de trottoir parce qu'elle a honte de moi."
"Oh! C'est quoi cette
histoire? J'étais pas au courant."
"Ça ne date pas d'hier.
Toi quand tu me rencontres en route, même si je suis bourré comme pas la peine,
tu ne peux pas passer sans t'inquiéter. Elle, elle trace sa route. Je n'en
parle pas parce que je ne veux pas me plaindre."
"Ah, le boss, je suis
désolée. Je ne savais pas que ça se passe comme ça entre vous. Tu aurais dû me
le dire depuis."
"Ah, elle a son père
Mbeng, qui est à Total et qui roule dans une grande Mitsubishi Pajero. Moi, je
suis dans ma vieille Toyota Corrola. Qui me remarque? Personne."
"Ah, le boss, tu sais que
tu es mon cœur! Pour rien au monde je ne t'échangerai."
"Y a que toi, pour me
considérer, y a que toi."
"Mais toi-même tu sais
que toi et moi c'est l'eau dans l'eau. Tu es l'amour de ma vie, papoumet!"
"Hummmm! La fille que
Dieu m'a donnée, là, elle sait baratiner les gens!" me fait-il en
souriant.
Je suis heureuse de le voir
rire. Un peu plus et il sombrait dans la déprime en me racontant le traitement
que lui inflige Pupuce.
"Bon, Tania Akendengué,
je t'ai appelé pour t'annoncer une bonne nouvelle."
"Monsieur Akendengué,
parle ; je t'écoute."
"Aujourd'hui, ça fait 4
mois que je n'ai pas bu une goutte d'alcool. J compte les jours. Je me sens
mieux, tu sais."
"Mais, je vois ça le
boss. Félicitations ! Je suis contente pour toi. Tiens le coup cette fois, s'il
te plaît !"
"Ça ira, ça ira. Je te
promets que ça ira. Voir moins
17-
"Mais dis moi Tania,
comment se passe la grossesse de ta sœur?"
"Oh, ça va le boss, ça.
Tout le monde s’occupe d'elle, maman, Mamie. Tranquille quoi."
"Ah! Et elle va
régulièrement à l'école, j'espère."
"Oui, de ce côté-là, ça
va."
"Et si tu me parlais du
côté qui ne va pas!"
"Ah, toi aussi monsieur
Akendengue! Je ne suis pas là pour parler des choses des autres!"
"Je t'écoute Mademoiselle
Akendengue. Je t'écoute."
"Non, y a rien. C'est
juste que le type qui l'a engrossée, attend deux enfants en même temps."
"Il a de l'énergie, ce
type! Il travaille où?"
"Il est avec nous à
Raponda. Il passe le bac en même que nous."
"Ah! C'est un lycéen! Ok,
au moins, elle a choisi quelqu'un de son âge."
"Ouais, ouais...",
fais-je en regardant dans le vide.
"Tu vas cracher le
morceau ou faut-il que j'aille voir Agnès Mbeng pour qu'elle me déballe tout ce
qu'elle a sur le cœur ! Figure-toi qu'elle m'a menacé la semaine dernière au
marché du grand-village. J'achetais tranquillement ma sardine fumée et elle
s'approche de moi pour me dire que ta sœur va finir comme moi, parce qu'elle ne
sait pas viser haut!"
"Oh! Et qu'est-ce qu'elle
voulait dire par-là?"
"Ah, vous les femmes et
la manière que vous avez toujours de comparer les hommes en ne tenant en compte
que leurs poches. Elle ose me balancer que si j'ai un peu de chance, peut-être
que le mari que Pupuce nous ramènera sera capable de sortir 5mille cfa pour la
dot!"
"Non, papa! Elle a osé
dire ça!"
"C'est la vérité que je
te dis. Je suis resté là ébahi! Cette femme n'a pas changé. Mais de là à
dénigrer sa fille à ce point ! C'est pour cela que je te demandais des
informations sur ce jeune homme. Peut-être que mme Mbeng aurait préféré qu'elle
fasse l'enfant avec un pétrolier ou alors le fils d'un PDG ou d'un
ministre."
"En tout cas...Dans cette
histoire, tout le monde va mettre sa bouche, car nous sommes tous dépassés.
Mais, sinon, on est obligé de rester positif."
"Dis-moi, elle était
pressée de pouponner, ta sœur? Elle est la meilleure de sa classe depuis des
années. Elle a les clés pour un avenir brillant ! Qu'est-elle allée faire dans
le lit d'un homme sans protection ? Dans les livres qu'elle lit, on ne parle
pas de la pilule ?"
"Le boss, cette
histoire-là, je ne veux plus en parler, parce que bientôt, on dira que c'est
moi qui l'ai enceinté."
"Tu as beaucoup d'humour,
ma fille. Bien, voilà une enveloppe. Il y a cent mille francs à l’intérieur.
Donne-la à ta mère. Elle saura quoi faire avec. C'est pour acheter la layette
de votre futur bébé."
"Ok, le boss. Vraiment,
cet enfant-là n'est pas encore né, mais tout le monde l'attend avec
impatience."
"Vous voulez nous faire
vieillir trop vite, on va encore faire comment !"
Arès avoir fait le ménage et
ranger un peu la maison, je m'en vais de chez mon père avec un sourire aux
lèvres. Il a réussi à me mettre de bonne humeur, ce type. Et je suis heureuse
de le voir plus en forme que la dernière fois. Quand j'arrive à la maison, il
est 19h. Je trouve maman assise dans le canapé en train de lire le quotidien
L'Union. Elle me sourit en me voyant rentrer.
"Miro était là, il y a
tout juste dix minutes."
"Oh! Il a dû m'appeler,
mais ma batterie est complètement à plat."
"Ah! Il a laissé deux
livres de philosophie pour toi."
"Chouette, chouette,
chouette. On les étudie en classe et on a dû mal à les trouver ici. Son père a
dû les acheter quand il était de passage à Paris."
"y en a vraiment qui ont
de la chance", me fait-elle en souriant. "Dis-moi, mademoiselle
Akendengué, où as-tu rencontré ce jeune homme?"
"La vieille, toi aussi,
je vais pas me mettre à te raconter mes petits secrets!!!"
"Arrête ton char et
réponds à ma question."
"Bon, on s'est rencontrée
à la plage, à SOGARA un dimanche. Mais, t'inquiète, ce n'est as mon corps en
maillot de bain qui l'a attiré, parce que j'étais encore tout habillée quand il
m'est entré dedans."
"Menteuse! Et dis-moi, il
n'a pas un ami qui aurait pu voler le cœur de Pupuce. Au lieu de ça, on se
retrouve avec ce Peter qui me fous des mots de tête à chaque fois qu'il ouvre
la bouche !"
"Ah, non, la vieille. Que
les choses soient claires entre nous à partir d'aujourd'hui. Je ne gère pas les
affaires de ma sœur. Je veux bien me confesser et reconnaître qu'elle était la
nuit où ils ont conçu leur enfant, mais ce n'est pas moi qui l'ai envoyée.
Qu'on ne me parle plus de cette affaire sinon, je pense que ma tête va
exploser."
C'est ça la nouvelle génération ? Je suis
simplement dépassée. Le type vient de me dire que le père de Miro lui a trouvé
un job pour les grandes vacances. Il va travailler 3 mois pleins à Maurel &
Praum, et lorsque je le félicite en disant qu'au moins, il pourra s’occuper un
tout petit peu de son bébé, il me réponds que cet argent, c'est pour payer son
billet pour la France. Il me dit qu'il a déjà ses plans et tout! Qu'est-ce qui
ne va pas chez ce type. Il fait les enfants comme ça pour le plaisir ? C'est ça
la nouvelle génération ?"
"Maman, je ne sais même
pas pourquoi tu te prends la tête! C'est toi-même qui veut les maux de tête
parce que c'est toi qui le laisse venir lorgner dans tes marmites et manger à
sa guise."
"Mais, je le fais en me
disant qu'à force de venir ici et de nous fréquenter, il changera un peu! Et je
pense que ta sœur aussi à besoin de l'avoir à ses côtés."
"Huummmm, Bernadette! Tu
es vraiment une maman moderne. Faut supporter, ça ira. L'enfant sera là en
juin. Après, tu pourras t'occuper d'autre chose que la bêtise de Peter."
"Mon Dieu! Moi qui
pensais que l'arrivée du bébé pouvait changer les choses, tu es en train de
m'ôter mes illusions !"
"Maman, il a déjà 4
gosses. Quelle différence y a t-il entre eux et celui qu'aura Pupuce. Il n'a
que des filles et Pupuce attend une fille."
"Tu penses que si elle
attendait un garçon, il réagirait autrement."
"Je pense que c'est un
égocentrique qui ne connaît pas la valeur d'un enfant ; et je crois qu'il
vaudrait mieux, pour l'équilibre mental de tout le monde, que l'on agisse comme
si cet enfant n'a pas forcément besoin de "ce" père-là."
"Ben dis donc ma chérie,
tes cours de philosophie te font vraiment mûrir !"
"Non, je pense que ce qui
me fait cet effet-là, c'est de savoir qu'un type comme Magloire Akendengue est
capable de me traiter comme si c'était lui qui avait planté la graine dans le
jardin de Kaba. C'est ça être père. Élever un enfant et l'aimer envers et
contre tout. C'est facile d'être distributeur de sperme ; c'est plus difficile
d'être père Tiens, voilà une enveloppe que papa m'a demandée de te remettre.
C'est pour l'arrivée du bébé. Il s'inquiète lui aussi pour Pupuce."
"Oh! C'est vraiment
gentil de sa part. Comment va t-il."
"Il ne boit plus, maman.
Il semble plus lucide. Et je croise les doigts pour qu'il ne replonge
plus."
"Je croiserai les doigts
avec toi, alors." Voir moins
18-
La vie suit son corps et la
grossesse de Pupuce la rend de plus en plus chiante. Elle me donne parfois des
envies de meurtre, mais je préfère m'éclipser et la laisser seule. Je dors au
salon quand elle me prend la tête. Quand maman en a marre de me voir installer
ce petit matelas dans un coin du salon, elle m'invite à dormir dans sa chambre,
plutôt.
Le bac, on ne parle que de ça.
Tu as envie de sortir un peu faire la folle au Diamant, et ta copine du blaze
te sort : "pardon, oh! Le bac-là, je dois l'avoir."
Tu veux juste aller un peu
faire la belle en maillot de bain le dimanche à SOGARA et les frangines du
quartier te répondent que vraiment, la terminale chauffe la tête. C'est à peine
si on respire encore dans ces terminales-là! Entre ceux qui gardent les doigts
croisés depuis le 1er jour de classe et ceux qui osent à peine te dire bonjour
tellement ils sont stressés, on a l'impression de passer une épreuve du fameux
examen chaque jour.
En classe, là-bas, c'est pas
la peine. Mr Komba, le professeur de mathématique ne parle que des résultats
qu'il attend. Il veut qu'on lui montre le feu à la fin de l'année. Il a déjà sa
liste d'élèves dont IL EST sûr. Ces élèves-là, n'ont même pas intérêt à rater
le bac!
C'est fort.
Y a que maman pour dire que
l'on doit apprendre à respirer et regarder les choses avec détachement. Bref,
c'est la folie.
Maintenant, si ce bac on ne
l'a pas, on fait quoi???
Moi, je ne me pose même pas la
question.
Il faut que je l'ai.
Et je l'aurai.
Hors de question que je rate
cet examen.
Je n'ai pas le temps de
revenir à Raponda l'an prochain.
Je n'ai pas le temps de rester
encore à Pog.
Et surtout, mon rêve doit
prendre forme dès le mois d'août, car à force de rêver, je commence à avoir des
maux de tête et à maigrir.
Je continue de faire mes
économies.
Il me faut de quoi payer mon
billet d'avion pour partir du Gabon.
Après, si je n'ai pas d'argent
pour vivre à l'étranger, tant pis.
Au moins, je serai parti d'ici
et je trouverai bien le moyen d'avoir une bourse d'études.
Je continue d'économiser même
les pièces de 5 et 25 francs.
Même si cela fait rire ma sœur
Pupuce lorsqu'elle prend son taxi juste devant la maison, alors que je me tape
le trajet pour l'école à pieds.
Ce matin, elle se moque de moi
en me disant :
"Mais pourquoi tu ne
demandes pas au chauffeur de ton chéri de venir te chercher."
Et je lui réponds:
"Mais pourquoi tu ne vas
pas en cours à pieds étant donné que ton chéri n'a pas de chauffeur."
Elle s'en va vexée, mais je
m'en fous.
Il est 14h 30 ce 12 mai.
Sharonna Gaëlle et ma combi Jileska sont là, avec moi. Nous nous installons à
la table de la terrasse, derrière la maison. C'est un moment intense de bosse dure.
Un devoir de mathématique et un autre de science physique à préparé. Maman nous
a acheté des boissons et les a rangées dans le réfrigérateur. J'ai fait un
gâteau au chocolat pour accueillir mes copines et miss Jileska a pensé aux
beignets brochettes de chez Maman pour nous ouvrir l'esprit. Huuuummmm! C'est
doux d'être avec les copines!
Avec Sharonna, ça ne blague
pas! Elle avalent les mathématique comme d'autre avalent des bouteilles de
Castel ou de regab dans les bars. C'est une craque depuis la 6ème. Nous sommes
amies depuis là. C'est notre passion pour les mathématiques qui nous a unies.
Gaëlle est la meilleure du group en anglais et en français; c'est une matheuse
qui lit beaucoup, surtout les romans noirs, épouvante, suspense, policier. Elle
a l'esprit d'analyse et de critique très aiguisé. Jileska, elle, se définit
comme une rescapée. En fait, elle a atterri en série scientifique par défaut.
Elle déteste lire, elle est nulle en langues. Mais la biologie, c'est son truc.
La chance qu'elle a, c'est que sa mère s'occupe depuis le premier jour, de son
enfant. Ma combi est tombée enceinte quand nous étions en 5ème. La mère n'a pas
fait trop de bruit. Elle lui a seulement dit qu'elle devait réussir pour
pouvoir dans le futur prendre soin de son enfant.
Nous sommes là, à rigoler en
parlant des péripéties en classe, histoires de prendre notre élan avant de nous
lancer dans les livres et les cahiers. Quand on commence, parfois, 22 heures,
nous trouve là. Alors...
"Monsieur Nguema, mon
cher père ingénieur de son état, m'a inscrit à un programme qui me permettra
d'avoir une bourse d'excellence si j'ai de bonnes notes au baccalauréat. C'est
un truc de l'ambassade du Japon, je crois.", nous lance Sharonna.
"Mais toi, c'est obligé
que tu aie une bourse. C'est quand même toi la grande bosseuse.", fait
Jileska.
"Là, où vous me voyez là,
j'ai même pas envie de devenir ingénieur." continue Sharonna.
"Ah, pardon. Arrête de
nous bassiner avec tes mêmes histoires. Intelligente comme tu es, tu vas aller
faire le conservatoire??? Qu'est ce qui ne va pas? Là, tu veux seulement que
monsieur Nguema, ton cher père, te tue. Il te vois déja grand cadre là-bas à
Total, comme lui.", lance Gaëlle.
"ne me dis pas que tu
n'as pas abandonné ce rêve, Sharonna! Ton père va te tuer sec quand il va
apprendre ce que tu as l'intention de faire.", fais-je.
"Les filles, les filles,
les filles! Dès que je pose le pied aux USA, monsieur Nguema ne pourra plus
rien me faire. Je vais aller à la fac comme prévue, mais à côté, je vais
m'inscrire à une école d'arts dramatiques. Je veux devenir actrice et monter
sur les planches pour jouer de grands rôles comme celui d'Andromaque, de
Phèdre, de Juliette. Vous comprenez au moins. C'est mon rêve.", lance
Sharonna.
"La fille-ci, est
vraiment particulière! Nous, on se gratte la tête pour savoir où on va trouver
l'argent pour payer ne serait-ce que le billet pour voir un jour un pays
étranger ! Toi, tu as déja de grands rêves dans la tête!", fait Jileska.
"En fait, je voulais
aller en France, cela aurait été plus facile pour moi. Mais comme mes deux
grands frères sont déja à Washington, je vais me débrouiller là-bas. Je vous
enverrai des photos. Mais il est hors de question que je renonce au théâtre.
Qui sait, je deviendrais peut-être une grande actrice. Vous allez me ragarder à
la télévision et tout." continue Sharonna.
"Et moi qui pensais que
mon rêve était trop grand, je me rends compte que je suis raisonnable,"
fais-je. "Je veux simplement aller à Accra ou à Pretoria. En tout cas,
partir du Gabon quoi. Je ne veux pas rester là et attendre que les autres
viennent me raconter!"
"Moi-là, je pense que je
vais aller mourir à l'université à Masuku. Qui va me gaspiller le Ghana ou la
France. Ma grande sœur Sybille est là en train de moisir à l'UOB. Mon
grand-frère Franck a eu la chance d'avoir la bourse pour l'Afram. Et ma grande
sœur Pauline est à l'institut de gestion. C'est pas moi qu'on va envoyer à
l'étranger, oh! Y a les dô!" nous fait Jileska.
"Moi, je pense aller à
Cape town. Je vais rejoindre ma sœur Charline qui est déjà là-bas. C'est déjà
décidé." conclut Gaëlle.
Nous commençons à travailler
quand Jileska me demande :
"Au fait, Tania, que va
faire Pupuce après le bac?"
"Elle fait ses plans en
secret. J'ai seulement appris au détour d'une conversation qu'elle a
l'intention d'aller en France. Papa Jimmy fait des plans pour elle. Il a déja
l'argent du billet et son nom est déja sur la table d'un de ses ancien camarade
d'université: elle aura la bourse les yeux ouverts. Elle n'a pas les mêmes
soucis que nous, Jileska."
"Oh! Mais pourquoi il n'a
pas donné ton nom aussi à son collègue. S'il peut faire avoir la bourse à
Pupuce, il le peut aussi pour toi, Tania. Ou bien!?"
"Pardon, oh! Ne me pose
pas de questions compliquées. Je préfère de loin résoudre des equations à
plusieurs inconnues."
"Yooooo!!!! Non, il
blague, il va t'aider.", insiste Jileska.
"Mama, laisse
l'affaire-là! Le billet de Pupuce est réservé depuis l'année dernière. Il nous
a montré la réservation comme ça! Tu comprends. Elle accouche, elle décroche le
bac. Et le 3 septembre, elle est dans l'avion pour Toulouse. C'est déjà écrit,
même le ciel a acquiesé."
Jileska qui n'en revient
toujours pas reste me regarde fixement.
"Yo! Y en a qui ont de la
chance!" fait-elle.
"Elle a même beaucoup de
chance !", lance Gaëlle. "Elle a la chance que papa Jimmy n'est pas
réagi comme Kaba. Sinon, elle allait rester ici pour remplir les rangs de
l'UOB."
"Et son type? Ton bof
chéri, ce cher Peter?", demande Sharonna.
"Pardon, les filles. Ne
me fatiguez pas avec ce type. Je ne m'occupe pas de ses affaires."
fais-je.
"Humm, tu devrais,
pourtant ! C'est le père de ta nièce à venir. ", me lance Gaëlle,
"Oui, oui, c'est pour ça
que je lui dit poliment bonjour. Mais, franchement, je ne suis pas obligée de
me taper la conversation avec lui. Je sais qu'il a de grands projets. Il a des
frangins basketteurs qui sont déjà là-bas en France et qui jouent dans des
clubs. Donc, les types sont en train de lui arranger son affaire."
"Hummm! Il faut vérifier
cette histoire ! Quels frangins qui vont lui arranger l'affaire!!!! Pardon,
c'est parce que je ne veux pas mettre ma bouche dans les histoires des autres!
Dis à Pupuce d'enlever le coeur là. Elle accouche, elle se remet en forme, elle
va en France et elle s'attrape un type potable là-bas!", fais Gaëlle.
"Hummmm! La fille de là!
Faut nous dire, oh! C'est comment tu te braques comme ça sur l'affaire là!
Qu'est-ce que Peter t'a fait. Faut nous dire."
"Laissez, je préfère me
taire. C'est dans ma bouche on va manger piment!", lance Gaëlle.
"Mais la go, tu ne peux
plus te taire. Tu en as trop dit. Crache le morceau ! Qu'est-ce qui se
passe?", lance Jileska.
"Rien, oh! Pardon,
faisons les maths seulement.
Tout le monde la regarde sans
trop comprendre. Au fond de moi, je n'ai que faire de ce que Peter peut
inventer comme coup de baguette magique pour arriver en France. Il dit à tout
le monde que le basket peut l'emmener très loin, car il est l'un des meilleurs
joueurs gabonais du moment. Mais, avec les parents qui n'ont rien, quelle magie
va t-il opéré, lui qui trébuche à l'école et un dossier scolaire qui est triste
à lire?
Bref... je préfère me poser
les questions auxquelles j'ai des réponses.
19-
Une semaine plus tard, je suis
dans ma chambre, couchée sur le lit et je relis mes cours d'histoire-géo.
Maman arrive et s'assoit à mes
côtés. Je me relève pour lui faire face.
"Tout va bien pour toi,
ma fille? Et tes cours? ."
"Tranquille, maman. Tout
va bien. Enfin, tu me connais."
"Oui, je te connais. Je
sais que lorsque tu veux quelque chose, tu t'accroches pour l'avoir. Je suis
tellement désolée de ne pas pouvoir t'offrir des études supérieures dignes de
ce nom ! Avec ce salaire d'institutrice et les miettes que je me fait en
donnant des cours particuliers, je peux à peine vivre décemment."
"Maman, le Prêtre a dit
un jour : il faut rêver à la hauteur de ses moyens ; ça évite de commettre des
pêchers. J'ai un rêve à la hauteur de mes moyens. Ne t'inquiète pas pour moi.
L'essentiel est que je réussis et décroche mes diplômes."
"Dieu t'a vraiment bien
faite, Tania Akendengué. Je suis heureuse d'avoir une fille pareille !"
"Et moi, je suis heureuse
d'avoir une mère comme toi, tu peux pas savoir!"
Nous nous serrons dans les
bras l'une de l'autre et ne nous rendons pas compte que Pupuce est entrée dans
la chambre.
"Dis donc, arrêtez, vous
allez me faire pleurer", fait Pupuce.
"Tu peux pleurer, Pupuce.
Nous sommes habituées à tes larmes.", lui fais-je.
"Très drôle Tania
Akendengué. Heureusement que tu est bien forte, car j'aurais besoin que tu me
tienne la main en salle d’accouchement ! Je sais pas comment je vais faire pour
expulser ce bébé!"
"Dans tes rêves, ma
chère. Le seul accouchement auquel j'assisterai, c'est le mien. Il est hors de
question que je sois traumatisée ; ça pourrait me bloquer toute envie d'avoir
des enfants plus tard.", lui fais-je.
"Dis pas de bêtises
Tania. J'ai besoin de toi! Tu ne peux pas me lâcher !", insiste Pupuce.
"Marjorie Akendengué,
arrête de faire des plans dans mon dos. Je te dis que je ne vais pas rentrer
dans cette salle d'accouchement et je n'y mettrai pas les pieds. Même à la
télé, j'ai du mal à regarder ce genre de chose, et tu penses que je viendrais
les vivre en live! C'est comment!!!!"
"Je te laisse le temps de
te faire à l'idée. Je ne rentre pas dans cette salle d'accouchement si tu ne
viens pas avec moi ! Tu t'imagines pas la trouille que j'ai rien que d'y
penser."
"Mama, tes histoires des
blancs là, c'est pas avec moi. Si toi tu as appris à l'école mixte, moi j'étais
à l'école du parc, d'accord. Donc, c'est pas avec moi que tu vas venir faire
tes chichi d'enfant gâtée, d'accord."
"Tu es une sacrée
rabat-joie, Tania Akendengué. Tu verras comment tu seras paniquée quand ce sera
ton tour."
Yoooooo! Pardon, je préfère
aller me fourrer la tête dans mes livres !
Mon téléphone vibre à ce moment-là.
Je le prends et m'éclipse pour aller répondre dans la douche.
"Comment va ma beauté
?"
"Oh! J'adore cette voix.
Comment le plus beau garçon sur terre."
"Tu me manquais trop. Je
suis à ton portail."
je me mire rapidement histoire
d'être sûre que je suis dans mon élément et je cours vers le salon. Miro est
déjà là, assis face à maman. Ils conversent comme de vieux potes.
"Hey beauté, je demandais
à ta mère la permission de t'enlever le week-end."
"Mais, c'est mon
anniversaire! Je ne peux pas bouger."
"Tiens donc ! Et pourquoi
ça!", fait maman.
"Mais, je...j'ai
l'habitude d'être avec toi le jour de mon anniversaire. Et là, c'est spécial.
Nous allons avoir 18 ans!"
"Ben, raison de plus pour
demander un peu de liberté. Ne t'inquiète pas pour moi; je boirai un verre de
mousseux en trinquant à ta santé."
"Mais...mais..."
"Y a pas de mais qui
tienne. Allez faire la fête ensemble. Ça te permettra de déstresser avant ton
examen."
Yoooo! Ma mère me vend comme
ça!
"Et où ira t-on?"
"Oh, nous allons passer
le week-end à Libreville. Nous partons vendredi soir avec mes parents."
"Oh, d'accord. Je vois
que tout est déjà ficelé!"
"Et oui! Ne t’inquiète de
rien. Fais simplement tes bagages. J'enverrai Samba te cher à 17h, car nous
devons être à l'aéroport à 17h 30,"
"D'accord. C'est noté!
Mais comment suis-je sensée passer la semaine au calme en sachant que je vais à
Libreville pour mon anniversaire !"
"On n'a pas tous les
jours 18 ans, ma chérie!"
Sur ce, il m'embrasse sans se
soucier de la présence de ma mère.
"J'aurais bien invité ta
sœur à venir avec nous, mais tu sais qu'elle ne peut pas voyager dans son
état."
ET QUI A DIT QUE J'AI ENVIE DE
PASSER CE WEEKEND LA AVEC PUPUCE!!!???
Je me montre égoïste, cette
année. Je veux un anniversaire, seul avec mon chéri. Pupuce n'a qu'à faire la
fête avec son type. Voilà!
J'accompagne Miro jusqu'à la
voiture où l'attend le chauffeur. Là, je lui demande:
"Tes parents ont accepté
comme ça, de me payer un week-end à Libreville."
"Mon père sait que je
suis fou de toi, bébé."
"Et ta mère?"
"Oh, elle a peur que tu
la remplaces dans mon cœur."
"Oh! Compris. Je te
promets d'être la plus douce de toutes les filles pendant ce week-end. Je ne
répondrais à aucune de ses attaques."
"Oh! C'est vrai ce
mensonge?! Je t'aime malgré tout. Reste-toi et tout ira bien. Elle s'habituera
au fait que tu as volé mon cœur."
"Pince-moi, s'il te
plaît. J'ai l'impression d'être en plein rêve."
"Et que diras-tu le jour
où je t'emmènerai à New-York?"
"Commençons par aller à
Libreville, mon chéri. Ensuite, on verra.
"N'oublie pas que je
t'aime Tania Akendengué."
"Oh! Je ne risque pas de
l'oublier ! ", fais-je en répondant à son baiser.
La voiture s'en va et je
reviens dans le salon.
"Dis, maman, on fera
comment le weekend prochain pour ne pas se retrouver dans le même lit, lui et
moi."
"Oh, ça, ce n'est pas mon
problème ma chérie. Tu es une grande fille, penses à prendre des préservatifs à
la pharmacie avant de monter dans l'avion."
"Oh! Ça c'est qu'elle
mère qui jette sa fille comme ça dans les bras d'un homme."
"Mademoiselle Akendengue,
je préfère te savoir en week-end avec ce garçon bien élevé plutôt qu'en boîte
de nuit avec je ne sais qui. Au moins, tu n'auras pas besoin de sortir par la
fenêtre !"
"Sinon, dis la vérité
maman. Il te plaît bien ce Miro!"
"C'est à toi qu'il est
sensé plaire. Je demande juste au ciel qu'il te traite bien et continue à te
couvrir de tendresse."
"Ok, madame. Je te
promets qu'on fera l'amour comme des bêtes, le week-end prochain."
Devant la mine ahurie de ma
mère, je suis obligée de dire: "J'rigole!"
"Je préfère ça. Mais, je
mettrai moi-même cette boite de préservatifs dans ton sac de voyage. Et viens
avec moi dans la chambre."
Je la suis dans sa chambre.
Arrivée là, elle fouille dans le tiroir au chevet de son lit et en sort deux
billets de 10mille.
"Prend-les et achète toi
une jolie robe pour le dîner de ton anniversaire. Faudrait pas que celle qui te
sert de belle-mère trouve quelque chose à redire sur ton habillement."
"J'aurais beau être
habillée en princesse qu'elle trouvera toujours quelque chose à dire."
"Dis-moi, est-elle la
fille d'un ambassadeur ou d'un chef d'entreprise ? Où se sont-ils rencontrés
?"
"Oh, non. Ni diplomate ni
chef d'entreprise. Elle faisait la vie dans les rues de Brazzaville. Il était
en mission de longue durée là-bas. Elle s'est accrochée à lui. Il lui a payé
des études à l'université de Nanterre, car elle avait au moins son
baccalauréat. Voilà."
"Mais alors, pourquoi
voit-elle d'un mauvais œil ta relation avec son fils? Pourquoi t'a t-elle
traitée de croqueuse de diamants à ce dîner il y a deux mois."
"Oh! Elle a oublié d'où
elle vient. Elle veut me faire croire qu'elle a toujours vécu dans le luxe et
l'abondance. Elle m'a encore répété qu'elle espère que Miro me lâchera et
sortira avec une fille de bonne famille."
"Ce garçon est tellement
amoureux de toi que sa mère se fout les doigts dans les yeux si elle pense
qu'il te laissera tomber. Continue d'être polie avec elle ; ne fait aucun
esclandre."
"C'est ce que je compte
faire, ne t'inquiète pas maman."
Je m'en vais dans la chambre
heureuse d'avoir tenu ma langue. Il aurait fallu d'une seconde pour que je
raconte tout à maman. Cassandra, la mère de miro, a osé me coincer un jour dans
la cuisine, il y a 2 semaines pour me demander si j'ai envoûté son fils. Elle
en est presque arrivée à m'étrangler en m'accusant d'avoir recours à des seaux
et des mixtures pour "marabouter" son fils.
Je l'ai regardé avec des yeux
innocents et lui ai répondu :
"c'est quoi le
maraboutage, Cassandra?"
Là, elle a consenti à me
lâcher et m'a dit :
"Oh, rien, c'est un truc
dont les femmes parlent beaucoup en Afrique! C'est rien."
Et toute honteuse, elle est
partie dans sa chambre et m'a foutu la paix.
20-
La semaine passe très vite.
J'ai que la tête dans les nuages tellement je pense au week-end. Dieu, qu'est
ce qui va se passer là-bas à Libreville? Moi qui vais parfois passer les
vacances là-bas chez, l'oncle Alexandre, le frère aîné de maman, qui habite à
Owendo, me voilà qui vais maintenant pour nous. Et ils occuperont la chambre
juste à côté. Comme par hasard, les deux chambres sont communicantes. Bref, je
vais voir la vie en mieux ce week-end. La fille d'e Magloire Akendengue aura
des étoiles dans les yeux. Je vais tenter de faire la fille qui connaît, oh!
Faut pas qu'on me prenne pour la maboule qu'on a sortie de son trou. C'est pas
parce que je vis au quartier Château d'eau à Port-Gentil que je dois jouer à la
broussarde. On regarde tous la télé, alors, je vais faire comme si je n'étais
pas impressionnée.
Mais bon, si les choses là-bas
me dépassent, je serai obligée d'appeler ma mère ou ma combi Jileska pour leur
raconter des choses et avoir des conseils.
Pour l'instant, le prof de
français nous fatigue avec ses histoires de romans gabonais qu'on doit
"absolument lire" pour notre propre culture. On dirait qu'il est
copain avec tous les écrivains gabonais là, dont il parle. Parce que façon, il
nous demande d'acheter les livres là! Aujourd'hui, il est
"émerveillé" par la plume d'un certain Hallnaut Engouang, qui a écrit
le roman dont le titre est LES VEUVES. Il n'arrête pas de nous bassiner avec
cette histoire et répète que vraiment ce roman "est de bonne
facture". Yooo!!!!! Heureusement qu'il est professeur de français parce
qu'on pourrait croire qu'il se shoote avant d'arriver en classe; donc, comme
ça, on doit "absolument" acheter ce livre qui coûte 12mille francs!
Là, Prudence, la tête brûlée de la classe, lance:
"Ah! Monsieur! Les poches
sont vides oh! La littérature gabonaise, aussi, ça coûte cher, hein!"
"Mais, mlle Matsanga, les
baskets que vous portez aux pieds coûtent 5 fois plus cher que ce livre!
Pourtant, vous les avez achetés."
"Mais, monsieur, c'est
pour le swagg! Dites-moi qui va être épaté parce que j'ai acheté ce roman-là!
Personne."
"Ne vous faites pas plus
bête que vous ne l'êtes, mlle Matsanga. Je vous signale que vous pouvez tomber
sur un texte gabonais le jour du bac."
"Aka! Ça va faire mal
monsieur. Parce que la façon dont vous avez parlé du style de ce romancier-là,
on est foutu! Où est-ce qu'on va trouver le même vocabulaire que vous pour
réussir notre commentaire composé."
"Chère mlle Matsanga, et
vous tous ici dans cette classe : éteignez votre télévision. Arrêtez de
regarder Novelas TV et Nollywood Tv. Et allumez vos cerveaux en lisant LES VEUVES
ou encore LA NUIT SERA LONGUE ou encore MA MÈRE SE CACHAIT POUR PLEURER. Tenez,
voilà un livre qui devra vous occupez ce week-end. Prudence Matsanga, Jileska
Obame Ndong et Gaëlle Azizet et Fidolin Malekou, vous avez une semaine pour
nous préparer une fiche de lecture sur ce livre. Il s'agit de ce petit livre
très sympathique dont le titre est LES DOUX MURMURES DE MON ENFANCE. Vous allez
vous régaler. Avant de rêver d'aller à l'étranger, vous êtes priés de consommer
gabonais. Vous aimez les feuilles de manioc et l'odika; vous aimerez lire vos
compatriotes. Car charité bien ordonnée commence par soit même."
"Mais monsieur, moi
j'aime pas trop la charité. Je ne suis pas une mendiante."
"Très drôle mlle
Matsanga. Vous avez beaucoup d'humour. Alors, faites-nous rire mercredi
prochain en nous présentant ce livre."
"Vous êtes dur en
affaire, monsieur."
"N'aggravez pas votre
cas, mlle Matsanga."
Le cours continue dans cette
humeur bon enfant. Jileska n'arrête pas de raconter sa vie à Jacques, son
voisin de table. Moi, j'ai la tête dans les nuages. Vivement le week-end.
A la sortie des cours, les
filles me disent qu'elles passent le soir même à la maison. Nous allons
travailler ensemble. Jacques et Fidolin s'ajoutent dans le lot. C'est ok pour
moi. Je sais que maman n'y verrai pas d'inconvénient.
"Donc, je vous attends à
18 heures chez moi.", fais-je en quittant le groupe.
Je me dépêche. J'ai
l'intention d'aller me perdre à MTK (friperie), pour trouver la robe qu'il me
faut pour le dîner de mon anniversaire, samedi. Ça me laisse le temps de l'a lavé
et la repasser de sorte qu'elle soit impeccable samedi. Faut pas vous moquer de
nous autres. C'est à MTK que je vais mourir pour acheter tous ces vêtements que
les amies de Miro (les petites tissmées du Lycée Victor Hugo), on le courage de
m'envier ! Vraiment... Ce sont elles qui vont en France et c'est moi qui est le
swagg lors de leurs petites sorties !
J'arrive rapidement à la
maison et je me change. Quand je sors avec l'intention d'aller rapidement au
marché, maman et Pupuce arrive. Elles font une tête enterrement.
"C'est comment ! Qui est mort
?", suis obligée de demander.
Maman me regarde dubitative.
Pupuce me regarde comme si j'étais transparente.
"Mais, dites ce qui se passe
!"
Là, maman, se tient la tête
comme si elle devenait trop lourde et m'annonce :
"Ta sœur attend deux
bébés au lieu d'un."
"Tu t'imagines, Tania.
Deux bébés. Comment vont-ils sortir de mon ventre ?"
"Ne dis pas de bêtises,
Pupuce. Vas te reposer plutôt."
Ma sœur s'en va en se parlant
à elle-même. Moi, je suis tellement sonnée par la nouvelle que je suis obligée
de rire.
"Maman, dis-moi que c'est
une blague."
"On ne blague pas avec
ces choses-là, chérie !"
"Yo! Vraiment Dieu
réellement le sens de l'humour. L'accouchement, c'est dans un mois et c'est
maintenant qu'on apprend la présence de ce deuxième bébé!!!"
"Pardon, j'ai mal à la
tête. Je vais me reposer."
Je reste là au salon, n'en
croyant toujours pas mes oreilles ! Me voilà maintenant assise dans le canapé.
Je me rends compte que la vie de quelqu'un peut changer du tout au tout, en un
clin d’œil.
21-
Je laisse là le problème de
Pupuce et de bébés. Ma sœur a décidé de nous faire voir double et on n’y peut
rien. On aura bien le temps de penser à tout ça !
Je cours vers MTK. Je vais
chercher encore la robe de rêve.
Je marche assez vite. J’ai
hâte d’avoir cette robe-là sous les yeux. Je la veux rose ou bleue, jolie en
tout cas. Pas décolleté, car mes seins sont tellement sauvages qu’ils
pourraient se retrouver dehors en pleine piste de danse. Donc, pas de
décolleté. Je n’en mets jamais ; alors que Pupuce, elle, aimait bien mettre ses
seins en valeur. Nous avons une grosse poitrine, qui me dérange fortement,
surtout pendant les cours d’EPS. Je préfère mettre mes jambes en valeur parce
qu’elles sont minces et belles. Quand maman me voit habillée en short jean,
elle me dit tout le temps : « j’étais comme toi une époque, jeune et mince.
Regarde-moi aujourd’hui. » ce me fait rigoler. Je me demande ce que je dirai à
ma fille quand elle aura 20 ans et que je me trouverai bien moche face à elle !
Il fait chaud et il y a foule
à la fripe. Les gens se battent devant les tables et les brouettes en bordure
de route, où sont exposés pelle mêle les vêtements. Pardon, je préfère alors me
jeter à l’intérieur, loin de la route et des curieux qui pourraient me
reconnaître. J’arrive là et je tombe sur cette Larissa, l’ex de mon père.
« Huuuummm ! Akendengue, tu
fais quoi ici ? »
« C’est mon anniversaire dans
ce weekend ; je viens m’acheter une robe. »
« Eh ! Les jeunes ! y a quoi
même ! »
« Mais, tata Larissa, j’aurais
18ans. »
« Pardon, ne viens pas
m’appeler tata devant les gens. Est-ce que j’ai l’âge de ta mère ! Allez, tiens
les 50 mille là et disparais. »
« Oh ! Merci Larissa ! Merci.
»
Alors que je la remercie encore,
je vois un blanc qui arrive vers elle et lui passe le bras autour du cou.
« Alors poupée, avec qui
discutes-tu ? », fait-il après lui avoir donné une tape aux fesses.
« Oh, Louis-Georges, je te
présente Tania, une amie de Toulouse. »
Yo ! Cette femme-là a mis les
pieds à Toulouse, quel jour ? Et moi d’abord, en quelle année ai-je habité en
France ? Jusqu’à preuve de contraire, je ne sors pas en vampire, donc…
« Tania a dû rentrer
précipitamment de France parce que son papa est malade. »
« Oh ! Enchanté de faire ta
connaissance, Tania. Allez poupée, on rentre. »
Yo ! Donc cette go de Sindara
a laissée tomber mon père pour aller faire la vie aux blancs ! Papa ne pouvait
pas lutter. Car vu la manière dont ce blanc-là la bécote alors que je les
regarde s’éloigner, mon père aurait attrapé une rage de dents.
Vraiment, il faut vivre pour
voir ces choses-là ! Bref, je les laisse partir et j’ai envie de rire en voyant
cette Larissa se battre pour avancer avec ses talons aiguilles de 21 cm. Elle
est vêtue d’une jupe en sky, à raz des fesses et sur la tête, elle a des rastas
de couleur bleue qui lui tombe dans le dos. Bref, un véritable sketch ambulant.
Le plus important est qu’elle
m’a donné ces 50 milles francs. Du coût, je décide de me prendre une robe,
Morgan, fin de série, avec une paire de chaussures. Le tout me coûte 30mille.
Je rentre tranquillement à la maison en sifflotant. J’ai bien l’intention de
garder dans ma tirelire les 20mille que maman m’a remis. Avec les autres 20
mille, je vais m’acheter un glosss, un parfum et ma crème Mixa pour le corps.
La vie est belle, tout d’un
coup !
Quand j’arrive à la maison, je
trouve maman dans le salon en grande discussion au téléphone avec quelqu’un que
je ne reconnais pas tout de suite. Je n’ai pas envie d’en savoir plus. Je dois
travailler avec mes amis, donc, le mieux est de ne pas poser de questions pour
ne pas avoir l’esprit embrouillé.
Je vais dans la cuisine et me
sert à manger une assiette de riz accompagné de ragoût aux lentilles. Je
m’assois à la table de derrière pour manger. Je suis là tranquille en train de
bouffer et de pianoter sur mon téléphone, histoire d’envoyer des baisers par
whatsapp à Miro, lorsque Pupuce vient s’assoir à mes côtés. Elle me glisse tout
doucement dans l’oreille :
« Kaba est complètement folle
! Elle pète les plombs au téléphone comme si c’est moi qui ai demandé à Dieu de
m’envoyer deux bébés au lieu d’un. Elle n’y connaît rien en hérédité ! »
Je la regarde sans trop savoir
quoi dire. Elle repose sa tête sur mon épaule et me confie :
« Je suis complètement perdue
Tania. Je sais plus quoi penser. »
« Ne pense pas. Repose-toi et
laisse Dieu faire le reste. Le bac avant tout. »
« Heureusement que tu es là !
», me fait-elle en me posant un bisou sur la joue.
Elle s’en va en douceur, comme
elle est venue.
Je reste là bien décidée à ne
pas poser de question.
Le groupe arrive quelques
instants plus tard alors que maman est partie faire un tour au Super CkDo pour
acheter les noix de cajou que réclament tous les jours à 22heure, les bébés de Pupuce.
Nous nous installons à la
table de la salle à manger. La bosse peut commencer. Les cerveaux se mettent en
ébullition. Tout le monde a bien sûr arrêté son téléphone. Jacques et Fidolin
sont les garçons les plus acharnés que je connaisse ; ils sont déconneurs quand
il faut mais lorsqu’il s’agit de bosser, on peut compter sur eux. Fidolin a
l’intention de tourner tout Raponda à poil s’il décroche le bac au premier
tour. Jacques, lui, ira danser toute la nuit à La Villa. Il s’interdit d’aller
en boîte de nuit tant que le bac n’est pas passé. Moi, je me gratte la tête et
je prie fort pour avoir ce diplôme. Jileska, elle, est pleine d’assurance et
refuse d’imaginer le pire. Sharonna et Gaëlle se disent que pour elles, c’est
juste une formalité à remplir.
Maman arrive quelques instants
plus tard. Elle a pensé à nous acheter deux grands paquets de chips, histoire
de nous motiver.
Alors que nous continuons de
travailler, Jacques demande à Jileska si elle est libre ce samedi. On comprend
vite que le type a une idée derrière la tête et que la petite lui plait
drôlement. Et elle lâche.
« Au non, je suis à Libreville
ce weekend. »
« A Libreville !! », fais-je
étonnée. « Depuis quand passes-tu des weekends à Libreville. »
Jileska se mord les lèvres et
lance :
« En fait, je viens de
l’inventer. Je… »
« Je comprends », fait
Jacques. « C’est une manière de me dire que tu n’as pas mon temps. »
Elle sourit sans rien ajouter.
Je pense qu’elle aussi, en pince pour lui.
« Qu’est-ce que Pupuce fait
pour son anniversaire ? », demande Gaëlle.
« Je ne sais pas. Je suppose
que nos frères viendront diner avec elle samedi. Maman a dit qu’elle fera à
manger pour vingt. »
« Oh ! en tout cas, si je
m’ennuie, je viendrai manger ici pour fuir un peu la maison. C’est un peu tendu
ces temps-ci. », lance Sharonna.
« Oh ! que se passe t-il ? »
demande Jileska.
« Oh ! les parents se rentrent
dedans ces derniers temps. Je ne sais pas trop ce qui se trame. Mathis et moi,
on regarde et on ne comprend rien. Ca l’énerve même de savoir qu’il va rester
tout seul avec eux quand je serai partie après le bac. C’est moche ! »
« Oh ! Dommage. Tes parents
sont si beaux ensemble », lance Gaëlle.
« Tu regardes trop de films,
Gaëlle », fait Fidolin.
« C’est bizarre que tes
parents se disputent comme ça alors qu’ils sont heureux ensemble depuis plus de
20 ans ! C’est dommage. », fais-je.
« Oui, comme tu dis. Le plus
surprenant, c’est que jamais encore, ils ne se sont disputés comme ça devant
nous. », lance Sharonna.
« Ca ira ! », conclut Jacques.
A 2 3 heures, nous nous
séparons. Le père de Sharonna est là. Il se propose de déposer tout le monde,
même Jileska qui n’habite pas loin. Quand j’arrive dans la chambre, Pupuce est
là, couchée sur le lit ; elle lit un roman de Maryse Condé.
« Je pensais que tu dormais. »
« J’ai pas sommeil. Ce roman
est trop intéressant. Il faut que je le termine. »
« T’as une grossesse assez
particulière, Pupuce. Sais-tu combien de livres, tu as lu depuis que tu es ici
? »
« Je sais pas ; je compte pas.
J’ai envie de lire, c’est tout. »
« Tu y passes des nuits
entières, Pupuce. A ce stade de la grossesse, tu devrais penser à te reposer. »
« Non, j’ai envie de lire. Si
la lumière te dérange, je vais au salon. »
« Non, c’est bon. C’est moi
qui vais dormir au salon. Bonne lecture. »
Cette fille trouve le moyen de
lire 4 romans par semaine alors qu’elle est enceinte et passe le bac dans
quelques semaines ! Je n’en reviens pas. Mais comme elle lisait beaucoup avant,
sa folie des livres en ce moment ne m’inquiète pas plus. Cela même si je pense
qu’elle frôle l’overdose. Si elle ne nous fait pas des enfants intellectuels…
J’envoie des messages à Miro
avant de m’endormir.
Il me répond : « Dors dans mes
bras cette nuit. Je t’aime. »
22-
Vendredi matin, alors que je
suis dans la cuisine en train de faire la vaisselle, en chantant, ma mère
arrive. Elle ne travaille pas ce matin. Les enseignants sont en grève. J'ai la
chance d'être d'un collège privé, car nos professeurs ne font pas grève.
« J'ai reçu tes beaux-parents
hier. »
« C'est quoi cette histoire !
»
« J'ai appelé ta fameuse
belle-mère, Cassandra. Elle est passée en fin de journée avec son époux. Tu
étais chez Jileska à ce moment-là. »
« Et, pourquoi les as-tu
appelés ? »
« Je voulais discuter avec
Cassandra avant votre départ pour Libreville. Tu les as déjà rencontrés, mais
moi, jamais. Alors je voulais m'assurer que tout ira bien. »
« Ok. Et ils sont venus ici. »
« Oui, juste histoire de faire
connaissance. Leur fils est amoureux ; ils veulent s'assurer que tout va bien
de ton côté. »
« Donc Cassandra a accepté de
venir ici !!! ce doit être la curiosité qui l'a emmenée ici. Ça m'étonne d'elle
! »
« Oh ! C'est vrai que j'ai eu
l'impression que c'est Rico, le père de Miro, qui voulait me rencontrer.
Apparemment, ma chérie, leur fils leur a dit qu'il a l'intention de faire de
toi son épouse. »
« Oh ! Je ...Je... »
« Pas la peine de bégayer avec
moi, je ne fais que te rapporter ce qu'ils m'ont dit. Ils disent qu'il a déjà
eu des petites amies, mais que tu es la première à laquelle il tient autant. »
« Bon...je...Euh ! »
« Tout d'un coup, tu ne sais
plus quoi dire, toi que je connais bavarde. »
« Mais que veux-tu que je te
dise, maman. Je sais qu'il discute avec ses parents ; je suis juste étonnée
qu'ils en sachent autant. »
« Donc, si je comprends bien,
Miro ne t'a jamais rien dit de tel ? »
« Maman ! J'en sais rien, moi.
Je... »
« Écoute, je n'ai pas envie de
discuter à tort et à travers. Ce que je veux te faire comprendre, c'est que ce
garçon t'aime et veux faire un long chemin avec toi. De grâce, ma chérie,
comporte-toi sainement et dignement avec lui. »
« Mais maman, je n'ai jamais
eu de comportement indigne avec lui ! »
« Je sais comment tu es, je le
sais. Ce que je veux, c'est que tu ne changes pas. Ne te laisse jamais
influencée, d'accord. »
« Je ne comprends rien à ce
que tu veux m'entendre dire, maman. »
« Viens, suis-moi. Je vais te
confier quelque chose. »
Je laisse la vaisselle et suis
ma mère jusque dans sa chambre. Arrivée là, elle ferme la porte et me conduit
vers son lit. Nous nous asseyons là, l'une à côté de l'autre. Ça m'inquiète un
peu alors, je luis dis :
« Maman, qu'as-tu de si secret
à me dire ? Tu m'inquiètes. »
« Je voulais juste te dire que
quelles que soient les circonstances, reste tranquille. Ces gens que j'ai
rencontrées, sont vraiment très bien. De même pour leur fils. J'aimerais que tu
fasses très attention, ma chérie. Dis-en le moins possible à tes amis.
Cultive-toi un jardin secret. »
« Mais maman, mes copines sont
géniales ! Jamais, il ne leur viendrait l'idée de me chipper Miro !!! »
« Ma fille, écoute-moi quand
je te parle. Je me fais peut-être des films, mais je veux juste que tu sois
vigilante jusqu'au jour où enfin, tu auras la bague au doigt. »
« Ah, ok. Je vois que ton
esprit est déjà loin, ma petite maman. Ce jeune homme t'a vraiment mise dans la
poche. »
« Comme tu dis, j'avoue que
j'aime beaucoup Miro. Il est intelligent et bien élevé. A moins, je n'aurais
pas à me battre avec la mauvaise éducation d'un pauvre type que tu aurais
ramassé, je ne sais où. »
« Ok, madame ma mère. Mais je
te signale que je suis encore loin de me marier. Je dois d'abord finir mes
études et trouver du travail. Ensuite, on verra. »
« Laisse Dieu en décider, ma
chérie. Laisse Dieu en décidé. Tiens, je voulais te remettre ceci. »
« Qu'est-ce que c'est ? »
« Ton cadeau, ma fille.
Ouvre-le. »
J'ouvre le petit paquet que
m'a remis ma mère et je me retrouve avec un très beau bijou entre les mains.
Une chaîne en or avec un pendentif en forme de dauphin.
« Oh, comme c'est beau ! Merci
maman. Mais, ça dû te coûter une petite fortune. »
Elle me regarde alors
intensément. Puis, son regard se perd dans le vide. Un silence nous envahit. Je
le romps en disant :
« Maman, tu es avec moi ?
Maman... »
« Je ne sais pas, ma chérie.
je...en fait, la visite des parents de Miro m'a bouleversée. Je...Je. »
Elle s'arrête de nouveau et
son regard se perd encore dans le vide. J'ai comme l'impression qu'il y a
quelque chose qui lui pèse sur le cœur. Je dois me dépêcher d'aller me
préparer, mais je préfère rester là. Du moins, je n'aurais pas les idées
claires tant que je ne saurais pas ce à quoi pense maman.
« Maman, qu'est-ce qu'il y a ?
Tu sembles tout d'un coup sur une autre planète.
« J'ai acheté ce bijou il y a
26 ans. »
« Non, sans blague ! Et tu
l'as conservé toutes ces années ! »
« J'avais 22 ans, lorsque je
l'ai acheté. Je comptais le porter le jour de mes fiançailles. Elles n'ont
jamais eu lieu, alors, j'ai gardé ce bijou, comme ça, car je ne savais quoi en
faire. »
« Euh, sois plus claire maman.
Tu t'es fiancée à 22 ans !« Cette imbécile de Larissa que tu as revue au marché
et qui était avec ton père ! »
« Bien, je crois qu'il faut
que je te raconte tout. Je fais comme une crise d'angoisse depuis hier. C'est
peut-être bête, mais je ne sais pas pourquoi, J'ai l'impression de revivre une
scène de ma jeunesse. »
« Mais encore, maman ? Sois
claire. »
« Cette imbécile de Larissa
que tu as revue au marché et qui était avec ton père !»
« Oui, Larissa, oui. Je
t'écoute. Que vient-elle faire dans la conversation ? »
« Elle et moi étions amies
autrefois. »
Yo !!!! C'est quoi cette
histoire !!! Me voilà qui saute du lit tellement je tombe des nues.
« Mais maman, si Larissa n'a
que 35 ans, elle ne peut pas être ton amie d'enfance !
« Chérie, j'ai 48 ans
aujourd'hui. Et si cette chère Larrisa a 35 ans, je me coupe une jambe tout de
suite ! Elle a 2 ans de plus que moi. Nous avons été à l'école ensemble. Elle
arrivait de Mandji Ndolo avec sa mère. Sa fameuse mère ! »
« Yo ! Mais maman, c'est pas
possible ! Larrissa ne peut pas avoir 50 ans ! Non, ce n'est pas possible. Elle
est encore toute fraîche et...»
« Ma fille, laisse tomber tout
cela. Elle s'est fait refaire les seins ! Elle n'a jamais eu d'enfant, donc,
elle est bien conservée. Mais elle a 50 ans. »
« Non, là, balance la doc, la
vieille, parce que je suis que dépassée. »
« Bien, j'avais 20 ans. Un
homme blanc est tombé follement amoureux de moi. Le type était directeur d'un
grand magasin de Port-Gentil. Il venait de Toulouse. Il m'offrait des bijoux,
il m'achetait les vêtements les plus beaux. Il me donnait de l'argent. Je ne
manquais de rien avec lui. Le type était tellement fou de moi, qu'e deux ans
après notre rencontre, il a demandé ma main aux parents, parce qu'il devait
rentrer en France et voulait m'emmener avec lui. »
« Et que s'est-il passé, maman
? Pourquoi ne t'es-tu pas mariée ? »
« La copine que j'avais m'a
joué le coup du siècle. J'étais jeune et naïve. Elle était comme une grande
sœur. Votre mère Agnès était trop jeune pour écouter mes histoires de cœur ; c'est
donc à Larissa que je me confiais. Il se trouve que la mère de Larissa était
une grande féticheuse. Les gens allaient la voir pour tout et n'importe quoi.
Les femmes allaient la voir pour attacher les hommes et les hommes allaient la
voir pour rendre leurs femmes maboules d'amour pour eux ; tu comprends. »
« Oui, je vois que les choses
n'ont pas changé aujourd'hui, c'est pareil ! »
« C'est justement là où je
voulais en venir ! Sois vigilante ma chérie et surtout ne te laisse entraîner
par personne vers ces pratiques-là. Miro t'a aimé simplement comme tu es. Reste
telle quelle et ne cherche pas d'artifices pour le rendre dingue et l'attacher.
»
« Maman, que s'est-il passé
entre Larissa et toi ? Aujourd'hui, vous vous parlez à peine ! Si tu ne m'en
parlais pas maintenant, jamais je n'aurais parié que vous vous connaissiez
avant qu'elle n’atterrisse dans la maison de papa. »
« J'ai été bien bête ma
chérie. Ce type était fou de moi. Il subvenait à mes besoins. Il m'avait logé
dans cet immeuble-là, en face du lycée d'état, le Lagon Bleu. J'étais
tranquille. Mon avenir était tracé : on devait se marier et s'envoler pour la
France. Tes grand-parents avaient déjà acheté toute la boisson pour les
fiançailles. Elles n'ont jamais eu lieu. »
« Pourquoi, maman ? Que s'est-il
passé ? »
« J'étais heureuse, au comble
du bonheur. Une sage-femme venait de m'annoncer que j'étais enceinte. Quand
j'ai annoncé la nouvelle à ce type, il est allé voir mes parents et leur a dit
qu'on oubliait les fiançailles et qu'il voulait que l'on célèbre directement le
mariage. Donc, nous devions nous marier à la coutume et à l'ambassade de
France, à Libreville. Mais, je ne sais pas pourquoi et comment je me suis
laissée manipuler par Larissa. Elle m'a convaincue utilisée un soi-disant parfum
que sa mère avait spécialement préparé pour moi. Elle m'a remis un petit flacon
que je devais me pulvériser avant de me mettre au lit avec mon fiancé. J'ai
bêtement cru quand elle m'a dit que cela allait réveiller les sens de mon
fiancé et le rendre plus fougueux au lit. J'ai été bien bête ! »
« Oh ! Je vois. Je parie
qu'elle t'a joué un mauvais tour qui a fait fuir ton fiancé. »
« Oh, figure-toi, que le
fameux parfum était composé des sécrétions vaginales de Larissa. Elle se lavait
l'entre-jambe et gardait cette eau en vue de faire ce fameux parfum. Donc,
quand j'ai à trois reprises utilisé ce parfum, c'était l'odeur de Larissa qui
ensorcelait mon fiancé. C'est comme ça qu'il m’a laissé tomber du jour au
lendemain et a commencé à suivre Larissa comme un chien. Garde bien cette image
en tête : on avait vraiment un chien collant cette fille à la trace. Une
semaine avant la date prévue de mon mariage, elle et lui ont pris l'avion pour
Toulouse. Je suis restée là, à Port-Gentil, avec mes larmes et mes souvenirs.
J'ai été tellement secouée par cet abandon de la part de mon fiancé et cette
tromperie de la part de celle que je voyais comme une sœur, que j'en ai perdu
mon bébé. A la suite de cet événement malheureux, j'ai appris que je ne
pourrais plus avoir d'enfant. »
« Maman ! Comme c'est triste !
Je ne savais pas que tu avais vécu ce genre de chose ! Et je m'étonne que Kaba
qui parle toujours à tort et à travers ne nous ai jamais divulgué tout cela. »
« Mais pourquoi n'as-tu jamais
essayé de refaire ta vie, maman ? Tu vois, elle n'est pas si méchante que ça !
J'ai gardé mes douleurs en moi. Et j'ai loué Dieu quand votre mère a accepté de
me donner un enfant. »
« Mais pourquoi n'as-tu jamais
essayé de refaire ta vie, maman ? A part tonton Steeve avec lequel nous avons
vécu quand j'étais au jardin d'enfants, depuis, rien. »
« Je ne sais pas ; Je ne sais
pas Tania. Je suis heureuse comme ça ! »
« D’accord, si tu le dis. Mais
dis-moi. Comment se fait-il que Larissa ait atterri il y a 3 ans dans la vie de
papa ? Elle ne ressemblait en rien à quelqu'un qui a vécu en France ? Elle
était fauchée comme un rat d'église et vénale avec ça ! Mon pauvre papa. »
« Eh ben, je crois que la
chicote de Dieu lui est tombée dessus. Parait qu'elle a vécu la belle vie
pendant 10 ans à Toulouse. Jusqu'au jour où sa mère est morte. Elle ne pouvait
donc plus recevoir ses petits colis de feuilles pour se laver le corps. Le
blanc qu'elle m'avait volé, l'a mis à la porte. Elle a atterri dans la rue.
Elle était tellement bête en classe, qu'arriver là-bas, elle n'a même pas eu la
présence d'esprit de s'inscrire dans un centre de formation pour apprendre un
métier. Elle a soi-disant fait des petits boulots. Mais je pense qu'elle s'est
prostitué. Et pour finir, elle s'est choppé un milliardaire anglais, qui lui
payé la fameuse chirurgie esthétique pour augmenter sa poitrine. Mais là aussi,
le type l'a balancé après l'avoir consommée. Elle a donc trouvé le moyen de
rentrer au Gabon. Mais, tiens-toi bien, elle n'avait que des robes de soirée
dans ses valises. Pas un sou, ni un diplôme et encore moins l récit de la vie
en rose à nous raconter. Elle n'a jamais mis les pieds ici car elle a honte ;
et je ne peux vraiment pas la sentir.»
« Je suis vraiment désolée
pour toi, maman. »
« Ne le sois pas, ma chérie.
Je suis heureuse car je t'ai. Le reste appartient au passé. J'ai juste eu cette
crise d'angoisse dans la nuit à tel point que je n'en ai pas dormi. Sis
vigilante. »
« Il ne m'arrivera rien,
maman. Mes amies n'ont pas l'esprit tordu. »
« D'accord, ma chérie.
Maintenant, va te préparer pour l'école. Tu vas être en retard. »
Je sors dans la chambre de ma
mère, avec cette chaîne en or autour du cou. Je suis tellement heureuse que je
ne veux en aucun cas me gâcher la vie en étant suspicieuse vis-à-vis de mes amies.
Il ne m’arrivera rien, car mes copines ne sont pas aussi sottes que Larissa.
23-
Moi qui d'habitude prends le
bateau pour aller à Libreville, je voyage sur Africaviation aujourd'hui. Je
suis assise dans le salon VIP de l'aéroport de Port-Gentil, avec Miro, ses
parents et Carmella, la meilleure amie de sa mère. Mon chéri me garde bien à
côté de lui, ma tête posée sur son épaule. Rico, son père, sourit :
« Eh mon petit, personne ne va
te la voler ! Laisse-la respirer. »
Et Carmella d'ajouter :
« Veuillez avoir pitié de nous
autres célibataires. J'ai pas envie d'avoir mal aux yeux. »
« T'inquiète tata Carmella, je
t'offrirai des lunettes ! »
« Très drôle Miro. J'adore ton
humour », lui fait Carmella.
Carmella est une très belle
femme ; une métisse suisso-congolaise de 45 ans. Elle est en vacances au Gabon.
Dans deux semaines, elle rentre en Italie où elle travaille. Dès qu'on me l'a
présentée à mon arrivée à l'aéroport, nous avons tout de suite accroché. Elle
est très sympathique et joviale. Nous discutons encore et encore avant de
monter dans l'avion. Le père de Miro me lance :
« Ta mère est une femme
délicieuse, Tania. »
« Ça se dit, ça, chéri !
Qu'est-ce que tu entends par délicieuse. », demande Cassandra.
« Je veux dire par là que j'ai
apprécié son éducation et ses manières. », répond Rico.
Nous montons les derniers dans
l'avion. L’hôtesse nous place à l'avant. Je me sens tellement bien, là, avec
Miro à mes côtés que je suis obligée de faire une petite prière au Bon Dieu.
J'ai encore beaucoup de mal à croire que moi, Tania Akendengue, je vais en
week-end à Libreville pour fêter mon anniversaire !
Je pense à Pupuce qui était
ronchon au moment où j'ai quitté la maison. Elle m'a dit qu'elle aurait aimé
que nous fêtions nos 18 ans ensemble. Le dernier anniversaire que nous avons
fait toutes les deux, c'était celui de nos 10 ans. Nos mamans nous avaient
préparé la plus belle des fêtes. Depuis, c'est chacun son côté. Chez les Mbeng
là-bas à la cité Rose, monsieur papa Jimmy fait les choses comme un blanc : on
fête les anniversaires des enfants chaque année. Pour moi, le fait que maman me
prépare mon plat préféré chaque 16 mai et qu'elle m'offre un cadeau, m'a
toujours suffi.
Le service à bord est vraiment
cool ; on nous sert des petits-fours et des boissons. Ça commence vraiment
bien. Je me dis que j'aurais beaucoup de choses à raconter à mes copines au
retour. Elles n'attendent que ça : le kongossa du weekend. J'aurais aimé être
avec ces folles et faire la belle au Millenium. Mais c'est mille fois mieux d'être
là, aux côtés de ce beau jeune-homme qui fait battre mon cœur. Il me murmure
dans l'oreille :
« Je t'aime Tania Akendengue.
»
et de même, je lui réponds :
« Moi dix fois plus. »
A notre arrivée à Libreville,
un chauffeur nous attend dans une Nissan Teena. Yes ! Le genre de voiture de
laquelle vous descendez à contre cœur tellement vous êtes trop bien à
l’intérieur. Comme ma tête ne quitte pas l'épaule de miro, Cassandra est
obligée d’inciter :
« Carmella fera le chaperon
pendant le week-end. Je ne peux décemment pas vous laisser tout seuls une
minute. Je n'ai pas envie d'être grand-mère maintenant : »
« Oh, maman, tu en as des
idées ! »
« Non, mon chéri, tu ne vas
pas me rouler : je n'ai aucune confiance en toi quand je vois que ta bouche a
du mal à rester loin de celle de Tania. »
« Ok, ok. Promis juré, nous
nous tiendrons correctement. », lui promet Miro.
Tu parles. Deux secondes
après, nos lèvres sont encore l'une sur l'autre. Bref, le week-end promet.
Nous arrivons à l’hôtel. Un
portier nous aide à descendre de voiture tandis qu'un concierge s’occupe de nos
bagages. Comme je l'avais prévu, la chambre de Carmella communique avec la
nôtre.
« Demain matin, nous passons
la journée à la Pointe Denis. », m'annonce Cassandra.
Peu m'importe l'endroit où on
m'emmène, l'essentiel pour moi est d'avoir les plus beaux des souvenirs.
Je plane déjà en me couchant
sur le lit. C'est tout doux sur la peau ! Le matelas est tellement confortable
qu'on pourrait rester là des jours sans se rendre compte que le temps passe.
« On se croirait au paradis »,
fais-je en regardant Miro.
Le bon monsieur arrive vers
moi, il me lève su lit et m'embrasse comme s'il voulait m'avaler toute crue.
C'est comment !!!
« Eh, je t'assure que si tu
continues dans cette tendance, Cassandra me demandera d'aller dormir avec
Carmella. », lui fais-je.
« Jamais ! Tu es dans la bonne
chambre et j'y suis aussi. Je suis dingue de toi Tania Akendengue. »
Yo !!!! je fais comment pour
ne pas briser la promesse que je me suis faite ! PAS DE SEXE AVANT LE BAC. Et
ce sera le cas.
« Je t'aime, Miro. Si tu
savais ! Jamais je n'aurais imaginé venir dans un si bel hôtel pour mon 18ème
anniversaire. »
« Je décrocherai la lune pour
toi. »
« Je suis amoureuse d'un beau
parleur », dis-je pour le taquiner.
Là, il s'éloigne de moi. Il
croise les bras autour de sa poitrine et m'observe, avec un regard insistant.
« Finalement, je pense qu'il
vaudrait mieux que tu ailles dormir dans la chambre de Carmella. Je pense que
je serai incapable de me contrôler. Mademoiselle Tania, tu as un effet mortel
sur moi ! »
« Hummmm ! C'est quoi cette
histoire, monsieur. Je te signale que toi et moi avons déjà dormi dans le même
lit ! Tu te souviens, à ton anniversaire en novembre. Il n'ya rien de sorcier.
J'ai envie de dormir dans tes bras. »
« Ce ne sera pas possible, ma
princesse. Tout mon être est en ébullition quand tu es près de moi. Je ne
pourrai pas me contrôler. J'ai sacrément envie de toi, Tania Akendengue. »
« Arrête de blaguer, Miro.
J'suis pas venue ici pour dormir avec Carmella. Sinon, je m'en vais. »
« Viens là, plutôt. Je t'aime
tellement, Tania. C'est fou l'effet que tu me fais. Vraiment dingue ! »
« Je préfère ça ! Je t'aime,
Miro. »
« Dis, beauté, qu'est ce qui
te ferait plaisir comme cadeau ? »
« Eh, monsieur, tu viens de
m'offrir un weekend dans un hôtel luxueux. Je pense que c'est suffisant, non. »
« C'est mon père qui te
l'offre, ma chérie. Je te parle-moi, de quelque chose que je paierai de ma
poche. J'ai hésité entre un bijou et un parfum. Et comme ma sœur Gabriella est
à New-York et ne peut vraiment pas m'aider à choisir, je te pose la question. »
« Je ne sais pas, Miro ! Il y
a tellement de choses auxquelles je rêve ! Je ne sais pas. Tout ce que tu
m'offriras me fera plaisir. Tu ne risques pas de te tromper étant donné que je
n'ai pas grand-chose. »
« Ok, chérie. Je verrai bien.
Tu ne t'emporteras pas si je t'offre un string panthère, j'espère. »
« Très drôle, monsieur. À mon
tour, je t'offrirai du rouge à lèvre. »
« Ouille, je n'ai pas encore
viré de bord ! »
« Alors, on oublie les
sous-vêtements ! »
« Je t'aime beauté. Parfois,
j'en tremble. Je me rends compte que tu deviens aussi essentielle que l'oxygène
que je respire. »
« Et toi Miro, chaque
pulsation de mon cœur chante ton nom. »
Ça c'est ce qu'on appelle le
LOVE. Je ne savais même pas que ça pouvait exister ! C'est Pupuce qui lit tous
ces livres, Harlequin, Adoras et compagnie et c'est moi qui vit l'histoire
d'amour la plus belle...
Miro prends son smartphone.
Nous prenons un selfie qu'il pose comme photo de profil whatsapp en mettant
comme statut : ti amo Tania.
Carmella vient nous chercher à
19h 30. Nous allons dîner au restaurant La Roma. Avant cela, le père de Miro
veut faire un petit tour de ville, histoire d'admirer Libreville by night. Je
regarde la ville défiler sous cette nuit qui tombe à peine. Ça doit faire deux
ans que je ne suis pas venue à Libreville, alors, je note des changements sans
trop m'y attarder. Je remarque juste que l’hôpital Jeanne Ebori a été détruit.
Bref, le décor a changé.
Quand nous arrivons à la Roma,
nous sommes placés dans un coin discret. C'est tellement beau que cela me
change drastiquement du Coppa Cabana, de Port-Gentil, le seul restaurant que
j'arrive à m'offrir avec ma copine Jileska. La musique est douce, le parfum
d'ambiance est lui aussi doux. Des couples occupent les tables à l'entour. On
nous tend la carte des menus. Je fais comme ma mère m'a dit : je vais commander
ce que je connais.
Le père de Miro demande un vin
italien. Moi, je me contente d'un jus d'orange pressée, alors que les deux
dames préfèrent des cocktails alcoolisés. Miro demande une bouteille d'eau
minérale.
« Alors, Tania. Tu passes le
baccalauréat cette année ! », me demande Carmella.
« Oui, je prépare un bac
scientifique. »
« Oh ! », s'étonne Carmella.
« Mademoiselle a de
l'ambition. Sa mère m'a dit qu'elle veut devenir ingénieur en pétrochimie. »,
fait Cassandra.
Qui aurait parié qu'un jour
cette femme parlerait de moi avec autant d’admiration ???
24-
A la fin du dîner, le père de
Miro commande 5 coupes de champagne.
« Nous allons trinquer à votre
bonheur, les jeunes. »
« Nous vous souhaitons de
décrocher ce baccalauréat du premier coup », ajoute Cassandra.
Je me contente de me mouiller
les lèvres, car je ne bois jamais d'alcool. Je n'ai pas envie d'avoir la tête
qui tourne et de me retrouver en train de faire « des choses » dans le lit avec
Miro.
Je suis heureuse d'être là
avec ces gens. Les choses se passent mieux que ce que j'aurais imaginé.
Nous rentrons à l’hôtel après
avoir longtemps bavardé. Carmella nous accompagne jusque dans notre chambre,
alors que les parents de Miro sont à l'étage au-dessus. Elle nous souhaite
bonne nuit. Je file dans la douche pendant que Miro répond à ses différents
messages sur Facebook. Quand je sors de la salle de bains, vêtue de cette
nuisette que madame ma mère m'a acheté, il est admiratif.
« On touche avec les yeux,
uniquement. »
« Ça va être très difficile,
ma chérie. »
Ça m'énerve ces seins sauvages
qui ne peuvent pas rester en place !!!
Il sort à son tour de la
douche vêtu d'un pyjama tout blanc. Il enlève le haut avant de se glisser dans
le lit à mes côtés.
Là, dans ses bras de monsieur
mon bel amoureux, je rêve à haute voix.
« Nous aurons deux enfants :
une fille et un garçon. Nous voyagerons un peu en Afrique, un peu en Europe. Je
conduirai une belle voiture. »
« Et on se marie à quel moment
dans ton histoire ? »
« Après ma licence. Il me faut
ce diplôme avant de perdre la tête et de te confier ma vie à jamais. »
A ce moment-là, monsieur sort
du lit. Il se dirige vers son trolley et fouille un instant. Il me demande de
fermer les yeux.
Il éteint la lumière et met
les deux veilleuses de chevet en marche. Là, il prend ma main gauche et me
glisse au doigt, ce qui semble être une bague.
« Tu peux ouvrir les yeux »,
me fait-il.
Quand je les ouvre, je me
retrouve stupéfaite face à une bague sertie de diamant au doigt. Mon Dieu !
C'est tellement beau que je n'ai même plus de voix pour crier.
Les larmes se mettent alors à
couler.
Vraiment Akendengue Tania !
Tout pour être la maboule de service !
« Eh, beauté, je ne te l'ai
pas offerte pour te faire pleurer. »
« Je...je...Elle... »
Les mots meurent au seuil de
ma bouche.
Il se met alors à genoux sur
le lit, juste à côté de moi et me dit :
« Je t'aime princesse. Et
j'espère que cette bague te plaît ? »
Les mots sont faibles ; alors
je préfère rester silencieuse. Je m'avance vers lui et l'embrasse.
« Je t'aime Miro. J'ai
l'impression de vivre un rêve éveillé. »
« Tu ne rêves pas, ma belle. »
Nous discutons encore et
encore en nous embrassant, bien sûr. À tel point, que sans nous en rendre
compte, minuit sonne au téléphone de Miro.
« Tu as officiellement 18 ans,
mlle la voleuse de mon cœur. Joyeux anniversaire beauté. Je t'offre ton cadeau
maintenant ou tu préfères attendre au dîner ce soir ? »
« Euh, mais tu me l'a déjà
offert, Miro ! », fais-je en regardant la bague.
« Oh, ça ! C'est juste un
outil pour bien dire à tous les garçons qui te tournent autour de passer leur
chemin, car tu es déjà prise. »
Yo !!!! Voilà que je suis
maintenant une propriété privée !
« Offre-moi ce que tu veux.
Mais ne me donne pas de mauvaises habitudes, je pourrais m'habituer. »
« J'ai intérêt à devenir le
meilleur des juristes pour satisfaire plus tard le moindre de tes désirs. »
« Je n'aurais besoin que de toi,
mon cher. Je t'aime. »
« Moi, dix fois plus. Et si on
appelait ta sœur ? Tu penses qu'elle dort. »
« Non, elle est sûrement en
train de lire. Appelons-la. »
Nous appelons Pupuce. Elle
décroche au bout de 3 sonneries. Miro met le haut-parleur et lui souhaite un
joyeux anniversaire. Mademoiselle a le courage de fondre en larmes.
« Oh, beauté, je t'appelais
juste pour t'envoyer des bisous pas pour te faire pleurer. Nous pensons fort à
toi. »
Il raccroche après avoir
encore souhaité beaucoup d bonheur à Pupuce.
Mon téléphone vibre. Des
messages. De mon frère Julien. De ma mère. De ma folle de Jileska. De mon cher
papa, qui pour une fois n'a pas oublié. Mes petits Mbeng ne m'ont pas oubliée.
Ils ont envoyé un message commun : Joyeux anniversaire Ya Tania. Je suis
comblée. Tant d'émotions me tire encore des larmes.
« On sèche ses larmes et on
danse. Allez, viens. », me fait Miro.
Il prend son téléphone et met
de la musique. Nous commençons par Photograph de Ed Sheeran, puis Primetime de
Janelle Monae, pour poursuivre par El perdon, de Enrique Iglesias.
« T'as que de la musique de
filles, mon chéri. »
« C'est pour faire plaisir à
la plus belle, celle que je tiens dans mes bras à cet instant. »
Nous finissons par nous
endormir, dans les bras l'un de l'autre. C'est la réception qui nous réveille à
7h.
Petit déjeuner royal au
restaurant de l’hôtel. Il y a tellement de choses exposées là, que je me
contente de ce que je connais : une assiette de fruit, un bol de corn flakes et
2 verres de jus d'orange.
Une heure plus tard, un
chauffeur arrive pour nous emmener à Michel Marine pour prendre la vedette pour
La Pointe Denis.
Quand on arrive à destination,
je me rends bien vite compte que la journée sera vraiment belle. L'endroit est
propice pour de belles photos. C'est la première fois que je viens ici
pourtant, j'en ai beaucoup entendu parler. Je suis quand même émerveillée de
voir les familles venues se relaxer pour la journée, à la plage.
Quand nous arrivons dans une
salle, plutôt jolie et bien décorée, je ne m'attends pas à :
« Joyeux anniversaire Tania !
»
Tous mes amis sont là. Mon
frère Julien aussi. Jileska, Sharonna, Gaëlle, et Marc-Elise. Yo ! Je suis que
dépassée. Je me retourne vers Miro et lui lance :
« Tu as fait ça ! »
« Et oui ! Surprise mon cœur.
Joyeux anniversaire. »
Il y a une dizaine d'amis de
Miro. J'ai plus d'acquintence avec Cristale, une métisse franco-ivoirienne dont
le père est géologue à Perenco Gabon. Elle me tire par le bras. Et me lance :
« Allez, vient par ici. Séance
photos avec tout le monde. Ensuite, il y a les bougies à souffler et après, les
cadeaux à ouvrir. »
Ils ont tout préparé sans que
je ne me doute de rien. Je comprends maintenant pourquoi Jileska disait à
Jacques qu'elle serait à Libreville pour le week-end. Les cachottières. Tout le
monde passe à mes côtés pour les photos.Mes copines font la grimace lorsque le
photographe crie : cheese !
C'est fou ce que le bonheur
peut rendre bête. Je suis tellement heureuse que les selfies pleuvent avec ces
fofolles qui m'accompagnent depuis la classe de 6ème.
« Vous avez le vampire, les
filles ! Nous avons passé la semaine ensemble et à aucun moment, je ne me suis
douté que vous me cachiez quelque chose. »
« Je n'ai pas envie de mourir
jeune ! Alors quand Miro nous a demandé de garder le secret, je me suis tue. Il
nous aurait tuées, sinon. », me fait Gaëlle.
« Trop cool de vous avoir ici
! »
« Pardon, la go ! Moi, je suis
trop contente de dormir dans des draps aussi soyeux ! Yo, j'ai cru que j'étais
au paradis quand je me suis glissée dans mon lit ! », lance Jileska.
« Et moi, alors ! » lance
Marc-Elise. « La baignoire dans notre chambre est tellement immense, que je
pourrais dormir dedans. Ah, vraiment, ma copine, tu as trouvé là, un vrai gars.
Qui donc allait me « gaspiller » le Park'Inn.
« Huummmm ! Fais semblant, toi
aussi ! », lui lance Jileska. « En tout cas, quand on me voit me balader là
dans l’hôtel, je fais comme si j'ai l'habitude de prendre l'ascenseur tous les
jours, oooh ! Les gens n'ont pas besoin de savoir que la go de POG que je suis n'a
jamais voyager dans un avion et n'a jamais dormi dans un hôtel ! »
« Tu ne changeras jamais ! »,
fais-je à Jileska en riant.
La musique est enivrante.
Personne ne se fait prier pour danser. Même ma belle-mère se trémousser sur la
piste au rythme du Tcham de J-Rio. Faut voir les amis du lycée Victor Hugo !
Ils dansent là, comme s'il s'agissait de casser le corps. Moi, je ne lâche pas
Miro d'un pouce. Je joue à ton pied mon pied, parce que la connasse de
Pamella-Jo, qui aimerait être à ma place, est là. Elle est sortie avec Miro il
y a deux ans. Il l'a laissé tomber. Madame jure qu'elle va me le piquer. Comme
je n'ai pas envie de bastonner quelqu'un le jour de mon anniversaire, je
préfère protéger mon cœur.
Mais, cette blanche-là est
tellement sans gêne qu'elle arrive vers nous et m'arrache Miro des bras ! Yo !
J'ai envie de la tirer par les
cheveux et aller la jeter dans l'eau, mais je me retiens. Depuis le jour où je
l'ai surpris, à l'anniversaire de Miro, en novembre dernier, lui faire un
strip-tease, alors qu'il se préparait dans sa chambre, j'ai des envies de
meurtre quand je la vois. Nous étions ensemble dans la chambre. Il se préparait
pour aller saluer ses invités. Il m'avait juste envoyé lui chercher un verre
d'eau. Quand je reviens quelques minutes après, je trouve la fille seins nus,
en train de se battre pour enlever son pantalon en skaï. Je ne me suis pas
occupé d'elle. J'ai simplement tiré Miro par le bras et nous sommes sortis de
la chambre.
Comme j'en ai marre de voir
cette fille se serrer tout contre mon mec, je demande de l'aide à mon frère.
« S'il te plaît, Julien,
est-ce que tu peux t’occuper de cette fille-là ! Tu vois, celle qui danse avec
Miro. Essaie de l’occuper toute la journée, histoire qu'elle oublie un peu mon
chéri. Elle me sort par les oreilles ! »
« Huuummm ! Sister, elle est
bien jolie. Mais tu sais que moi les blanches, c'est elle me donne de
l'urticaire. Donc, je ne peut rien pour toi. »
« Eh, ben, mon cher, tu vas
devoir oublier ton allergie pour les filles blanche et me rendre ce service. »
« Grande sœur, que les choses
soient claires. Si la go me démarre, ce n'est pas moi qui vais freiner ! Faudra
pas venir me tirer les oreilles si jamais nous grillons des feux rouges ! »
« Je te signale que tu n'as
que 14 ans et que tu n'as pas encore le permis de conduire. Alors, contente-toi
de prendre le taxi. Allez, ouste ! »
Julien réussit à séparer Miro
de Pamella-Jo. Je récupère mon chéri, et nous évoluons tranquillement sur la
piste de danse. A midi, l'on nous sert à manger, des grillades comme je les
aime, et des salades. Jileska, qui est une mordue des beignets brochettes, se
met dans un coin, histoire que personne ne l'embête pendant qu'elle descend
toutes les broches de viande qu'elle a posées dans son assiette. Gaëlle fait la
ligne et décide donc de ne manger que des salades, alors qu'elle a un corps de
rêve. Marc-Elise est occupé à écouter les histoire d 'Antoine, un ami
franco-Thailandais de Miro. C'est à peine si elle ne le mange pas des yeux.
Le repas terminé, des serveurs
apporte une immense pièce montée, vanille-fraise; de 5 gâteaux en forme de
cœur. Même dans mes rêves les plus fous...
« Tu es complètement fou, Miro
! », lui fais-je à l'oreille.
« Oui, fou de toi ! »
Nous nous embrassons et sommes
interrompus par Cristale qui me demande d'approcher du gâteau. Ils entonnent
tous un happy birthday et après, j'entends les copines qui crie : fais un vœu.
Mon vœu fait, je coupe une
part de gâteau. Je vais la donner à Cassandra. Je réserve la deuxième à Rico.
Puis la troisième à Miro. Ensuite, je tends le couteau à Cristale pour qu'elle
continue le découpage.
Nous passons ensuite
l'après-midi dans l'eau, sous l'objectif de Cristale qui compte bien en faire
un film.
25-
La nuit vient juste de tomber.
Nous sommes rentrés complètement, morts de fatigues. Dans la navette, je me
suis rendu compte que Pamela-Jo ne veut plus lâcher mon frère d'une semelle. Et
il ne sable plus allergique aux blanches !!!
Je suis dans la salle de
bains. Allongée dans la baignoire, j'ai les yeux fermés, comme pour mieux me
relaxer. La journée a été belle mais fort épuisante. Et là, les amis nous
attendent pour aller dîner. Ensuite, nous nous jetons dans un bus loué pour
l'occasion, et nous atterrissons en boite de nuit, chaperonnés par Carmella.
Je suis là en train de rêver
dans la baignoire, quand Miro rentre dans la salle de bains. Il s'assoit sur le
rebord de la baignoire et souris :
« Je m'étonne que tu ne te
caches pas sous l'eau à cet instant. »
« Pas la peine, je ne suis pas
aussi prude que ça. Et puis, tu m'as déjà vu toute nue, tu te souviens. »
« Ok ! Prière de ne pas me
rappeler se souvenir sinon, je ne pourrai plus me contrôler. C'est que tu es la
tentation même, mademoiselle Akendengue ! », fait-il en m'envoyant un baiser à
la volée.
« Ah ! Je suis amoureuse d'un
beau parleur. »
« Le beau parleur te fera
gémir comme un dingue. Et faudra pas venir te plaindre ; tu m’auras tellement
fait attendre, que je ne répondrais de rien une fois que sera mienne. »
« Mon Dieu, j'en tremble déjà
! », fais-je en le taquinant. « Merci pour tout Miro. J'ai passé la plus belle
des journées. »
« Tu le mérites, ma belle. Tu
le mérites. Et je t'aime. »
« Moi, dix fois plus. »
« C'est vrai ce mensonge ? »,
fait-il en me posant un baiser sur le front.
Il s'en va en m'annonçant
qu'il va régler quelques détails avec les garçons, qui sont deux étages plus
bas. Je reste là et continue de rêver dans mon bain. Je me demande comment
Pupuce a vécu cet anniversaire. Ça fait pas mal d'effet d'avoir 18 ans. C'est
bête, mais je me sens plus grande. J'ai l'impression que quelque chose dans mon
esprit a changé. C'est peut-être une impression. Là, je me demande ce que je
ressentirai le jour où j'aurai 25 ans ? J'aimerais avoir mon première enfant à
25 ans. Le second à 28 ans. Et éventuellement un 3ème à 30 ans. Bref, la vie
nous le dira.
Quand j'arrive dans la chambre
pour m'habiller, je me rends compte que mon téléphone vibre. De même pour celui
de Miro. Je me dirige directement vers le mien. Je me rends compte que c'est un
message de Pupuce. Joyeux anniversaire, me dit-elle. Je réponds par la même
sans plus m'attarder. Il faut que je m'habille, alors, je ne prends pas la
peine de consulter les autres messages. J'enfile ma robe et je me maquille
légèrement ; un peu de fond de teint et un peu de gloss. Je suis prête pour le
dîner. Je suis là à chercher mon eau de toilette lorsque Miro arrive.
« Moi qui pensais passer un
week-end tranquille ! C'est raté. »
« Que se passe t-il ? »,
fais-je.
« Heu...figure-toi que ton
amie Sharonna est dans tous ses états. Je viens de passer une demi-heure à la
calmer. »
« C'est quoi cette histoire ?
»
« Je l'ai trouvé dans
l'ascenseur en larmes. J'ai dû user de tout le vocabulaire que je connais pour
la calmer. »
« Et à quoi est dû cette crise
de larmes ? »
« Elle t'a envoyé une tonne de
sms en 10 minutes. Je savais que les filles étaient folles amoureuses de leur
téléphone, mais là, elle a réussi à m'impressionner. Sa vitesse de frappe est
terrible. »
Je m'empare rapidement de mon
téléphone et me rends compte qu'il y a 2 messages non lus venant de Pupuce et
une trentaine de messages de la part de Sharonna. C'est vraiment dingue !
J'en lis quelques-uns. Et je
finis par comprendre. Damm !
« Ne me dis pas que... »
« Et si ! C'est dingue, n'est-ce
pas ? »
« Et comment va t-elle ? Moi
je serais complètement effondrée à sa place. »
« Tes mots sont faibles, ma
chérie. Elle est terrassée. »
Ma copine Sharonna a surpris
sa mère dans les bras d'un autre homme que son père. Ils s'embrassaient dans le
hall de l’hôtel, comme s'ils ne pouvaient attendre d'être dans leur chambre.
« Et qui est cet homme ? »,
fais-je à Miro.
« Elle ne l'a pas vraiment
distingué. Elle a tellement été frappée de stupeur en reconnaissant sa mère,
qu'elle ne s'est plus intéressée au monsieur. Il a d'ailleurs très vite pris la
tangente. La mère n'a même pas trouvé un seul mot pour calmer sa fille. »
« Il y a quelque chose que je
ne comprends pas. Pourquoi sa mère est-elle descendue dans le même hôtel que
nous alors qu'elle savait que sa fille y passerait le week-end. »
« En fait, Sharonna s'est
trompée en demandant la permission à ses parents. Elle leur a dit que nous
descendions au Meridien. Donc, sa mère a dû pensé qu'elle ne risquait rien en
venant au Park'Inn. »
« C'est fou quand même ! Une
femme mariée qui embrasse son amant dans le hall d'un grand hôtel !!! »
« Il faut penser que ce type
la rend complètement bête, au point de faire preuve de légèreté. J'ai bien peur
que tu te retrouves toute seule avec moi pour le dîner. Les filles sont avec
elles en ce moment. Et j'ai bien l'impression qu'elles vont rester à l'hôtel et
se commander à manger par le room service. »
« Il en est hors de question.
Je vais les voir et je t'appelle. Tu peux te préparer. »
« A tout à l'heure ma puce. »
Quand j'arrive dans la chambre
de Sharonna et Jileska, je trouve les filles en conseil de guerre. L'attitude
que m'a décrite Miro, a complètement changée. J'entends Sharonna dire : je vais
faire la folle cette nuit, danser jusqu'au matin et descendre toute une
bouteille de Black jack et
« Tu ne feras rien de tout ça,
Sharonna. Personne ne va se saouler. On va faire la fête convenablement et
rentrer saines et sauves à Port-Gentil. »
« C'est facile à dire, Tania.
Ce n'est pas ta mère qui se fait bécoter par son amant dans le hall d'un hôtel
! »
« Je comprends, Sharonna. Mais
nous sommes venues ici pour nous amuser. Nous n'aurons peut-être plus
l'occasion avant longtemps de faire les folles toutes ensemble à Libreville. Le
bac, c'est bientôt ; ensuite, nous serons éparpillées ! Viens avec nous. Ne
reste pas dans ta chambre toute seule. Demain, nous aurons bien le temps de
réfléchir à la conduite à suivre avec ta mère. Ok ! »
« Non, je viens pas. Je sais
même pas comment je vais faire quand je me retrouverai devant mon père ! »
Nous restons là encore à
parlementer pendant un quart d'heure et c'est Marc-Elise qui trouve la parade
pour faire changer d'avis à Sharonna :
« On prend le téléphone, on
appelle ton père et on lui raconte tout. Comme ça, tu te sentiras plus légère
et ta mère se débrouillera avec son époux. »
« Jamais je ne ferai ce genre
de chose », s'insurge Sharonna.
« Alors, habille-toi et viens
avec nous sinon, je l'appelle. »
Mon amie consent alors à
s'habiller. Et nous rejoignons les autres au restaurant. Les parents de Miro
dînent avec nous. Ils ont été rejoints par un couple d'amis qui vit à la
capitale. Carmella prend son rôle de chaperon vraiment au sérieux. Elle nous
surveille de près.
Le dîner est tranquille. Comme
dessert, les serveurs apportent un immense gâteau au chocolat. Et nous avons
droit en lieu et place du champagne, à du cidre. Les parents de Miro veulent
être sûrs que personne ne se saoule sous leurs yeux. Il est 22h 30 quand nous
sortons de table. Juste le temps de faire un tour dans nos chambres pour nous
rafraîchir, et nous voilà dans le bus, près pour aller se trémousser sur la
piste de danse.
Le chauffeur du bus à pour
consigne de nous ramener à l’hôtel à 2 heures du matin.
Là, je danse dans les bras de
Miro. En fait, je devrais dire que nous somme collé-collé, pire que deux
chewing-gums. Nos bouches ne se quittent pas un instant. Les autres autours se
trémoussent. Chacun a pris possession de la piste comme il peut. Mon frère
Julien a les bras très occupés à caresser le fessier de Pamella-Jo. Marc-Elise
se l a joue experte en danse dans les bras d'Antoine. Chacune de mes copines a
trouvé avec qui faire la paire. Le plus important pour moi est de ne pas perdre
Miro dans cette boîte de nuit. J'ai bien trop peur qu'il atterrisse dans les
bras d'une autre.
À 2 heures du matin, nous
sommes complètement à plat lorsque Carmella nous somme de sortir de la boîte.
Direction l’hôtel.
Il est trois heures du matin
quand je tombe exténuée après la salle de bain, dans le lit. Miro est déjà
couché. Il n'a pas pris la peine d'enlever sa cravate tellement il est fatigué.
Je lui pose un baiser sur la joue et il ne réagit pas.
Alors que je veux me coucher,
mon téléphone vibre violemment. J'ai l'impression de l'avoir ignoré pendant
longtemps, car il y a près d'une quarantaine de messages. Mes frangin Mbeng
m'ont matraquée de messages. Il y en a 2 de Pupuce. Ma mère m'en a envoyé 3.
Ils sont courts : appelle.
Je ne prends pas le temps de
lire les autres messages. Je me demande alors ce qui se passe. Je suis loin de
me douter de ce qu'ils ont à m'annoncer.
« Tu en as mis du temps, me
lance maman. Je te signale que tes enfants sont nés à zéro heure 45 ce matin.
Par césarienne. Deux jolies filles. »
Mon cri de joie est tellement
strident que Miro se réveille en panique.
« Qu'y a t-il chérie ! »
« Je suis tata, Miro, je suis
tata. »
26-
Impossible de dormir après
avoir appris cette nouvelle. Je ne tiens plus en place. Je tourne dans la
chambre. J'envoie des whatsapp aux copines pour leur annoncer la nouvelle.
Jileska, Gaëlle et Marc-Elise arrivent quelques minutes plus tard.
« Montre les photos, montre
les photos », me font-elles.
Elles sont là à s'extasier
devant les petites frimousses qui sont drôlement mignonnes. Je n'en reviens
pas. Je suis tata.
« Eh, les filles ! Vous savez,
elles seront toujours au réveil. Et si vous me laissiez dormir », fait Miro en
riant.
« Ok ! Nous avons compris le
message ! On dérange, c'est ça ! », fait Gaëlle.
« C'est pas que je vous mets à
la porte, mais je vous assure que je tombe de sommeil. Alors, on se voit au
petit-déjeuner ! », fait Miro.
« A tout à l'heure, alors. »,
lancent les filles en s'en allant. « Elles sont trop chou ces petites ! »
C'est vrai qu'elles sont
belles mes nièces. Elles ont beaucoup de cheveux sur la tête, des petites
bouches en forme d'amande. Mon Dieu, de véritables merveilles !
Je laisse Miro se rendormir et
me remets à pianoter sur mon téléphone. Comme Pupuce est encore en salle de
réveil, je chatte avec Line, la cadette des Mbeng. Elle est en extase devant
les petites. Elles m'envoient photos sur photos. Et je demande alors si Kaba
est à l’hôpital. Elle me répond non.
« La vieille est chez elle.
Tante Bernadette l'a appelée, mais elle dort. »
« Je pense qu'elle changera de
comportement quand elle verra les petites. »
« En tout cas, on s'en fout
d'elle. Elle aime toujours gâcher l'ambiance. Sinon, papa Jimmy est là. Il est
tellement nerveux qu'il n'arrive pas à tenir sur place. Il y a aussi papa
Magloire. Il ne boit plus, oh ! »
« Je suis contente de
l'apprendre. »
Et ça dure comme ça une heure
durant. Un échange par whatsapp pour me faire vivre chaque instant comme si j'y
étais.
Alors que je réponds à un
message dans lequel on m'a envoyé une autre photo, Miro me prend le téléphone
de la main et le dépose sur le chevet du lit. Il me renverse sur le lit et
m'emprisonne en me donnant un baiser.
« Viens la tata Tania. Ce lit
est triste sans toi. »
Il m'embrasse encore, alors
que nous sommes tous deux couchés sur le lit. Puis, il relève la tête et me dit
:
« Au fait, vous avez choisi
quels prénoms pour les petites ? »
« Jade et Ruby. »
« Oh ! Des pierres précieuses.
Qui a choisi ces prénoms ? »
« C'est maman. Elle les a
trouvées instinctivement le jour où elle a appris qu'il y en avait deux au lieu
d'une.
« Bienvenue à Jade et Ruby,
alors. Et toi, embrasse-moi. »
Huuuuummmmmmm !
Il est 9 heures lorsque nous
allons au restaurant de l’hôtel pour le petit-déjeuner. Une partie des amis est
là. Certains dorment encore. D'autres sont partis faire un tour au marché
Mont-bouët.
Miro et moi mangeons en
compagnie d'Antoine qui n'arrête pas de questionner sur Marc-Elise. Les
questions pleuvent. Quel est son film préféré ? Quel genre de livre lit-elle ?
Quelle est sa date de naissance ? Est-ce qu'elle aime les sushis ? Est-ce
qu'elle aime les chiens ?
« Tu aurais dû engager un
détective privé, Antoine », lui fait Miro.
« Eh, déconne pas, mec. Elle
me plaît. J'ai besoin de cartouches pour tirer et viser juste. »
« Ok, ok. Sois pas si agressif
! », fait Miro.
« Comprends-moi, elle
m'impressionne. Tu sais, Tania, c'est la première fois qu'une fille black
m’intéresse, alors je ne sais pas trop comment l'approcher, tu vois. Avec les
Françaises, c'est direct. Tu dis ce que tu veux et elle dit oui ou non. Ici au
Gabon, ça l'air un peu plus compliqué. »
« Les filles sont toutes les
mêmes, Antoine. Prête-lui beaucoup d'attention et c'est tout. », lui fais-je.
« Ok, ok. Ça, je sais faire.
Je vais l'inviter au restaurant et on verra bien ce qu'elle répondra. »
Au fond de moi, je me suis
mise à rire. Tu vas inviter la gaboma au restaurant et elle va te dire non !!!
« Invite là à Planet grill.
Elle adore cet endroit, même si nous n'avons pas l’occasion d'y manger tout le
temps. »
« Ok, c'est noté. Euh,
rappelle-moi son parfum préféré. »
Me voilà en train de réfléchir
pour que ma copine ait un parfum digne de ce nom.
« Nous avons récemment eu des
échantillons de Magnetism, d'Escada. Offre-le lui et tu l'auras à tes pieds. »
« Oh, je ne m'attends pas à ce
qu'elle me lèche les pieds, Tania. »
« C'est une expression pour
dire que tu lui feras plaisir, Antoine. La prochaine fois, Tania parlera Thaï
et tu comprendras mieux. »
« Très drôle, miro. Très drôle
», fait Antoine.
« Bon, Tania et moi retournons
dans notre chambre. Nous sortirons ensuite pour aller acheter des cadeaux à ses
nièces. Elles sont nées ce matin, tu t'imagines ! »
« T'es vraiment la plus jeune
des tatas que je connaisse, Tania. En France, on est tata à 30 ou 40 ans. »
« Nous sommes en Afrique,
Antoine. Mets toi à l'heure africaine. »
« Je vais le faire, Miro. Vu
toi, tu t'es vite acclimaté, mon pote. »
Miro et moi remontons dans
notre chambre. Je lui demande alors où l'on ira pour acheter les fameux
cadeaux.
« Nous sommes dimanche, tu
sais. A part le marché Mont Bouët, aucun magasin en ville n'est ouverts. Le
mieux est d'attendre demain. Nous achèterons les cadeaux à Port-Gentil. De
toute manière, je n'ai pas d'argent. »
« T'inquiète pas pour
l'argent. Et pour le magasin, je vais demander à ma mère. Elle a une amie qui
possède un magasin pour bébé au quartier Louis. Elle nous fera une fleur en
ouvrant rien que pour nous. »
Wèèèèèèè ! C'est bien d'être
riche et d'avoir de l'influence.
Quand nous arrivons devant la
porte de notre chambre, nous trouvons Cassandra qui s'apprête à toquer.
« Nous sommes là, maman. »
« Ah ! Bonjour à vous. Tiens,
Tania. J'ai oublié de te remettre ton cadeau hier. »
« Oh, merci Cassandra. »
Je lui fais deux bises avant
de me saisir du paquet qu'elle me tend. Comme c’est une go qui ne blague pas,
je me rends bien vite compte qu'il y a un parfum de chez parfum et un bijou
dans le paquet. Yo !!! J'ai vraiment beaucoup de chance cette année ! La vie ne
peut pas être plus belle.
« Maman, nous avons besoin
d'acheter des cadeau pour des bébés. Tania est tata depuis ce matin. »
« Oh, félicitations. Mais tout
est fermé le dimanche. Ah, laisse-moi passer un coup de fil et je t'envoie un
texto. A tout à l'heure chéri. Ton père me demande de l'accompagner à la messe
à Ste Marie. Bisou. »
dans la chambre, Miro m'aide à
ranger tous les paquets cadeau. Entre ceux que j'ai ouverts et les autres, il y
a une pléthore de paquet. J'ai vraiment été gâtée. Même en rêve, jamais je
n'aurais pu avoir tout ça. Le père de Miro m'a offert une montre Swatch.
Carmella m'a offert une robe de chez Desigual, et dans le paquet que m'a remis
Cassandra, il y a une gourmette en or sur laquelle est gravée mon prénom et une
eau de toilette Miss Balmain.
Mon sac de voyage risque de
rendre l'ame si je mets tout cela à l'intérieur, alors Miro me dit :
« Nous allons acheter un sac.
Viens, sortons. Maman a appelé son amie. Elle nous attend au magasin. »
Nous prenons un taxi compteur
qui nous dépose juste devant le magasin, à côté du marché Louis. Nous montons à
l'étage et je me retrouve au paradis des bébés. Mon Dieu ! On a envie de tout
prendre. Mais comme ce n'est pas mon argent qui paie, je me contente de tirer
deux robes
« C'est tout ! », s’étonne
Miro.
Me voilà en train de bégayer :
« Je...je ...euh ! »
« Tania Akendengue, ton
intégrité m’honore, mais s'il te plaît, achète de vrais cadeaux aux petites. »
Yo !!! faudra pas que les gens
pensent après que je profite de son argent.
Je prends un panier que je
remplis de petites choses. Des choses dont je sais qu'elles auront besoin. Je
prends en plus, des joujoux. Miro demande alors à l'amie de sa mère d'emballer
deux grands nounours, les plus grands du magasin. Un représentant Minnie Mousse
et l'autre Daisy Duck. Nous passons à la caisse et un sacré mal de tête me
prend quand j’entends dire : trois cent quarante-six mille francs. Je préfère
regarder ailleurs pour ne pas avoir mal au cœur.
J'ai dépensé en une fois le
prix de mon billet d'avion pour Accra !!!
27-
Sitôt que nous arrivons à
Port-Gentil, je demande à Miro de nous déposer, Julien et moi, à la maison.
Cela me permet de prendre une douche et de me reposer un peu avant d'aller voir
les petites à la clinique Total. Les filles me lancent :
« On se capte tout à l'heure à
la clinique. A 18h. »
Miro descend de voiture pour
dire bonjour à maman.
« Alors, elles sont comment ? »,
fais-je en arrivant dans le salon.
Maman qui est devant la
télévision me regarde et e sourit :
« Mademoiselle Akendengue, on
dit bonjour ! Bonjour Miro. Comment vas-tu.
« Bonjour Bernadette. Je vais
très bien. Bon, je m'en vais. Je vais me reposer un peu. Faites-moi signe quand
vous serez à la clinique. Je viendrai vous rejoindre. »
Il s'en va après m'avoir
embrassée.
« Alors, raconte ! Pourquoi
ces petites ont-elles décidé d'arriver avec 3 semaines d'avance ? »
« Oh ! Je pense qu'elle en
avait assez d'être dans ce ventre et voulais te voir de près ! »
« Très drôle, maman ! Alors,
comment s'est passé l'accouchement ? Qui vous a accompagnées à la clinique ? »
« J'ai appelé Mr Mbeng sitôt
qu'elle s'est senti mal. Elle a perdu connaissance dans la cuisine. Heureusement
que j'étais à la maison... »
« Ok. D'accord. Et comment
vont les petites ? Est-ce que tante Agnès était à la clinique ? »
« Non ! Elle est toujours
fâchée. J'ai du mal à comprendre pourquoi.« Très drôle, maman !it on doit
passer à autre chose et changer d'attitude maintenant que les petites sont là !
»
« Et dis-moi, est-ce que vous
avez prévenu la mère de Peter ? Et lui-même, où est-il ? »
« Ne pose pas de questions
dont tu ne veux pas entendre les réponses. On va là-bas, on s’occupe de nos
enfants, le reste, on le laisse à Dieu. »
« Oh ! C'est à ce point. »
« Oui. Et j'aimerais que tu
n’embarrasses pas ta sœur avec ces questions. D'accord. »
« Ohhhhhh !!! mais il faudra
bien un jour ou l'autre qu'on en parle. »
« Peut-être, mais pas
aujourd'hui. Pas tant que Pupuce est à l’hôpital. Il la garde dix jours à cause
de la césarienne. Et pour Agnès, j'irai lui parler demain après le boulot. Je
l'ai eu au téléphone à 10h. Elle m'a fait tout un speech, soit disant que je
suis trop permissive. Elle ne comprend rien à la vie, cette femme ! »
« Bonjour Julien. Comment
s'est passé ton week-end. »
« Très bien même, la vieille.
Il a été très occupé avec le fessier de cette Pamella-Jo ! »
« Vous avez vu les gens !
C'est comme ça qu'on me vend. Écoute la vieille, ta fille était embêtée et
tout. Il y a une fille qui chauffait pas mal mon bof ! Donc la sista vient me
voir et me demande de m'occuper du bizzz et tout. On ne refuse pas une faveur à
sa frangine, tu comprends. Donc j'ai pris le colis en charge jusqu'à destination.
», fait mon frère.
« Et quand tu parles en
français facile, ça donne quoi. », lui demande la vieille.
« Bon, La fille en question,
Pamella-Jo elle a 17 ans, elle me mange dans la main. Je suis un gars hyper
sexy, intellect et disponible. C'est normal. », fait mon frère.
« Je te signale, monsieur mon
fils que tu n'as que 14 ans ! Comment peux-tu sortir avec une fille plus
vieille que toi ??? »
« La vieille, je peux te jurer
que lorsque je l'ai embrassée, elle n'a pas senti la différence entre mes 14
ans et les 17 ans des mecs auxquels elle est habituée !!! »
« Ah, parce qu'elle a déjà des
habitudes !!! »
« Calme-toi, la vieille ! Tu
parles quand même à un garçon responsable ! J'ai fait comme tu me l'a toujours
répété, j'ai utilisé une capote. Enfin...deux capotes quoi !? »
« Donc, si je comprends bien,
tu es allé en weekend à Libreville pour te faire dépuceler par une fille de
terminale ! »
« Eh ! J'ai rien demandé
maman. Elle m'a proposé, j'allais pas dire non. »
« Mon Dieu ! Cet enfant est
fou ! Disparais de ma vue ! »
« Bon, je m'en vais dan ma
chambre. Mais si une Tuscon de couleur grise se gare devant ton portail, ne
t'étonne de rien. On vient me rendre visite tout à l'heure ! Mais, quand même
tu restes ma number one, la mater. »
« Disparais ! Pardon,
n'assassine pas plus mes oreilles. Cet enfant est même comment ! Tania, c'est
ce que vous êtes allés faire à Libreville. »
Pendant tout leur échange, je
suis restée silencieuse. Mais là !
« Huuuummmm ! La vieille, tu
aimes exagérer. On s'est amusé, c'est tout. », fais-je à maman.
« Alors, raconte-moi tout. »
Je m'assois pour raconter le
week-end à ma mère. J'ouvre les bagages pour lui montrer tous les cadeaux que
j'ai reçu.
« Finalement, ça va mieux avec
Cassandra ! »
« Oui, vraiment mieux. Je ne
sais pas ce que tu lui as dit lorsqu'elle est venue te voir, mais elle a été
très impressionnée. Elle s'est adoucie envers moi. »
« J'en suis heureuse. Tu ne
m'a pas montré le cadeau que t'a offert Miro. »
« Ferme les yeux d'abord. »
Alors qu'elle ferme les yeux,
je lui mets en évidence, ma bague sous les yeux. Quand elle les ouvre, elle
crie.
« Ce n'est pas vrai ! Dis-moi
que ce n'est pas vrai. »
« Et si, c'est ça son cadeau !
« Tu as vraiment eu un
anniversaire de rêve. »
« Comme tu le dis, maman.
Comme tu le dis. »
Nous sommes là en train de
papauter quand on entend une voiture se garer devant le portail. Maman s’étonne
au son du moteur de la dite voiture. On sort et on se retrouve face à un TM. En
descend la mère de Peter.
« Bonjour, oh ! Je ne pouvais
pas venir à la clinique. J'étais trop occupée avec la maman qui me fait un
palu, là ! Mais voilà. Peter est parti, oh ! Il m'a dit d'aller chez Bitar (le
libanais) pour aller chercher les deux berceaux, là. Voilà. »
Maman regarde étonner. Elle
n'ose rien dire.
« Oh, c'est Peter qui envoie
les berceaux, c'est ça ! », fais-je complètement incrédule.
« A didiambou ! c'est ce que
je dis là. Il m'a seulement dis, vas chez le libanais, j'ai déjà payé. Donc, y
a 2 berceaux et 2 commodes, plus 2 matelas. Voilà ! »
Je sors très vite de mon
étonnement et demande aux jeunes hommes qui porte les affaires de les déposer
dans le salon. Ils s’exécutent et la mère de Peter s'en va comme elle est
arrivée. Maman n'a même pas le temps de lui poser plus de questions. Alors,
elle se tourne vers moi et me demande :
« Dis-moi Tania, où Peter a
t-il trouvé l'argent pour acheter ces meubles ? »
« Je n'en ai aucune idée,
maman. Je suis aussi surprise que toi. »
Julien arrive alors.
« C'est quoi ce vacarme ! Oh
!!! Où avez-vous eu l'argent pour acheter d'aussi beaux berceaux ? »
« C'est la mère de Peter qui
vient de les livrer », lui répond maman.
« Où les a t-elle volé ? »
« Julien ! », s'indigne maman.
« Ah, la vieille. Elle t'a dit
elle-même qu'elle n'a pas de lit chez elle. Où a t-elle trouvé l'argent pour
acheter ces meubles ? », s’étonne Julien.
« Elle dit que c'est Peter qui
les as achetés. »
« Yo !!!! On verra de tout
dans ce Gabon ! Je ne dis rien. », fait Julien en allant dans la cuisine.
Maman et moi restons là à nous
regarder.
« Heuuuuu ! Où va t-on mettre
tout ça ? »
« C'est vrai qu'on y a même
pas pensé. On est obligé d'en mettre un dans ta chambre et l'autre dans la
mienne. C'est le seul moyen. »
« Ok. On mettra les deux
commodes dans la chambre de Julien. En espérant que monsieur ne se fâche pas en
disant qu'on viole son espace privé. »
Elle appelle alors Julien pour
nous aider. On fait comme on a dit. Puis, maman commence à ranger les affaires
des bébés dans la commode. Je place les nounours achetés par Miro dans les
berceaux. Et je vais prendre une douche. Quand je reviens, je me rends compte
que maman a prodigieusement installé les tours de lits que j'ai acheté à
Libreville. C'est bête, mais à voir ces berceaux aussi bien décorés, on aurait
envie d'avoir des enfants.
« C'est vraiment beau ! »
« Comme tu dis ! J'espère que
ces deux berceaux ne seront pas les seules choses qu'elles recevront de leur
père. »
« Maman, la mère de Peter a
dit qu'il est parti. Qu'est-ce que cela veut dire ? »
« Je n'en sais rien, chérie.
Je n'en sais rien. »
« C'est bête, mais j'aurais
jusqu'au bout espéré qu'il change malgré tout. »
« Il ne changera pas. Il est
comme il est. », conclut maman. Voir moins
28-
Je suis fin prête et habillée
pour me rendre à la clinique. Maman termine de ranger les affaires des petites.
Je la rejoins dans sa chambre.
« Je vais passer la nuit
là-bas. Elle a besoin d'aide, car elle ne peut porter les bébés à cause de sa
cicatrice. Là, ta grand-mère est restée là-bas avec la grand-mère Mbeng. »
« Oh ! Elles vont pouvoir de
raconter beaucoup de choses ! »
« C'est sûr ! Ces gens sont
vraiment gentils. Les sœurs de mr Mbeng étaient toutes là ce matin pour la
visite. », me confie maman.
« C'est vraiment cool pour
Pupuce. Elle qui pensait se retrouver seule ! »
« Non, il y aura dix-mille
mains pour s’occuper de ces enfants. Ma maison est bien petite pour accueillir
tout ce monde. »
Je souhaite poser une question
quand Julien arrive en trombe dans la chambre de maman en oubliant de cogner :
« Les filles, vous ne me
croirez pas. »
« Oui, qu'y a t-il. »
« Un frangin vient de me
balancer une info, là ! Parait que Big Wave s'est tiré ! »
« Nous étions déjà au courant
! Sa mère nous l'a dit tout à l'heure. »
« Et wèèèè ! Et vous savez où
le type a atterri ? »
« Non. Où est-il ? », demande
maman intriguée.
« Yo !!!! Il est à Malaga, en
Espagne. Il a pris l'avion la nuit dernière à 22h 30. Il a envoyé un whatsapp
aux autres frangins de son équipe en disant que sa vie commence maintenant ! »
« Oh !!! Il n'aura même pas
attendu que ses enfants arrivent au monde. », fais-je
« Qu'est-il allé faire là-bas,
en Espagne ? Et pourquoi si vite ? Où a t-il trouvé l'argent pour le billet ?
Qui l'a aidé pour le visa ? Que va t-il y faire ? », demande maman.
« Il va faire ce qu'il sait
faire : jouer au basket ! Ses frangins, qui sont déjà là-bas, lui ont arrangé
le coup ! Ils sont solidaires ces basketteurs. Et puis pour les enfants, vous
savez depuis le début qu'il n'en a que faire ! Ouvrez donc les yeux ! »,
conclut Julien.
Maman et moi sommes dubitatives.
Le type a mangé ici tous les jours après le school. Il n'était pas aussi cool
qu'on l’aurait aimé, mais ça fait froid au dos de savoir que ses plans étaient
calculés au plus près et que rien ne pouvaient les changer.
« Espérons qu'ils apprennent à
utiliser des capotes là-bas ! », fais-je.
« Ce n'est plus notre
problème, Tania. Nous devons nous atteler à parler de lui le moins possible
pour ne pas indisposer ta sœur. Et j'ai franchement plus envie d'entendre ce
prénom, Peter. Il est parti, qu'il vive sa vie et sort de la nôtre. »
« Il sortira de la nôtre,
maman. Tu n'auras pas besoin de prier pour ça. Le type a rêvé depuis des
siècles à se barrer d'ici ; il ne risque pas de revenir d'aussitôt ! »,
fais-je.
Quand maman et moi arrivons à
la clinique Total à 18 heures, toutes les frangines de Raponda sont là. Elles
se sont passé le mot par Whatsapp. Tout le monde veut voir les bébés de Pupuce,
dont on dit qu'elles ressemblent à des poupée. Sunita, sa combi en chef, est
là. Comme elle a vu les bébés ce matin, c'est elle qui donne les détails. Elles
ont des fossettes, confient-elle. Wèèèèè !
Une sage-femme est obligée de
venir à nous. Elle met un peu de discipline et nous annonce que l'on rentrera
deux par deux dans la chambre, exceptée maman et moi.
Je laisse donc les filles et
suis maman dans la chambre dans laquelle Pupuce est endormie.
La grand-mère Mbeng se lève
pour nous accueillir.
« Je vais m'en allée. Elle a
pris deux yaourts à midi. Elle n'a pas vraiment faim. À demain Bernadette. »
Elle s'en va accompagner de
grand-mère Ziza. La sage-femme arrive deux minutes plus tard avec les deux
bébés qui viennent de prendre leur toilette.
« Et voici nos princesses.
Elles sont toute propres. »
« Elle sont surtout très
belles ! », fais-je en m'extasiant devant les petites.
Je n'ai pas besoin de les
regarder plus pour me rendre compte que toutes les deux ont pris trait pour
trait, le visage de Kaba ! Le monde est vraiment injuste. On aurait dit
qu'elles sont sorties du ventre même de mme Mbeng !
« Mais, pourquoi ressemblent-elles
tant à leur grand-mère ? », fais-je.
« C'est un mystère ! Tout me
va du moment qu'elle sont en bonne santé ! », fait maman.
Pupuce se réveille alors. Je
fais rentrer ses potesses deux par deux. Il y a bien une trentaine de personnes
qui attendent pour elle. La bavarde de Sunita s'y met. Elles ont déjà préparé
une petite fête pour la sortie de leur amie.
« Juste un petit truc, quoi.
Des cup cakes, des pizzas, des grillages ! Et des jus. On fera ça quand tu
seras plus en forme. Et puis, y a mr Nziengui, le professeur de français qui
t'envoie ses salutations. Et la kongosseusse de mme Chancelle dit qu'elle
espère te voir en cours vendredi prochain. Oh, elles sont trop choux. »
Toutes les filles ont emmené
un petit cadeau : des paquets de couches, des grenouillères, des nounours.
Elles se taquinent. Elles
rigolent. L'ambiance est vraiment positive dans la pièce.
Bientôt, tantine Bibiane et
tantine Jolie, les sœurs de mr Mbeng arrivent. Elles embrassent les petites et
font signe à maman de les suivre dehors. Je suppose qu'elles veulent parler de
Kaba et de son comportement.
Mes complices ne tardent pas à
arriver. Je me rends compte que Marc-Elise est aux bras d'Antoine. Jileska,
égal à elle-même est pressée comme une puce. Dès qu'elle a l'une des petites
dans les bras, elle se met à la couvrir de baisers. Gaëlle nous fait alors
remarquer :
« Elles sont identiques, c'est
vrai, mais vous pourrez les distinguer facilement. »
« Comment ? » s'étonne Pupuce.
« Ah ! C'est vrai que t'as pas
pu les tenir dans tes bras longtemps ni leur donner le bain. Mais, figurez-vous
qu'il y en a une qui a un point de beauté juste là, sous le nez. », fait
Gaëlle.
« Personne ne s'en est rendu
compte », confie Pupuce. « C’est pour ça que Grand-mère les habillent avec des
couleurs différentes. »
Nous continuons à papoter. Ne
tenant plus sur place, Jileska balance :
« Excuse-moi pupuce, mais ce
tocard de Peter Malonga est où ? »
Marc-Elise lui fout
discrètement un coup dans le dos.
« Non, mais il faut poser la
question. Il me sort par les pores ce type ! Bon, excuse-moi. Je m’occupe de ce
que je peux maîtriser et comprendre. Elles sont trop jolies ces petites. »
La voilà qui se remet à
embrasser Jade et Ruby.
« Tania, ta mère a eu une idée
géniale en leur donnant ses prénoms. », me fait Marc-Elise.
« J'ai demandé à grand-mère de
leur trouver des prénoms en miènè. Et bien sûr grand-mère Mbeng a décidé de
leur trouver des petits noms fangs. »
« Yo ! À la fin, elles ne
sauront plus quelle langue parler entre le miènè, le fang et l'eshira. »
« Elles ne risquent pas de
parler eshira car je vous interdis dès aujourd'hui de prononcer le nom de
Malonga devant moi. »
STUPEUR DANS LA SALLE ! Nous
restons là, les yeux ouverts, étonnés. Que s'est-il passé ? Où donc a disparu
la Pupuce tellement amoureuse de Peter, qu'elle quittait chez elle pour aller
faire la lessive à Ntchenguè ? Personne n'ose poser de question. Nous nous
regardons et décidons de manière tacite, à ne nous intéresser qu'aux bébés.
Le téléphone de Marc-Elise
vibre violemment ; le mien est resté à la maison. Miro était trop fatigué pour
m'accompagner. Il a décidé de venir plus tard, avant la fin des visites. Le
téléphone de Jileska se met lui aussi à vibrer sauvagement. Je sors de la
chambre et vais vers Gaëlle et lui demande où se trouve Sharonna. Elle devait
nous rejoindre, mais n'est toujours pas là.
« Je viens de vous envoyer des
messages. Réunion de crise tout de suite chez toi, Tania. Sharonna nous y
attend. C'est plus que grave : c'est une question de mort ou de mort. »
Yoooooo ! Qu'est ce qui s'est
passé entre le moment où nous avons atterri à 14h 45 et maintenant ?
Les filles arrivent au pas de
charge.
« C'est comment Gaëlle ? Mon
cœur a failli lâcher. C'est quoi ce message ? », lance Sharonna. »
« L’heure est grave. Très grave.
Je ne sais même pas par où commencer. Allons-y seulement. »
J'abandonne donc mes nièces à
la clinique après leur avoir fait des bisous. Je suis les filles. Comme Antoine
a la voiture de sa mère, il nous dépose chez moi. Nous arrivons là et trouvons notre
copine tremblante et est en larmes. Un peu plus et elle entre en transe.
« C'est comment, Sharonna ?
Qu'est-ce qui se passe ? », fais-je dépassée.
Mon frère, qui la tient dans
ses bras pour la soutenir et l'empêcher d’atterrir par terre, nous lance :
« On verra de tout dans ce
Gabon. Il faut venir y vivre pour y croire. »
Nous regardons Sharonna sans
trop comprendre. Nous sommes obligées de la prendre dans nos bras et de la
bercer comme un bébé.
29-
Un quart d'heure plus tard,
Sharonna est toujours inconsolable. Comme les larmes n'arrêtent pas de couler
et que les tremblements sont toujours aussi importants, je me tourne vers
Julien.
« Qu'est-ce qui se passe ? Que
t'a t-elle dit. »
Alors que mon frère veut
répondre à ma question, son téléphone sonne. Il regarde et me lance que c'est
maman. Il lui répond et me tend le téléphone en faisant de gros yeux.
« Oui maman ! Désolée, je peux
pas te parler. J'ai... »
« Appelle ton amie Sharonna ou
va la voir, s'il te plaît. Il se passe des choses grave de son côté ! »
« Yo ! Ma mère est courant
alors que moi, je suis avec l’intéressée et que je ne sais que dalle !!!
« Qu'est-ce qu'il se passe
maman ! Dis-moi tout s'il te plaît. »
« Ah, Tania ! On ne parle pas
de ces choses-là au téléphone. Je suis là avec monsieur Mbeng. Il a reçu un
coup de fil important. Il était tellement dépassé par la nouvelle qu'il s'est
mise à parler tout seul. C'est très grave ma chérie. »
« Mais, maman, dis-moi ce qui
se passe. »
« Vas voir ta copine, ma
chérie et reste avec elle toute la nuit s'il le faut ! Je t'appelle tout à
l'heure. »
«Je raccroche et me tourne
vers Sharonna. Je la supplie de nous dire ce qui ne va pas.
« Ma mère est au courant de
quelque chose, mais elle dit que c'est à toi de me le raconter. Dis-nous ce qui
se passe, Sharonna. »
Elle consent à parler. D'une
voix faible, elle nous dit :
« Le monde s'effondre ! »
Elle ne peut en dire plus, car
un sanglot fort la prend et la fait tressaillir.
« Mettez-la sous un jet d'eau
! », nous dit Antoine.
Nous avions complètement
oublié qu'il était là, celui-là.
« Bonne idée ! », fait
Jileska.
Nous la prenons et l’emmenons
dans la douche. Là, nous la mettons sous le jet de douche. Il semble qu'elle ne
se rende même pas compte qu'elle est entièrement trempée, car elle ne réagit
pas à l'eau froide. Nous la laissons pleurer et elle finit par se clamer.
Je me demande bien ce qu'elle
a à dire.
Nous la sortons de là en
l’emmitouflant dans une grande serviette.
De retour au salon, on
l'assoit dans le canapé et on attend.
Elle nous regarde avec des
yeux tellement absents, qu'on se rend vraiment compte que son monde s'est
réellement effondré.
« Qu'y a t-il, Sharonna ? »,
insiste Gaëlle. « Tu nous a envoyé un message tellement énigmatique que l'on
est venu ici en courant. Qu'est ce qui ne va pas ? »
Elle n'arrive toujours pas à
parler. Tout ce qu'elle parvient à nous dire est :
« Ma vie vient de s'arrêter !
»
Yo !
Nous sommes là, suspendus à
ses lèvres. Alors Antoine nous dit :
« Ne la brusquez pas. Elle
semble avoir reçu un choc vraiment terrible. Attendez qu'elle se calme et
décide de parler. Je vais vous chercher des pizzas et je reviens. »
Antoine s'en va et moi, je
rejoins mon frère dans sa chambre. Il est couché sur son lit et regarde le
plafond.
« Que t'a t-elle dit en
arrivant. »
« Elle m'a dit qu'à
Port-Gentil les gens ont des rêves très grands. Ils font tout pour le réaliser,
quel que soit le bonheur des autres. »
« Et si tu parles en français
facile, ça donne quoi ? »
« Bon, son père a fracassé le
crâne de sa mère. Ça s'est passé, il y a deux ou 3 heures. »
« Non ! Ce n'est pas possible
! Ce type est doux comme un agneau. Il ne peut pas avoir fait ça ! »
« Mais dans ce cas, on va
changer le proverbe et dire désormais, méfiez-vous de l'agneau qui dort. »
« Arrête de blaguer, Julien.
C'est sérieux ce que tu viens de dire. »
« Sista. Sa mère a fait joujou
avec un idiot qui use de sa bite pour réaliser son rêve aux détriments des
autres. Et donc... »
Alors qu'il veut m'en dire
plus, j'entends les filles qui m'appellent comme si une bombe leur était tombée
sur la tête.
« On verra de tout dans ce
Gabon là ! On verra de tout ! », fait mon frère.
Je reviens dans le salon. Je
remarque Gaëlle qui tourne en rond en se tenant la tête. Jileska est là,
stupéfaite. Marc-Elise n'arrête pas de répéter : c'est faux, ce n'est pas
possible.
« Qu'est-ce qu'il y a ? »,
fais-je.
« Sa mère est aux soins
intensifs à Ntchenguè. Le Pater l'a sérieusement bastonnée à coups-de-poing. »
« Ce n'est pas possible »,
fais-je. « On connaît tout mr Nguema. Jamais il ne ferait une chose pareille. »
« Eh ben, si. », répond
Jileska.
« Non, ce n'est pas possible.
», fais-je comme si je voulais me sortir d'un mauvais rêve.
« il l'a tellement boxée que
mon frère et moi avons cru qu'il allait la tuer. », fait Sharonna entre deux sanglots.
Et merde ! C'est là que je me
souviens du baiser à Libreville, dans le hall de l’hôtel.
« Mais, Sharonna, qui lui a
dit que ta mère était à Libreville avec son amant ? Qui lui en a parlé ? »
« Personne ! Ce n'est pas pour
ça qu'il l'a bastonnée. »
« Ah ! Et pour quoi alors ? Je
ne comprends pas. », lui fais-je.
Elle me regarde dans les yeux
et j'ai l'impression que ce qu'elle va me dire, va me rompre le cœur.
« Il a découvert ce matin en
consultant ses comptes sur Internet que maman a dilapidé tous les sous qu'il
réservait pour mes études aux USA. »
« TU RIGOLES SHARONNA ! C'est
une blague. »
« Tu t'imagines Tania ! Cette
femme qui est sensée m'aimer, a vider le compte dans lequel, mon père a placé
toutes ses primes depuis deux ans ! Il disait que c'était pour mes études, car
on lui demandait une caution de 15 millions de francs pour que je puisse aller
étudier dans l'université d mon choix aux USA. Elle a tout pris, Tania. Elle
n'a même pas laissé un franc. Elle n'a même pas pensé à moi, à mon avenir. »,
fait Sharonna en pleurant.
Là, même moi, je suis obligée
de pleurer parce que je me rends compte de la détresse et du chagrin de ma
copine. Les autres restent sans voix. Personne n'arrive à parler. Marc-Elise
n'arrête pas de répéter : ce n'est pas possible.
Et Jileska de lancer :
« Et qu'a t-elle fait de tout
cet argent, Sharonna ? Où cet argent est-il passé ?»
« Figurez-vous qu'elle l'a
donné à son amant. »
« Ah bon ! Donc une femme
belle et intelligente comme ta mère, ingénieur à Shell Gabon, a besoin de payer
pour qu'un homme lui fasse l'amour ? Ça n'a aucun sens Sharonna ! Elle a été
envoûtée ! », fait Jileska.
30-
« Maintenant, que nous savons
tous, ce que Big Wave a fait, peut-être pourrions-nous nous mettre à table et
savourer ces pizzas. »
Le temps est resté suspendu et
personne ne s'est rendu compte qu'Antoine est revenu avec 5 pizzas. Sans crier
gare, Julien dresse la table.
Mon cerveau fait deux tours et
je lui dis :
« Comment ça ce que Big Wave a
fait ? Qu'est-ce que Peter Malonga a encore fait ? »
« Oooooh ! Vous n'êtes pas
encore au courant ? », fait julien. « Excuse-moi Sharonna, mais ta mère a
vraiment chier. »
Et ma copine se remet à
pleurer.
« Oooooh, là ! On se calme.
Tout doux ! », fait Antoine en tapotant la main de Sharonna.
« Qu'est-ce que Peter Malonga
vient faire dans cette affaire, Julien. »
« Mais, les 15 millions,
c'était pour lui. Ah ! Il a volé le rêve de Sharonna. Elle voulait aller à New
York ou à Los Angeles danser avec les étoiles. Lui voulait faire rêver les
petits Port-Gentillais comme Lasme et Géraldine Robert le font en jouant dans
les championnats européens. La mère de Sharonna a estimé que le rêve de Big
Wave était plus important que celui de sa fille ! Voilà. Il faut le faire quand
même ! Réduire à zéro l'avenir de sa fille parce qu'un imbécile a su jouer du
violon avec sa bite. »
Yoooooo !
« Dis-moi que tu rigoles,
Julien ! Dis-moi qu'il raconte n'importe quoi Sharonna ! », fait Jileska qui
semble tout d'un coup sortie de nulle part.
« Oh ! J'ai tellement honte les
filles ! Ma mère avec ce crétin ! »
« Non ! Mama, dis-moi que
c'est une blague ! Popopopopoooooooo ! Malonga baise avec ta mère ! »
« Merci pour la délicatesse,
Jileska. J'attendais pas mieux de toi. », fait Sharonna en pleurant de nouveau.
« En fait, Jileska a raison
d'être étonnée ; moi-même j'ai du mal à mettre les choses en ordre. Donc, ta
mère a un amant. Son amant c'est le père des filles de Pupuce, le gars qu'on
prenais pour un idiot, et il s'est cassé en Espagne avec les sous de tes études
supérieures ! C'est ça Sharonna ? », fait Marc-Elise.
« Ekiééé ! Le bangala de ce
type doit-être magique ! »
« Reste polie, Jileska ! »,
s'insurge Gaëlle.
« Excusez-moi, guèèèè ! Je
suis tellement sur-méga-choquée que je n'ai plus de vocabulaire. Donc Malonga a
fini toutes les filles des collèges de Pog. Il a fait 5 enfants à Port-Gentil
et 1 sur la route de Kango ; et a réussi à inscrire le nom de ta mère sur son
tableau de chasse. Mais c'est qu'il est à féliciter ce couillon ! »
Et voilà les larmes de
Sharonna qui redoublent d'intensité.
Moi, je reste là à essayer de
mettre les idées en ordre dans ma tête. Qu'est ce qui ne tourne pas rond chez
cette femme ? Elle a tout ce que les autres femmes désirent : cadre à Shell
Gabon, des enfants brillants à l'école, un mari qui a de l'argent, des
voitures... et elle va se perdre dans le lit miteux de Peter !
« J'ai besoin d'un efferalgan.
Ma tête va me lâcher ! », fais-je en me levant.
Je vais dans la chambre de ma
mère et me dirige vers la boite à pharmacie. Un cachet d'efferalgan me fera le
plus grand bien. Mon Dieu, si on m'avait dit que je vivrait ce genre de chose !
Quand je reviens au salon, je
me rends compte qu’Antoine a réussi à convaincre Sharonna et les filles de se
mettre autour de la table. Elles mangent leurs pizzas dans le silence.
« Bon, je veux pas jeter de
l'huile sur le feu, mais quand même, il faut que les choses soient claires.
J'ai un peu de doc, donc sharonna, sache que ta mère n'est pas dingue. Je pense
qu'elle t'aime, mais le tchang du grand Malonga était trop fort. C'est qu'il
n'est pas simple, le type ! Ma source me dit que le petit frère de sa mère est
un grand Nganga, du côté d'Ozouri. Donc, quand on additionne 1 + 1, on se rend
que le boa de Peter Malonga est très fort. »
« Cà veut dire quoi ça ? »,
demande Antoine.
« Ça veut dire, qu'il s'est
fait vacciner le sexe pour taper fort. Et il fallait qu'il tape sur la mère de
Sharonna. », conclut Julien.
« Oh ! Comme j'ai honte ! »,
pleurniche Sharonna.
Cette histoire me mets
tellement mal à l'aise que j'en arrive à bouder les pizzas.
« Je me mets à la place de mr
Nguema ! Le type rêve de te voir faire de brillantes études, toi son unique
fille. Et son rêve tombe à plat comme ça ! Son argent part en fumée d'un coup !
Je m'étonne qu'il n'ai pas sorti sa carabine ! Y a de quoi avoir des envies de
meurtre. », fais-je à Sharonna.
« Moi, ce qui me choque, c'est
que ta mère, qui nous impressionnait tant on la trouve belle et intelligente,
ai pu se retrouver dans le lit d'un gars de 25 ans ! Qu'est-ce qui lui a pris.
Même si ton mari te fait ça dure, trouve-toi quelqu'un qui lui arrive à la
cheville ! Elle va carrément se dégrader dans les bras d'un imbécile. », fais
Marc-Elise.
« Je ne suis pas étonné
qu'elle couche avec un garçon de 25 ans. En France, on voit cela tout le temps.
On appelle cela des cougars. », nous fait Antoine.
« Mais donc, votre monde ne
tourne pas rond, mon cher. Ma mère avec un type aussi jeune que mon grand-frère
! Non, non, non ! C'est pas normal. », fait Marc-Elise.
« Je pense qu'on devrait faire
comme a dit Pupuce : ne plus prononcer le nom de Peter Malonga. », lance
Jileska.
« Très juste », fais-je.
Mais comme Port-Gentil est une
petite ville, le lendemain, c'est le kongossa partout dans la ville. Au
collège, les gens en rajoutent. On donne des détails sur le tchang que l'oncle
de Peter a fait au petit. On dit que c'est pour ça que toutes les filles
tombaient comme des mouches. Ceux qui sont dans la confidence, se transmettent
par Whatsapp, la photo de Big Wave arrivant à l'aéroport de Malaga. Paraît
qu'après avoir envoyé ce Selfie à ses frangins de l'équipe de basket, le type a
jeté sa puce Libertis.
Les curieux qui vont dans sa
page Facebook, envoie des messages d'encouragement. Les filles qui se sentent
trahies, postent des messages haineux. Toutes veulent lui couper les couilles.
Il a posté un selfie sur sa
page Facebook, en mettant comme légende : Ma vie commence aujourd'hui.
En fait, avant, c'était un
mort-vivant. Malaga l'a ressuscité.
Gaëlle a carrément le courage
de poster sur le mur de Malonga : ATTENTION, CE TYPE EST UN SERIAL LOVER
MULTIRECIDIVISTE, PERE IRRESPONSABLE DE 6 GOSSES.
Quand je lui dit que Peter
effacera le message en le voyant, elle répond qu'elle s'en fout. Au moins une
personne l'aura lu.
Le soir même, Big Wave a
supprimé son compte Facebook pour en créer un autres, plus intimiste.
Mardi, à la clinique avec
Pupuce, je lui demande comment elle encaisse la nouvelle. Elle me regarde comme
si j'avais parlé chinois et me réponds :
« Mais Tania, je ne vais pas
aller me jeter dans l'Ogooué parce que Malonga est parti ! Je suis toujours
amoureuse de lui, oui, mais mes enfants sont plus important ! »
Yoooooo ! A quel moment cette
amoureuse forcenée est-elle devenu si réfléchie !
« Je suis heureuse de
t'entendre parler ainsi. J'avais peur que tu déprimes. »
« Écoute Tania Akendengue, il
est parti, bon débarras. Regarde le message qu'il m'a envoyé alors qu'il allait
embarquer dans 2 minutes et quitter Libreville. »
Elle me tend son téléphone
portable. Sur Whatsapp, Malonga a écrit :
« Mon oncle m'a dit qu'il ne
faut jamais s'arrêter de rêver et que la fin justifie les moyens. Je go vers
mon avenir. Trouve-toi un type bien qui prendra soin de toi et de tes bébés. Ma
vie m'appelle ailleurs. Adieu ! »
Je ne sais même pas quoi penser
après avoir lu son message.
« Au moins, il était
prévisible. On a toujours su qu'il n'allait pas assumer son rôle de père. »
« Mais moi, j'ai bêtement rêvé
de le changer ! », fait Pupuce en regardant le vide.
« Évitions les regrets ! Les
petites n'ont pas besoin de ça ! »
« Oui, c'est ce que je me dit.
»
« Et sa mère qui ne met même
pas les pieds ici depuis la naissance. »
« Je lui ai envoyé un message
ce matin. Elle m'a répondu qu'elle a ses soucis. »
« On va les laisser de côté.
Ca ne nous fera pas de mal. »
« C'est ce que j'ai
l'intention de faire. Focaliser mon attention sur mes enfants. Après le bac, je
passe le concours de l'ISI. »
« Comment ça l'ISI ? Et la
France dans tout ça ? Papa Jimmy a tout préparé pour ton départ ! »
« Je ne bouge pas de Port-Gentil,
Tania. Il est hors de question que j'abandonne mes enfants. Je reste ici. Je
ferai mon cursus à l'ISI. »
« Tu es sérieuse, Pupuce ? Tu
veux que mr Mbeng face un infractus. »
« Me fatigue pas Tania. Je ne
bouge pas. C'est toi qui a toujours rêver d'aller à l'étranger. Moi, je reste
où est mon cœur. Et mon cœur se trouve là, à côté de mes enfants. Va donc
découvrir le monde pour nous deux. Tu me raconteras. »
« Pardon, je préfère me taire.
»
Jeudi matin en classe,
Sharonna nous apprend que les parents de son père et ceux de sa mère qui sont
arrivés lundi soir d'Oyem, tiennent chaque soir des réunions. Son père n'arrive
toujours pas à parler tellement il est choqué et outré par le geste de sa
femme. La mère de Sharonna va mieux. Mais ses parents pensent qu'elle devrait
aller en Afrique du Sud pour un contrôle.
« Mon père a dit qu'il ne veut
plus la voir chez lui. Nous allons déménager avec lui. Elle va garder la
maison. Il dit qu'il ne veut plus en entendre parler. Ça nous fait tout drôles
à mon frère et moi ! »
« Et que disent les parents de
ta mère ? », demande Jileska.
« Oh ! Ils disent qu'il faut
pardonner. Mais, il accepte le fait qu'elle l'aie trompé mais ne supporte pas
et ne pourra jamais excuser qu'elle ait dilapidé l'argent de mes études. »
31-
À l'école, les jours passent
et ne se ressemblent pas. Les profs nous fatiguent avec beaucoup d'exercices
ici, des exposés là-bas. On ne sait plus où donner de la tête.
L'annonce vient de tomber.
Malgré les multiples grèves dans l'enseignement, le bac aura lieu. En août.
Enfin...Si les professeurs sont payés. Parce que là, ils ne sont pas du tout
contents. Les autres lycées ont passé plusieurs mois, fermés. Les élèves
étaient à la maison. Mais à Raponda, comme c'est privée, on continue de schooler.
Les rumeurs fusent de partout.
Tout le monde dit que ce bac-là est un bac manioc ; c'est dire qu'il ne sera
reconnu nulle part. Les gens enfoncent le clou en disant qu'on va à l'école
pour rien parce que l'Unesco ne va pas valider l'année !
Et nos pauvres parents qui
paient, l'école, le taxi, les livres et la nourriture ???
Pupuce est restée deux
semaines à la maison. Elle a ensuite repris les cours. Ses copines lui
emmenaient les cours à domicile. C'est bien d'être apprécié.
Y a toujours plein de monde à
la maison pour s’occuper des bébés. Les copines de Raponda sont là tous les
jours. On dirait quand on était petites et qu'on se retrouvait derrière la
maison pour jouer à la poupée.
Maman est aux anges. Elle
pouponne sans même prêter attention aux heures. Je me dis que même si Kaba
continue de faire sa crise et ne fait pas cas, on s'en fout. On ne sait même
plus pourquoi elle est fâchée.
Papa Jimmy vient à la maison
tous les jours après le travail. Il reste là à discuter avec sa fille Pupuce et
à donner le biberon aux petites. Il parle aussi des projets qu'il a pour sa
fille.
Il a acheté le billet. Pupuce
prend l'avion le 1er septembre à 22h 35 pour Paris. Et mademoiselle n'a même
pas la présence d'esprit de dire au boss qu'elle ne veut plus bouger.
Une nuit, je m'approche d'elle
et lui demande :
« Pourquoi tu ne dis pas à
Papa Jimmy que tu ne veux plus aller en France ? Tu le laisses dépenser tout
cet argent pour rien ? »
« Je ne sais pas comment lui
parler. Il se fait tellement de films que j'ai peur qu'il fasse une crise
cardiaque ! »
« Mais tu n'as pas compris que
ton comportement est encore plus criminel !!! En tout cas, ce ne sont pas mes
affaires, je ne m'en occupe pas. »
« Ta vie est tellement facile,
Tania. Tu as une mère qui t'aime et t'écoute. Tu as un fiancé raide dingue de
toi et la vie te sourie. »
« Quelqu'un te mange, Marjorie
Akendengue ? Je te signale qu'on est sorti du même ventre ; et que de nous
deux, c'est toi qui a eu la vie la plus facile ! Et j'en ai marre, je te dis
bien, que j'en ai assez que tu passes ton temps à me sortir les mêmes conneries
! Tu étais avec moi quand je devais me lever tous les matins et aller à pied à
l'école alors que toi, papa Jimmy te déposait en voiture ! »
« Oui, mais je suis sûre que
si j'avais eu tante Bernadette pour ma maman, ma vie serait meilleure. »
« Fous moi la paix avec ta
connerie. Je suis en train de me casser la tête pour trouver des solutions pour
mes études l'an prochain. Toi, ton dossier de bourse est ficelé, ton billet
d'avion est acheté, et tu veux m'emmerder avec tes questions
pseudo-existentielles ! ON S'EN FOUT DE SAVOIR COMMENT AURAIT ETE TA VIE SI
BERNADETTE T'AVAIS CHOISI AU LIEU DE MOI. Tu es là en train de te trouver des
sujets de dispute juste parce que tu as peur d'affronter Papa Jimmy. Je vais
pas rester là à t'écouter te plaindre. Bye.»
Ce dernier jeudi de juin,
alors que Miro est en train de passer ses dernières épreuves du baccalauréat
français, le professeur de philosophie nous bastonne avec un devoir. Le sujet :
Le devoir moral est-il une
entrave à la liberté ?
Là, je sèche. Je ne sais que
mettre sur ma copie. Les profs aussi.
Le prof d'histoire, comme à
son habitude, nous rappelle encore et encore, que l'on doit élargir nos
horizons et nous intéresser aux autres cultures. Il dit que l'on doit se
cultiver en lisant toujours plus, non pas seulement Les Gabonitudes de Libek,
mais aussi des magazines scientifiques, économiques et autres !
Pour la peine, il nous colle
un dernier exposé à chaque groupe. Ils divisent la classe en 4 groupes.
Le premier groupe doit faire
un exposé sur LE COUPLE LOVING.
Je fais parti de ce groupe.
Quand je demande au prof : « C'est qui les Loving ? »
Il me répond : « C'est à vous
de nous le dire. »
Le 2ème groupe doit travailler
sur Jean Hilaire Aubame et les pères des indépendances en Afrique.
Le 3ème groupe doit tabler sur
les règnes de Charles Taylor et celui de Hissène Habré.
Le dernier doit nous édifier
sur l'OPEP.
Quand le type nous donne les
sujets et nous dit qu'on a qu'une semaine pour travailler dessus, on a que mal
à la tête.
« Épatez-moi avant votre
départ pour l'université ; sinon je me dirai que j'ai livré des cancres aux
écoles supérieures ! »
Mamo, rien que ça !
Nous sommes samedi. Pour
oublier le stress de leur examen, Miro et Antoine ont organisé un pique-nique
au Cap Lopez. Nous y allons toutes : Marc-Elise, Gaëlle, Sharonna, Jileska et
moi. Les amis du lycée français sont là eux aussi. Le cuisiner de Miro a
préparer tout le repas. Nous n'avons qu'à dresser la table et manger en rigolant.
Nous jouons au beach soccer, et ensuite, nous faisons le relais, filles contre
les garçons.
Pamela-Jo n'est pas des
notres. Depuis le week-end de mon anniversaire à Libreville, elle colle aux
basques de mon frère Julien, comme s'il était devenu son oxygène. J'ai demandé
à monsieur jusqu'à quand, cela va durer, étant donné que lui n'est pas
amoureux. Il m'a répondu :
« Elle s'en va dans deux
semaines. Moi, je passerai à autre chose. Je suis encore jeune, ma vie
continue. »
Les filles sont très belles
dans leur maillot de bains. Marc-Elise, qui se prend pour miss monde, demande à
Antoine de la prendre en photo avec son smartphone. Gaëlle quant à elle,
discute avec Justin, un matheux aussi mordu de films d'Arsène Lupin et Agatha
Christie comme elle. Ils semblent tous les deux dans un autre monde.
Sharonna a meilleure mine,
même si la séparation de ses parents la chagrine énormément. Cela fait des
jours qu'elle n'a pas parlé à sa mère. Et leur désaccord a été amplifié par un
statut facebook de Big Wave. Un ami nous l'a montré. Il a écrit sur son nouveau
compte :
L'âge n'est qu'un chiffre,
Aaliyah l'a chanté. J'envoie une tonne de baisers à la plus désirable des
femmes : Pétula, tu es mon cœur. Peu importe la distance.
Le type écrit une déclaration
à la mère de Sharonna. Tout le monde peut la lire. Même pas un mot pour les
enfants.
Alors, ma copine a décidé de
laisser sa mère de côté histoire qu'elle-même fasse le point sur la situation.
Longtemps encore, les langues
à Pog, raconteront cette histoire.
Je fais la belle dans mon
maillot deux pièces. Je l'ai acheté pour cette sortie. J'ai fouillé longtemps à
la fripe pour trouver le plus beau, histoire de ne pas me prendre la honte
aujourd'hui.
Le temps est tranquille.
Pendant que nous espérons un bac qui est plus que peu probable, ceux du lycée
français en ont terminé. Miro sait ce qu'il fera à la rentrée prochaine. Nous
nous éloignons du groupe histoire de parler tranquillement. Il m'annonce :
« J'irais où tu iras. C’est
vrai que mon père espère que je fasse la prépa HEC à Paris, mais, mon cœur me
retient à toi. »
« Qu'est-ce que cela veut
dire, monsieur ? Je ne sais même pas ce que je ferai après ce bac ! »
« Où veux-tu aller ? T'as bien
une idée. Tu me parlais du Ghana. »
« Et toi, tu es prêt à me
suivre là-bas ? Tu rigoles, j'espère ! Qui aurait envie de se perdre en Afrique
alors qu'il a la possibilité de faire la meilleure école de commerce de France
?
« J'irai où tu iras. Tu n'as
pas encore compris combien je t'aime ? »
« Si. Et moi, je t'aime dix
fois plus. »
Alors que nous nous
embrassons,
Deux petits passent
accompagner de leur mère et se mettent à crier :
« Oh, les amoureux, oh ! Oh,
les amoureux ! »
32-
Juillet commence tout
doucement. Ça sent les vacances pour certains. Julien prépare son BEPC
tranquillement.
Il arrive ce mardi-là et me
rejoint dans la cuisine où je fais des spaghettis pour le repas du soir.
« Les filles aussi ! Vous
aimez même comment ? »
« Qu'est-ce qui se passe
encore ? »
« Laisse ! Je suis dépassée !
»
« Toi dépassé ? Tu m'étonnes.
»
« Comprends l'affaire qui me
traumatise aujourd'hui. Je suis allé voir Pamela-Jo, histoire de lui faire mes
adieux, quoi. Je t'ai dit qu'elle se tire pour la Belgique, non. »
« Oui, tu me l'a dit. Et que
s'est-il passé ? »
« Devine ? C'est toi qui lis
les histoires de Mady Rémanda sur Facebook, non ! Devine maintenant. »
« Elle t'a demandé de
l'épouser ? »
« C'est presque ça ! Réfléchis
encore. »
« Julien, dis le truc.
Qu'est-ce que Pamela-Jo t'a demandé. »
« Tu veux dire, qu'est ce
qu'elle a fait, plutôt. »
« Dis-moi ce qu'elle a fait. »
« J'arrive chez elle et tout,
la fille me présente carrément à son père. On a vu ça où ? Les blancs vraiment.
»
« Et qu'est ce qui te dérange
là-dedans ? C'est leur manière de fonctionner. »
« Sister, visualise un peu la
scène. Le pater me dit et tout : tu viens en vacances avec nous, Julien. Nous
allons sur la côte basque cette année. »
« Tu rigoles. C'est quoi ce
truc. »
« Je te dis que le pater a
appelé l'agence pour me réserver un billet d'avion. »
« Tu me fais marcher, Julien.
C'est quoi, ce délire. »
« Je te dis que dans 3 jours
là, je prends l'avion tranquille pour Paris, puis Bruxelles. Et dans deux
semaines, on descend au Pays Basque. Dans tout ça, je ne sais même pas où ça se
trouve. »
« Arrête de me faire marcher,
Julien. Tu me racontes n'importe quoi. »
« Ok, ne t'étonne pas si tu ne
me vois plus la semaine prochaine. »
« Donc, mon petit frère est un
gars aussi facile. »
« Tu blagues ou quoi ! Je les
ai arrêtés net. J'ai sorti la fatale : Je n'ai pas de passeport. Un point à la
ligne. »
« Moi qui pensais que tu
aurais sauté sur l'occasion. »
« Je te l'ai dis, sista, je ne
vais pas aller mourir pour elle alors que ce n'est pas la femme de ma vie !
Elle s'en va, je lui dis merci pour l'expérience qu'elle m'a transmise et je
passe à autre chose. Je ne suis pas à vendre, quand même. »
« Hummmm ! Julien Yénot, je
suis fière de toi. »
« Tu devrais. Car, j'ai tenu
ferme quand la go a commencé à me supplier à chaudes larmes. Les blanches aussi
! Je suis un petit bout de manioc de 14 ans ; elle peut trouver costaux là-bas
qui prendront soin d'elle, mais c'est chez moi qu'elle veut mourir. »
« Je parie que tu lui a brisé
le cœur. »
« Regarde seulement mon
téléphone. On m'envoie des messages toutes les secondes. Je l'ai laissée là-bas
en larmes ! »
« Et si elle décide de ne pas
partir ? Et qui elle décide de passer ses vacances ici. »
« Sister, son dossier est
bouclé. Je passe à autre chose. »
Sur ce, il s'en va de la
cuisine en sifflotant. A ce moment là, j'entends l'une des petites, pleure. Je
vais rapidement dans la chambre. Elles sont dans la chambre de maman. Ruby dort
dans son lit tandis que Jade, dort juste à côté de la grand-mère, sur le lit de
maman. C'est Ruby qui pleure. Elle se ressemble beaucoup. Nous habillons avec des
couleurs différentes pour les reconnaître. Pour Pupuce et moi, les choses
étaient plus simples, à ce que dit maman. Paraît que j'ai toujours été plus
dodue que Pupuce. Par la suite, c'est notre coupe de cheveux qui a fait la
différence. Pupuce garde ses cheveux très longs et aime les tresses. Mou, j'ai
les cheveux toujours coupés courts.
J'aime passer du temps avec
les petites dans les bras. Je les regarde, leur fait des bisous et me demande
comment sera leur vie dans 18 ans. Je comprends en les regardant, pourquoi
Pupuce a du mal à s'imaginer ailleurs, loin d'elles.
Moi, je suis toujours dans le
flou. Je continue mes économies et ma tirelire est pleine. Je veux juste voir
mon nom affiché sur les tableaux des résultats du premier tour. Dès ce
moment-là, je pourrais respirer et me projeter.
Je me pose des questions quant
à ma relation avec Miro. Il dit qu'il me suivra où j'irai. Mais comment ses
parents prendront-ils sa décision. Est-ce qu'ils ne seront pas fâchés en
apprenant que leur fils refuse d'aller en France pour faire sa Prépa HEC ?
Beaucoup de choses dans la tête. J'aime tellement ce type que je ne m'imagine
pas avec quelqu'un d'autre.
Je suis là en train de
raconter des histoires à Ruby, qui me sourit, quand Julien m'appelle
discrètement depuis la porte.
« Non, y a des gens qui sont
fous. »
« Qu'est-ce qui se passe
encore. »
« Un frangin vient de me
balancer des news. Non, vraiment, y a des gens qui sont fous. »
« Julien, qu'y a t-il ? »
Regarde seulement ! Je ne
parle plus. »
Il me tends son téléphone sur
lequel il est en conversation sur Whatsapp. Je regarde la photo qui s'affiche
en grand sur l'écran.
« Ce n'est pas vrai ! »
Le t téléphone devient tout
d'un coup trop lourd tellement il me fait mal aux yeux.
« Et ouais...C'est ça même !
Le monde tourne maintenant à l'envers. »
J'ai la bouche ouverte
tellement l'étonnement est fort.
« Qu'est-ce qui ne va pas,
Julien ? Qu'est-ce qui ne va pas ? »
« Pardon, donne-moi, mon
téléphone. J'ai des choses à faire avec ! »
Toujours désarçonnée, je lui
rends son téléphone. Je vais dans ma chambre prendre mon vieux blackberry C5 et
j'appelle Sharonna. Elle répond à la 3ème sonneria.
« Comment va ma chérie ? »
« Comment veux-tu que ça
aille, Tania. Je ne peux plus sortir de chez moi. Les gens rient en me voyant.
T'as vu la photo que Big Wave a osé posté ? Ma mère est devenue complètement
maboule, Tania. Est-ce qu'on se comporte comme ça quand on a des enfants et
qu'on est mariée ? Qu'est-ce qui ne va pas dans sa tête ? »
« C'est pour ça même que je
t'appelle. Julien vient de me montrer la photo. Ca discute pas mal sur son
groupe de frangins sur Whatsapp. »
« La photo fait le tour de la
ville en un rien de temps, Tania. Snif ! J'étais tout de suite chez le malien.
Des pétasses que je ne calculais même pas avant, osent maintenant rire
de moi.
Et oui ! C'est ça la vie. On
pensait que le type parti, son nom sortirait de notre vocabulaire ; mais même
loin, il continue de faire des vagues. La photo en question : Big Wave et la
mère de Sharonna qui s'embrasse dans un aéroport. La légende de la photo que le
type a postée sur Facebook, dit :
##Enfin réunis !c'est mon cœur
; la plus belle femme au monde.##
Je reste sans voix.
Qu'êtes-vous sensés éprouver comme sensations quand votre mère se comporte de
la sorte ? Mme Pétula Nguema a quitté le Gabon il y a deux jours pour rejoindre
son petit Peter Malonga à Malaga. Et ils vivent le grand amour. Au point qu'ils
ont sont à poster des selfie sur Facebook. La femme est pulpeuse, plus belle
que jamais. Elle paraît plus fraîche et drôlement mordue du jeune homme qui
l'emprisonne dans ses bras. Elle a eu 4 enfants, mais son corps fait encore
pâlir de jalousie.
« Sharonna, comment va ton
père ? Savait-il que son épouse est en Espagne. »
« Je t'ai déjà dit qu'il s'en
fout. Il lui a seulement dit qu'il ne veut plus la voir. Depuis que nous avons
déménagé, elle nous appelle seulement. Je ne savais même pas qu'elle quittait
le pays. »
« Et comment te sens-tu ? »
« Là, je n'ai même plus envie
de mettre les pieds en classe. Je vais attendre l'examen à la maison. J'ai un
mal de tête tellement terrible, que j'ai l'impression que tout va exploser à
l’intérieur. »
« Repose-toi, s'il te plaît.
Et arrête ton téléphone car les gens ne vont pas se gêner pour t'embêter. »
« Heureusement que vous êtes là,
les filles. Je ne sais pas si j'aurais eu le courage d'aller à l'école avec
tout ça. Je me demande ce qu'elle est allée faire en Espagne. Elle ne va pas me
dire qu'elle est amoureuse de cet idiot ! Il a deux ans de moins que mon frère
aîné, Tania ! »
« J'ai dû mal à y croire,
Sharonna. Je l'admirais tellement ! »
« Comme tu dis ! A demain.
Bisou. »
Je remets la petite au lit et
retourne dans la cuisine. Maman arrive alors.
« Oh, comment va t-on ici. Et
les petites ? »
« Elles font la sieste. «
« Ok. Oh, tu fais la tête ou
quoi ? Où est ton sourire ? »
« Tout va bien, maman. Je suis
juste fatiguée. »
« Tu es sûr ! Tu ne me caches
rien, j'espère ? Tout va bien avec Miro ! »
« Oui, maman. Tout va bien
entre nous. »
« As-tu réfléchi à votre
avenir. Il ira en France dans quelque temps ; comment le vivras-tu ? »
« Je ne me suis pas encore
posé la question maman. Mais il m'a dit qu'il est prêt à me suivre où j'irais.
»
« Donc, si tu vas à Masuku, il
y va avec toi ? »
« T'as beaucoup d'humour,
maman ! »
33-
Maman veut continuer la
conversation, mais elle est appelée par les cris des petites.
« Elles ont faim. »
Grand-mère nous dit au revoir
après avoir donné le biberon à Jade.
Je dresse la table du salon,
alors que Julien arrive dans le salon et prend une de ses nièces dans les bras.
« Elles feront des malheurs
ces petites ! Comment peuvent-elle être aussi jolies ! »
« Aussi jolie que ta fameuse
Pamela-Jo ! », le taquine la vieille.
« Maman, pardon, oublie ce
prénom-là. C'était juste une aventure ! »
« Ecoutez-le ! », fait maman,
« Il se prend pour un homme. »
« Mais, je suis un homme. Et
un vrai. C'est pour ça que cette Pamela-Jo meurt pour moi. »
« Pardon, ne me fais pas mal
aux oreilles.
Il est 21 heures et je suis
dans la chambre après avoir mangé. Les petites sont couchées et maman regarde
les infos sur Africa 24. Julien travaille dans sa chambre. Je pianote des mots
à mon Miro chéri, sur WhatsApp. Je suis tellement absorbée par l'amour que tout
autour de moi disparaît. J'entends soudain :
« Tania, tu peux pas savoir
combien ça fait mal, là. J'essaie de rester stoïque en me disant que la vie
continue, mais le regard des autres me fait drôlement souffrir. Combien de
temps leur faudra-t-il pour oublier Peter Malonga ? Combien de temps, encore, l’associeront-ils
à moi ? »
Pupuce vient de rentrer de
chez Solange, une amie de classe. Elles font les 2KPI ensemble. Elle est
complètement déboussolée. Je l'ai souvent vu pleurer, mais là, aucune larme.
Son visage est serein, mais je ressens sa tristesse.
« Que s'est-il passé ? Je
pensais que tu étais allée travailler ? »
« Je travaillais, en effet.
Mais les filles du groupe ont passé deux heures à s'intéresser à la nouvelle
vie de Peter. Elles ont vu la fameuse photo. Elles ont dû passer la moitié du
temps à se demander comment j'ai pu tomber amoureuse de lui. C'est à peine si
elles ne m'ont pas traité d'idiote. Pourtant dans le lot, il y en a bien deux
ou trois qui ont couché avec lui. Dis, on va tout le temps me fatiguer les
oreilles avec ce type ? Même parti, il fait couler beaucoup d'encre. »
Je ne sais quoi répondre à
Pupuce. Elle est tellement épuisée, qu'elle s'affale sur le lit, les yeux fixés
au plafond.
« Imagine donc Sharonna en ce
moment ! », lui fais-je.
« J'ose même pas. Je
n'aimerais pas être à sa place. Tout comme je ne souhaite à personne d'être à
la mienne. La vie a un drôle de sens de l'humour. Je pense que finalement, je
vais partir d'ici. »
« Ah bon ! Tu es décidé ? »
« Oui. Ça me fera du bien.
Cette ville est beaucoup trop petite. Même lorsque tu pètes dans le secret de
ta salle de bain, tout le monde est au courant à la minute. J'ai envie
d'oublier Peter Malonga, Reaponda, Port-Gentil. J'ai envie d'oublier que j'ai
été folle amoureuse de cet imbécile. »
« C'est le père de tes
enfants. »
« Raison pour laquelle, il
faut que je parte. Je vivrais à l'étranger des choses excitantes qui me
permettront de prendre de la distance et surtout, de pardonner et accepter
Peter comme il est. »
« Tu deviens raisonnable,
Pupuce ! »
« Oh, j'ai passé une heure à
longer le bord de mer. Je me suis dit que je me priverai de quelque chose en
restant ici. La vie continue. Et tu sais, il y a cette douleur qui reste là en
dedans de moi. »
« De quelle douleur parles-tu
? »
« Oh ! J'ai lu pas mal de
romans. A force, on finit par rêver. On se dit que tout ce qu'elle invente dans
leurs histoires doit forcément se réaliser dans la réalité. Je ne demandais pas
grand chose à la vie. J'étais naïve de penser que Peter changerait. Mais
bon...recevoir un bouquet de roses de sa part à la maternité, m'aurait
réconcilié avec la vie ! Je n'ai pas connu ça. Et ça me fait mal. Ni roses, ni
boîtes de chocolats. Qu'est-ce que cela lui enlevait d'attendre que les petites
viennent au monde ? »
« Il avait ses plans. Et il
lui fallait agir vite. Il a volé, ne l'oublie pas. Il fallait agir vite. »
« Oui, comme tu dis. Il a volé
le cœur de plusieurs filles. Il vit aujourd'hui le grand bonheur, d'après lui.
Il se fout pas mal que cela fasse souffrir. Bref, j'ai besoin de changement. »
« Je te croirai quand tu seras
dans l'avion. Tu es encore capable de changer d'avis. »
Elle me regarde et sourit
tristement.
« Dis-moi, elle est vraiment
amoureux d'elle, hein ! Il aime vraiment la mère de Sharonna. »
« Je crois que oui, Pupuce.
Jamais il n'aurait publié cette photo sur Facebook, sinon ! »
« Je mérite quelqu'un qui
mettra ma photo en profil sur Facebook ou Whatsapp. C'est bête, mais bon... »
Je laisse Pupuce toute seule
dans la chambre, car je sens qu'elle a besoin d'intimité.
Je vais me réfugier dans la
chambre de maman et reste là à observer les petites qui dorment sur le lit de
leur grand-mère. Je suis tellement habituée à leur présence, que je me demande
comment je ferai quand je serai loin. Oui, quand je serai loin de Port-Gentil,
comment me sentirai-je ? Il n'y aura plus maman, plus les délires de Julien. Et
papa me manquera, lui aussi. Bref, c'est ça la vie. Tout le monde au moment du
départ ressent sûrement le même déchirement. Nous avons encore l'espace des
examens, des résultats et des vacances pour nous préparer à ce départ.
Lundi 13 juillet, Miro a ses
résultats. Bien sûr, monsieur mon chéri a décrocher son bac d'office. Il ne
craignait même pas l'échec. Antoine, lui aussi a eu son bac. Pour fêter cela,
ils nous invitent au restaurant, Marc-Elise et moi. Nous avons choisi d'aller à
Planète Grill parce que mademoiselle ma copine veut une pizza et moi des
grillades. La salle est bondée.
Les garçons parlent de tout et
de rien. Ils sont heureux d'avoir leur examen.
« Je prends l'avion pour Paris
dans deux semaines », nous annonce Antoine. « Je vais en vacances pour la
première fois en Thaïlande avec mes parents. Ma mère n'a pas remis les pieds
dans son pays depuis mes 6 ans. »
« Oh ! Et toi ? Tu y as déjà
été ? »
« Non ! C'est la première
fois. Ma grand-mère a vécu trois ans avec nous quand j'étais enfant. Elle est
décédée maintenant. Mon grand-père est mort avant ma naissance. La sœur de ma
mère est mariée à un Américain et vit aux USA. Donc, ma mère ne se sent plus
vraiment d'attaches pour la Thaïlande. »
« Ok ! », conclut Marc-Elise.
Elle m'envoie un sms dans
lequel elle m'annonce que cette nuit, elle en fini avec Antoine. Je lui
réponds, qu'on a cours demain. Mademoiselle me dit que ce n'est pas un souci et
qu'Antoine doit avoir un souvenir du Gabon.
En tout cas, je préfère
arrêter là. Elle me donnera les détails demain.
Nous continuons de manger en
rigolant. J'ose demander à Antoine avec quel genre de fille, il a l'habitude de
sortir. Il me répond franchement :
« Mes deux exs sont blanches.
Je ne suis jamais sorti avec une fille d'une autre couleur. Pourquoi ? »
« Simple curiosité », lui
fais-je.
« Port-Gentil va beaucoup me
manquer ! Mes parents sont encore là pour deux ans, mais je ne sais pas si j'y
reviendrai. », fait Antoine.
« Oh ! Donc tu t'en vas vraiment
définitivement ! », fais-je étonnée.
Je ne comprends pas ce que ma
copine trouve de palpitant à coucher avec ce garçon dont elle sait qu'elle ne
reverra plus. Je lui envoie un sms. Elle me répond qu'elle veut coucher avec
lui, pour le fun. Yo !!!! C'est à ce niveau-là ?
Quand Miro me raccompagne à la
maison, il descend avec moi. Nous trouvons maman au salon. Comme chaque nuit
avant de s'endormir, elle regarde les informations comme pour s'assurer de
l'état du monde avant de fermer l'œil. Elle tient Ruby dans ses bras.
« Cette petite coquine est
bien la chaleur humaine. Elle ne dort bien que dans mes bras », fait-elle à
Miro qui embrase la petite sur le front.
Je les laisse tous les deux,
après avoir servi un verre d'eau à Miro. Je vais dans la chambre enlever mes
chaussures et ma robe. J'enfile la plus belle de mes robes de nuit et me dirige
vers le berceau de Jade, qui se trouve dans la chambre de maman, pour
l'embrasser. Pupuce n'est pas encore rentrée. Julien est là, qui veille sur le
sommeil de mlle la princesse.
Quand je reviens vers le
salon, avant même que je n'ouvre la porte du couloir, j'entends Miro dire à ma
mère :
« Ma mère m'a dit de vous
demander la procédure. Elle dit que ça se fait ! »
Je me demande de quoi ils
parlent, ces deux-là : Ma mère répond simplement :
« On en parle posément demain,
d'accord. »
J'arrive dans le salon et Miro
prend congé de maman. Je le raccompagne jusqu'au portail.
« Je t'aime Tania Akendengué.
Bonne nuit trésor. »
« Je t'aime dix fois plus. »
Je rentre et vais directement
prendre une douche. Ensuite, je me jette sur le lit avec l'intention de dormir
comme un bébé. Je suis pourtant réveillée par le bip de mon téléphone. Je
regarde et me rends compte que c'est Marc-Elise qui envoie un message à notre
groupe de fille. C'est un groupe sur WhatsApp. Nous sommes 21 là-dedans. Nous
nous balançons des infos et des bêtises pour rigoler. Je souhaite bonne nuit à
tout le monde et ne s'appesantis pas plus là-dessus. J'ai sommeil.
Portant, en rentrant deux
heures plus tard, Pupuce me réveille énergiquement.
« Elle est complètement tarée,
Marc-Elise. Elle est en plein ébat sexuel avec son Thaïlandais-là et toute la
ville est au courant ! »
« C'est quoi cette histoire !
», fais-je endormie.
« Elle était tellement pressée
de baiser qu'elle ne s'est même pas rendue compte qu'elle a fait une mauvaise
manip devant l'ordi de son type. Elle nous a envoyé un message vidéo
enregistrée via Facebook avant de dormi, histoire de faire la belle devant la
webcam du fameux Antoine. Figure-toi qu'elle a oublié d'arrêter l'ordi et que
la caméra continue de filmer. »
Yo ! C'est quoi ce bims' ?
Là, je suis totalement
réveillée. Pupuce me tend son téléphone. Je me rends compte qu'elle ne blague
pas. Les images parlent d'elles-mêmes. »
« Mais comment as-tu eu ces
images ? »
« Tu connais les enfants des
riches, non ? Tous leurs appareils sont connectés les uns aux autres. Un ami
d'Antoine a dû recevoir le film et l'a balancé aux autres ! Moi c'est Jileska
qui vient de m'envoyer le truc. Elle l'a reçu de Cristal, l'amie de Miro. »
« Donc, ça veut dire que Miro
aussi l'a vu ? », fais-je.
« C'est sûr ! Elle voulait
jouer la belle alors que la technologie la dépasse ! Vraiment, cette go du
Tranfo ! »
35-
Lorsque j'arrive à la maison,
je trouve maman dans le salon en conversation avec ses petites filles. Dans la
chambre, Pupuce se prépare à sortir.
« Je vais voir Papa Jimmy à
son bureau. Il m'a appelée. »
« De quoi allez-vous discuter
? »
« Je n'en ai aucune idée. Je
vais écouter ce qu'il a à me dire. »
« Au fait, maman vient de me
dire que Kaba a appelé. Elle va passer voir les petites tout à l'heure. »
« Et alors ! Qu'est-ce que ça
peut me faire. Quelqu'un t'a dit que j'ai envie de voir sa face ici ? »
« C'est ta mère, je te le
signale. »
« Oui, mais il n'y a pas de
poubelle dans laquelle on peut jeter les enfants quand il nous dépasse. Et elle
m'a mise à la poubelle. Ça, je ne l'oublie pas. »
« Ok. Je n'ai rien dit. Passe
le bonjour à Papa Jimmy. »
« Je n'y manquerai pas. Au
fait, elle va comment Marc-Elise ? »
« Euh !!! Je pense qu'elle
peut oublier Antoine. Il est trop choqué par ce qui s'est passé. »
« Tu m'étonnes. En tout cas,
c'est qu'elle ne se laisse pas ronger par le remords et se remette d'attaque
pour le bac. »
Je décide de rester couchée
sur le lit et me mets à lire mes cours de philosophie. Cet après-midi avec les
filles, nous allons travailler l'histoire-géo et la biologie. Miro m'envoie
alors un message. Il vient me chercher à 19 heures. Nous allons assister à un
concert donné dans le jardin de l'Alliance Franco-gabonaise pour le 14 juillet.
Yo ! Où vais-je trouver une robe, là, maintenant ? Y a pas d'argent. Alors, je
lui réponds que je ne veux pas sortir et que je préfère rester pour étudier. Il
m'écrit alors :
« Tu as besoin de prendre
l'air pour avoir les idées claires le jour J. Fais-moi confiance. »
Le fameux jour J que l'on
vivra cette année en fin juillet, alors que lui, il est déjà en vacances.
Alors, j'accepte.Après lui avoir dit que je passe l'après-midi avec les filles,
à bosser.
« Tu veux que je vous apporte
quelque chose à manger ? », me demande t-il.
« Euh ! Je sais pas. Tu sais
que les filles adorent les pizzas. »
« Ok. Alors, je commanderai à
13 heures, cinq pizzas au Rétro et je demanderai à Samba de vous les apporter.
»
« Efficacité. »
« Qu'est-ce que je ne ferai
pas pour cette petite gabonaise qui a mangé mon cœur. »
« Hummmm ! Et encore, tu n'as
rien vu. »
« Oh, oh, oh, oh ! Prière de
ne pas me provoquer sinon, tu te retrouveras toute nue dans mon lit avant même
de t'en rendre compte. »
« Je t'aime, monsieur mon
cœur. »
« Moi, dix fois plus, Tania
Akendengue.
Hummm ! L'amour-là aussi ! Ça
rend vraiment maboule !
Avant de raccrocher, il me
balance :
« Au fait, dis à ta copine
qu'Antoine prend l'avion ce soir pour Libreville. Demain soir, il s'envole pour
Paris. Il a anticipé son départ. »
« Il va si mal que ça ! »
« Oh ! Je crois que oui. Ça
lui passera, je crois. Il ne s'attendait pas à ce que sa première expérience
sexuelle soit retransmise en direct, tu comprends ! »
« Ouais, je comprends. Dis-lui
que Marc-Elise est vraiment confuse. Elle ne sait plus où se mettre. »
« Qu'elle le lui dise
elle-même. Qu'elle lui envoie un message. Je crois qu'il prendra la peine de le
lire. »
« Ok. Je le ferai. Je t'aime,
beau gosse.
« A tout à l'heure, princesse.
»
Quand je raccroche, j'entends
la voix de grand-mère qui arrive accompagnée de Kaba. Je sors de la chambre
pour aller les saluer.
« Bonjour tante Agnès. Comment
vas-tu ? »
Elle ne prend même pas la
peine de me sourire et répond sèchement :
« Je vais bien. »
Yo ! Je préfère alors me
tourner vers ma grand-mère.
« Mémé, tu es en forme ce
matin. Comment s'est passée ta nuit ? »
« J'ai bien dormi, ma chérie.
Mon homme est rentré des lacs en fin de journée. Nous avons passé la nuit à
discuter. »
« Et notre part de poisson est
où ? »
« Oh ! On a oublié la glacière
dans la voiture. Vas la chercher, s'il te plaît. »
Je prends les clés que me tend
Kaba et je vais sortir la glacière de la voiture. Je passe par derrière pour
atterrir directement dans la cuisine. Là, je commence à séparer le poisson et à
ranger, minutieusement le tout dans le congélateur. Je laisse trois mulets
dehors pour en faire un bouillon.
« Bon, la vieille, je cours
rapidement au marché acheté quelques aubergine et de l'oseille. À tout à
l'heure. »
« Ok. Nous sommes là. »
Je les laisse discuter et file
à pieds, au marché du grand village. Je reviens une demi-heure plus tard et me
mets à concocter le fameux bouillon de poisson. La cuisine terminée, je
retourne dans ma chambre. Je remarque au passage que Kaba tient, Jade dans ses
bras et je me dis que c'est un bon début.
Il est 14h moins dix quand les
filles arrivent. Nous nous installons sur la table de la terrasse derrière la
maison. Dix minutes plus tard, Samba, le chauffeur de Miro, nous apporte nos
pizzas.
Lorsque Jileska me voit
arriver avec la bouffe, elle s'écrit :
« C'est ça même la vérité !
Pardon, emmène ça là, près de mois. Ca va me changer du paquet de silures de ma
mère ! »
« Humm ! Tu oses critiquer la
bouffe de ta vielle ! », la taquine Sharonna.
« Et, ma go ! Je ne peux
critiquer, oh ! Mais là, ces pizzas-là me font des clins d’œil. Qui peut
résister ! »
Nous mangeons histoire de nous
ouvrir l'esprit avant de nous jeter dans le travail.
« Miro dit qu'il ne comprend pas
pourquoi nous passons autant de temps à travailler. », fais je.
« Dis-lui que c'est parce
qu'il y a des trous dans la tête de Jileska. Il suffit que je me relâche un
jour pour tout oublier. Tout le monde n'est pas intelligent comme lui ! », fait
Jileska.
« Heureusement que tu es là
pour nous faire rire, Jileska ! »
« Marc-Elise me dit qu'elle ne
sort plus de chez elle jusqu'au jour du bac. Les blancs-là lui envoient des
messages pour lui proposer des partouzes. Il y a des lesbiennes qui lui ont
fait des avances. Elles se demandent comment tout le monde a eu son numéro de
téléphone. », nous annonce Sharonna.
« Elle n'a qu'à changer de
numéro », fait Jileska.
« Je pense que c'est ce
qu'elle fera. Elle a même peur qu'on la reconnaisse en route. C'est la psychose
en ce moment. Elle se sent mal. », ajoute Sharonna.
« Elle ne peut rien y changé
», fait Gaëlle. « Qu'elle change de numéro et pense à autre chose. La vie
continue. »
« Mais, elle me dit qu'elle
est amoureuse d'Antoine et qu'elle est profondément affectée. », continue
Sharonna.
« Ça va lui passer », fais-je.
« Miro m'a dit qu'il s'envole ce soir pour Libreville. Demain soir, il prend
l'avion pour Paris. »
« Sans lui dire au revoir ?
Elle sera terrassée », nous lance Sharonna.
« Je ne sais pas quoi penser,
» fait Jileska.
« Je suis perplexe, moi aussi
», ajoute Gaëlle.
Nous décidons alors d'appeler
la copine pour l'encourager à envoyer un message à Antoine. Elle nous répond :
« Il m'a dit de l'oublier et
de lui foutre la paix. »
On se demande pourquoi il est
si dur ! Et elle nous répond :
« Quelqu'un a posté une photo
de nos corps tous nus sur Facebook en mettant pour légende :
#M-E, le meilleur coup de
Port-Gentil. #
Il y a 2800 commentaires sur
cette photo. Je ne peux plus sortir dans Port-Gentil. On se verra le jour du
bac. Bisous. »
C'est là que je me rends
compte que la notion de liberté avec laquelle le prof de philosophie nous
bassinait en classe, prend tout son sens. Ces nouvelles technologies sont
vraiment venues foutre la merde dans nos vies.
« Saloperie d'Internet »,
fais-je en déposant mon téléphone sur la table.
« Internet n'est pas à blâmer.
C'est nous les hommes qui abusons. Tout ce qui se passe dans nos vies, on va le
poster sur Facebook, ou instagram ! Faut consommer maintenant ! », fait Sharonna.
« Pardon, travaillons sinon,
on va devenir bête. », conclut Gaëlle.
36-
Nous arrivons à balayer toutes nos leçons d'histoire-géo. Nous faisons des
questions-réponses pour la biologie.
Il est 19 heures quand Pupuce arrive. Elle nous regarde vraiment pensive avant
de nous annoncer :
« Vous êtes bien tranquilles, les filles ! Personne ne vous a envoyé de message
pour vous dire que Marc-Elise a été transportée d'urgence à l’hôpital général !
»
« Tu rigoles ! », s'écrit Gaëlle.
« Non, ce n'est pas une blague. Sa mère m'a appelée à 18h. J'étais chez les
Mbeng en compagnie de mes frères. Nous avons foncé en voiture à l’hôpital. Je
pensais que vous étiez au courant. »
« Que s'est-il passé ? », fais-je sans voix.
« Elle s'est ouvert les veines au niveau des deux poignets. Elle a perdu
beaucoup de sang. Sa mère l'a trouvée sans connaissance dans la douche. »
« Mais, on lui a parlé là, à 14h ? Pourquoi a t-elle fait cela ? Oh, c'est pas
possible ! », lance Sharonna.
« Je ne sais pas trop. Elle comptait s'en aller de ce monde sans même laisser
un mot. C'est terrible ! Là, les médecins s’occupent d'elle Je suis venue me
changer. Sunita et moi, nous repartons à l’hôpital. »
Sur ce, Pupuce nous abandonne et va prendre une douche. Nous sommes estomaquées
! Plus personne n'arrive à parler. Comment est-ce possible ? Comment tout cela
a t-il pu virer au cauchemar ?
Je prends mon téléphone et appelle Miro.
« Beauté, j'arrive dans une demi-heure. »
« Marc-Elise est entre la vie et la mort. », lui dis-je sans cérémonie.
« Et merde ! Que s'est-il passé ? »
« Elle s'est ouvert les veines. »
« Et moi qui viens de dire au revoir à Marc il y a à peine une heure ! Il vient
d'arriver à Libreville. »
« Ben, dis-lui que tout va mal ici. »
« Et merde ! Bon, je t'appelle tout à l'heure. »
Je raccroche. Gaëlle décide que l'on doit toutes aller à l’hôpital.
« Ça ne sert à rien », fait Jileska. « Laissons Pupuce et Sunita y aller. Elles
nous donneront des nouvelles. Nous prierons cette nuit et irons la voir demain
matin. »
« Oui, tu as raison. Mais je pense que je ne dormirai pas cette nuit. C'est
carrément impossible. Appelons quand même sa mère pour savoir si les médecins
lui ont dit quelque chose. », fait Sharonna.
Jileska prend son téléphone et appelle la mère de Marc-Elise. Elle répond d'une
voix assez faible et on se rend bien vite compte qu'elle pleure.
« C'est comment maman ! Qu'y a t-il ? »
Impossible d'avoir une réponse.
« Je pense qu'on va toutes aller à l’hôpital. Je n'aime pas ça du tout. »
Je file rapidement changer de robe et apprendre la mauvaise nouvelle à maman.
« Mais pourquoi a t-elle fait ce genre de chose ! »
« Je n'en sais rien, maman. Je n'en sais rien. »
« Je ne suis pas rassurée à l'idée de vous savoir toutes seules là-bas, si loin
de Ntchenguè. Il est déjà 20 heures. »
« Miro arrive nous chercher. On sera rentrées avant 22 heures, maman. »
« Non, laisse Pupuce y aller. Toi, reste là. Je ne me sentirai pas bien si vous
partez toutes les deux. Donne-moi mon téléphone. Je vais appeler Élisabeth. »
Elle pose délicatement Ruby dans son couffin et compose le numéro de la mère de
Marc-Elise. Elles se mettent à parler en omiènè et je finis par comprendre que
le pronostic vital de notre copine est engagé. Elle a perdu beaucoup trop de
sang.
Mon cœur s'arrête de battre à ce moment là. L'air autour de mois devient
irrespirable. Mon cœur est tellement lourd que j'éclate en sanglots.
Qu'est-ce qui n'a pas marché ?
Comment n'avons-nous pas compris que sous ses faux airs assurés, notre amie
souffrait ?
Qu'est-ce qui ne tourne pas rond.
Maman raccroche et me regarde complètement perdue.
« J'aimerais que vous restiez toutes ici. Je vais y aller avec Pupuce. Je
n'aime pas du tout ce que me dit Élisabeth. S'il vous plaît, restez ici au
calme, d'accord ! »
Elle se lève et ajuste son foulard. Elle époussette son pagne et mets ses
babouches.
Quand Miro arrive dix minutes plus tard, seules maman et Pupuce s'en vont.
Les filles et moi restons là, sans trop savoir quoi dire, ni penser.
« Qu'est-ce qui ne va pas ? », se demande Gaëlle. « Qu'est-ce qu'on a raté ? »
« Je me suis posé la même question et je n'ai pas obtenu de réponse. »
Sunita, qui n'arrête pas de tourner en rond dans le salon, semble perdre la
raison. Jileska, sa grande sœur, est obligée de la forcer à s’asseoir.
« Il faut que nous restions calmes et priions. C'est toi la sœur en Christ,
Sunita. Alors, prie fort pour éloigner le malheur. »
La sœur de Jileska nous entraîne alors dans un rodéo de prière et de louanges.
Sa voix est tellement angélique, qu'on en oublie un moment pourquoi nous sommes
si triste.
Et dans mon cœur, je me dis : la copine ne peut pas nous laisser tomber. Ce
n'est pas possible.
Le temps s'écoule lentement. On peut ressentir les secondes tellement nous
attendons le coup de fil qui nous sauvera de cette angoisse.
Là, Sharonna sans s'en rendre compte s'écrie : « Marc-Elise, le bac c'est dans
2 semaines, lève-toi, s'il te plaît, lève-toi. »
À ce moment-là, Gaëlle se lève et fait un bond spectaculaire de la chaise sur
laquelle elle était assise. Notre copine rentre en transe et commence à tourner
dans la maison. Nous sommes toutes ahuries. Elles tournent elle tourne,
possédée par les esprits du Ndjembè. Voilà qu'un voix qu'on ne lui connaissait
parle avec autorité.
Que la chair de poule. Mais qu'est-ce qui se passe ?
Notre copine tourne sur elle-même comme une toupie et commence à citer le nom
d'un certain Mpemba. Elle appelle une cette personne, Omwanto wi ndjembè.
Je sais juste que cela veut dire, femme du ndjembè et c'est tout. On ne sait
même pas qui est cette femme. On ne sait même pas s'il faut attraper Gaëlle ou
la laisser. Nous sommes pétrifiées.
Elle tourne sur elle-même, ses bras opérant des mouvements saccadés de grande
force et commence à parler. Elle parle.
Mais comme je ne comprends que la moitié de ce qu'elle dit en omiènè et que les
autres sont fangs, nous sommes dans la panade.
Alors, bêtement, je me mets à taper dans les mains, en rythme, comme je l'ai
déjà entendu dans les veillées que nous avons faites il y a 3 ans pour le
souvenir de mon grand-père. Je tape bêtement dans les mains en espérant que
cela calme Gaëlle.
La transe continue. Elle tourne dans le salon en disant pas mal de choses.
Bientôt, elle en vient à psalmodier certaines phrases. On reste là, interdites.
Personne dans la pièce ne sait quelle attitude adopter. Après une éternité,
Gaëlle s'assoit par terre. Elle se met à coudre le vide. On voit bien les
mouvements de ses bras qui semblent suturer des plaies. Elle se lève dans un
bond aussi prodigieux que le dernier. Elle se met à rire de manière fort
lugubre. Et elle finit par se coucher sur le sol. Endormie.
Mon téléphone sonne dix minutes plus tard, il est 23h 10. Au bout du fil, maman
m'annonce :
« Votre amie est tirée d'affaire. Nous arrivons. »
J'annonce la nouvelle aux filles. Personne ne saute de joie tellement nous
sommes sous le choc du spectacle donné par mademoiselle Gaëlle Azizet.
37-
Quand Miro ramène Maman et Pupuce, il est pratiquement minuit et demi. Il
semble épuisé. De même pour maman qui annonce qu'elle va au lit. Là, je suis
obligée de lui annoncer que Gaëlle et Sharonna dorment déjà dans son lit.
Elle me demande pourquoi. Je lui réponds en lui posant une question.
« Maman, qui est Mpemba ? »
« Pourquoi cette question ? La mère d’Élisabeth, la grand-mère de Marc-Elise
s'appelait Mpemba Madeleine. Elle est décédée il y a 15 ans. »
« Ok. Ok. »
« Pourquoi cette question ? »
« Je te raconterai demain. Je tombe de fatigue. Mais sache que la fameuse
Mpemba est venue visiter Gaëlle. C'est pour ça qu'elle est cassée ! »
Maman me regarde sans rien dire puis me demande son téléphone pour appeler les
parents de Gaëlle et Sharonna pour les rassurer.
Miro décide d'aller déposer Jileska et Sunita. Je me blottis dans ses bras,
juste devant la voiture et il me murmure :
« Je n'oublierai jamais cette journée ! On se voit demain, mon cœur. Je tombe
de fatigue. »
Il se met derrière le volant et me dit :
« Au fait, Antoine a bien pris son avion. Mais, il m'a dit qu'il appellera
demain, en arrivant à Paris pour avoir des nouvelles de Marc-Elise.
« C'est une bonne chose », lui fais-je.
« À demain trésor. »
Julien, qui bosse avec le voisin pour les épreuves de son BEPC, arrive quelques
minutes après. Je le briffe sur l'état de Marc-Elise et il me répond :
« C'est bête d'avoir envie de mourir si jeune. Dans deux mois, on aura oublié
cette fichue vidéo ! »
Comme maman atterrit dans mon lit à côté de Pupuce, je prends mon petit matelas
et m'installe dans le salon. J'ouvre la Bible et lis quelques passages avant de
dormir. Quelle journée alors ! Comment aurions-nous réagi si notre copine avait
passé l'arme à gauche ? Comment sera l'ambiance entre nous une fois qu'elle
sortira de l’hôpital ?
Beaucoup de questions s’entremêlent dans ma tête et j'envoie un whatsapp à Miro
contenant plein de petits cœurs. Il me répond : bonne nuit tendresse.
Le lendemain matin, les filles rentrent chez elle. Maman appelle la mère de
Marc-Elise et lui promet de passer à l’hôpital pour les visites à midi. Nous,
nous irons voir notre amie pour les visites à 18 heures. Nous allons passer
l'après-midi à bosser. Cela, même si Miro pense que nous devrions laisser nos
cerveaux respirer un peu.
Je fais le ménage en chantant histoire de chasser la tristesse et
l'incompréhension. J'espère vivement qu'Antoine appellera comme il l'a promis à
Miro. Je ne sais pas si cela apportera quelque chose, mais au moins, cela
voudra dire qu'il n'est pas insensible au sort de notre copine.
Le téléphone de Julien se met à sonner. Je me rends compte que mon frère l'a
fourré dans le pot de fleurs qui décore la table de la salle à manger. Je le
sors et vais dans sa chambre.
« Téléphone, monsieur. »
« S'il te plaît ! Ramène ce truc où tu l'as trouvé ! »
« Comment ça ? »
Je lis le nom de l'appelant et rigole en me rendant compte que mon petit frère
veut éviter les appels de Pamela-Jo.
« Elle a appelé 15 fois, Julien. Elle n'arrêtera pas tant que tu ne répondras
pas. »
« Je lui ai dit tout ce que j'avais à lui dire. Quand c'est fini, c'est fini.
Elle ne sait pas ce que veut dire le mot aventure ! »
« Oh ! C'est maintenant comme ça ! Mais, prends le téléphone et dis lui qu'elle
arrête de rêver. »
« Pardon, moins je lui parle, mieux je me porte. Je savais que j'avais du
charme. Mais là, j'avoue que ce charme me dépasse moi-même. »
« Qu'est-ce que cela veut dire ? »
« Ça veut dire que madame a convaincu ses parents de lui permettre de passer
les vacances à Port-Gentil. Pourquoi ? Parce qu'elle ne peut pas vivre sans
moi. Qui lui a dit que j'ai les moyens de tomber amoureux et d'entretenir une
relation sur le long terme ? Pardon, éteins-moi ce téléphone. Mon BEPC d'abord.
Le reste ensuite. Comme elle pense que je suis un gars qu'elle peut acheter,
elle m'achète des montres, des polos. Si tu veux ouvrir un magasin, je te les
refile. Mais éteins-moi ce téléphone, s'il te plaît. »
J'éteins le téléphone comme il me l'a demandé, mais je ne peux m'empêcher de
rire. C'est fou comme l'amour peut rendre bête. Il nous pousse à faire des
choses qu'on n’imagine pas possibles.
Je suis dans la cuisine découpée un poulet, quand Pupuce arrive.
« Nous avons eu tellement peu hier soir que j'ai eu l'impression de perdre 10
kilos, sur place dans cette salle d'attente à l’hôpital ! Tu t'imagines ! Je
comptais les secondes. J'avais beau prier fort en silence, j'entendais mon cœur
battre à tout rompre à l’intérieur. Plus jamais je n'irai dans cet hôpital.
Heureusement que Marc-Elise s'en est sortie !»
« Et sa mère ? Comment a t-elle te nue le choc. »
« Oh ! Le médecin a dû lui donner un calmant. Tu t'imagines, perdre comme ça
l'unique enfant que Dieu lui a donné ! Le père est resté à la maison ; il ne
pouvait pas supporter l’hôpital. Il était effondré. Mais grâce à Dieu, si tout
va bien, elle sera en classe pour les épreuves du bac. »
« Et on laissera toute cette tristesse derrière nous. Il faut penser positif :
on aura ce bac. »
« Je n'en doute pas. », fait Pupuce.
« Tu n'as pas l'air convaincue ? »
« Oh ! C'est juste qu’hier, j'étais avec papa Jimmy. Le type rêve à ma place,
quoi ! Il a tout préparé. Je ne savais même plus comment lui dire que je ne
veux plus aller en France, mais en Afrique du Sud. »
« Pourquoi l'Afrique du Sud ? »
« Parce que ça me permet de rester plus longtemps avec les petites. Je partirai
en janvier au lieu de quitter précipitamment le pays après les résultats. »
« Et pourquoi n'as-tu pas eu le courage de le dire à papa Jimmy ? »
« Je ne sais pas. Je n'ai jamais su lui parler. Pourtant, contrairement à
maman, il a toujours été cool et compréhensif. »
« Dans ce cas, prends ton téléphone et envoie-lui un mail où tu lui expliques
tout ce que tu viens de dire. Il comprendra. »
« Si tu le dis. Au fait, c'est quand vos fiançailles ? Avant ou après les
résultats. »
« De quoi parles-tu Pupuce. »
« Et merde ! Désolée, je n'ai rien dit. »
Elle s'en va aussi vite qu'elle le peut. Je la rattrape sur le pas de la porte
de la chambre et l'oblige à me regarder :
« De quoi parles-tu ? Tu as intérêt à cracher le morceau. »
« Zut, alors ! Comment pouvais-je savoir que c'était une surprise ! Et merde,
il fallait que ça me tombe dessus ! »
« Dépêche-toi de cracher le morceau, Pupuce. »
Elle continue de me défier par son silence et en profite pour se sauver au
moment où le son strident des pleurs de bébés se fait entendre.
38-
Je poursuis Pupuce partout où elle va. Au bout d'une heure, elle ne m'a
toujours pas craché le morceau. J'ai beau la harceler, elle trouve toujours une
parade pour se défiler.
Elle parle aux petites :
« Dites à votre tata Tania de se calmer. Est-ce que c'est de ma faute si ce
Miro-là est fou d'elle ? Au fait mes chéries, il faut lui demander la recette,
oh ! Comment a t-elle fait pour tomber sur un type aussi génial ! »
Et c'est ainsi pendant de longues minutes. Puis, voyant que je suis toujours là
à attendre, elle me lance :
« Qu'est-ce tu veux que je te dise ? Tu peux me suivre autant que tu veux, tu
ne sauras rien. »
Et elle continue de bercer les enfants.
Alors, je vais dans le salon où maman prépare son sac pour aller à l'hôpital.
« Maman, qu'est-ce qui se passe avec Miro ? »
« C'est à moi que tu poses la question ? Jusqu'à preuve de contraire, c'est toi
qui es censée être son amoureuse, et non moi. »
« J'aime beaucoup ton humour maman. Dis-moi, qu'est ce que vous complotez ? »
« Je ne complote rien du tout. Et je ne suis pas avec toi quand tu dis à ce
jeune homme que tu ne peux pas vivre sans lui. »
« Maman ! »
« Quoi, maman ? Pardon, Élisabeth m'attend. Je m'en vais. »
« Donc, tu ne me diras rien ? »
« C'est comment, Tania ? Il est venu me voir pour me dire qu'il veut
officialiser votre union. Je lui ai dit que je ne suis pas la personne
appropriée pour en parler. Je l'ai envoyé discuter avec ton père. »
« MAMAN ! »
« Écoute, mademoiselle, tu me fais mal aux oreilles. Je m'en vais. »
Sur ce, elle s'en va, me laissant dans la stupeur. Donc ces gens-là sont
capables de faire des plans dans mon dos !!!! Ils sont même comment ?
Retour dans la chambre, où Pupuce repasse le linge des petites.
« Mademoiselle Marjorie Akendengué, crache le morceau. Qui tu as mise au
courant ? Je veux tout savoir. »
« Tu ne sauras rien, si tu ne te calmes pas. Tu es maintenant sur la défensive
comme si on avait l'intention de te faire un sale coup. »
« Mais, personne ne m'a parlé de fiançailles ? Vous agissez dans mon dos !!! »
« Écoute-là ! Prends ce téléphone qui est posé sur le lit et appelle Miro.
Dis-lui d'arrêter ces plans, car tu n'as pas son temps. »
« Très drôle, Pupuce. »
« Dans ce cas, calme-toi et fous-moi la paix. Si le type a décidé de faire le
grand jeu, je ne vois pas pourquoi tu t'affoles comme ça ! »
« Mais, personne ne me dit rien. Vous faites les choses dans mon dos. Dis-moi
qui tu as mise au courant. Dis-moi tout. »
« Yo ! Vraiment la négresse là qui ne sait pas ce que veut dire le mot surpris
! Tu ne peux pas faire comme si tu ne savais rien !? »
« Non ! Je veux savoir. Alors, parle, sinon je t'étrangle. »
« Ok, mais faudra pas te plaindre si la surprise ne fait plus d'effet au moment
venu. Donc, j'étais hier chez mes parents Mbeng quand mon téléphone a sonné.
Magloire Akendengue ton très cher père m'a carrément sommée de passer chez lui.
Il m'a dit que c'était urgent. Voilà comment j'ai sauté dans un taxi. Arrivée à
pavé centre social, le type m'attendait debout devant la maison. Là, j'ai su
que l'affaire était d'une haute importance. Sans même me faire Samba, le type me
demande, qui est ce Miro et s'il est sérieux. Il me raconte que le fameux Miro,
un métis élégant et bien élevé, est venu garée sa voiture juste devant sa
maison et lui a dit cache, qu'il vient lui demander la main de sa fille. Tu
aurais vu la tête du boss quand il me racontait l'affaire ! J'étais pliée de
rire. »
« C'est une blague ! Miro n'est pas allé voir papa ? »
« Yo !!! Tu comprends vite, mais il faut expliquer longtemps, hein ! »
« En fait, je n'en reviens pas parce qu'on n’en a jamais discuter ensemble. »
« Et alors ? Ça fait quoi s'il veut aller plus loin avec toi ? Tu connais les
plans qu'il a pour vous deux ? »
« Si je comprends bien, vous avez décidé de me vendre, c'est ça ? »
« Mais quelle maboule ? Je suis avec toi quand tu vous vous dîtes des mots
d'amour en secret ! Pardon, ne fatigue pas ma tête ! Si tu ne veux pas, tu n'es
pas obligée. »
Elle continue son repassage comme si de rien n'était. J'insiste pour avoir la
suite de l'histoire. Elle me raconte. Et j'apprends que monsieur mon père est tombé
sous le charme de Miro.
« Fallait entendre le boss en train de chanter les louanges du petit. Le type
me dit carrément que cet enfant là a de l'avenir. Pourquoi, parce qu'il
respecte les usages et les traditions. Akendengue Magloire que trop fier, quoi
! »
« C'est ça ! »
« Aka ! je te raconte ce qu'il y a . Maintenant, si tu ne veux pas m'écouter,
je me tais. »
« Je n'en reviens pas. Miro ne m'en a pas parlé. Mon avis ne compte pas ? »
« Pardon, Tania, évite de te moquer de nous autres célibataires ! Si tu n'en
veux pas, quelqu'un d'autre sautera sur l'occasion pour s’occuper de lui.
Maintenant, laisse-moi travailler. »
Je la laisse là et vais m’asseoir au salon. Je ne sais plus quoi penser. J'ai
la tête complètement vide. C'est vrai que je suis folle amoureuse de lui, mais
de là à me fiancer???Je n'ai que 18 ans. J'ai la vie devant moi. Je dois
décrocher mes diplômes. Je...
« C'est pas bon de trop réfléchir. Ça peut griller les neurones ! », fait
Julien en rigolant.
Il s'en va acheter une bouteille d'Orangina chez le Malien.
Quand il revient, je lui demande s'il est au courant de l'histoire. Il me
répond en riant :
« Dis seulement oui ! Ce n'est pas ce que vous voulez, vous les filles !
Maintenant, tu as le type qui veut te faire vivre le rêve, et tu permets de
jouer la difficile !!!Et, s'il te plaît, inutile d'en parler à tes copines. Ne
dis rien, même pas pour avoir leurs conseils, entendus. Il faut savoir cultiver
son jardin secret. »
Les filles arrivent à 14heures. Nous nous installons à la terrasse derrière la
maison. On commence par chambrer Gaëlle.
« La go, tu as oublié de nous dire que tu es initiée. On t'a vu à l’œuvre hier.
», lui fais-je.
« Je ne vois pas de quoi vous parler. Qu'est-ce que j'ai dit. »
« Ah,ça ! Si tu ne t'en souviens pas, on ne peut rien pour toi. Mais sinon, il
faut nous dire. », lui lance Jileska.
« Je ne suis initiée à rien. C'est sûrement les bêtises de ma mère qui veulent
tomber sur moi. Je n'ai pas le temps pour ça. »
Jileska, Sharonna et moi éclatons de rire.
« Maman m'a appelée », fais-je. « Elle dit que Marc-Elise est réveillée. Elle
va rester deux jours encore à l’hôpital. Elle devra se reposer pour être en
forme le 29. »
« Elle nous a vraiment foutu la frousse de notre vie. J'espère qu'elle sera
d'aplomb pour ce bac. On le passe et après on fait la fête. », lance Gaëlle.
« Pardon, je vais d'abord attendre les résultats avant de faire la fête. Parce
que moi là, je ne sais pas trop, oh !!! »
« Restons positives!Nous l'aurons ce bac. », fait Sharonna.
« Aka ! Je te dis que même quand je rêve, le bac me fuit. Donc, on va attendre
une bonne fois les résultats. »
« Ok, mademoiselle Jileska. Mais, bon, on part avec l'esprit conquérant et on
l'aura. », fais-je.
Nous avalons quelques sujets de mathématique puis un autre de sciences
physiques. À 17 heures, nous plions nos affaires. Les filles vont pouponner en
jouant avec Jade et Ruby.
J'appelle Miro pour savoir s'il vient toujours nous chercher pour nous emmener
à l’hôpital. Il répond oui. Alors, je viens retrouver les filles au salon.
« Miro dit qu'il nous emmène à la plage dimanche. On prendra le bateau de son
père pour aller de l'autre côté, à Sogara. Il dit qu'on doit s'aérer l'esprit
pour être reposé le jour de l'examen. », fais-je.
« Ce type-là est très intéressant. Il devrait être Médecin. Il sait comment
traiter les gens. »
« Pardon, quel genre de médecin. Toutes les femmes vont tomber dans ses bras.
Son cabinet médical ne désemplira pas. »
« Oh ! Tu trouves qu'il est aussi craquant que ça ! », fais-je à Gaëlle.
« Achète-toi des lunettes, Tania. Tu peux être sûre que si tu ne veux pas de
lui, quelqu'un d'autre fera moins la difficile. Le type a tout ce qu'il faut là
où il faut et il est beau comme un dieu ! », me répond-elle.
« Pardon, Tania Akendengue, ne fais pas la belle ! Évite de te moquer de nous
autres célibataires ! », fait Sharonna.
« Tu es célibataire parce que tu le veux, Sharonna Nguema. Tous les mecs
courent après toi. », fait Jileska.
« Pardon, je suis en stand-by jusqu'à ce qu'on me déclare admise au bac. Ensuite
seulement, je m’occuperai de ma vie amoureuse. », conclut-elle.
« Et toi, Jileska, pourquoi tu n'as pas encore conclu avec jacques. Le type
bave en te voyant. », lui demande Gaëlle.
« Si j'avais le même cerveau que toi, mademoiselle Gaëlle Azizet, j'allais
mélanger l'amour et l'école. Mais comme ça coince là-dedans dans ma tête, pas
la peine de me créer des soucis en plus. », confie Jileska.
39-
Les jours passent tranquillement. Nous allons voir notre
copine à l’hôpital. Le médecin lui a dit qu'elle a besoin de beaucoup de repos.
Alors, nous ne l'embêtons pas avec des questions ridicules. Ce qui nous fait
plaisir, c'est que tous les matins et tous les soirs, Antoine lui envoie un
message vocal pour l'encourager à se remettre très vite.
Samedi, après-midi, je fais un tour chez monsieur Magloire
Akendengue pour discuter avec lui. Quand j'arrive, il est à peine 15h et
monsieur s'active devant les fourneaux.
« Dis-moi, monsieur mon père, qui va s’occuper de toi
quand je serai partie. »
« Je vais me débrouiller. Ne t'inquiète pas pour moi. »
Je lui arrache le couteau qu'il tient dans la main, et je
découpe les deux carpes qu'il s'échine à nettoyer. Je lui concocte son bouillon
de poissons et prépare deux doigts de bananes vertes.
Pendant que son repas cuit, on s'installe au salon pour
discuter.
« Dis-moi papaonet, d’où vient cette bouteille d'Armagnac
que je vois là dans ton living. »
« Euh, ça ne te regarde pas. Tu es venu ici pour faire la
police ? Je n'ai plus le droit de recevoir des cadeaux. »
« Hummm ! Monsieur Akendengue ! Tu es prêt à me vendre
pour une bouteille d'Amagnac ? Je n'en reviens pas ? »
« Ah mama, la ferme, tu comprends. Si tu veux que je rende
la bouteille, tu n'as qu'à me le dire. Mais ne viens pas me parler ton gros
français ici. Moi, je n'ai pas eu le bac. Ce jeune homme est venu me voir.
C'est qu'il est très bien élevé ! Pas comme les bouts de manioc là qui traîne
dans Port-Gentil. Il m'a parlé comme un homme. C'est des choses comme ça qu'un
père attend. »
« Hummm ! En tout cas ! Je n'ai rien dit. »
« Ne dis rien, je préfère. Mais sache que si tu n'en veux
pas, quelqu'un d'autre en voudra. »
« Yo ! C'est maintenant à base de menaces ! Mais est-ce
que je suis obligée de me fiancer maintenant ? Je ne suis pas trop jeune. »
« Tu serais bête de dire non, ma fille. Vous n'êtes
obligés à rien. Le jour où ça ne va plus, chacun prend sa route. Mais pour ma
tranquillité d'esprit, je préfère te savoir avec un jeune homme responsable
comme lui, plutôt qu'avec un joueur. »
« Ok, ok ! Je suis juste impressionnée qu'il soit venu
jusqu'ici pour te parler. Il ne m'a rien dit. »
« C'est à des gestes comme celui-là qu'on mesure le degré
d'amour de quelqu'un. »
« Mon père devient philosophe ! »
« Pardon, ne me fatiguent pas les oreilles ! »
Pendant que les gens s'agitent en ville parce que le grand
footballeur Messi arrive à Pog, mon frère me dit : « pardon, je suis fan du
Real ; et mon BEPC est plus important ! Je n'ai pas d'argent pour aller jusqu'à
Ntchengue. Il n'a qu'à poser la pierre. Nous on ira là-bas quand le stade sera
construit. »
Miro non plus n'est pas fan du Barça ; alors toute cette
agitation autour de Messi le laisse de marbre.
Dimanche, nous allons en virée comme convenu. Nous prenons
le bateau du père de Miro.
Pupuce a abandonné les petites à maman et grand-mère. Il y
a aussi la tante Jolie, la sœur de papa Jimmy, qui est à la maison pour la
journée. Les trois femmes vont s’occuper des jumelles tandis que Pupuce va
retrouver un peu de son insouciance de jeune fille. Il y a Sunita qui est avec
nous, ainsi que Gaëlle et sa cousine Rita. Sharonna est venue toute seule. Miro
est accompagné de Samba, son chauffeur sénégalais, et de deux amis : Alec et
Patrick. Dès que Jileska voit Alec, elle se met à bégayer dans mon oreille : «
mais, mais c'est quoi ce type. Il est sorti d'un magazine de mode ou quoi.
Alec est un métis, de mère suédoise et de père noir
américain. Le type respire ce qu'on appelle la beauté. Et pour tuer les filles
une bonne fois pour toutes, il ne porte pas de tee-shirt sur lui, rien que son
short. Donc, ses biceps et pectoraux sont dehors. Aïe ! Je sens que ma copine
Jileska ne pourra pas supporter la traversée dans ces conditions.
Alors que Samba manœuvre à la barre et que nous quittons
le rivage, je vois Jileska qui m’arrache ma belle serviette blanche et qui va
vers Alec. Elle lui tend la serviette et lui dit :
« S'il te plaît, Alec, pardon, porte ça ! Je n'ai pas
envie de tomber à la renverse dans la mère parce que tu es juste devant moi !
Toi aussi, quand Dieu a distribué les corps, fallait te servir doucement ! »
Miro ne peut s'empêcher d'éclater de rire. Et Gaëlle de
même. Alors, Pupuce me souffle dans l'oreille : « je savais que cette fille-là
n'allait pas se taire. Pardon, qu'elle ne nous fasse pas les choses de la
honte. »
Alors, Alec avec son bel accent américain, lance : « Tu es
marrante, Jileska. »
« Poooopoppopoo ! Papa, ferme la bouche ! Est-ce qu'on t'a
déjà dit que tu ressembles à un personnage de roman. Tu veux tuer qui avec ton
accent. Pardon, je change même de bord. J'en ai trop vu et trop entendu. »
Là, c'est moi qui atterris par terre, morte de rire.
Pupuce suit alors Jileska, qui nous abandonne à l'avant
pour se réfugier plus loin.
Patrick, un rouquin franco-anglais, nous lance alors :
« Miro, je ne savais pas que les Gabonaises avaient
beaucoup d'humour. »
Il est tellement mignon avec ses taches de rousseur sur le
visage et sa coupe à la Justin Bieber. Là, c'est Sunita qui ne le lâche pas des
yeux. La voilà qui se lève et se met à débouler tout l'anglais qu'elle connaît.
Comme quoi, l'école, ça sert à quelque chose. Ils se mettent à parler de
musique et de films. Tout ça en anglais.
Rita, la cousine de Gaëlle, est plus intéressée par ce que
fait Samba à la barre. Elle discute avec le chauffeur et prend des photos ci et
là. Dans les bras de Miro, je ne vois pas les rives défiler. Mon esprit n'est
préoccupé que par une chose : être heureuse et profiter du moment présent.
Alec se met alors à nous raconter le fameux concert de
Jay-Z & Beyoncé, le 12 septembre 2014 à Paris. Il raconte avec menus
détails. Tout pour susciter l'envie de Sunita de Sharonna qui est une fan
invétérée de Queen-B.
« J'ai le coffret collector de ce concert. Je te le
prêterai, si tu veux. »
« Bien sûr », répond ma copine.
Quand nous arrivons à notre lieu de pique-nique, il y a
une paillote. Nous nous y installons.les filles s’occupe du repas. Le cuisinier
de Miro a tout préparer et emballé dans des Tupperwares. Alors, nous n'avons
qu'à installer sur la grande table. Pendant que Jileska, Gaëlle et moi nous
occupons de mettre la table, les autres se sont jetés dans la mer pour piquer
une tête.
« Je n'en reviens pas ! Tu as vu le corps de Pupuce. On ne
dirait pas qu'il y a deux mois, elle était enceinte ! », s'étonne Gaëlle.
« Avec grand-mère qui la masse à la serviette chaude tous
les soirs, elle ne peut que retrouver son corps. »
« En tout cas, elle est belle ! Elle n'aura pas de mal à
retrouver un vrai gars quand elle sera partie en France. »
« Elle veut aller en Afrique du Sud. »
« Oh ! C'est nouveau ! Elle nous bassine avec la France
depuis la 6ème ; et tout d'un coup, elle change d'avis. »
« Elle dit qu'elle veut rester proche des petites. »
« Je comprends », fait Jileska. « Ça m'étonne même qu'elle
ait le courage de partir. Quand je vois ces deux petites-là, je pense que moi à
sa place, j'aurais beaucoup de mal. »
« Pardon, ne lui dis pas ce genre de chose. Elle est déjà
assez indécise ! », fais-je en conclusion.
Je regarde les amis qui s'ébattent dans la mère. Miro et
Alec sont des nageurs hors pair. Les filles rigolent en faisant des clapotis
dans l'eau. Jileska s'approche du lecteur Mp4 de Miro, qui est relié à un mini
ampli blutooth. Elle met de la musique et se met à danser comme une folle, sur
un son de Jeremih.
« C'est comme ça que tu vas tuer la musique si tu as le
bac. », lui fais-je.
« Oh, ça, c'est petit ! Je vais danser nue là au lycée, si
je l'ai au premier tour. »
« Tu ne changeras jamais ! », lui fait Gaëlle en riant.
Nous voyons alors Sharonna et Alec qui viennent vers nous
en rigolant. Mon Dieu ! Ils sont tellement beaux ensemble, que je suis obligée
de me saisir rapidement de mon téléphone et de les prendre en photo.
« Figurez-vous que monsieur ici présent fait des études de
médecine. Il va en 3ène année. Vous vous imaginez ! », nous fait Sharonna.
« Je pense, mon cher Alec, que tu t'es tromper de filière
! Tu rendras toutes femmes malades d'amour, très cher. »
« Hey, t'es toujours comme ça où c'est moi qui te mets
dans cet état. Est-ce que tu as déjà pensé à t'écrire un one woman show et de
monter sur les planches. », répond Alec en riant.
« Pardon, oh ! Le gars-ci est vraiment terrible ! »,
conclut Jileska.
Nous mangeons en riant. Les garçons nous racontent comment
ils se sont connus en
Belgique, il y a près de 6 ans.et je me rends compte que
c'est beau de voyager. Eux ils ont la chance d'avoir des parents qui bougent et
les incitent à rencontrer des gens d'autres cultures. Moi aussi je veux voyager
et m'enrichir des différences des autres !
« Que fais-tu dans la vie, Patrick ? », demande Gaëlle.
« Il travaille à Londres dans une grande banque. Il y est
rentré après sa licence en économie, il y a quelques mois. », répond Sunita.
« Cool ! Voilà que mon pote à une impressario à
Port-Gentil. », s'exclame Miro.
Tout le monde éclate alors de rire.
« Ales, Patrick, figurez-vous que ces jeunes filles
passent le baccalauréat dans quelques jours. Que fait-on si elles le décrochent
du coup ? », demande Miro.
« J'ai quelques idées, mais je pense qu'on leur devrait
leur réserver une surprise. », fait Alec.
« Mon cher, si la surprise, c'est toi tout nu sortant d'un
immense seau à champagne, je te jure que ce bac là, j'en fais mon affaire ! »
« Jileska ! », s'écrie Pupuce qui est dépassée par le sans
gêne de ma copine.
« Respire, Marjorie Akendengue. Respire. On appelle ça de
l'humour et ça ne tue pas. »
Gaëlle ne peut s'empêcher de rire.
« Il aurait fallu t'inventer, si tu n'existais pas », fait
Rita à Jileska.
« Et toi, Pupuce, tu ne parles pas beaucoup ! Que veux-tu
faire après le baccalauréat ? », demande Alec.
« Mademoiselle hésite entre une école de commerce et la
faculté de langue. Elle veut devenir traductrice. Elle lit beaucoup ! », répond
Miro comme s'il voulait vanter les connaissances de ma sœur.
Elle sourit timidement et garde son nez sur son assiette.
« Ah bon ! Et qu'est ce que tu lis ? », demande Alec,
fortement intéressé.
« Oh ! Je lis un roman roman intéressant en ce moment. La
vérité sur l'Affaire Harry Quebert. Juste comme ça ! »
Elle joue sa modeste ! Le roman en question a bien 400
pages ! Tout pour me donner des maux de tête ! Mais ça marche. Alec et elle se
mettent à parler de livres ; et comme par hasard, ils ont lu les mêmes choses !
Comme quoi !
Là, Miro me chuchote dans l'oreille :
« Elles sont cool tes copines ! Vraiment cool ! »
40-
Dernière semaine de juillet, le bac nous bastille. C'est à peine si les gens se
serrent encore la main. Qui a envie de prendre la malchance de quelqu'un ?
Chacun est là que concentré. Tellement concentré que les têtes chauffent.
Jileska ne veut pas qu'on lui parle. Elle arrête même son téléphone.
Pupuce est plus relax. De même pour Sharonna.
Moi, je passe une partie de la soirée en conversation whatsapp avec Miro. Il
m'encourage.
Marc-Elise est dans la salle comme prévu. Elle semble motivée malgré la
fatigue. Antoine lui envoie des messages chaque soir pour l'encourager.
A la maison, maman nous fait le petit déjeuner et le repas de midi est toujours
prêt. Quand nous rentrons le soir, elle nous demande comment s'est passée la
journée.
Papa Jimmy est là pointu tous les soirs pour savoir comment Pupuce a appréhendé
chaque épreuve. Le type nous a carrément fait le corrigé de l’épreuve de
philosophie, là, dans le salon. Pour rire et faire un peu baisser la tension,
maman lui a dit : « dommage que tu ne sois pas le professeur qui corrigera les
copies ! » et lui de répondre : « Ils ont intérêt à ne pas faire les imbéciles
et à ne pas se venger sur les copies des enfants ! Leurs problèmes d'argent ne
concernent pas nos enfants !
Il est en colère contre ces professeurs qui passent la moitié de l'année à
manifester, à faire grève.
« Encore faut-il savoir si avec votre fameux bac là, vous n'aurez pas de souci
à l'étranger. On dit déjà qu'il n'a aucune valeur ! »
« Humm, à monsieur Mbeng, c'est comme ça que tu encourages les enfants ! », lui
fait maman.
Monsieur mon père dit seulement qu'il ne se fait pas de souci pour moi. Il voit
déjà mon nom inscrit au tableau des admis. S'il savait seulement combien le
stress me tenaille chaque fois que j'approche le portail du centre d'examen !
Je ne sais pas si j'ai déjà ressenti ce genre de chose, mais là, on a
l'impression que la vie peut s'écrouler si on ne réussit pas cet examen.
Et mon professeur d'histoire-géo qui vient tous les matins au portail pour nous
encourager ! Il a le courage de me lancer :
« Pour vous Tania Akendengue, ce n'est qu'un formalité ! »
Aka ! Si c'est une formalité, pourquoi mon cœur bas chaque fois que je me
retrouve en salle ?
Le jour de notre dernière épreuve, Sharonna, Gaëlle, Jileska, Jacques, Fidolin
et moi rentrons à la maison à pieds. Nous rigolons pour faire baisser la
pression. Pupuce a encore un oral à passer le lendemain. Elle bosse dessus avec
sa copine Sunita.
Nous, nous décidons d'aller faire un tour à la plage à SOGARA.
Arrivé là, j'enlève mes chaussures et je vais traîner mes pieds dans l'eau. À
côté de moi, Sharonna me dit :
« Mon père a déposé sa demande de divorce. Ma mère est toujours en Espagne.
Elle a pris un mois et demi de congé. »
« Oh ! C'est définitif alors ? Il ne changera pas d'avis. »
« Non, je ne pense pas. Mes grands frères ont appelé de Washington histoire de
demander à papa de réfléchir encore. Il a dit qu'il préfère en rester là. Il
est complètement dépité d'autant que maman semble bien se foutre de tout ça. »
« Elle vit une seconde jeunesse, apparemment. »
« Comme tu dis. C'est vraiment triste. Je ne m'attendais pas à ce qu'ils se
séparent. J'étais loin de me douter qu'elle n'était pas heureuse avec nous. »
« La vie est pleine de surprises ! Et finalement, où vas-tu après le
baccalauréat ? »
« Je vais en Afrique du Sud. La sœur de Gaëlle m'a envoyé des informations sur
l'université de technologie du Cap. Papa a dit que je vais y passer mon
bachelor et ensuite, j'irai rejoindre mes grands frères aux USA. L'essentiel
pour lui est que je devienne ingénieur comme lui, comme maman. Ça m'arrange un
peu. Ça me permet de rester proche de lui. Il dit qu'il s'en remettra, mais je
sens que son orgueil de mâle a été touché. »
« Et donc, ta mère est réellement amoureuse de Peter. »
« Oui, apparemment ! Sinon, elle ne serait pas allée le rejoindre, non ? »
Gaëlle nous rejoint en nous annonçant que les garçons veulent qu'on aille
prendre un verre au Petit Kawa, histoire de respirer avant d'avoir les résultat
la semaine prochaine.
Je suis la meute, et nous arrivons au bord de mer à pieds, malgré la distance.
Nous avons discuté tout le long du chemin. Arrivé à notre destination, c'est
Jacques qui nous offre des jus. Après une heure à discuter, je prends congé.
Il est 20 heures quand j'arrive à la maison. Maman, est assise dans le salon.
Elle est en pleine discussion avec Kaba.
« Bonsoir mesdames », leur fais-je en allant vers le couloir des chambres.
« alors, comment s'est passé la journée ! »
« Oh, tranquille. Les sujets étaient abordables », fais-je à maman.
« Pas la peine de trop parler ! On attend seulement les résultats ! », me lance
Kaba.
La femme-là a quel problème ! Pardon ! Je préfère aller dans ma chambre.
J'y trouve Pupuce.
« Salut ! Pourquoi tu restes dans la chambre. »
« La femme qui nous a mises au monde me saoule ! Ça la tuerait d'être un peu
positive et de m'encourager ??? »
« Laisse-la de côté. Tu sais comment elle est. Garde l'esprit positif. Tu as
oral demain. »
« C'est pour cela que je reste dans la chambre. Je la ferai taire en lui
mettant mon relevé de notes sous le nez. Car ce bac, je vais l'avoir. Ensuite,
elle ne me verra plus qu'en photo ! »
« Ça ira. Elle va changer. »
« C'est toi qui le dis. »
Je me couche sur le lit avec l'intention de me lever deux heures plus tard pour
prendre ma douche. Mais, impossible de fermer l’œil, car le téléphone de Pupuce
vire toutes les deux secondes.
« Avec qui es-tu en train de chatter ? Ton téléphone n'a jamais autant vibré. »
« Oh ! je...je... Bon, je chatte avec Alec. »
Yo !!!! Depuis quand ? »
« Euh, excuse-moi ma curiosité, mais, comment as-tu eu son numéro de téléphone
? »
« Très drôle Tania ! Je te signale que c'est Miro qui lui a refilé mon numéro.
Tu ne penses tout de même pas que je suis assez courageuse pour faire le premier
pas !!! »
« Ok ! Et de quoi discutez-vous ? »
« Oh ! On discute surtout littérature. C'est tout. », fait-elle avec un sourire
espiègle.
Je la regarde sans rien dire ; puis, je me recouche. J'aurais bien le temps
après les résultats, de parler de tout ça.
« Au fait, comment tu as trouvé les épreuves ? »
« Abordables ! », lui fais-je en m'endormant.
Il est minuit quand je me réveille. Je vais prendre une douche. Ensuite, je
m'installe sur le canapé en chemise de nuit. Je me câble sur Novellas TV pour
voir la rediff de La Patrona. Je vais rester là jusqu'au matin pour regarder la
télévision. Ça fait tellement longtemps que je m'en prive.
Ainsi, dans quelques jours, nous aurons le verdict qui soit nous rendra
heureux, soit nous condamnera à revenir l'an prochain dans les murs de Raponda.
Pour ma part, j'ai tellement pas envie de revoir la bouille de mes professeurs,
que je prie au plus profond de moi, pour décrocher cet examen. Un peu plus et
je sors en vampire pour avoir les résultats avant le jour J. Tchooooo !!!
Le matin venu, je vois Pupuce qui sort de la maison pour aller à son oral
d'anglais. La go est habillée d'un tailleur.
« Mais, là, tu as 20/20 sans ouvrir la bouche ! »
« Tu penses ! Je suis trop sapée, c'est ça ! »
« Mais non, c’est du bon. Allez, courage ! »
J'entends une voiture démarrer. Hummm ! Qui est venu chercher cette fille !!!
Depuis quand a t-elle un chauffeur. Je serais bien sortie en courant pour voir
la fameuse voiture, mais comme je suis en chemise de nuit...
Quand elle revient à midi, mademoiselle prend son sac. Elle y fourre tous ses
cahiers et va les mettre à la poubelle.
« Ça ne te va pas, Pupuce ? Et si tu es admissible. »
« Oh ! Non ! Ce bac, je l'ai d'office. Je ne veux plus voir ces cahiers. Fini
le lycée. Ouf, ça fait du bien. »
« Yo !!! Donc ton nom est écrit d'office sur la liste des admis, c'est ça ! »
« Oui ! J'ai confiance. »
« Ne m'insulte pas, sister ! Moi, je préfère attendre de voir. Je ne suis sûre
de rien. C'est vrai qu'avec les moyennes que tu as toujours eues, il faudrait
vraiment un sacré coup de malchance pour le rater, cet examen ! »
« Et oui ! Maintenant, je vais prendre une bonne douche et dormir. Tu t’occupes
des filles ce soir ? Je suis invitée dîner. »
« Quoi ? Tu sors dîner ? Avec qui ? »
« Euh ! C'est la police qui demande ? Est-ce que je n'ai pas le droit de
m'offrir un dîner tranquille, avec ma frangine Sunita ? On va décompresser au
Coppa Cabana. Y a quoi même ! »
« Hummmm ! Marjorie Akendengue, arrête de mentir. Ton nez s'allonge. »
Elle sourit et m'abandonne dans le salon. Je la rattrape dans la chambre et lui
demande :
« Je te trouve un peu changée depuis 3 jours. Quel chapitre ai-je manqué ? »
« Aucun. Y a rien. Enfin, euh !!! »
« Arrête de faire durer le suspens. Crache le morceau. »
« Bon ! Un très beau jeune homme m'a demandé si je veux passer la soirée avec
lui. J'ai voulu dire non, j'ai trouvé des excuses. Et là, madame Bernadette ta
mère, m'a arraché le téléphone des mains. Elle m'a fait la leçon en trois
chapitres : je suis jeune, c'est pas parce que j'ai des enfants que ma vie doit
s'arrêter, et je ne perds rien à essayer. Tu sais comment elle sait se montrer
persuasive, cette femme. Donc, voilà comment j'ai dit oui à ce jeune homme. Le
reste, à la suite de l'épisode. »
« Et puis-je savoir qui est ce jeune homme ? »
« Oh ! C'est... »
Au moment où elle veut me lâcher l'affaire, les petites se mettent à hurler
comme si elles n'ont pas mangé depuis des jours !
41-
Le lendemain, Jileska, Gaëlle et moi sommes ensemble chez
Jileska, à salsa. Nous sommes assises dans le salon et on s'ennuie en regardant
une série télé. Il est 14 heures. Nous n'avons rien de spécial à faire, si ce
n'est d'attendre encore quelques jours pour avoir les résultats du bac.
Sûrement les jours les plus longs de nos vies ! Jileska
apporte un Scrabble et nous nous mettons à jouer sans grande conviction. La
tête est dans l'attente des résultats.
« Sinon, l'école c'est quand même bien, quoi ! Parce que
je vois la manière dont Sunita déboule l'anglais au téléphone avec ce Patrick,
là ! Je suis que dépassée. On dirait qu'elle a passé 10 ans au Ghana ! »
« Jileska et le sens de l'exagération ! Comme ça, la
petite travaille son dossier auprès de Patrick ? », demande Gaëlle.
« Tu veux dire les petites ? Figure-toi que Pupuce et elle
nous ont grillé la politesse. Elles auraient pu nous laisser la place, mais non
! Hier, elles étaient au resto avec les types. Et quel resto !? »
« Elles sont efficaces, ces filles ! Elles ont négocié
l'affaire comme ça, alors que nos têtes étaient en plein dans l'examen. », fait
Gaëlle.
« C'est ce que tu dis petit comme ça ! Depuis le jour à la
plage, Sunita joue l'affaire très serrée. Elle ne laisse pas une minute de
répit au pauvre type. Je lui ai demandé pourquoi elle veut à tout prix mourir
là, et vous savez ce qu'elle m'a répondu ? Elle me dit carrément qu'on ne sait
pas de quoi est fait demain. J'ai préféré enlever ma bouche là dedans. »
Gaëlle et moi éclatons de rire.
« J'ai entendu Pupuce et maman discuter ce matin. Elle lui
racontait la soirée. Paraît que ce soir, ils sortent encore ensemble. Ils vont
jouer au billard ensuite, ils vont au Karaoké ! », fais-je.
« Hummm ! En tout cas, elles s'enjaillent ! Au moins elles
! »
« Comme tu dis. Il y en a qui ont de la chance ! Moi avec
qui oh ! »
« Arrête, Jileska. Ton tour arrive. L'an prochain, c'est
l'université ! Tu vas forcément trouver le prince charmant là-bas. », fais-je.
« Yo ! Ça c'est quel prince charmant que tu me souhaites !
Donc je vais m'embourber à l'USTM et je vais encore me fatiguer avec un sans
espoir comme moi ! Yooooo ! Pardon, autant rester célibataire., fait Jileska.
« Mais sois positive ! Qui dit que tu ne vas pas tomber
amoureuse d'un fringant jeune homme, jeune diplômé, tout juste embauché dans
une banque ou autre ? À Libreville, tout est possible ! », fait Gaëlle.
« Laisse ça, la go ! La chance n'a jamais été de mon côté.
Bref, je suis là pour accompagner les autres. Personne ne me regarde jamais
autrement qu'en bonne potesse ! »
« Tu es trop pessimiste, Jileska », conclut Gaëlle.
Samedi 8 août, c'est Miro qui me réveille à 6 heures du
matin.
« Comment te sens-tu ? », me demande-t-il au téléphone.
« Je me sens endormie, mon chéri. Je te signale que le
soleil se lève à peine. »
« Désolé, je pense que je suis trop nerveux depuis hier soir.
Les résultats c'est pour aujourd'hui ma belle ! »
« Merci pour la pression, mais on ne saura rien avant cet
après-midi ! »
« Ok. Rendors-toi. Je t'embrasse très fort. »
Je ne peux pas me rendormir. Je me lève et abandonne
Pupuce dans le lit.
Dans le salon, maman est assise dans le canapé et donne le
biberon à Jade.
« Hello ! »
« Hello à toi. C'est le grand jour. »
« Moi, je n'y vais pas. Les autres me raconteront.
« Comment ça ! Et si on te fait une mauvaise blague en te
disant que ton y est alors que ce n'est pas vrai ! »
« J'ai pas envie d'y aller, maman. Mon cœur bat tellement
vite que j'ai l'impression qu'il peut lâcher à tout moment. »
« Espèce de poltronne. Reste assise à la maison ; tes
résultats viendront te suivre ici. », me fait maman.
« Et si je ne l'ai pas ! »
« Ce n'est pas la fin du monde. Tu le repasseras l'année
prochaine. »
Nous continuons de discuter de tout et de rien,
lorsqu'arrive Pupuce, lavée, coiffée, maquillée.
« J'ai raté un épisode, ou il n'est que 8 heures du matin.
C'est quoi toute cette beauté ? Tu veux tuer qui ? », lui fais-je.
« Rabat-joie ! Je veux juste être au meilleur de ma forme
aujourd'hui. Je te signale qu'on aura bientôt les résultats. »
« Oui, cet après-midi. Ça ne justifie pas que tu sois déjà
pimpante à 8 heures. »
« Oh ! Je me suis faite belle parce que je vais faire un
tour. »
« Tu vas faire un tour ? Où ? »
« C'est la police qui demande ? », me répond Pupuce.
« Y en a qui ont pris du galon, dis donc. Heureusement que
les petites ont une grand-mère, n'est-ce pas ? »
« C'est fait pour ça les grand-mères », conclut Pupuce
avec un sourire espiègle.
« Arrête d'embêter ta sœur, Tania. Elle a l'occasion de
s'aérer l'esprit, il faut la comprendre ! », fait maman.
« Faites comme si je n'avais rien dit. », fais-je en allant
vers la salle de bains.
Je prends une douche en écoutant sur mon téléphone, le
morceau Photograph de Ed Sheeran. Ce morceau me fait penser à Miro. Je me
demande ce qu'il adviendra de nous sitôt que j'aurais mes résultats du bac. Ce
soir, c'est le soir fatidique.
Je me prélasse sous le jet d'eau comme si je n'avais rien
d'autre à faire que rêver.
Mon téléphone sonne. Je regarde l'appelant. C'est l'élu de
mon cœur. Je laisse sonner et me contente de m'essuyer.
Il appelle de nouveau dix minutes plus tard.
Je réponds. Il m'annonce qu'il est là dans dix minutes et
m'emmène prendre le petit déjeuner au Méridien. Je n'ai pas faim ; mais comme
j'ai envie d'être dans ses bras, je réponds ok.
Je vais dans la chambre et je pique à Pupuce une de ses
robes paysannes qu'elle ne porte plus depuis longtemps. Je me fais belle en
lissant mes cheveux courts qui ont plutôt poussé. Je vais dans la chambre de
maman lui piquer du parfum : eau de Kenzo.
C'est bon ! Je me sens fraîche et belle pour attaquer la
journée. Miro est là comme promis. Après avoir dit bonjour à maman, il lui
annonce qu'elle ne me reverra qu'en début de soirée.
Yo ! Il a prévu quoi pour me tenir occupée ?
Nous allons effectivement prendre ce fameux petit
déjeuner. Il y a tellement de choses au buffet, que j'en ai le tournis.
« Et si tu souriais un peu, beauté ! », me fait-il alors
qu'il s'assoit en face de moi.
Je lui fais mon plus beau sourire.
« Alors, les filles sont prêtes pour le verdict ? »
« Toutes sauf Jileska qui est en panique. Je pense qu'elle
n'a pas dormi de la nuit. C'est tellement important pour elle. »
« Pourquoi ? »
« Oh ! Elle se met la pression depuis qu'elle a eu son
enfant en 5ème. Elle se dit qu'il lui faut à tout prix réussir, car ses parents
ont eu une charge en plus. C'est psychologique ! Elle se sent redevable envers
eux et a hâte d'avoir un diplôme d'études supérieures pour trouver un travail
digne de ce nom, et venir en aide en retour à ses parents. »
« Je comprends. C'est très africain cette idée de prendre
soin de ses parents dans leurs vieux jours. Je dois dire que j'en ai appris
beaucoup sur les traditions en 3 années au Gabon. En France, on a tendance à
être plus égoïstes. »
« On ne peut pas se permettre ce luxe ici. Tu as vu tout
ce que l'on transporte comme famille ! »
« Je vois ça ! Et je suis impressionné chaque fois que je
vienne te voir et que je me rende compte que ta grand-mère est là et qu'elle
prend soin des filles de Pupuce. Moi, la mère de mon père va skier en hiver en
suisse, elle fait le shopping au printemps à New York. Et elle bronze l'été à
Maldives. Ce n'est pas elle qui arrêterait sa vie pour prendre soin de son
arrière-petit-fils. »
« Ça me fait tout drôle de t'entendre dire cela. Tu ne me
parles jamais des parents de ta mère. »
« Oh ! C'est qu'elle ne m'a jamais emmené au Congo. Ces 5
frères sont tous réfugiés en Belgique. Sa sœur aînée a épousé un Allemand et
vit au Luxembourg. Il n'y a plus personne à Lubumbashi. »
« Oh ! Ça fait drôle de savoir qu'elle n'y met plus les
pieds. Je n'arrive pas à imaginer un instant ne plus jamais revoir le Gabon.
Mais, à chaque famille son histoire. »
« Comme tu dis. Mas dis moi, Tania Akendengué, où
vivrons-nous une fois que je t'aurais épousé ? »
Sonnée, je ne sais quoi répondre.
« Tu n'as jamais réfléchi à ce genre de choses ? », fait
Miro étonné.
« Je te suivrai partout où tu iras. Ma maison sera là où
tu seras. », fais-je pour rattraper le coup. Jamais je n'ai pensé à tout ça.
Monsieur a tout prévu pour moi. Il m'emmène au salon de
beauté Cuttie Hair pour une séance de massage intégral. Ensuite, nous achetons
une pizza et deux canettes d'orangina et allons manger au bord de la mer à
SOGARA. Le temps passe tellement vite que je ne me rends pas compte quand
l'heure de la sentence tombe. Il est 14 heures quand il me dit :
« Les filles sont devant le portail du lycée depuis deux
heures déjà. Il faut y aller. »
Nous arrivons là-bas. La foule est compacte devant le
lycée. J'entends quelqu'un qui me crie : « Tania Akendengué admise d'office !
»
43-
Il est 18 heures quand j'arrive à la maison après avoir
longuement discuté avec monsieur mon père.
J'ouvre le portail, j'ouvre la porte d'entrée. Et qui je
vois, bien assis dans le salon !!!
Pardon, je suis obligée de me mordre la langue pour
m'empêcher de crier.
Donc, le salon est envahi par Patrick et Alec, qui
discutent avec Sunita et Pupuce. Patrick porte Jade dans les mains, tandis que
Sunita a Ruby. Une véritable photo de famille, juste bien trouvée pour
illustrer un magazine. Je les salue et demande où se trouve maman.
« Elle est dans la cuisine », me répond Pupuce, trop
occupée à manger Patrick des yeux.
Yo !!!
Je vais dans la cuisine et trouve maman derrière les
fourneaux.
« Ta fille a eu le bac, ma petite maman. »
« C'est quand même ma fille. Dieu ne s'est pas trompé en
te mettant dans mes bras. Oh, comme je suis fière de toi ! », me fait-elle en
m'embrassant. « Tu as appelé ton père ? »
« Je reviens de chez lui. Nous avons discuté un peu. »
« Ok. Ta sœur est tellement dans le love, comme vous
dîtes, qu'elle a préféré annoncer la nouvelle à monsieur Mbeng par téléphone.
Il est en train de boire le champagne là-bas. Ta grand-mère est dans la
chambre. Va lui annoncer la nouvelle toi-même. »
« Ok, je vais le faire. Mais dis-moi, maman, ils font quoi
là au salon ? Tu étais au courant depuis le début, en fait. Moi ne tombe des
nues. »
« Oh ! Ne va pas embêter ta sœur avec tes questions. Tu es
trop cartésienne. Laisse-la vivre son bonheur. Je préfère la voir comme ça
épanouie plutôt que triste en enlaidi par l'amour fou qu'elle ressentait pour
Peter. »
« Maman ! C'est toi qui arranges maintenant le coup à tes
filles. »
« Oh ! Ils sont venus me dire bonjour hier. Ils m'ont dit
qu'ils veulent manger des plats typiquement gabonais. C'est pour ça que tu me
vois dans la cuisine. J'ai fait un bouillon de carpe, un plat de poisson salé
aux aubergines, des feuilles de manioc aux crevettes. Et bien sûr, du poulet
fumé à l'Odika. Ils mangeront ici ce soir. Il y aura aussi ton frère Julien et
cette petite blanche là, Pamela-Jo. Elle s'en va définitivement demain. »
« Maman ! Tu arranges le coup à tes enfants ! » , fais-je
pour la taquiner.
« Mais pourquoi pas ! Si c'est le seul moyen que j'ai pour
leur montrer que vous n'êtes pas des filles quelconques, je ne vois pas
pourquoi je ne le ferais pas. »
« Ok, mamounette ! Heureusement que Dieu t'as créée. Tu es
trop cool ! », lui fais-je en la serrant dans mes bras.
« Mais, demande à Miro et aux filles de se joindre à eux.
Il y a assez à manger pour 20. »
« Ok. Je vais l'appeler. Il sera content de venir. Les
filles aussi. »
« Au fait, la mère de Peter Malonga était là ce matin.
Elle nous a apporté deux paquets de manioc. Vous les mangerez au repas de ce
soir. »
« Oh ! »
Je sors de la cuisine et me dirige vers la chambre de
maman où se repose grand-mère. En omiènè, je lui annonce ma nouvelle.
« Agnambiè, Akéwa ! (Dieu merci)», fait-elle en levant les
mains au ciel.
Là, elle dénoue un pan de son pagne et me dit :
« Tiens. C'est pour toi. Fais-en bon usage. Je suis
heureuse pour toi. Et si ce jeune homme te demande en mariage, dis oui. Tu
réfléchiras après. »
Je l'embrasse en prenant les 100 mille francs qu'elle m'a
remis. Je vais dans ma chambre pour passer des coups de fil. J'appelle d’abord
l'oncle Alexandre, le frère aîné de maman qui vit à
Libreville. Il n'arrête pas de crier au téléphone, tellement il est content.
J'appelle ensuite, Albert, le meilleur ami de maman. Lui de même ; il est
heureux pour moi. Quand j'appelle monsieur Mbeng, c'est Kaba qui répond au
téléphone. Elle reçoit la nouvelle avec joie et me lance :
« Vraiment, c'est Bernadette la plus heureuse dans cette
affaire ! »
Comme je n'ai vraiment pas envie de m'étendre en
discussion avec elle, je lui demande de me passer Papa Jimmy.
Il prend le téléphone et me dit :
« Vraiment ma fille, félicitations. Bernadette a vraiment
eu raison de se battre pour te payer Raponda chaque année. Je suis fière de toi
! Tu t'imagines ! Pupuce a eu mention bien. »
Yo ! Pourquoi l'ai-je appelé ? J'avais oublié que ce n'est
pas mon père !
J'envoie un message Whatsapp aux filles pour les inviter
au repas à la maison, à 20 heures. J'appelle ensuite Miro. Il répond au bout de
5 sonneries.
« Désolé beauté, j'étais sous la douche. »
« Ok, pas de souci. Je voulais juste te dire qu'est invité
ce soir par ma mère. Elle a préparé un menu entièrement gabonais. »
Cool ! Je viendrai à 21h. Je dois accompagner mon père à
un cocktail officiel dans quelques minutes. Je fais juste acte de présence et
ensuite, je suis à toi. »
« À tout à l'heure, alors. Je t'aime. »
« Moi, dix fois plus, beauté. »
je raccroche et compose le numéro de Jileska qui m'a
répondu « Appelle ».
« Oui, qu'il y a t-il mademoiselle. »
« et ben ! Il se trouve que je ne serai pas avec vous ce
soir. Je... »
« Tu vas au restaurant avec Jacques donc tu n'a pas notre
temps. Ça se comprend, on ne t'en veut pas, tu sais. »
« La go, ce que j'aime avec toi, c'est que tu comprends
vite. Il m'a dit qu'il m'emmène dans un vrai restaurant. Le Copa Cabana c'est
fini, oh !!!! »
« Encore toi-même ! Tu le mérites, frangine. Bisous. »
« Bisous. »
Je me couche sur le lit, histoire de me relaxer avant que
les invités n'arrivent. Un quart d'heure plus tard, Pupuce entre dans la
chambre. Elle ouvre le placard et se parfume. Son parfum embaume la chambre.
« C'est quoi ce parfum ? », lui fais-je, surprise par
cette agréable odeur.
« Ça s'appelle Libertine. C'est du Vivienne Westwood.
Sunita et moi, nous nous sommes ruinées pour en acheter avec une collègue de
Papa Jimmy qui revient de France. C'est sensuel, n'est-ce pas ? »
« Je ne te connaissais pas des goûts si prononcés pour
tout ce qui est SENSUEL ? », lui fais-je.
« Est-ce que ça te tuerait d'être un peu heureuse pour moi
? Je te signale que c'est la première fois qu'un garçon s’intéresse réellement
à moi. Il me fait sentir belle, désirable. Contrairement à ce Peter de malheur
qui n'est sorti avec moi que parce qu'il avait besoin de quelqu'un pour lui
faire ses devoirs de maison ! Pfffffff! »
« Désolée Pupuce. Je suis heureuse pour toi. Bonne chance.
C'est juste que je me dis qu'il est juste de passage. »
« Et alors ! C'est tante Bernadette qui a raison : peu
importe s'il s'en va après, j'aurais vécu de beaux moments. »
« Tu as raison. Je devrais arrêter de trop réfléchir. Dis,
comment es-tu arrivée à lui parler des petites ? Il n'a pas été choqué ? »
« C'est Sunita qui s'en est chargée. Et comme ma combi
sait y faire, le type n'a rien trouvé à redire. Tu crois ça toi ? »
« Je le vois et je me dis que tu as de la chance ! »
« Comme quoi, c'est bien cette folle de Kaba qui avait
raison : j'aurais dû marcher avec toi dès le début. Je n'aurais pas fondu
bêtement pour Malonga. »
Je l'a regarde sans rien dire. Donc, Kaba a trouvé quelque
chose de bien à dire sur moi ?
« J'ai pensé au début que c'était Alec qui te plaisait. »,
lui dis-je.
« No way ! Tu as vu comme il est beau on dirait qu'il veut
tuer les filles d'un seul regard ! Et c'est moi qui allais tomber là ! Pardon,
j'ai eu mon lot avec Big Wave. Je , ne me voyais pas sortir à nouveau avec une
gravure de mode. Partout où on va, les filles se retournent sur lui et toisent
Sunita. Pardon, j'ai mis mon cœur à l'abri. »
Elle s'en va comme elle est arrivée et je me dis qu'elle
en fait du chemin, ma chère Pupuce.
44-
Il est 20h lorsque Sharonna arrive en compagnie de Stephen, son petit frère. Du
haut de ses 17 ans, il va en terminale B au lycée Ambourouet Avaro. Tous deux
m'aident à dresser la table.
« Tu t'imagines que j'ai du fuir le vieux. Il avait des plans, le type. Il
voulait qu'on aille au restaurant et tout. Je lui ai demandé de me laisser
sortir étant donné que monsieur a déjà payé les billets pour Dubaï. On y va en
vacances dans dix jours. Juste le temps d'effectuer les démarches à Libreville
pour récupérer mon diplôme »
« Comme je t'envie ! Vous resterez combien de jours ? », lui fais-je.
« Oh ! On y restera deux semaines. Ensuite, Stephen et moi allons passer deux
semaines à Cologne chez ma marraine. »
« C'est beau de pouvoir voyager. J'imagine, déjà faire le tour du monde, plus
tard, quand je travaillerai. Je serais aussi class et professionnelle que ta
mère. Et je voyagerai avec mes enfants et mon époux. »
« Oh ! En parlant de maman. Elle m'a appelée. Elle vous passe ses
félicitations. Elle a osé me supplier de ne pas la juger. Elle m'a dit que
l'amour ne prévient pas et qu'elle me souhaite de vivre la même chose. J'ai cru
que j'allais vomir quand elle m'a dit ça ! »
Je me contente de rire devant la mine dépitée de Sharonna.
« On en rira dans dix ans, tu verras ! »
« Oh ! Ça ne risque pas d'arriver ! », fait Stephen. « Elle est enceinte,
vois-tu ? Nous allons sûrement avoir un petit frère. Difficile de rire une fois
que le petit sera là. »
Les assiettes que j'avais dans la main atterrissent par terre.
« Tu rigoles, Stephen ! Sharonna, dis-moi qu'il rigole ! Ta mère va avoir 49
ans. À cet âge on souhaite se débarrasser de ses enfants et vivre une nouvelle
vie avec son époux et non pas pouponner de nouveau. »
« On se calme, Tania. Tu t'imagines ce que j'ai pu ressentir en apprenant la
nouvelle ! Je n'ai même pas eu le courage de le dire à mon père. Je ne sais
même pas comment annoncer la nouvelle à mes grands frères Josselin et Michaël.
», me fait Sharonna.
« J'ai besoin d'un efferalgan ; Excusez-moi, j'arrive. », fais-je alors que
Pupuce et maman sortent de la chambre, intriguées par le bruit des assiettes.
Alec, Patrick et Sunita qui sont partis acheter à boire chez Azockry,
reviennent quelques minutes plus tard. Dès lors, Pupuce ne quitte pas le bras
de Patrick. Sunita, elle, a dû mal à éloigner sa bouche de celle d 'Alec. Elle
semble s'être transformer en masque à oxygène, tend il semble qu'il a
excessivement besoin d'elle comme de l'oxygène pour vivre.
À cela, Sharonna rit et lance :
« personne ne va te le voler ici, Sunita. On respire ! »
La petite de Jileska, du haut de ses 17 ans, répond simplement :
« Si tu savais, Ya Sharonna. Si tu savais ! »
Bref, il semble que la petite soit en train de vivre Noël avant l'heure.
Gaëlle arrive en compagnie de Marc-Elise.
« Les consignes de Nazaire Ontala et d'Elisabeth Ogoula sont les suivantes :
ramenez leur fille à la maison sitôt que nous avons fini de manger. Ils m'ont
dit qu'il est hors de question qu'elle nous suive en boîte de nuit. », me fait
Gaëlle en rigolant.
« Ah, ces gens là, quand je vais les barrer ils vont bien s'ennuyer dans leur
maison. Ce n'est pas moi qui leur ai dit de ne faire qu'un enfant ! », s’énerve
Marc-Elise.
« Oh, le bijoux de maman Élisabeth se fâche ! Ma go, tu vas juste là a
Libreville. Ce n'est pas comme si tu quittais le pays. Tu seras toujours leur
bébé. », lui fais-je.
« Peu importe. Au moins, j'aurai un peu d'indépendance. Je vais me prendre une
chambre. Et j'espère vraiment réussir le concours de l'Afram ! Mais d'abord,
cet oral de rattrapage du Bac»
« Et t'as des nouvelles d'Antoine », lui demande Sharonna.
« Il m'a envoyé un message de félicitations, mais je n'ai pas envie d'en
parler, » répond-elle simplement.
Les filles n'insistent donc pas. Nous nous mettons à rire en voyant Julien qui
essaie d'échapper aux griffes de Pamela-Jo. Je me demande pourquoi il l'a
invitée.
Maman arrive avec Ruby dans les bras alors que Jade dort déjà. Elle nous
souhaite à tous un bon appétit en nous félicitant encore pour notre réussite au
bac.
Avant de repartir dans la chambre, elle m'appelle dans la cuisine et me donne
des consignes.
« Si vous sortez, tu gardes Pupuce à l’œil. Tu l'emmènes en boîte de nuit et tu
la ramènes à la maison, d'accord ? Je ne veux pas que vous consommiez d'alcool,
on est d'accord. Et bien sûr, Julien ne sort pas avec vous, quelques soient ses
supplications. Amusez-vous bien. Et bonsoir à Miro. »
Sur ce, elle s'en va dans la chambre en souhaitant bonne soirée à tout le
monde.
Nous mettons à manger dans la bonne humeur. Je regarde ma montre et suis
impatiente de voir Miro arriver. Patrick demande à goûter du piment, malgré les
mises en garde de Pupuce. Il met en mets un peu dans son plat et devient aussi
rouge qu'une tomate, quand le piment agit dans son organisme.
« Mais, c'est un suicide ! Comment faites-vous pour manger ce truc ? »
« Ce n'est pas pour les poltrons », lui lance Julien.
« Je veux bien être poltron si cela doit me garder en vie. », répond Patrick en
essayant de rire.
Gaëlle lui demande alors de nous raconter la vie à Londres. Il se met à parler
de la ville dans laquelle il a étudié et vit depuis cinq ans.
« Je suis né à Nairobi. Mon père y était conseiller économique à l’ambassade de
France. Ma mère et lui s'y sont rencontrés. Elle était professeur de Lettres à
l'université. Je suis le deuxième enfant du couple. Ma sœur cadette étudie à Lille.
», nous fait-il.
« Et toi, Alec. Comment es-tu arrivé en Belgique ? », questionne Sharonna.
« Oh, c'était un compromis entre l’Allemagne où vivent mes parents et la Suède
où vivent encore mes grands-parents. Rien de bien original. Je suis en Suède.
J'ai grandi entre Dakar, New York, Bruxelles et Düsseldorf. J'avais l'embarras
du choix quant au lieu où j'allais effectuer mes études. »
« Ok. Intéressant tout ça ! », conclut Gaëlle.
Miro arrive finalement à 22 heures 30 alors que nous mangeons encore. Il semble
exténué.
« J'ai serré tellement de mains, et tellement souri aux gens, que j'ai bien
envie de me glisser dans mon lit. », me fait-il alors que nous sommes tous les
deux devant le portail.
« Impossible, tu as promis aux filles de nous emmener danser. », lui fais-je.
« Ok, ok ! Viens, allons retrouver les autres. »
Quand nous rentrons au salon, j'entends alors Pamela-Jo demander à Pupuce :
« Dis, tu seras à Toulouse en septembre ! On pourra s'y voir, alors ? »
« Non, je serai à Paris. J'ai été accepté dans une école de commerce qui a une
branche dans 5 villes de France. Je préfère Paris, finalement. Mon avion
décolle de Libreville le 1er septembre, je crois. Enfin, c'est mon père qui se
charge de tout. »
Gaëlle et Sharonna me regardent l'air de dire : mais finalement , cette Pupuce,
elle reste en Afrique où elle va en France ?
Moi, je ne m'en préoccupe pas plus. Je ne serai sûre de son itinéraire que
lorsque je verrai son avion décoller. Car, même assise dans la salle
d'embarquement à l'aéroport international Léon Mba, elle serait capable de
rater l'avion exprès, en allant s'enfermer dans les toilettes !
Et écoutez-là rajouter.
« Et c'est tellement plus pratique d'être là. En un saut, tu peux rapidement
prendre le train pour Londres, l'Allemagne, la Belgique. Je veux voyager, tu
comprends ! »
Ça c'est sûr que le message est passé ! Paris est tellement SI PROCHE de
Londres où travaille Patrick. Pas besoin de nous faire un dessin.
Je sers à manger à Miro, qui préfère s'en tenir aux feuilles de manioc, que ça
mère lui a déjà fait manger plusieurs fois. Assis à mes côtés dans le canapé,
sa tête ne tarde pas à tomber endormie sur mon épaule.
« Il semble épuisé ! », me fait Sharonna.
« Ce n'est pas grave, les filles. Qu'il reste dormir dans les bras de sa chère et
tendre. Et Pascal et moi, nous vous emmenons en boîte de nuit. »
Les filles sont d'accord avec ce programme. Moi, je réfléchis quelques secondes
à mon sort. Monsieur mon chéri va dormir ici. Où vais-je l'installer. Dans mon
lit au matelas peu confortable ou ici dans le canapé. Pupuce me sort de
l’embarras en me murmurant dans l'oreille :
« Je vais piquer de beaux draps à la vielle et vite arranger le lit et la
chambre. T'inquiète. »
Pour une fois, la télépathie entre nous a bien marché.
À 23h 30, alors que Miro dort couché sur le canapé, Julien et moi, accompagnons
les amis vers les voitures conduites par Patrick et Alec. Nous leur disons au
revoir.
« Désolée de devoir vous laisser tomber ; », fais-je à mes copines.
« T'inquiète ; nous allons nous amuser. On te raconte demain », me fait
Sharonna.
« Bonne nuit à toi Marc-Elise. Maman Élisabeth t'attend à la maison. », fais-je
à ma copine.
« Très drôle, Tania Akendengué. J'adore ton humour. »
J'ai eu le temps de dire à Pupuce de bien prendre soin d'elle en boîte de nuit
et de rentrer tranquillement à la maison après s'être amusée.
« T'inquiète », m'a t-elle dit. « J'ai retenu la leçon. »
Ils s'en vont, même si Pamela-Jo a un énorme pincement au cœur et les larmes
aux yeux en disant au revoir à Julien.
« Enfin partie ! J'ai bien cru qu'elle n'allait jamais me lâcher. », me confie
mon frère.
« Dis la vérité. Tu l'aimes quand même un peu, cette fille. »
Il me regarde sans rien répondre.
J'arrive à traîner Miro jusque dans la chambre. Je le débarrasse de sa veste de
costume, le couche sur le lit et lui enlève ses chaussures. Il est tellement
sonné, qu'il ne boude pas un instant. Il arrive à m'emprisonner dans ses bras.
Et à me murmurer dans l'oreille : Viens avec moi à New York, Tania.
Je me redresse pour être sûre d'avoir bien entendu, mais le sommeil l'a déjà
transporté bien loin au pays des rêves.
45-
Il est 5 heures du matin quand j'entends les petites pleurer pour leur biberon
du matin. Je me lève doucement du lit où Miro dort encore et me glisse furtivement
dans la chambre de maman.
« Ce sont de véritables horloges, ces petites. Pas besoin de réveil ! », me fat
maman. « Comment s'est passée votre sortie ? »
« Euh ! Miro s'est endormi, donc j'ai dû l'installer dans mon lit. Les autres
sont partis sans nous. », lui fais-je.
« Tu as laissé Pupuce sortir toute seule ? Oh ! Et elle n'est pas encore
rentrée ? », me demande maman ;
« Apparemment, non. Mais t'inquiète, je suis sûre que nous pouvons lui faire
confiance. »
« Ok ! L’essentiel c'est qu'elle s'amuse comme une fille de son âge. Voilà, le
biberon de ces dames est prêt.
Nous donnons à manger aux petites qui ne tardent à se rendormir. J'installe
tranquillement Ruby dans son berceau alors que Jade décide comme à son habitude
de rester dans les bras de maman.
« Nous avons bien mangé, cette nuit. Les garçons étaient contents. », dis-je à
maman.
« Je suis heureuse de l'entendre. Vous pouvez respirer maintenant que votre bac
est en poche. L'atmosphère est plus agréable. Et bientôt, il n'y aura plus
personne dans la maison pour mettre l'ambiance comme le font tes copines. Vous
serez toutes éparpillées un peu partout. »
« Oh ! C'est que tu me chasses. Je ne sais pas encore où je vais atterrir,
maman. Gaëlle ne s'envole pour Cape Town qu'au mois de décembre. Sharonna, elle
s'en ira en janvier si tout va bien. »
« Oh ! Elle va finalement aux USA comme prévu ? »
« Non, son père a décidé de l'envoyer en Afrique du Sud, en attendant qu'il se
remette à flot. Le départ de leur mère a mis un cran d'arrêt à ses grands
projets pour elle. »
« C'est vraiment dommage ! Mais l'essentiel c'est qu'elle fasse les études qui
lui plaisent.
« Comme tu dis. Au fait, sa mère est enceinte. »
« La mère de qui ? De qui parles-tu, Tania ? »
« Euh ! La mère de Sharonna est enceinte, maman. »
« Enceinte de qui ? »
« Euh, de Peter Malonga. Elle a annoncé la nouvelle hier à Sharonna. »
« Dieu ! A 50 ans ! C'est une blague ! Qu'ont-ils fait boire à cet enfant à sa
naissance ? Comment fait-il pour être aussi fécond ? Il enceinte toutes les
femmes qu'il touche !!! »
« Maman ! »
« Pardon, je préfère penser à autre chose ! Ce n'est pas possible. Je vais me
recoucher. J'irai à la messe de 10 h aujourd'hui. Ce n'est pas possible !
Enceinte ! »
Je laisse maman se remettre du choc de cette nouvelle. Je me demande comment
les grands frères de Sharonna accueilleront la nouvelle.
Je reviens dans ma chambre et trouve Miro éveillé, qui tient en main, un livre
de Pupuce.
« Bonjour bel homme ! »
« Bonjour belle dame ! J'ai l'impression que quelqu'un m'a gardé prisonnier
cette nuit ! »
« J'aurais fait plus si tu n'étais pas aussi fatigué, qui sait Tu te serais
réveillé tout nu ce matin? »
« Oh ! Tu aurais pu faire de moi ton esclave sexuel que je n'aurais rien
trouver à dire. Viens là », me fait-il en m'emprisonnant dans ses bras.
« Tu vas à New York, Miro ? »
« Pour quoi faire ?, me répond t-il intrigué.
« Non, rien. Rien. »
Il sourit et me dit :
« Il faut que je m'en aille. Je ne veux en aucun cas que ta mère pense que j'ai
abusé de sa confiance. »
« Elle sait que t'as dormi dans mon lit. Je le lui ai dit. »
« Oh ! Dans ce cas, je me dépêche de m'en aller avant que ton frère ne pète un
plomb. »
Il sort du lit et prend sa veste et ses chaussures en mains. Je l'accompagne
jusqu'à sa voiture et il m'embrasse avant de s'installer au volant. Il baisse
après avoir mis le contact et me lance :
« Au fait, fais ton sac. Je t'enlève pour la journée, pour la nuit et peut-être
pour la vie, si tu veux bien de moi ! »
Il s'en va avant même que je n'ai le temps de lui poser des questions !
Je mets quoi dans ce sac ? Il m'emmène où ? Quand vais-je revenir chez moi ?
C'est quoi ces plans ?
Je reviens dans la maison et vais dans la chambre pour me remettre les idées en
ordre. Je n'arrive pas à penser sainement parce que le baiser de monsieur me
reste là sur les lèvres. Je fais quels bagages et pourquoi. Je... Aïe ! Je
viens de poser mes fesses sur le lit et sans m'en rendre compte, je me suis
assise sur quelque chose. Je me lève pour voir ce que c'est et... SURPRISE.
« Euh ! Tu devrais peut-être l'ouvrir au lieu de rester là la bouche ouverte !
Tu vas finir par gober une mouche ! »
« Très drôle, Julien. C'est toi qui me fait cette blague ! », fais-je à mon
frère qui se tient debout devant ma porte.
« J'ai un très grand sens de l'humour, tu le sais. Mais, je pense quand même
que mes blagues valent un peu moins cher que le billet d'avion à l’intérieur de
cette enveloppe. Et t'as vu la bague que ce type est capable de payer ! Pardon,
il faut vraiment que je réussisse mes études supérieures. Je pourrais ainsi
faire planer la future femme de ma vie ! »
« De quoi parles-tu, Julien ? »
« Arrête de poser des questions et ouvre donc cette enveloppe ! Bon, moi je
sais déjà ce qu'il y a à l’intérieur. Ouvre au lieu de rester là à me regarder.
»
Je m'exécute comme une automate.
Il y a une carte de vœux dans cette enveloppe A5. Il y est écrit : FÉLICITATIONS
POUR CE BAC !
Il y comme l'a dit Julien, une réservation pour un billet Libreville/Paris/New
York au nom de Akendengue Tania. Et avec ça, un écrin. J'ouvre et je me trouve
en face d'une jolie petite bague. Il y a un mot qui accompagne le tout.
~mon cœur t'appartient pour la vie
Je reste là à regarder tout ça. Et mon esprit semble complètement ailleurs, sur
une autre planète.
« Tu as perdu ta langue, sister. Je comprends, le choc est trop fort, c'est ça
! Tu as du mal à imaginer la go du château d'eau de Port-Gentil, là-bas à New
York. Je compatis à ton trouble ma chérie. Je compatis », me fait Julien avec
son rire espiègle.
« Tu étais au courant ? Tu... »
« Y a quel problème ? Il m'a remis le truc hier. Il m'a un peu briffé et puis
voilà ! Est-ce que y a quelque chose à discuter, là. Tu montes simplement dans
l'avion et c'est tout ! »
« Oh ! Je...je... »
« Pardon Tania ne nous insulte pas. Y a pas à réfléchir, là. Qu'est-ce que tu
ne comprends pas ? Prends une douche froide si tu en as besoin, mais s'il te
plaît, fais-moi ces bagages et on n'en parle plus. N'oublie pas de me ramener
tous les Dvds collector de Hip Hop que tu trouveras là-bas, ok. »
Comme je ne réagis toujours pas, Julien me secoue fermement et appelle maman à
la rescousse :
« Bernadette, ta fille va tomber dans les vap' »
Maman sort rapidement de sa chambre et nous trouve là, dans ma chambre, moi
toujours sans voix et Julien exaspéré.
« Que se passe t-il ? », demande t-elle.
« Il se passe qu'on emmène ta fille à New York. Madame veut rester à côté de
toi pour sucer le sein. Il est temps de la sevrer, maman ! C'est pas possible.
»
c'est quoi cette histoire. Montre-moi voir ça », fait-elle en m'arrachant des
mains le papier que je tiens encore. « Oh ! Vous partez dans 3 semaines. Donc
il était sérieux quand il me parlait de ses projets ! C'est quoi le problème
Tania. »
« Rien, je suis juste émue. Je ne m'y attendais pas. C'est que... »
Et là, je me mets à pleurer. Je ne sais pas si c'est l'étonnement, la joie où
l'incertitude qui l'emporte. Je pleure simplement.
« On t'offre un billet d'avion et ça te fait pleurer. J'ai raté un épisode ou
quoi ? »
« Non, non ! Elle fait sa star, tu comprends, maman. Elle ne savait pas qu'elle
tomberait sur un type qui serait tellement fou d'elle qu'il dépenserait tout
son argent pour elle ! C'est tout. Et pour ta gouverne, mademoiselle ma sœur
chérie, c'est l'argent de son job d’état de l'année dernière qui a payé ton
billet d'avion et la bague. C'est comme ça chez les blancs, il paraît. Ici pour
se marier, y'en a qui comptent sur les poches des autres. Lui, son père qui est
pourtant riche l'oblige à travailler toutes les vacances depuis qu'il a 14 ans.
Oh, rien de compliqué comme ici où on va décharger les camions chez les
commerçants libanais. Non, il travaille dans l’entreprise de son oncle, quelque
part à Dijon. Bref, plus j'en sais un max sur ce type, plus je l'apprécie.
Vraiment ! »
Toujours avec le même sourire espiègle, Julien s'en va en sifflant. Maman
m'assied alors sur le lit et me serre dans ses bras.
« C'est comment mademoiselle Akendengué. C'est bien la première fois que je te
vois perdre tous tes moyens. »
« J'suis bête, n'est-ce pas ? »
« Non, c'est normal. Maintenant, prépare-toi. Je crois que quelqu'un doit venir
te chercher, non ! »
« Parce que ça aussi vous l'avez comploté dans mon dos ! »
« Ma chérie, tant qu'il est poli et correct avec toi, je ne vois pas pourquoi
je mettrais des barrières entre vous. Mais, dis-moi, il va être 7 heures. Où
est ta sœur. »
« Je n'en ai aucune idée, maman. »
Je regarde de nouveau la réservation d'avion. Départ le lundi 31 août à 22h 35.
retour le dimanche 20 décembre.
« C'est loin New York, maman ? Je sais pas ! Même quand je dis que je veux
aller au Ghana je n’imagine même pas comment je vivrai sans toi. »
« ça s'appelle devenir adulte, ma chérie. Je serai toujours là. Tu ne dois pas
t'empêcher de profiter de la vie. Et n'oublie pas que lorsque tu seras mariée,
tu ne m’emmèneras pas dans tes bagages ! »
« ça fait tout drôle, tu sais. »
« Oui, j'imagine. Mais, s'il te plaît, garde la nouvelle pour toi. Tu le diras
à tes copines et à ta sœur, quand tu auras ton visa la semaine prochaine. Pas
avant, compris ? »
« D'accord, maman. D'accord. »
46-
Maman me laisse et sort de la chambre. Je prends mon téléphone et compose le
numéro de Miro.
« Mon cœur a failli lâcher. Vraiment merci pour la surprise, monsieur mon chéri
! »
« Je savais pas comment tu allais le prendre. Je veux pas te forcer la main.
C'est juste que j'ai ce stage de trois moi là-bas. Et je ne m'imagine pas un
instant partir sans toi. Tu vas bien, t'es sûre ! »
« Je t'aime, Miro. »
« Et moi, je suis dingue de toi. Notre avion décolle à 18 heures. Tu as
rendez-vous à l’ambassade des USA mardi matin. »
« Tu as pensé à tout, n'est-ce pas ? »
« Oh ! Ton frère m'a grandement facilité la tâche, tu sais ! »
Il raccroche et je vais sous la douche. Je me mets à imaginer la tête que
feront les filles en apprenant la nouvelle. Je me demande ce que dira mon cher
papa. Et Kaba, comment réagira-t-elle. » Et je me mets à danser en chantant
tout bas : je vais à New York, je vais à New York.
La vie ne peut pas être plus belle ! La fille du Kwat va voir la grosse pomme.
Yo ! Qui donc a écrit mon histoire ! Vraiment, Dieu, tu es bon !
Il est 9 heures et je viens de passer la serpillière dans toute la maison. Les
assiettes sont nettoyées, je peux me reposer un instant et regarder la
télévision. Je ne me suis même pas rendu compte que Pupuce n'est toujours pas
là. Mais cette fille-là est où ?
Au moment où je m'apprête à l'appeler, elle rentre dans le salon en souriant :
« Je vous apporte des croissants pour le petit-déjeuner. J'ai pas appelé pour
ne pas vous embêter. Mais soyez sans crainte : Je n'ai pas fait de bêtises.
Alors, tout va bien. »
Maman qui est devant la porte de la cuisine se contente de sourire.
« Tu t'es souvenue du chemin de la maison, Pupuce ? Comment a été ta nuit ? »
« Huummmm ! Tante Bernadette. Tu veux vraiment les détails ? »
« Oui, je suis curieuse. Où étais-tu ? Qu'as-tu fait ? Où as-tu dormi ? »
« Oh ! Je ne dirai pas que j'ai dormi. On a dansé jusqu'à 6 heures du mat'.
Ensuite, mon sieur Patrick a voulu aller voir le coucher du soleil au bord de
mer. Voilà qu'on y est allé. On avait beaucoup de choses à se raconter, alors,
on a pas vu le temps passer. Il vous dit bonjour. Puis-je aller prendre une
douche et embrasser les petites. »
Avant même d'avoir une réponse, elle s'en va. Maman se contente de sourire.
« Elle a bien changé, ta sœur ! »
« C'est le fait d'être loin de sa mère qui la rend plus cool ! Elle s’émancipe.
»
Maman ajuste son foulard sur la tête et ne dit rien. Elle se prépare à partir à
l'église. Son sac fin prêt elle se tourne vers moi et me dit :
« Au fait, j'allais oublier. Il faut que je prenne tes mesures avant de partir.
Un instant, je reviens. »
Elle va dans sa chambre et en revient avec un ruban à mesurer. Elle me le met
autour des épaules, de la taille, des bras. Elle prend la longueur de haut en
bas. Je lui demande pourquoi.
Elle me répond :
« Oh ! C'est juste un cadeau que je compte te faire comme cadeau pour ta
réussite. J'ai préféré attendre les résultats pour ne pas être présomptueuse.
Tu verras, ça te plaira. »
« Ok, je te fais confiance. »
« Bisou ma chérie. Et surtout, arrête de réfléchir. D'accord. Prends les choses
comme elles viennent. Ce type fera de toi une reine. »
« Hummm ! C'est la mère de quelqu'un qui parle ! », lui fais-je.
Elle s'en va en riant.
« On se voit à ton retour, la semaine prochaine. Et comme je te l'ai dit, motus
et bouche cousue.
« Ok, c'est compris. »
Je vais dans la chambre voir comment vont les petites. Alors que je me penche
dans le berceau où dans lequel dort Ruby et je lui murmure :
« C'est sûr ta sœur et toi vous irez à New York un jour. Vous ferez de
brillantes études et surtout, vous rencontrez de beaux jeunes hommes qui
n'auront d'yeux que pour vous. Vous êtes tellement jolies ! »
Pupuce qui m'a entendu ajoute :
« Oh ! Je ne doute pas que leur parcours sera différent du mien ! Surtout les
filles, faites comme tata Tania et y aura pas de problème. »
« Pourquoi dis-tu cela, Pupuce ? »
« Parce que si elles se montrent aussi futées que toi, Tania Akendengué, elles
ne rencontreront pas de Peter Malonga sur leur route ! »
« Oh ! C'est juste ça ! Mais n'oublie pas que de nous deux, c'est toi qui à
toujours briller à l'école ! »
« Ouais, ça, heureusement que Dieu me l'a donné ! », conclut-elle en embrassant
Jade qui dort pénard sur le lit de maman.
« Je vais me préparer. Miro vient bientôt me chercher. »
« Et où allez-vous ? »
« Oh ! Je sais pas trop. Il me fait une surprise. »
« Cool ! À tous les coups, tu vas encore vivre une aventure qui va nous faire
pâlir de jalousie ! Il faut vraiment le faire, hein ! Vivre à côté de Tania
Akendengué ! »
« Qu'est-ce que cela veut dire ? », lui fais-je.
« Oh, rien ! C'est juste que le soleil brille tellement au-dessus de ta tête
que je me demande dans quelle eau tante Bernadette te lavait quand tu étais
enfant ! »
« N'importe quoi, Marjorie Akendengué ! », lui fais-je en refermant la porte de
la chambre de maman. »
J'enfile une jupe jean droite, qui m'arrive aux genoux. Au-dessus, j'ai une
jolie chemise bleu ciel avec manche ¾ . Je vais dans la chambre de maman lui piquer
un peu de parfum.
« Il me fait trop rire, ce Patrick », me fait Pupuce en arrivant du salon. « Il
me dit carrément qu'il n'arrive pas à se passer de moi. Il arrive me chercher
pour aller manger. J'ai appelé Sunita. On brosse un tour au Pétrolier ! Yes yes
yes yes », chante t-elle en allant dans la chambre.
Je la laisse à son petit bonheur et vais embrasser les petites. Je prends mon
sac à main et mon petit sac de voyage et je sors de la maison. Devant le
portail, Julien discute avec Miro qui est au volant de sa voiture.
« Bon, on se voit la semaine prochaine, sister. Amusez-vous bien. », nous lance
t-il avant de refermer le portail.
« Où va t-on », fait à Miro.
« Tu vas d'abord déposer tes affaires à la maison. Ensuite, nous allons manger
au Club SOGARA. Ça te va ? Ensuite, une sieste car j'ai la tête encore lourde à
cause du cocktail auquel mon père m'a traîné hier soir. »
« Ok ! Ça me va. »
Après le déjeuner au club, nous nous retrouvons tous les deux dans sa chambre.
« Où sont tes parents ? »
« Oh ! Monsieur mon père est sûrement à une partie de golf. Ma mère est avec
des copines. Une fois par mois, elles sillonnent les quartiers de la ville pour
offrir des vêtements et de la nourriture aux nécessiteux. »
« Oh, c'est cool ce genre d'initiative ! », lui fais-je.
« Oui, elles peinent parfois à recevoir des dons, mais ça va. Enfin, elles sont
contentes. Viens là ! Sers-moi fort. »
Je m’approche de lui et l'accueille dans mes bras. Il me murmure dans l'oreille
:
« parfois je me réveille et je me rendors en me disant que tu n'es pas réelle !
»
« Et moi alors ! Qu'est-ce que je dirais ! Tu me fais le même effet ! »
« Si on m'avait dit qu'une petite Gabonaise prendrait mon cœur en otage, j'en
aurais ri. »
« Et pourquoi ? »
« Oh ! Ma mère a toujours tout fait pour que j'évite les filles black. »
« Et pourquoi ça ? »
« Je n'en ai aucune idée ! Elle a ses raisons. Du coup, je ne suis sortie
qu'avec des petites blanches de bonne famille très smart, mais vachement
dévergondée en privé ! »
« Je vois ! Et qu'est-ce qui t'a attiré chez la petite Gabonaise qui a pris ton
cœur en otage ! »
« Tes yeux ! Il y a quelque chose d'hypnotique dans ton regard Tania. On a forcément
envie de te connaître. Et tu faisais tellement la fière dans cette boîte de
nuit, ce jour-là, que je me suis mis au défi de te faire mienne. »
« Tu racontes tellement bien ! On dirait un film. Et si on passait aux choses
sérieuses ! », fais-je en lui enlevant son polo.
L'on s'embrasse langoureusement. Il me débarrasse très vite de na chemise et de
ma jupe. Je me retrouve là, en string et en soutien-gorge. Dieu ! Je suis
obligée de me répéter mentalement : ça ira, respire, ça ira.
Il me lève de terre et me conduit dans la salle de bains. Arrivé là, il met le
jet de douche en route et en même temps, le robinet de la baignoire.
« Viens, approche. », me fait-il en me tendant la main. »
L'on s'embrasse de nouveau ! Et je perds d'un coup tout encrage avec la
réalité.
47-
Sa bouche fait des merveilles sur mon corps et je n'ai pas
envie qu'il s'arrête. Comme c'est bon. Il dégrafe mon soutien-gorge et les
seins les plus sauvages de la planète, sont libérés. Je sens comme une gêne
alors, je veux me blottir contre lui pour mieux contrôler mes impulsions. Mais,
il me garde à distance en me murmurant :
« Laisse-moi t'admirer ! »
Je ne saurais dire comment nous nous retrouvons follement
enlacés sous un jet d'eau tiède.
« Tu me rends dingue, Tania Akendengué. J'ai rêvé de ce
moment pendant des mois. »
« Je dois craindre le pire alors ! », lui fais-je avec un
sourire crispé.
« Je ne te ferai pas de mal. Je t'aime, si tu savais. »
« Moi, dix fois plus. »
Hummmm ! J'essaie de faire la fière, mais au fond, je
tremble comme une feuille.
« On ira à ton rythme », me murmure-t-il.
Ouais ! C'est beau de s'embrasser ; ça fait du bien de se
sentir désirer. Mais, suis-je prête à sauter le pas ?
Je frissonne malgré la douceur de l'eau sur mon corps.
« Viens », me fait-il en arrêtant l'eau. Il m'enveloppe
dans un drap de bain tout doux et me mène jusque dans la chambre. Là, couché
sur le lit, il entreprend de m'embrasser sur tout le corps. Ensuite, il se
redresse et me dit :
« Te souviens-tu de ce que je t'ai dit la première fois
que je t'ai embrassée ? »
« Oh ! Je ne m'en souviens pas. Laisse-moi chercher. Non,
je ne m'en souviens plus. »
« Je t'ai dit que tu serais ma femme ; et tu es partie
dans un grand éclat de rire. »
« Ouais, maintenant je m'en souviens. J'ai juste pensé que
tu étais un peu fou ! »
« Tu veux dire que ton charme opérait déjà sur moi, oui !
»
« Et on dira que c'est de ma faute si monsieur est raide
dingue ! »
« Je t'aime, Tania Akendengué. »
Alors qu'il dit cela et emprisonne ma bouche par un baiser
fougueux, un de ses doigts est déjà parti à la recherche de l'entrée de mon
jardin secret. Là, je me dis : respire, Tania, respire. Oh ! Si je pouvais
garder les yeux fermés le temps que ça passe. Je n'arrive même pas à décrire la
sensation que je ressens au moment où son sexe se met à forcer l'entrée de mon
vagin.
« Mords-moi si tu as à mal. Tu peux même m'arracher les cheveux.
»
Et voilà comment j'en arrive à hurler tout mon saoul parce
que même si Gaëlle et Jileska m'avaient raconté « LE TRUC » en me disant que
j'aurai M.A.L, j'ai juste envie d'étrangler le type qui me tient dans ses bras
au moment où je perds toute mon innocence. Un flot de larmes s'échappe de mes
yeux et je me mets à taper très fort sur le dos de Miro. Mes ongles ont beau
griffer très fort, il ne s'arrête pas et me tient serrée dans ses bras.
Bientôt tout s'arrête et je n'ai ni envie de lui parler ni
envie de bouger du lit.
Alors que je veux me recroqueviller dans un coin du lit,
je vois cette immense tache de sang sur les draps. Et je me mets à hurler :
« T'es qu'une brute. Je te déteste. »
« Viens », me fait-il sans se démonter. « Viens dans mes
bras. »
Je m’exécute malgré moi. J'aimerais être ailleurs.
J'aimerais avoir moins mal. J'aimerais...
« Ça ira, beauté. La prochaine fois, tu n'auras pas mal. »
« Ah bon ! Parce qu'il y aura une prochaine fois. »,
fais-je en pleurant.
Là, il sourit et entreprend de m'essuyer les larmes à
l'aide de baisers.
Un quart d'heure plus tard, il me lève du lit et me
soulève pour aller me déposer délicatement dans la baignoire toute pleine de
mousse. Ce bain fait du bien à ma peau et je finis par me calmer alors que lui
est sous la douche.
Je fais un petit exercice mental pour me relaxer et
laisser passer la tension que je ressens au niveau des jambes. Si seulement je
pouvais m'endormir dans cette baignoire ! Je m'y sens tellement en sécurité !
Je ne me rends même pas compte que Miro est sorti. Il
revient avec un verre d'eau et m'invite à boire.
« Tu es la plus belle chose qui me soit arrivé, Tania
Akendengué. »
Je le toise et me contente de fermer les yeux.
« Hors de question que je sorte de ce bain. », lui
fais-je.
« Oh ! Dans ce cas, je vais dans la cuisine chercher les
provisions dont tu auras besoin si tu comptes hiberner ici ! »
« Très drôle ! Je bouge pas. Je suis fatiguée, j'ai
sommeil, et je veux plus te voir. »
« Tu vas devoir me supporter, parce que je n'irai nulle
part sans toi. », me fait-il en posant un baiser sur mon front.
Il me laisse là, et je l'entends s'affairer dans la
chambre en sifflotant. Je reste dans l'eau sans bouger. J'aimerais bien mettre
un doigt là, dans mon vagin pour voir ce qui a changé, mais je préfère ignorer
la partie de mon corps qui commence au-dessous de la ceinture. Et je me mets à
espérer que je vais OUBLIER ce moment.
Je me lève et laisse disparaître cette eau qui me gardait
doucement. Je me rince et tire un drap de bain dans lequel je m'enroule. Je
mets devant le miroir et me regarde en profondeur en me demandant ce qui a
changé. Suis-je toujours la même ! Je regarde et ne vois que mes yeux fatigués
d'avoir supporté la douleur. Alors, je décide d'arrêter là cet exercice et
reste plantée comme un arbre face à la porte qui mène à la chambre de Miro.
Il arrive et me trouve là, silencieuse.
« Viens avec moi. » , me fait-il en m’entraînant dans la
chambre.
Quand on arrive là, je vois que monsieur a refait le lit
et que là, est posée une robe de chez robe. Elle est colorée avec de belles
fleurs de partout. C'est du Desigual tout craché ! Je m'exclame aussitôt :
« Mon Dieu, qu'elle est belle. »
« Pour la plus belle des femmes. Je suis sûr qu'elle tira.
Pupuce m'a dit que tu portes du 38. »
« J'en reviens pas ! T'as vu comme elle est belle ! Où
l'as-tu acheté. »
« Oh, ma sœur me l'a envoyé des USA. C'est elle la reine
du shopping dans la famille. Enfin, quand ma grand-mère est en vacances, quoi.
»
« Tu sais vraiment y faire pour m'avoir. »
« Et toi, tu as tout pour me rendre dingue. Souviens-toi
toujours que je t'aime. »
Je souris et entreprends d'essayer ma robe.
« Elle est trop belle ! »
« Cela veut dire que j'ai du goût car elle m'a tout de
suite plût quand ma sœur m'a envoyé les photos par WhatsApp. »
« Merci. », fais-je en l'embrassant.
Samba nous dépose une heure plus tard à l'aéroport. Là,
dans la salle de départ, je repose ma tête sur les épaules de mon amoureux et
le monde s'efface autour de moi. C'est comme s'il n’y avait plus que lui et
moi. J'ai l'impression que je pourrais le suivre au bout du monde sans jamais
avoir de crainte. C'est sûrement ça l'amour.
Avant d’arrêter mon téléphone après l'embarquement,
j'envoie un message à maman et à papa. Puis, un autre aux filles pour leur
souhaiter une bonne soirée. Ensuite, j'éteins mon téléphone avec l'intention de
rester injoignable jusqu'à ce que je n'en puisse plus de mourir d'amour pour
Miro. Je m'endors la tête posée sur son épaule.
Quand nous arrivons, la nuit est déjà tombée sur Libreville.
Un coursier nous attend à l'aéroport et tend à Miro les clés d'un véhicule garé
sur le parking VIP. Il s'agit d'une Toyota Prado. Tout pour que je me sente à
l'aise et puisse me reposer pendant le trajet jusqu’à l’hôtel. Nous descendons
à la Résidence Nomad. Le confort y est de haut standing et j'ai vraiment
l'impression de vivre une vie de princesse.
Alors, je me tourne vers Miro et lui dis :
« Tu me diras quand atterrir, n’est-ce pas ? »
Il me répond en souriant :
« Tu n'es pas en train de planer, chérie. Tu es dans la
réalité. »
Je fais le tour de cette studette que nous occupons ;
c'est vraiment très chic. Il y a de quoi y rester enfermer des jours sans voir
le dehors.
« As-tu faim ? », me demande Miro. « Veux-tu que nous
allions manger quelque part. »
« Je connais pas très bien Libreville. Alors, je te suis.
Je veux juste une pizza et de la glace. »
« Ok ! Allons au Rivoli, c'est juste à côté. Mais, je te
laisse appeler tes parents, avant. »
Je prends le téléphone pour appeler maman et lui dire que
je suis bien arrivée à Libreville. La bonne dame me répond :
« Tu n'as pas besoin d'appeler toutes les heures, ok. Je
sais que tu vas bien. »
Yo !!!
J'appelle ensuite mon père. Il me répond :
« Amuse-toi bien, ma chérie. Et arrête de réfléchir. »
Ok !!! Je crois que je vais arrêter mon téléphone une
bonne fois. Juste le temps d'envoyer un message à Jileska, Gaëlle, Sharonna et
Marc-Elise : « me cherchez surtout pas. J'suis à Lbv. Des bisous sucrés. »
48-
Nous sommes assis au Rivoli et mes yeux ont du mal
à regarder autre chose que le visage en face de moi.
« Tu es sûr que tu as faim ! J'ai l'impression
que c'est plutôt moi que tu es en train de manger du regard. »
Je souris.
« Je me demande juste ce que tu ne m'as pas
encore dis. », fais-je très espiègle.
« Oh ! Tu veux savoir quel est mon plus grand
secret. J'en ai plusieurs. Par lequel commencer ? »
« Arrête de te moquer. Dis-moi un truc que je ne
sais pas sur ta famille. Quelque chose que je devrais savoir. »
Avec le plus grand sérieux, il me regarde et
hésitant, il me confie :
« Mon oncle Angelo, le frère cadet de mon père,
est gay. »
« Oh ! », fais-je manquant de m'étouffer avec
une gorgée d'eau. « Tu veux dire que ton oncle...qu'il...euh ! »
« Il aime les hommes, chérie. Je ne sais pas
comment tu pourras t'accommoder avec cette situation, mais il va falloir faire
un petit effort, car nous allons le rencontrer avec son mari pendant notre
séjour à New York. »
« Oh ! Tu veux dire que je vais avoir devant moi
deux hommes susceptibles de s'embrasser et tout ??? Euh...je...Tu sais, je sais
pas si...ouais, c'est plus qu'un petit effort que je vais devoir faire ! C'est
une blague ou ton oncle existe vraiment ? »
« Il existe vraiment, Tania. Il est super
génial, mais il est gay. Et on n’y peut rien. »
« Comme tu dis ! On n’y peut rien. Je...je... »
« Parle, je t'écoute. »
« C'est juste que je ne m'attendais pas à ce
genre de révélation. Donc ton oncle embrasse d'autres hommes et ils vont
ensemble au lit et tout le reste !!! »
« Tania, as-tu un souci avec cela ? Dis-le moi,
que je le sache ! »
« Euh !!! Je dois dire que je suis un peu sonnée
! Je...je vais devoir m'habituer à cette idée. J'ai déjà vu des homos,
t'inquiète ; mais jamais encore je n'en ai côtoyé. Ça fait tout drôle quand
même ! Ça t'a pas surpris la première fois ? »
« C'est mon oncle. Il est né 28 ans avant moi.
Donc, il était déjà gay quand je suis arrivé au monde. Et non, ça ne me choque
pas. »
« C'est fort quand même. Mais bon, euh... »
« Respire, chérie ! J'ai peur que tu finisses
par manquer d'air. Il ne te mordra pas. »
« Ouais ! », fais-je le regard en l'air. « Donc
lui, il joue le rôle de la femme, c'est ça ? Ça marche vraiment comme ça pour
eux. »
« Changeons de sujet, car je vois bien que tu es
mal à l'aise. On en discutera plus tard. Je ne t'imposerai pas sa présence si
vraiment, ça doit te rendre malade. »
Je le regarde sans rien dire. Je ne sais que
penser, d'ailleurs. Mais bon, il va bien falloir que je rencontre cet oncle si
je dois faire ma vie avec Miro.
J'avale une part de pizza pour m’ôter de la tête
les images qui y défilent. Miro rompt le silence en me demandant :
« Dis pourquoi as-tu un passeport alors que
jamais tu n'as voyagé ? »
« Oh ! Je l'ai fait comme ça pour décorer mon
portefeuille ! », fais-je en souriant. « J'rigole ! C'est maman qui prévoyait
un séjour au Cameroun avec son groupe de prière de l'église. Au final, elle a
dû renoncer à son voyage parce que je suis tombée malade à quelques jours du
départ. Voilà ! »
« Ok ! Maintenant, raconte-moi un truc que je ne
sais pas de toi. Je t'écoute. »
« Euh...je...je sais pas moi. J'ai rien de
particulier à raconter. Ma vie est vraiment banale, tu sais. J'ai toujours vécu
avec ma mère. Et voilà ! »
« Fais un effort, tu trouveras bien. »
Là, je cherche. Et je finis par lui dire :
« Mon père est un alcoolique repenti. Quand
j'étais à la maternelle, je pleurais beaucoup parce qu'il avait des accès de
colère chaque fois qu'il avait bu. Je devais à chaque fois le supplier à genoux
pour qu'il ne me crie pas dessus. J'avais 4 ou 5 ans à l'époque. Il faisait des
promesses que jamais il ne tenait. Ce n'est que lorsque je suis arrivée en CE2
qu'il s'est résolu à aider financièrement ma mère et à payer pour ma scolarité.
Ça été des périodes difficiles parce qu'il lui arrivait de boire au point d'en
oublier mon prénom ! »
« Oh ! Jamais je n'aurais imaginé que tu es
passé par des moments aussi difficiles ! Je suis désolé si je t'ai rappelé de
mauvais souvenirs ! »
« Ça va,», fais-je le regard vague. « J'ai
grandi. »
« Ok. Maintenant, dis-moi comment tu imagines
notre mariage. »
« Oh ! Je ne savais pas que j'avais dit oui ? Il
ne me semble pas avoir entendu de proposition. »
« Bien, disons que tu as déjà dit oui. Où se
mariera t-on et comment ? »
« Les pieds dans l'eau, au bord de mer à
Port-Gentil. Avec toutes mes copines vêtues de robe couleur écrue ; et mes
nièces en demoiselles d'honneur. »
« C'est gentil de vouloir me faire faire des
économies, mais je crois qu'une fois que tu auras voyagé, tu auras envie de te
marier les pieds dans l'eau à Port-Louis, à Zanzibar, ou à Cape Town, ma
chérie. »
« Je suis nulle en géographie, Miro, donc disons
qu'on se mariera quelque part les pieds dans l'eau. »
« Ok, ma belle. Mange ; ta pizza va refroidir. »
J'avale encore deux parts de pizzas et ma glace
au café. Puis nous levons le camp.
Dans la voiture je lui demande :
« Que ferai-je de mes journées pendant que
monsieur sera occupé à travailler ? »
« Oh ! T'as même pas besoin de poser la
question. Tu vas très vite trouver à t’occuper. Imagine-toi Port-Gentil en
100000 fois plus plus magique et tu comprendras pourquoi tout le monde rêve
d'aller New York. T'as vraiment pas de soucis à te faire. Il y a autant de
salles de cinémas là-bas qu'il y a de bars et de maquis à POG. Et puis, il y
aura ma sœur avec toi. Elle va se charger de te faire découvrir tout ce qu'il y
a de beau là-bas. »
« Je vois que monsieur a pensé à tout », fais-je
en souriant.
« Que ne ferais-je pas pour toi, Tania ! », me
rétorque t-il.
Nous continuons la route en silence. La ville
est belle cette nuit. Les axes principaux sont déjà décorés aux fanions
vert-jaune-bleu, à l'approche du 55ème anniversaire de l'indépendance du pays.
« Tu m'aideras à choisir un cadeau pour ma mère.
C'est son anniversaire mardi prochain. », fait Miro.
« Oh ! Celui de ma mère c'est 10 jours après.
Elle est née le 27 août. »
« Ok ! Alors je te laisse la charge de trouver
des cadeaux pour les deux. Je sature en termes d'idée ! », me dit il.
C'est sûr ! Sa mère doit déjà tout avoir.
« Et que veux-tu faire de spécial pour ta mère ?
», me demande t-il.
« C'est quelqu'un de très humble. Elle n'aime
pas trop ce qui superflu. Donc, je pense qu'un massage et des soins de beauté
lui feront plaisir. »
Il se contente de sourire et ne dit rien.
Quand nous arrivons à l’hôtel, nous prenons des
cartes de recharge pour nos phones et montons dans notre chambre. Pendant qu'il
tente de joindre son père, je me couche sur le lit, les yeux vers le plafond.
Je l'entends qui demande des nouvelles de ses amis Patrick et Alec.
Apparemment, le père lui dit qu'il n'a pas à s'en faire pour eux, car ils se
sont très vite acclimatés au pays.
Il raccroche et vient vers moi. Il me prend par
le bras et m’entraîne dans une danse lente, avec le silence autour de nous
comme musique. Il finit par m'embrasser sur le front, le nez, la joue. Je me
sens bien là. Quand il emprisonne mes lèvres dans un long baiser, j'aimerais
que le temps se fige maintenant et que demain ne vienne pas tout de suite.
« Nous allons jouer à un jeu. »
« Et en quoi consiste ton jeu. », lui dis-je.
« Je vais embrasser chaque parcelle de peau de
ton corps pour deviner quels en sont les points les plus érogènes. Et
interdiction de m'arrêter. Ensuite ce sera ton tour. »
« C'est de la triche ; j'ai bien droit à un
joker, non ! »
« Oui, juste un ! Viens là. »
Il me lève de terre et me dépose délicatement
sur le lit. Il commence sa prospection sur mon corps, me déshabillant au
passage. Et je sais que pour moi, c'est peine perdue, sitôt qu'il pose ses
lèvres dans mon cou, puis sur l'un de mes seins.
La nuit défile lentement et nous en arrivons à
faire l'amour. Je suis pleine d'appréhension, mais monsieur parvient à calmer
mon angoisse en se montrant très tendre et surtout patient.
Le matin venu, nous allons prendre le petit
déjeuner à La Librevilloise ensuite, il m'emmène faire des photos d'identité.
Puis, nous atterrissons dans un prêt-à-porter appartenant à une amie de sa
mère.
« Elle ne connaît pas mal de monde, ta mère ! »,
lui fais-je.
« Elle entretient très bien son carnet
d'adresses. », me répond-il.
Nous entrons et l'une des vendeuses se jette
littéralement sur nous, sitôt qu'elle voit Miro.
« Vous désirez, monsieur, madame ? »
Elle a dû se dire que c'est un client à ne pas
négliger ! Elles savent y faire dans ce magasin.
« J'attends à la caisse. Je ne fais
qu'accompagner ma fiancée. », répond Miro.
Je le regarde histoire de savoir ce que je suis
censé acheter.
« Il te faut des robes de soirée. Nous sommes
invités à dîner demain chez un couple d'amis de mes parents. Et pour
l'anniversaire de ma mère la semaine prochaine, il y aura un dîner. Tu vois le
genre ! »
« Ok ! », fais-je peu convaincue.
Je suis la vendeuse qui m'emmène dans un coin où
les robes sont plus chères les unes que les autres. J'ai mal à la tête
tellement il y a du choix. Puis, nous passons aux chaussures. Ensuite, elle me
propose de choisir un parfum et une pochette pour accompagner les robes.
Quand nous revenons à la caisse, je préfère me
boucher les oreilles pour ne pas entendre le montant de la facture.
« Allons dans une bijouterie chercher un bijou
pour ta mère. », me lance Miro.
Wèèèèèèèè ! Je suis seulement le mouvement.
Il est 14 heures quand nous rentrons à l’hôtel.
Dans la chambre, Miro me demande :
« J'ai remarqué que tu ne portes pas ta bague.
Celle que je t'ai achetée il y a tout juste 4 jours. »
« C'est que personne ne me l'a mise au doigt,
alors j'ai pensé qu'elle était juste là pour décorer », lui fais-je en
souriant.
Il se lève alors du canapé dans lequel il
s'était affalé et me demande où se trouve la bague. Je fouille mon sac de
voyage et en sors l'écrin rouge en forme de cœur dans lequel se trouve la
bague. Avec le plus grand sérieux, il pose un genou par terre et me prend la
main.
« Mademoiselle Tania Akendengue, tu seras ma
femme avant même de t'en rendre compte. », dit-il avec beaucoup d'assurance.
Là, il me glisse la bague au doigt et me baise
la main.
49-
~~~Pendant ce temps à Port-Gentil, mardi soir,
19h 30 chez la mère de Tania~~~
Comme je suis heureuse. Tania vient de m'appeler
de Libreville ; elle a obtenu son visa pour les USA. Je peux enfin respirer. Je
lève les mains au ciel et m'écrie :
« Merci mon Dieu. Tu es grand ! »
Le sourire angélique de la petite Jade me ramène
sur terre. La pauvre petite doit sûrement se dire que sa mamie Bernadette a perdu
la boule !
Non, tout va bien pour moi, ma tête aussi. C'est
juste que la pression que je me suis mise est quelque peu retombée. Encore
quelques nuits à prier fermement et à la fin du mois, ma fille sera dans
l'avion pour le USA. Je pourrai alors mieux me reposer.
C'est que depuis le jour où Dieu m'a permis le
bonheur d'avoir cette enfant, ma vie n'a tourné qu'autour d'elle. Je suis
heureuse d'avoir réussi la part des choses en l'emmenant jusqu’à la réussite de
son baccalauréat. Et dans quelques jours, elle sera fiancée. Qu'est-ce qu'une
maman pourrait demander de plus ?
Je suis là en train de repenser au passé quand
Pupuce arrive en trombe.
« Hey ! Qu'est-ce qui t'arrive ? Où vas-tu en
courant ainsi ? », lui fais-je.
« Je viens juste changer de paire de chaussures.
Les autres m'attendent dans la voiture. »
« C'est maintenant comme ça, Pupuce ? Tu rentres
et tu n'embrasses plus tes filles ? »
« Je suis pressée tante Bernadette. »,
répond-elle en envoyant des baisers à la volée aux jumelles.
Je préfère ne rien dire, me contentant de la
regarder partir. Depuis dimanche, j'ai dû la voir deux heures à la maison. Elle
rentre quand je dors et elle sort quand j'ai la tête ailleurs. C'est en coup de
vent qu'elle me fait savoir qu'effectivement, elle vit encore dans cette
maison. Je me demande ce que tout cela va donner. Je préfère ne pas parler, car
elle risque à nouveau de se refermer comme une huître. En la motivant et en
l'aidant à reprendre de l'estime de soi, je ne savais pas qu'on en arriverait à
ce niveau !
C'est à peine si elle n'a pas oublié comment je
m'appelle ! Bref, les petites sont désormais à ma charge. Je suppose que c'est
ainsi quand on est grand-mère. J'ai la chance que les petites ne pleurent pas
trop. Heureusement que Julien est là chaque nuit.
J'ose quand même me demander ce qu'il adviendra
de Pupuce une fois que ce jeune homme sera reparti dans son pays. Elle sait
qu'il est là pour ses congés. Elle m'a semblé avoir assez de bon sens lorsque
nous avons discuté ensemble. Je prie que leurs au revoir se passent bien.
Je suis là dans mes divagations quand Jileska
arrive.
« Bonjour tantine Bernadette ! On dit quoi ? »
« C'est à toi que je dois poser la question. Tu
sembles de très bonne humeur. »
« Oh ! Moi ça va. Depuis que j'ai eu ce bac-là,
je respire. », répond-elle.
« Ok. Et que comptes-tu faire maintenant ? Tu
vas à Masuku ? »
« Jamais ! Y a pas d'avenir là-bas. Je compte
aller me chercher du côté de Libreville quitte à changer de voie et faire de la
comptabilité à l’Institut de Gestion, pour ne pas subir une année blanche. »
« Bien ! Je suis heureuse que tu aies des
pistes. Et Sunita ? », lui fais-je.
« Oh ! Je pense que c'est la faculté de Lettres
de l'UOB qui l'attend. Mais pour l'instant, il y a autre chose qui l’intéresse
plus. »
« Je vois. », lui fais-je avant de lui proposer
à boire.
« Oh, laisse tantine. Je vais aller chercher mon
verre d'eau moi-même. Faut pas que ces deux petites disent que je suis venue
embêter leur grand-mère. »
Elle se lève du fauteuil dans lequel elle est
assise et va chercher un verre et une bouteille d'eau dans la cuisine. Elle
boit deux verres et me lance.
« Tantine, n'est-ce pas Pupuce vit maintenant
ici, non ? »
« Euh, oui. Pourquoi ? »
« Non, sinon je n'aime pas parler des histoires
des autres, mais c'est quand même une bonne chose qu'elle habite ici. »
« Pourquoi dis-tu cela, Jileska ? »
« Ah ! Je...bon en fait, je voulais juste que tu
dises à Pupuce que si elle fait bien les choses, tout le monde aura pour lui. »
Je la regarde intriguée, ne sachant pas où elle
veut en venir. Et elle comprend que je suis perdue.
« En fait, tu vas redresser Pupuce, parce
qu’elle a trop la bouche tordue. », me fait-elle.
« Comment ça ? Que veux-tu dire ? », lui
fais-je.
« Ah, je n'aime pas trop parler des choses des
autres moi-même j'ai des problèmes sans solutions, mais quand même il faut que
je te dise. Hier, j'étais dans la cuisine. Sunita et Pupuce étaient dans le
salon en train de se maquiller pour sortir. Elles racontaient aussi. Ce n'est
pas bon la manière dont Pupuce parle de Tania. Quand on aime sa sœur, on ne
parle pas comme ça. J'ai failli la baffer grave. Elle ose carrément dire que
Tania suit Miro à cause de son argent. Elle dit que s'il n'était pas le fils
d'un DG, sa sœur n'allait pas le regarder ! »
« Elle a dit ça ? », fais-je vraiment surprise.
« Elle a dit ça et beaucoup d'autres mauvaises
choses. Elle parle mal ! Ce n'est pas bon. Chacun a son moment dans la vie.
Moi-même j'étais là quand Tania a commencé avec Miro. On est resté là dans le
flou pendant 3 mois. Le type nous sortait sous le soleil ou sous la pluie, dans
les taxis que tu vois là. Quand on collait le wagon avec Tania, c'était là au
Copa Cabana que le gars l'invitait manger les brochettes. On était que debout
debout avec lui. Il mangeait le tchèp là avec nous là au grand-village là !
C'est quand il a vu que la fille de Bernadette tenait la route et que c'est une
vraie go, qu'il nous a montré la réalité. Quand il est venu la première fois
avec son chauffeur, la chercher pour l'emmener chez lui pour manger avec ses
parents, on était là Sharonna, Gaëlle et moi ; on a ri en disant qu'il avait
peut-être volé cette voiture. Pourquoi ? Parce que le gars s'habillait en
destroy et puis qu'il mangeait le pain aux haricots avec nous et buvait le
djino avec nous, là debout chez le malien. Maintenant, la petite go de la cité
rose là, vient se mettre dans une situation de concurrence avec sa sœur !!! »
« C'est vrai ce que tu me dis là !? », fais-je
étonner.
« Hummm ! Pardon, je ne veux pas trop parler, oh
! Mais la fille de Mr Mbeng dit qu'elle va montrer qu’elle aussi elle peut !
Mais qui a dit qu'elle ne peut pas ? », fait Jileska au comble de
l'incrédulité. « Je ne vais pas tarder avec elle si elle continue. Je la
démarre si elle dit encore des conneries ! C'est comme ça que le vampire
commence. »
« Ah, c'est vous-même là-bas. Tout ce que je
fais aujourd'hui, je le fais en espérant que chacun réussira tranquillement.
Elle rentre, elle sort, je m’occupe des enfants, parce que je me dis que cela
lui donne la chance de vivre une aventure heureuse. Si ça peut lui ouvrir les
portes du bonheur, tant mieux. Ce que je veux qu'elle comprenne et cela je le
lui répète tout le temps, c'est qu'il n'y a pas de fatalité. Ce n'est pas parce
qu'elle a eu une expérience malheureuse avec Peter que la vie s'arrête. Je lui
ai demandé de garder l'esprit positif parce qu'il le faut pour avancer.
J'espère qu'elle m'écoute, parce que tous les conseils que je lui donne sont
les mêmes que je donnais à Tania. »
« Ah ! J'espère que ça ira. Je n'aime pas le son
de sa voix quand elle commence à se plaindre et dire que sa chance a été
détournée... », fait Jileska avant de se rattraper très vite en mettant la main
devant la bouche comme si elle regrettait d'avoir trop parlé.
« Que viens-tu de dire Jileska ! Qu'a t-elle
dit. »
« Oh, tantine Bernadette ! je...je...Je n'ai
rien dit, pardon. »
« Parle, je t'écoute. Qu'a dit Pupuce ? »,
fais-je en insistant.
« En fait, j'ai voulu la baffer parce que je
l'ai entendu dire à Sunita que sa chance a été détournée quand elle était
enfant. »
« QU'EST-CE QUE TU ME RACONTES LA !? », fais-je
survoltée.
« Ah ! Gaëlle dit toujours qu'il faut que
j'apprenne à fermer ma bouche ! Je comprends pourquoi. », fait-elle.
« Excuse-moi d'avoir crier. Je ne m'attendais
pas à entendre ce genre de chose. Ça prouve bien que cette fille-là est sotte.
Comment peut-on raconter ce genre de bêtises. Sa chance a été détournée par qui
? »
« Ah, elle dit que c'est la grand-mère qui a
détourné sa chance quand elles étaient petites pour la donner à Tania. Elle dit
que c'est pour ça que Tania a toujours été la préférée de tout le monde dans la
famille. »
« Tania est la préférée de tout le monde parce
que je l'ai bien élevée et qu'elle écoute quand on lui parle. Je n'ai jamais
entendu des bêtises pareilles. Je te donne l'autorisation de la baffer la
prochaine fois qu'elle racontera ce genre de chose. Ça lui donnera un peu de
bon sens. »
« Sinon, je ne vais rien dire à Tania. Je ne
veux pas gâcher l'affaire entre les deux sœurs, oh ! »
« Je ne lui dirai rien non plus. Je prie tous
les soirs pour que la fin de ce mois arrive et que Pupuce prenne tranquillement
son avion pour la France. Au moins, on aura réussi quelque chose en la
soutenant et en la supportant pendant cette année scolaire. »
« Bien, je vais un peu rester pour discuter avec
ces deux petites là. De toute manière, je n'ai rien d’intéressant à faire avec
ma vie ! », fait-elle en prenant Ruby dans les bras.
« Tu réussiras dans la vie Jileska. Et tu sais
pourquoi ? », lui fais-je.
« Euh, pourquoi ? », demande-t-elle. Sceptique.
« Parce que tu arrives à prendre du recul et à
rire de toi-même. C'est bien de pouvoir à chaque fois se remettre en question.
Ça veut dire que ton cœur est bon. Dieu t'ouvrira les portes. », lui dis-je.
« Pardon, qu'Il les ouvre bien grand parce que
là, je me trouve dans une souricière. », conclut-elle.
Cette fille et son sens de l'humour ! Elle a
toujours le mot et l'attitude pour faire rire !
50-
~~~Pendant ce temps à Port-Gentil, mercredi après-midi,
15h 30 dans un magasin au carrefour Banco.~~~
Quand Miro m'a appelée hier soir à 20 heures, j'ai cru
qu'il me faisait une bonne blague en m'annonçant que je devais prendre en
charge la décoration de la grande salle de l’hôtel Le Méridien. Il fallait
l'entendre au téléphone : Gaëlle, tu ne peux pas dire non ! Allez !
Voilà comment, je me retrouve embarquée dans le secret des
préparatifs de la fête surprise que monsieur a décidé pour sa belle. Pour leurs
fiançailles. Heureusement que cette fille est la copine de mon cœur ! Parce que
là, j'ai quand même la pression. Il faut que tout soit beau, tout droit sorti
d'un rêve, comme ma chère Tania l'a toujours décrit.
« Vraiment, y a que la fille de Magloire Akendengué pour
nous faire tourner comme ça. Les autres auraient seulement dit blanc, rouge ou
bleu ! Non, miss Tania vient nous sortir ECRU et LIS DE VIN. Je sais que c'est
quoi la différence entre blanc cassé et champagne ? », me fait Sharonna alors
que l'on tourne depuis trois quart d'heures dans le magasin.
« Mais c'est toi la future ingénieur en pétrochimie. Les
couleurs, ça ne devrait pas te dépasser ! », lui fais-je
« Gaëlle, je te signale que moi je suis une scientifique
par défaut. C'est Tania et toi qui étiez chaudes pour la série scientifique. Si
mr Nguema n'était pas mon père, autrement, je ferais du Slam tranquillement !
Et j'écrirais des livres pour les enfants. »
« Tu peux devenir ingénieur, faire du théâtre et écrire
des livres pour les enfants, Sharonna. De nous toutes, tu as toujours été la
plus brillante. »
« Mais pas la plus futée, apparemment. C'est quoi écru ?
Je me perds là. C'est du beige, du kaki ou du champagne ? »
« Mélange le blanc et le champagne et tu auras la couleur
que tu cherches. », lui fais-je.
« C'est du Tania Akendengué tout craché. Elle a toujours
eu le chic de nous faire sortir des sentiers battus. »
« Oui, c'est bien elle. Avec ses histoires à dormir
debout, elle va bien nous manquées quand nous serons en Afrique du Sud ! »
« Comme tu dis, Gaëlle ! Tiens, on dirait que c'est bon !
Je pense qu'on a trouvé ce que l'on cherchait. Mais au fait, on l'a tourne
quand cette vidéo. Il faut que j'ai le temps d'aller chez la coiffeuse. C'est
quand même mon premier grand rôle devant la caméra ! », fait Sharonna en riant.
« Redescends sur terre, ma belle. Nous sommes à
Port-Gentil et les caméras ne sont là que pour filmer les fait divers ! », lui
dis-je en riant.
« Rabats-joie ! Cela ne va pas m'empêcher de faire le plus
bel effet à la caméra. Achète des mouchoirs parce que cette fille là, telle que
je la connais, va bien chialer une fois qu'elle aura vu ma prestation ! »
« J'y ai pensé, t'inquiète. Tout le monde connaît déjà les
mots de la copine. Elle sera que trop touchée ! », fais-je en riant.
« Ce n'est ce que tu dis petit là. C n'est pas tous les
jours que l'on a droit à une fête de fiançailles surprise. Miro m'a tuée quoi !
Comment quelqu'un peut autant surprendre les gens ! Tu te souviens comment je
le cassais avant là ! Avec ma bouche là, je disais à Tania que le gars est trop
louche et tout et que ça devait être un chanvré. Il ne m'inspirait pas du tout
confiance avec sa manière de s'habiller là comme un péquenaud et ses longs
cheveux frisés ! Heureusement qu'il les a coupés. »
« Hummm ! La fille de Nguéma là ! Tu as vu qu'il ne faut
jamais se fier aux apparences ! »
« Comme tu dis, Gaëlle. Nous voilà maintenant en train de
préparer la fête parce que le petit italien a le cœur chaviré par la beauté de
la petite gabonaise du château d'eau. C'est quand même une belle histoire ! Il
faut que je pense à l'écrire ! »
« Attends qu'ils aient un enfant pour écrire. L'histoire
sera plus belle encore. »
« La go, un gars aussi beau, tu lui fait 10 gosses sans
réfléchir ! »
« Sharonna ! Tu fais maintenant dans l’eugénisme ! »
« Euh ! Je dis juste qu'ils auront de très beaux enfants,
c'est tout ! »
« Je préfère entendre ça ! Viens passons à la caisse. »
Nous arrivons à la caisse avec tout ce que nous avons pu
trouvé comme ruban et tulles de couleur écru. Miro nous a chargé de la
décoration de la salle pour le repas de leurs fiançailles. Comme je suis
l'experte en la matière, je mets un point d'honneur à surprendre la plus cool
des filles que je connaisse. Je me souviens encore comme si c'était hier de ce
petit bout de femme qui du haut de ses jambes frêles, alors que nous avion 7
ans et étions toutes deux à l'école du Parc, est venue me sauver des griffes,
des cassics de l'école, qui voulaient me rosser, un samedi midi, sous le
soleil, après les cours. Tania est arrivée et a insulté tout le monde sans se
soucier du fait que ces redoublantes qui voulaient me filer la casse, avaient
10 ou 11 ans. Les autres sont parties en riant devant le culot de Tania. Elle
m'a donné la main pour me relever du sable où on m'avait jetée comme une
feuille de papier. Et depuis ce jour, nous sommes devenues amies. Et plus, car
mes étaient bien plus grandes que moi. C'est donc, chez Tania que j'allais
passer mes mercredis après-midi et mes samedis. Et aujourd'hui, on se prépare à
la voir attachée sa vie à celle de Miro. J'espère juste que nous serons là le
jour de leu mariage. Parce que là, dans quelques mois, chacune de nous sera
partie où l'appelle son avenir estudiantin.
Je m'envole en décembre pour Cape Town où étudie ma sœur
Charline. Elle va me céder son appartement en mai car elle rentre après son
Master en finance. Une nouvelle vie nous attend. Ça fait tout drôle de savoir
que l'on ne s'entendra plus qu'au téléphone.
En parlant de téléphone, Marc-Elise m'appelle.
« Oui, mademoiselle Ontala, je t'écoute. Donne-moi les
nouvelles. »
« Oh ! Mon oral de rattrapage s'est bien passé. Où
êtes-vous ? »
Aïe ! Que faire. Vite, j'invente quelque chose.
« Nous sommes du côté de l’hôpital Ntchenguè avec Gaëlle.
Nous avons accompagnées madame ma mère pour inspecter les travaux de
construction de leur maison. »
« Ok ! Faites-moi signe quand vous revenez à la
civilisation. Je veux des beignets brochettes ce soir. On dit quoi ? »
« Oh ! On dit que mes poches sont vides. Je vais voir avec
Sharonna ; On te phone à 18h. Bizz. »
« Pourquoi lui as-tu menti ? », me fait Sharonna alors que
j'ai raccroché.
« Je sais pas. Je voulais pas parler de tout ça pour
respecter le secret, quoi. Comme Miro ne nous l'a dit qu'à toi et moi, je me
suis dit que je n'avais pas à divulguer l'affaire. »
« Ok, ok ! Je comprends. Mais on fait comment avec
Jileska. Il va bien falloir la mettre dans la confidence. »
« Bien sûr qu'on lui dira. Mais d'abord, il faut que
j'achète du sparadrap pour lui cloué la bouche et lui passer l'envie d'aller
colporter la nouvelle. Une surprise est une surprise ! »
« Ok. On fera comme tu dis. Maintenant, il faut que
j'aille draguer monsieur Nguéma pour qu'il nous file le gain pour allez manger
ce soir. On va où ? Je suis fatigué de manger les brochette de Mame ! »
« Oh ! Comme c'est monsieur Nguéma qui paie, on va à
Mermoz, tranquillement et on s'enjaille. Ensuite, direction mon lit. Je veux
rattraper le sommeil que j'ai perdu en préparant ce bac. », fais-je en montant
dans le taxi que Sharonna a arrêté.
Nous arrivons chez moi, à la cité des médecins. Mon cher
médecin de papa, le docteur Azizet, est assis dans le salon et lit son journal
tranquillement. Il lève les yeux pour regarder qui arrive et se contente de
nous sourire.
« Bonjour docteur ? On dit quoi. Vous avez fuis vos
patients, on dirait. »
« Je suis en vacances, ma chère Sharonna. Si madame ma
femme n'était pas occupée à suivre les travaux de notre maison, j'aurais pris
ma pirogue pour aller me cacher un peu au village là-bas. »
« Oh ! Ça ira ! Le plus important c'est que vous arrêtiez
votre téléphone et appreniez à ne rien faire. »
« Tu parles ! Ils viennent de m'appeler là. Un cas
difficile vient de se présenter à la clinique. Je suis l'affaire à distance.
Mais je vais devoir y faire un tour avant la nuit. »
« Hummm ! Ça doit quand même vous faire quelque chose
qu'aucune de vos 5 filles n'aient envie de devenir Médecin ! »
« Les femmes de cette maison décident elle-même de leur
avenir, n'est ce pas Gaëlle Azizet ? », répond mon père.
« Oh ! Le boss. On ne va pas remettre cette discussion. Je
t'ai dit que je ferais un très mauvais médecin. J'ai toujours eu la phobie des
aiguilles et tu le sais ! »
« Tu vois, Sharonna ! Le débat est clôt »
Ayant dis cela, monsieur se remet à la lecture de son
journal et ma copine et moi nous allons dans ma chambre.
Le dessous de mon lit est ma caverne d'Ali Baba. J'en sors
cette grande valise dans laquelle je garde tout mon matériel.
« Voilà la couleur lis de vin. » Nous allons la marié à
l'écru. »
« Yo ! Mais c'est du rouge, alors. »
« Sharonna ! Oui c'est un peu ça. Ça fera beau, tu verras.
»
« Oh, pour ça, je te fais confiance. Et les pétales de
rose pour marquer le chemin, ils seront de quel couleur ?
« Tu verras. Je ne vais pas dévoiler tous mes secrets. »
« Donc, Tania Akendengué va bien pleurer. Je pense qu'on va
devoir racheter d'autres mouchoirs. »
« C'est sûr ! Au fait, j'ai trouvé la robe parfaite pour
toi quand tu vas chanter. J'étais hier à la fripe. Tu vas halluciner. »
« Montre-voir ! »
je vais mon placard et sort la robe en question. Sharonna
manque de s'évanouir en la voyant.
« T'es sûre que tu l'as eu aux fripes, celle-là ! Mais
elle est parfaite. Je vais en faire de l'effet, dedans. »
« J'ai tout de suite pensé à toi. Je vois que je ne me
suis pas trompée. Au fait, que comptes-tu chanter. »
« La chanson de chez chanson qui va faire dire à
mademoiselle Akendengué que vraiment, ces copines l'aiment trop ! »
« Yo ! Pardon ! De ne pas nous faire toutes pleurer parce
qu'alors, là, on ne ressemblera plus à rien. Heureusement que je ne ne maquille
jamais. Je ne risque pas de salir ma robe avec du mascara qui dégoulinera de
mes yeux. »
« En tout cas, vous verrez. Maintenant si l'émotion est
trop forte, vous pouvez aller vous cacher aux toilettes. »
« Hummm ! »
« Mais quand même, je pense que tu te trompe de voie. Tu
es une merveilleuse coordinatrice et décoratrice. Pourquoi aller t'emmerder en
chimie ! »
« Je veux travailler dans l’industrie cosmétique, je te
l'ai dit. Créer des produits de beauté, des parfums...etc...»
« Ok, j'ai compris. Ne m'oublie pas quand tu travailleras
pour l'Oréal ou Estée Lauder. »
« çà ne risque pas ! N'oublie pas que nous serons toutes
deux dans la même université à Cape town. »
« Oh, c'est vrai ! Enfin, sauf si monsieur Nguéma insiste
pour que je quitte l'Afrique du sud pour les USA. On est ensemble ! »
« Attends, j'appelle Julien pour qu'on s'arrange à faire
le petit film demain. Il faut qu'on boucle l'affaire avant que Tania revienne.
»
« Et elle rentre quand ? », me demande Sharonna.
« Oh, tantine Bernadette dit qu'ils seront peut-être là
samedi. »
« Ok. Appelle déjà Marc-Elise et Jileska pour leur dire
qu'on va ce soir au Mermoz. »
51-
~~~Pendant ce temps à Port-Gentil, vendredi
soir, 19h30 chez Sharonna, route Ondimba.~~~
« Non, Jileska, ne me dis pas que ça ne te fait
rien. », me fait Marc-Elise.
« C'est comment ! La fille Nazaire Ontala et
d'Elisabeth Ogoula ? C'est quoi l'affaire là, aujourd'hui ! »
« Mais, Jileska. Tania se fiance. Regarde-nous.
Regarde-nous. »
« Attend, laisse-moi me regarder. Ça va, Je vais
bien. Y a quoi même là où tu es maintenant en train de te torturer l'esprit là.
»
« Mais Jileska, elle est comme nous. C'est quoi
l'affaire là où elle a tout ce dont on rêve et nous nous sommes là comme si le
ciel ne nous connaît pas !? »
« Ah, pardon ! Lève-toi et arrête de faire
l'enfant. La copine se fiance, c'est sa chance. Pourquoi tu agios comme si tu
veux aller maintenant te jeter dans l'océan. »
« Oh ! On marche tous ensemble ! Regarde-moi,
regarde-toi ! Qu'est ce qui ne te va pas. »
« Yo ! Je ne savais pas qu'en t'annonçant la
nouvelle, tu allais me faire une crise ! Toi aussi, le bonheur de la frangine,
c'est le bonheur de nous toute ! »
« Mais dis-moi, moi avec qui ? »
« Pardon ! Tu es allée te perdre là-bas, pendant
3 ans avec Peter Malonga ! Pendant ce temps, y a des chances qui sont passées !
Ça ne veut pas dire que ta vie s'arrête aujourd'hui parce que la frangine se
fiance. C'est quoi ça ! »
« Oh ! C'est vrai que j'étais tellement folle
amoureuse de ce Malonga que j'en oubliais même de manger. Mais bon ! »
« Dis plutôt que c'est sa bite qui t'empêchait
de réfléchir correctement. Maintenant, lève-toi au lieu de faire l'imbécile. Je
ne sais pas si tu te crois à Akiéni ou dans le Fernan Vaz, mais à Port-Gentil,
les gens ne meurent pas de jalousie. »
« En fait, je suis contente pour elle. Mais des
fois aussi, j'aimerais être celle qui épate tout le monde. »
« Tu nous épatera un jour à ta manière ! Tu es
encore jeune Marc-Elise ! »
« Eh ! Qui te crois même !! »
« Pardon, arrête avec ta tête de caca et sortons
de ces toilettes. Les filles vont commencer à s'inquiéter. »
« Donc, samedi 22 août à 18h, notre copine aura
officiellement rompu avec le célibat !! » moi avec qui oh !
« Mademoiselle Ontala Marc-Elise, la ferme ;
sinon je te donne deux bonnes giffles et je te fous la tête dans le WC. »
« Pardon, faut pas me parler mal. J'arrive !
Mais parfois, j'ai l'impression d'être venue sur terre pour vous accompagner. »
« Parce que j'ai quoi. Je n'ai pas la beauté de
Gaëlle, ni l'intelligence de Sharonna, et encore moins la gentillesse de Tania.
Donc, tu arrête tes bêtises sinon je dis aux filles que tu nous fais une crise.
»
« C'est bon, c'est bon. Je me calme. »
Nous sortons des toilettes et je me dis que je
dois garder l’œil ouvert sur cette fille. Elle est capable d'aller encore nous
avaler des boites de médicaments pour mettre fin à sa vie. Y a quoi même !
L'autre se fiance, on danse et c'est tout !
Pardon, on va s’attraper des maux de tête à
force de jalousie tout ça pour récolter quoi !
Dieu m'en préserve. J'avance même si la
visibilité est nulle devant moi. J'ai envie de faire fête et je vais faire la
folle pendant cette fête là. Les gens qui me connaisse n'ont qu'à m’attraper
parce que lorsque je vais débouler sur la piste de danse là, personne ne va me
reconnaître. C'est comme ça du côté de Cocobeah et d'Esassa, oh ! Quand y a
moyen de faire la fête, on fait la fête.
Nous revenons dans le salon où Julien se repasse
le film du grand moment de Sharonna. Mademoiselle était habillée comme une
reine de beauté et a chanté un morceau hyper touchant pour souhaiter beaucoup
de bonheur à Tania et Miro. Bon, je dois l'avoue, j'ai versé une larme. Raison
pour laquelle j'ai suivi Marc-Elise dans la salle de bains. C'est maintenant au
tour de Gaëlle de se mettre en scène. Je suis épatée face à tout le vocabulaire
qu'emploie la copine pour ce moment d'anthologie.
Elle a vraiment le verbe pour faire chavirer les
cœurs. Pardon, je dois trouver quelque chose d'original à dire sinon, on va me
prendre pour une tarte à la crème.
C'est compliqué de marcher avec des intellos,
parce que si on ne suit pas, ça veut vraiment dire qu'on est sur terre pour
rien. Alors, je me mets à cogiter.
A côté de moi, j'observe Marc-Elise qui semble
avoir l'esprit ailleurs.
Quand nous sommes arrivées elle et moi il y a
deux heures, nous ne savions pas à quoi nous attendre. C'est Julien qui nous a
mis dans la confidence, car il le fallait pour son petit film qui sera projeté
le jour J, c'est à dire samedi 22 août. J'ai failli tomber à la renverse, au
comble de la joie. Je suis d'avis que le bonheur des autres, copines ou sœurs,
rejaillit forcément sur nous, comme une onction divine. Il me tarde de voir la
tête de Tania ce samedi quand une voiture viendra la chercher chez elle pour la
conduire au Méridien, dans cette salle où l'attendra tout le monde.
C'est vraiment beau l'amour ! Je suis loin de
savoir l'effet que ça fait, vu que le père de mon enfant, que j'ai eu à 14 ans
en classe de 5ème, n'a jamais plus donné de nouvelles après la naissance de la
petite. Et puis, je n'ai pas envie de parler de lui. Ensuite, il y a eu cet
imbécile de Pacheco, ce gars de Sété Cama dont j'étais folle amoureux en 3ème
et qui m'a plaquée aussi sec quand j'ai raté mon BECP. Il avait peur que mon
échec soit contagieux. Et puis, Aymar est arrivé. C'est mon ex de 1ère. Un
charmant menteur invétéré, qui s'est avéré être marié et père du coté de Moabi.
Oui, je sais, je n'avais pas à ce moment là les idées en place en allant
m'accoquiner avec un fonctionnaire. Mais bon, on apprend de ces erreurs. Et ce
que les miennes m'ont appris, c'est qu'il ne faut jamais courir pour faire
comme les autres et avancer en fonction de ce que font les autres. Comme ma
copine Gaëlle avait un gars vachement branché, jeune ingénieur production chez
Perenco Gabon, qui lui mangeait littéralement dans la main et la couvrait de
cadeaux alors même qu'elle ne demandait rien, je voulais la même chose. Voilà
comment je me suis retrouvée aux bras de mon sacré menteur de fonctionnaire qui
venait mendier jusqu'à l'argent du taxi chez moi. Bref, je ne vais donc pas me
mettre la pression comme Marc-Elise qui est prête à s'étouffer d'envie
tellement elle aimerait être à la place de Tania.
« Sinon, c'est mon tour, hein ! Gaëlle Azizet,
tu nous a déjà toutes tuées avec ton gros français. Une fois que tout le monde
t'auras entendu et vu Sharonna chanter, y aura plus d'applaudissements pour les
autres ! De grâce, laisse-moi aussi briller un peu. », fais-je en me levant.
« Mais la scène est à toi, ma chère ! », me fait
Gaëlle en me montrant le chemin jusque devant l'objectif de la caméra que
Julien tient en main.
Là, je ne me fait pas prier.
« Musique, s'il vous plaît ! », fais-je.
Sharonna appuie sur le lecteur CD et mon morceau
du moment se met à vibrer. Je me casse le corps sur El Pardon de Enrique
Iglesias, tellement je kiffe le morceau et tellement je ne comprends rien en
espagnol. J'ai bien bossé mon ballet étant donné que je danse sur cette musique
tous les jours. Au moins, on ne pourra pas dire que je n'ai pas la danse dans le
sang, car ça, c'est un talent que Dieu m'a donnée. Alors, je danse. Et à la fin
de ma prestation, j'envoie un baiser à la volée en souhaitant des années de
bonheur à la frangine de mon cœur.
« Huuuummm ! Pardon, on met cette séquence à la
fin ! Sinon, elle va voler la vedette à tout le monde. Fais doucement, toi
aussi Jileska ! Maintenant que tu as dansé comme ça, qu'est ce que je vais bien
pouvoir inventer ? », s'insurge Marc-Elise.
« A quel niveau de moquerie ? Pardon, oh ! C'est
à ton tour. C'est plus le moment de parler dans le vide là. On veut du concret.
», fais-je à la copine.
Elle est toute perdue là, ne sachant plus quoi
inventer. Alors, elle se lance sans filet et récite des vers de Shakespeare. Le
sonnet 18, dit-elle. C'est celui là qui lui est venue en tête quand elle a
appris la bonne nouvelle. Les littéraires, ont vraiment des cartouches
romantiques pour vous atteindre en plein cœur.
Tout le monde obligé d'applaudir tellement on ne
sait pas qui est ce Shakespeare (lol).
« Eh ! On sent les gens qui sont passés par
l'école mixte ! Sinon, l'école c'est bien quoi ! », fais-je aux amis.
« Hummm ! Pardon, l'école on en reparle en
janvier. Pas avant », conclut Gaëlle
52-
~~~Pendant ce temps à Port-Gentil, samedi, il est
3 heures du matin. Alec et Sunita sont à l'hotel, la Résidence Scott. ~~~
« You've really made this week unbelivable, Sunita
! C'est vraiment cool que vous soyez disponibles Pupuce et toi pour nous
accompagner. »
Ce type a quel problème ? J'ai beau lui dire et
lui faire comprendre que nous sommes à leur disposition, il n'arrête pas de me
remercier.
« Oh, je suis heureuse que Patrick et toi vous
soyez contents ! Jamais encore je ne me suis autant amusée »
« C'est
vrai ça ? Tu as pourtant l'air de connaître tous ces coins où nous sommes
passés ! »
« Oh, de nom, oui. Je n'ai pas vraiment l'habitude
de sortir tu sais. Je le fais maintenant plus librement parce que j'ai mon bac
en poche, voilà ! »
« Ok, ok ! Je tombe de sommeil. J'aurais pu te
ramener chez toi, tu sais. »
« Oh, j'aurais dormi dehors car mes parents sont
déjà au lit. », lui fais-je.
« Ah ! Bien. Moi je préfère ne pas déranger les
parents de Miro en rentrant si tard. Alors, nous allons dormir là et je te
ramène chez toi au petit matin. »
« Ça me va ! »
Le type se couche. Je vais dans la douche me
laver et me préparer pour cette nuit qui à tous les coups, sera chaude.
aujourd'hui, je lui fait la totale. Il criera mon nom comme pas la peine !
C'est sûr, je vais graver mon nom au fer rouge sur son cœur. Et il ne risque
pas de m'oublier.
C'est bête, quoi ! J'ai au tout début craqué
pour Patrick, parce qu'il est blanc et que j'aime la peau blanche. Mais comme
le type n'arrêtait pas de me dire qu'il est intéressé par ma sœur Jileska, j'ai
zappé. J'ai de suite tenté mon coup avec Alec, avant que quelqu’un d'autre ne
lui tombe dessus. Et, j'ai arrangé l'affaire à ma copine pour que Patrick, au
lieu d'aller mourir chez ma chère sœur Jileska, aille plutôt réchauffer le cœur
de ma combi du cœur, Pupuce. Jileska aura son tour quand elle arrêtera de me
faire chier avec ses leçons de moral à la con. Elle me saoule cette grande sœur
que Dieu m'a donnée. Et en plus, je lui en voudrais toute ma vie car elle m'a
vendu chez la vieille en lui disant qu'elle m'avait trouvé au lit avec
Paul-Hector, le mari de notre voisine. Ça fait quoi si je m'envoie en l'air avec
lui ! Elle sait comment je fais pour m'offrir tout ce dont j'ai besoin et
comment j'entretiens ma beauté ! Si elle a du mal à s’attraper des hommes
biens, mon problème est où ?
Après ça, maman m'en a tellement voulu, qu'elle
m'a privé de sortie pendant toute l'année scolaire et m'a obligée à la suivre
dans son église éveillée, tous les mercredis et tous les dimanches !
J'ai fait semblant d'être docile pendant tout ce
temps, histoire de gagner la confiance de la vieille. Mais je dois dire que
j'ai franchement détesté Jileska depuis ce moment-là.
Donc, quand j'ai approché Patrick et que le type
m'a demandé de lui arranger le coup avec ma chère Jileska, j'ai pris la
tangente et j'ai placé ma combi. C'est elle ma vraie sister. Je ne vois pas
pourquoi j'aurais agi autrement. Pupuce au moins me comprend. Et nous parlons
le même langage.
Donc, j'ai travaillé l'affaire pendant 2 jours
et Patrick a cédé face au portrait que je lui ai fait de Pupuce. Ma combi est
dix-mille fois plus intelligente que Jileska. Elle mérite d'être heureuse. Et,
elle a bien saisi la balle au bond.
Là, monsieur Patrick est sous le charme. Il avale
les mots de ma combi. Elle parle anglais pour le faire fondre. Elle a bossé son
affaire et ils ont concrétisé il y a deux nuits. Ils sont allés à l’hôtel Le
Parthenon et ils ont fait l'amour toute la nuit.Y a quoi même !
Ma combi a droit au bonheur. Je lui ai fait la
leçon car elle avait un peu d'appréhension. Comme elle n'avait fait l'amour
qu'une fois et était tombée enceinte dès le premier rapport sexuel, je l'ai
briffée en lui faisant des démonstrations. Je lui ai appris à faire une pipe ;
je lui ai appris à remuer son derrière, à mouner comme on dit chez nous. Par
dessus tout, je lui ai appris les mots qu'il faut prononcer et comment les murmurer
à l'oreille de Patrick.
Les travaux pratiques ont duré trois heures durant
lesquelles je l'ai fait répété pour m'assurer qu'elle fera passer à Patrick,
toute envie d'approcher cette imbécile qui me sert de grande sœur.
Le type a tellement aimé cette partie de jambes
en l'air, qu'il en a vite reprogrammée une cette nuit. Ils sont dans la chambre
juste à côté de la notre. C'est qui le meilleur des professeur ? C'est Sunita !
Et oui. Jileska peut aller se brosser !
Nous avons dîner au Ranch. En une semaine, nous
avons fait le tour des restaurants de la ville. Nous les avons emmenés danser
un peu partout : au Milenium, à la Villa, au Gallion... partout où l'on pouvait
danser et se frotter les uns aux autres. Du moins, tant que je suis avec Alec,
c'est bien là mon intention : Faire en sorte qu'il se souvienne longtemps de
cette gabonaise qu'il a rencontré à Port-Gentil. Et plus, pourquoi pas. J'ai là
en main, un ticket gagnant.
Coté sexe, pour Alec et moi, c'est un peu plus
lent. Il embrasse divinement bien. Ses mains font des merveilles quand elles en
viennent à me caresser. Mais, il n'y a encore rien eu. En fait, je la joue
slow, histoire qu'il pense que vraiment, la petite Sunita, personne ne la
touche aussi facilement. Mais, cette nuit, il y a le feu entre mes cuisses et
j'ai besoin d'un pompier pour l'éteindre. Monsieur va devoir me montrer de quoi
ce beau corps musclé est capable. Et moi en retour, je vais lui faire voir que
le feu qu'il y a là, entre mes jambes, avait réellement besoin de son sexe comme
arrosoir
N'en déplaise aux personnes qui ne veulent voir
en moi que la petite sœur de cette rigolote de Jileska ! D'ailleurs, il faut
que je la sorte de mon vocabulaire quand je suis avec ce bel homme qui a tout
pour m'envoyer au septième ciel.
Je me suis parfumée avec Libertine, de Vivienne
Westwood. C'est fort, c'est sensuel. Cela appelle à des nuits félines. Et comme
je n'ai pas l'intention de dormir avant que ce type ait fait de moi sa chienne,
tout le monde est d'accord.
J'enfile juste le tee-shirt blanc en col V que
j'avais dans mon sac à main. Je mets un nouveau string. Je n'oublie pas de
mettre dans la main, 2 préservatifs. Je veux avoir la fièvre cette nuit.
Arrêtez-moi si vous pouvez !
J'arrive toute de sensualité vêtue. Je me
saisis de mon téléphone posé sur la table et mets de la musique douce.
« Coucou
beau mec, je ne t'ai pas trop fait attendre, j'espère ? »
Il ne répond pas. La chambre est plongée dans
une semi-pénombre. J'avance à pas de loup et arrive bientôt sur le lit.
J'appelle tout doucement :
« Alec,
j'ai envie de toi cette nuit. »
Rien. Pas de réaction.
Je continue de murmurer des mots doux à son
oreille
«
Sweety, are you listinning to me or what ? »
Il ne réagit pas. Merde alors ! Il ne va pas me
dire qu'il s'est endormi !
Je monte sur lui à califourchon, histoire de le
secouer.
« Chéri, tu m'entends ? »
Il se réveille en sursaut comme s'il sortait
d'un mauvais rêve. Il se hisse vers le coin du lit et allume la veilleuse.
« What
are you doing, Sunita ? Je t'ai dit qu'il n y aura pas de sexe entre nous. Je
te l'ai encore répété cet après-midi : je n'ai pas l'intention de griller
toutes mes chances de me mettre avec Gaëlle. C'est elle que je veux. Je pensais
qu'on était d'accord et que tu l'avais compris. »
YO !
Donc, je suis là toute propre, toute belle !
Prête pour me faire secouer. Et le type-ci pense que je vais céder ma place à
quelqu'un d'autre ! Mais il même comment ?
Je me mets alors à pleurer.
53-
Il est 15 h ce samedi. L'avion qui nous ramène
Miro et moi, vient d’atterrir à Port-Gentil. J'ai encore la tête dans les
nuages tellement notre séjour à Libreville a été merveilleux. J'attends dans la
voiture en pianotant sur mon téléphone tandis que Miro est reparti rapidement
s'acheter des journaux.
Il revient et s'installe derrière le volant.
« J'ai l'impression que Port-Gentil m'attendait.
Je viens de rater cinq coups de fils. Je rappellerai tout le monde plus tard.
« Ok. Moi je n'ai pas remis mon téléphone en
marche. En quatre jours, je pense que la mémoire doit être saturée de messages.
«
« Ça, tu peux en être sûre. Je parie que les
filles ont du t'envoyer des messages pour te raconter leurs moindres faits et
gestes ! »
« On se moque pas des copines ! Elles m'ont trop
manquée ! »
« Et tu comptes sortir avec elles ce soir. »
« Non, je vais plutôt rester à la maison avec
maman et les petites. »
« d'accord. Je te dépose, alors. J'ai un souci à
régler. Je ne sais pas encore de quoi il en retourne. »
« Pourtant, tu supposes que c'est un souci. »
« Oui C'est Alec. Il m'assomme de message depuis
ce matin. Je t'en dirais plus quand j'en saurais plus. »
« D'accord. J'ai hâte d'être à la maison. Mais en
même temps, je serais volontiers rester dans les bras d'un certain, dont je
suis folle amoureuse. »
« Oh ! Et qui t'oblige à l’abandonner ? »
« Oh ! C'est juste qu'il ne faut pas abuser des
bonnes choses, voilà tout. »
« Tania Akendengué, t'es vraiment une coquine. »,
fait-il en souriant.
Pendant le trajet jusque chez moi, son téléphone
sonne 3 fois.
« C'est encore Alec. Il s'impatiente. »
« Dis donc, il a vachement de choses à te raconter
ton ami ! »
« Je le sens un peu tendu. Je ferais mieux
d'arriver rapidement. »
il se gare devant le portail et m'aide à porter
les deux valises que j'ai ramener. Dans le salon, nous trouvons maman en conversation
avec grand-mère et son amie Georgeline. Elles sont heureuses de nous voir
arriver et nous ouvrent leur bras.
Samba. Samba. Samba.
Oui, nous sommes les bienvenus à Port-gentil et
dans cette maison en particuliers.
« Comment vont les plus belles dames de
Port-gentil ? », fait Miro en souriant.
« Mon cher, tu n'as plus besoin de nous flatter.
Tu nous as déjà voler le cœur notre fille ! », lui fait maman.
Il se contente de sourire et prend congé en
promettant de passer dans la soirée. Il s'en va après avoir embrassé Jade et
Ruby.
Je m'assoie et prend ces deux petites sur mes
genoux. Elles ont vachement grandi. Dans quelques jours, elles auront 3 mois.
Le temps a passé tellement vite ! Je remarque que Jade est plus en chair que
Ruby qui semble plus fine.
« Cette fille veut devenir mannequin ! », fais-je
tout haut.
« Je pense plutôt qu'elle veut devenir
journaliste. Elle n dort pas autant que sa sœur. Mais elle est bavarde ! »
« Oh ! Les longues nuit à chatter avec elles vont
bientôt commencer. Je leur ai acheté des robes. Mais j'ai pris du 6 mois pour
être sûr que ça leur irait. »
« Tania n'awan'issè (Tania et ses enfants) ! »,
fait tendrement grand-mère.
Je lève le regard vers elle pour lui demander
pourquoi elle le dit. Elle me répond que ça fait une semaine qu'elle n'a pas vu
Pupuce. Pourtant, elle vient chez nous tous les matins.
« heureusement qu'elle n'allaite pas les enfants,
parce que je crois qu'elle les a traverser ? »
« Qu'est ce que ça veut dire ? », fais-je étonnée.
C'est Georgeline qui m'explique que Pupuce a
repris sa vie sexuelle.
« Ah, d'accord », fais-je sans trop envie d'avoir
les détails.
Elles m'observent attendant que je leur raconte
mon séjour à Libreville. Les curieuses !
« Vous êtes pires que mes copines, les vieilles !
Y a des choses qui sont privées. »
« Raconte nous au moins quelques trucs. Où
étais-tu ? Où avez-vous mangé ? Qui avez-vous vu ? »
je leur raconte comment Miro m'a fait tourner la
ville et fait découvrir des endroits que je ne connaissais pas. Je leur raconte
les restaurants dans lesquels nous sommes allés et surtout, les trois repas
chez des amis de ses parents.
« Oh ! Donc il t'a présentée à tout le monde
là-bas ! », s'étonne grand-mère.
« Bien, il m’emmenait dire bonjour et après nous
étions invités à venir dîner. C'était cool. Les gens étaient très gentils avec
moi. »
« C'est une bonne chose », conclut maman.
Je continue à jour avec les petites quelques
minutes dans le salon. Puis, je les soulève pour les emmener dans la chambre.
Je les pose délicatement sur le lit et m'assure qu'elles ne risquent rien.
J'entreprends alors de défaire mes bagages. Comme j'ai acheter plusieurs robes,
j'hésite à toutes les mettre dans mon placard. Je préfère aller les ranger dans
la chambre de maman. Dans ma chambre, je ne garde que les vêtements du
quotidien. Quand j'ouvre mon placard, je me rends compte qu'il a été fouillé.
Je l'avais laissé en ordre en partant, pourtant ! Je ne m'en inquiète pas plus.
A partager la chambre avec Pupuce, il va sans dire qu'elle fouille mes affaires
de temps en temps. Je continue de ranger en musique. Je danse en chantant à
tue-tête. Je prends le sac de voyage dans lequel il y a tous les cadeaux que je
réserve à maman et aux copines, et je le glisse sous le lit en espérant que
Pupuce ne le découvre pas. Pour elle, j'ai pris une robe e soirée couleur bleue
oranger, sa préférée. J'espère qu'elle appréciera.