53-

Write by Lilly Rose AGNOURET

 

1-

 

"Mon Dieu, mon Dieu! Que vais-je devenir? Enceinte!!!!!!!!"

"Sache que tu es morte. Parce que Kaba ne va pas te rater. Une fois qu'elle apprendra la nouvelle, elle prendra soit son couteau de cuisine pour t'éventrer soit son balai pour te rosser. Dans les deux cas, elle te foutra à la porte de sa maison."

"Snif! Une fois qu'elle apprendra la nouvelle, elle prendra soit son couteau de cuisine pour t'éventrer soit son balai pour te rosser."

"De rien, ma chère Pupuce. Tu savais les conséquences, non! Nous sommes allées là-bas pour nous amuser, faire les folles sur la piste de danse. Pas pour aller coucher, ma belle!"

"Snif! Je ...je...j'étais loin de me douter que tout cela finirait ainsi. Je...Que vais-je devenir."

"Une fois morte, plus de souci. Tu as au ciel ou en enfer. Et l'affaire est réglée."

"Merci pour ton soutien, Tania."

"Y a pas de quoi. Si jamais Kaba t'épargne, tu auras appris une leçon : on ne couche pas sans capote à moins d'être complètement conne! On nous l'a appris en classe, non?"

"Je... C'est facile à dire, Hein! Je voudrais t'y voir toi dans le feu de l'action, penser à une capote à ce moment-là!"

"Sois pas bête Pupuce! Nous sommes de grande fille! Ne me dis pas qu'à 17 ans, tu es incapable de prononcer le mot CAPOTE! T'as eu honte de quoi???"

"De rien... Tu peux pas comprendre. Je pensais pourtant que tu étais ma frangine... Mais je constate que je n'ai plus personne sur qui compter."

"Ma go, le bac c'est là, à la fin de l'année. Nous n'avons plus que six mois à tenir. Ensuite, on s'envole pour l'Afrique du Sud, pour la liberté. Plus de Kaba ni de papa Jimmy pour nous emmerder. Et au lieu d'être patiente, tout ce que tu as trouvé d'intéressant à faire, c'est d'aller écarter tes jambes sur le banc d'une salle de classe et laisser Peter éjaculer dans ton vagin!"

"Mais... je... je."

"Tu bégayais aussi comme ça quand il t'a proposé de le suivre dans cette salle de classe! Pupuce, nous avons fait le mur pour aller danser, tu comprends. Nous sommes allées là-bas pour DANSER. Pas pour coucher. Et surtout pas sans capote. Et surtout pas avec un imbécile, même trop mignon, qui couche avec toutes les fille qui lui tombent dans les bras."

"C'est mon mec, Tania."

"Et cela ne l'empêche pas de se taper d'autre fille. Je te signale qu'une fois la fête finie, il a atterri dans le lit de Roseline. Elle l'a raconté à tout le monde. C'est ça le type dont tu es amoureuse. Que dire? C'est ça le type dont tu es enceinte."

"Merci pour ton soutien!"

"Oh, tu ne me remercieras jamais assez. Bien, je te laisse. Il faut que j'aille à la morgue pour commander ton cercueil, ma belle. Car lorsque Kaba va te tomber dessus, il ne restera plus que des miettes de toi. Je les mettrai dans ce cercueil. Et t'inquiète, tu auras un bel enterrement. Salut, ma vieille.

"Tania!"

"Quoi, Tania? Il faut bien que j'aille réfléchir à une solution pour te sortir de là, non!"

"De quoi parles-tu?"

"Je ne sais pas, moi. Là, j'ai l'esprit un peu embrouillé. Mais la nuit porte conseil, dit-on. Alors, à demain Pupuce."

 

La nuit est tombée depuis longtemps au moment où j'abandonne Pupuce dans sa chambre. Elle a décidé d'y rester enfermée jusqu'au jugement dernier. C'est mieux pour elle, car lorsque Kaba apprendra la nouvelle, l'Apocalypse aura lieu au même moment.

Qui est Kaba? C'est notre mère. En fait, en regardant un dessin animé il y a quelques années, le nom de la sorcière dans le film nous a marqué. Cette sorcière se nomme Karaba. Nous avons tout de suite pensé à celle qui nous a mise au monde. Mais pour ne pas qu'elle se sente insulté en apprenant l'affaire, nous avons coupé le nom et l'appelons simplement Kaba. Pourquoi ? Parce qu'elle ressemble à une lionne toujours prête à bondir sur sa proie. Et parce que tout le monde dans la famille et dans le quartier l'a craint plus que tout. Donc, voilà, on l'appelle Kaba au lieu de Karaba. Bref, toute une histoire.

J'ai dit que c'est notre mère, oui. Mais elle ne m'a pas élevée. Je suis Tania. Ma sœur Pupuce et moi, sommes jumelles. Nous sommes nées en mi-mai, il y a 18 ans maintenant. À l'annonce de cette grossesse, Nzigou Etienne, notre géniteur, a pris la poudre d'escampette et est allé se terrer du côté de Mbigou, dans le sud du Gabon. C'est ainsi que notre mère, qui en réalité se prénomme Agnès, s'est retrouvée toute seule, sans travail, sans argent, avec une grossesse gémellaire de 5 mois.

Est alors arrivé dans sa vie, le sauveur, du nom de Malgloire Akendengue. Il a payé la layette et tous les frais médicaux pour le suivi de la grossesse. Et à notre naissance, il nous a officiellement reconnues à la mairie du 2nd arrondissement de Port-Gentil.

Je suis Tania Akendengue. Pupuce se nomme Marjorie Akendengue. Mais comme le sort s'acharnait encore, madame notre mère a abandonné, monsieur notre très cher père, car il la violentait sérieusement, au point de lui casser le bras, après avoir pris une cuite, un samedi, au bar du coin. Son bras cassé et son œil au beurre noir, Kaba a quitté monsieur Magloire Akendengue et a cogné, à 3h du matin chez sa sœur Bernadette, avec une valise et deux bébés de 3 mois dans les bras. C'est là que ma vie devait commencer. Pour le meilleur.

Quand 3 mois plus tard, Jimmy Mbeng est arrivé dans la vie de Kaba, elle lui a fait chanté la sérénade un an durant. Elle ne voulait surtout pas revivre les mêmes histoires qu'avant. Alors, elle a fait traîner l'affaire en longueur avant de lui dire oui. Nous avions 1 an et demi Pupuce et moi, quand la famille Mbeng est descendue de l'estuaire pour venir enlever notre mère à sa vie de célibat. Elle s'est mariée à la coutume, à la mairie et à l'église. Alors, elle a fait traîner l'affaire en longueur avant de lui dire oui. Et est très strict dans sa vie au quotidien et dans sa manière de nous élever.

Et moi alors?

Avant que le mariage de Kaba ne soit célébrer, ma tante Bernadette, qui en fait s'occupait de nous plus que ne le faisait Kaba, s'est mise à genoux devant sa sœur. Une nuit durant, elle l'a suppliée de lui laisser un enfant. Kaba n'a pas joué la difficile: elle a dit oui. Elle m'a alors donnée à sa sœur, qui malheureusement était stérile. C'est ainsi que la tante Bernadette, est devenue ma man à moi; et Kaba est restée celle de Pupuce.

Et je ne m'en porte pas plus mal; car lorsque Kaba rugit, pupuce atterri toujours dans la maison de Bernadette.

Donc pour moi, maman c'est Bernadette. Et Papa, c'est le cher monsieur Akendengue, qui malgré toute la boisson qu'il ingère chaque jour, joue son rôle de paternel. Il paie notre scolarité et il nous donne chaque mois 35mille francs d'argent de poche, pour que nous puissions payer le taxi pour se rendre au lycée.

Ma sœur et moi sommes en classe de terminale au lycée Raponda Walker. La scolarité lui coûte plutôt cher, mais comme nous sommes ses uniques enfants, il fait de son mieux. Monsieur notre papa est magasinier dans une compagnie pétrolière. Il est célibataire, par la force des choses: monsieur cogne dur sur les femmes lorsqu'il est ivre. Qui peut supporter un tel homme !

 

Un jour, quand nous avions 10 ans, nous étions passées lui dire bonjour. Ses parents étaient là dans la cour. Il y avait réunion de famille parce que trop c'était trop, aux dires de nos tantes paternelles. Il fallait trouver une solution à la situation de Magloire Akendengue. Beaucoup d'idées ont fusé. Et quelqu'un a décidé qu'il devait se faire initier au rite OKUYI. Yo!

Pupuce et moi nous avons ri ; pourtant nous n'avions que 10 ans! Lui, se faire initier??? Nous pensions déjà, avec notre espièglerie, que se serait Okouyi qui aurait peur de notre père et qui s'enfuirait en le voyant.

Cela n'a pas raté. Les provisions ont été acheté, le passage pour Lambaréné, payé. Le vendredi matin au port d'embarquement, la famille à attendu notre père en vain. Il avait été hospitalisé la veille à l'hôpital Paul Igamba. Quelqu'un l'avait ramassé en route, en état d'ébriété avancé.

C'est notre père. Nous demandons tous les jours à Kaba de prier pour que Dieu jeté un regard compatissant sur lui et le remette sur de bons rails. Mais Kaba, n'en a plus rien à foutre de notre paternel et elle nous répond immanquablement : ce soûlard, même en enfer, il n'en voudrait pas, car il est capable d'éteindre les flammes par son haleine avinée.

Yo!

Que dire après ça!?


 

2-

Je vis avec ma mère au château d'eau, juste en face de l'église St Paul. Ma mère est instructrice dans une école primaire privée. Elle a élevé deux enfants : mon frère Julien et moi. Julien est l'enfant laissé par Berthe, la sœur cadette de maman. Il avait 4 ans quand sa mère est morte. Il en a 14 aujourd'hui. Nous sommes très proches lui et moi. Pour rien au monde, je n'aurais quitté ma mère pour retourner vivre avec Kaba. Cela même si quand j'ai eu 12 ans, les gens de la famille éloignée, ont voulu mettre leurs bouches dans nos histoires. Ils pensaient foutre le désordre entre nous et créer la discorde en me racontant tout : ma venue au monde, comment Kaba m'avait abandonnée à sa sœur et patati et patata. Ils s'attendaient à ce que je me révolte et devienne impolie envers ma mère. Mais ça n'a pas été le cas. Je savais que même si je n'étais pas sortie de son ventre, cette femme m'aimait plus que tout. Je l'aime bien quand elle est dans ses bons jours ;

Ma relation avec Kaba? Elle est celle d'une fille envers sa tante. Je l'aime bien quand elle est dans ses bons jours ; je la fuis quand elle pète les plombs.

Cette femme est dingue. Quand elle se fâche, tout le quartier peut brûler. Et vous voulez que moi Tania, je dise que c'est ma mère! Autant me casser une jambe.

Chaque fois que je vais passer la journée chez elle, et cela, depuis que je suis petite, elle me rappelle systématiquement que je dois rentrer chez moi. Bref...

 

Kaba et son époux, que nous appelons papa Jimmy, vivent dans la Cité Rose. Il travaille à la maintenance chez Total Gabon. Une fois mariés, ils ont aligné 7 gosses. Ne me demandez pas comment ils s'y sont pris. La dernière, Angelline, a tout juste 3 ans. Elle est belle comme un ange. Elle est venue clore le ballet des visites à la maternité. Les autres, six garçons. Heureusement pour Kaba, ils sont brillants à l'école. C'est ainsi que le premier, Eric, a eu le bac à 16 ans, un an avant nous ses grandes sœurs. Monsieur est en Afrique du Sud en ce moment. Il nous envoie des Whatsapp pour nous raconter sa vie. Tout pour nous rendre dingues et nous donner la volonté de bien faire et de se casser enfin de Port-Gentil.

Avec les moyens de ma mère, qui est célibataire, je ne sais pas où je vais atterrir. Mais je prie Dieu pour aller à l'étranger. Comme ça, je ne vais pas rester derrière alors que les autres auront des choses à raconter tant ils auront visité le monde. Je travaille mon père depuis la 3ème. Il sait que je ne vais pas le lâcher. Je veux aller à l'étranger. Au Ghana ou en Afrique du Sud. Et comme il est encore en vie et qu'il ne boit pas complètement son salaire en fin de mois, il va contribuer à ma réussite. Je ne suis pas Tania si je n'arrive pas à Pretoria.

Le plan, c'est que Pupuce et moi, nous prenions le même avion à la fin de l'année. Mais là... Cette fille est même comment!? De nous deux, elle est la plus sage. Moi, la plus folle. Kaba se réjouit depuis des années du fait que j'ai atterri dans les bras de sa sœur Bernadette. Elle m'aurait, selon ses dires, casser les deux jambes depuis bien longtemps, si j'habitais chez elle. Elle ne se prive pas pour m'insulter de long en large chaque fois qu'elle me rencontre en route, bras dessus bras dessous avec mon mec, Miro. C'est un beau métis de chez métis. Avec des fossettes et des cheveux frisés. Il ressemble à cet acteur qui joue dans la série Les experts. Il va au lycée français. Son père, italien, est le directeur d'une société de la place. Sa mère est congolaise ; ne me demandez pas où nous nous sommes rencontrés, car je serais obligée de vous raconter mes coups fourrés.

Bref...je vais en boîte de nuit depuis que j'ai 14 ans. C'est comme ça! Ma mère n'en sais rien. Je fais le mur, une fois par mois depuis que j'ai 14 ans. J'aime la musique.

Depuis que je suis toute petite, j'ai cet instinct de danseuse. Elle m'aurait, selon ses dires, casser les deux jambes depuis bien longtemps, si j'habitais chez elle. Mais de qui tient-elle le don de la danse ?

C'était toujours moi la reine sur la piste. Les tontons tournaient autour de moi et m'encourageaient en me mettant des billets de 500 cfa sur le visage. Autant dire que j'en ai gagné des compétitions de danse quand j'allais en vacances au village chez la grand-mère Ziza.

Donc, c'est ainsi qu'il y a deux ans, en arrivant en boite de nuit, je me fais alpaguer par ce type aux yeux vert, beau comme un dieu grec. Qui allait laisser l'affaire ! Malgré mes 16 ans, j'ai dit au type : à partir d'aujourd'hui, c'est ton pied mon pied. Je lui colle aux basques comme un chewgum. Lui et moi c'est pour la vie. Et je ne blague pas. Je claque la fille qui ose s'approcher de lui. Chacun son chacun.

Je ne sais pas comment on fera une fois que j'aurai le bac, mais pour l'instant, nous sommes bien ensemble. Et j'ai mis ma mère Bernadette dans la confidence. Et elle m'a simplement répondu : "n'oublie pas les capotes; il serait bête que tu tombes enceinte maintenant!"

Et il fallait que cette zozote que j'ai comme sœur, aille se vautrer avec son imbécile de Peter! Et mademoiselle a oublié la capote. Comment Est-ce possible d'être aussi....huuuuuuummmm! Je suis tellement énervée que j'ai envie de hurler.

C'était la première fois, la toute première fois que j'emmenais ma sœur dans mes coups fourrés. Elle voulait danser dans les bras du fameux Peter. Je l'ai invité à venir passer le weekend à la maison. Sitôt que madame Bernadette, ma mère, s'est endormie, nous avons pris la poudre d'escampette. J'ai répété les règles d'or à ma sœur :

1- On flirt, uniquement.

2- On ne couche pas.

3- Si jamais, il insiste, on dit qu'on a nos règles.

4- S'il insiste plus, on lance des appels de phare à sa copine ou à sa grande sœur.

5- s'il insiste malgré tout, on le plaque sur la piste de danse.

Qu'est-ce qu'elle n'a pas compris dans tout le vocabulaire que je me suis évertuée à lui sortir??? elle a réussi à se préserver jusque-là. Madame est la première de la classe. Elle a toujours marché droit. Même les petits trucs que je fais en cachette, elle a toujours eu peur d'essayer. Et là...elle décide de perdre sa virginité dans une salle de classe !

Je suis effondrée. Je sais que quand Kaba apprendra l'affaire, elle viendra me couper le cou. Elle me l'a déjà dit : "Tu essaies d'entraîner ma fille dans tes conneries et tu ne me reconnaîtras pas, car toi et moi, nous allons porter des shorts et nous battre là, dans cette cour. "Tu essaies d'entraîner ma fille dans tes conneries et tu ne me reconnaîtras pas, car toi et moi, nous allons porter des shorts et nous battre là, dans cette cour. C'est vous dire combien de personnes assisteront au spectacle.

En fait, j'ai dit à Pupuce que je vais commander son cercueil, mais c'est un cercueil xxl qu'il faut, car Kaba va nous enterrer toutes les deux.

 

Qui va dormir cette nuit! Après une telle nouvelle, même si j'avale toute une bouteille de black Jack, l'affaire va rester là, pendue en plein sur mon visage. Comment ma sœur a pu être aussi bête ? Une fille aussi brillante ! Avec tous les gars de son niveau qui sont là à lui tourner autour, elle préfère aller sortir avec ce cancre de Peter qui repasse le bac pour la 4ème fois? Il a la côte au lycée. Les filles lui tombent dans les bras. Il n'a pas besoin de faire d'effort. Le gars est beau, tellement beau, que... pardon, je ne l'ai même pas regardé ! Un rigolo complet. Monsieur pense que parce qu'il est le meilleur basketteur de la ville, il a le droit de faire tomber les petites comme il veut. Il va avoir 20 ans, et tout ce qui l'intéresse, c'est de battre le record de filles passées dans son lit. Et c'est d'un type comme ça que ma sœur est tombée amoureuse ! Comme quoi, LES CONTRAIRES S'ATTIRENT VRAIMENT!

Je suis dépassée.

Comment va t-on se sortir de ce guêpier ?


 

3-

Je tourne en rond dans ma chambre. Mon frère Julien dort déjà. Je me glisse dans sa chambre et m'assois sur son lit. Je le réveille.

"Eh, capitaine, j'ai besoin de te parler."

"Je dors, repasse demain matin.

"Please, fais pas le beau! Le moment est mal choisi."

"Quoi encore. S'il te plaît, j'ai pas envie d'entendre tes bêtises au sujet de ton gars, pardon."

"C'est plus grave que ça. C'est une question de mort ou de mort."

"En fait, c'est déjà mort, et tu espères qu'une parole de moi ramènera la situation à la vie, n'est-ce pas."

"Tu comprends toujours tout, frangin. C'est pour ça que je t'aime."

"Eh Tania, je te signale que je n'ai que 14 ans. Je ne sais encore rien sur la vie."

"A d'autres, capitaine. Écoute-moi au moins."

"Fais court, s'il te plaît. Le sommeil t'attend."

"Voilà, la frangine est enceinte."

"Qui, toi! Oh, c'est pas grave! Le boss de ton gars est DG. Il s'occupera de tout. Alors, laisse-moi dormir."

"Mais, non, patate! Il s'agit pas de moi. C'est pupuce."

"Oh, oh, oh, oh! Laisse-moi d'abord faire mes prières. Avant de te répondre. Agnambiè*, c'est vrai ce que tu dis là?"

"Est ce que j'ai le visage de quelqu'un qui cherche à blaguer! L'heure est grave."

"Attends frangine, je vais compter ce qu'il y a dans ma tirelire et je cours de ce pas à CASEPGA acheter un cercueil. Pupuce et toi, considérez que vous êtes mortes. Quand Kaba va apprendre sa, soit elle vous pend, soi elle vous égorge. Dans les deux cas, vous aurez besoin d'un cercueil. Et comme vous êtes jumelles, autant nous faire faire des économies, un seul cercueil, et une photo, vous vous ressemblez tellement!"

"Merci pour ton soutien".

"De rien, frangine. D'habitude, j'ai de bonnes idées pour résoudre les problèmes. Mais dans cette histoire, je ne mettrai pas mon nez que je sais que ça finira par un carnage. Mais vraiment, Pupuce n'a pas peur du feu !"

"Je me suis fait la même réflexion."

 Je me demande comment cela a pu arriver. La bêtise qu'on attend de toi, c'est elle qui l'a fait !"

"Merci pour le compliment ! Je sais que je suis boucanière, mais de là à attendre le pire venant de moi, il y a un fossé."

"Non, ma vieille joue pas avec moi. On se connaît. Donc comme ça, tu as entraîné la frangine dans tes chemins de traverses et tu l'as perdue en route."

"Comment sais-tu que c'est moi qui l'ai entrainée."

"Tu m'a raconté la soirée, Tania. Tu m'as dit que vous vous êtes perdue de vue. C'est faux!"

"Oh, pardon, ne remues pas le couteau dans la plaie. Je me demande comment cela a pu arriver."

"Toi aussi, quand tu emmenés la frangine comme ça, explique-lui le bizz. Mais s'il te plaît, surtout, n'essayez pas d'arranger ça toutes les deux."

 Toutes les capotes que maman t'achète là, tu aurais pu lui en refiler une. N'enfonce pas plus le couteau."

"Bon, bon. Le seul truc que je vois là, c'est dormir cette nuit. Repose ta tête. Et demain, il faut qu'on en parle à maman. Il n'y a qu'elle qui pourra trouver une solution. Mais s'il te plaît, surtout n'essayez pas d'arranger ça toutes les deux. S'il te plaît."

"Pourquoi dis-tu ça?"

"Je le dis parce que je connais ces tours de passe-passe que les filles utilisent maintenant pour enlever les grossesses. N'y pensez même pas! Si jamais vous le faites, je ne vous parle plus."

"Ok, ok. Je n'y avais même pas pensé. D'accord. Je vais dormir."

"Au fait, quand a t-elle su qu'elle est enceinte ?"

"Cet après-midi. C'est moi qui ai acheté les deux tests de grossesse qu'elle a fait."

"Oh! C'est bête. Vous avez le bac à la fin de l'année. Qu'est-ce qui lui est passé par la tête?"

"Je me suis posée la même question et je n'ai pas de réponse."

"Ah, les novices, c'est comme ça. A force de rester enfermée dans la maison de Kaba, elle a goûté à la liberté une fois et voilà!"

"Merci d'enfoncer le clou."

"Non, frangine, excuse-moi. C'est que je tombe des nues."

"Et moi donc."

 

Qui va dormir cette nuit!

Qui m'a dit d'emmener Pupuce à cette fête?

D'habitude elle vient dormir à la maison. Quand j'escalade la fenêtre de ma chambre pour aller dans mes choses, mademoiselle reste sagement dormir tellement elle a peur du coup de poing de Kaba. Et cette nuit-là, je lui ai dit qu'elle devait cesser d'avoir peur. Et voilà...la peur et partie et le bébé est rentré.

Qui peut dormir cette nuit.

Je vois déjà les grosses fesses de Kaba sur mon petit corps.

Mamaooooo! Qui m'a dit d'emmener la fille de l'autre à cette fête.

 

C'était beau.

Le préau avait été décoré.

La musique était percutante.

Le vent venait nous chatouiller les pores alors qu'on se trémoussait sur la piste.

Fallait me voir! Qui pouvait m'attraper.

Qui peut m'attraper quand P-square dose à fond dans la sono et que les lumière-là, encense la piste.

Je n'avais plus le temps de personne.

La musique me fait cet effet.

Et même mon cavalier, le mec le plus beau de Port-Gentil, avait du mal à suivre mon rythme.

Et j'étais tellement lancé que je ne me suis pas rendu compte que ma teubée de sœur suivait cet ANIMAL de PETER NKOUENDI dans une salle de classe.

Vraiment... J'ai mal à la tête.

Pas la peine de prendre efferalgan, ça ne passera pas.

Il faut que j'appelle ma grande copine Jileska Ngome, pour qu'elle me trouve deux trois solutions pour me remettre les idées en place.

"Frangine, c'est quoi ce dérangement à 23 h. Y en a qui pionce"

"Arrête ton char et réveille toi."

"Allez, dis-moi tout. Qu'est ce que le beau Miro t'a encore dit."

"Là, il ne s'agit pas de Miro. En fait, j'ai juste besoin que tu me remontes le moral en me racontant des conneries."

"Oh, là! Il est 23h. A moins que tu n'aies envie de te suicider, tu n'as pas le droit de me déranger à cette heure."

"Vas mourir."

"Je t'aimmmme oh.."

 

Jileska a au moins le mérite de me faire rire à chaque fois.

Je décide de passer en mode whatsapp avec mon chéri, mon Miro.

"Hey, baby!"

"Oui, ma belle. Tu dors pas."

"Non, besoin de tes baisers."

"Oh, gourmande"

"Je t'aime."

"Dix fois plus."

"Bonne nuit."

"A demain. Je t'embrasse fort mon ange."

 

Et là, le sommeil m'emporte.

 

Nous sommes en 2015 et la barbarie existe encore.

Je me suis levée ce matin avec la pêche.

Je me suis dit, pas la peine de tergiverser.

Je me suis directement rendue dans la chambre de Bernadette.

Elle faisait son lit comme tous les dimanches à sept heures.

Elle faisait son lit comme tous les dimanches à sept heures.

"il faut qu'on parle, maman."

"Qu'est-ce qu'il y a? m'a t-elle répondu paniquée.

"Euh...Je..."

"Parle! Je t'écoute."

"Promets-moi d'abord que tu ne vas pas te fâcher."

"C'est promis. Maintenant, parle."

"Voilà, euh..."

"Tania Akendengue, je t'écoute.

"Je...bon, voilà...il y que Pupuce...euh..."

"Oui."

"Elle est enceinte, maman."

"Ce n'est pas vrai! Pupuce. Tu dois te tromper de personne. Ne serait-ce pas toi, par hasard."

"Merci pour la confiance, eh!"

"Arrête ton char et raconte."

"Elle est enceinte. Voilà."

"Comment ça, voilà! C'est ce que tu diras à ta tante quand elle demandera des explications ?"

"Mais pourquoi me demandera t-elle des explications, maman? Qu'est-ce que j'ai à voir dans tout ça."

"Oh, arrête espèce de poltronne. Ta sœur ne peut pas en arriver à cette extrémité sans ton aide. C'est toi la filoute dans l'affaire."

"Maman, je te promets que ..."

"N'en rajoutes pas."N'en rajoutes pas. C'est sûrement toi qui tenais la lampe torche pendant qu'elle faisait ses bêtises ! Je vous connais."

"Bien, étant donné que tu m'as déjà crucifiée, on fait comment pour se sortir de là?"

"Et bien, il va falloir avancer avec intelligence. Je connais ma sœur, elle sortira son couteau pour vous vous égorger comme des porcs, une fois qu'elle saura la nouvelle. Il faut que je réfléchisse."

Là, elle s'est arrêtée de parler. Elle a fait les cent pas dans la chambre, dix longues minutes. Puis:

"Je vais à l'église. Toi, tu ne bouges pas d'ici. Appelle ta sœur, qu'elle vienne ici cet après-midi. Je veux discuter avec elle. Mais s'il vous plait, enlevez-vous déjà de la tête toutes idées d'avortement. Je ne mange pas de ce pain."

"Ok, la vieille. On y a même pas pensé."

"Ok. Dieu n'a mis aucun enfant dans mon ventre ; alors jamais je n'aiderai quiconque à en tuer un."

"Ok, la vieille. Peace!"

"Peace, toi même. Sors de ma chambre et va faire le ménage."


 

4-

 

La vieille est partie pour la messe de 8 heures. Je suis restée à faire le ménage en musique. J'écoutais Davido à fond. Mon frère Julien est sorti de sa chambre à 10 heures.

"Je vais au Cap avec des amis. A ce soir. Tu me raconteras. Ciao."

"Et la vieille, elle t'étrangle à quel moment ? A ton retour ? Dépêche-toi de faire la vaisselle avant de partir. J'ai balayé toute la maison ainsi que la cour."

"Oh! Franchement, c'est pas cool ça! Fais-le pour moi, please."

"Pas de please, qui tienne. Fais la vaisselle avant de partir sinon je te vends à la vieille."

"C'est pas top, ça! Il faut que je me trouve une petite amie. Elle viendra t'aider pour les travaux de la maison."

"Tu es vraiment malade. Parce que monsieur est trop paresseux, il faut qu'on l'aide, c'est ça? J'aimerais bien voir la fille qui acceptera ça."

"Laisse, elles tombent toutes pour moi. C'est parce que j'ai trop de respect pour mon corps, que je n'ai pas encore cédé. Mais dans deux ans, la vieille n'aura plus de souci à se faire. Elles vont s'aligner devant la maison pour venir faire le ménage et la cuisine ici."

"C'est ça! Rêve toujours!"

 

Je suis tranquillement là faisant mon ménage quand j'entends cogner au portail. Je me dépêche de me mirer un coup avant d'aller ouvrir.

Et heureusement que je me suis mirée.

Qui est devant mon portail avec un large sourire aux lèvres ?

Miro.

"Hey, salut beauté. Je passais te faire un coucou."

"Tu es fou ou quoi? Ma mère ne va pas tarder. Je te signale qu'elle est à l'église juste en face."

"Et alors. Je me fous pas mal qu'elle nous vois ensemble ! Comme ça, elle verra que je suis fou de toi."

Ce type-là est même comment ! Est-ce que c'est le moment de se faire flinguer par Bernadette ? Pardon, je ne veux pas de bruit aujourd'hui. Avec l'affaire de Tania, Pupuce, elle va se dire que c'est contagieux et que moi aussi, je ne vais pas tarder à tomber enceinte. Donc, vite vite. Je roule deux pelles à mon mec et puis, je le remets très vite dans la Pajero, que conduit son chauffeur.

"Dans 6 mois, tu ne pourras plus me rembarrer, ma belle."

"t'as bien dit dans 6 mois, mon beau. Pour l'instant, rentre tranquillement chez toi. On se voit à 17h. Même endroit.

"Je t'aime, beauté."

 

La voiture partie, je souffle un bon coup.

Je repars à la maison.

Madame ma mère arrive 2 minutes plus tard.

"Tania Akendengue, peux-tu me dire qui tu embrassais devant mon portail ?"

Et merde ! Il faut une explication de texte ! Je suis nulle en français le dimanche matin...

"Alors, mademoiselle. Qui est ce jeune homme."

"C'est que...maman...je...bon, c'est mon copain, voilà!"

"Tu n'as pas besoin de crier. La prochaine fois qu'il viendra ici, fais-le assoir au salon. Je veux discuter avec lui."

"Mais maman, c'est quoi cette affaire. On est juste comme ça. Maintenant, tu parles de discuter avec lui."

"Ta sœur aussi est juste COMME CA avec le type avec qui elle sort. Et regarde où on en est."

"Mais la vieille, tu dois comprendre certains codes. On ne présente pas son petit ami à sa vieille, à moins que..."

"Tu vas devoir déroger aux règles. Je veux voir ce jeune homme assis dans mon canapé la prochaine fois qu'il est dans le coin."

"Mais, toi aussi, la vieille. Est-ce que je t'ai déjà déçue ! Aie confiance en moi."

"J'ai confiance en toi, ma chérie. C'est en lui que je n'ai pas confiance. Quand je vois une grosse voiture s'arrêter devant chez moi, j'ai des raisons de m'inquiéter."

"C'est même pas sa voiture, la vieille."

"Donc, s'il vole les voitures, j'ai raison de m'inquiéter ?"

"Hummm! Là, tu vas chercher loin. Bon, d'accord. Je vais lui dire. Mais n'essaie même pas de lui poser des questions bizarres, hein! Je n'ai pas envie qu'il me fuit juste parce que ma mère est vieux jeu et veux s'immiscer dans ma vie privée."

"Mais ma chérie, tant que tu habites sous mon toit, tu n'as pas de vie privée ! La vie privée commence quand on a le bac."

"Ok, ok, la vieille. Mais une fois le bac en poche, je crois que je vais faire des choses que tu risques de regretter."

"Et je vais pouvoir te fendre le crâne en deux si tu ne réussis pas à l'université."

"Mais franchement maman, je ne te comprends plus. Tu me dis qu'une fois que j'ai le bac, je peux profiter de ma liberté. Et maintenant tu veux encore la restreindre???"

"Tu parles un peu trop ma chérie. Tant que tu es ma fille, tu as l'obligation de réussir. Point à la ligne."

"Ok, Chef. Je vais faire à manger. Tu peux te reposer devant la télévision."

"C'est ça. J'ai pas envie d'avoir une gastrite."

"Huuuummm! La confiance règne."

Ma mère consent à se reposer devant une série télé pendant que je m'affaire dans la cuisine. Au menu : un poulet rôti, des pommes sautées et un bouillon de bongo debout avec du bon manioc.

Julien arrive dans la cuisine et me lance: "On se capte tout à l'heure. Les potes m'attendent."

Il est midi quand Albert et son épouse Georgeline arrivent.

J'ai déjà mis la table.

En règle générale, ils s'arrêtent de manger avec nous le dimanche, en sortant de l'église. Georgeline est une amie d'enfance de ma mère. Et Albert, son époux, enseigne dans la même école que maman. Je connais déjà le sujet de discussion à l'ordre du jour: la grève des enseignants.

Je pense que je vais manger en silence. Ça vaudra mieux pour moi.

Qu'il pleuve ou qu'il vente, dans 6 mois j'aurai mon bac. Et ensuite... quoi? Ah, oui. Après, je vais devoir honorer la promesse que j'ai faite à Miro. Nous allons faire l'amour pour la première fois, après la proclamation des résultats. Si j'ai mon bac en poche du premier coup, je saute le pas.

Jusqu'à présent, je me suis contentée de flirt. On dit, flirt poussé, il parait. Je lui permets de m'embrasser, de me caresser les seins, de foutre sa main dans mon string. Et ça s'arrête là. Je n'ai pas envie que Bernadette fasse une crise cardiaque en me pinçant un jour nus, au lit avec Miro. Elle a beau jouer la maman évoluée et m'acheter des capotes et tout, je sais qu'au fond, elle ferait une crise si elle me voyait dans cette posture. Et puis, je n'ai pas envie de m'ajouter plus de soucis que je n'en ai déjà. Je veux bien faire la folle en boite de nuit, danser à n'en plus finir, mais c'est tout...le sexe, ça complique tout. Je l'ai lu dans les livres. Je le vois à la télévision.


 

5-

 

Nous sommes en 2015. Et quand vous avez une mère complètement folle, elle le reste à vie!

 

Ainsi donc, nous sommes en train de manger quand le téléphone de maman sonne. Au bout du fil, Kaba.

 

On l'entend vociférer même à 50 mètres.

 

Mais qu'est-ce qui ne va pas avec cette femme ! Jamais elle ne changera. Est-ce qu'elle a besoin de crier comme ça au téléphone ?

 

Comme maman a peur d'avoir mal aux oreilles, elle tient son téléphone portable à distance. On entend la voix de Kaba et les invités et moi sommes à terre.

 

Madame Kaba s'en prend à tout le monde : Dieu, la lune et la terre ! C'est terrible. Et cela me fous des frissons dans le dos. Qu'a t-elle? Pourquoi autant de rage? Merde ! Je me mets à prier en silence pour que tout aille bien pour ma sœur. Pourvu que rien ne lui soit arrivé !

 

Cette femme crie tellement au téléphone, que maman a du mal à lui répondre. Elle parle de tuer quelqu'un. De quoi s'agit-il?

 

Maman est obligée de raccrocher. Elle nous demande de l'accompagner à la cité rose. C'est grave, d'après elle. Voilà que nous laissons à table, tout le repas. Nous hélons un taxi et demandons une course pour la cité Rose. Arrivé là, nous nous hâtons vers la maison de ma chère tante Kaba. Quand nous arrivons là... Un spectacle inouï nous attend. Même dans mes rêves les plus bêtes, jamais au grand jamais je n'aurais imaginé cela.

 

Nous sommes en 2015. Et si votre mère est conne, il faut dire que c'est à vie.

 

Je suis obligée de crier.

 

"Elle est complètement pétée cette femme ! Mais comment a t-elle fait pour avoir des filles aussi équilibrée de Pupuce et moi. Elle est dingue maman."

 

Ni une ni deux, j'entends une voix qui tonne derrière moi et me lance:

 

"C'est qui la pétée. Redis ce que tu viens de dire."

 

Moi! Redire quoi? Pardon. Je prends mes distances. Je suis à près de 100 mètres de cette maudite maison, quand je me mets à crier:

 

"Tu es dingue mme Mbeng! Faut te faire soigner."

 

C'est pas on a dit. Alors que je pense taper, un rallie sur mes deux pieds, je vois une voiture derrière qui me suis. La voiture s'arrête à ma hauteur et là, kaba sort de la et me court après. Mon Dieu, neuf gosses et madame est fine comme une jeunette. La voilà qui me saisit par le col de ma robe.

 

"C'est toi qui a entraîné ta sœur, n'est-ce-pas? Y a que toi pour l'emmener des conneries pareilles. Tu ne pouvais pas aller te faire baiser toute seule, il fallait que tu l'entraînes."

 

Yo! Moi que rester sans voix. Non seulement, elle me faisait un mal de chien au cou; mais en plus, c'était la première fois qu'elle se montrait aussi grossière. Quand je pense que je sors de son ventre, j'ai un malaise. Si au moins, elle me lâchait la robe !

 

"Tu vas me raconter ce qui s'est passé, sinon, je te casse la gueule tout de suite."

 

Mais cette femme a quel problème ? Qui m'a même dit de venir ici! Voilà que les gens s'attroupent autour de la voiture de Kaba. Ceux qui me connaissent, ri; les autres son outrés.

 

Il y en a qui osent lancer:

 

"Mme Mbeng, laisse l'enfant. On ne règle pas les problèmes."

 

J'entends alors Kaba lui répondre :

 

"Va d'abord t'occuper de ta femme qui te trompe avec le voisin avant de venir parler de mes affaires, mr Ossoria."

 

Yo!!!

 

Par le col de ma robe, elle me ramène dans la voiture. Inutile de vous dire que tout le monde a vu mon string. Je ne sais même plus si je dois être désemparée ou si je dois résister.

 

Retour à la maison.

 

Là, dans le manguier qui est majestueusement à l'entrée de chez elle, Kaba, a attaché ma sœur par les bras et les jambes. Il y a le soleil haut dans le ciel, et ma pauvre Pupuce est là, toute nue, attachée, incapable de bouger, elle pleure.

 

J'ai le cœur défait. J'ai tant de haine en moi, que j'ai envie d rosser Kaba. Elle me descend de la voiture comme on traîne un vulgaire chiffon. Là, face à l'incompréhension générale de ma mère qui cherche une paire de ciseaux pour détacher sa nièce et celle des petits qui pleurent, je reçois une de ces gifles.

 

"Donc comme ça, tu as estimé que le moment était bien choisi pour que ta sœur emmène un enfant au lieu du bac ?"

 

Et regifle.

 

Là, Albert et Georgeline sont obligés d'intervenir. Ils prennent Kaba par les bras et desserrent ainsi son emprise sur moi. Vite, je me dépêche d'aller d'en la cuisine. J'en ramène un couteau. Je vais vers le manguier où ma mère se bat déjà pour détacher Pupuice. Ma soeur a changé de couleur. Son visage à tourné au violet. Je me demande depuis quelle heure elle est attachée là.

 

"Pupuce, comment tu vas?"

 

"Je...snif...je...Elle m'a donné tellement de coups. J'ai mal à la tête."

 

Nous voilà toutes les deux pleurant dans les bras l'une de l'autre. Ah, cette Kaba! Si je pouvais lui foutre des coups.

 

"Fouttez le camp de chez moi, les jumelles. Je ne veux plus vous voir ici."

 

"Mais qu'est-ce qui ne va pas, mme Mbeng? Tu ne peux pas chasser ta fille comme ça!", s'insurge Albert.

 

"Pourquoi pas. Est-ce son incapable et alcoolique de père qui paie le loyer ici? C'est mon époux qui la loge gracieusement. Je ne veux plus la voir ou je commets un crime."

 

"Mais, tu n'es pas sérieuse!", s'insurge Georgeline.

 

"Qu'elle s'en aille d'ici avant que je la tue avec mes coups. Elle pense que là où je suis là, j'ai de l'argent pour nourrir une autre bouche!"

 

"Ah! Parce que toutes celles que tu as dans cette maison, c'est toi qui les nourris ? Tu travailles, où?", ai-je le courage de dire à cette fichue sorcière de Kaba.

 

Oyoooo!

 

J'aurais dû me taire.

 

La gifle qui atterrit sur ma figure.

 

"On y va!", lance maman. "S'il te plaît, arrête de gifler ma fille sinon, tu ne me reconnaîtras pas."

 

"C'est ça, Bernadette. Sors-moi ces deux bordelles d'ici."


 

6-

 

La petite Angelline apporte une robe à Pupuce. Albert arrête un taxi et nous nous glissons dedans. Voilà comment ma sœur et moi, nous arrivons chez nous.

 

Maman met de l'eau chaude dans une bassine et arrive dans ma chambre, où Pupuce est allongée sur le lit.

 

"Je vais te masser le corps. Ca ira mieux après. Ta mère est vraiment restée la même brute qui se battait à la fin des cours quand nous étions petites ! Un véritable sauvage."

 

"Maman, tu es sûre que vous avez les mêmes parents ! Pourquoi Dieu lui a donné tous ces enfants-là, alors que toi, tu es plus douce."

 

"Dieu a un sens de l'humour bien particuliers, ma chérie."

 

Maman continue de masser Pupuce qui ne sais plus ni quoi dire, ni quoi penser. Elle finit par s'endormir.

 

"Avec la mère qu'elle a, je me demande pourquoi elle s'est risquée à tomber enceinte", me fait maman alors que nous sommes au salon.

 

"Oh, je pense qu'elle n'a pas réfléchi. Et puis, comme c'était la première fois, elle s'est surement dit que c'était sans risque."

 

"Ah, bon ! C'est ce qu'on vous apprend à l'école ! Que lors du 1er rapport vous n'avez aucun risque de tomber enceinte ?"

 

"Non, non, non. Ce n'est pas ce que je voulais dire."

 

"Ok. Il va falloir retourner chez ta tante chercher les affaires de ta sœur."

 

"Ah ça, non! Elle va me rouer de coups dès qu'elle me verra arriver. Dis maman, tu es sûre que c'est sœur?"

 

"Oh ! Dis pas de bêtises ! Ta sœur aura besoin de ses affaires. Sa mère ne l'acceptera plus chez elle."

 

"C'est fou quand même !" elle avait à peine 20 ans quand elle est tombée enceinte de nous. Est-ce que Mamie Ziza l'a bastonnée comme elle l'a fait pour Pupuce?"

 

"Oh! Surement pas. Jamais ta grand-mère n'aurait fait ce genre de chose. Mais feu ton grand-père, si. Heureusement qu'il était déjà décédé."

 

"Mais alors, pourquoi s'est-elle acharnée sur Pupuce?"

 

"Parce qu'elle a vu tout le gâchis que c'est que de tomber enceinte ç cet âge, alors que l'avenir s'ouvre à elle."

 

"Ok. Ok."

 

"Je n'ai pas envie d'affronter ma sœur aujourd'hui. On ira chez eux demain soir. Il nous faut récupérer les affaires de Pupuce."

 

"D'accord maman. Euh..."

 

"Oui, je t'écoute, Tania."

 

"C'est que...euh..."

 

"Akendengue, c'est bien la première fois que tu perds ta langue. Qu'est-ce qui se passe?

 

"Je vais faire un tour tout à l'heure avec...enfin...euh!"

 

"Tu vas faire un tour avec ce jeune homme qui te bouffait les lèvres tout à l'heure, c'est ça?"

 

"Maman! Tu as vraiment du vocabulaire."

 

"Parle, je t'écoute."

 

"C'est que, nous allons juste faire un tour au bord de mer. J'adore aller me promener là-bas. Mais il me ramène ensuite. Ne t'inquiète pas."

 

"Je veux le voir et lui parler avant que vous ne sortiez."

 

"Non, la vieille. J'aurais dû continuer à faire mes choses en secret, quoi!"

 

"Tu peux parler autant que tu veux ma chérie, mais tu ne sortiras que si ce jeune homme vient s'asseoir dans mon canapé."

 

"Mais, la veille, tu comprends que c'est un guet-apens! C'est à peine si tu ne lui demandes pas de me mettre la bague au doigt."

 

"Trêve de bavardages, ma fille. Je vais me reposer."

 

Quand Miro arrive me chercher à 16h, son chauffeur se gare juste devant mon portail. Je suis dans des fraîcheurs telles que non, le gars est obligé de s'arrêter un long moment pour m'admirer. Oui, c'est vrai oh, je suis belle comme ma fausse mère qui m'a mise au monde. Elle est d'une beauté à couper le souffle. C'est la seule chose que j'ai héritée d'elle.

 

"Hey, Bébé. Je vais finir par être jaloux de ton miroir si ça continue."

 

"Sans blague Miro. Tu as vraiment le sens de l'humour mon chéri."

 

"Viens là que je t'embrasse!"

 

Oyo! Si Bernadette regarde par la fenêtre de sa chambre... Je suis que gênée. Je l'embrasse rapidement et me sépare de lui. Le gars ne l'entend pas de cette manière. Voilà qu'il se met à manger mes lèvres, comme dit ma mère.

 

"Mon cœur, ma maman est là. Elle regarde par la fenêtre."

 

"Qu'elle regarde, alors. Elle verra combien de fois, je suis fou amoureux de sa fille."

 

Ah, les enfants des blancs! Nos gars du quartier là, auraient déjà barré dès que j'aurais parlé de ma mère! Lui, il insiste.

 

"Elle veut discuter avec toi avant que nous sortions."

 

"Oh! Mais je ne peux pas me présenter devant elle les mains vides. Euh...Attend. Je vais demander à Samba de m'emmener quelque part, histoire de trouver quelque chose. Je t'aime. "

 

Sur ce, il s'en va avec son chauffeur.

 

Je retourne alors dans la maison. Alors que je m'apprête à cogner à la porte de la chambre de ma mère, elle ouvre.

 

"Oui, mademoiselle. Que puis-je faire pour toi?", me demande t-elle avec un sourire.

 

"Rien. Je voulais simplement te prévenir que Miro va arriver."

 

"Qui est Miro ? Le chien du voisin ?"

 

"Oh, la vieille, tu gazes. C'est mon petit ami."

 

"Ah ! Ok. Je m'installe au salon, alors. Et ta sœur, où est-elle ?"

 

"Elle dort encore. Je pense qu'elle est très secouée."

 

"Il y a de quoi. Ah, les jeunes !"

 

Un quart d'heure plus tard, monsieur le beau gosse qui fait bouger mon cœur, cogne à la porte d'entrée. Je vais ouvrir. Et sans cérémonie, monsieur me gobe la bouche devant devant ma mère. Ce type-là est même comment ?  Me voilà maintenant en train de me battre pour qu'il me lâche. Vraiment !

 

"Euh, Miro, voici Agnès, ma maman."

 

"Oh! Enchanté madame. Vous êtes resplendissante. Je vois de qui tient Tania."

 

Le gars-ci !!!

 

"Assayez-vous jeune homme.", l'invite maman.

 

Il lui tend alors la bouteille de vin blanc qu'il est allé acheter avec Samba, son chauffeur.

 

"Merci ! Vous avez du goût, Miro."

 

"Oh, c'est une qualité qui me vient de mon père. Il collectionne les grands crus."

 

Comme j'ai peur que ma mère me foute la honte devant mon chéri, je décide de m'éclipser et de les laisser seule.

 

Je ferme la porte du couloir qui mène aux chambres, et je garde mon oreille collée derrière.

 

Et la conversation continue. C'est donc comme ça que j'apprends que monsieur mon chéri, le plus gosse de Port-Gentil a des intentions sérieuses envers moi. Huuuuummm! Pardon, je suis que dépassée. Le type dit carrément qu'il attend que nous ayons le bac à la fin de l'année et il me passe la bague au doigt.

 

À ce moment-là, j'entends ma fragile petite maman dire : "des fiancailles, j'espère. On parle bien de fiançailles, n'est-ce pas?"

 

Sans se démonter, Miro lui répond :

 

"Votre fille sera ma femme, peu importe le moment."

 

Atchoum!

 

C'est bête ! Je ne peux m'empêcher d'éternuer. Voir moins


 

7-

 

Je rejoins ma sœur dans la chambre.

Je la trouve assise sur le lit, un oreiller dans le dos.

"Je pensais que tu dormais encore.", lui fais-je.

"Je suis réveillée depuis un moment. J'ai un peu faim, mais je n'ose pas sortir de la chambre. J'ai comme l'impression que mon corps peut me lâcher à tout moment."

"Tu as si mal que ça!"

"Les mots sont faibles ! Elle s'est acharnée sur moi, tu sais. Elle a attendu que papa Jimmy soit sorti pour me rosser de coups."

"Mais, comment a t-elle su?"

"Oh! Bête comme je suis, j'ai jeté les deux tests de grossesse dans la poubelle de la salle de bain. Alors, devine le reste."

"Cette femme est terrible. Pire qu'un ouragan."

"Où est tante Bernadette?"

"Figure-toi qu'elle discute dans le salon avec Miro."

"Oh! Y en a qui ont de la chance! Pas comme moi. Je viens d'appeler l'auteur de ma grossesse. C'est sa petite sœur qui m'a répondu. Elle m'a dit qu'il est enfermé dans sa chambre depuis une heure avec une certaine Sandra. Elle a osé me demander si je suis la suivante. Comme si elle tenait son agenda."

"Ce type est un con. Te prends pas la tête pour lui."

"Je suis amoureuse, Tania. Tu peux le comprendre ça?"

"Non! Je ne peux pas comprendre que tu sois amoureuse d'un imbécile. Tu vaux mieux que ça Pupuce."

"Et que dirai-je à mon enfant? Que son père est un idiot!"

"Oh, merde! C'est un détail que j'avais oublié!"

"Un détail. Ouais...un détail."

"Ecoute, on va pas se prendre la tête maintenant. La vie continue. Tu as un toit où te reposer. Maman prendra soin de toi. Et tout ira bien. On ne change pas nos plans. Tu mets ce bébé au monde et ensuite, à nous la vie de rêve à Accra."

"Eh ben! Et qui gardera mon enfant."

"Réfléchis cinq minutes Pupuce! Maman ne demande que ça, pouponner à nouveau. Elle sera ravie de garder le petit. Ta vie ne va pas s'arrêter parce que tu auras un enfant!"

"Facile à dire Tania. J'aimerais t'y voir."

"Je ne serais jamais à ta place, Pupuce. Je serais incapable de vivre ce que tu ressens à cet instant. Tout ce que je dis c'est qu'il faut garder l'esprit positif. Tu es une élève brillante. Tu auras ton bac du premier coup. Ce qui ne sera peut-être pas mon cas si je ne m'accroche pas plus à mes cahiers."

"Pourquoi ne suis-je pas comme toi? Tu as toujours les idées claires!"

"Pupuce, tu ne peux pas être moi. Sinon, tu ne seras jamais la première de la classe. A chacune de nous ses qualités."

"Mais quand même ! On a l'impression qu'on est pas née de la même mère. Tu tiens tellement de tante Bernadette."

"Mama, on ne va pas commencer à philosopher, tu veux. Ne me dis pas que tu tiens de Kaba et que tu comptes aligner 9 gosses comme elle!"

"Non, bien sûr! Mais j'aurais tant aimé être celle que Bernadette a choisi il y a 17 ans."

"Pardon, laisse-mo ma mère tranquille."

"T'as vu! Tu reconnais que ta vie est meilleure que la mienne, Tania."

"Tu fais chier, Pupuce. Bon, je te laisse."

 

Je la plante là et retourne au salon.

Je trouve là, ma mère et Miro en pleine conversation. Ils rigolent comme des personnes qui se connaissent depuis dix ans.

Huuummmm!

"Je parie que ma mère m'a foutu la honte en te racontant toutes les bêtises que je faisais enfant."

"Pire que ça, ma jolie! Elle m'a accordé ta main."

"Non, sans blague."

"Je lui ai tout raconter. Ton mariage de rêve, là au bord de la mer. Et ta fameuse lune de miel aux Bermudes."

"Mais tu racontes n'importe quoi! C'est juste des délires comme ça! On va finir par croire que je suis une arriviste!"

"C'est beau d'être jeunes! En tout cas, miro, je suis heureuse de te connaître. Ainsi, ma fille n'aura plus besoin d'escalader la fenêtre de sa chambre pour aller te rejoindre."

"Maman! Mon Dieu, j'ai honte."

"Ma chérie, tu penses peut-être que je dors et que je n'entends rien, c'est ça!"

Vraiment, cette mère-là!

"C'est bon, maman! Tu m'a grillée, c'est bon! La honte, quoi!"

"Je vous laisse, les jeunes. Je vais voir une amie malade. Amusez-vous bien."

Maman s'en va et nous abandonne dans le salon.

Miro en profite pour m'embrasser.

"Elle est trop cool, ta mère."

"Ouais, comme tu dis. Elle est cool."

"Et si on allait se promener au bord de mer."

"Un instant. Je vais mettre mes chaussures et je suis à toi.

"Ok."

 

Un quart d'heure plus tard, samba, le chauffeur, nous dépose au bord de mer. Main dans la main, nous arpentons le rivage. J'aime écouter le bruit des vagues et regarder au loin, les bateaux en transit. Miro me prend alors dans ses bras.

"Ma mère aimerait que tu viennes déjeuner à la maison samedi prochain."

"Ah bon! Moi qui pensais qu'elle ne pouvait pas me sentir."

"Mais pas du tout! Nous avons parlé de toi hier soir. Elle souhaite mieux te connaître."

"Mais miro, nous avons déjà déjeuner ensemble 3 fois. Et elle ne retient toujours pas mon prénom!"

"Tu exagères, ma puce. Elle sait que je tiens énormément à toi."

"Ok! Samedi, à 11h 30, je serai chez toi."

"C'est sûr que tu y seras. J'enverrai Samba te chercher."

"Huuuuummmm! La confiance règne. Je te promets de ne pas me défiler. Mais dis-moi, que va t-elle inventer cette fois pour me mettre mal à l'aise ! La dernière fois, le coup des écrevisses ça a très bien marché."

Là, il éclate de rire.

"Je revois encore ta tête face à ce plat. Heureusement que mon père t'a dit que tu pouvais manger avec les doigts."

"Moque-toi de la pauvre fille du quartier que je suis! Si elle me présente encore ce genre de choses, je te promets que je ne mangerai qu'un bout de pain."

"Bon, là, j'avoue qu'elle a pas été cool! Mais je pense que c'est un truc de femme. Vous aimez bien vous tester. Et elle veut sûrement savoir jusqu'où tu es prête à aller pour avoir son fils."

"J'irais sur la lune si tu t'y trouvais. Je t'aime Miro."

"Moi, dix fois plus."

Pardon, faut pas trop parler! Le love là, c'est comme ça. Je suis trop maboule de ce type.

Là, ses mains sont maintenant sous mon tee-shirt. Il cherche quoi, même !

Pardon, il embrasse trop bien. J'adore foutre mes mains dans ses cheveux. Et j'aime l'entendre me murmurer des mots doux en italien, là, dans mon oreille.

Et là, il me pose encore la même question :

"Tu me tortures, tu sais. Quand fera t-on enfin l'amour."

"Je te l'ai dit, mon ange. Le jour de la proclamation des résultats du bac."

"Je pense que cette nuit-là, je te kidnapperai et tu resteras ma prisonnière pendant une semaine."

"Hummm! Je vois qu'il y en a qui se surestime. Qu'est-ce que tu pourrais bien me faire pendant une semaine."

"Laisse-moi te montrer un avant-gout."

 

Bouchez vos oreilles et fermez vos yeux.

Il n'y a rien à voir.

 

Donc, cinq secondes plus tard, me voilà, moi Tania Akendengue, couchée là, à même le sable. Il y a la tête d'un beau gosse métisse qui embrasse la peau, là de mon ventre et monte jusqu'à mon soutien-gorge.

"C'est bon, c'est bon...J'ai compris. "

"Et tu n'as encore rien vu!"

"C'est ça! Je crois qu'il y en a qui ont un peu trop d'expérience pour le jeune âge."

"Je préfère ne pas te parler de mes expériences aux USA. Sinon, je suis sûr que tu m'égorgeras."

"Là, tu as raison. Je ne veux pas entendre parler d'une autre fille. Sinon, je t'étrangle."

"Vraiment, cette gabonaise! Tu me rends complètement maboule."

"Je préfère ça, monsieur."

Il est 19h quand le chauffeur de Miro me dépose devant la maison. Maman n'est pas encore rentrée. Je trouve Julien et Pupuce qui jouent au scrabble au salon.

"Bonsoir les jeunes!" fais-je en rentrant.

"Bonsoir, la vieille.", me répond Julien.

"Tu sors d'où?", demande Pupuce.

"J'étais au pays des merveilles avec mon prince charmant."

Je les laisse là et vais prendre une douche.

 

À table, une heure plus tard, maman nous raconte comment elle est allée chez Mr et Mme Mbeng. Kaba était sortie. Elle a donc discuté avec papa Jimmy. Elle voulait avoir quelques affaires pour Pupuce et surtout ces cahiers et livres. Papa Jimmy lui a répondu: "Aucune affaire ne sort de cette maison. Je n'ai pas chassé Pupuce de chez moi. J'attends donc son retour."

Et Pupuce de dire: "Je ne retourne pas là-bas. Sa femme va m'achever avec ses coups. Je ne serai en sécurité là-bas que lorsque Papa Jimmy sera à la maison. Le reste du temps, je serais à la merci de Kaba. Non, je préfère rester ici. Je vais me débrouiller pour les cahiers et les livres."

Et maman de conclure que Papa Jimmy est vraiment atterrée par le fait que son épouse ait pu lever la main sur sa fille enceinte.

"Il m'a dit que dès que tu accouches, cet enfant vivra sous son toit."

"Les fangs et les enfants..." conclut Julien. Voir moins


 

8-

 

Dix jours plus tard. Je suis dans la chambre avec Pupuce. Madame fait la tête depuis l'après-midi. Me voilà obligée de la secouer pour savoir ce qui ne va pas. Et elle me répond:

"Je ne sais pas si j'irai jusqu'au bout. Je ne me sens plus motivée comme avant."

"Ca veut dire quoi ça ! La motivation, on la perd si vite ! Je te signale qu'on doit décrocher ce bac à la fin de l'année. Ensuite, on fly vers d'autres horizons."

"Où irons-nous Tania? Y arriverai-je ? Tu rêves beaucoup, tu sais. Un peu trop pour moi."

Là, je suis obligée de m'énerver franchement. Ce n'est pas à moi qu'elle va saper le moral aujourd'hui. Elle peut tuer son optimisme ; pas le mien.

"Là où tu me vois là, Marjorie Akendengue, j'ai beaucoup de rêves dans la tête. Je ne sais pas comment je vais les réaliser, mais je ne m'empêche pas de rêver. Si tu as décidé que ta vie doit s'arrêter parce que tu es enceinte, c'est ton affaire. Je t'abandonne là au bord de la route, net."

"Comme tu es méchante Tania. Je te disais juste que je me sens gêné en classe. je..."

"Gênée de quoi! Ton ventre ne se voit même pas. Tu diras quoi dans deux mois? Que tu abandonnes l'école!"

"Non, tu comprends pas."

"Ah, pardon. Y a rien à comprendre. Tu as un lit où dormir, tu as à manger à midi, tu a de quoi payer le taxi pour aller à l'école. C'est quoi le problème ce soir."

"tu ne me comprends pas."

"Je n'ai pas envie de te comprendre. Je te signale que ma grande du cœur, Jileska, a eu un enfant en 5ème. Ça n'empêche que nous sommes toutes en terminale aujourd'hui. Tu t'imagines, elle n'avait que 14 ans!"

"Snif...ce n'est pas pareil ! Sa mère ne l'a pas mise à la porte, elle."

"Ah! Si je comprends bien, c'est le sein de Kaba que tu veux retourner téter!!!! Qu'est-ce qui ne va pas dans ta tête?"

"Ce n'est pas ça! C'est juste que...snif! J'ai appelé Peter plusieurs fois. Il a changé de numéro de téléphone. Il ne cherche même pas à savoir si je vais bien."

"Ah, c'est ça! Désolée, Pupuce. Ca ira. Garde la tête haute. On bosse à fond les cours. On décroche le bac. Tu accouches. Et on déguerpie de Pog. Il faut qu'on aille ailleurs un peu voir comment est la vie là-bas."

"Qui te dit que j'ai envie d'aller ailleurs ? Qui te dis que je ne serais pas mieux ici."

"Mais qu'est-ce qui ne va pas chez toi! Tu veux maintenant rester ici à cause de cet imbécile qui cours après tous les jupons à la ronde. Parait même qu'il a engrossé une fille du collège Évangélique."

Et merde! Avais-je besoin de lui sortir cela comme ça! Ca fait une semaine que j'ai l'info et voilà que je la lui balance comme ça!

Et la voilà qui fond en larmes. Mon dieu, qu'est-ce que je suis allée encore ramasser.

"Tu dis n'importe quoi, Tania. Tu inventes des histoires juste parce que tu ne le supportes pas."

"Oyooooo!!! C'est quoi cette affaire. Donc, maintenant, j'invente des histoires! Pardon, je vais dormir au salon. Tu peux occuper tout le lit?"

Cette fille est même comment????

 

Ça fait seulement quelques jours qu'elle est à la maison et elle se plaint de tout. Elle ose me demander comment je fais pour faire la vaisselle tous les matins avant d'aller à l'école. Obligé de lui dire qu'elle n'a qu'à laisser les assiettes et que je les laverai moi-même. Si la ménagère chez les Mbeng fait tout, chez ma mère à moi, il n'y a pas de ménagère. Bernadette fait à manger tous les jours. Elle s'arrange à ce que nous trouvions les marmites prêtes quand nous rentrons de l'école. Elle s'assure que nous avons de quoi payer le taxi. Et cela me suffit. Elle ne fait pas autant de bruit que Kaba. Donc, j'étais obligée de dire à ma princesse de jumelle que si elle est fatiguée de faire la vaisselle le matin, elle n'a qu'à prendre ses affaires pour retourner dans sa belle maison à la cité Rose.

Vraiment!!!

 

Deux semaines plus tard.

Marc-Elise, une frangine du quartier, m'interpelle alors que je sors de ce cours de philosophie. Elle est en terminale A2 avec Pupuce.

"Ma go, mais la frangine ne vient pas en cours depuis 4 jours. J'ai oublié depuis là de te demander si elle est malade."

"Comment ça, elle ne vient plus en cours? On quitte la maison, toutes les deux tous les jours? On arrive ensemble devant l'école."

"Je te dis qu'elle ne vient pas en classe en ce moment. Le professeur de français a remarqué l'absence de son élève préférée. Tu sais bien que sans elle en classe, le cours de français et le cours d'anglais sont nuls!"

"Huuuummmm! C'est quoi cette histoire?"

"Yo! J'explique, j'explique et tu ne comprends pas. Je te dis que Pupuce ne vient plus en classe. Est-ce qu'elle est malade."

"Non, elle n'est pas malade. Elle veut juste sécher, c'est tout."

"Franchement! Cette manière de sécher, aussi!!! en terminale. Ca, c'est des trucs qu'on faisait en 4ème. Mais là, c'est la dernière ligne droite!"

"Comme tu dis, Marc-Elise. Comme tu dis."

Nous marchons ensemble jusqu'au quartier en nous racontant des bêtises. Avec Marc-Elise, jamais rien n'est sérieuse. C'est un déconneuse de première. Quand on arrive devant la maison, elle me dit au revoir et ajoute:

"Pardon, dis à Marjorie Akendengue que si elle, elle abandonne là, nous c'est même pas la peine de continuer. Depuis quand la première de la classe par défaitiste pour la bataille!?"

"Je le lui dirai, t'inquiète."

 

Il est quatorze heures. La maison est silencieuse. Je pense trouver Pupuce à la maison, mais elle n'y est pas. Donc, cette fille-là me roule tous les jours alors que je la crois en classe! Comment Est-ce possible? Elle va où? Elle fait quoi?

Je suis là en train de réfléchir quand maman arrive.

"Oh, bonjour Tania. Où est ta sœur."

"Ah, la vieille, je vais pas te mentir. Une copine me dit que Pupuce sèche les cours depuis quelques jours."

"C'est quoi cette histoire? Où est-elle?"

"Je n'en ai aucune idée."

"Oh! Je n'aime pas ça du tout! Où passe t-elle ses journées ?

"Je n'en ai aucune idée. Je tombe des nues moi aussi." Voir moins


 

9-

 

Maman est tellement inquiète et frustrée qu'elle me demande d'aller acheter des unités Airtel pour appeler toutes les amies. La voilà dix minutes après, au téléphone avec de la grand-mère Ziza pour savoir si ma sœur est passée par le quartier balise. La vieille au téléphone répond non. C'est vrai que ma sœur ne va pratiquement jamais chez ma grand-mère. Elle n'aime pas s'enfoncer dans le sable de Port-Gentil. Même pas pour aller voir la grand-mère. Voilà que cette dernière aussi se met à paniquer :

"Ah Bernadette, c'est comment. L'enfant est où?"

Hulmmm! Je vois que maman ne sais pas quoi dire. Je prends le téléphone et je dis quelques mots à ma grand-mère, histoire de la calmer.

Ensuite, j'appelle ma combi, Jileska pour savoir si sa petite sœur Sunita, qui est la confidente de Pupuce, est au courant de quelque chose.

Elle me répond:

"Attends que j'aille secouer les puces à ma sœur. Elle va me cracher le morceau."

Ma combi me rappelle dix minutes plus tard et me balance:

"Vas faire un tour du côté de Ntchenguà badamier. Tu y trouveras la frangine. Parait qu'elle est chez le typo."

Oh! Mais qu'est-ce que Pupuce est allée foutre à Ntchenguè badamier, alors qu'elle doit être en classe!?

"Où est-elle?", me demande maman.

"Parait qu'elle est chez une copine du côté de Ntchenguè."

"Ne me mens pas, s'il te plaît. Chez qui est-elle?"

"J'te dis, la vieille. Elle est chez une copine."

"Tania, ta sœur, a des copines de ce côté-ci de la ville. Que va t-elle faire si loin de Ntchenguè?"

"Euh! Je ne sais quoi te dire, maman. Je n'en sais rien."

Sceptique, maman me regarde, l'air de me dire qu'elle n'est pas dupe du tout.

Alors, que je n'ai pas encore mangé, je demande à Julien qui vient d'arriver, de m'accompagner à ntchenguè. Je sais même que badamier, c'est quel endroit de La ville !?

"Qu'est-elle allée foutre là-bas?"

"Elle est allée rejoindre Peter. Il habite là-bas."

"Vous aussi, les filles! L'amour va vous mener très loin. Voilà qu'on est obligé de miser 2 mille de taxi pour aller la chercher ! Elle va me rembourser mon gain."

"Ah, papa, on va discuter après. Cette affaire-là commence à me dépasser.

 

Nous voilà dans un taxi en direction de l'extrémité de la ville. Un endroit que je ne connais même pas. On dépasse l'hôpital, et je rappelle au chauffeur de nous laisser au bon endroit parce que nous ne savons pas où nous allons. Là, il me répond avec son accent béninois :

"Tu viens chercher quoi ici?"

Obligée de rire.

Nous descendons du taxi. Julien à le réflexe d'aller vers deux jeunes filles qui discutent en bordure de route. Il leur demande si elles connaissent Big wave, qui n'est autre que Peter.

"Pardon, oh! Qui ne connait pas Big Wave ici. Tu vois, après la poubelle là-bas, tu vas tout droit. Tu vas arriver chez un malien avec une boutique rouge, tu prends le petit chemin à gauche du malien. Tu vas tout droit jusqu'au container abandonné là-bas. Tu demandes seulement. On va te montrer la maison."

C'est si bien indiqué, que l'on se dit qu'on y arrivera vite. Tu parles. Il y a tellement de sable, d'herbe et de chemins, qu'à la fin, mon frère se demande si l'on doit continuer ;

"Écoute, Tania, je t'aime beaucoup Frangine, mais là, mes baskets sont vraiment traumatisées. Qu'est-ce que la frangine est venue foutre ici? Le sable la décourage quand il s'agit d'aller voir la grand-mère à la balise ; là, ni le sable, ni l'herbe ne l'ont arrêtée !!!"

"Je sais que tu es dépassé. Mais ne m'abandonne pas maintenant."

Lorsque l'on arrive à destination, mes chaussures ont rendu l'âme. J'ai les pieds tout sale et mal aux jambes. Le vent venant de l'océan tout proche, me fait frissonner.

On demande à une petite fille où habite Big Wave. Elle nous répond :

"Mon papa n'est pas là. Je suis seule avec Grand-Ma et tantine Marjorie."

Donc, ne voici t-il pas que nous découvrons la tantine Marjorie en question, en train de laver des jeans et des tee-shirt, là, dans la cour de cette maison inachevée!!!

Laissez-moi vous planter le décor.

Les murs de la maison ne sont pas crépis. Des fils électriques se promènent au-dessus de nos têtes. Il n'y a pas de vitres aux fenêtres ; ce sont des planches de contreplaqués qui servent de fenêtres et de portes. En fait, tout est en chantier. Et notre sœur est là, dans un coin, debout devant une table branlante, en train de frotter avec une brosse, un pantalon plein d'eau mousseuse ! Et elle ose se plaindre quand il faut faire la vaisselle à la maison, avant d'aller à l'école le matin!!!???

 

Elle sourit quand elle nous remarque.

"Oh! Que faites-vous là?"

"C'est à toi que nous devons poser la question !" lui lance Julien plein d'incompréhension. "Qu'est-ce qui ne va pas, Pupuce. Tu deviens maintenant femme de ménage !"

"Oh, qu'est-ce que tu racontes! Je suis juste venue laver le linge sale de Peter, c'est tout."

"C'est tout! Dis-moi, depuis quand, sais-tu laver le linge à la main. Chez ta mère, là-bas, même tes chemises pour Raponda passent à la machine, alors que Tania et moi lavons à la main tous les samedis! Donc, tu sais le faire."

"Mais, oh! Ca s'apprend non!"

"Ecoute, ma grande, je te respecte, tu comprends. Donc, laisse seulement ce que tu es en train de faire et on rentre à la maison tout de suite."

"Mais quoi? Partez, je vous rejoins. Je n'ai pas encore fini. Et j'ai mis une marmite de riz au feu."

"Tania, attrape-moi sinon je vais commettre un crime. Depuis quand Akendengue Marjorie sait-elle faire à manger!!!!!!!" Nous sommes tous les jours à la maison et c'est Tania et moi qui nous tapons tout le boulot! Et comme par hasard, ici, tu viens faire la cuisine!!!!! Tu te fous de qui."

"Calme-toi, julien. Calme-toi."

Mon frère est tellement furax, qu'il a du mal à se retenir.

"Qu'est-ce qui ne va pas chez cette fille. On te cherche partout en ville et tu es ici au lieu d'être à l'école ! Tu es devenue maboule ou tu as oublié que tu es en terminale!? Madame sèche les cours pour venir laver les caleçons de Big wave!!! Qu'est-ce qui ne va pas dans ta tête, Pupuce. Qu'est ce qui ne va pas? Tu sais combien de filles défilent dans le lit de ce gars! Tania, s'il te plaît, dis à ta sœur de se rincer tranquillement les mains et de me suivre. Sinon, je lui fends le crâne tout de suite. Si les autres n'ont pas de frères pour les remettre sur les rails, moi mes sœurs ne lavent pas les caleçons des imbéciles!""

Là, je sens que la situation est tendue. Mon frère est tellement touché dans son orgueil qu'à tout moment il peut exploser et rosser Pupuce en oubliant que c'est sa grande sœur.

"Pupuce, pardon. Allons tranquillement à la maison. Laisse les pantalons de Peter. Une autre fille viendra les laver."

"Mais, laissez-moi au moins finir ce que j'ai commencé. Je vous suis après. La marmite va brûler, sinon."

"Que cette marmite brule ! On y va, Pupuce. N'envenime pas plus l'affaire !"

Yooooo! Je suis moi-même que dépassée! Me voilà ballotée entre mes deux frères. Je m'attendais à tout sauf à ça.

"Ah Pupuce, on y va. Laisse-moi tout ça, tu n'es pas chez toi, ici."

Elle consent enfin à se rincer les mains. Avant de nous suivre, elle court rapidement dans la maison et crie:

"Grand-ma, je suis partie, oh!"

Et la Grand-Ma en question de répondre:

"A demain, ma fille."

Yoooooo!!!! Voir moins


 

10-

 

Dans le silence, nous avançons dans les chemins de sable de Ntchenguè badamier. Je n'en reviens pas d'être aussi loin. Que serais-je venue chercher ici???

Julien marche derrière nous. Il est toujours vert de colère. Moi, je n'ai même pas envie de parler. Mon ventre chante tellement j'ai fin. J'ai simplement envie d'aller manger ce plat de feuilles de manioc aux crevettes qui m'attend à la maison. Maintenant, si ma soeur veut revenir ici demain, faire le ménage, ce ne sera plus mon problème.

Qu'est-ce qui lui passe par la tête en ce moment! Tu vas quitter si loin de chez toi pour venir te terrer dans un lieu pareil, par amour??? On aura tout vu. Je m'attendais à tout de sa part. Mais là...

Quand on arrive en route, Julien hèle un taxi. On mise de nouveau 2 mille cfa pour qu'il nous dépose devant la maison.

Dans le taxi, silence. Je regarde par la vitre. Pupuce, regarde ses chaussures.

En arrivant à la maison, on trouve la grand-mère Ziza et maman qui nous attendent à la terrasse.

"Akendengue Marjorie, où étais-tu", lui demande la grand-mère en omiènè.

Elle ne répond pas. Alors, maman insiste.

"D’où viens-tu Pupuce?"

"Je...je.."

Elle se met à pleurer.

"Mademoiselle lavait les caleçons de son gars et elle faisait la cuisine. Tu comprends maman, elle faisait la cuisine."

"Ah! Pupuce, tu sais laver le linge à la main! Ce n'est pas dimanche que je t'ai vu soulever une valise de linge sale pour aller le laisser chez le blanchisseur!"

"Ne parle pas trop, Bernadette! Laisse-la.", fait grand-mère Ziza.

Pupuce en profite pour aller se réfugier dans la chambre. Julien prends alors la parole et s'adresse à maman :

"Madame ma mère, tu vas dire à Pupuce que je passe mon BEPC à la fin de l'année. Si elle compte aller tous les jours du côté de Ntchenguè, ne comptez pas sur moi pour aller la chercher. Qu'est ce qui ne va pas dans la tête de cette fille? Elle est la première de sa classe depuis des années et là, elle va laver les slips d'un type qui triple toutes les classes, tellement il est occupé à coucher avec toutes les filles!"

"Te fâche pas comme ça, mon chéri!", lui fait la grand-mère. "Il faut lui parler calmement. Les femmes enceintes, c'est délicat."

"Ah, mamie, je veux bien comprendre. Mais je t'assure que si elle continue d'aller là-bas, je vais oublier qu'elle est enceinte."

"Oh, mon chéri! Un homme doit se contrôler." surenchérit grand-mère Ziza.

"Je dis, hein mme Ziza, comment peux-tu concevoir que ta petite fille, au lieu de se concentrer sur ses cahiers, préfère aller laver le linge d'un homme. Et je dois me taire. Jamais. Elle y met encore les pieds et vous ne me reconnaîtrez pas. Et si ce rigolo qu'elle va suivre pense qu'il peut s'amuser avec ma soeur comme ça, il me trouvera devant lui."

Sur ce, Julien va manger. Ma mère me regarde alors et me demande :

"Qu'est-ce qui ne va pas? Que faisait-elle là bas?"

"Ah, qu'est ce que je vais te dire, maman. Elle lavait toute une bassine de linge sale. Et elle faisait cuire une marmite de riz."

"Depuis quand sait-elle cuisiner?" s'étonne grand-mère Ziza.

"Depuis que l'amour donne des ailes.", c'est tout ce que je trouve à répondre.

"Je crois qu'il faut qu'on convoque la famille de ce jeune homme."

"Et que vont-ils te dire maman? Qu'ils ont la place chez eux pour une nouvelle bouche à nourrir???"

"Ne sois pas cynique, Tania. Il faut que je discute au moins avec une personne de là-bas."

"Bonne chance maman. Moi, je vais manger."

 

Les jours suivant, julien accompagne systématiquement Pupuce jusqu'à sa salle de classe. À la récréation, il vient s'assurer qu'elle est bien là. À la sortie des cours, il l'attend devant le portail. Je me demande jusqu'à quand cette surveillance rapprochée va continuer, mais au moins, on est rassuré de savoir que notre sœur va bien en classe.

Quand arrive la fin du trimestre, mlle est deuxième de sa classe. Moi, j'obtiens à peine la moyenne. Je suis en terminale D. Je veux devenir ingénieur. Je serai ingénieur. Je vais épouser Miro. Lui aussi sera ingénieur. Je vais faire mes études à l'étranger. Et quand je vais rentrer, je vais acheter une voiture à ma mère.


 

11-

 

En parlant de mère, celle de Peter, alias Big Wave a répondu à l'appel de ma mère. Donc, un samedi, elle est arrivée chez nous, accompagnée d'une de ses amies. Elle s'est assise dans le canapé de ma mère et a attendu qu'on lui pose des questions. On aurait dit qu'elle venait témoigner à un procès. Pupuce était derrière chez notre copine Marc-Elise. Elles bossaient toutes les deux. Julien était à son match de foot hebdomadaire.

Donc, j'ai été réquisitionnée pour faire le service.

La femme était là. À la regarder, je lui aurais donné 50 ans; pourtant, elle en a que 35 ans. Sa copine, une femme très bavarde, est du même acabit.

La discussion a commencé après que la Beaufort et la Regab demandées soient servies.

Je me suis assise sur une chaise à la table de la salle à manger. Les dames et ma mère étaient dans le salon. Albert, est arrivé en renfort quelques temps après.

Quand maman annonce la nouvelle, la mère de Peter commence son discours :

"Ah, cet enfant vient encore m'ajouter les problèmes ! Ça ne va pas finir, cette histoire ! C'est le seul garçon que j'ai, mais il ne comprend rien. Je parle à gauche, je parle à droite et il fait toujours les mêmes bêtises. Il n'a pas pitié de moi. Madame, vous m'appelez aujourd'hui chez vous là pour dire que votre fille est enceinte. Mais avant de coucher avec Peter, elle ne s'est pas renseigné !"

"Comment ça, renseignée ! Quand les jeunes se mettent ensemble, ils font des enquêtes d'abord ! C'est ce que vous voulez me faire comprendre."

"Eh, madame ! Elle aurait dû poser les questions à gauche à droite, oh! C'est pas seulement le beau corps et le beau visage que vous voyez là. Oooooh, il est beau oh! Oooooh, c'est un grand basketteur, oh! C'est ça que les filles suivent. Elles défilent à la maison-là, défilé, défilé, défilé. Même les draps sales qui sur lesquels il dort là, sur son matelas, les filles ne voient pas ça. Non, c'est seulement baiser que les enfants veulent !"

Yoooo! Je manque de m'étouffer de rire en voyant le visage scandalisé de ma mère. Elle qui ne supporte pas les écarts de langage, elle est servie.

"Madame, là où vous me voyez là, j'ai seulement, 35 ans. 35 ans, oh! C'est l'enfant-là qui veut me faire vieillir avec ses conneries! Dîtes-moi un peu, avec mon petit commerce de manioc là que je fais au marché de Moukala, je trouve l'argent où pour payer tous les trousseaux qui me tombent sur la tête."

"Qu'est-ce que cela veut dire?" demande maman.

"C'est tout ça là, oh! C'est tout ça là que je disais que votre fille n'a pas posé les questions avant de venir se jeter dans le lit de mon fils, oh! L'enfant qu'on appelle Peter Malonga a déjà 3 gosses! Vous me voyez là, que dépassée. Je suis déjà grand-mère oh!"

"Trois enfants ! À 20 ans ! C'est une blague.", s'étonne Albert.

"Papa, je ne blague pas. Quand je vous dis que mes soucis commencent du côté de SOGARA là-bas et se terminent après le carrefour Banco, vous ne me croyez pas. Je suis dépassée là où vous me voyez. Le mari, y a pas. Le copain, y a pas. Me voilà là avec mon petit commerce et les 4 bouches qui sont sorties de mon ventre, et que je dois nourrir. Y a la maman qui est venue du village. Elle est malade, il faut trouver les médicaments pour la soigner. Elle est là à la maison depuis 3 ans. Et là, je vais même trouver l'argent où, pour acheter même un silip (slip) à l'enfant-là que votre fille a dans le ventre !"

"Écoutez, madame, je ne vous ai pas appelée ici pour vous demander de l'argent. Je voulais simplement faire votre connaissance." fait ma mère.

"Ok, madame. Donc là, on a fait connaissance ; oh! Je suis Huguette Malonga, j'habite à badamier, là-bas. La maison-là, c'est une brique ici, une brique là-bas. C'est comme ça que j'ai monté les murs-là. C'est mon commerce et mes bricoles partout partout là chez les blancs-là, qui m'aident à vivre, oh! Maintenant, si votre fille veut venir aussi partager notre bâton de manioc et une boîte de sardines avec nous là-bas, elle peut venir. Mais pardon, maman, évitez-moi les maux de tête et les soucis. Ce n'est pas moi qui envoie l'enfant mettre les grossesses dans la ville. Là, il était pendant les grandes vacances là-bas à Libreville, sur la route de Kango chez ma grande sœur. On m'appelle la semaine dernière pour me dire qu'il a laissé une grossesse là-bas. Que Dieu me pardonne, oh! Tout ça là, je ne peux pas gérer. J'ai ma petite fille-là, Fidélia qui travaille que bien trop bien à l'école. C'est là mon avenir. Tout mon argent meurt là-bas chez elle parce que je sais qu'elle va avoir le BEPC là, les yeux fermés. Je ne peux pas prendre cet argent-là encore, pour aller donner aux copines de Peter, excusez-moi oh!"

"Nous vous comprenons, madame", fait Albert. "Il s'agissait juste d'une prise de contact. C'est toujours bien de savoir à qui ont a affaire."

"D'accord d'accord. Quand je vois même votre maison là, je me demande ce que votre fille est venu chercher dans mon taudis. Elle a vu un écran plat ou même un lit chez moi! Les filles d'aujourd'hui vraiment ! Elles sont plus bêtes que nous, pardon."

"Pourquoi dîtes-vous ce genre de chose", s'insurge maman.

"Ah, madame, pardon, oh! Moi quand j'ai vu la vie de mon père là, qui plantait les tubercules pour nous payer l'école, j'ai visé juste, oh. J'ai fait les enfants avec un policier, et puis un professeur. J'ai regardé en haut. Pourquoi votre fille regarde-t-elle en bas ? Quand elle me voit là, elle peut même me comparer à vous. Aka! Elle a la maison où il y a le climatiseur. Au lieu de chercher le garçon qui habitent dans une maison ou y a la piscine, elle vient se jeter là, dans nos marécages de tchenguè!"

Après une tirade pareille, je suis à terre. Obligée de quitter le salon pour aller rire dans la cuisine. Comment quelqu'un peut-il parler de lui ainsi ? Cette femme n'a aucune honte, on dirait.

"Donc comme ça, le père de Peter est policier ?", demande Albert qui n'a rien raté de la conversation.

"Un policier mort retraité va vous donner quoi ? Vous pouvez aller le chercher du côté de Tchibanga là-bas. Je vais vous donner son numéro Libertis."

"Ce n'est pas la peine ! Nous avons compris que tout ça vous est égal, madame.", fait maman, qui semble très touchée par les propos de la mère de Peter.

"Madame, on ne va pas se fâcher, oh! Si je pouvais, j'allais pouvoir. Mais comme je ne peux pas, je préfère être claire dès le départ. Je ne pourrai pas. Même si je force, c'est un petit 100 francs cfa qui vont tomber de ma poche."

Sur ce, la dame et sa copine, siffle les 3 bières Beaufort et les 3 Regab qu'on leur a offert et elles s'en vont.

Ma mère est sciée. Elle ne sait plus quoi dire. Albert prend la parole et la fait sortir de son silence :

"On ne peut pas jeter la pierre à cette dame, Bernadette. Quand on élève nos enfants aujourd'hui, c'est avec l'espoir qu’ils évitent les mêmes embûches que nous."

"Tu as raison, Albert. Mais, je reste quand même sans voix. Je m'attendais à mieux. Tania, viens voir un instant."

J’arrive alors au salon, l'air de rien. Je m'assois en face de maman. Elle me demande alors :

"Tu connais ce garçon ? Ce Peter."

"Connaître, c'est un grand mot, maman. Ce n'est pas mon pote, mais tout le monde le connaît, quoi. C'est une star de basket à Pog."

"Ok. Donc c'est ce qu'a suivi ta sœur."

Là, je préfère ne pas répondre, car mes réponses peuvent m'emmener très loin. Je me contente de hausser les épaules.

"Je pense, Bernadette, que tu dois faire en sorte que la petite réussisse son bac et accouche dans de bonnes conditions. Il ne faut pas que sa scolarité pâtisse de cette erreur de jeunesse."


 

12-

Je suis là dans ma chambre en train de repasser mes vêtements quand ma sœur arrive en souriant.

"Je vois que vous avez bien rigolé en révisant vos maths."

"Oh, ce n'est pas Marc-Elise qui me fait rire. J'étais au téléphone avec Peter. Il devient très câlin, tu sais !"

"Ah bon! C'est nouveau. Sa mère était là."

"Oh, maman Julienne était là ! Pourquoi tu ne m'as pas appelée."

Yoooo! C'est maintenant au niveau de maman Julienne !

"Je ne savais pas que tu voulais la voir. Et comme elle avait des choses à régler avec la vieille, u comprends."

"Ok! Elle est vraiment trop cool, cette femme. Elle est gentille, elle est simple. Pas comme cette folle de Kaba qui est prise de tête !"

Je regarde ma sœur sans rien dire ; elle range ses cahiers et va se coucher sur le lit. Là, je me demande ce que la mère de Peter aurait dit si elle s'était retrouvé devant la magnifique Kaba, cette folle qui est belle on dirait et qui est toujours impeccablement coiffée et maquillée comme si elle allait mourir demain. En plus, si elle a été impressionnée par le faux climatiseur que nous avons au salon et par l'écran plat que l'oncle Alexandre, le frère aîné de maman, lui a offert à la fête des mères il y a 2 ans, qu'aurait-elle dit devant la Rav 4 de Kaba, leurs fauteuils en cuir dans le salon, leur machine à laver et leur home cinéma ?

Vraiment...

Je suis là dans ma réflexion, face à ma sœur qui lit un livre de Carol Higgins Clark, quand j'entends cogner au portail. J'entends mon frère Julien crier : "Maman, papa Jimmy est là.

La porte de la chambre de maman s'ouvre aussitôt.

Imperturbable, ma sœur reste couchée et continues sa lecture.

"Tu ne viens pas dire bonjour à papa Jimmy."

"Non. Dis-lui que je dors."

"Et puis quoi encore. Lève tes fesses de ce lit et on y va."

Nous arrivons au salon. Le mari de Kaba est heureux de nous voir.

"Huum! Mes femmes, comment allez-vous.

Là, maman prend le relais :

"elles vont très bien. C'est gentil de t'en préoccuper."

"Mais, Bernadette, je te l'ai dit. Jamais je n'ai chassé Pupuce de la maison. C'est toi qui veux la garder ici."

"Ok, ok, on ne va pas se disputer pour ça. Que puis t'offrir à boire."

"Pardon, donne-moi un verre de Whisky et ça ira."

Je sers le Whisky en question et Pupuce et moi retournons dans la chambre. Mademoiselle ma soeur continue sa lecture sans plus se soucier de ma présence. Parfois, j'ai l’impression que lorsqu'elle ouvre ses livres, elle s'envole vers un pays imaginaire d'où il est difficile de la faire sortir. Je préfère donc ne pas l'embêter et continue tranquillement à repasser mes vêtements.

À table à 20h, maman nous raconte son entrevue avec Papa Jimmy.

"Il m'a apporté 300 mille pour que j’achète la layette pour ton bébé." fait-elle à Pupuce.

"Et que dit mme Mbeng dans tout ça ?", demande Julien.

"Elle dit qu'il ne faut pas l'embêter. Elle a ses soucis. Elle n'a pas besoin qu'on en rajoute. Ma fille, heureusement que ce type travaille à Total et que tu te fais suivre là-bas !"

Pupuce continue de manger sans rien dire. On a l'impression que c'est de quelqu'un d'autre que nous parlons.

Maman n'en fait pas cas et préfère écouter julien lui raconter ce qui s'est passé lors de sa dernière rencontre de football.

"Et devine quoi la vieille !"

"Oui, je t'écoute, fiston.

"La semaine prochaine, on joue contre ses tocards du lycée français."

Se retournant vers moi, il me dit:

"Ma chère sœur, je n'aurai pas pitié de ton mec. Je vais lui apprendre ce qu'est le foot."

"Désolée pour toi, banane, Miro ne joue pas au foot. Il est plutôt karatéka."

"Sans blague... Mais quel tocard !", fait Julien.

"Tu feras moins le malin quand il t'aura mis par terre !", lui dit maman.

"Mamooo, les mères des autres, oooh! Ça discute avec les enfants, ça rigole et tout."

Tous nos regards effarés se tournent sur Pupuce qui vient de parler.

"Oh! C'est juste un constat. Quel enfant chez les Mbeng va venir blaguer comme ça avec la vieille !", conclut Pupuce.

"Ne soyez pas durs avec ma soeur. Elle a ses humeurs, mais il faut savoir la prendre."

"Ah, la vieille, arrête ton char. Qui ne connaît pas ta sœur? Quand elle commence avec toi le matin à 6 heures, à minuit, elle est encore sur ton dossier !", fait Julien.

"C'est la vie qui l'a changée. C'était une fille douce quand nous étions adolescentes."

"Ah bon !", se contente de lancer Pupuce, très sceptique. Voir moins


 

13-

 

Deux semaines plus tard, un dimanche, alors que maman se prépare pour se rendre à la messe de 8heures, je suis dans la cuisine quand arrive Pupuce.

"Est-ce que tu peux me rendre un service, Tania ?"

"Parle, je t'écoute."

"Voilà, je veux aller chez Peter. Est-ce que tu peux m'accompagner ?"

"No way! Faut pas abuser, quoi. Ma chère, c'est pas parce que maman a dit qu'on doit bien te traiter, que tu vas abuser de ma gentillesse, compris?"

"Comme t'es méchante ! Je voulais juste..."

"Tu voulais quoi. Je n'ai que ça à faire. Claquer mes sous pour le taxi ! Tout ça parce que tu ne peux pas demander à ce type de se déplacer ! C'est quoi cette histoire. Vas-y toute seule. Ne compte pas sur moi pour me taper tout ce chemin pour aller tenir la chandelle."

"Je...Je..."

Et madame se met à pleurer.

"Eh eh, eh, eh. Tu ne vas pas me faire le coup à chaque fois. Pleurer parce que je dis non, pleurer pour ci, pleurer pour ça. Ça ne marche pas avec moi. Je n'irai pas avec toi à Nchenguè, un point un trait. Je dois faire la vaisselle, je dois faire à manger et je dois réviser pour mon devoir de demain. Si ton type ne peut pas se déplacer pour te voir et ben, qu'il aille au diable."

"Comme t'es méchante, Pupuce. Je savais pas que tu pouvais dire des choses aussi dures!"

La fille-là a même quel problème ? À tout ce qu'elle demande, il faut que je dise oui, sinon madame se met à pleurer ! C'est quoi cette affaire.

"Continue de pleurer ! Je crois qu'à force de m'énerver comme tu le fais, ton enfant va bien me ressembler !"

"Comme tu es bête Pupuce ! Nous sommes jumelles, tu veux qu'il ressemble à qui ?"

"Oh, t'as raison. Qu'il me ressemble, ça vaudra mieux pour lui. Ça lui évitera d'être trop beau comme son père et e voir à 5 ans, les filles lui courir après à la maternelle."

"Tu as vraiment le sens de l'humour, chère sœur, malgré ton cœur de pierre."

"C'est fini! Voilà, c'est comme ça que madame compte me manipuler. Ma belle, regarde-moi bien ; tu peux chanter autant que tu veux et dire que je ressemble à Kaba quand j'agis comme ça, moi Tania Akendengue, je ne t'accompagnerai nulle part."

Sur ce, je continue de faire la vaisselle et madame va bouder dans la chambre.

Julien arrive alors, j'ai fini de balayer la cour. J'en finis avec le salon et je disparais. J'ai un match cet aprèm."

"Ok! Moi, je bouge pas. Je vais réviser cet aprèm."

"Cool! Au fait, j'oubliais, il faut dire à Pupuce que j'ai vu votre pater hier. Il était sobre, je crois. Il m'a dit de vous dire, de passer le voir dans la semaine."

"T'es sûr qu'il était sobre?"

"Oui, j'en suis sûr. Il était accompagné d'une jeune fille. J'ai pensé que c'était sa nouvelle copine."

"Ok. Je vais l’appeler."

"Cool!"

 

Alors que maman vient dans la cuisine me dire au revoir, je l'arrête.

"La vieille, Pupuce me fait une crise de larmes parce qu'elle veut que je l'accompagne à badamiers, là-bas. Règle ça avant de partir, quoi !"

"Que veut-elle aller y faire ?"

"Ah! Elle veut aller voir son type. Parait qu'il a été malade toute la semaine ."

"Oh! Et elle est infirmière, je suppose ?"

"Ah! Tout ça, je ne connais pas. Ce que je sais, c'est qu'elle va nous taper une fugue si tu ne fais rien."

"Ok. Je vais la voir. Où est-elle ?"

"Dans la chambre. Elle boude."

"Ok. Je vais régler cela avant de partir. Je n'ai pas envie d'être en retard à la messe."

"Maman, l'église est juste de l'autre côté de la route."

"Oui, raison de plus pour être la première assise au premier rang !"

Elle me laisse-là et va dans la chambre. Elle en sort 10 minutes plus tard et me lance: "Tania, sors un sachet d'ailes de poulet fumé. Je les ferais cuire en plus du plat de Nyemboué que j'ai fait hier soir."

"Yo! C'est comment maman! Qui va manger tout ça ? Il y a la marmite de poisson salé qui est resté hier."

"Oh, nous avons un invité à midi. Il faut bien lui offrir des plats variés à table."

"Un invité ? Qui est-ce ?

"Tu poses trop de questions, ma fille. Je suis pressée. À tout à l'heure."

La voilà partie. Je sors donc le poulet demandé et je vais dans la chambre pour savoir ce qui se passe. Quand j'arrive là, je trouve madame ma sœur en train de balancer des mots au téléphone. Les je t'aime, les doudou...etc...

Quand elle me voit entrer dans la chambre, elle lance un au revoir à son interlocuteur qui, bien sûr, j'ai reconnu."

"Alors?"

"Alors quoi?", me répond t-elle.

"Tu vas à badamier ou pas?"

"Toujours en train de blaguer et de dénigrer les autres. Je te signale que c'est un quartier comme tous les autres."

"Arrête ton char, tu veux! Tu y va ou pas."

"Non, figure toi que Tantine Bernadette a invité mon cœur à manger avec nous à midi."

"C'est une blague."

"Et pourquoi, ce serait une blague! Je te signale que ton petit cœur, ce cher Miro, vient ici comme un chef, et il s'assoie dans les fauteuils de tantine et que toi, miss, tu as le droit de le recevoir à la maison quand bon te chante. Pourquoi ce ne serait pas la même chose pour moi, dis? Il a quoi de moins que Miro, mon chéri?"

"Eh! Madame l'avocate, désolée d'avoir posé la question! Pas la peine de monter sur tes grands chevaux."

"Vous êtes quand même marrants Julien et toi. Vous êtes là à détester Peter alors que vous le connaissez à peine ! Je vous signale que je l'aime moi !"

"Ah, mama, c'est quoi mon problème là-dedans? Tu l'aimes, tu l'aimes pas? Qu'est-ce que j'en ai à foutre. Est-ce que c'est mon cœur qui souffre."

"Pourquoi penses-tu que mon cœur souffre, dis-moi? Allez, je t'écoute !"

"La go, tu vois, on ne voit pas parler jusqu'àààààà! Je ferme ma bouche tranquillement et je retourne faire mon ménage. D'accord. Ton gars peut venir manger toutes les cuisses de poulet qu'il veut, ce n'est pas mon affaire. C'est la maison de ma mère, pas la mienne. Si elle veut nourrir tout le monde, je n'ai rien à redire dessus."

"T'as vu comme tu es méchante, Tania ! Pourquoi Miro aurait le droit de venir s’asseoir ici et prendre ses aises dans le canapé de tantine, et pas Peter?"

"Yo! La fille-là, c'est comment! Ton gars vient, c'est quoi maintenant l'affaire qu'on doit rester là des heures à discuter !"

"J'en ai marre que vous le traitiez comme un moins-que-rien. Vous sentez supérieurs à lui, n'est-ce-pas ? Ce n'est pas parce qu'il n'a pas un père plein au as comme Miro, ou une mère médecin comme la copine de Julien, que vous devez le dénigrer. Je te demande de le respecter et d'être un peu plus gentille envers lui."

"Ok, c'est noté. Puis-je retourner dans la cuisine?"

"Non, je n'ai pas terminé. Je veux que tu me regardes dans les yeux et que tu me promettes de mieux traiter le père de mon enfant."

"Ecoute Akendengué Marjorie, j'ai autre chose de plus important à faire là, à l'instant. Donc, fous moi la paix avec tes foutaises. C'est pas possible d'être aussi prise de tête. Je faisais comment avant, quand t'habitais pas ici."

"Tu t'ennuyais comme la mort, car tu n'avais personne avec qui te comparer. Depuis que je suis là, tu t'amuses à me montrer que Miro est plus gentil parce qu'il t'offre des fleurs. Que Miro est plus doux parce qu'il dit des mots doux. Que Miro..."

"La go, laisse-moi mon gars tranquille. Je n'ai jamais autant parlé que depuis que tu es ici avec toutes tes conneries. Je vais sourire à ton type quand il sera là. Mais s'il ne change pas de comportement avec toi et continues à t'ignorer comme il le fait et à courir et coucher avec toutes ces filles au lieu de se préoccuper de ton état, ça ne changera rien du tout."

Sur ce, je sors de la chambre et la laisse là. Du coup, je suis chamboulée et me mets à réfléchir. Est-ce que je snobe vraiment ce Peter ? C'est vrai que je le trouve con et roigolo parce qu'il use de son charme sur toutes les filles, mais à part cela, je ne le connais pas vraiment. En fait, bordel comme il est, jamais je n'aurais imaginé que ma sœur puisse tomber amoureux d'elle. Mais bon, puisqu'ils ont concrétisé l'affaire, peut-être que je devrais, comme elle le demande, le "respecter". Donc, je décide de préparer une bonne marmite de riz à ma façon et de faire sauter les ailes et cuisses de poulet fumés avec des poivrons et autre petits légumes. Quand maman rentre de la messe à 10 heures moins dix, elle me trouve affairée dans la cuisine.

"Oh, je vois que t'as pas mal avancé dans la cuisine. Je vais chez le malien à côté. Ta sœur m'a dit que son invité ne boit pas de boissons gazeuses, alors je vais chercher des jus Cérès."

"Ben voyons !"

"Qu'est-ce qu'il y a Tania ? Tu as quelque chose à dire ?"

"Non, rien. Je préfère me taire sinon on pensera que je snob le type parce qu'il vit à Ntchenguè badamier."

"Ah, ta sœur a réussi à te faire entendre raison ! Sache que tu vas devoir apprendre à l'apprécier ce Peter. Il est le père de ton futur neveu."

"Franchement la vieille ! Je ne l'avais pas remarqué ?"

Elle s'en va en riant.


 

14-

 

Je chantonne en mettant la table lorsque ma grand-mère Ziza arrive à 11h 30.

 

"A mama, Itchango sè! Eroumbè zo éré na rwé?"

 

" Bonjour Mamie. Pupuce est dans la chambre."

 

"Ta sœur ne reste que dans la chambre! À chaque fois que je viens, c'est la même réponse que tu me donnes ! Fais là sortir de là."

 

Je m’exécute et ramène Pupuce dans le salon. Alors, la grand-mère lui demande comment elle va et ce qu'elle faisait dans la chambre.

 

"Je lisais, Mamie."

 

"Et bien maintenant, tu vas aider ta sœur à mettre la table."

 

Elle n'ose même pas bouder, car elle sait qu'avec la grand-mère, c'est pas la peine.

 

La table à 6 place. Je mets des assiettes pour maman, Pupuce, mamie et moi. Et je n'oublie pas celle de MONSIEUR Peter. Je rajoute une assiette pour Albert, qui aujourd'hui vient sans son épouse qui est malade. Alors que Mamie tente de mettre un peu de bon sens dans la tête de ma sœur en lui expliquant qu'elle n'a pas à faire la paresseuse parce qu'elle est enceinte, quelqu'un cogne au portail.

 

"J'y vais", crie Pupuce en pensant que c’est Peter qui est là.

 

Elle revient déçue et me lance :

 

"C'est pour toi, Tania."

 

Je sors et retrouve Miro au portail.

 

"Comment va la plus douce ?", me fait-il.

 

"Comment va le plus beau ? Je suis heureuse de te voir là."

 

Avant de me blottir dans ses bras, je m'assure bien que les yeux de mamie ne traînent pas dans le coin.

 

"J'avais envie de te voir. Mes parents sont en week-end à la Pointe Denis avec un couple d'amis. Je m'ennuie à la maison."

 

"Reste manger avec nous, si tu t'ennuies !" fait madame ma mère qui rentre avec des boissons dans un sac.

 

Yoooo! Ça va être rock'N'roll ce repas.

 

Au loin, j’aperçois Albert qui arrive. Il semble un peu inquiet. La tante Georgeline son épouse est hospitalisée à la clinique Bilie.

 

"Ils disent que ça va mieux aujourd'hui. Je viens de la quitter. Le médecin lui demande de se reposer."

 

"Que lui est-il arrivé ?" demande Mamie.

 

"Oh! Juste une hausse de tension. Comme d'habitude. Dîtes, jeune homme, je ne vous connais pas. Je suis Albert un oncle à Tania. Et vous?", fait Albert en avançant le bras tendu vers Miro.

 

"Je suis Miro, le petit ami de Tania."

 

J'ai les yeux qui fixe le sol à ce moment-là. J'attends seulement que Mamie rajoute du sel dans l'affaire. Et ça n'attend pas. Elle s'écrie en langue:

 

"Oh, Bernadette, où est ce que ta fille a ramassé ce beau garçon ? J'espère qu'il est bien élevé, hein !"

 

Tout le monde éclate de rire, sauf Miro qui, bien sûr, n'a rien compris.

 

"La grand-mère de Tania te trouve très beau", lui dit maman.

 

"Oh, merci", répond Miro en rougissant. Et sans transition, il s'assoit face à Albert, au salon, et la conversation entre eux commence.

 

Je vais dans la cuisine histoire d'apprêter les plats à mettre à table. Ma sœur est là dans un coin. Elle semble soit bouder, soit être impatiente.

 

"Qu'y a t-il?" lui fais-je.

 

"Je savais pas que t'avais invité Miro."

 

"Euh, non. Il est venu me faire un coucou et maman lui a demandé de rester manger avec nous. Y a un souci?"

 

"Oui, qu'a t-il à venir voler la vedette à Peter? Je te signale que c'est mon petit ami qui est attendu pour ce repas."

 

"Et je te signale, Akendengue Marjorie, qu’ici, je suis chez ma mère. Je fais ce que je veux."

 

"Ok, ok. Je n'ai plus faim de toute manière. Je vais dormir."

 

"Tant mieux pour toi. Ça nous donnera l'occasion de saucissonner ton mec et d'en apprendre plus sur lui. Et ne compte pas sur nous pour te laisser à manger."

 

"T'es trop nulle, Tania Akendengue. Va au large."

 

"Pareil pour toi! Tu me les brises, tu entends."

 

Sur ce, madame s'en va de la cuisine en pleurant. Cela alerte maman qui arrive et me demande :

 

"Qu'est-ce qui se passe encore ?"

 

"Rien du tout maman. Elle n'en finit plus avec ses crises de larmes. C'est vraiment chiant !"

 

"Mademoiselle Akendengue, dis-moi quelque chose. Pourquoi Julien et toi dîtes que Peter est un cancre ? Il n'a que 20 ans et c'est pas trop vieux pour la terminale."

 

"Oh, c'est juste qu'il ne peut pas avoir 20 ans s'il a fait 2 fois la 5ème, 2 fois la 3ème et qu'il repasse le bac pour la 3ème fois cette année !"

 

Ça veut dire quoi ça !?"

 

"Mais maman, ça veut dire qu'il est né au moins 5 ans avant la date inscrite sur son dossier scolaire."

 

"Oh! C'est fort ça !" s'étonne maman.

 

"Très fort, mais très courant aussi.", fais-je en sortant de la cuisine.

 

Quand je dépose le premier plat à table, je me rends compte que le fameux Peter est arrivé. Il est vêtu comme un basketteur, avec la tenue intégrale de Allen Iverson, un basketteur que monsieur adule. Il me sourit quand il me voit. Comme si lui et moi on a gardé les vaches ensemble.

 

Je ne lui ai jamais parlé. Jamais serré la main. En fait, rien que le voir m'énerve car il a fait tomber beaucoup de mes copines du collège. Ils les a soit sautées soit bécoquettées. Donc...je reste gonflée à la vue de la grossesse de Pupuce. Mes fameuses copines, elles, ont eu "la chance" de ne pas tomber enceinte.

"Bonjour Tania. On dit quoi ?", me fait il en souriant.

Mon Dieu, si je pouvais baffer ce type et sa gueule de con!!!

"On est là. Rien de spécial."

Je vois ma sœur qui sort du couloir des chambres avec le sourire. Elle vient s’asseoir là, sur le canapé, à côté de son type. Pardon...

Comme nous sommes en nombre impair, Albert décide que les femmes ainsi que Miro, mangeront à table. Il invite Peter à manger avec lui sur la tablette du salon.

"Ok, ça me va, vous savez", fait Peter histoire de montrer qu'il est poli.

J'accompagne Miro et Peter se laver les mains dans la cuisine. Alors, que mon bof a fini, monsieur mon métis en profite pour me serrer dans ses bras et me foutre un smack.

"Miro, ma grand-mère est là !"

"Mlle Akendengue, t'as intérêt à m'embrasser correctement, sinon, je t'assure que je ferai pire devant ta grand-mère."

Yooo! Pardon, je n'ai pas envie que la pauvre vieille se casse les yeux !

À table, les plats sont variés : poisson salé aux aubergines, poisson fumé au Nyemboué, Poulet fumé aux petits légumes. Avec du Riz, du manioc et e la banane.

"Ah, ça! On dalle pas mal chez vous ! Vraiment, je suis content d'être là." fait Peter.

Je souris. J'ai envie de dire au type, mange en silence, pardon.

Manque de pot pour moi, le type est très bavard. Il discute avec Albert qui se montre très curieux. L'ami de maman veut en apprendre plus sur le père de l'enfant à naître de Pupuce; il se lance dans les questions qui intéressent tout le monde, après avoir parlé football et basket ball.

 

"Alors, dis-moi jeune homme. Comment fait-on pour avoir déjà 4 enfants en terminale. Et plus, il parait."

 

Sans même réfléchir, Peter répond avec une franchise désarmante :

 

"Ce n'est pas de ma faute, monsieur. Je dis toujours aux filles de prendre leurs précautions, mais elles se jettent toutes nues dans mon lit sans que je n'ai besoin de faire d'effort. Quand je rentre chez moi après un match de basket, il y en a quatre, cinq parfois plus, alignées là devant la maison. Je fais comment moi pour m'acheter toutes ces capotes !?"

 

Je ne sais pas si Albert a voulu faire de l'humour, mais il a eu réponse à sa question !

 

Je manque de m'étouffer en tentant de m'empêcher d'éclater de rire.


     

15-

 

"Mais, jeune homme ! Le SIDA dans tout ça ?"

 

"Ah, monsieur, c'est Dieu qui me garde, oh !"

 

J'ai tout d'un coup l'impression que maman va avoir une attaque. C'est plus qu'elle ne peut entendre. Elle sort de table pour aller se passer de l'eau au visage. Quand elle revient, elle souhaite changer de sujet et demande à Miro :

 

"Tiens, Miro, julien me disait que vous avez une rencontre de football aujourd'hui ?"

 

"J'ai arrêté le foot, madame. Mon beau-frère m'a foutu la honte sur le terrain le week-end dernier. Je dois dire que Julien a pris un sacré plaisir à me ratatiner pendant le match amical mercredi dernier."

 

"C'est bien lui ça ! Je pense que c'était sa manière de te prévenir que tu dois faire très attention et qu'il t'a à l’œil", fait maman.

 

"Oh! Ça, j'ai compris la leçon. C'est un sacré joueur, ce petit."

 

"J'éviterai de l'appeler petit", lui fais-je en riant.

 

Albert, qui n'démord pas, revient à la charge sur Peter. J'ai l'impression qu'il se dit qu'étant donné qu'il l'a devant lui, il doit en profiter.

 

"Dis-moi, jeune homme, ne trouves-tu pas que ta mère est bien trop jeune à 35 ans pour être grand-mère."

 

"Mais monsieur, ma mère ne peut pas avoir 35 ans si elle m'a fait à 15 ans et que j'en ai 25 aujourd'hui. C'est l'âge des papiers, ça !"

 

Là, Albert manque de s'étouffer. Grand-mère Ziza se lève de table pour lui donner une tape très forte dans le dos. Maman me regarde comme pour me dire qu'elle n'en croit pas ses oreilles. Pupuce garde les yeux fixés sur son assiette. Elle est imperturbable. Miro nous sort de notre mutisme et lance en riant :

 

"Tu viens d'une sacrée famille Peter ! En plus d'être un très bon basketteur, tu as beaucoup d'humour."

 

L'autre sourit sans comprendre l'ironie derrière la chose.

 

"Ah ! Je n'ai pas l'habitude de mentir, monsieur. Ma mère m'a rectifié l’âge quand je devais passer le BEPC. Voilà. Elle m'a dit que si elle ne le faisait pas, j'aurais des soucis pour avoir une bourse d'études après le bac."

 

"Ah, ok!" fait Albert qui a retrouvé ses esprits. "Et que comptes-tu suivre comme études après le bac ?"

 

"Sincèrement monsieur, il faut d'abord que j'ai le bac. Une fois que je l'aurai, je vais réfléchir. Parce que j'ai fait tellement de plans dans ma vie làààà! Rien ne s'est réalisé jusqu'à présent."

 

Mama regarde fixement Peter comme s'il s'agissait d'un extraterrestre. Elle lui lance alors :

 

"Nous prions pour que tu décroches ton baccalauréat."

 

"Que Dieu entende vos prières madame. Comme ça au moins, je pourrai me casser de Port-Gentil et aller rejoindre mes frangins qui jouent le basket dans de vraies équipes professionnelles en France. Ce pays de Gabao là, tue trop les rêves des enfants. Quel basket on peut jouer ici ?"

 

Dans tout ce que le type vient de dire, j'ai seulement noté son intention de se tirer de Port-Gentil. Des enfants, il en a déjà. Alors, un de plus ou de moins, il a des projets dans la tête et il les fait en solo, apparemment.

 

"Je compte moi aussi aller en France après le baccalauréat", annonce ma sœur. J'ai passé des tests en ligne pour une école de commerce et ils sont bluffés par mes résultats.

 

Yooo! Depuis quand cette fille a décidé de me rouler et d'aller en France au lieu de me suivre au Ghana ou en Afrique du Sud!!! Finalement, c'est mieux de faire ses plans toute seule !

 

"Enfin, j'irai en France si bien sûr, tantine Bernadette garde le bébé comme elle l'a promis", fait ma sœur en regardant ma mère avec insistance, comme pour l'hypnotiser.

 

"Mangez les enfants, mangez. On parlera du baccalauréat et de l'avenir, lorsque nous aurons le ventre plein", fait Albert.

 

C'est en silence que nous terminons le déjeuner.

 

Alors que je débarrasse avec l'aide de Miro, les adultes discutent dans le salon. Pupuce et son chéri discutent là, derrière la maison. On entend alors quelqu'un entrer et fermer le portail. Un invité surprise: Kaba.

 

Elle est pimpante comme à son habitude. Elle vêtue d'un bel ensemble en bazin rose, avec foulard sur la tête. Elle porte de jolis escarpins, comme si elle avait rendez-vous à la préfecture ou dans une autre administration. Même le dimanche, après-midi, cette femme ne relâche pas ses efforts pour montrer à tous qu'elle a de la classe. Elle arrive et salue tout le monde.

 

Maman me demande alors de lui apporter à boire. Quand Kaba remarque Miro, elle demande à maman de qui il s'agit. Alors, maman lui répond honnêtement :

 

"C'est le petit ami de Tania."

 

"Ah bon !", s'étonne Kaba. "Et que fait-il chez toi ? Il a mangé à ta table ? C'est quoi cette histoire ? Tu encourages maintenant ta fille dans ce genre d'histoire, c'est ça !"

 

"Ah, la ferme !», lui intime la Grand-mère. "Où sont passées tes bonnes manières !"

 

"Oh ! C'est comme ça maintenant ! Je dois la fermer parce que les enfants ont maintenant le droit de tout faire, c'est ça !"

 

"Hummmm! Agnès Mbeng, tais-toi un peu ! Depuis quand as-tu perdu tout sens de la répartie ? Tu n'as pas à parler à ta grande sœur de la sorte.", s'insurge Albert.

 

"Faites comme si je n'ai rien dit. De toute manière, je ne fais que passer.", répond Kaba.

 

"Et qu'est-ce qui t'emmène par ici ?", demande maman.

 

"C'est Mbeng qui n'arrête pas de me faire le bruit à la maison. Il me fatigue les oreilles en répétant que je dois venir chercher sa "fille" parce qu'il ne l'a pas mise à la porte. Je viens donc la chercher. Enfin...en fait, non. Je n'ai pas envie de l'avoir chez moi. Je m'en vais."

 

"Mais tu n'es pas obligée de t'en aller maintenant. Reste discuter avec nous."

 

"Non, je risque de commettre un crime si je vois cette imbécile qui a eu le culot d'aller se faire sauter sans capote à quelques mois du bac. Qu'elle aille au diable!  Mbeng la veut à la maison, qu'il vienne la chercher lui-même."

 

Dès que j'entends cela, je vais rapidement derrière la maison, histoire de mettre en garde, Pupuce et Peter. Manque de pot, ils ont contourné la maison et sont à la terrasse, devant. Et merde et merde et merde. J'entends crier comme si la mort frappait à la porte :

 

"ON PEUT SAVOIR CE QUI SE PASSE ICI?

 

C'est fort. La tension est montée d'un coup. Deuxième gifle. Kaba est folle de rage. Ma sœur ne sait plus où se mettre. J'entends seulement Peter qui menace la mère de sa copine :

 

"Tu la touches encore et je te rends les baffes que tu lui donnes !"Tu la touches encore et je te rends les baffes que tu lui donnes !"

 

Yooooo!

 

"Agnès, Agnès", s'écrie maman. "Qu'est-ce qui ne va pas ? Pourquoi tu gifles l'enfant ?"

 

"Quoi, pourquoi je la gifle ! Donc c'est ça que tu trames chez toi ??? Ne serait-ce pas ici par hasard qu'elle est venue se faire baiser bêtement ? Une fille brillante qui n'a jamais eu besoin de cours de soutien pour avoir des tableaux d'honneur à l'école. Il faut bien qu'elle ait été influencée par TA fille, Bernadette. Ton andouille de Tania, ce canard boiteux qu'il a fallu pousser comme une brouette à l'école."

 

Yoooo! Qu'est-ce que je viens faire dans cette histoire ? Mamooooo!!!!

 

"Agnès, fous le camp d'ici s'énerve grand-mère. "Une femme incapable de parler correctement aux autres n'a rien à faire en face de moi. Fous le camp avant que je m'énerve."

 

"Je m'en vais. De toute manière, ça toujours été comme ça. Tu as toujours cautionné les bêtises de Bernadette, maman. Ça ne m'étonne pas ! Reste à faire vos magouilles ici. Vous pouvez la donner en mariage cadeau, c'est pas mon problème."

 

Sur ce, elle s'en va comme elle est venue. Et personne ne la retient. Je suis quand même sonnée. Comment cette femme qui m'a mise au monde peut ainsi me rabaisser ? Elle l'a systématiquement fait depuis que je suis enfant. Si j'avais vécu avec elle et mr Mbeng je crois que je n'aurais plus de dents tant elle m'aurait cogné, vu qu'elle m'a toujours trouvé bête. Il faut vraiment que je décroche ce baccalauréat à la fin de l'année. Cela lui clouera le bec.

 

Miro s'est rapproché. Il me sert dans ses bras et me murmure à l’oreille : "Je t'aime."

 

Heureusement qu'il est là, parce qu'à cet instant, j'ai juste envie d'aller m'enfermer dans ma chambre et ne plus en sortir jusqu'à demain.

 

"Repartons au salon," nous intime Albert.

 

Assis là, dans le canapé, il s'adresse à Miro :

 

"Que font tes parents dans la vie, jeune homme ?"

 

"Mon père est Directeur Général d'une boîte pétrolière et ma mère est femme au foyer."

 

"Yo, mec. Ton père peut me trouver un petit taf quelque part ! Glisse lui deux mots, pour moi s'il te plaît."

 

Vraiment, le type qu'on appelle Peter...

 

"Tu cherches quoi comme p'tit boulot?", lui demande Miro.

 

"Je sais pas, moi. Ma mère dit que je dois me débrouiller pour payer les layettes pour les deux enfants à venir. Il faut que je fasse quelque chose histoire qu'elle arrête de me prendre la tête."

 

Albert, qui suit la conversation avec un intérêt particulier, lance alors à Peter :

 

"Jeune homme, le travail, il faut le prendre avec sérieux, d'accord. Il ne s'agit pas d'y aller simplement avec l'intention de gagner de l'argent vite fait. Il faut le faire consciencieusement."

 

"Ah, je vais encore faire comment ? Je vais m'appliquer. Et si ça casse, ça casse. Je ne vais pas forcer."

 

Albert est obligé de se tenir la tête entre les deux mains tellement il est dépassé par l’imbécillité de Peter !

 
 

16-

 

Cette nuit-là, couchée sur mon lit, je reste là les yeux fixés au plafond. Je ne sais quoi penser de cette journée. Et je suis troublée par l'annonce de Pupuce. À quel moment a t-elle décidé d'aller étudier en France ? Jamais elle n'en a parlé.

Je suis là, en silence quand madame arrive dans la chambre. Elle porte une chemise de nuit qui étouffe son gros ventre.

"Je pensais que tu dormais déjà."

"Non, je réfléchis."

"Dis plutôt que tu penses à Miro, oui"

"Et si c'est le cas, je ne vois pas où est le problème."

"Tu rêves vraiment ma belle si tu penses que ses parents vont laisser votre histoire empêcher leur fils de réaliser ses rêves."

"Ça veut dire quoi, Pupuce?"

"Ça veut dire qu'ils te tolèrent simplement parce qu'ils sont basés au Gabon en ce moment. L'an prochain, ils seront dans un autre pays. Et ils ne vont sûrement pas t'emmener dans leurs bagages."

"Je comprends mieux pourquoi tu es tombée dans les bras de Peter, ma chère. Vous êtes tous les deux des imbéciles."

Je me lève du lit et prends la couverture avec moi. Je vais dormir dans le salon. Je pense que je ne pourrai pas supporter cette nuit, ni les pleurnicheries de ma sœur, ni sa mauvaise langue. Je suis vannée. Il faut que je garde l'esprit positif pour la suite.

J'envoie un whatsapp avant de m'endormir.

"Je T''M"

Et je m'endors en ayant la sensation que cette année, jamais je ne l'oublierai.

Deux semaines plus tard.

J'ai l'impression que maman a un enfant de plus dans la maison.

En fait, depuis ce fameux dimanche que personne n'arrive à oublié, monsieur Peter a du mal à rentrer chez lui après les cours. De fait, il vient manger tous les jours à la maison en sortant de Raponda. Donc, quand madame ma sœur arrive à la maison, elle rajoute une assiette à table pour monsieur mon bof. Il est pile à l'heure13h. Il mange tranquille et ensuite, retour en cours. Les deux fois où il n'est pas venu à 13h, il était là à 17h. Je pense que la nourriture de ma mère est tellement bonne, qu'il a dû mal à répondre non aux "invitations" faites par ma sœur.

Il mange et se rempli bien la panse. Pourtant ses attentions vis-à-vis de ma sœur n'ont pas très significatives. Monsieur sort avec Belinda en ce moment. Elle est en 3ème au collège évangélique. C'est la cousine de Suzanne, une de mes amies de classe. Je l'ai appris il y a quelques jours. Parait que Belinda raconte à tout le monde que c'est elle LA TITULAIRE de Peter et que les autres sont des passe-temps. Bref, j'ai partagé l'info avec Julien. Il m'a répondu :

"Sans blague! Mais moi, je viens d'apprendre que Peter est avec Shanty, tu sais celle qui rendait Spyke complètement dingue. Eh ben,figure-toi, que tout le monde les a vus, ou je devrai dire, entendus faire l'amour dans les toilettes au Gymnase Total après le match, mercredi dernier. L'affaire a même dégénérée. Il y avait une certaine Chanice qui elle aussi est une autre des titulaires de ton beau-frère. Elles se sont franchement rentrées dedans après le match. Les gens ont dû les séparer. "

"Sans blague, Julien! Tu rigoles."

"Je te dis que ma source est fiable. Ton bof là, pardon. Je préfère me taire. Je ne sais pas ce que ta sœur est partie chercher dedans."

"Tu ferais mieux de ne pas te poser cette question. Jamais tu n'auras de réponse."

"En tout cas, quand on parle du loup...monsieur arrive manger. Maman ne s'est pas rendu compte que sa cuisine est devenue celle des restos du cœur."

"Oh, Julien! Comment peux-tu dire des choses pareilles!"

"Je le dis parce qu'il ne manque plus que le type emmène sa valise et s'installe dans ta chambre et t'oblige à dormir au salon. Je m'en vais faire un tour. Ce type me sors par les oreilles."

Sur ce, Julien s'en va en évitant soigneusement Peter qu'il croise au portail.

"Comment va la belle Tania?", ma fait Peter en me donnant une tape dans le dos.

Depuis quand suis-je devenue sa potesse!?

"La belle Tania va bien. Attends, je vais chercher ta chérie. Moi, je vous abandonne. Je vais voir mon père."

Je vais chercher Pupuce qui est en train de lire dans la chambre. Elle arrive avec un large sourire au visage. Je ne m'occupe plus du reste. J'ai rendez-vous avec Magloire Akendengue, mon cher et tendre père. En chemin, je fais ma prière. J'aimerais le trouver sobre en arrivant là-bas.

Il habite du côté du quartier Pavé centre social. Je me tape la route à pince car depuis l'année dernière, j'économise sur l'argent du taxi que mon père nous donne chaque mois. Je veux avoir une somme assez conséquente au moment où il faudra faire le bon choix pour mon avenir. Je me suis renseignée sur les études au Ghana et en Afrique du Sud. Je sais combien cela peut coûter. Il faut simplement que quelqu'un de bon cœur, maman ou papa, décide de me suivre dans mon délire. Il faut que je sorte du Gabon. Il est hors de question que je reste ici pour mes études. Je ne me vois pas atterrir à l’université des sciences et techniques de Masuku, pour y aller perdre mon temps. Trop de grèves dans l'enseignement tuent les espoirs des jeunes.

Je veux faire des études d'ingénierie. Je veux avoir mon diplôme et être bilingue pour entrer sans problème dans le secteur pétrolier à Port-Gentil.

Une fois que j'aurais mon premier emploi, j'envoie ma mère à auto-école et je lui paie une voiture. Ensuite, je retape la maison dans laquelle nous habitons. C'est la maison que lui a laissé feu notre grand-père.

J'ai des projets plein la tête et celui qui est là-haut dans le ciel va m'aider pour les réaliser.

Je suis obligée d'enlever mes chaussures en empruntant le chemin boueux qui me mène vers la maison de mon père. Il s'agit d'une petite maison en dur dont la peinture aux murs à besoin d'être rafraîchie.

Je cogne à la porte d'entrée. Le paternel me crie d'entrer.

Je le trouve assis dans le salon. Il semble bien calme et sourit en me voyant entrer.

"Comme vas-tu, ma fille?"

"Je vais bien papa. Et toi."

"Ça va très bien. Comme tu vois, je suis en forme, je suis propre et je n'ai pas bu."

"Je vois ça, le boss. Je suis contente pour toi. Mais, samedi je viendrai faire un peu de ménage dans cette maison. Y a trop de désordre, le vieux!"

"Ah laisse! J'ai chassé la fille qui était là avec moi. Tout ce qu'elle voulait, c'est seulement le lit, le lit, le lit. Incapable de tenir une maison."

"Mais sinon, le vieux, je ne suis pas venue t'écouter me raconter tes aventures au lit, où bien."

"Hummm! Mes filles...toujours en train de faire semblant d'être choquées quand on parle de sexe et après, ça nous arrive là-bas avec des grossesses !"

"Oh, papa! Arrête un peu! Ne mélange pas tout. Je ne vais pas venir raconter mes petites histoires avec toi, ou bien."

"Pardon, tu vas me rendre sourd avec tout ton français-là. Je sais que je peux compter sur toi. Tu as la tête sur les épaules. Celle de ta sœur voyage un peu trop entre mars et la lune."

"Bon, sinon elle te dis bonjour."

"Arrête de mentir, ma fille. Ça ne te réussit pas. Cette fille-là et moi, on se rencontre en route. Elle change de trottoir parce qu'elle a honte de moi."

"Oh! C'est quoi cette histoire? J'étais pas au courant."

"Ça ne date pas d'hier. Toi quand tu me rencontres en route, même si je suis bourré comme pas la peine, tu ne peux pas passer sans t'inquiéter. Elle, elle trace sa route. Je n'en parle pas parce que je ne veux pas me plaindre."

"Ah, le boss, je suis désolée. Je ne savais pas que ça se passe comme ça entre vous. Tu aurais dû me le dire depuis."

"Ah, elle a son père Mbeng, qui est à Total et qui roule dans une grande Mitsubishi Pajero. Moi, je suis dans ma vieille Toyota Corrola. Qui me remarque? Personne."

"Ah, le boss, tu sais que tu es mon cœur! Pour rien au monde je ne t'échangerai."

"Y a que toi, pour me considérer, y a que toi."

"Mais toi-même tu sais que toi et moi c'est l'eau dans l'eau. Tu es l'amour de ma vie, papoumet!"

"Hummmm! La fille que Dieu m'a donnée, là, elle sait baratiner les gens!" me fait-il en souriant.

Je suis heureuse de le voir rire. Un peu plus et il sombrait dans la déprime en me racontant le traitement que lui inflige Pupuce.

"Bon, Tania Akendengué, je t'ai appelé pour t'annoncer une bonne nouvelle."

"Monsieur Akendengué, parle ; je t'écoute."

"Aujourd'hui, ça fait 4 mois que je n'ai pas bu une goutte d'alcool. J compte les jours. Je me sens mieux, tu sais."

"Mais, je vois ça le boss. Félicitations ! Je suis contente pour toi. Tiens le coup cette fois, s'il te plaît !"

"Ça ira, ça ira. Je te promets que ça ira. Voir moins


 

17-

 

"Mais dis moi Tania, comment se passe la grossesse de ta sœur?"

"Oh, ça va le boss, ça. Tout le monde s’occupe d'elle, maman, Mamie. Tranquille quoi."

"Ah! Et elle va régulièrement à l'école, j'espère."

"Oui, de ce côté-là, ça va."

"Et si tu me parlais du côté qui ne va pas!"

"Ah, toi aussi monsieur Akendengue! Je ne suis pas là pour parler des choses des autres!"

"Je t'écoute Mademoiselle Akendengue. Je t'écoute."

"Non, y a rien. C'est juste que le type qui l'a engrossée, attend deux enfants en même temps."

"Il a de l'énergie, ce type! Il travaille où?"

"Il est avec nous à Raponda. Il passe le bac en même que nous."

"Ah! C'est un lycéen! Ok, au moins, elle a choisi quelqu'un de son âge."

"Ouais, ouais...", fais-je en regardant dans le vide.

"Tu vas cracher le morceau ou faut-il que j'aille voir Agnès Mbeng pour qu'elle me déballe tout ce qu'elle a sur le cœur ! Figure-toi qu'elle m'a menacé la semaine dernière au marché du grand-village. J'achetais tranquillement ma sardine fumée et elle s'approche de moi pour me dire que ta sœur va finir comme moi, parce qu'elle ne sait pas viser haut!"

"Oh! Et qu'est-ce qu'elle voulait dire par-là?"

"Ah, vous les femmes et la manière que vous avez toujours de comparer les hommes en ne tenant en compte que leurs poches. Elle ose me balancer que si j'ai un peu de chance, peut-être que le mari que Pupuce nous ramènera sera capable de sortir 5mille cfa pour la dot!"

"Non, papa! Elle a osé dire ça!"

"C'est la vérité que je te dis. Je suis resté là ébahi! Cette femme n'a pas changé. Mais de là à dénigrer sa fille à ce point ! C'est pour cela que je te demandais des informations sur ce jeune homme. Peut-être que mme Mbeng aurait préféré qu'elle fasse l'enfant avec un pétrolier ou alors le fils d'un PDG ou d'un ministre."

"En tout cas...Dans cette histoire, tout le monde va mettre sa bouche, car nous sommes tous dépassés. Mais, sinon, on est obligé de rester positif."

"Dis-moi, elle était pressée de pouponner, ta sœur? Elle est la meilleure de sa classe depuis des années. Elle a les clés pour un avenir brillant ! Qu'est-elle allée faire dans le lit d'un homme sans protection ? Dans les livres qu'elle lit, on ne parle pas de la pilule ?"

"Le boss, cette histoire-là, je ne veux plus en parler, parce que bientôt, on dira que c'est moi qui l'ai enceinté."

"Tu as beaucoup d'humour, ma fille. Bien, voilà une enveloppe. Il y a cent mille francs à l’intérieur. Donne-la à ta mère. Elle saura quoi faire avec. C'est pour acheter la layette de votre futur bébé."

"Ok, le boss. Vraiment, cet enfant-là n'est pas encore né, mais tout le monde l'attend avec impatience."

"Vous voulez nous faire vieillir trop vite, on va encore faire comment !"

 

Arès avoir fait le ménage et ranger un peu la maison, je m'en vais de chez mon père avec un sourire aux lèvres. Il a réussi à me mettre de bonne humeur, ce type. Et je suis heureuse de le voir plus en forme que la dernière fois. Quand j'arrive à la maison, il est 19h. Je trouve maman assise dans le canapé en train de lire le quotidien L'Union. Elle me sourit en me voyant rentrer.

"Miro était là, il y a tout juste dix minutes."

"Oh! Il a dû m'appeler, mais ma batterie est complètement à plat."

"Ah! Il a laissé deux livres de philosophie pour toi."

"Chouette, chouette, chouette. On les étudie en classe et on a dû mal à les trouver ici. Son père a dû les acheter quand il était de passage à Paris."

"y en a vraiment qui ont de la chance", me fait-elle en souriant. "Dis-moi, mademoiselle Akendengué, où as-tu rencontré ce jeune homme?"

"La vieille, toi aussi, je vais pas me mettre à te raconter mes petits secrets!!!"

"Arrête ton char et réponds à ma question."

"Bon, on s'est rencontrée à la plage, à SOGARA un dimanche. Mais, t'inquiète, ce n'est as mon corps en maillot de bain qui l'a attiré, parce que j'étais encore tout habillée quand il m'est entré dedans."

"Menteuse! Et dis-moi, il n'a pas un ami qui aurait pu voler le cœur de Pupuce. Au lieu de ça, on se retrouve avec ce Peter qui me fous des mots de tête à chaque fois qu'il ouvre la bouche !"

"Ah, non, la vieille. Que les choses soient claires entre nous à partir d'aujourd'hui. Je ne gère pas les affaires de ma sœur. Je veux bien me confesser et reconnaître qu'elle était la nuit où ils ont conçu leur enfant, mais ce n'est pas moi qui l'ai envoyée. Qu'on ne me parle plus de cette affaire sinon, je pense que ma tête va exploser."

 C'est ça la nouvelle génération ? Je suis simplement dépassée. Le type vient de me dire que le père de Miro lui a trouvé un job pour les grandes vacances. Il va travailler 3 mois pleins à Maurel & Praum, et lorsque je le félicite en disant qu'au moins, il pourra s’occuper un tout petit peu de son bébé, il me réponds que cet argent, c'est pour payer son billet pour la France. Il me dit qu'il a déjà ses plans et tout! Qu'est-ce qui ne va pas chez ce type. Il fait les enfants comme ça pour le plaisir ? C'est ça la nouvelle génération ?"

"Maman, je ne sais même pas pourquoi tu te prends la tête! C'est toi-même qui veut les maux de tête parce que c'est toi qui le laisse venir lorgner dans tes marmites et manger à sa guise."

"Mais, je le fais en me disant qu'à force de venir ici et de nous fréquenter, il changera un peu! Et je pense que ta sœur aussi à besoin de l'avoir à ses côtés."

"Huummmm, Bernadette! Tu es vraiment une maman moderne. Faut supporter, ça ira. L'enfant sera là en juin. Après, tu pourras t'occuper d'autre chose que la bêtise de Peter."

"Mon Dieu! Moi qui pensais que l'arrivée du bébé pouvait changer les choses, tu es en train de m'ôter mes illusions !"

"Maman, il a déjà 4 gosses. Quelle différence y a t-il entre eux et celui qu'aura Pupuce. Il n'a que des filles et Pupuce attend une fille."

"Tu penses que si elle attendait un garçon, il réagirait autrement."

"Je pense que c'est un égocentrique qui ne connaît pas la valeur d'un enfant ; et je crois qu'il vaudrait mieux, pour l'équilibre mental de tout le monde, que l'on agisse comme si cet enfant n'a pas forcément besoin de "ce" père-là."

"Ben dis donc ma chérie, tes cours de philosophie te font vraiment mûrir !"

"Non, je pense que ce qui me fait cet effet-là, c'est de savoir qu'un type comme Magloire Akendengue est capable de me traiter comme si c'était lui qui avait planté la graine dans le jardin de Kaba. C'est ça être père. Élever un enfant et l'aimer envers et contre tout. C'est facile d'être distributeur de sperme ; c'est plus difficile d'être père Tiens, voilà une enveloppe que papa m'a demandée de te remettre. C'est pour l'arrivée du bébé. Il s'inquiète lui aussi pour Pupuce."

"Oh! C'est vraiment gentil de sa part. Comment va t-il."

"Il ne boit plus, maman. Il semble plus lucide. Et je croise les doigts pour qu'il ne replonge plus."

"Je croiserai les doigts avec toi, alors." Voir moins

 
   

18-

 

La vie suit son corps et la grossesse de Pupuce la rend de plus en plus chiante. Elle me donne parfois des envies de meurtre, mais je préfère m'éclipser et la laisser seule. Je dors au salon quand elle me prend la tête. Quand maman en a marre de me voir installer ce petit matelas dans un coin du salon, elle m'invite à dormir dans sa chambre, plutôt.

Le bac, on ne parle que de ça. Tu as envie de sortir un peu faire la folle au Diamant, et ta copine du blaze te sort : "pardon, oh! Le bac-là, je dois l'avoir."

Tu veux juste aller un peu faire la belle en maillot de bain le dimanche à SOGARA et les frangines du quartier te répondent que vraiment, la terminale chauffe la tête. C'est à peine si on respire encore dans ces terminales-là! Entre ceux qui gardent les doigts croisés depuis le 1er jour de classe et ceux qui osent à peine te dire bonjour tellement ils sont stressés, on a l'impression de passer une épreuve du fameux examen chaque jour.

En classe, là-bas, c'est pas la peine. Mr Komba, le professeur de mathématique ne parle que des résultats qu'il attend. Il veut qu'on lui montre le feu à la fin de l'année. Il a déjà sa liste d'élèves dont IL EST sûr. Ces élèves-là, n'ont même pas intérêt à rater le bac!

C'est fort.

Y a que maman pour dire que l'on doit apprendre à respirer et regarder les choses avec détachement. Bref, c'est la folie.

Maintenant, si ce bac on ne l'a pas, on fait quoi???

Moi, je ne me pose même pas la question.

Il faut que je l'ai.

Et je l'aurai.

Hors de question que je rate cet examen.

Je n'ai pas le temps de revenir à Raponda l'an prochain.

Je n'ai pas le temps de rester encore à Pog.

Et surtout, mon rêve doit prendre forme dès le mois d'août, car à force de rêver, je commence à avoir des maux de tête et à maigrir.

Je continue de faire mes économies.

Il me faut de quoi payer mon billet d'avion pour partir du Gabon.

Après, si je n'ai pas d'argent pour vivre à l'étranger, tant pis.

Au moins, je serai parti d'ici et je trouverai bien le moyen d'avoir une bourse d'études.

Je continue d'économiser même les pièces de 5 et 25 francs.

Même si cela fait rire ma sœur Pupuce lorsqu'elle prend son taxi juste devant la maison, alors que je me tape le trajet pour l'école à pieds.

Ce matin, elle se moque de moi en me disant :

"Mais pourquoi tu ne demandes pas au chauffeur de ton chéri de venir te chercher."

Et je lui réponds:

"Mais pourquoi tu ne vas pas en cours à pieds étant donné que ton chéri n'a pas de chauffeur."

Elle s'en va vexée, mais je m'en fous.

 

Il est 14h 30 ce 12 mai. Sharonna Gaëlle et ma combi Jileska sont là, avec moi. Nous nous installons à la table de la terrasse, derrière la maison. C'est un moment intense de bosse dure. Un devoir de mathématique et un autre de science physique à préparé. Maman nous a acheté des boissons et les a rangées dans le réfrigérateur. J'ai fait un gâteau au chocolat pour accueillir mes copines et miss Jileska a pensé aux beignets brochettes de chez Maman pour nous ouvrir l'esprit. Huuuummmm! C'est doux d'être avec les copines!

Avec Sharonna, ça ne blague pas! Elle avalent les mathématique comme d'autre avalent des bouteilles de Castel ou de regab dans les bars. C'est une craque depuis la 6ème. Nous sommes amies depuis là. C'est notre passion pour les mathématiques qui nous a unies. Gaëlle est la meilleure du group en anglais et en français; c'est une matheuse qui lit beaucoup, surtout les romans noirs, épouvante, suspense, policier. Elle a l'esprit d'analyse et de critique très aiguisé. Jileska, elle, se définit comme une rescapée. En fait, elle a atterri en série scientifique par défaut. Elle déteste lire, elle est nulle en langues. Mais la biologie, c'est son truc. La chance qu'elle a, c'est que sa mère s'occupe depuis le premier jour, de son enfant. Ma combi est tombée enceinte quand nous étions en 5ème. La mère n'a pas fait trop de bruit. Elle lui a seulement dit qu'elle devait réussir pour pouvoir dans le futur prendre soin de son enfant.

Nous sommes là, à rigoler en parlant des péripéties en classe, histoires de prendre notre élan avant de nous lancer dans les livres et les cahiers. Quand on commence, parfois, 22 heures, nous trouve là. Alors...

"Monsieur Nguema, mon cher père ingénieur de son état, m'a inscrit à un programme qui me permettra d'avoir une bourse d'excellence si j'ai de bonnes notes au baccalauréat. C'est un truc de l'ambassade du Japon, je crois.", nous lance Sharonna.

"Mais toi, c'est obligé que tu aie une bourse. C'est quand même toi la grande bosseuse.", fait Jileska.

"Là, où vous me voyez là, j'ai même pas envie de devenir ingénieur." continue Sharonna.

"Ah, pardon. Arrête de nous bassiner avec tes mêmes histoires. Intelligente comme tu es, tu vas aller faire le conservatoire??? Qu'est ce qui ne va pas? Là, tu veux seulement que monsieur Nguema, ton cher père, te tue. Il te vois déja grand cadre là-bas à Total, comme lui.", lance Gaëlle.

"ne me dis pas que tu n'as pas abandonné ce rêve, Sharonna! Ton père va te tuer sec quand il va apprendre ce que tu as l'intention de faire.", fais-je.

"Les filles, les filles, les filles! Dès que je pose le pied aux USA, monsieur Nguema ne pourra plus rien me faire. Je vais aller à la fac comme prévue, mais à côté, je vais m'inscrire à une école d'arts dramatiques. Je veux devenir actrice et monter sur les planches pour jouer de grands rôles comme celui d'Andromaque, de Phèdre, de Juliette. Vous comprenez au moins. C'est mon rêve.", lance Sharonna.

"La fille-ci, est vraiment particulière! Nous, on se gratte la tête pour savoir où on va trouver l'argent pour payer ne serait-ce que le billet pour voir un jour un pays étranger ! Toi, tu as déja de grands rêves dans la tête!", fait Jileska.

"En fait, je voulais aller en France, cela aurait été plus facile pour moi. Mais comme mes deux grands frères sont déja à Washington, je vais me débrouiller là-bas. Je vous enverrai des photos. Mais il est hors de question que je renonce au théâtre. Qui sait, je deviendrais peut-être une grande actrice. Vous allez me ragarder à la télévision et tout." continue Sharonna.

"Et moi qui pensais que mon rêve était trop grand, je me rends compte que je suis raisonnable," fais-je. "Je veux simplement aller à Accra ou à Pretoria. En tout cas, partir du Gabon quoi. Je ne veux pas rester là et attendre que les autres viennent me raconter!"

"Moi-là, je pense que je vais aller mourir à l'université à Masuku. Qui va me gaspiller le Ghana ou la France. Ma grande sœur Sybille est là en train de moisir à l'UOB. Mon grand-frère Franck a eu la chance d'avoir la bourse pour l'Afram. Et ma grande sœur Pauline est à l'institut de gestion. C'est pas moi qu'on va envoyer à l'étranger, oh! Y a les dô!" nous fait Jileska.

"Moi, je pense aller à Cape town. Je vais rejoindre ma sœur Charline qui est déjà là-bas. C'est déjà décidé." conclut Gaëlle.

 

Nous commençons à travailler quand Jileska me demande :

"Au fait, Tania, que va faire Pupuce après le bac?"

"Elle fait ses plans en secret. J'ai seulement appris au détour d'une conversation qu'elle a l'intention d'aller en France. Papa Jimmy fait des plans pour elle. Il a déja l'argent du billet et son nom est déja sur la table d'un de ses ancien camarade d'université: elle aura la bourse les yeux ouverts. Elle n'a pas les mêmes soucis que nous, Jileska."

"Oh! Mais pourquoi il n'a pas donné ton nom aussi à son collègue. S'il peut faire avoir la bourse à Pupuce, il le peut aussi pour toi, Tania. Ou bien!?"

"Pardon, oh! Ne me pose pas de questions compliquées. Je préfère de loin résoudre des equations à plusieurs inconnues."

"Yooooo!!!! Non, il blague, il va t'aider.", insiste Jileska.

"Mama, laisse l'affaire-là! Le billet de Pupuce est réservé depuis l'année dernière. Il nous a montré la réservation comme ça! Tu comprends. Elle accouche, elle décroche le bac. Et le 3 septembre, elle est dans l'avion pour Toulouse. C'est déjà écrit, même le ciel a acquiesé."

Jileska qui n'en revient toujours pas reste me regarde fixement.

"Yo! Y en a qui ont de la chance!" fait-elle.

"Elle a même beaucoup de chance !", lance Gaëlle. "Elle a la chance que papa Jimmy n'est pas réagi comme Kaba. Sinon, elle allait rester ici pour remplir les rangs de l'UOB."

"Et son type? Ton bof chéri, ce cher Peter?", demande Sharonna.

"Pardon, les filles. Ne me fatiguez pas avec ce type. Je ne m'occupe pas de ses affaires." fais-je.

"Humm, tu devrais, pourtant ! C'est le père de ta nièce à venir. ", me lance Gaëlle,

"Oui, oui, c'est pour ça que je lui dit poliment bonjour. Mais, franchement, je ne suis pas obligée de me taper la conversation avec lui. Je sais qu'il a de grands projets. Il a des frangins basketteurs qui sont déjà là-bas en France et qui jouent dans des clubs. Donc, les types sont en train de lui arranger son affaire."

"Hummm! Il faut vérifier cette histoire ! Quels frangins qui vont lui arranger l'affaire!!!! Pardon, c'est parce que je ne veux pas mettre ma bouche dans les histoires des autres! Dis à Pupuce d'enlever le coeur là. Elle accouche, elle se remet en forme, elle va en France et elle s'attrape un type potable là-bas!", fais Gaëlle.

"Hummmm! La fille de là! Faut nous dire, oh! C'est comment tu te braques comme ça sur l'affaire là! Qu'est-ce que Peter t'a fait. Faut nous dire."

"Laissez, je préfère me taire. C'est dans ma bouche on va manger piment!", lance Gaëlle.

"Mais la go, tu ne peux plus te taire. Tu en as trop dit. Crache le morceau ! Qu'est-ce qui se passe?", lance Jileska.

"Rien, oh! Pardon, faisons les maths seulement.

Tout le monde la regarde sans trop comprendre. Au fond de moi, je n'ai que faire de ce que Peter peut inventer comme coup de baguette magique pour arriver en France. Il dit à tout le monde que le basket peut l'emmener très loin, car il est l'un des meilleurs joueurs gabonais du moment. Mais, avec les parents qui n'ont rien, quelle magie va t-il opéré, lui qui trébuche à l'école et un dossier scolaire qui est triste à lire?

Bref... je préfère me poser les questions auxquelles j'ai des réponses.


 

19-

 

Une semaine plus tard, je suis dans ma chambre, couchée sur le lit et je relis mes cours d'histoire-géo.

Maman arrive et s'assoit à mes côtés. Je me relève pour lui faire face.

"Tout va bien pour toi, ma fille? Et tes cours? ."

"Tranquille, maman. Tout va bien. Enfin, tu me connais."

"Oui, je te connais. Je sais que lorsque tu veux quelque chose, tu t'accroches pour l'avoir. Je suis tellement désolée de ne pas pouvoir t'offrir des études supérieures dignes de ce nom ! Avec ce salaire d'institutrice et les miettes que je me fait en donnant des cours particuliers, je peux à peine vivre décemment."

"Maman, le Prêtre a dit un jour : il faut rêver à la hauteur de ses moyens ; ça évite de commettre des pêchers. J'ai un rêve à la hauteur de mes moyens. Ne t'inquiète pas pour moi. L'essentiel est que je réussis et décroche mes diplômes."

"Dieu t'a vraiment bien faite, Tania Akendengué. Je suis heureuse d'avoir une fille pareille !"

"Et moi, je suis heureuse d'avoir une mère comme toi, tu peux pas savoir!"

Nous nous serrons dans les bras l'une de l'autre et ne nous rendons pas compte que Pupuce est entrée dans la chambre.

"Dis donc, arrêtez, vous allez me faire pleurer", fait Pupuce.

"Tu peux pleurer, Pupuce. Nous sommes habituées à tes larmes.", lui fais-je.

"Très drôle Tania Akendengué. Heureusement que tu est bien forte, car j'aurais besoin que tu me tienne la main en salle d’accouchement ! Je sais pas comment je vais faire pour expulser ce bébé!"

"Dans tes rêves, ma chère. Le seul accouchement auquel j'assisterai, c'est le mien. Il est hors de question que je sois traumatisée ; ça pourrait me bloquer toute envie d'avoir des enfants plus tard.", lui fais-je.

"Dis pas de bêtises Tania. J'ai besoin de toi! Tu ne peux pas me lâcher !", insiste Pupuce.

"Marjorie Akendengué, arrête de faire des plans dans mon dos. Je te dis que je ne vais pas rentrer dans cette salle d'accouchement et je n'y mettrai pas les pieds. Même à la télé, j'ai du mal à regarder ce genre de chose, et tu penses que je viendrais les vivre en live! C'est comment!!!!"

"Je te laisse le temps de te faire à l'idée. Je ne rentre pas dans cette salle d'accouchement si tu ne viens pas avec moi ! Tu t'imagines pas la trouille que j'ai rien que d'y penser."

"Mama, tes histoires des blancs là, c'est pas avec moi. Si toi tu as appris à l'école mixte, moi j'étais à l'école du parc, d'accord. Donc, c'est pas avec moi que tu vas venir faire tes chichi d'enfant gâtée, d'accord."

"Tu es une sacrée rabat-joie, Tania Akendengué. Tu verras comment tu seras paniquée quand ce sera ton tour."

Yoooooo! Pardon, je préfère aller me fourrer la tête dans mes livres !

Mon téléphone vibre à ce moment-là. Je le prends et m'éclipse pour aller répondre dans la douche.

"Comment va ma beauté ?"

"Oh! J'adore cette voix. Comment le plus beau garçon sur terre."

"Tu me manquais trop. Je suis à ton portail."

je me mire rapidement histoire d'être sûre que je suis dans mon élément et je cours vers le salon. Miro est déjà là, assis face à maman. Ils conversent comme de vieux potes.

"Hey beauté, je demandais à ta mère la permission de t'enlever le week-end."

"Mais, c'est mon anniversaire! Je ne peux pas bouger."

"Tiens donc ! Et pourquoi ça!", fait maman.

"Mais, je...j'ai l'habitude d'être avec toi le jour de mon anniversaire. Et là, c'est spécial. Nous allons avoir 18 ans!"

"Ben, raison de plus pour demander un peu de liberté. Ne t'inquiète pas pour moi; je boirai un verre de mousseux en trinquant à ta santé."

"Mais...mais..."

"Y a pas de mais qui tienne. Allez faire la fête ensemble. Ça te permettra de déstresser avant ton examen."

Yoooo! Ma mère me vend comme ça!

"Et où ira t-on?"

"Oh, nous allons passer le week-end à Libreville. Nous partons vendredi soir avec mes parents."

"Oh, d'accord. Je vois que tout est déjà ficelé!"

"Et oui! Ne t’inquiète de rien. Fais simplement tes bagages. J'enverrai Samba te cher à 17h, car nous devons être à l'aéroport à 17h 30,"

"D'accord. C'est noté! Mais comment suis-je sensée passer la semaine au calme en sachant que je vais à Libreville pour mon anniversaire !"

"On n'a pas tous les jours 18 ans, ma chérie!"

Sur ce, il m'embrasse sans se soucier de la présence de ma mère.

"J'aurais bien invité ta sœur à venir avec nous, mais tu sais qu'elle ne peut pas voyager dans son état."

ET QUI A DIT QUE J'AI ENVIE DE PASSER CE WEEKEND LA AVEC PUPUCE!!!???

Je me montre égoïste, cette année. Je veux un anniversaire, seul avec mon chéri. Pupuce n'a qu'à faire la fête avec son type. Voilà!

J'accompagne Miro jusqu'à la voiture où l'attend le chauffeur. Là, je lui demande:

"Tes parents ont accepté comme ça, de me payer un week-end à Libreville."

"Mon père sait que je suis fou de toi, bébé."

"Et ta mère?"

"Oh, elle a peur que tu la remplaces dans mon cœur."

"Oh! Compris. Je te promets d'être la plus douce de toutes les filles pendant ce week-end. Je ne répondrais à aucune de ses attaques."

"Oh! C'est vrai ce mensonge?! Je t'aime malgré tout. Reste-toi et tout ira bien. Elle s'habituera au fait que tu as volé mon cœur."

"Pince-moi, s'il te plaît. J'ai l'impression d'être en plein rêve."

"Et que diras-tu le jour où je t'emmènerai à New-York?"

"Commençons par aller à Libreville, mon chéri. Ensuite, on verra.

"N'oublie pas que je t'aime Tania Akendengué."

"Oh! Je ne risque pas de l'oublier ! ", fais-je en répondant à son baiser.

 

La voiture s'en va et je reviens dans le salon.

"Dis, maman, on fera comment le weekend prochain pour ne pas se retrouver dans le même lit, lui et moi."

"Oh, ça, ce n'est pas mon problème ma chérie. Tu es une grande fille, penses à prendre des préservatifs à la pharmacie avant de monter dans l'avion."

"Oh! Ça c'est qu'elle mère qui jette sa fille comme ça dans les bras d'un homme."

"Mademoiselle Akendengue, je préfère te savoir en week-end avec ce garçon bien élevé plutôt qu'en boîte de nuit avec je ne sais qui. Au moins, tu n'auras pas besoin de sortir par la fenêtre !"

"Sinon, dis la vérité maman. Il te plaît bien ce Miro!"

"C'est à toi qu'il est sensé plaire. Je demande juste au ciel qu'il te traite bien et continue à te couvrir de tendresse."

"Ok, madame. Je te promets qu'on fera l'amour comme des bêtes, le week-end prochain."

Devant la mine ahurie de ma mère, je suis obligée de dire: "J'rigole!"

"Je préfère ça. Mais, je mettrai moi-même cette boite de préservatifs dans ton sac de voyage. Et viens avec moi dans la chambre."

 

Je la suis dans sa chambre. Arrivée là, elle fouille dans le tiroir au chevet de son lit et en sort deux billets de 10mille.

"Prend-les et achète toi une jolie robe pour le dîner de ton anniversaire. Faudrait pas que celle qui te sert de belle-mère trouve quelque chose à redire sur ton habillement."

"J'aurais beau être habillée en princesse qu'elle trouvera toujours quelque chose à dire."

"Dis-moi, est-elle la fille d'un ambassadeur ou d'un chef d'entreprise ? Où se sont-ils rencontrés ?"

"Oh, non. Ni diplomate ni chef d'entreprise. Elle faisait la vie dans les rues de Brazzaville. Il était en mission de longue durée là-bas. Elle s'est accrochée à lui. Il lui a payé des études à l'université de Nanterre, car elle avait au moins son baccalauréat. Voilà."

"Mais alors, pourquoi voit-elle d'un mauvais œil ta relation avec son fils? Pourquoi t'a t-elle traitée de croqueuse de diamants à ce dîner il y a deux mois."

"Oh! Elle a oublié d'où elle vient. Elle veut me faire croire qu'elle a toujours vécu dans le luxe et l'abondance. Elle m'a encore répété qu'elle espère que Miro me lâchera et sortira avec une fille de bonne famille."

"Ce garçon est tellement amoureux de toi que sa mère se fout les doigts dans les yeux si elle pense qu'il te laissera tomber. Continue d'être polie avec elle ; ne fait aucun esclandre."

"C'est ce que je compte faire, ne t'inquiète pas maman."

Je m'en vais dans la chambre heureuse d'avoir tenu ma langue. Il aurait fallu d'une seconde pour que je raconte tout à maman. Cassandra, la mère de miro, a osé me coincer un jour dans la cuisine, il y a 2 semaines pour me demander si j'ai envoûté son fils. Elle en est presque arrivée à m'étrangler en m'accusant d'avoir recours à des seaux et des mixtures pour "marabouter" son fils.

Je l'ai regardé avec des yeux innocents et lui ai répondu :

"c'est quoi le maraboutage, Cassandra?"

Là, elle a consenti à me lâcher et m'a dit :

"Oh, rien, c'est un truc dont les femmes parlent beaucoup en Afrique! C'est rien."

Et toute honteuse, elle est partie dans sa chambre et m'a foutu la paix.


 

20-

 

La semaine passe très vite. J'ai que la tête dans les nuages tellement je pense au week-end. Dieu, qu'est ce qui va se passer là-bas à Libreville? Moi qui vais parfois passer les vacances là-bas chez, l'oncle Alexandre, le frère aîné de maman, qui habite à Owendo, me voilà qui vais maintenant pour nous. Et ils occuperont la chambre juste à côté. Comme par hasard, les deux chambres sont communicantes. Bref, je vais voir la vie en mieux ce week-end. La fille d'e Magloire Akendengue aura des étoiles dans les yeux. Je vais tenter de faire la fille qui connaît, oh! Faut pas qu'on me prenne pour la maboule qu'on a sortie de son trou. C'est pas parce que je vis au quartier Château d'eau à Port-Gentil que je dois jouer à la broussarde. On regarde tous la télé, alors, je vais faire comme si je n'étais pas impressionnée.

Mais bon, si les choses là-bas me dépassent, je serai obligée d'appeler ma mère ou ma combi Jileska pour leur raconter des choses et avoir des conseils.

Pour l'instant, le prof de français nous fatigue avec ses histoires de romans gabonais qu'on doit "absolument lire" pour notre propre culture. On dirait qu'il est copain avec tous les écrivains gabonais là, dont il parle. Parce que façon, il nous demande d'acheter les livres là! Aujourd'hui, il est "émerveillé" par la plume d'un certain Hallnaut Engouang, qui a écrit le roman dont le titre est LES VEUVES. Il n'arrête pas de nous bassiner avec cette histoire et répète que vraiment ce roman "est de bonne facture". Yooo!!!!! Heureusement qu'il est professeur de français parce qu'on pourrait croire qu'il se shoote avant d'arriver en classe; donc, comme ça, on doit "absolument" acheter ce livre qui coûte 12mille francs! Là, Prudence, la tête brûlée de la classe, lance:

"Ah! Monsieur! Les poches sont vides oh! La littérature gabonaise, aussi, ça coûte cher, hein!"

"Mais, mlle Matsanga, les baskets que vous portez aux pieds coûtent 5 fois plus cher que ce livre! Pourtant, vous les avez achetés."

"Mais, monsieur, c'est pour le swagg! Dites-moi qui va être épaté parce que j'ai acheté ce roman-là! Personne."

"Ne vous faites pas plus bête que vous ne l'êtes, mlle Matsanga. Je vous signale que vous pouvez tomber sur un texte gabonais le jour du bac."

"Aka! Ça va faire mal monsieur. Parce que la façon dont vous avez parlé du style de ce romancier-là, on est foutu! Où est-ce qu'on va trouver le même vocabulaire que vous pour réussir notre commentaire composé."

"Chère mlle Matsanga, et vous tous ici dans cette classe : éteignez votre télévision. Arrêtez de regarder Novelas TV et Nollywood Tv. Et allumez vos cerveaux en lisant LES VEUVES ou encore LA NUIT SERA LONGUE ou encore MA MÈRE SE CACHAIT POUR PLEURER. Tenez, voilà un livre qui devra vous occupez ce week-end. Prudence Matsanga, Jileska Obame Ndong et Gaëlle Azizet et Fidolin Malekou, vous avez une semaine pour nous préparer une fiche de lecture sur ce livre. Il s'agit de ce petit livre très sympathique dont le titre est LES DOUX MURMURES DE MON ENFANCE. Vous allez vous régaler. Avant de rêver d'aller à l'étranger, vous êtes priés de consommer gabonais. Vous aimez les feuilles de manioc et l'odika; vous aimerez lire vos compatriotes. Car charité bien ordonnée commence par soit même."

"Mais monsieur, moi j'aime pas trop la charité. Je ne suis pas une mendiante."

"Très drôle mlle Matsanga. Vous avez beaucoup d'humour. Alors, faites-nous rire mercredi prochain en nous présentant ce livre."

"Vous êtes dur en affaire, monsieur."

"N'aggravez pas votre cas, mlle Matsanga."

Le cours continue dans cette humeur bon enfant. Jileska n'arrête pas de raconter sa vie à Jacques, son voisin de table. Moi, j'ai la tête dans les nuages. Vivement le week-end.

A la sortie des cours, les filles me disent qu'elles passent le soir même à la maison. Nous allons travailler ensemble. Jacques et Fidolin s'ajoutent dans le lot. C'est ok pour moi. Je sais que maman n'y verrai pas d'inconvénient.

"Donc, je vous attends à 18 heures chez moi.", fais-je en quittant le groupe.

Je me dépêche. J'ai l'intention d'aller me perdre à MTK (friperie), pour trouver la robe qu'il me faut pour le dîner de mon anniversaire, samedi. Ça me laisse le temps de l'a lavé et la repasser de sorte qu'elle soit impeccable samedi. Faut pas vous moquer de nous autres. C'est à MTK que je vais mourir pour acheter tous ces vêtements que les amies de Miro (les petites tissmées du Lycée Victor Hugo), on le courage de m'envier ! Vraiment... Ce sont elles qui vont en France et c'est moi qui est le swagg lors de leurs petites sorties !

 

J'arrive rapidement à la maison et je me change. Quand je sors avec l'intention d'aller rapidement au marché, maman et Pupuce arrive. Elles font une tête enterrement.

"C'est comment ! Qui est mort ?", suis obligée de demander.

Maman me regarde dubitative. Pupuce me regarde comme si j'étais transparente.

"Mais, dites ce qui se passe !"

Là, maman, se tient la tête comme si elle devenait trop lourde et m'annonce :

"Ta sœur attend deux bébés au lieu d'un."

"Tu t'imagines, Tania. Deux bébés. Comment vont-ils sortir de mon ventre ?"

"Ne dis pas de bêtises, Pupuce. Vas te reposer plutôt."

Ma sœur s'en va en se parlant à elle-même. Moi, je suis tellement sonnée par la nouvelle que je suis obligée de rire.

"Maman, dis-moi que c'est une blague."

"On ne blague pas avec ces choses-là, chérie !"

"Yo! Vraiment Dieu réellement le sens de l'humour. L'accouchement, c'est dans un mois et c'est maintenant qu'on apprend la présence de ce deuxième bébé!!!"

"Pardon, j'ai mal à la tête. Je vais me reposer."

Je reste là au salon, n'en croyant toujours pas mes oreilles ! Me voilà maintenant assise dans le canapé. Je me rends compte que la vie de quelqu'un peut changer du tout au tout, en un clin d’œil.


 

21-

 

Je laisse là le problème de Pupuce et de bébés. Ma sœur a décidé de nous faire voir double et on n’y peut rien. On aura bien le temps de penser à tout ça !

Je cours vers MTK. Je vais chercher encore la robe de rêve.

Je marche assez vite. J’ai hâte d’avoir cette robe-là sous les yeux. Je la veux rose ou bleue, jolie en tout cas. Pas décolleté, car mes seins sont tellement sauvages qu’ils pourraient se retrouver dehors en pleine piste de danse. Donc, pas de décolleté. Je n’en mets jamais ; alors que Pupuce, elle, aimait bien mettre ses seins en valeur. Nous avons une grosse poitrine, qui me dérange fortement, surtout pendant les cours d’EPS. Je préfère mettre mes jambes en valeur parce qu’elles sont minces et belles. Quand maman me voit habillée en short jean, elle me dit tout le temps : « j’étais comme toi une époque, jeune et mince. Regarde-moi aujourd’hui. » ce me fait rigoler. Je me demande ce que je dirai à ma fille quand elle aura 20 ans et que je me trouverai bien moche face à elle !

Il fait chaud et il y a foule à la fripe. Les gens se battent devant les tables et les brouettes en bordure de route, où sont exposés pelle mêle les vêtements. Pardon, je préfère alors me jeter à l’intérieur, loin de la route et des curieux qui pourraient me reconnaître. J’arrive là et je tombe sur cette Larissa, l’ex de mon père.

« Huuuummm ! Akendengue, tu fais quoi ici ? »

« C’est mon anniversaire dans ce weekend ; je viens m’acheter une robe. »

« Eh ! Les jeunes ! y a quoi même ! »

« Mais, tata Larissa, j’aurais 18ans. »

« Pardon, ne viens pas m’appeler tata devant les gens. Est-ce que j’ai l’âge de ta mère ! Allez, tiens les 50 mille là et disparais. »

« Oh ! Merci Larissa ! Merci. »

Alors que je la remercie encore, je vois un blanc qui arrive vers elle et lui passe le bras autour du cou.

« Alors poupée, avec qui discutes-tu ? », fait-il après lui avoir donné une tape aux fesses.

« Oh, Louis-Georges, je te présente Tania, une amie de Toulouse. »

Yo ! Cette femme-là a mis les pieds à Toulouse, quel jour ? Et moi d’abord, en quelle année ai-je habité en France ? Jusqu’à preuve de contraire, je ne sors pas en vampire, donc…

« Tania a dû rentrer précipitamment de France parce que son papa est malade. »

« Oh ! Enchanté de faire ta connaissance, Tania. Allez poupée, on rentre. »

Yo ! Donc cette go de Sindara a laissée tomber mon père pour aller faire la vie aux blancs ! Papa ne pouvait pas lutter. Car vu la manière dont ce blanc-là la bécote alors que je les regarde s’éloigner, mon père aurait attrapé une rage de dents.

Vraiment, il faut vivre pour voir ces choses-là ! Bref, je les laisse partir et j’ai envie de rire en voyant cette Larissa se battre pour avancer avec ses talons aiguilles de 21 cm. Elle est vêtue d’une jupe en sky, à raz des fesses et sur la tête, elle a des rastas de couleur bleue qui lui tombe dans le dos. Bref, un véritable sketch ambulant.

Le plus important est qu’elle m’a donné ces 50 milles francs. Du coût, je décide de me prendre une robe, Morgan, fin de série, avec une paire de chaussures. Le tout me coûte 30mille. Je rentre tranquillement à la maison en sifflotant. J’ai bien l’intention de garder dans ma tirelire les 20mille que maman m’a remis. Avec les autres 20 mille, je vais m’acheter un glosss, un parfum et ma crème Mixa pour le corps.

La vie est belle, tout d’un coup !

Quand j’arrive à la maison, je trouve maman dans le salon en grande discussion au téléphone avec quelqu’un que je ne reconnais pas tout de suite. Je n’ai pas envie d’en savoir plus. Je dois travailler avec mes amis, donc, le mieux est de ne pas poser de questions pour ne pas avoir l’esprit embrouillé.

Je vais dans la cuisine et me sert à manger une assiette de riz accompagné de ragoût aux lentilles. Je m’assois à la table de derrière pour manger. Je suis là tranquille en train de bouffer et de pianoter sur mon téléphone, histoire d’envoyer des baisers par whatsapp à Miro, lorsque Pupuce vient s’assoir à mes côtés. Elle me glisse tout doucement dans l’oreille :

« Kaba est complètement folle ! Elle pète les plombs au téléphone comme si c’est moi qui ai demandé à Dieu de m’envoyer deux bébés au lieu d’un. Elle n’y connaît rien en hérédité ! »

Je la regarde sans trop savoir quoi dire. Elle repose sa tête sur mon épaule et me confie :

« Je suis complètement perdue Tania. Je sais plus quoi penser. »

« Ne pense pas. Repose-toi et laisse Dieu faire le reste. Le bac avant tout. »

« Heureusement que tu es là ! », me fait-elle en me posant un bisou sur la joue.

Elle s’en va en douceur, comme elle est venue.

Je reste là bien décidée à ne pas poser de question.

 

Le groupe arrive quelques instants plus tard alors que maman est partie faire un tour au Super CkDo pour acheter les noix de cajou que réclament tous les jours à 22heure, les bébés de Pupuce.

Nous nous installons à la table de la salle à manger. La bosse peut commencer. Les cerveaux se mettent en ébullition. Tout le monde a bien sûr arrêté son téléphone. Jacques et Fidolin sont les garçons les plus acharnés que je connaisse ; ils sont déconneurs quand il faut mais lorsqu’il s’agit de bosser, on peut compter sur eux. Fidolin a l’intention de tourner tout Raponda à poil s’il décroche le bac au premier tour. Jacques, lui, ira danser toute la nuit à La Villa. Il s’interdit d’aller en boîte de nuit tant que le bac n’est pas passé. Moi, je me gratte la tête et je prie fort pour avoir ce diplôme. Jileska, elle, est pleine d’assurance et refuse d’imaginer le pire. Sharonna et Gaëlle se disent que pour elles, c’est juste une formalité à remplir.

Maman arrive quelques instants plus tard. Elle a pensé à nous acheter deux grands paquets de chips, histoire de nous motiver.

Alors que nous continuons de travailler, Jacques demande à Jileska si elle est libre ce samedi. On comprend vite que le type a une idée derrière la tête et que la petite lui plait drôlement. Et elle lâche.

« Au non, je suis à Libreville ce weekend. »

« A Libreville !! », fais-je étonnée. « Depuis quand passes-tu des weekends à Libreville. »

Jileska se mord les lèvres et lance :

« En fait, je viens de l’inventer. Je… »

« Je comprends », fait Jacques. « C’est une manière de me dire que tu n’as pas mon temps. »

Elle sourit sans rien ajouter. Je pense qu’elle aussi, en pince pour lui.

« Qu’est-ce que Pupuce fait pour son anniversaire ? », demande Gaëlle.

« Je ne sais pas. Je suppose que nos frères viendront diner avec elle samedi. Maman a dit qu’elle fera à manger pour vingt. »

« Oh ! en tout cas, si je m’ennuie, je viendrai manger ici pour fuir un peu la maison. C’est un peu tendu ces temps-ci. », lance Sharonna.

« Oh ! que se passe t-il ? » demande Jileska.

« Oh ! les parents se rentrent dedans ces derniers temps. Je ne sais pas trop ce qui se trame. Mathis et moi, on regarde et on ne comprend rien. Ca l’énerve même de savoir qu’il va rester tout seul avec eux quand je serai partie après le bac. C’est moche ! »

« Oh ! Dommage. Tes parents sont si beaux ensemble », lance Gaëlle.

« Tu regardes trop de films, Gaëlle », fait Fidolin.

« C’est bizarre que tes parents se disputent comme ça alors qu’ils sont heureux ensemble depuis plus de 20 ans ! C’est dommage. », fais-je.

« Oui, comme tu dis. Le plus surprenant, c’est que jamais encore, ils ne se sont disputés comme ça devant nous. », lance Sharonna.

« Ca ira ! », conclut Jacques.

 

A 2 3 heures, nous nous séparons. Le père de Sharonna est là. Il se propose de déposer tout le monde, même Jileska qui n’habite pas loin. Quand j’arrive dans la chambre, Pupuce est là, couchée sur le lit ; elle lit un roman de Maryse Condé.

« Je pensais que tu dormais. »

« J’ai pas sommeil. Ce roman est trop intéressant. Il faut que je le termine. »

« T’as une grossesse assez particulière, Pupuce. Sais-tu combien de livres, tu as lu depuis que tu es ici ? »

« Je sais pas ; je compte pas. J’ai envie de lire, c’est tout. »

« Tu y passes des nuits entières, Pupuce. A ce stade de la grossesse, tu devrais penser à te reposer. »

« Non, j’ai envie de lire. Si la lumière te dérange, je vais au salon. »

« Non, c’est bon. C’est moi qui vais dormir au salon. Bonne lecture. »

Cette fille trouve le moyen de lire 4 romans par semaine alors qu’elle est enceinte et passe le bac dans quelques semaines ! Je n’en reviens pas. Mais comme elle lisait beaucoup avant, sa folie des livres en ce moment ne m’inquiète pas plus. Cela même si je pense qu’elle frôle l’overdose. Si elle ne nous fait pas des enfants intellectuels…

J’envoie des messages à Miro avant de m’endormir.

Il me répond : « Dors dans mes bras cette nuit. Je t’aime. »


 

22-

 

Vendredi matin, alors que je suis dans la cuisine en train de faire la vaisselle, en chantant, ma mère arrive. Elle ne travaille pas ce matin. Les enseignants sont en grève. J'ai la chance d'être d'un collège privé, car nos professeurs ne font pas grève.

« J'ai reçu tes beaux-parents hier. »

« C'est quoi cette histoire ! »

« J'ai appelé ta fameuse belle-mère, Cassandra. Elle est passée en fin de journée avec son époux. Tu étais chez Jileska à ce moment-là. »

« Et, pourquoi les as-tu appelés ? »

« Je voulais discuter avec Cassandra avant votre départ pour Libreville. Tu les as déjà rencontrés, mais moi, jamais. Alors je voulais m'assurer que tout ira bien. »

« Ok. Et ils sont venus ici. »

« Oui, juste histoire de faire connaissance. Leur fils est amoureux ; ils veulent s'assurer que tout va bien de ton côté. »

« Donc Cassandra a accepté de venir ici !!! ce doit être la curiosité qui l'a emmenée ici. Ça m'étonne d'elle ! »

« Oh ! C'est vrai que j'ai eu l'impression que c'est Rico, le père de Miro, qui voulait me rencontrer. Apparemment, ma chérie, leur fils leur a dit qu'il a l'intention de faire de toi son épouse. »

« Oh ! Je ...Je... »

« Pas la peine de bégayer avec moi, je ne fais que te rapporter ce qu'ils m'ont dit. Ils disent qu'il a déjà eu des petites amies, mais que tu es la première à laquelle il tient autant. »

« Bon...je...Euh ! »

« Tout d'un coup, tu ne sais plus quoi dire, toi que je connais bavarde. »

« Mais que veux-tu que je te dise, maman. Je sais qu'il discute avec ses parents ; je suis juste étonnée qu'ils en sachent autant. »

« Donc, si je comprends bien, Miro ne t'a jamais rien dit de tel ? »

« Maman ! J'en sais rien, moi. Je... »

« Écoute, je n'ai pas envie de discuter à tort et à travers. Ce que je veux te faire comprendre, c'est que ce garçon t'aime et veux faire un long chemin avec toi. De grâce, ma chérie, comporte-toi sainement et dignement avec lui. »

« Mais maman, je n'ai jamais eu de comportement indigne avec lui ! »

« Je sais comment tu es, je le sais. Ce que je veux, c'est que tu ne changes pas. Ne te laisse jamais influencée, d'accord. »

« Je ne comprends rien à ce que tu veux m'entendre dire, maman. »

« Viens, suis-moi. Je vais te confier quelque chose. »

 

Je laisse la vaisselle et suis ma mère jusque dans sa chambre. Arrivée là, elle ferme la porte et me conduit vers son lit. Nous nous asseyons là, l'une à côté de l'autre. Ça m'inquiète un peu alors, je luis dis :

« Maman, qu'as-tu de si secret à me dire ? Tu m'inquiètes. »

« Je voulais juste te dire que quelles que soient les circonstances, reste tranquille. Ces gens que j'ai rencontrées, sont vraiment très bien. De même pour leur fils. J'aimerais que tu fasses très attention, ma chérie. Dis-en le moins possible à tes amis. Cultive-toi un jardin secret. »

« Mais maman, mes copines sont géniales ! Jamais, il ne leur viendrait l'idée de me chipper Miro !!! »

« Ma fille, écoute-moi quand je te parle. Je me fais peut-être des films, mais je veux juste que tu sois vigilante jusqu'au jour où enfin, tu auras la bague au doigt. »

« Ah, ok. Je vois que ton esprit est déjà loin, ma petite maman. Ce jeune homme t'a vraiment mise dans la poche. »

« Comme tu dis, j'avoue que j'aime beaucoup Miro. Il est intelligent et bien élevé. A moins, je n'aurais pas à me battre avec la mauvaise éducation d'un pauvre type que tu aurais ramassé, je ne sais où. »

« Ok, madame ma mère. Mais je te signale que je suis encore loin de me marier. Je dois d'abord finir mes études et trouver du travail. Ensuite, on verra. »

« Laisse Dieu en décider, ma chérie. Laisse Dieu en décidé. Tiens, je voulais te remettre ceci. »

« Qu'est-ce que c'est ? »

« Ton cadeau, ma fille. Ouvre-le. »

J'ouvre le petit paquet que m'a remis ma mère et je me retrouve avec un très beau bijou entre les mains. Une chaîne en or avec un pendentif en forme de dauphin.

« Oh, comme c'est beau ! Merci maman. Mais, ça dû te coûter une petite fortune. »

Elle me regarde alors intensément. Puis, son regard se perd dans le vide. Un silence nous envahit. Je le romps en disant :

« Maman, tu es avec moi ? Maman... »

« Je ne sais pas, ma chérie. je...en fait, la visite des parents de Miro m'a bouleversée. Je...Je. »

Elle s'arrête de nouveau et son regard se perd encore dans le vide. J'ai comme l'impression qu'il y a quelque chose qui lui pèse sur le cœur. Je dois me dépêcher d'aller me préparer, mais je préfère rester là. Du moins, je n'aurais pas les idées claires tant que je ne saurais pas ce à quoi pense maman.

« Maman, qu'est-ce qu'il y a ? Tu sembles tout d'un coup sur une autre planète.

« J'ai acheté ce bijou il y a 26 ans. »

« Non, sans blague ! Et tu l'as conservé toutes ces années ! »

« J'avais 22 ans, lorsque je l'ai acheté. Je comptais le porter le jour de mes fiançailles. Elles n'ont jamais eu lieu, alors, j'ai gardé ce bijou, comme ça, car je ne savais quoi en faire. »

« Euh, sois plus claire maman. Tu t'es fiancée à 22 ans !« Cette imbécile de Larissa que tu as revue au marché et qui était avec ton père ! »

« Bien, je crois qu'il faut que je te raconte tout. Je fais comme une crise d'angoisse depuis hier. C'est peut-être bête, mais je ne sais pas pourquoi, J'ai l'impression de revivre une scène de ma jeunesse. »

« Mais encore, maman ? Sois claire. »

« Cette imbécile de Larissa que tu as revue au marché et qui était avec ton père !»

« Oui, Larissa, oui. Je t'écoute. Que vient-elle faire dans la conversation ? »

« Elle et moi étions amies autrefois. »

Yo !!!! C'est quoi cette histoire !!! Me voilà qui saute du lit tellement je tombe des nues.

« Mais maman, si Larissa n'a que 35 ans, elle ne peut pas être ton amie d'enfance !

« Chérie, j'ai 48 ans aujourd'hui. Et si cette chère Larrisa a 35 ans, je me coupe une jambe tout de suite ! Elle a 2 ans de plus que moi. Nous avons été à l'école ensemble. Elle arrivait de Mandji Ndolo avec sa mère. Sa fameuse mère ! »

« Yo ! Mais maman, c'est pas possible ! Larrissa ne peut pas avoir 50 ans ! Non, ce n'est pas possible. Elle est encore toute fraîche et...»

« Ma fille, laisse tomber tout cela. Elle s'est fait refaire les seins ! Elle n'a jamais eu d'enfant, donc, elle est bien conservée. Mais elle a 50 ans. »

« Non, là, balance la doc, la vieille, parce que je suis que dépassée. »

« Bien, j'avais 20 ans. Un homme blanc est tombé follement amoureux de moi. Le type était directeur d'un grand magasin de Port-Gentil. Il venait de Toulouse. Il m'offrait des bijoux, il m'achetait les vêtements les plus beaux. Il me donnait de l'argent. Je ne manquais de rien avec lui. Le type était tellement fou de moi, qu'e deux ans après notre rencontre, il a demandé ma main aux parents, parce qu'il devait rentrer en France et voulait m'emmener avec lui. »

« Et que s'est-il passé, maman ? Pourquoi ne t'es-tu pas mariée ? »

« La copine que j'avais m'a joué le coup du siècle. J'étais jeune et naïve. Elle était comme une grande sœur. Votre mère Agnès était trop jeune pour écouter mes histoires de cœur ; c'est donc à Larissa que je me confiais. Il se trouve que la mère de Larissa était une grande féticheuse. Les gens allaient la voir pour tout et n'importe quoi. Les femmes allaient la voir pour attacher les hommes et les hommes allaient la voir pour rendre leurs femmes maboules d'amour pour eux ; tu comprends. »

« Oui, je vois que les choses n'ont pas changé aujourd'hui, c'est pareil ! »

« C'est justement là où je voulais en venir ! Sois vigilante ma chérie et surtout ne te laisse entraîner par personne vers ces pratiques-là. Miro t'a aimé simplement comme tu es. Reste telle quelle et ne cherche pas d'artifices pour le rendre dingue et l'attacher. »

« Maman, que s'est-il passé entre Larissa et toi ? Aujourd'hui, vous vous parlez à peine ! Si tu ne m'en parlais pas maintenant, jamais je n'aurais parié que vous vous connaissiez avant qu'elle n’atterrisse dans la maison de papa. »

« J'ai été bien bête ma chérie. Ce type était fou de moi. Il subvenait à mes besoins. Il m'avait logé dans cet immeuble-là, en face du lycée d'état, le Lagon Bleu. J'étais tranquille. Mon avenir était tracé : on devait se marier et s'envoler pour la France. Tes grand-parents avaient déjà acheté toute la boisson pour les fiançailles. Elles n'ont jamais eu lieu. »

« Pourquoi, maman ? Que s'est-il passé ? »

« J'étais heureuse, au comble du bonheur. Une sage-femme venait de m'annoncer que j'étais enceinte. Quand j'ai annoncé la nouvelle à ce type, il est allé voir mes parents et leur a dit qu'on oubliait les fiançailles et qu'il voulait que l'on célèbre directement le mariage. Donc, nous devions nous marier à la coutume et à l'ambassade de France, à Libreville. Mais, je ne sais pas pourquoi et comment je me suis laissée manipuler par Larissa. Elle m'a convaincue utilisée un soi-disant parfum que sa mère avait spécialement préparé pour moi. Elle m'a remis un petit flacon que je devais me pulvériser avant de me mettre au lit avec mon fiancé. J'ai bêtement cru quand elle m'a dit que cela allait réveiller les sens de mon fiancé et le rendre plus fougueux au lit. J'ai été bien bête ! »

« Oh ! Je vois. Je parie qu'elle t'a joué un mauvais tour qui a fait fuir ton fiancé. »

« Oh, figure-toi, que le fameux parfum était composé des sécrétions vaginales de Larissa. Elle se lavait l'entre-jambe et gardait cette eau en vue de faire ce fameux parfum. Donc, quand j'ai à trois reprises utilisé ce parfum, c'était l'odeur de Larissa qui ensorcelait mon fiancé. C'est comme ça qu'il m’a laissé tomber du jour au lendemain et a commencé à suivre Larissa comme un chien. Garde bien cette image en tête : on avait vraiment un chien collant cette fille à la trace. Une semaine avant la date prévue de mon mariage, elle et lui ont pris l'avion pour Toulouse. Je suis restée là, à Port-Gentil, avec mes larmes et mes souvenirs. J'ai été tellement secouée par cet abandon de la part de mon fiancé et cette tromperie de la part de celle que je voyais comme une sœur, que j'en ai perdu mon bébé. A la suite de cet événement malheureux, j'ai appris que je ne pourrais plus avoir d'enfant. »

« Maman ! Comme c'est triste ! Je ne savais pas que tu avais vécu ce genre de chose ! Et je m'étonne que Kaba qui parle toujours à tort et à travers ne nous ai jamais divulgué tout cela. »

« Mais pourquoi n'as-tu jamais essayé de refaire ta vie, maman ? Tu vois, elle n'est pas si méchante que ça ! J'ai gardé mes douleurs en moi. Et j'ai loué Dieu quand votre mère a accepté de me donner un enfant. »

« Mais pourquoi n'as-tu jamais essayé de refaire ta vie, maman ? A part tonton Steeve avec lequel nous avons vécu quand j'étais au jardin d'enfants, depuis, rien. »

« Je ne sais pas ; Je ne sais pas Tania. Je suis heureuse comme ça ! »

« D’accord, si tu le dis. Mais dis-moi. Comment se fait-il que Larissa ait atterri il y a 3 ans dans la vie de papa ? Elle ne ressemblait en rien à quelqu'un qui a vécu en France ? Elle était fauchée comme un rat d'église et vénale avec ça ! Mon pauvre papa. »

« Eh ben, je crois que la chicote de Dieu lui est tombée dessus. Parait qu'elle a vécu la belle vie pendant 10 ans à Toulouse. Jusqu'au jour où sa mère est morte. Elle ne pouvait donc plus recevoir ses petits colis de feuilles pour se laver le corps. Le blanc qu'elle m'avait volé, l'a mis à la porte. Elle a atterri dans la rue. Elle était tellement bête en classe, qu'arriver là-bas, elle n'a même pas eu la présence d'esprit de s'inscrire dans un centre de formation pour apprendre un métier. Elle a soi-disant fait des petits boulots. Mais je pense qu'elle s'est prostitué. Et pour finir, elle s'est choppé un milliardaire anglais, qui lui payé la fameuse chirurgie esthétique pour augmenter sa poitrine. Mais là aussi, le type l'a balancé après l'avoir consommée. Elle a donc trouvé le moyen de rentrer au Gabon. Mais, tiens-toi bien, elle n'avait que des robes de soirée dans ses valises. Pas un sou, ni un diplôme et encore moins l récit de la vie en rose à nous raconter. Elle n'a jamais mis les pieds ici car elle a honte ; et je ne peux vraiment pas la sentir.»

« Je suis vraiment désolée pour toi, maman. »

« Ne le sois pas, ma chérie. Je suis heureuse car je t'ai. Le reste appartient au passé. J'ai juste eu cette crise d'angoisse dans la nuit à tel point que je n'en ai pas dormi. Sis vigilante. »

« Il ne m'arrivera rien, maman. Mes amies n'ont pas l'esprit tordu. »

« D'accord, ma chérie. Maintenant, va te préparer pour l'école. Tu vas être en retard. »

Je sors dans la chambre de ma mère, avec cette chaîne en or autour du cou. Je suis tellement heureuse que je ne veux en aucun cas me gâcher la vie en étant suspicieuse vis-à-vis de mes amies. Il ne m’arrivera rien, car mes copines ne sont pas aussi sottes que Larissa.


 

23-

 

Moi qui d'habitude prends le bateau pour aller à Libreville, je voyage sur Africaviation aujourd'hui. Je suis assise dans le salon VIP de l'aéroport de Port-Gentil, avec Miro, ses parents et Carmella, la meilleure amie de sa mère. Mon chéri me garde bien à côté de lui, ma tête posée sur son épaule. Rico, son père, sourit :

« Eh mon petit, personne ne va te la voler ! Laisse-la respirer. »

Et Carmella d'ajouter :

« Veuillez avoir pitié de nous autres célibataires. J'ai pas envie d'avoir mal aux yeux. »

« T'inquiète tata Carmella, je t'offrirai des lunettes ! »

« Très drôle Miro. J'adore ton humour », lui fait Carmella.

Carmella est une très belle femme ; une métisse suisso-congolaise de 45 ans. Elle est en vacances au Gabon. Dans deux semaines, elle rentre en Italie où elle travaille. Dès qu'on me l'a présentée à mon arrivée à l'aéroport, nous avons tout de suite accroché. Elle est très sympathique et joviale. Nous discutons encore et encore avant de monter dans l'avion. Le père de Miro me lance :

« Ta mère est une femme délicieuse, Tania. »

« Ça se dit, ça, chéri ! Qu'est-ce que tu entends par délicieuse. », demande Cassandra.

« Je veux dire par là que j'ai apprécié son éducation et ses manières. », répond Rico.

Nous montons les derniers dans l'avion. L’hôtesse nous place à l'avant. Je me sens tellement bien, là, avec Miro à mes côtés que je suis obligée de faire une petite prière au Bon Dieu. J'ai encore beaucoup de mal à croire que moi, Tania Akendengue, je vais en week-end à Libreville pour fêter mon anniversaire !

Je pense à Pupuce qui était ronchon au moment où j'ai quitté la maison. Elle m'a dit qu'elle aurait aimé que nous fêtions nos 18 ans ensemble. Le dernier anniversaire que nous avons fait toutes les deux, c'était celui de nos 10 ans. Nos mamans nous avaient préparé la plus belle des fêtes. Depuis, c'est chacun son côté. Chez les Mbeng là-bas à la cité Rose, monsieur papa Jimmy fait les choses comme un blanc : on fête les anniversaires des enfants chaque année. Pour moi, le fait que maman me prépare mon plat préféré chaque 16 mai et qu'elle m'offre un cadeau, m'a toujours suffi.

Le service à bord est vraiment cool ; on nous sert des petits-fours et des boissons. Ça commence vraiment bien. Je me dis que j'aurais beaucoup de choses à raconter à mes copines au retour. Elles n'attendent que ça : le kongossa du weekend. J'aurais aimé être avec ces folles et faire la belle au Millenium. Mais c'est mille fois mieux d'être là, aux côtés de ce beau jeune-homme qui fait battre mon cœur. Il me murmure dans l'oreille :

« Je t'aime Tania Akendengue. »

et de même, je lui réponds :

« Moi dix fois plus. »

A notre arrivée à Libreville, un chauffeur nous attend dans une Nissan Teena. Yes ! Le genre de voiture de laquelle vous descendez à contre cœur tellement vous êtes trop bien à l’intérieur. Comme ma tête ne quitte pas l'épaule de miro, Cassandra est obligée d’inciter :

« Carmella fera le chaperon pendant le week-end. Je ne peux décemment pas vous laisser tout seuls une minute. Je n'ai pas envie d'être grand-mère maintenant : »

« Oh, maman, tu en as des idées ! »

« Non, mon chéri, tu ne vas pas me rouler : je n'ai aucune confiance en toi quand je vois que ta bouche a du mal à rester loin de celle de Tania. »

« Ok, ok. Promis juré, nous nous tiendrons correctement. », lui promet Miro.

Tu parles. Deux secondes après, nos lèvres sont encore l'une sur l'autre. Bref, le week-end promet.

Nous arrivons à l’hôtel. Un portier nous aide à descendre de voiture tandis qu'un concierge s’occupe de nos bagages. Comme je l'avais prévu, la chambre de Carmella communique avec la nôtre.

« Demain matin, nous passons la journée à la Pointe Denis. », m'annonce Cassandra.

Peu m'importe l'endroit où on m'emmène, l'essentiel pour moi est d'avoir les plus beaux des souvenirs.

Je plane déjà en me couchant sur le lit. C'est tout doux sur la peau ! Le matelas est tellement confortable qu'on pourrait rester là des jours sans se rendre compte que le temps passe.

« On se croirait au paradis », fais-je en regardant Miro.

Le bon monsieur arrive vers moi, il me lève su lit et m'embrasse comme s'il voulait m'avaler toute crue. C'est comment !!!

« Eh, je t'assure que si tu continues dans cette tendance, Cassandra me demandera d'aller dormir avec Carmella. », lui fais-je.

« Jamais ! Tu es dans la bonne chambre et j'y suis aussi. Je suis dingue de toi Tania Akendengue. »

Yo !!!! je fais comment pour ne pas briser la promesse que je me suis faite ! PAS DE SEXE AVANT LE BAC. Et ce sera le cas.

« Je t'aime, Miro. Si tu savais ! Jamais je n'aurais imaginé venir dans un si bel hôtel pour mon 18ème anniversaire. »

« Je décrocherai la lune pour toi. »

« Je suis amoureuse d'un beau parleur », dis-je pour le taquiner.

Là, il s'éloigne de moi. Il croise les bras autour de sa poitrine et m'observe, avec un regard insistant.

« Finalement, je pense qu'il vaudrait mieux que tu ailles dormir dans la chambre de Carmella. Je pense que je serai incapable de me contrôler. Mademoiselle Tania, tu as un effet mortel sur moi ! »

« Hummmm ! C'est quoi cette histoire, monsieur. Je te signale que toi et moi avons déjà dormi dans le même lit ! Tu te souviens, à ton anniversaire en novembre. Il n'ya rien de sorcier. J'ai envie de dormir dans tes bras. »

« Ce ne sera pas possible, ma princesse. Tout mon être est en ébullition quand tu es près de moi. Je ne pourrai pas me contrôler. J'ai sacrément envie de toi, Tania Akendengue. »

« Arrête de blaguer, Miro. J'suis pas venue ici pour dormir avec Carmella. Sinon, je m'en vais. »

« Viens là, plutôt. Je t'aime tellement, Tania. C'est fou l'effet que tu me fais. Vraiment dingue ! »

« Je préfère ça ! Je t'aime, Miro. »

« Dis, beauté, qu'est ce qui te ferait plaisir comme cadeau ? »

« Eh, monsieur, tu viens de m'offrir un weekend dans un hôtel luxueux. Je pense que c'est suffisant, non. »

« C'est mon père qui te l'offre, ma chérie. Je te parle-moi, de quelque chose que je paierai de ma poche. J'ai hésité entre un bijou et un parfum. Et comme ma sœur Gabriella est à New-York et ne peut vraiment pas m'aider à choisir, je te pose la question. »

« Je ne sais pas, Miro ! Il y a tellement de choses auxquelles je rêve ! Je ne sais pas. Tout ce que tu m'offriras me fera plaisir. Tu ne risques pas de te tromper étant donné que je n'ai pas grand-chose. »

« Ok, chérie. Je verrai bien. Tu ne t'emporteras pas si je t'offre un string panthère, j'espère. »

« Très drôle, monsieur. À mon tour, je t'offrirai du rouge à lèvre. »

« Ouille, je n'ai pas encore viré de bord ! »

« Alors, on oublie les sous-vêtements ! »

« Je t'aime beauté. Parfois, j'en tremble. Je me rends compte que tu deviens aussi essentielle que l'oxygène que je respire. »

« Et toi Miro, chaque pulsation de mon cœur chante ton nom. »

Ça c'est ce qu'on appelle le LOVE. Je ne savais même pas que ça pouvait exister ! C'est Pupuce qui lit tous ces livres, Harlequin, Adoras et compagnie et c'est moi qui vit l'histoire d'amour la plus belle...

Miro prends son smartphone. Nous prenons un selfie qu'il pose comme photo de profil whatsapp en mettant comme statut : ti amo Tania.

 

Carmella vient nous chercher à 19h 30. Nous allons dîner au restaurant La Roma. Avant cela, le père de Miro veut faire un petit tour de ville, histoire d'admirer Libreville by night. Je regarde la ville défiler sous cette nuit qui tombe à peine. Ça doit faire deux ans que je ne suis pas venue à Libreville, alors, je note des changements sans trop m'y attarder. Je remarque juste que l’hôpital Jeanne Ebori a été détruit. Bref, le décor a changé.

Quand nous arrivons à la Roma, nous sommes placés dans un coin discret. C'est tellement beau que cela me change drastiquement du Coppa Cabana, de Port-Gentil, le seul restaurant que j'arrive à m'offrir avec ma copine Jileska. La musique est douce, le parfum d'ambiance est lui aussi doux. Des couples occupent les tables à l'entour. On nous tend la carte des menus. Je fais comme ma mère m'a dit : je vais commander ce que je connais.

Le père de Miro demande un vin italien. Moi, je me contente d'un jus d'orange pressée, alors que les deux dames préfèrent des cocktails alcoolisés. Miro demande une bouteille d'eau minérale.

« Alors, Tania. Tu passes le baccalauréat cette année ! », me demande Carmella.

« Oui, je prépare un bac scientifique. »

« Oh ! », s'étonne Carmella.

« Mademoiselle a de l'ambition. Sa mère m'a dit qu'elle veut devenir ingénieur en pétrochimie. », fait Cassandra.

Qui aurait parié qu'un jour cette femme parlerait de moi avec autant d’admiration ???


 

24-

A la fin du dîner, le père de Miro commande 5 coupes de champagne.

« Nous allons trinquer à votre bonheur, les jeunes. »

« Nous vous souhaitons de décrocher ce baccalauréat du premier coup », ajoute Cassandra.

Je me contente de me mouiller les lèvres, car je ne bois jamais d'alcool. Je n'ai pas envie d'avoir la tête qui tourne et de me retrouver en train de faire « des choses » dans le lit avec Miro.

Je suis heureuse d'être là avec ces gens. Les choses se passent mieux que ce que j'aurais imaginé.

Nous rentrons à l’hôtel après avoir longtemps bavardé. Carmella nous accompagne jusque dans notre chambre, alors que les parents de Miro sont à l'étage au-dessus. Elle nous souhaite bonne nuit. Je file dans la douche pendant que Miro répond à ses différents messages sur Facebook. Quand je sors de la salle de bains, vêtue de cette nuisette que madame ma mère m'a acheté, il est admiratif.

« On touche avec les yeux, uniquement. »

« Ça va être très difficile, ma chérie. »

Ça m'énerve ces seins sauvages qui ne peuvent pas rester en place !!!

Il sort à son tour de la douche vêtu d'un pyjama tout blanc. Il enlève le haut avant de se glisser dans le lit à mes côtés.

Là, dans ses bras de monsieur mon bel amoureux, je rêve à haute voix.

« Nous aurons deux enfants : une fille et un garçon. Nous voyagerons un peu en Afrique, un peu en Europe. Je conduirai une belle voiture. »

« Et on se marie à quel moment dans ton histoire ? »

« Après ma licence. Il me faut ce diplôme avant de perdre la tête et de te confier ma vie à jamais. »

A ce moment-là, monsieur sort du lit. Il se dirige vers son trolley et fouille un instant. Il me demande de fermer les yeux.

Il éteint la lumière et met les deux veilleuses de chevet en marche. Là, il prend ma main gauche et me glisse au doigt, ce qui semble être une bague.

« Tu peux ouvrir les yeux », me fait-il.

Quand je les ouvre, je me retrouve stupéfaite face à une bague sertie de diamant au doigt. Mon Dieu ! C'est tellement beau que je n'ai même plus de voix pour crier.

Les larmes se mettent alors à couler.

Vraiment Akendengue Tania ! Tout pour être la maboule de service !

« Eh, beauté, je ne te l'ai pas offerte pour te faire pleurer. »

« Je...je...Elle... »

Les mots meurent au seuil de ma bouche.

Il se met alors à genoux sur le lit, juste à côté de moi et me dit :

« Je t'aime princesse. Et j'espère que cette bague te plaît ? »

Les mots sont faibles ; alors je préfère rester silencieuse. Je m'avance vers lui et l'embrasse.

« Je t'aime Miro. J'ai l'impression de vivre un rêve éveillé. »

« Tu ne rêves pas, ma belle. »

Nous discutons encore et encore en nous embrassant, bien sûr. À tel point, que sans nous en rendre compte, minuit sonne au téléphone de Miro.

« Tu as officiellement 18 ans, mlle la voleuse de mon cœur. Joyeux anniversaire beauté. Je t'offre ton cadeau maintenant ou tu préfères attendre au dîner ce soir ? »

« Euh, mais tu me l'a déjà offert, Miro ! », fais-je en regardant la bague.

« Oh, ça ! C'est juste un outil pour bien dire à tous les garçons qui te tournent autour de passer leur chemin, car tu es déjà prise. »

Yo !!!! Voilà que je suis maintenant une propriété privée !

« Offre-moi ce que tu veux. Mais ne me donne pas de mauvaises habitudes, je pourrais m'habituer. »

« J'ai intérêt à devenir le meilleur des juristes pour satisfaire plus tard le moindre de tes désirs. »

« Je n'aurais besoin que de toi, mon cher. Je t'aime. »

« Moi, dix fois plus. Et si on appelait ta sœur ? Tu penses qu'elle dort. »

« Non, elle est sûrement en train de lire. Appelons-la. »

Nous appelons Pupuce. Elle décroche au bout de 3 sonneries. Miro met le haut-parleur et lui souhaite un joyeux anniversaire. Mademoiselle a le courage de fondre en larmes.

« Oh, beauté, je t'appelais juste pour t'envoyer des bisous pas pour te faire pleurer. Nous pensons fort à toi. »

Il raccroche après avoir encore souhaité beaucoup d bonheur à Pupuce.

Mon téléphone vibre. Des messages. De mon frère Julien. De ma mère. De ma folle de Jileska. De mon cher papa, qui pour une fois n'a pas oublié. Mes petits Mbeng ne m'ont pas oubliée. Ils ont envoyé un message commun : Joyeux anniversaire Ya Tania. Je suis comblée. Tant d'émotions me tire encore des larmes.

« On sèche ses larmes et on danse. Allez, viens. », me fait Miro.

Il prend son téléphone et met de la musique. Nous commençons par Photograph de Ed Sheeran, puis Primetime de Janelle Monae, pour poursuivre par El perdon, de Enrique Iglesias.

« T'as que de la musique de filles, mon chéri. »

« C'est pour faire plaisir à la plus belle, celle que je tiens dans mes bras à cet instant. »

Nous finissons par nous endormir, dans les bras l'un de l'autre. C'est la réception qui nous réveille à 7h.

Petit déjeuner royal au restaurant de l’hôtel. Il y a tellement de choses exposées là, que je me contente de ce que je connais : une assiette de fruit, un bol de corn flakes et 2 verres de jus d'orange.

Une heure plus tard, un chauffeur arrive pour nous emmener à Michel Marine pour prendre la vedette pour La Pointe Denis.

Quand on arrive à destination, je me rends bien vite compte que la journée sera vraiment belle. L'endroit est propice pour de belles photos. C'est la première fois que je viens ici pourtant, j'en ai beaucoup entendu parler. Je suis quand même émerveillée de voir les familles venues se relaxer pour la journée, à la plage.

Quand nous arrivons dans une salle, plutôt jolie et bien décorée, je ne m'attends pas à :

« Joyeux anniversaire Tania ! »

Tous mes amis sont là. Mon frère Julien aussi. Jileska, Sharonna, Gaëlle, et Marc-Elise. Yo ! Je suis que dépassée. Je me retourne vers Miro et lui lance :

« Tu as fait ça ! »

« Et oui ! Surprise mon cœur. Joyeux anniversaire. »

Il y a une dizaine d'amis de Miro. J'ai plus d'acquintence avec Cristale, une métisse franco-ivoirienne dont le père est géologue à Perenco Gabon. Elle me tire par le bras. Et me lance :

« Allez, vient par ici. Séance photos avec tout le monde. Ensuite, il y a les bougies à souffler et après, les cadeaux à ouvrir. »

Ils ont tout préparé sans que je ne me doute de rien. Je comprends maintenant pourquoi Jileska disait à Jacques qu'elle serait à Libreville pour le week-end. Les cachottières. Tout le monde passe à mes côtés pour les photos.Mes copines font la grimace lorsque le photographe crie : cheese !

C'est fou ce que le bonheur peut rendre bête. Je suis tellement heureuse que les selfies pleuvent avec ces fofolles qui m'accompagnent depuis la classe de 6ème.

« Vous avez le vampire, les filles ! Nous avons passé la semaine ensemble et à aucun moment, je ne me suis douté que vous me cachiez quelque chose. »

« Je n'ai pas envie de mourir jeune ! Alors quand Miro nous a demandé de garder le secret, je me suis tue. Il nous aurait tuées, sinon. », me fait Gaëlle.

« Trop cool de vous avoir ici ! »

« Pardon, la go ! Moi, je suis trop contente de dormir dans des draps aussi soyeux ! Yo, j'ai cru que j'étais au paradis quand je me suis glissée dans mon lit ! », lance Jileska.

« Et moi, alors ! » lance Marc-Elise. « La baignoire dans notre chambre est tellement immense, que je pourrais dormir dedans. Ah, vraiment, ma copine, tu as trouvé là, un vrai gars. Qui donc allait me « gaspiller » le Park'Inn.

« Huummmm ! Fais semblant, toi aussi ! », lui lance Jileska. « En tout cas, quand on me voit me balader là dans l’hôtel, je fais comme si j'ai l'habitude de prendre l'ascenseur tous les jours, oooh ! Les gens n'ont pas besoin de savoir que la go de POG que je suis n'a jamais voyager dans un avion et n'a jamais dormi dans un hôtel ! »

« Tu ne changeras jamais ! », fais-je à Jileska en riant.

La musique est enivrante. Personne ne se fait prier pour danser. Même ma belle-mère se trémousser sur la piste au rythme du Tcham de J-Rio. Faut voir les amis du lycée Victor Hugo ! Ils dansent là, comme s'il s'agissait de casser le corps. Moi, je ne lâche pas Miro d'un pouce. Je joue à ton pied mon pied, parce que la connasse de Pamella-Jo, qui aimerait être à ma place, est là. Elle est sortie avec Miro il y a deux ans. Il l'a laissé tomber. Madame jure qu'elle va me le piquer. Comme je n'ai pas envie de bastonner quelqu'un le jour de mon anniversaire, je préfère protéger mon cœur.

Mais, cette blanche-là est tellement sans gêne qu'elle arrive vers nous et m'arrache Miro des bras ! Yo !

J'ai envie de la tirer par les cheveux et aller la jeter dans l'eau, mais je me retiens. Depuis le jour où je l'ai surpris, à l'anniversaire de Miro, en novembre dernier, lui faire un strip-tease, alors qu'il se préparait dans sa chambre, j'ai des envies de meurtre quand je la vois. Nous étions ensemble dans la chambre. Il se préparait pour aller saluer ses invités. Il m'avait juste envoyé lui chercher un verre d'eau. Quand je reviens quelques minutes après, je trouve la fille seins nus, en train de se battre pour enlever son pantalon en skaï. Je ne me suis pas occupé d'elle. J'ai simplement tiré Miro par le bras et nous sommes sortis de la chambre.

Comme j'en ai marre de voir cette fille se serrer tout contre mon mec, je demande de l'aide à mon frère.

« S'il te plaît, Julien, est-ce que tu peux t’occuper de cette fille-là ! Tu vois, celle qui danse avec Miro. Essaie de l’occuper toute la journée, histoire qu'elle oublie un peu mon chéri. Elle me sort par les oreilles ! »

« Huuummm ! Sister, elle est bien jolie. Mais tu sais que moi les blanches, c'est elle me donne de l'urticaire. Donc, je ne peut rien pour toi. »

« Eh, ben, mon cher, tu vas devoir oublier ton allergie pour les filles blanche et me rendre ce service. »

« Grande sœur, que les choses soient claires. Si la go me démarre, ce n'est pas moi qui vais freiner ! Faudra pas venir me tirer les oreilles si jamais nous grillons des feux rouges ! »

« Je te signale que tu n'as que 14 ans et que tu n'as pas encore le permis de conduire. Alors, contente-toi de prendre le taxi. Allez, ouste ! »

Julien réussit à séparer Miro de Pamella-Jo. Je récupère mon chéri, et nous évoluons tranquillement sur la piste de danse. A midi, l'on nous sert à manger, des grillades comme je les aime, et des salades. Jileska, qui est une mordue des beignets brochettes, se met dans un coin, histoire que personne ne l'embête pendant qu'elle descend toutes les broches de viande qu'elle a posées dans son assiette. Gaëlle fait la ligne et décide donc de ne manger que des salades, alors qu'elle a un corps de rêve. Marc-Elise est occupé à écouter les histoire d 'Antoine, un ami franco-Thailandais de Miro. C'est à peine si elle ne le mange pas des yeux.

Le repas terminé, des serveurs apporte une immense pièce montée, vanille-fraise; de 5 gâteaux en forme de cœur. Même dans mes rêves les plus fous...

« Tu es complètement fou, Miro ! », lui fais-je à l'oreille.

« Oui, fou de toi ! »

Nous nous embrassons et sommes interrompus par Cristale qui me demande d'approcher du gâteau. Ils entonnent tous un happy birthday et après, j'entends les copines qui crie : fais un vœu.

Mon vœu fait, je coupe une part de gâteau. Je vais la donner à Cassandra. Je réserve la deuxième à Rico. Puis la troisième à Miro. Ensuite, je tends le couteau à Cristale pour qu'elle continue le découpage.

Nous passons ensuite l'après-midi dans l'eau, sous l'objectif de Cristale qui compte bien en faire un film.


 

25-

 

La nuit vient juste de tomber. Nous sommes rentrés complètement, morts de fatigues. Dans la navette, je me suis rendu compte que Pamela-Jo ne veut plus lâcher mon frère d'une semelle. Et il ne sable plus allergique aux blanches !!!

Je suis dans la salle de bains. Allongée dans la baignoire, j'ai les yeux fermés, comme pour mieux me relaxer. La journée a été belle mais fort épuisante. Et là, les amis nous attendent pour aller dîner. Ensuite, nous nous jetons dans un bus loué pour l'occasion, et nous atterrissons en boite de nuit, chaperonnés par Carmella.

Je suis là en train de rêver dans la baignoire, quand Miro rentre dans la salle de bains. Il s'assoit sur le rebord de la baignoire et souris :

« Je m'étonne que tu ne te caches pas sous l'eau à cet instant. »

« Pas la peine, je ne suis pas aussi prude que ça. Et puis, tu m'as déjà vu toute nue, tu te souviens. »

« Ok ! Prière de ne pas me rappeler se souvenir sinon, je ne pourrai plus me contrôler. C'est que tu es la tentation même, mademoiselle Akendengue ! », fait-il en m'envoyant un baiser à la volée.

« Ah ! Je suis amoureuse d'un beau parleur. »

« Le beau parleur te fera gémir comme un dingue. Et faudra pas venir te plaindre ; tu m’auras tellement fait attendre, que je ne répondrais de rien une fois que sera mienne. »

« Mon Dieu, j'en tremble déjà ! », fais-je en le taquinant. « Merci pour tout Miro. J'ai passé la plus belle des journées. »

« Tu le mérites, ma belle. Tu le mérites. Et je t'aime. »

« Moi, dix fois plus. »

« C'est vrai ce mensonge ? », fait-il en me posant un baiser sur le front.

Il s'en va en m'annonçant qu'il va régler quelques détails avec les garçons, qui sont deux étages plus bas. Je reste là et continue de rêver dans mon bain. Je me demande comment Pupuce a vécu cet anniversaire. Ça fait pas mal d'effet d'avoir 18 ans. C'est bête, mais je me sens plus grande. J'ai l'impression que quelque chose dans mon esprit a changé. C'est peut-être une impression. Là, je me demande ce que je ressentirai le jour où j'aurai 25 ans ? J'aimerais avoir mon première enfant à 25 ans. Le second à 28 ans. Et éventuellement un 3ème à 30 ans. Bref, la vie nous le dira.

 

Quand j'arrive dans la chambre pour m'habiller, je me rends compte que mon téléphone vibre. De même pour celui de Miro. Je me dirige directement vers le mien. Je me rends compte que c'est un message de Pupuce. Joyeux anniversaire, me dit-elle. Je réponds par la même sans plus m'attarder. Il faut que je m'habille, alors, je ne prends pas la peine de consulter les autres messages. J'enfile ma robe et je me maquille légèrement ; un peu de fond de teint et un peu de gloss. Je suis prête pour le dîner. Je suis là à chercher mon eau de toilette lorsque Miro arrive.

« Moi qui pensais passer un week-end tranquille ! C'est raté. »

« Que se passe t-il ? », fais-je.

« Heu...figure-toi que ton amie Sharonna est dans tous ses états. Je viens de passer une demi-heure à la calmer. »

« C'est quoi cette histoire ? »

« Je l'ai trouvé dans l'ascenseur en larmes. J'ai dû user de tout le vocabulaire que je connais pour la calmer. »

« Et à quoi est dû cette crise de larmes ? »

« Elle t'a envoyé une tonne de sms en 10 minutes. Je savais que les filles étaient folles amoureuses de leur téléphone, mais là, elle a réussi à m'impressionner. Sa vitesse de frappe est terrible. »

Je m'empare rapidement de mon téléphone et me rends compte qu'il y a 2 messages non lus venant de Pupuce et une trentaine de messages de la part de Sharonna. C'est vraiment dingue !

J'en lis quelques-uns. Et je finis par comprendre. Damm !

« Ne me dis pas que... »

« Et si ! C'est dingue, n'est-ce pas ? »

« Et comment va t-elle ? Moi je serais complètement effondrée à sa place. »

« Tes mots sont faibles, ma chérie. Elle est terrassée. »

Ma copine Sharonna a surpris sa mère dans les bras d'un autre homme que son père. Ils s'embrassaient dans le hall de l’hôtel, comme s'ils ne pouvaient attendre d'être dans leur chambre.

« Et qui est cet homme ? », fais-je à Miro.

« Elle ne l'a pas vraiment distingué. Elle a tellement été frappée de stupeur en reconnaissant sa mère, qu'elle ne s'est plus intéressée au monsieur. Il a d'ailleurs très vite pris la tangente. La mère n'a même pas trouvé un seul mot pour calmer sa fille. »

« Il y a quelque chose que je ne comprends pas. Pourquoi sa mère est-elle descendue dans le même hôtel que nous alors qu'elle savait que sa fille y passerait le week-end. »

« En fait, Sharonna s'est trompée en demandant la permission à ses parents. Elle leur a dit que nous descendions au Meridien. Donc, sa mère a dû pensé qu'elle ne risquait rien en venant au Park'Inn. »

« C'est fou quand même ! Une femme mariée qui embrasse son amant dans le hall d'un grand hôtel !!! »

« Il faut penser que ce type la rend complètement bête, au point de faire preuve de légèreté. J'ai bien peur que tu te retrouves toute seule avec moi pour le dîner. Les filles sont avec elles en ce moment. Et j'ai bien l'impression qu'elles vont rester à l'hôtel et se commander à manger par le room service. »

« Il en est hors de question. Je vais les voir et je t'appelle. Tu peux te préparer. »

« A tout à l'heure ma puce. »

Quand j'arrive dans la chambre de Sharonna et Jileska, je trouve les filles en conseil de guerre. L'attitude que m'a décrite Miro, a complètement changée. J'entends Sharonna dire : je vais faire la folle cette nuit, danser jusqu'au matin et descendre toute une bouteille de Black jack et

« Tu ne feras rien de tout ça, Sharonna. Personne ne va se saouler. On va faire la fête convenablement et rentrer saines et sauves à Port-Gentil. »

« C'est facile à dire, Tania. Ce n'est pas ta mère qui se fait bécoter par son amant dans le hall d'un hôtel ! »

« Je comprends, Sharonna. Mais nous sommes venues ici pour nous amuser. Nous n'aurons peut-être plus l'occasion avant longtemps de faire les folles toutes ensemble à Libreville. Le bac, c'est bientôt ; ensuite, nous serons éparpillées ! Viens avec nous. Ne reste pas dans ta chambre toute seule. Demain, nous aurons bien le temps de réfléchir à la conduite à suivre avec ta mère. Ok ! »

« Non, je viens pas. Je sais même pas comment je vais faire quand je me retrouverai devant mon père ! »

Nous restons là encore à parlementer pendant un quart d'heure et c'est Marc-Elise qui trouve la parade pour faire changer d'avis à Sharonna :

« On prend le téléphone, on appelle ton père et on lui raconte tout. Comme ça, tu te sentiras plus légère et ta mère se débrouillera avec son époux. »

« Jamais je ne ferai ce genre de chose », s'insurge Sharonna.

« Alors, habille-toi et viens avec nous sinon, je l'appelle. »

Mon amie consent alors à s'habiller. Et nous rejoignons les autres au restaurant. Les parents de Miro dînent avec nous. Ils ont été rejoints par un couple d'amis qui vit à la capitale. Carmella prend son rôle de chaperon vraiment au sérieux. Elle nous surveille de près.

Le dîner est tranquille. Comme dessert, les serveurs apportent un immense gâteau au chocolat. Et nous avons droit en lieu et place du champagne, à du cidre. Les parents de Miro veulent être sûrs que personne ne se saoule sous leurs yeux. Il est 22h 30 quand nous sortons de table. Juste le temps de faire un tour dans nos chambres pour nous rafraîchir, et nous voilà dans le bus, près pour aller se trémousser sur la piste de danse.

Le chauffeur du bus à pour consigne de nous ramener à l’hôtel à 2 heures du matin.

Là, je danse dans les bras de Miro. En fait, je devrais dire que nous somme collé-collé, pire que deux chewing-gums. Nos bouches ne se quittent pas un instant. Les autres autours se trémoussent. Chacun a pris possession de la piste comme il peut. Mon frère Julien a les bras très occupés à caresser le fessier de Pamella-Jo. Marc-Elise se l a joue experte en danse dans les bras d'Antoine. Chacune de mes copines a trouvé avec qui faire la paire. Le plus important pour moi est de ne pas perdre Miro dans cette boîte de nuit. J'ai bien trop peur qu'il atterrisse dans les bras d'une autre.

À 2 heures du matin, nous sommes complètement à plat lorsque Carmella nous somme de sortir de la boîte. Direction l’hôtel.

Il est trois heures du matin quand je tombe exténuée après la salle de bain, dans le lit. Miro est déjà couché. Il n'a pas pris la peine d'enlever sa cravate tellement il est fatigué. Je lui pose un baiser sur la joue et il ne réagit pas.

Alors que je veux me coucher, mon téléphone vibre violemment. J'ai l'impression de l'avoir ignoré pendant longtemps, car il y a près d'une quarantaine de messages. Mes frangin Mbeng m'ont matraquée de messages. Il y en a 2 de Pupuce. Ma mère m'en a envoyé 3. Ils sont courts : appelle.

Je ne prends pas le temps de lire les autres messages. Je me demande alors ce qui se passe. Je suis loin de me douter de ce qu'ils ont à m'annoncer.

« Tu en as mis du temps, me lance maman. Je te signale que tes enfants sont nés à zéro heure 45 ce matin. Par césarienne. Deux jolies filles. »

Mon cri de joie est tellement strident que Miro se réveille en panique.

« Qu'y a t-il chérie ! »

« Je suis tata, Miro, je suis tata. »


 

26-

Impossible de dormir après avoir appris cette nouvelle. Je ne tiens plus en place. Je tourne dans la chambre. J'envoie des whatsapp aux copines pour leur annoncer la nouvelle. Jileska, Gaëlle et Marc-Elise arrivent quelques minutes plus tard.

« Montre les photos, montre les photos », me font-elles.

Elles sont là à s'extasier devant les petites frimousses qui sont drôlement mignonnes. Je n'en reviens pas. Je suis tata.

« Eh, les filles ! Vous savez, elles seront toujours au réveil. Et si vous me laissiez dormir », fait Miro en riant.

« Ok ! Nous avons compris le message ! On dérange, c'est ça ! », fait Gaëlle.

« C'est pas que je vous mets à la porte, mais je vous assure que je tombe de sommeil. Alors, on se voit au petit-déjeuner ! », fait Miro.

« A tout à l'heure, alors. », lancent les filles en s'en allant. « Elles sont trop chou ces petites ! »

C'est vrai qu'elles sont belles mes nièces. Elles ont beaucoup de cheveux sur la tête, des petites bouches en forme d'amande. Mon Dieu, de véritables merveilles !

Je laisse Miro se rendormir et me remets à pianoter sur mon téléphone. Comme Pupuce est encore en salle de réveil, je chatte avec Line, la cadette des Mbeng. Elle est en extase devant les petites. Elles m'envoient photos sur photos. Et je demande alors si Kaba est à l’hôpital. Elle me répond non.

« La vieille est chez elle. Tante Bernadette l'a appelée, mais elle dort. »

« Je pense qu'elle changera de comportement quand elle verra les petites. »

« En tout cas, on s'en fout d'elle. Elle aime toujours gâcher l'ambiance. Sinon, papa Jimmy est là. Il est tellement nerveux qu'il n'arrive pas à tenir sur place. Il y a aussi papa Magloire. Il ne boit plus, oh ! »

« Je suis contente de l'apprendre. »

Et ça dure comme ça une heure durant. Un échange par whatsapp pour me faire vivre chaque instant comme si j'y étais.

Alors que je réponds à un message dans lequel on m'a envoyé une autre photo, Miro me prend le téléphone de la main et le dépose sur le chevet du lit. Il me renverse sur le lit et m'emprisonne en me donnant un baiser.

« Viens la tata Tania. Ce lit est triste sans toi. »

Il m'embrasse encore, alors que nous sommes tous deux couchés sur le lit. Puis, il relève la tête et me dit :

« Au fait, vous avez choisi quels prénoms pour les petites ? »

« Jade et Ruby. »

« Oh ! Des pierres précieuses. Qui a choisi ces prénoms ? »

« C'est maman. Elle les a trouvées instinctivement le jour où elle a appris qu'il y en avait deux au lieu d'une.

« Bienvenue à Jade et Ruby, alors. Et toi, embrasse-moi. »

Huuuuummmmmmm !

 

Il est 9 heures lorsque nous allons au restaurant de l’hôtel pour le petit-déjeuner. Une partie des amis est là. Certains dorment encore. D'autres sont partis faire un tour au marché Mont-bouët.

Miro et moi mangeons en compagnie d'Antoine qui n'arrête pas de questionner sur Marc-Elise. Les questions pleuvent. Quel est son film préféré ? Quel genre de livre lit-elle ? Quelle est sa date de naissance ? Est-ce qu'elle aime les sushis ? Est-ce qu'elle aime les chiens ?

« Tu aurais dû engager un détective privé, Antoine », lui fait Miro.

« Eh, déconne pas, mec. Elle me plaît. J'ai besoin de cartouches pour tirer et viser juste. »

« Ok, ok. Sois pas si agressif ! », fait Miro.

« Comprends-moi, elle m'impressionne. Tu sais, Tania, c'est la première fois qu'une fille black m’intéresse, alors je ne sais pas trop comment l'approcher, tu vois. Avec les Françaises, c'est direct. Tu dis ce que tu veux et elle dit oui ou non. Ici au Gabon, ça l'air un peu plus compliqué. »

« Les filles sont toutes les mêmes, Antoine. Prête-lui beaucoup d'attention et c'est tout. », lui fais-je.

« Ok, ok. Ça, je sais faire. Je vais l'inviter au restaurant et on verra bien ce qu'elle répondra. »

Au fond de moi, je me suis mise à rire. Tu vas inviter la gaboma au restaurant et elle va te dire non !!!

« Invite là à Planet grill. Elle adore cet endroit, même si nous n'avons pas l’occasion d'y manger tout le temps. »

« Ok, c'est noté. Euh, rappelle-moi son parfum préféré. »

Me voilà en train de réfléchir pour que ma copine ait un parfum digne de ce nom.

« Nous avons récemment eu des échantillons de Magnetism, d'Escada. Offre-le lui et tu l'auras à tes pieds. »

« Oh, je ne m'attends pas à ce qu'elle me lèche les pieds, Tania. »

« C'est une expression pour dire que tu lui feras plaisir, Antoine. La prochaine fois, Tania parlera Thaï et tu comprendras mieux. »

« Très drôle, miro. Très drôle », fait Antoine.

« Bon, Tania et moi retournons dans notre chambre. Nous sortirons ensuite pour aller acheter des cadeaux à ses nièces. Elles sont nées ce matin, tu t'imagines ! »

« T'es vraiment la plus jeune des tatas que je connaisse, Tania. En France, on est tata à 30 ou 40 ans. »

« Nous sommes en Afrique, Antoine. Mets toi à l'heure africaine. »

« Je vais le faire, Miro. Vu toi, tu t'es vite acclimaté, mon pote. »

 

Miro et moi remontons dans notre chambre. Je lui demande alors où l'on ira pour acheter les fameux cadeaux.

« Nous sommes dimanche, tu sais. A part le marché Mont Bouët, aucun magasin en ville n'est ouverts. Le mieux est d'attendre demain. Nous achèterons les cadeaux à Port-Gentil. De toute manière, je n'ai pas d'argent. »

« T'inquiète pas pour l'argent. Et pour le magasin, je vais demander à ma mère. Elle a une amie qui possède un magasin pour bébé au quartier Louis. Elle nous fera une fleur en ouvrant rien que pour nous. »

Wèèèèèèè ! C'est bien d'être riche et d'avoir de l'influence.

Quand nous arrivons devant la porte de notre chambre, nous trouvons Cassandra qui s'apprête à toquer.

« Nous sommes là, maman. »

« Ah ! Bonjour à vous. Tiens, Tania. J'ai oublié de te remettre ton cadeau hier. »

« Oh, merci Cassandra. »

Je lui fais deux bises avant de me saisir du paquet qu'elle me tend. Comme c’est une go qui ne blague pas, je me rends bien vite compte qu'il y a un parfum de chez parfum et un bijou dans le paquet. Yo !!! J'ai vraiment beaucoup de chance cette année ! La vie ne peut pas être plus belle.

« Maman, nous avons besoin d'acheter des cadeau pour des bébés. Tania est tata depuis ce matin. »

« Oh, félicitations. Mais tout est fermé le dimanche. Ah, laisse-moi passer un coup de fil et je t'envoie un texto. A tout à l'heure chéri. Ton père me demande de l'accompagner à la messe à Ste Marie. Bisou. »

dans la chambre, Miro m'aide à ranger tous les paquets cadeau. Entre ceux que j'ai ouverts et les autres, il y a une pléthore de paquet. J'ai vraiment été gâtée. Même en rêve, jamais je n'aurais pu avoir tout ça. Le père de Miro m'a offert une montre Swatch. Carmella m'a offert une robe de chez Desigual, et dans le paquet que m'a remis Cassandra, il y a une gourmette en or sur laquelle est gravée mon prénom et une eau de toilette Miss Balmain.

Mon sac de voyage risque de rendre l'ame si je mets tout cela à l'intérieur, alors Miro me dit :

« Nous allons acheter un sac. Viens, sortons. Maman a appelé son amie. Elle nous attend au magasin. »

Nous prenons un taxi compteur qui nous dépose juste devant le magasin, à côté du marché Louis. Nous montons à l'étage et je me retrouve au paradis des bébés. Mon Dieu ! On a envie de tout prendre. Mais comme ce n'est pas mon argent qui paie, je me contente de tirer deux robes

« C'est tout ! », s’étonne Miro.

Me voilà en train de bégayer :

« Je...je ...euh ! »

« Tania Akendengue, ton intégrité m’honore, mais s'il te plaît, achète de vrais cadeaux aux petites. »

Yo !!! faudra pas que les gens pensent après que je profite de son argent.

Je prends un panier que je remplis de petites choses. Des choses dont je sais qu'elles auront besoin. Je prends en plus, des joujoux. Miro demande alors à l'amie de sa mère d'emballer deux grands nounours, les plus grands du magasin. Un représentant Minnie Mousse et l'autre Daisy Duck. Nous passons à la caisse et un sacré mal de tête me prend quand j’entends dire : trois cent quarante-six mille francs. Je préfère regarder ailleurs pour ne pas avoir mal au cœur.

J'ai dépensé en une fois le prix de mon billet d'avion pour Accra !!!


 

27-

 

Sitôt que nous arrivons à Port-Gentil, je demande à Miro de nous déposer, Julien et moi, à la maison. Cela me permet de prendre une douche et de me reposer un peu avant d'aller voir les petites à la clinique Total. Les filles me lancent :

« On se capte tout à l'heure à la clinique. A 18h. »

Miro descend de voiture pour dire bonjour à maman.

« Alors, elles sont comment ? », fais-je en arrivant dans le salon.

Maman qui est devant la télévision me regarde et e sourit :

« Mademoiselle Akendengue, on dit bonjour ! Bonjour Miro. Comment vas-tu.

« Bonjour Bernadette. Je vais très bien. Bon, je m'en vais. Je vais me reposer un peu. Faites-moi signe quand vous serez à la clinique. Je viendrai vous rejoindre. »

Il s'en va après m'avoir embrassée.

« Alors, raconte ! Pourquoi ces petites ont-elles décidé d'arriver avec 3 semaines d'avance ? »

« Oh ! Je pense qu'elle en avait assez d'être dans ce ventre et voulais te voir de près ! »

« Très drôle, maman ! Alors, comment s'est passé l'accouchement ? Qui vous a accompagnées à la clinique ? »

« J'ai appelé Mr Mbeng sitôt qu'elle s'est senti mal. Elle a perdu connaissance dans la cuisine. Heureusement que j'étais à la maison... »

« Ok. D'accord. Et comment vont les petites ? Est-ce que tante Agnès était à la clinique ? »

« Non ! Elle est toujours fâchée. J'ai du mal à comprendre pourquoi.« Très drôle, maman !it on doit passer à autre chose et changer d'attitude maintenant que les petites sont là ! »

« Et dis-moi, est-ce que vous avez prévenu la mère de Peter ? Et lui-même, où est-il ? »

« Ne pose pas de questions dont tu ne veux pas entendre les réponses. On va là-bas, on s’occupe de nos enfants, le reste, on le laisse à Dieu. »

« Oh ! C'est à ce point. »

« Oui. Et j'aimerais que tu n’embarrasses pas ta sœur avec ces questions. D'accord. »

« Ohhhhhh !!! mais il faudra bien un jour ou l'autre qu'on en parle. »

« Peut-être, mais pas aujourd'hui. Pas tant que Pupuce est à l’hôpital. Il la garde dix jours à cause de la césarienne. Et pour Agnès, j'irai lui parler demain après le boulot. Je l'ai eu au téléphone à 10h. Elle m'a fait tout un speech, soit disant que je suis trop permissive. Elle ne comprend rien à la vie, cette femme ! »

« Bonjour Julien. Comment s'est passé ton week-end. »

« Très bien même, la vieille. Il a été très occupé avec le fessier de cette Pamella-Jo ! »

« Vous avez vu les gens ! C'est comme ça qu'on me vend. Écoute la vieille, ta fille était embêtée et tout. Il y a une fille qui chauffait pas mal mon bof ! Donc la sista vient me voir et me demande de m'occuper du bizzz et tout. On ne refuse pas une faveur à sa frangine, tu comprends. Donc j'ai pris le colis en charge jusqu'à destination. », fait mon frère.

« Et quand tu parles en français facile, ça donne quoi. », lui demande la vieille.

« Bon, La fille en question, Pamella-Jo elle a 17 ans, elle me mange dans la main. Je suis un gars hyper sexy, intellect et disponible. C'est normal. », fait mon frère.

« Je te signale, monsieur mon fils que tu n'as que 14 ans ! Comment peux-tu sortir avec une fille plus vieille que toi ??? »

« La vieille, je peux te jurer que lorsque je l'ai embrassée, elle n'a pas senti la différence entre mes 14 ans et les 17 ans des mecs auxquels elle est habituée !!! »

« Ah, parce qu'elle a déjà des habitudes !!! »

« Calme-toi, la vieille ! Tu parles quand même à un garçon responsable ! J'ai fait comme tu me l'a toujours répété, j'ai utilisé une capote. Enfin...deux capotes quoi !? »

« Donc, si je comprends bien, tu es allé en weekend à Libreville pour te faire dépuceler par une fille de terminale ! »

« Eh ! J'ai rien demandé maman. Elle m'a proposé, j'allais pas dire non. »

« Mon Dieu ! Cet enfant est fou ! Disparais de ma vue ! »

« Bon, je m'en vais dan ma chambre. Mais si une Tuscon de couleur grise se gare devant ton portail, ne t'étonne de rien. On vient me rendre visite tout à l'heure ! Mais, quand même tu restes ma number one, la mater. »

« Disparais ! Pardon, n'assassine pas plus mes oreilles. Cet enfant est même comment ! Tania, c'est ce que vous êtes allés faire à Libreville. »

Pendant tout leur échange, je suis restée silencieuse. Mais là !

« Huuuummmm ! La vieille, tu aimes exagérer. On s'est amusé, c'est tout. », fais-je à maman.

« Alors, raconte-moi tout. »

Je m'assois pour raconter le week-end à ma mère. J'ouvre les bagages pour lui montrer tous les cadeaux que j'ai reçu.

« Finalement, ça va mieux avec Cassandra ! »

« Oui, vraiment mieux. Je ne sais pas ce que tu lui as dit lorsqu'elle est venue te voir, mais elle a été très impressionnée. Elle s'est adoucie envers moi. »

« J'en suis heureuse. Tu ne m'a pas montré le cadeau que t'a offert Miro. »

« Ferme les yeux d'abord. »

Alors qu'elle ferme les yeux, je lui mets en évidence, ma bague sous les yeux. Quand elle les ouvre, elle crie.

« Ce n'est pas vrai ! Dis-moi que ce n'est pas vrai. »

« Et si, c'est ça son cadeau !

« Tu as vraiment eu un anniversaire de rêve. »

« Comme tu le dis, maman. Comme tu le dis. »

Nous sommes là en train de papauter quand on entend une voiture se garer devant le portail. Maman s’étonne au son du moteur de la dite voiture. On sort et on se retrouve face à un TM. En descend la mère de Peter.

« Bonjour, oh ! Je ne pouvais pas venir à la clinique. J'étais trop occupée avec la maman qui me fait un palu, là ! Mais voilà. Peter est parti, oh ! Il m'a dit d'aller chez Bitar (le libanais) pour aller chercher les deux berceaux, là. Voilà. »

Maman regarde étonner. Elle n'ose rien dire.

« Oh, c'est Peter qui envoie les berceaux, c'est ça ! », fais-je complètement incrédule.

« A didiambou ! c'est ce que je dis là. Il m'a seulement dis, vas chez le libanais, j'ai déjà payé. Donc, y a 2 berceaux et 2 commodes, plus 2 matelas. Voilà ! »

Je sors très vite de mon étonnement et demande aux jeunes hommes qui porte les affaires de les déposer dans le salon. Ils s’exécutent et la mère de Peter s'en va comme elle est arrivée. Maman n'a même pas le temps de lui poser plus de questions. Alors, elle se tourne vers moi et me demande :

« Dis-moi Tania, où Peter a t-il trouvé l'argent pour acheter ces meubles ? »

« Je n'en ai aucune idée, maman. Je suis aussi surprise que toi. »

Julien arrive alors.

« C'est quoi ce vacarme ! Oh !!! Où avez-vous eu l'argent pour acheter d'aussi beaux berceaux ? »

« C'est la mère de Peter qui vient de les livrer », lui répond maman.

« Où les a t-elle volé ? »

« Julien ! », s'indigne maman.

« Ah, la vieille. Elle t'a dit elle-même qu'elle n'a pas de lit chez elle. Où a t-elle trouvé l'argent pour acheter ces meubles ? », s’étonne Julien.

« Elle dit que c'est Peter qui les as achetés. »

« Yo !!!! On verra de tout dans ce Gabon ! Je ne dis rien. », fait Julien en allant dans la cuisine.

Maman et moi restons là à nous regarder.

« Heuuuuu ! Où va t-on mettre tout ça ? »

« C'est vrai qu'on y a même pas pensé. On est obligé d'en mettre un dans ta chambre et l'autre dans la mienne. C'est le seul moyen. »

« Ok. On mettra les deux commodes dans la chambre de Julien. En espérant que monsieur ne se fâche pas en disant qu'on viole son espace privé. »

Elle appelle alors Julien pour nous aider. On fait comme on a dit. Puis, maman commence à ranger les affaires des bébés dans la commode. Je place les nounours achetés par Miro dans les berceaux. Et je vais prendre une douche. Quand je reviens, je me rends compte que maman a prodigieusement installé les tours de lits que j'ai acheté à Libreville. C'est bête, mais à voir ces berceaux aussi bien décorés, on aurait envie d'avoir des enfants.

« C'est vraiment beau ! »

« Comme tu dis ! J'espère que ces deux berceaux ne seront pas les seules choses qu'elles recevront de leur père. »

« Maman, la mère de Peter a dit qu'il est parti. Qu'est-ce que cela veut dire ? »

« Je n'en sais rien, chérie. Je n'en sais rien. »

« C'est bête, mais j'aurais jusqu'au bout espéré qu'il change malgré tout. »

« Il ne changera pas. Il est comme il est. », conclut maman. Voir moins

   
 

28-

 

Je suis fin prête et habillée pour me rendre à la clinique. Maman termine de ranger les affaires des petites. Je la rejoins dans sa chambre.

« Je vais passer la nuit là-bas. Elle a besoin d'aide, car elle ne peut porter les bébés à cause de sa cicatrice. Là, ta grand-mère est restée là-bas avec la grand-mère Mbeng. »

« Oh ! Elles vont pouvoir de raconter beaucoup de choses ! »

« C'est sûr ! Ces gens sont vraiment gentils. Les sœurs de mr Mbeng étaient toutes là ce matin pour la visite. », me confie maman.

« C'est vraiment cool pour Pupuce. Elle qui pensait se retrouver seule ! »

« Non, il y aura dix-mille mains pour s’occuper de ces enfants. Ma maison est bien petite pour accueillir tout ce monde. »

Je souhaite poser une question quand Julien arrive en trombe dans la chambre de maman en oubliant de cogner :

« Les filles, vous ne me croirez pas. »

« Oui, qu'y a t-il. »

« Un frangin vient de me balancer une info, là ! Parait que Big Wave s'est tiré ! »

« Nous étions déjà au courant ! Sa mère nous l'a dit tout à l'heure. »

« Et wèèèè ! Et vous savez où le type a atterri ? »

« Non. Où est-il ? », demande maman intriguée.

« Yo !!!! Il est à Malaga, en Espagne. Il a pris l'avion la nuit dernière à 22h 30. Il a envoyé un whatsapp aux autres frangins de son équipe en disant que sa vie commence maintenant ! »

« Oh !!! Il n'aura même pas attendu que ses enfants arrivent au monde. », fais-je

« Qu'est-il allé faire là-bas, en Espagne ? Et pourquoi si vite ? Où a t-il trouvé l'argent pour le billet ? Qui l'a aidé pour le visa ? Que va t-il y faire ? », demande maman.

« Il va faire ce qu'il sait faire : jouer au basket ! Ses frangins, qui sont déjà là-bas, lui ont arrangé le coup ! Ils sont solidaires ces basketteurs. Et puis pour les enfants, vous savez depuis le début qu'il n'en a que faire ! Ouvrez donc les yeux ! », conclut Julien.

Maman et moi sommes dubitatives. Le type a mangé ici tous les jours après le school. Il n'était pas aussi cool qu'on l’aurait aimé, mais ça fait froid au dos de savoir que ses plans étaient calculés au plus près et que rien ne pouvaient les changer.

« Espérons qu'ils apprennent à utiliser des capotes là-bas ! », fais-je.

« Ce n'est plus notre problème, Tania. Nous devons nous atteler à parler de lui le moins possible pour ne pas indisposer ta sœur. Et j'ai franchement plus envie d'entendre ce prénom, Peter. Il est parti, qu'il vive sa vie et sort de la nôtre. »

« Il sortira de la nôtre, maman. Tu n'auras pas besoin de prier pour ça. Le type a rêvé depuis des siècles à se barrer d'ici ; il ne risque pas de revenir d'aussitôt ! », fais-je.

 

Quand maman et moi arrivons à la clinique Total à 18 heures, toutes les frangines de Raponda sont là. Elles se sont passé le mot par Whatsapp. Tout le monde veut voir les bébés de Pupuce, dont on dit qu'elles ressemblent à des poupée. Sunita, sa combi en chef, est là. Comme elle a vu les bébés ce matin, c'est elle qui donne les détails. Elles ont des fossettes, confient-elle. Wèèèèè !

Une sage-femme est obligée de venir à nous. Elle met un peu de discipline et nous annonce que l'on rentrera deux par deux dans la chambre, exceptée maman et moi.

Je laisse donc les filles et suis maman dans la chambre dans laquelle Pupuce est endormie.

La grand-mère Mbeng se lève pour nous accueillir.

« Je vais m'en allée. Elle a pris deux yaourts à midi. Elle n'a pas vraiment faim. À demain Bernadette. »

Elle s'en va accompagner de grand-mère Ziza. La sage-femme arrive deux minutes plus tard avec les deux bébés qui viennent de prendre leur toilette.

« Et voici nos princesses. Elles sont toute propres. »

« Elle sont surtout très belles ! », fais-je en m'extasiant devant les petites.

Je n'ai pas besoin de les regarder plus pour me rendre compte que toutes les deux ont pris trait pour trait, le visage de Kaba ! Le monde est vraiment injuste. On aurait dit qu'elles sont sorties du ventre même de mme Mbeng !

« Mais, pourquoi ressemblent-elles tant à leur grand-mère ? », fais-je.

« C'est un mystère ! Tout me va du moment qu'elle sont en bonne santé ! », fait maman.

Pupuce se réveille alors. Je fais rentrer ses potesses deux par deux. Il y a bien une trentaine de personnes qui attendent pour elle. La bavarde de Sunita s'y met. Elles ont déjà préparé une petite fête pour la sortie de leur amie.

« Juste un petit truc, quoi. Des cup cakes, des pizzas, des grillages ! Et des jus. On fera ça quand tu seras plus en forme. Et puis, y a mr Nziengui, le professeur de français qui t'envoie ses salutations. Et la kongosseusse de mme Chancelle dit qu'elle espère te voir en cours vendredi prochain. Oh, elles sont trop choux. »

Toutes les filles ont emmené un petit cadeau : des paquets de couches, des grenouillères, des nounours.

Elles se taquinent. Elles rigolent. L'ambiance est vraiment positive dans la pièce.

Bientôt, tantine Bibiane et tantine Jolie, les sœurs de mr Mbeng arrivent. Elles embrassent les petites et font signe à maman de les suivre dehors. Je suppose qu'elles veulent parler de Kaba et de son comportement.

Mes complices ne tardent pas à arriver. Je me rends compte que Marc-Elise est aux bras d'Antoine. Jileska, égal à elle-même est pressée comme une puce. Dès qu'elle a l'une des petites dans les bras, elle se met à la couvrir de baisers. Gaëlle nous fait alors remarquer :

« Elles sont identiques, c'est vrai, mais vous pourrez les distinguer facilement. »

« Comment ? » s'étonne Pupuce.

« Ah ! C'est vrai que t'as pas pu les tenir dans tes bras longtemps ni leur donner le bain. Mais, figurez-vous qu'il y en a une qui a un point de beauté juste là, sous le nez. », fait Gaëlle.

« Personne ne s'en est rendu compte », confie Pupuce. « C’est pour ça que Grand-mère les habillent avec des couleurs différentes. »

Nous continuons à papoter. Ne tenant plus sur place, Jileska balance :

« Excuse-moi pupuce, mais ce tocard de Peter Malonga est où ? »

Marc-Elise lui fout discrètement un coup dans le dos.

« Non, mais il faut poser la question. Il me sort par les pores ce type ! Bon, excuse-moi. Je m’occupe de ce que je peux maîtriser et comprendre. Elles sont trop jolies ces petites. »

La voilà qui se remet à embrasser Jade et Ruby.

« Tania, ta mère a eu une idée géniale en leur donnant ses prénoms. », me fait Marc-Elise.

« J'ai demandé à grand-mère de leur trouver des prénoms en miènè. Et bien sûr grand-mère Mbeng a décidé de leur trouver des petits noms fangs. »

« Yo ! À la fin, elles ne sauront plus quelle langue parler entre le miènè, le fang et l'eshira. »

« Elles ne risquent pas de parler eshira car je vous interdis dès aujourd'hui de prononcer le nom de Malonga devant moi. »

STUPEUR DANS LA SALLE ! Nous restons là, les yeux ouverts, étonnés. Que s'est-il passé ? Où donc a disparu la Pupuce tellement amoureuse de Peter, qu'elle quittait chez elle pour aller faire la lessive à Ntchenguè ? Personne n'ose poser de question. Nous nous regardons et décidons de manière tacite, à ne nous intéresser qu'aux bébés.

Le téléphone de Marc-Elise vibre violemment ; le mien est resté à la maison. Miro était trop fatigué pour m'accompagner. Il a décidé de venir plus tard, avant la fin des visites. Le téléphone de Jileska se met lui aussi à vibrer sauvagement. Je sors de la chambre et vais vers Gaëlle et lui demande où se trouve Sharonna. Elle devait nous rejoindre, mais n'est toujours pas là.

« Je viens de vous envoyer des messages. Réunion de crise tout de suite chez toi, Tania. Sharonna nous y attend. C'est plus que grave : c'est une question de mort ou de mort. »

Yoooooo ! Qu'est ce qui s'est passé entre le moment où nous avons atterri à 14h 45 et maintenant ?

Les filles arrivent au pas de charge.

« C'est comment Gaëlle ? Mon cœur a failli lâcher. C'est quoi ce message ? », lance Sharonna. »

« L’heure est grave. Très grave. Je ne sais même pas par où commencer. Allons-y seulement. »

J'abandonne donc mes nièces à la clinique après leur avoir fait des bisous. Je suis les filles. Comme Antoine a la voiture de sa mère, il nous dépose chez moi. Nous arrivons là et trouvons notre copine tremblante et est en larmes. Un peu plus et elle entre en transe.

« C'est comment, Sharonna ? Qu'est-ce qui se passe ? », fais-je dépassée.

Mon frère, qui la tient dans ses bras pour la soutenir et l'empêcher d’atterrir par terre, nous lance :

« On verra de tout dans ce Gabon. Il faut venir y vivre pour y croire. »

Nous regardons Sharonna sans trop comprendre. Nous sommes obligées de la prendre dans nos bras et de la bercer comme un bébé.


 

29-

 

Un quart d'heure plus tard, Sharonna est toujours inconsolable. Comme les larmes n'arrêtent pas de couler et que les tremblements sont toujours aussi importants, je me tourne vers Julien.

« Qu'est-ce qui se passe ? Que t'a t-elle dit. »

Alors que mon frère veut répondre à ma question, son téléphone sonne. Il regarde et me lance que c'est maman. Il lui répond et me tend le téléphone en faisant de gros yeux.

« Oui maman ! Désolée, je peux pas te parler. J'ai... »

« Appelle ton amie Sharonna ou va la voir, s'il te plaît. Il se passe des choses grave de son côté ! »

« Yo ! Ma mère est courant alors que moi, je suis avec l’intéressée et que je ne sais que dalle !!!

« Qu'est-ce qu'il se passe maman ! Dis-moi tout s'il te plaît. »

« Ah, Tania ! On ne parle pas de ces choses-là au téléphone. Je suis là avec monsieur Mbeng. Il a reçu un coup de fil important. Il était tellement dépassé par la nouvelle qu'il s'est mise à parler tout seul. C'est très grave ma chérie. »

« Mais, maman, dis-moi ce qui se passe. »

« Vas voir ta copine, ma chérie et reste avec elle toute la nuit s'il le faut ! Je t'appelle tout à l'heure. »

«Je raccroche et me tourne vers Sharonna. Je la supplie de nous dire ce qui ne va pas.

« Ma mère est au courant de quelque chose, mais elle dit que c'est à toi de me le raconter. Dis-nous ce qui se passe, Sharonna. »

Elle consent à parler. D'une voix faible, elle nous dit :

« Le monde s'effondre ! »

Elle ne peut en dire plus, car un sanglot fort la prend et la fait tressaillir.

« Mettez-la sous un jet d'eau ! », nous dit Antoine.

Nous avions complètement oublié qu'il était là, celui-là.

« Bonne idée ! », fait Jileska.

Nous la prenons et l’emmenons dans la douche. Là, nous la mettons sous le jet de douche. Il semble qu'elle ne se rende même pas compte qu'elle est entièrement trempée, car elle ne réagit pas à l'eau froide. Nous la laissons pleurer et elle finit par se clamer.

Je me demande bien ce qu'elle a à dire.

Nous la sortons de là en l’emmitouflant dans une grande serviette.

De retour au salon, on l'assoit dans le canapé et on attend.

Elle nous regarde avec des yeux tellement absents, qu'on se rend vraiment compte que son monde s'est réellement effondré.

« Qu'y a t-il, Sharonna ? », insiste Gaëlle. « Tu nous a envoyé un message tellement énigmatique que l'on est venu ici en courant. Qu'est ce qui ne va pas ? »

Elle n'arrive toujours pas à parler. Tout ce qu'elle parvient à nous dire est :

« Ma vie vient de s'arrêter ! »

Yo !

Nous sommes là, suspendus à ses lèvres. Alors Antoine nous dit :

« Ne la brusquez pas. Elle semble avoir reçu un choc vraiment terrible. Attendez qu'elle se calme et décide de parler. Je vais vous chercher des pizzas et je reviens. »

Antoine s'en va et moi, je rejoins mon frère dans sa chambre. Il est couché sur son lit et regarde le plafond.

« Que t'a t-elle dit en arrivant. »

« Elle m'a dit qu'à Port-Gentil les gens ont des rêves très grands. Ils font tout pour le réaliser, quel que soit le bonheur des autres. »

« Et si tu parles en français facile, ça donne quoi ? »

« Bon, son père a fracassé le crâne de sa mère. Ça s'est passé, il y a deux ou 3 heures. »

« Non ! Ce n'est pas possible ! Ce type est doux comme un agneau. Il ne peut pas avoir fait ça ! »

« Mais dans ce cas, on va changer le proverbe et dire désormais, méfiez-vous de l'agneau qui dort. »

« Arrête de blaguer, Julien. C'est sérieux ce que tu viens de dire. »

« Sista. Sa mère a fait joujou avec un idiot qui use de sa bite pour réaliser son rêve aux détriments des autres. Et donc... »

Alors qu'il veut m'en dire plus, j'entends les filles qui m'appellent comme si une bombe leur était tombée sur la tête.

« On verra de tout dans ce Gabon là ! On verra de tout ! », fait mon frère.

Je reviens dans le salon. Je remarque Gaëlle qui tourne en rond en se tenant la tête. Jileska est là, stupéfaite. Marc-Elise n'arrête pas de répéter : c'est faux, ce n'est pas possible.

« Qu'est-ce qu'il y a ? », fais-je.

« Sa mère est aux soins intensifs à Ntchenguè. Le Pater l'a sérieusement bastonnée à coups-de-poing. »

« Ce n'est pas possible », fais-je. « On connaît tout mr Nguema. Jamais il ne ferait une chose pareille. »

« Eh ben, si. », répond Jileska.

« Non, ce n'est pas possible. », fais-je comme si je voulais me sortir d'un mauvais rêve.

« il l'a tellement boxée que mon frère et moi avons cru qu'il allait la tuer. », fait Sharonna entre deux sanglots.

Et merde ! C'est là que je me souviens du baiser à Libreville, dans le hall de l’hôtel.

« Mais, Sharonna, qui lui a dit que ta mère était à Libreville avec son amant ? Qui lui en a parlé ? »

« Personne ! Ce n'est pas pour ça qu'il l'a bastonnée. »

« Ah ! Et pour quoi alors ? Je ne comprends pas. », lui fais-je.

Elle me regarde dans les yeux et j'ai l'impression que ce qu'elle va me dire, va me rompre le cœur.

« Il a découvert ce matin en consultant ses comptes sur Internet que maman a dilapidé tous les sous qu'il réservait pour mes études aux USA. »

« TU RIGOLES SHARONNA ! C'est une blague. »

« Tu t'imagines Tania ! Cette femme qui est sensée m'aimer, a vider le compte dans lequel, mon père a placé toutes ses primes depuis deux ans ! Il disait que c'était pour mes études, car on lui demandait une caution de 15 millions de francs pour que je puisse aller étudier dans l'université d mon choix aux USA. Elle a tout pris, Tania. Elle n'a même pas laissé un franc. Elle n'a même pas pensé à moi, à mon avenir. », fait Sharonna en pleurant.

Là, même moi, je suis obligée de pleurer parce que je me rends compte de la détresse et du chagrin de ma copine. Les autres restent sans voix. Personne n'arrive à parler. Marc-Elise n'arrête pas de répéter : ce n'est pas possible.

Et Jileska de lancer :

« Et qu'a t-elle fait de tout cet argent, Sharonna ? Où cet argent est-il passé ?»

« Figurez-vous qu'elle l'a donné à son amant. »

« Ah bon ! Donc une femme belle et intelligente comme ta mère, ingénieur à Shell Gabon, a besoin de payer pour qu'un homme lui fasse l'amour ? Ça n'a aucun sens Sharonna ! Elle a été envoûtée ! », fait Jileska.


 

30-

 

« Maintenant, que nous savons tous, ce que Big Wave a fait, peut-être pourrions-nous nous mettre à table et savourer ces pizzas. »

Le temps est resté suspendu et personne ne s'est rendu compte qu'Antoine est revenu avec 5 pizzas. Sans crier gare, Julien dresse la table.

Mon cerveau fait deux tours et je lui dis :

« Comment ça ce que Big Wave a fait ? Qu'est-ce que Peter Malonga a encore fait ? »

« Oooooh ! Vous n'êtes pas encore au courant ? », fait julien. « Excuse-moi Sharonna, mais ta mère a vraiment chier. »

Et ma copine se remet à pleurer.

« Oooooh, là ! On se calme. Tout doux ! », fait Antoine en tapotant la main de Sharonna.

« Qu'est-ce que Peter Malonga vient faire dans cette affaire, Julien. »

« Mais, les 15 millions, c'était pour lui. Ah ! Il a volé le rêve de Sharonna. Elle voulait aller à New York ou à Los Angeles danser avec les étoiles. Lui voulait faire rêver les petits Port-Gentillais comme Lasme et Géraldine Robert le font en jouant dans les championnats européens. La mère de Sharonna a estimé que le rêve de Big Wave était plus important que celui de sa fille ! Voilà. Il faut le faire quand même ! Réduire à zéro l'avenir de sa fille parce qu'un imbécile a su jouer du violon avec sa bite. »

Yoooooo !

« Dis-moi que tu rigoles, Julien ! Dis-moi qu'il raconte n'importe quoi Sharonna ! », fait Jileska qui semble tout d'un coup sortie de nulle part.

« Oh ! J'ai tellement honte les filles ! Ma mère avec ce crétin ! »

« Non ! Mama, dis-moi que c'est une blague ! Popopopopoooooooo ! Malonga baise avec ta mère ! »

« Merci pour la délicatesse, Jileska. J'attendais pas mieux de toi. », fait Sharonna en pleurant de nouveau.

« En fait, Jileska a raison d'être étonnée ; moi-même j'ai du mal à mettre les choses en ordre. Donc, ta mère a un amant. Son amant c'est le père des filles de Pupuce, le gars qu'on prenais pour un idiot, et il s'est cassé en Espagne avec les sous de tes études supérieures ! C'est ça Sharonna ? », fait Marc-Elise.

« Ekiééé ! Le bangala de ce type doit-être magique ! »

« Reste polie, Jileska ! », s'insurge Gaëlle.

« Excusez-moi, guèèèè ! Je suis tellement sur-méga-choquée que je n'ai plus de vocabulaire. Donc Malonga a fini toutes les filles des collèges de Pog. Il a fait 5 enfants à Port-Gentil et 1 sur la route de Kango ; et a réussi à inscrire le nom de ta mère sur son tableau de chasse. Mais c'est qu'il est à féliciter ce couillon ! »

Et voilà les larmes de Sharonna qui redoublent d'intensité.

Moi, je reste là à essayer de mettre les idées en ordre dans ma tête. Qu'est ce qui ne tourne pas rond chez cette femme ? Elle a tout ce que les autres femmes désirent : cadre à Shell Gabon, des enfants brillants à l'école, un mari qui a de l'argent, des voitures... et elle va se perdre dans le lit miteux de Peter !

« J'ai besoin d'un efferalgan. Ma tête va me lâcher ! », fais-je en me levant.

Je vais dans la chambre de ma mère et me dirige vers la boite à pharmacie. Un cachet d'efferalgan me fera le plus grand bien. Mon Dieu, si on m'avait dit que je vivrait ce genre de chose !

 

Quand je reviens au salon, je me rends compte qu’Antoine a réussi à convaincre Sharonna et les filles de se mettre autour de la table. Elles mangent leurs pizzas dans le silence.

« Bon, je veux pas jeter de l'huile sur le feu, mais quand même, il faut que les choses soient claires. J'ai un peu de doc, donc sharonna, sache que ta mère n'est pas dingue. Je pense qu'elle t'aime, mais le tchang du grand Malonga était trop fort. C'est qu'il n'est pas simple, le type ! Ma source me dit que le petit frère de sa mère est un grand Nganga, du côté d'Ozouri. Donc, quand on additionne 1 + 1, on se rend que le boa de Peter Malonga est très fort. »

« Cà veut dire quoi ça ? », demande Antoine.

« Ça veut dire, qu'il s'est fait vacciner le sexe pour taper fort. Et il fallait qu'il tape sur la mère de Sharonna. », conclut Julien.

« Oh ! Comme j'ai honte ! », pleurniche Sharonna.

Cette histoire me mets tellement mal à l'aise que j'en arrive à bouder les pizzas.

« Je me mets à la place de mr Nguema ! Le type rêve de te voir faire de brillantes études, toi son unique fille. Et son rêve tombe à plat comme ça ! Son argent part en fumée d'un coup ! Je m'étonne qu'il n'ai pas sorti sa carabine ! Y a de quoi avoir des envies de meurtre. », fais-je à Sharonna.

« Moi, ce qui me choque, c'est que ta mère, qui nous impressionnait tant on la trouve belle et intelligente, ai pu se retrouver dans le lit d'un gars de 25 ans ! Qu'est-ce qui lui a pris. Même si ton mari te fait ça dure, trouve-toi quelqu'un qui lui arrive à la cheville ! Elle va carrément se dégrader dans les bras d'un imbécile. », fais Marc-Elise.

« Je ne suis pas étonné qu'elle couche avec un garçon de 25 ans. En France, on voit cela tout le temps. On appelle cela des cougars. », nous fait Antoine.

« Mais donc, votre monde ne tourne pas rond, mon cher. Ma mère avec un type aussi jeune que mon grand-frère ! Non, non, non ! C'est pas normal. », fait Marc-Elise.

« Je pense qu'on devrait faire comme a dit Pupuce : ne plus prononcer le nom de Peter Malonga. », lance Jileska.

« Très juste », fais-je.

 

Mais comme Port-Gentil est une petite ville, le lendemain, c'est le kongossa partout dans la ville. Au collège, les gens en rajoutent. On donne des détails sur le tchang que l'oncle de Peter a fait au petit. On dit que c'est pour ça que toutes les filles tombaient comme des mouches. Ceux qui sont dans la confidence, se transmettent par Whatsapp, la photo de Big Wave arrivant à l'aéroport de Malaga. Paraît qu'après avoir envoyé ce Selfie à ses frangins de l'équipe de basket, le type a jeté sa puce Libertis.

Les curieux qui vont dans sa page Facebook, envoie des messages d'encouragement. Les filles qui se sentent trahies, postent des messages haineux. Toutes veulent lui couper les couilles.

Il a posté un selfie sur sa page Facebook, en mettant comme légende : Ma vie commence aujourd'hui.

En fait, avant, c'était un mort-vivant. Malaga l'a ressuscité.

Gaëlle a carrément le courage de poster sur le mur de Malonga : ATTENTION, CE TYPE EST UN SERIAL LOVER MULTIRECIDIVISTE, PERE IRRESPONSABLE DE 6 GOSSES.

Quand je lui dit que Peter effacera le message en le voyant, elle répond qu'elle s'en fout. Au moins une personne l'aura lu.

Le soir même, Big Wave a supprimé son compte Facebook pour en créer un autres, plus intimiste.

 

Mardi, à la clinique avec Pupuce, je lui demande comment elle encaisse la nouvelle. Elle me regarde comme si j'avais parlé chinois et me réponds :

« Mais Tania, je ne vais pas aller me jeter dans l'Ogooué parce que Malonga est parti ! Je suis toujours amoureuse de lui, oui, mais mes enfants sont plus important ! »

Yoooooo ! A quel moment cette amoureuse forcenée est-elle devenu si réfléchie !

« Je suis heureuse de t'entendre parler ainsi. J'avais peur que tu déprimes. »

« Écoute Tania Akendengue, il est parti, bon débarras. Regarde le message qu'il m'a envoyé alors qu'il allait embarquer dans 2 minutes et quitter Libreville. »

Elle me tend son téléphone portable. Sur Whatsapp, Malonga a écrit :

« Mon oncle m'a dit qu'il ne faut jamais s'arrêter de rêver et que la fin justifie les moyens. Je go vers mon avenir. Trouve-toi un type bien qui prendra soin de toi et de tes bébés. Ma vie m'appelle ailleurs. Adieu ! »

Je ne sais même pas quoi penser après avoir lu son message.

« Au moins, il était prévisible. On a toujours su qu'il n'allait pas assumer son rôle de père. »

« Mais moi, j'ai bêtement rêvé de le changer ! », fait Pupuce en regardant le vide.

« Évitions les regrets ! Les petites n'ont pas besoin de ça ! »

« Oui, c'est ce que je me dit. »

« Et sa mère qui ne met même pas les pieds ici depuis la naissance. »

« Je lui ai envoyé un message ce matin. Elle m'a répondu qu'elle a ses soucis. »

« On va les laisser de côté. Ca ne nous fera pas de mal. »

« C'est ce que j'ai l'intention de faire. Focaliser mon attention sur mes enfants. Après le bac, je passe le concours de l'ISI. »

« Comment ça l'ISI ? Et la France dans tout ça ? Papa Jimmy a tout préparé pour ton départ ! »

« Je ne bouge pas de Port-Gentil, Tania. Il est hors de question que j'abandonne mes enfants. Je reste ici. Je ferai mon cursus à l'ISI. »

« Tu es sérieuse, Pupuce ? Tu veux que mr Mbeng face un infractus. »

« Me fatigue pas Tania. Je ne bouge pas. C'est toi qui a toujours rêver d'aller à l'étranger. Moi, je reste où est mon cœur. Et mon cœur se trouve là, à côté de mes enfants. Va donc découvrir le monde pour nous deux. Tu me raconteras. »

« Pardon, je préfère me taire. »

 

Jeudi matin en classe, Sharonna nous apprend que les parents de son père et ceux de sa mère qui sont arrivés lundi soir d'Oyem, tiennent chaque soir des réunions. Son père n'arrive toujours pas à parler tellement il est choqué et outré par le geste de sa femme. La mère de Sharonna va mieux. Mais ses parents pensent qu'elle devrait aller en Afrique du Sud pour un contrôle.

« Mon père a dit qu'il ne veut plus la voir chez lui. Nous allons déménager avec lui. Elle va garder la maison. Il dit qu'il ne veut plus en entendre parler. Ça nous fait tout drôles à mon frère et moi ! »

« Et que disent les parents de ta mère ? », demande Jileska.

« Oh ! Ils disent qu'il faut pardonner. Mais, il accepte le fait qu'elle l'aie trompé mais ne supporte pas et ne pourra jamais excuser qu'elle ait dilapidé l'argent de mes études. »


 

31-

 

À l'école, les jours passent et ne se ressemblent pas. Les profs nous fatiguent avec beaucoup d'exercices ici, des exposés là-bas. On ne sait plus où donner de la tête.

L'annonce vient de tomber. Malgré les multiples grèves dans l'enseignement, le bac aura lieu. En août. Enfin...Si les professeurs sont payés. Parce que là, ils ne sont pas du tout contents. Les autres lycées ont passé plusieurs mois, fermés. Les élèves étaient à la maison. Mais à Raponda, comme c'est privée, on continue de schooler.

Les rumeurs fusent de partout. Tout le monde dit que ce bac-là est un bac manioc ; c'est dire qu'il ne sera reconnu nulle part. Les gens enfoncent le clou en disant qu'on va à l'école pour rien parce que l'Unesco ne va pas valider l'année !

Et nos pauvres parents qui paient, l'école, le taxi, les livres et la nourriture ???

Pupuce est restée deux semaines à la maison. Elle a ensuite repris les cours. Ses copines lui emmenaient les cours à domicile. C'est bien d'être apprécié.

Y a toujours plein de monde à la maison pour s’occuper des bébés. Les copines de Raponda sont là tous les jours. On dirait quand on était petites et qu'on se retrouvait derrière la maison pour jouer à la poupée.

Maman est aux anges. Elle pouponne sans même prêter attention aux heures. Je me dis que même si Kaba continue de faire sa crise et ne fait pas cas, on s'en fout. On ne sait même plus pourquoi elle est fâchée.

Papa Jimmy vient à la maison tous les jours après le travail. Il reste là à discuter avec sa fille Pupuce et à donner le biberon aux petites. Il parle aussi des projets qu'il a pour sa fille.

Il a acheté le billet. Pupuce prend l'avion le 1er septembre à 22h 35 pour Paris. Et mademoiselle n'a même pas la présence d'esprit de dire au boss qu'elle ne veut plus bouger.

Une nuit, je m'approche d'elle et lui demande :

« Pourquoi tu ne dis pas à Papa Jimmy que tu ne veux plus aller en France ? Tu le laisses dépenser tout cet argent pour rien ? »

« Je ne sais pas comment lui parler. Il se fait tellement de films que j'ai peur qu'il fasse une crise cardiaque ! »

« Mais tu n'as pas compris que ton comportement est encore plus criminel !!! En tout cas, ce ne sont pas mes affaires, je ne m'en occupe pas. »

« Ta vie est tellement facile, Tania. Tu as une mère qui t'aime et t'écoute. Tu as un fiancé raide dingue de toi et la vie te sourie. »

« Quelqu'un te mange, Marjorie Akendengue ? Je te signale qu'on est sorti du même ventre ; et que de nous deux, c'est toi qui a eu la vie la plus facile ! Et j'en ai marre, je te dis bien, que j'en ai assez que tu passes ton temps à me sortir les mêmes conneries ! Tu étais avec moi quand je devais me lever tous les matins et aller à pied à l'école alors que toi, papa Jimmy te déposait en voiture ! »

« Oui, mais je suis sûre que si j'avais eu tante Bernadette pour ma maman, ma vie serait meilleure. »

« Fous moi la paix avec ta connerie. Je suis en train de me casser la tête pour trouver des solutions pour mes études l'an prochain. Toi, ton dossier de bourse est ficelé, ton billet d'avion est acheté, et tu veux m'emmerder avec tes questions pseudo-existentielles ! ON S'EN FOUT DE SAVOIR COMMENT AURAIT ETE TA VIE SI BERNADETTE T'AVAIS CHOISI AU LIEU DE MOI. Tu es là en train de te trouver des sujets de dispute juste parce que tu as peur d'affronter Papa Jimmy. Je vais pas rester là à t'écouter te plaindre. Bye.»

 

Ce dernier jeudi de juin, alors que Miro est en train de passer ses dernières épreuves du baccalauréat français, le professeur de philosophie nous bastonne avec un devoir. Le sujet :

Le devoir moral est-il une entrave à la liberté ?

Là, je sèche. Je ne sais que mettre sur ma copie. Les profs aussi.

Le prof d'histoire, comme à son habitude, nous rappelle encore et encore, que l'on doit élargir nos horizons et nous intéresser aux autres cultures. Il dit que l'on doit se cultiver en lisant toujours plus, non pas seulement Les Gabonitudes de Libek, mais aussi des magazines scientifiques, économiques et autres !

Pour la peine, il nous colle un dernier exposé à chaque groupe. Ils divisent la classe en 4 groupes.

Le premier groupe doit faire un exposé sur LE COUPLE LOVING.

Je fais parti de ce groupe. Quand je demande au prof : « C'est qui les Loving ? »

Il me répond : « C'est à vous de nous le dire. »

Le 2ème groupe doit travailler sur Jean Hilaire Aubame et les pères des indépendances en Afrique.

Le 3ème groupe doit tabler sur les règnes de Charles Taylor et celui de Hissène Habré.

Le dernier doit nous édifier sur l'OPEP.

Quand le type nous donne les sujets et nous dit qu'on a qu'une semaine pour travailler dessus, on a que mal à la tête.

« Épatez-moi avant votre départ pour l'université ; sinon je me dirai que j'ai livré des cancres aux écoles supérieures ! »

Mamo, rien que ça !

Nous sommes samedi. Pour oublier le stress de leur examen, Miro et Antoine ont organisé un pique-nique au Cap Lopez. Nous y allons toutes : Marc-Elise, Gaëlle, Sharonna, Jileska et moi. Les amis du lycée français sont là eux aussi. Le cuisiner de Miro a préparer tout le repas. Nous n'avons qu'à dresser la table et manger en rigolant. Nous jouons au beach soccer, et ensuite, nous faisons le relais, filles contre les garçons.

Pamela-Jo n'est pas des notres. Depuis le week-end de mon anniversaire à Libreville, elle colle aux basques de mon frère Julien, comme s'il était devenu son oxygène. J'ai demandé à monsieur jusqu'à quand, cela va durer, étant donné que lui n'est pas amoureux. Il m'a répondu :

« Elle s'en va dans deux semaines. Moi, je passerai à autre chose. Je suis encore jeune, ma vie continue. »

Les filles sont très belles dans leur maillot de bains. Marc-Elise, qui se prend pour miss monde, demande à Antoine de la prendre en photo avec son smartphone. Gaëlle quant à elle, discute avec Justin, un matheux aussi mordu de films d'Arsène Lupin et Agatha Christie comme elle. Ils semblent tous les deux dans un autre monde.

Sharonna a meilleure mine, même si la séparation de ses parents la chagrine énormément. Cela fait des jours qu'elle n'a pas parlé à sa mère. Et leur désaccord a été amplifié par un statut facebook de Big Wave. Un ami nous l'a montré. Il a écrit sur son nouveau compte :

L'âge n'est qu'un chiffre, Aaliyah l'a chanté. J'envoie une tonne de baisers à la plus désirable des femmes : Pétula, tu es mon cœur. Peu importe la distance.

Le type écrit une déclaration à la mère de Sharonna. Tout le monde peut la lire. Même pas un mot pour les enfants.

Alors, ma copine a décidé de laisser sa mère de côté histoire qu'elle-même fasse le point sur la situation.

Longtemps encore, les langues à Pog, raconteront cette histoire.

Je fais la belle dans mon maillot deux pièces. Je l'ai acheté pour cette sortie. J'ai fouillé longtemps à la fripe pour trouver le plus beau, histoire de ne pas me prendre la honte aujourd'hui.

 

Le temps est tranquille. Pendant que nous espérons un bac qui est plus que peu probable, ceux du lycée français en ont terminé. Miro sait ce qu'il fera à la rentrée prochaine. Nous nous éloignons du groupe histoire de parler tranquillement. Il m'annonce :

« J'irais où tu iras. C’est vrai que mon père espère que je fasse la prépa HEC à Paris, mais, mon cœur me retient à toi. »

« Qu'est-ce que cela veut dire, monsieur ? Je ne sais même pas ce que je ferai après ce bac ! »

« Où veux-tu aller ? T'as bien une idée. Tu me parlais du Ghana. »

« Et toi, tu es prêt à me suivre là-bas ? Tu rigoles, j'espère ! Qui aurait envie de se perdre en Afrique alors qu'il a la possibilité de faire la meilleure école de commerce de France ?

« J'irai où tu iras. Tu n'as pas encore compris combien je t'aime ? »

« Si. Et moi, je t'aime dix fois plus. »

Alors que nous nous embrassons,

Deux petits passent accompagner de leur mère et se mettent à crier :

« Oh, les amoureux, oh ! Oh, les amoureux ! »


 

32-

 

Juillet commence tout doucement. Ça sent les vacances pour certains. Julien prépare son BEPC tranquillement.

Il arrive ce mardi-là et me rejoint dans la cuisine où je fais des spaghettis pour le repas du soir.

« Les filles aussi ! Vous aimez même comment ? »

« Qu'est-ce qui se passe encore ? »

« Laisse ! Je suis dépassée ! »

« Toi dépassé ? Tu m'étonnes. »

« Comprends l'affaire qui me traumatise aujourd'hui. Je suis allé voir Pamela-Jo, histoire de lui faire mes adieux, quoi. Je t'ai dit qu'elle se tire pour la Belgique, non. »

« Oui, tu me l'a dit. Et que s'est-il passé ? »

« Devine ? C'est toi qui lis les histoires de Mady Rémanda sur Facebook, non ! Devine maintenant. »

« Elle t'a demandé de l'épouser ? »

« C'est presque ça ! Réfléchis encore. »

« Julien, dis le truc. Qu'est-ce que Pamela-Jo t'a demandé. »

« Tu veux dire, qu'est ce qu'elle a fait, plutôt. »

« Dis-moi ce qu'elle a fait. »

« J'arrive chez elle et tout, la fille me présente carrément à son père. On a vu ça où ? Les blancs vraiment. »

« Et qu'est ce qui te dérange là-dedans ? C'est leur manière de fonctionner. »

« Sister, visualise un peu la scène. Le pater me dit et tout : tu viens en vacances avec nous, Julien. Nous allons sur la côte basque cette année. »

« Tu rigoles. C'est quoi ce truc. »

« Je te dis que le pater a appelé l'agence pour me réserver un billet d'avion. »

« Tu me fais marcher, Julien. C'est quoi, ce délire. »

« Je te dis que dans 3 jours là, je prends l'avion tranquille pour Paris, puis Bruxelles. Et dans deux semaines, on descend au Pays Basque. Dans tout ça, je ne sais même pas où ça se trouve. »

« Arrête de me faire marcher, Julien. Tu me racontes n'importe quoi. »

« Ok, ne t'étonne pas si tu ne me vois plus la semaine prochaine. »

« Donc, mon petit frère est un gars aussi facile. »

« Tu blagues ou quoi ! Je les ai arrêtés net. J'ai sorti la fatale : Je n'ai pas de passeport. Un point à la ligne. »

« Moi qui pensais que tu aurais sauté sur l'occasion. »

« Je te l'ai dis, sista, je ne vais pas aller mourir pour elle alors que ce n'est pas la femme de ma vie ! Elle s'en va, je lui dis merci pour l'expérience qu'elle m'a transmise et je passe à autre chose. Je ne suis pas à vendre, quand même. »

« Hummmm ! Julien Yénot, je suis fière de toi. »

« Tu devrais. Car, j'ai tenu ferme quand la go a commencé à me supplier à chaudes larmes. Les blanches aussi ! Je suis un petit bout de manioc de 14 ans ; elle peut trouver costaux là-bas qui prendront soin d'elle, mais c'est chez moi qu'elle veut mourir. »

« Je parie que tu lui a brisé le cœur. »

« Regarde seulement mon téléphone. On m'envoie des messages toutes les secondes. Je l'ai laissée là-bas en larmes ! »

« Et si elle décide de ne pas partir ? Et qui elle décide de passer ses vacances ici. »

« Sister, son dossier est bouclé. Je passe à autre chose. »

Sur ce, il s'en va de la cuisine en sifflotant. A ce moment là, j'entends l'une des petites, pleure. Je vais rapidement dans la chambre. Elles sont dans la chambre de maman. Ruby dort dans son lit tandis que Jade, dort juste à côté de la grand-mère, sur le lit de maman. C'est Ruby qui pleure. Elle se ressemble beaucoup. Nous habillons avec des couleurs différentes pour les reconnaître. Pour Pupuce et moi, les choses étaient plus simples, à ce que dit maman. Paraît que j'ai toujours été plus dodue que Pupuce. Par la suite, c'est notre coupe de cheveux qui a fait la différence. Pupuce garde ses cheveux très longs et aime les tresses. Mou, j'ai les cheveux toujours coupés courts.

J'aime passer du temps avec les petites dans les bras. Je les regarde, leur fait des bisous et me demande comment sera leur vie dans 18 ans. Je comprends en les regardant, pourquoi Pupuce a du mal à s'imaginer ailleurs, loin d'elles.

Moi, je suis toujours dans le flou. Je continue mes économies et ma tirelire est pleine. Je veux juste voir mon nom affiché sur les tableaux des résultats du premier tour. Dès ce moment-là, je pourrais respirer et me projeter.

Je me pose des questions quant à ma relation avec Miro. Il dit qu'il me suivra où j'irai. Mais comment ses parents prendront-ils sa décision. Est-ce qu'ils ne seront pas fâchés en apprenant que leur fils refuse d'aller en France pour faire sa Prépa HEC ? Beaucoup de choses dans la tête. J'aime tellement ce type que je ne m'imagine pas avec quelqu'un d'autre.

Je suis là en train de raconter des histoires à Ruby, qui me sourit, quand Julien m'appelle discrètement depuis la porte.

« Non, y a des gens qui sont fous. »

« Qu'est-ce qui se passe encore. »

« Un frangin vient de me balancer des news. Non, vraiment, y a des gens qui sont fous. »

« Julien, qu'y a t-il ? »

Regarde seulement ! Je ne parle plus. »

Il me tends son téléphone sur lequel il est en conversation sur Whatsapp. Je regarde la photo qui s'affiche en grand sur l'écran.

« Ce n'est pas vrai ! »

Le t téléphone devient tout d'un coup trop lourd tellement il me fait mal aux yeux.

« Et ouais...C'est ça même ! Le monde tourne maintenant à l'envers. »

J'ai la bouche ouverte tellement l'étonnement est fort.

« Qu'est-ce qui ne va pas, Julien ? Qu'est-ce qui ne va pas ? »

« Pardon, donne-moi, mon téléphone. J'ai des choses à faire avec ! »

Toujours désarçonnée, je lui rends son téléphone. Je vais dans ma chambre prendre mon vieux blackberry C5 et j'appelle Sharonna. Elle répond à la 3ème sonneria.

« Comment va ma chérie ? »

« Comment veux-tu que ça aille, Tania. Je ne peux plus sortir de chez moi. Les gens rient en me voyant. T'as vu la photo que Big Wave a osé posté ? Ma mère est devenue complètement maboule, Tania. Est-ce qu'on se comporte comme ça quand on a des enfants et qu'on est mariée ? Qu'est-ce qui ne va pas dans sa tête ? »

« C'est pour ça même que je t'appelle. Julien vient de me montrer la photo. Ca discute pas mal sur son groupe de frangins sur Whatsapp. »

« La photo fait le tour de la ville en un rien de temps, Tania. Snif ! J'étais tout de suite chez le malien. Des pétasses que je ne calculais même pas avant, osent maintenant rire de moi.

Et oui ! C'est ça la vie. On pensait que le type parti, son nom sortirait de notre vocabulaire ; mais même loin, il continue de faire des vagues. La photo en question : Big Wave et la mère de Sharonna qui s'embrasse dans un aéroport. La légende de la photo que le type a postée sur Facebook, dit :

##Enfin réunis !c'est mon cœur ; la plus belle femme au monde.##

Je reste sans voix. Qu'êtes-vous sensés éprouver comme sensations quand votre mère se comporte de la sorte ? Mme Pétula Nguema a quitté le Gabon il y a deux jours pour rejoindre son petit Peter Malonga à Malaga. Et ils vivent le grand amour. Au point qu'ils ont sont à poster des selfie sur Facebook. La femme est pulpeuse, plus belle que jamais. Elle paraît plus fraîche et drôlement mordue du jeune homme qui l'emprisonne dans ses bras. Elle a eu 4 enfants, mais son corps fait encore pâlir de jalousie.

« Sharonna, comment va ton père ? Savait-il que son épouse est en Espagne. »

« Je t'ai déjà dit qu'il s'en fout. Il lui a seulement dit qu'il ne veut plus la voir. Depuis que nous avons déménagé, elle nous appelle seulement. Je ne savais même pas qu'elle quittait le pays. »

« Et comment te sens-tu ? »

« Là, je n'ai même plus envie de mettre les pieds en classe. Je vais attendre l'examen à la maison. J'ai un mal de tête tellement terrible, que j'ai l'impression que tout va exploser à l’intérieur. »

« Repose-toi, s'il te plaît. Et arrête ton téléphone car les gens ne vont pas se gêner pour t'embêter. »

« Heureusement que vous êtes là, les filles. Je ne sais pas si j'aurais eu le courage d'aller à l'école avec tout ça. Je me demande ce qu'elle est allée faire en Espagne. Elle ne va pas me dire qu'elle est amoureuse de cet idiot ! Il a deux ans de moins que mon frère aîné, Tania ! »

« J'ai dû mal à y croire, Sharonna. Je l'admirais tellement ! »

« Comme tu dis ! A demain. Bisou. »

 

Je remets la petite au lit et retourne dans la cuisine. Maman arrive alors.

« Oh, comment va t-on ici. Et les petites ? »

« Elles font la sieste. «

« Ok. Oh, tu fais la tête ou quoi ? Où est ton sourire ? »

« Tout va bien, maman. Je suis juste fatiguée. »

« Tu es sûr ! Tu ne me caches rien, j'espère ? Tout va bien avec Miro ! »

« Oui, maman. Tout va bien entre nous. »

« As-tu réfléchi à votre avenir. Il ira en France dans quelque temps ; comment le vivras-tu ? »

« Je ne me suis pas encore posé la question maman. Mais il m'a dit qu'il est prêt à me suivre où j'irais. »

« Donc, si tu vas à Masuku, il y va avec toi ? »

« T'as beaucoup d'humour, maman ! »


 

33-

 

Maman veut continuer la conversation, mais elle est appelée par les cris des petites.

« Elles ont faim. »

Grand-mère nous dit au revoir après avoir donné le biberon à Jade.

Je dresse la table du salon, alors que Julien arrive dans le salon et prend une de ses nièces dans les bras.

« Elles feront des malheurs ces petites ! Comment peuvent-elle être aussi jolies ! »

« Aussi jolie que ta fameuse Pamela-Jo ! », le taquine la vieille.

« Maman, pardon, oublie ce prénom-là. C'était juste une aventure ! »

« Ecoutez-le ! », fait maman, « Il se prend pour un homme. »

« Mais, je suis un homme. Et un vrai. C'est pour ça que cette Pamela-Jo meurt pour moi. »

« Pardon, ne me fais pas mal aux oreilles.

Il est 21 heures et je suis dans la chambre après avoir mangé. Les petites sont couchées et maman regarde les infos sur Africa 24. Julien travaille dans sa chambre. Je pianote des mots à mon Miro chéri, sur WhatsApp. Je suis tellement absorbée par l'amour que tout autour de moi disparaît. J'entends soudain :

« Tania, tu peux pas savoir combien ça fait mal, là. J'essaie de rester stoïque en me disant que la vie continue, mais le regard des autres me fait drôlement souffrir. Combien de temps leur faudra-t-il pour oublier Peter Malonga ? Combien de temps, encore, l’associeront-ils à moi ? »

Pupuce vient de rentrer de chez Solange, une amie de classe. Elles font les 2KPI ensemble. Elle est complètement déboussolée. Je l'ai souvent vu pleurer, mais là, aucune larme. Son visage est serein, mais je ressens sa tristesse.

« Que s'est-il passé ? Je pensais que tu étais allée travailler ? »

« Je travaillais, en effet. Mais les filles du groupe ont passé deux heures à s'intéresser à la nouvelle vie de Peter. Elles ont vu la fameuse photo. Elles ont dû passer la moitié du temps à se demander comment j'ai pu tomber amoureuse de lui. C'est à peine si elles ne m'ont pas traité d'idiote. Pourtant dans le lot, il y en a bien deux ou trois qui ont couché avec lui. Dis, on va tout le temps me fatiguer les oreilles avec ce type ? Même parti, il fait couler beaucoup d'encre. »

Je ne sais quoi répondre à Pupuce. Elle est tellement épuisée, qu'elle s'affale sur le lit, les yeux fixés au plafond.

« Imagine donc Sharonna en ce moment ! », lui fais-je.

« J'ose même pas. Je n'aimerais pas être à sa place. Tout comme je ne souhaite à personne d'être à la mienne. La vie a un drôle de sens de l'humour. Je pense que finalement, je vais partir d'ici. »

« Ah bon ! Tu es décidé ? »

« Oui. Ça me fera du bien. Cette ville est beaucoup trop petite. Même lorsque tu pètes dans le secret de ta salle de bain, tout le monde est au courant à la minute. J'ai envie d'oublier Peter Malonga, Reaponda, Port-Gentil. J'ai envie d'oublier que j'ai été folle amoureuse de cet imbécile. »

« C'est le père de tes enfants. »

« Raison pour laquelle, il faut que je parte. Je vivrais à l'étranger des choses excitantes qui me permettront de prendre de la distance et surtout, de pardonner et accepter Peter comme il est. »

« Tu deviens raisonnable, Pupuce ! »

« Oh, j'ai passé une heure à longer le bord de mer. Je me suis dit que je me priverai de quelque chose en restant ici. La vie continue. Et tu sais, il y a cette douleur qui reste là en dedans de moi. »

« De quelle douleur parles-tu ? »

« Oh ! J'ai lu pas mal de romans. A force, on finit par rêver. On se dit que tout ce qu'elle invente dans leurs histoires doit forcément se réaliser dans la réalité. Je ne demandais pas grand chose à la vie. J'étais naïve de penser que Peter changerait. Mais bon...recevoir un bouquet de roses de sa part à la maternité, m'aurait réconcilié avec la vie ! Je n'ai pas connu ça. Et ça me fait mal. Ni roses, ni boîtes de chocolats. Qu'est-ce que cela lui enlevait d'attendre que les petites viennent au monde ? »

« Il avait ses plans. Et il lui fallait agir vite. Il a volé, ne l'oublie pas. Il fallait agir vite. »

« Oui, comme tu dis. Il a volé le cœur de plusieurs filles. Il vit aujourd'hui le grand bonheur, d'après lui. Il se fout pas mal que cela fasse souffrir. Bref, j'ai besoin de changement. »

« Je te croirai quand tu seras dans l'avion. Tu es encore capable de changer d'avis. »

Elle me regarde et sourit tristement.

« Dis-moi, elle est vraiment amoureux d'elle, hein ! Il aime vraiment la mère de Sharonna. »

« Je crois que oui, Pupuce. Jamais il n'aurait publié cette photo sur Facebook, sinon ! »

« Je mérite quelqu'un qui mettra ma photo en profil sur Facebook ou Whatsapp. C'est bête, mais bon... »

Je laisse Pupuce toute seule dans la chambre, car je sens qu'elle a besoin d'intimité.

Je vais me réfugier dans la chambre de maman et reste là à observer les petites qui dorment sur le lit de leur grand-mère. Je suis tellement habituée à leur présence, que je me demande comment je ferai quand je serai loin. Oui, quand je serai loin de Port-Gentil, comment me sentirai-je ? Il n'y aura plus maman, plus les délires de Julien. Et papa me manquera, lui aussi. Bref, c'est ça la vie. Tout le monde au moment du départ ressent sûrement le même déchirement. Nous avons encore l'espace des examens, des résultats et des vacances pour nous préparer à ce départ.

 

Lundi 13 juillet, Miro a ses résultats. Bien sûr, monsieur mon chéri a décrocher son bac d'office. Il ne craignait même pas l'échec. Antoine, lui aussi a eu son bac. Pour fêter cela, ils nous invitent au restaurant, Marc-Elise et moi. Nous avons choisi d'aller à Planète Grill parce que mademoiselle ma copine veut une pizza et moi des grillades. La salle est bondée.

Les garçons parlent de tout et de rien. Ils sont heureux d'avoir leur examen.

« Je prends l'avion pour Paris dans deux semaines », nous annonce Antoine. « Je vais en vacances pour la première fois en Thaïlande avec mes parents. Ma mère n'a pas remis les pieds dans son pays depuis mes 6 ans. »

« Oh ! Et toi ? Tu y as déjà été ? »

« Non ! C'est la première fois. Ma grand-mère a vécu trois ans avec nous quand j'étais enfant. Elle est décédée maintenant. Mon grand-père est mort avant ma naissance. La sœur de ma mère est mariée à un Américain et vit aux USA. Donc, ma mère ne se sent plus vraiment d'attaches pour la Thaïlande. »

« Ok ! », conclut Marc-Elise.

Elle m'envoie un sms dans lequel elle m'annonce que cette nuit, elle en fini avec Antoine. Je lui réponds, qu'on a cours demain. Mademoiselle me dit que ce n'est pas un souci et qu'Antoine doit avoir un souvenir du Gabon.

En tout cas, je préfère arrêter là. Elle me donnera les détails demain.

Nous continuons de manger en rigolant. J'ose demander à Antoine avec quel genre de fille, il a l'habitude de sortir. Il me répond franchement :

« Mes deux exs sont blanches. Je ne suis jamais sorti avec une fille d'une autre couleur. Pourquoi ? »

« Simple curiosité », lui fais-je.

« Port-Gentil va beaucoup me manquer ! Mes parents sont encore là pour deux ans, mais je ne sais pas si j'y reviendrai. », fait Antoine.

« Oh ! Donc tu t'en vas vraiment définitivement ! », fais-je étonnée.

Je ne comprends pas ce que ma copine trouve de palpitant à coucher avec ce garçon dont elle sait qu'elle ne reverra plus. Je lui envoie un sms. Elle me répond qu'elle veut coucher avec lui, pour le fun. Yo !!!! C'est à ce niveau-là ?

Quand Miro me raccompagne à la maison, il descend avec moi. Nous trouvons maman au salon. Comme chaque nuit avant de s'endormir, elle regarde les informations comme pour s'assurer de l'état du monde avant de fermer l'œil. Elle tient Ruby dans ses bras.

« Cette petite coquine est bien la chaleur humaine. Elle ne dort bien que dans mes bras », fait-elle à Miro qui embrase la petite sur le front.

Je les laisse tous les deux, après avoir servi un verre d'eau à Miro. Je vais dans la chambre enlever mes chaussures et ma robe. J'enfile la plus belle de mes robes de nuit et me dirige vers le berceau de Jade, qui se trouve dans la chambre de maman, pour l'embrasser. Pupuce n'est pas encore rentrée. Julien est là, qui veille sur le sommeil de mlle la princesse.

Quand je reviens vers le salon, avant même que je n'ouvre la porte du couloir, j'entends Miro dire à ma mère :

« Ma mère m'a dit de vous demander la procédure. Elle dit que ça se fait ! »

Je me demande de quoi ils parlent, ces deux-là : Ma mère répond simplement :

« On en parle posément demain, d'accord. »

J'arrive dans le salon et Miro prend congé de maman. Je le raccompagne jusqu'au portail.

« Je t'aime Tania Akendengué. Bonne nuit trésor. »

« Je t'aime dix fois plus. »

Je rentre et vais directement prendre une douche. Ensuite, je me jette sur le lit avec l'intention de dormir comme un bébé. Je suis pourtant réveillée par le bip de mon téléphone. Je regarde et me rends compte que c'est Marc-Elise qui envoie un message à notre groupe de fille. C'est un groupe sur WhatsApp. Nous sommes 21 là-dedans. Nous nous balançons des infos et des bêtises pour rigoler. Je souhaite bonne nuit à tout le monde et ne s'appesantis pas plus là-dessus. J'ai sommeil.

Portant, en rentrant deux heures plus tard, Pupuce me réveille énergiquement.

« Elle est complètement tarée, Marc-Elise. Elle est en plein ébat sexuel avec son Thaïlandais-là et toute la ville est au courant ! »

« C'est quoi cette histoire ! », fais-je endormie.

« Elle était tellement pressée de baiser qu'elle ne s'est même pas rendue compte qu'elle a fait une mauvaise manip devant l'ordi de son type. Elle nous a envoyé un message vidéo enregistrée via Facebook avant de dormi, histoire de faire la belle devant la webcam du fameux Antoine. Figure-toi qu'elle a oublié d'arrêter l'ordi et que la caméra continue de filmer. »

Yo ! C'est quoi ce bims' ?

Là, je suis totalement réveillée. Pupuce me tend son téléphone. Je me rends compte qu'elle ne blague pas. Les images parlent d'elles-mêmes. »

« Mais comment as-tu eu ces images ? »

« Tu connais les enfants des riches, non ? Tous leurs appareils sont connectés les uns aux autres. Un ami d'Antoine a dû recevoir le film et l'a balancé aux autres ! Moi c'est Jileska qui vient de m'envoyer le truc. Elle l'a reçu de Cristal, l'amie de Miro. »

« Donc, ça veut dire que Miro aussi l'a vu ? », fais-je.

« C'est sûr ! Elle voulait jouer la belle alors que la technologie la dépasse ! Vraiment, cette go du Tranfo ! »


 

35-

Lorsque j'arrive à la maison, je trouve maman dans le salon en conversation avec ses petites filles. Dans la chambre, Pupuce se prépare à sortir.

« Je vais voir Papa Jimmy à son bureau. Il m'a appelée. »

« De quoi allez-vous discuter ? »

« Je n'en ai aucune idée. Je vais écouter ce qu'il a à me dire. »

« Au fait, maman vient de me dire que Kaba a appelé. Elle va passer voir les petites tout à l'heure. »

« Et alors ! Qu'est-ce que ça peut me faire. Quelqu'un t'a dit que j'ai envie de voir sa face ici ? »

« C'est ta mère, je te le signale. »

« Oui, mais il n'y a pas de poubelle dans laquelle on peut jeter les enfants quand il nous dépasse. Et elle m'a mise à la poubelle. Ça, je ne l'oublie pas. »

« Ok. Je n'ai rien dit. Passe le bonjour à Papa Jimmy. »

« Je n'y manquerai pas. Au fait, elle va comment Marc-Elise ? »

« Euh !!! Je pense qu'elle peut oublier Antoine. Il est trop choqué par ce qui s'est passé. »

« Tu m'étonnes. En tout cas, c'est qu'elle ne se laisse pas ronger par le remords et se remette d'attaque pour le bac. »

Je décide de rester couchée sur le lit et me mets à lire mes cours de philosophie. Cet après-midi avec les filles, nous allons travailler l'histoire-géo et la biologie. Miro m'envoie alors un message. Il vient me chercher à 19 heures. Nous allons assister à un concert donné dans le jardin de l'Alliance Franco-gabonaise pour le 14 juillet. Yo ! Où vais-je trouver une robe, là, maintenant ? Y a pas d'argent. Alors, je lui réponds que je ne veux pas sortir et que je préfère rester pour étudier. Il m'écrit alors :

« Tu as besoin de prendre l'air pour avoir les idées claires le jour J. Fais-moi confiance. »

 

Le fameux jour J que l'on vivra cette année en fin juillet, alors que lui, il est déjà en vacances. Alors, j'accepte.Après lui avoir dit que je passe l'après-midi avec les filles, à bosser.

« Tu veux que je vous apporte quelque chose à manger ? », me demande t-il.

« Euh ! Je sais pas. Tu sais que les filles adorent les pizzas. »

« Ok. Alors, je commanderai à 13 heures, cinq pizzas au Rétro et je demanderai à Samba de vous les apporter. »

« Efficacité. »

« Qu'est-ce que je ne ferai pas pour cette petite gabonaise qui a mangé mon cœur. »

« Hummmm ! Et encore, tu n'as rien vu. »

« Oh, oh, oh, oh ! Prière de ne pas me provoquer sinon, tu te retrouveras toute nue dans mon lit avant même de t'en rendre compte. »

« Je t'aime, monsieur mon cœur. »

« Moi, dix fois plus, Tania Akendengue.

 

Hummm ! L'amour-là aussi ! Ça rend vraiment maboule !

Avant de raccrocher, il me balance :

« Au fait, dis à ta copine qu'Antoine prend l'avion ce soir pour Libreville. Demain soir, il s'envole pour Paris. Il a anticipé son départ. »

« Il va si mal que ça ! »

« Oh ! Je crois que oui. Ça lui passera, je crois. Il ne s'attendait pas à ce que sa première expérience sexuelle soit retransmise en direct, tu comprends ! »

« Ouais, je comprends. Dis-lui que Marc-Elise est vraiment confuse. Elle ne sait plus où se mettre. »

« Qu'elle le lui dise elle-même. Qu'elle lui envoie un message. Je crois qu'il prendra la peine de le lire. »

« Ok. Je le ferai. Je t'aime, beau gosse.

« A tout à l'heure, princesse. »

Quand je raccroche, j'entends la voix de grand-mère qui arrive accompagnée de Kaba. Je sors de la chambre pour aller les saluer.

« Bonjour tante Agnès. Comment vas-tu ? »

Elle ne prend même pas la peine de me sourire et répond sèchement :

« Je vais bien. »

Yo ! Je préfère alors me tourner vers ma grand-mère.

« Mémé, tu es en forme ce matin. Comment s'est passée ta nuit ? »

« J'ai bien dormi, ma chérie. Mon homme est rentré des lacs en fin de journée. Nous avons passé la nuit à discuter. »

« Et notre part de poisson est où ? »

« Oh ! On a oublié la glacière dans la voiture. Vas la chercher, s'il te plaît. »

Je prends les clés que me tend Kaba et je vais sortir la glacière de la voiture. Je passe par derrière pour atterrir directement dans la cuisine. Là, je commence à séparer le poisson et à ranger, minutieusement le tout dans le congélateur. Je laisse trois mulets dehors pour en faire un bouillon.

« Bon, la vieille, je cours rapidement au marché acheté quelques aubergine et de l'oseille. À tout à l'heure. »

« Ok. Nous sommes là. »

 

Je les laisse discuter et file à pieds, au marché du grand village. Je reviens une demi-heure plus tard et me mets à concocter le fameux bouillon de poisson. La cuisine terminée, je retourne dans ma chambre. Je remarque au passage que Kaba tient, Jade dans ses bras et je me dis que c'est un bon début.

Il est 14h moins dix quand les filles arrivent. Nous nous installons sur la table de la terrasse derrière la maison. Dix minutes plus tard, Samba, le chauffeur de Miro, nous apporte nos pizzas.

Lorsque Jileska me voit arriver avec la bouffe, elle s'écrit :

« C'est ça même la vérité ! Pardon, emmène ça là, près de mois. Ca va me changer du paquet de silures de ma mère ! »

« Humm ! Tu oses critiquer la bouffe de ta vielle ! », la taquine Sharonna.

« Et, ma go ! Je ne peux critiquer, oh ! Mais là, ces pizzas-là me font des clins d’œil. Qui peut résister ! »

Nous mangeons histoire de nous ouvrir l'esprit avant de nous jeter dans le travail.

« Miro dit qu'il ne comprend pas pourquoi nous passons autant de temps à travailler. », fais je.

« Dis-lui que c'est parce qu'il y a des trous dans la tête de Jileska. Il suffit que je me relâche un jour pour tout oublier. Tout le monde n'est pas intelligent comme lui ! », fait Jileska.

« Heureusement que tu es là pour nous faire rire, Jileska ! »

« Marc-Elise me dit qu'elle ne sort plus de chez elle jusqu'au jour du bac. Les blancs-là lui envoient des messages pour lui proposer des partouzes. Il y a des lesbiennes qui lui ont fait des avances. Elles se demandent comment tout le monde a eu son numéro de téléphone. », nous annonce Sharonna.

« Elle n'a qu'à changer de numéro », fait Jileska.

« Je pense que c'est ce qu'elle fera. Elle a même peur qu'on la reconnaisse en route. C'est la psychose en ce moment. Elle se sent mal. », ajoute Sharonna.

« Elle ne peut rien y changé », fait Gaëlle. « Qu'elle change de numéro et pense à autre chose. La vie continue. »

« Mais, elle me dit qu'elle est amoureuse d'Antoine et qu'elle est profondément affectée. », continue Sharonna.

« Ça va lui passer », fais-je. « Miro m'a dit qu'il s'envole ce soir pour Libreville. Demain soir, il prend l'avion pour Paris. »

« Sans lui dire au revoir ? Elle sera terrassée », nous lance Sharonna.

« Je ne sais pas quoi penser, » fait Jileska.

« Je suis perplexe, moi aussi », ajoute Gaëlle.

Nous décidons alors d'appeler la copine pour l'encourager à envoyer un message à Antoine. Elle nous répond :

« Il m'a dit de l'oublier et de lui foutre la paix. »

On se demande pourquoi il est si dur ! Et elle nous répond :

« Quelqu'un a posté une photo de nos corps tous nus sur Facebook en mettant pour légende :

#M-E, le meilleur coup de Port-Gentil. #

Il y a 2800 commentaires sur cette photo. Je ne peux plus sortir dans Port-Gentil. On se verra le jour du bac. Bisous. »

 

C'est là que je me rends compte que la notion de liberté avec laquelle le prof de philosophie nous bassinait en classe, prend tout son sens. Ces nouvelles technologies sont vraiment venues foutre la merde dans nos vies.

« Saloperie d'Internet », fais-je en déposant mon téléphone sur la table.

« Internet n'est pas à blâmer. C'est nous les hommes qui abusons. Tout ce qui se passe dans nos vies, on va le poster sur Facebook, ou instagram ! Faut consommer maintenant ! », fait Sharonna.

« Pardon, travaillons sinon, on va devenir bête. », conclut Gaëlle.


   

36-

Nous arrivons à balayer toutes nos leçons d'histoire-géo. Nous faisons des questions-réponses pour la biologie.
Il est 19 heures quand Pupuce arrive. Elle nous regarde vraiment pensive avant de nous annoncer :
« Vous êtes bien tranquilles, les filles ! Personne ne vous a envoyé de message pour vous dire que Marc-Elise a été transportée d'urgence à l’hôpital général ! »
« Tu rigoles ! », s'écrit Gaëlle.
« Non, ce n'est pas une blague. Sa mère m'a appelée à 18h. J'étais chez les Mbeng en compagnie de mes frères. Nous avons foncé en voiture à l’hôpital. Je pensais que vous étiez au courant. »
« Que s'est-il passé ? », fais-je sans voix.
« Elle s'est ouvert les veines au niveau des deux poignets. Elle a perdu beaucoup de sang. Sa mère l'a trouvée sans connaissance dans la douche. »
« Mais, on lui a parlé là, à 14h ? Pourquoi a t-elle fait cela ? Oh, c'est pas possible ! », lance Sharonna.
« Je ne sais pas trop. Elle comptait s'en aller de ce monde sans même laisser un mot. C'est terrible ! Là, les médecins s’occupent d'elle Je suis venue me changer. Sunita et moi, nous repartons à l’hôpital. »
Sur ce, Pupuce nous abandonne et va prendre une douche. Nous sommes estomaquées ! Plus personne n'arrive à parler. Comment est-ce possible ? Comment tout cela a t-il pu virer au cauchemar ?
Je prends mon téléphone et appelle Miro.
« Beauté, j'arrive dans une demi-heure. »
« Marc-Elise est entre la vie et la mort. », lui dis-je sans cérémonie.
« Et merde ! Que s'est-il passé ? »
« Elle s'est ouvert les veines. »
« Et moi qui viens de dire au revoir à Marc il y a à peine une heure ! Il vient d'arriver à Libreville. »
« Ben, dis-lui que tout va mal ici. »
« Et merde ! Bon, je t'appelle tout à l'heure. »
Je raccroche. Gaëlle décide que l'on doit toutes aller à l’hôpital.
« Ça ne sert à rien », fait Jileska. « Laissons Pupuce et Sunita y aller. Elles nous donneront des nouvelles. Nous prierons cette nuit et irons la voir demain matin. »
« Oui, tu as raison. Mais je pense que je ne dormirai pas cette nuit. C'est carrément impossible. Appelons quand même sa mère pour savoir si les médecins lui ont dit quelque chose. », fait Sharonna.
Jileska prend son téléphone et appelle la mère de Marc-Elise. Elle répond d'une voix assez faible et on se rend bien vite compte qu'elle pleure.
« C'est comment maman ! Qu'y a t-il ? »
Impossible d'avoir une réponse.
« Je pense qu'on va toutes aller à l’hôpital. Je n'aime pas ça du tout. »
Je file rapidement changer de robe et apprendre la mauvaise nouvelle à maman.
« Mais pourquoi a t-elle fait ce genre de chose ! »
« Je n'en sais rien, maman. Je n'en sais rien. »
« Je ne suis pas rassurée à l'idée de vous savoir toutes seules là-bas, si loin de Ntchenguè. Il est déjà 20 heures. »
« Miro arrive nous chercher. On sera rentrées avant 22 heures, maman. »
« Non, laisse Pupuce y aller. Toi, reste là. Je ne me sentirai pas bien si vous partez toutes les deux. Donne-moi mon téléphone. Je vais appeler Élisabeth. »
Elle pose délicatement Ruby dans son couffin et compose le numéro de la mère de Marc-Elise. Elles se mettent à parler en omiènè et je finis par comprendre que le pronostic vital de notre copine est engagé. Elle a perdu beaucoup trop de sang.
Mon cœur s'arrête de battre à ce moment là. L'air autour de mois devient irrespirable. Mon cœur est tellement lourd que j'éclate en sanglots.
Qu'est-ce qui n'a pas marché ?
Comment n'avons-nous pas compris que sous ses faux airs assurés, notre amie souffrait ?
Qu'est-ce qui ne tourne pas rond.
Maman raccroche et me regarde complètement perdue.
« J'aimerais que vous restiez toutes ici. Je vais y aller avec Pupuce. Je n'aime pas du tout ce que me dit Élisabeth. S'il vous plaît, restez ici au calme, d'accord ! »
Elle se lève et ajuste son foulard. Elle époussette son pagne et mets ses babouches.
Quand Miro arrive dix minutes plus tard, seules maman et Pupuce s'en vont.
Les filles et moi restons là, sans trop savoir quoi dire, ni penser.
« Qu'est-ce qui ne va pas ? », se demande Gaëlle. « Qu'est-ce qu'on a raté ? »
« Je me suis posé la même question et je n'ai pas obtenu de réponse. »
Sunita, qui n'arrête pas de tourner en rond dans le salon, semble perdre la raison. Jileska, sa grande sœur, est obligée de la forcer à s’asseoir.
« Il faut que nous restions calmes et priions. C'est toi la sœur en Christ, Sunita. Alors, prie fort pour éloigner le malheur. »
La sœur de Jileska nous entraîne alors dans un rodéo de prière et de louanges. Sa voix est tellement angélique, qu'on en oublie un moment pourquoi nous sommes si triste.
Et dans mon cœur, je me dis : la copine ne peut pas nous laisser tomber. Ce n'est pas possible.
Le temps s'écoule lentement. On peut ressentir les secondes tellement nous attendons le coup de fil qui nous sauvera de cette angoisse.
Là, Sharonna sans s'en rendre compte s'écrie : « Marc-Elise, le bac c'est dans 2 semaines, lève-toi, s'il te plaît, lève-toi. »
À ce moment-là, Gaëlle se lève et fait un bond spectaculaire de la chaise sur laquelle elle était assise. Notre copine rentre en transe et commence à tourner dans la maison. Nous sommes toutes ahuries. Elles tournent elle tourne, possédée par les esprits du Ndjembè. Voilà qu'un voix qu'on ne lui connaissait parle avec autorité.
Que la chair de poule. Mais qu'est-ce qui se passe ?
Notre copine tourne sur elle-même comme une toupie et commence à citer le nom d'un certain Mpemba. Elle appelle une cette personne, Omwanto wi ndjembè.
Je sais juste que cela veut dire, femme du ndjembè et c'est tout. On ne sait même pas qui est cette femme. On ne sait même pas s'il faut attraper Gaëlle ou la laisser. Nous sommes pétrifiées.
Elle tourne sur elle-même, ses bras opérant des mouvements saccadés de grande force et commence à parler. Elle parle.
Mais comme je ne comprends que la moitié de ce qu'elle dit en omiènè et que les autres sont fangs, nous sommes dans la panade.
Alors, bêtement, je me mets à taper dans les mains, en rythme, comme je l'ai déjà entendu dans les veillées que nous avons faites il y a 3 ans pour le souvenir de mon grand-père. Je tape bêtement dans les mains en espérant que cela calme Gaëlle.
La transe continue. Elle tourne dans le salon en disant pas mal de choses. Bientôt, elle en vient à psalmodier certaines phrases. On reste là, interdites. Personne dans la pièce ne sait quelle attitude adopter. Après une éternité, Gaëlle s'assoit par terre. Elle se met à coudre le vide. On voit bien les mouvements de ses bras qui semblent suturer des plaies. Elle se lève dans un bond aussi prodigieux que le dernier. Elle se met à rire de manière fort lugubre. Et elle finit par se coucher sur le sol. Endormie.
Mon téléphone sonne dix minutes plus tard, il est 23h 10. Au bout du fil, maman m'annonce :
« Votre amie est tirée d'affaire. Nous arrivons. »
J'annonce la nouvelle aux filles. Personne ne saute de joie tellement nous sommes sous le choc du spectacle donné par mademoiselle Gaëlle Azizet. 


 

37-

Quand Miro ramène Maman et Pupuce, il est pratiquement minuit et demi. Il semble épuisé. De même pour maman qui annonce qu'elle va au lit. Là, je suis obligée de lui annoncer que Gaëlle et Sharonna dorment déjà dans son lit.
Elle me demande pourquoi. Je lui réponds en lui posant une question.
« Maman, qui est Mpemba ? »
« Pourquoi cette question ? La mère d’Élisabeth, la grand-mère de Marc-Elise s'appelait Mpemba Madeleine. Elle est décédée il y a 15 ans. »
« Ok. Ok. »
« Pourquoi cette question ? »
« Je te raconterai demain. Je tombe de fatigue. Mais sache que la fameuse Mpemba est venue visiter Gaëlle. C'est pour ça qu'elle est cassée ! »
Maman me regarde sans rien dire puis me demande son téléphone pour appeler les parents de Gaëlle et Sharonna pour les rassurer.
Miro décide d'aller déposer Jileska et Sunita. Je me blottis dans ses bras, juste devant la voiture et il me murmure :
« Je n'oublierai jamais cette journée ! On se voit demain, mon cœur. Je tombe de fatigue. »
Il se met derrière le volant et me dit :
« Au fait, Antoine a bien pris son avion. Mais, il m'a dit qu'il appellera demain, en arrivant à Paris pour avoir des nouvelles de Marc-Elise.
« C'est une bonne chose », lui fais-je.
« À demain trésor. »
Julien, qui bosse avec le voisin pour les épreuves de son BEPC, arrive quelques minutes après. Je le briffe sur l'état de Marc-Elise et il me répond :
« C'est bête d'avoir envie de mourir si jeune. Dans deux mois, on aura oublié cette fichue vidéo ! »

Comme maman atterrit dans mon lit à côté de Pupuce, je prends mon petit matelas et m'installe dans le salon. J'ouvre la Bible et lis quelques passages avant de dormir. Quelle journée alors ! Comment aurions-nous réagi si notre copine avait passé l'arme à gauche ? Comment sera l'ambiance entre nous une fois qu'elle sortira de l’hôpital ?
Beaucoup de questions s’entremêlent dans ma tête et j'envoie un whatsapp à Miro contenant plein de petits cœurs. Il me répond : bonne nuit tendresse.

Le lendemain matin, les filles rentrent chez elle. Maman appelle la mère de Marc-Elise et lui promet de passer à l’hôpital pour les visites à midi. Nous, nous irons voir notre amie pour les visites à 18 heures. Nous allons passer l'après-midi à bosser. Cela, même si Miro pense que nous devrions laisser nos cerveaux respirer un peu.
Je fais le ménage en chantant histoire de chasser la tristesse et l'incompréhension. J'espère vivement qu'Antoine appellera comme il l'a promis à Miro. Je ne sais pas si cela apportera quelque chose, mais au moins, cela voudra dire qu'il n'est pas insensible au sort de notre copine.
Le téléphone de Julien se met à sonner. Je me rends compte que mon frère l'a fourré dans le pot de fleurs qui décore la table de la salle à manger. Je le sors et vais dans sa chambre.
« Téléphone, monsieur. »
« S'il te plaît ! Ramène ce truc où tu l'as trouvé ! »
« Comment ça ? »
Je lis le nom de l'appelant et rigole en me rendant compte que mon petit frère veut éviter les appels de Pamela-Jo.
« Elle a appelé 15 fois, Julien. Elle n'arrêtera pas tant que tu ne répondras pas. »
« Je lui ai dit tout ce que j'avais à lui dire. Quand c'est fini, c'est fini. Elle ne sait pas ce que veut dire le mot aventure ! »
« Oh ! C'est maintenant comme ça ! Mais, prends le téléphone et dis lui qu'elle arrête de rêver. »
« Pardon, moins je lui parle, mieux je me porte. Je savais que j'avais du charme. Mais là, j'avoue que ce charme me dépasse moi-même. »
« Qu'est-ce que cela veut dire ? »
« Ça veut dire que madame a convaincu ses parents de lui permettre de passer les vacances à Port-Gentil. Pourquoi ? Parce qu'elle ne peut pas vivre sans moi. Qui lui a dit que j'ai les moyens de tomber amoureux et d'entretenir une relation sur le long terme ? Pardon, éteins-moi ce téléphone. Mon BEPC d'abord. Le reste ensuite. Comme elle pense que je suis un gars qu'elle peut acheter, elle m'achète des montres, des polos. Si tu veux ouvrir un magasin, je te les refile. Mais éteins-moi ce téléphone, s'il te plaît. »
J'éteins le téléphone comme il me l'a demandé, mais je ne peux m'empêcher de rire. C'est fou comme l'amour peut rendre bête. Il nous pousse à faire des choses qu'on n’imagine pas possibles.
Je suis dans la cuisine découpée un poulet, quand Pupuce arrive.
« Nous avons eu tellement peu hier soir que j'ai eu l'impression de perdre 10 kilos, sur place dans cette salle d'attente à l’hôpital ! Tu t'imagines ! Je comptais les secondes. J'avais beau prier fort en silence, j'entendais mon cœur battre à tout rompre à l’intérieur. Plus jamais je n'irai dans cet hôpital. Heureusement que Marc-Elise s'en est sortie !»
« Et sa mère ? Comment a t-elle te nue le choc. »
« Oh ! Le médecin a dû lui donner un calmant. Tu t'imagines, perdre comme ça l'unique enfant que Dieu lui a donné ! Le père est resté à la maison ; il ne pouvait pas supporter l’hôpital. Il était effondré. Mais grâce à Dieu, si tout va bien, elle sera en classe pour les épreuves du bac. »
« Et on laissera toute cette tristesse derrière nous. Il faut penser positif : on aura ce bac. »
« Je n'en doute pas. », fait Pupuce.
« Tu n'as pas l'air convaincue ? »
« Oh ! C'est juste qu’hier, j'étais avec papa Jimmy. Le type rêve à ma place, quoi ! Il a tout préparé. Je ne savais même plus comment lui dire que je ne veux plus aller en France, mais en Afrique du Sud. »
« Pourquoi l'Afrique du Sud ? »
« Parce que ça me permet de rester plus longtemps avec les petites. Je partirai en janvier au lieu de quitter précipitamment le pays après les résultats. »
« Et pourquoi n'as-tu pas eu le courage de le dire à papa Jimmy ? »
« Je ne sais pas. Je n'ai jamais su lui parler. Pourtant, contrairement à maman, il a toujours été cool et compréhensif. »
« Dans ce cas, prends ton téléphone et envoie-lui un mail où tu lui expliques tout ce que tu viens de dire. Il comprendra. »
« Si tu le dis. Au fait, c'est quand vos fiançailles ? Avant ou après les résultats. »
« De quoi parles-tu Pupuce. »
« Et merde ! Désolée, je n'ai rien dit. »
Elle s'en va aussi vite qu'elle le peut. Je la rattrape sur le pas de la porte de la chambre et l'oblige à me regarder :
« De quoi parles-tu ? Tu as intérêt à cracher le morceau. »
« Zut, alors ! Comment pouvais-je savoir que c'était une surprise ! Et merde, il fallait que ça me tombe dessus ! »
« Dépêche-toi de cracher le morceau, Pupuce. »
Elle continue de me défier par son silence et en profite pour se sauver au moment où le son strident des pleurs de bébés se fait entendre. 


 

38-

Je poursuis Pupuce partout où elle va. Au bout d'une heure, elle ne m'a toujours pas craché le morceau. J'ai beau la harceler, elle trouve toujours une parade pour se défiler.
Elle parle aux petites :
« Dites à votre tata Tania de se calmer. Est-ce que c'est de ma faute si ce Miro-là est fou d'elle ? Au fait mes chéries, il faut lui demander la recette, oh ! Comment a t-elle fait pour tomber sur un type aussi génial ! »
Et c'est ainsi pendant de longues minutes. Puis, voyant que je suis toujours là à attendre, elle me lance :
« Qu'est-ce tu veux que je te dise ? Tu peux me suivre autant que tu veux, tu ne sauras rien. »
Et elle continue de bercer les enfants.
Alors, je vais dans le salon où maman prépare son sac pour aller à l'hôpital.
« Maman, qu'est-ce qui se passe avec Miro ? »
« C'est à moi que tu poses la question ? Jusqu'à preuve de contraire, c'est toi qui es censée être son amoureuse, et non moi. »
« J'aime beaucoup ton humour maman. Dis-moi, qu'est ce que vous complotez ? »
« Je ne complote rien du tout. Et je ne suis pas avec toi quand tu dis à ce jeune homme que tu ne peux pas vivre sans lui. »
« Maman ! »
« Quoi, maman ? Pardon, Élisabeth m'attend. Je m'en vais. »
« Donc, tu ne me diras rien ? »
« C'est comment, Tania ? Il est venu me voir pour me dire qu'il veut officialiser votre union. Je lui ai dit que je ne suis pas la personne appropriée pour en parler. Je l'ai envoyé discuter avec ton père. »
« MAMAN ! »
« Écoute, mademoiselle, tu me fais mal aux oreilles. Je m'en vais. »
Sur ce, elle s'en va, me laissant dans la stupeur. Donc ces gens-là sont capables de faire des plans dans mon dos !!!! Ils sont même comment ?
Retour dans la chambre, où Pupuce repasse le linge des petites.
« Mademoiselle Marjorie Akendengué, crache le morceau. Qui tu as mise au courant ? Je veux tout savoir. »
« Tu ne sauras rien, si tu ne te calmes pas. Tu es maintenant sur la défensive comme si on avait l'intention de te faire un sale coup. »
« Mais, personne ne m'a parlé de fiançailles ? Vous agissez dans mon dos !!! »
« Écoute-là ! Prends ce téléphone qui est posé sur le lit et appelle Miro. Dis-lui d'arrêter ces plans, car tu n'as pas son temps. »
« Très drôle, Pupuce. »
« Dans ce cas, calme-toi et fous-moi la paix. Si le type a décidé de faire le grand jeu, je ne vois pas pourquoi tu t'affoles comme ça ! »
« Mais, personne ne me dit rien. Vous faites les choses dans mon dos. Dis-moi qui tu as mise au courant. Dis-moi tout. »
« Yo ! Vraiment la négresse là qui ne sait pas ce que veut dire le mot surpris ! Tu ne peux pas faire comme si tu ne savais rien !? »
« Non ! Je veux savoir. Alors, parle, sinon je t'étrangle. »
« Ok, mais faudra pas te plaindre si la surprise ne fait plus d'effet au moment venu. Donc, j'étais hier chez mes parents Mbeng quand mon téléphone a sonné. Magloire Akendengue ton très cher père m'a carrément sommée de passer chez lui. Il m'a dit que c'était urgent. Voilà comment j'ai sauté dans un taxi. Arrivée à pavé centre social, le type m'attendait debout devant la maison. Là, j'ai su que l'affaire était d'une haute importance. Sans même me faire Samba, le type me demande, qui est ce Miro et s'il est sérieux. Il me raconte que le fameux Miro, un métis élégant et bien élevé, est venu garée sa voiture juste devant sa maison et lui a dit cache, qu'il vient lui demander la main de sa fille. Tu aurais vu la tête du boss quand il me racontait l'affaire ! J'étais pliée de rire. »
« C'est une blague ! Miro n'est pas allé voir papa ? »
« Yo !!! Tu comprends vite, mais il faut expliquer longtemps, hein ! »
« En fait, je n'en reviens pas parce qu'on n’en a jamais discuter ensemble. »
« Et alors ? Ça fait quoi s'il veut aller plus loin avec toi ? Tu connais les plans qu'il a pour vous deux ? »
« Si je comprends bien, vous avez décidé de me vendre, c'est ça ? »
« Mais quelle maboule ? Je suis avec toi quand tu vous vous dîtes des mots d'amour en secret ! Pardon, ne fatigue pas ma tête ! Si tu ne veux pas, tu n'es pas obligée. »
Elle continue son repassage comme si de rien n'était. J'insiste pour avoir la suite de l'histoire. Elle me raconte. Et j'apprends que monsieur mon père est tombé sous le charme de Miro.
« Fallait entendre le boss en train de chanter les louanges du petit. Le type me dit carrément que cet enfant là a de l'avenir. Pourquoi, parce qu'il respecte les usages et les traditions. Akendengue Magloire que trop fier, quoi ! »
« C'est ça ! »
« Aka ! je te raconte ce qu'il y a . Maintenant, si tu ne veux pas m'écouter, je me tais. »
« Je n'en reviens pas. Miro ne m'en a pas parlé. Mon avis ne compte pas ? »
« Pardon, Tania, évite de te moquer de nous autres célibataires ! Si tu n'en veux pas, quelqu'un d'autre sautera sur l'occasion pour s’occuper de lui. Maintenant, laisse-moi travailler. »
Je la laisse là et vais m’asseoir au salon. Je ne sais plus quoi penser. J'ai la tête complètement vide. C'est vrai que je suis folle amoureuse de lui, mais de là à me fiancer???Je n'ai que 18 ans. J'ai la vie devant moi. Je dois décrocher mes diplômes. Je...
« C'est pas bon de trop réfléchir. Ça peut griller les neurones ! », fait Julien en rigolant.
Il s'en va acheter une bouteille d'Orangina chez le Malien.
Quand il revient, je lui demande s'il est au courant de l'histoire. Il me répond en riant :
« Dis seulement oui ! Ce n'est pas ce que vous voulez, vous les filles ! Maintenant, tu as le type qui veut te faire vivre le rêve, et tu permets de jouer la difficile !!!Et, s'il te plaît, inutile d'en parler à tes copines. Ne dis rien, même pas pour avoir leurs conseils, entendus. Il faut savoir cultiver son jardin secret. »

Les filles arrivent à 14heures. Nous nous installons à la terrasse derrière la maison. On commence par chambrer Gaëlle.
« La go, tu as oublié de nous dire que tu es initiée. On t'a vu à l’œuvre hier. », lui fais-je.
« Je ne vois pas de quoi vous parler. Qu'est-ce que j'ai dit. »
« Ah,ça ! Si tu ne t'en souviens pas, on ne peut rien pour toi. Mais sinon, il faut nous dire. », lui lance Jileska.
« Je ne suis initiée à rien. C'est sûrement les bêtises de ma mère qui veulent tomber sur moi. Je n'ai pas le temps pour ça. »
Jileska, Sharonna et moi éclatons de rire.
« Maman m'a appelée », fais-je. « Elle dit que Marc-Elise est réveillée. Elle va rester deux jours encore à l’hôpital. Elle devra se reposer pour être en forme le 29. »
« Elle nous a vraiment foutu la frousse de notre vie. J'espère qu'elle sera d'aplomb pour ce bac. On le passe et après on fait la fête. », lance Gaëlle.
« Pardon, je vais d'abord attendre les résultats avant de faire la fête. Parce que moi là, je ne sais pas trop, oh !!! »
« Restons positives!Nous l'aurons ce bac. », fait Sharonna.
« Aka ! Je te dis que même quand je rêve, le bac me fuit. Donc, on va attendre une bonne fois les résultats. »
« Ok, mademoiselle Jileska. Mais, bon, on part avec l'esprit conquérant et on l'aura. », fais-je.
Nous avalons quelques sujets de mathématique puis un autre de sciences physiques. À 17 heures, nous plions nos affaires. Les filles vont pouponner en jouant avec Jade et Ruby.
J'appelle Miro pour savoir s'il vient toujours nous chercher pour nous emmener à l’hôpital. Il répond oui. Alors, je viens retrouver les filles au salon.
« Miro dit qu'il nous emmène à la plage dimanche. On prendra le bateau de son père pour aller de l'autre côté, à Sogara. Il dit qu'on doit s'aérer l'esprit pour être reposé le jour de l'examen. », fais-je.
« Ce type-là est très intéressant. Il devrait être Médecin. Il sait comment traiter les gens. »
« Pardon, quel genre de médecin. Toutes les femmes vont tomber dans ses bras. Son cabinet médical ne désemplira pas. »
« Oh ! Tu trouves qu'il est aussi craquant que ça ! », fais-je à Gaëlle.
« Achète-toi des lunettes, Tania. Tu peux être sûre que si tu ne veux pas de lui, quelqu'un d'autre fera moins la difficile. Le type a tout ce qu'il faut là où il faut et il est beau comme un dieu ! », me répond-elle.
« Pardon, Tania Akendengue, ne fais pas la belle ! Évite de te moquer de nous autres célibataires ! », fait Sharonna.
« Tu es célibataire parce que tu le veux, Sharonna Nguema. Tous les mecs courent après toi. », fait Jileska.
« Pardon, je suis en stand-by jusqu'à ce qu'on me déclare admise au bac. Ensuite seulement, je m’occuperai de ma vie amoureuse. », conclut-elle.
« Et toi, Jileska, pourquoi tu n'as pas encore conclu avec jacques. Le type bave en te voyant. », lui demande Gaëlle.
« Si j'avais le même cerveau que toi, mademoiselle Gaëlle Azizet, j'allais mélanger l'amour et l'école. Mais comme ça coince là-dedans dans ma tête, pas la peine de me créer des soucis en plus. », confie Jileska. 


 

39-

Les jours passent tranquillement. Nous allons voir notre copine à l’hôpital. Le médecin lui a dit qu'elle a besoin de beaucoup de repos. Alors, nous ne l'embêtons pas avec des questions ridicules. Ce qui nous fait plaisir, c'est que tous les matins et tous les soirs, Antoine lui envoie un message vocal pour l'encourager à se remettre très vite.
Samedi, après-midi, je fais un tour chez monsieur Magloire Akendengue pour discuter avec lui. Quand j'arrive, il est à peine 15h et monsieur s'active devant les fourneaux.
« Dis-moi, monsieur mon père, qui va s’occuper de toi quand je serai partie. »
« Je vais me débrouiller. Ne t'inquiète pas pour moi. »
Je lui arrache le couteau qu'il tient dans la main, et je découpe les deux carpes qu'il s'échine à nettoyer. Je lui concocte son bouillon de poissons et prépare deux doigts de bananes vertes.
Pendant que son repas cuit, on s'installe au salon pour discuter.
« Dis-moi papaonet, d’où vient cette bouteille d'Armagnac que je vois là dans ton living. »
« Euh, ça ne te regarde pas. Tu es venu ici pour faire la police ? Je n'ai plus le droit de recevoir des cadeaux. »
« Hummm ! Monsieur Akendengue ! Tu es prêt à me vendre pour une bouteille d'Amagnac ? Je n'en reviens pas ? »
« Ah mama, la ferme, tu comprends. Si tu veux que je rende la bouteille, tu n'as qu'à me le dire. Mais ne viens pas me parler ton gros français ici. Moi, je n'ai pas eu le bac. Ce jeune homme est venu me voir. C'est qu'il est très bien élevé ! Pas comme les bouts de manioc là qui traîne dans Port-Gentil. Il m'a parlé comme un homme. C'est des choses comme ça qu'un père attend. »
« Hummm ! En tout cas ! Je n'ai rien dit. »
« Ne dis rien, je préfère. Mais sache que si tu n'en veux pas, quelqu'un d'autre en voudra. »
« Yo ! C'est maintenant à base de menaces ! Mais est-ce que je suis obligée de me fiancer maintenant ? Je ne suis pas trop jeune. »
« Tu serais bête de dire non, ma fille. Vous n'êtes obligés à rien. Le jour où ça ne va plus, chacun prend sa route. Mais pour ma tranquillité d'esprit, je préfère te savoir avec un jeune homme responsable comme lui, plutôt qu'avec un joueur. »
« Ok, ok ! Je suis juste impressionnée qu'il soit venu jusqu'ici pour te parler. Il ne m'a rien dit. »
« C'est à des gestes comme celui-là qu'on mesure le degré d'amour de quelqu'un. »
« Mon père devient philosophe ! »
« Pardon, ne me fatiguent pas les oreilles ! »

Pendant que les gens s'agitent en ville parce que le grand footballeur Messi arrive à Pog, mon frère me dit : « pardon, je suis fan du Real ; et mon BEPC est plus important ! Je n'ai pas d'argent pour aller jusqu'à Ntchengue. Il n'a qu'à poser la pierre. Nous on ira là-bas quand le stade sera construit. »
Miro non plus n'est pas fan du Barça ; alors toute cette agitation autour de Messi le laisse de marbre.
Dimanche, nous allons en virée comme convenu. Nous prenons le bateau du père de Miro.
Pupuce a abandonné les petites à maman et grand-mère. Il y a aussi la tante Jolie, la sœur de papa Jimmy, qui est à la maison pour la journée. Les trois femmes vont s’occuper des jumelles tandis que Pupuce va retrouver un peu de son insouciance de jeune fille. Il y a Sunita qui est avec nous, ainsi que Gaëlle et sa cousine Rita. Sharonna est venue toute seule. Miro est accompagné de Samba, son chauffeur sénégalais, et de deux amis : Alec et Patrick. Dès que Jileska voit Alec, elle se met à bégayer dans mon oreille : « mais, mais c'est quoi ce type. Il est sorti d'un magazine de mode ou quoi.
Alec est un métis, de mère suédoise et de père noir américain. Le type respire ce qu'on appelle la beauté. Et pour tuer les filles une bonne fois pour toutes, il ne porte pas de tee-shirt sur lui, rien que son short. Donc, ses biceps et pectoraux sont dehors. Aïe ! Je sens que ma copine Jileska ne pourra pas supporter la traversée dans ces conditions.
Alors que Samba manœuvre à la barre et que nous quittons le rivage, je vois Jileska qui m’arrache ma belle serviette blanche et qui va vers Alec. Elle lui tend la serviette et lui dit :
« S'il te plaît, Alec, pardon, porte ça ! Je n'ai pas envie de tomber à la renverse dans la mère parce que tu es juste devant moi ! Toi aussi, quand Dieu a distribué les corps, fallait te servir doucement ! »
Miro ne peut s'empêcher d'éclater de rire. Et Gaëlle de même. Alors, Pupuce me souffle dans l'oreille : « je savais que cette fille-là n'allait pas se taire. Pardon, qu'elle ne nous fasse pas les choses de la honte. »
Alors, Alec avec son bel accent américain, lance : « Tu es marrante, Jileska. »
« Poooopoppopoo ! Papa, ferme la bouche ! Est-ce qu'on t'a déjà dit que tu ressembles à un personnage de roman. Tu veux tuer qui avec ton accent. Pardon, je change même de bord. J'en ai trop vu et trop entendu. »
Là, c'est moi qui atterris par terre, morte de rire.
Pupuce suit alors Jileska, qui nous abandonne à l'avant pour se réfugier plus loin.
Patrick, un rouquin franco-anglais, nous lance alors :
« Miro, je ne savais pas que les Gabonaises avaient beaucoup d'humour. »
Il est tellement mignon avec ses taches de rousseur sur le visage et sa coupe à la Justin Bieber. Là, c'est Sunita qui ne le lâche pas des yeux. La voilà qui se lève et se met à débouler tout l'anglais qu'elle connaît. Comme quoi, l'école, ça sert à quelque chose. Ils se mettent à parler de musique et de films. Tout ça en anglais.
Rita, la cousine de Gaëlle, est plus intéressée par ce que fait Samba à la barre. Elle discute avec le chauffeur et prend des photos ci et là. Dans les bras de Miro, je ne vois pas les rives défiler. Mon esprit n'est préoccupé que par une chose : être heureuse et profiter du moment présent.
Alec se met alors à nous raconter le fameux concert de Jay-Z & Beyoncé, le 12 septembre 2014 à Paris. Il raconte avec menus détails. Tout pour susciter l'envie de Sunita de Sharonna qui est une fan invétérée de Queen-B.
« J'ai le coffret collector de ce concert. Je te le prêterai, si tu veux. »
« Bien sûr », répond ma copine.

Quand nous arrivons à notre lieu de pique-nique, il y a une paillote. Nous nous y installons.les filles s’occupe du repas. Le cuisinier de Miro a tout préparer et emballé dans des Tupperwares. Alors, nous n'avons qu'à installer sur la grande table. Pendant que Jileska, Gaëlle et moi nous occupons de mettre la table, les autres se sont jetés dans la mer pour piquer une tête.
« Je n'en reviens pas ! Tu as vu le corps de Pupuce. On ne dirait pas qu'il y a deux mois, elle était enceinte ! », s'étonne Gaëlle.
« Avec grand-mère qui la masse à la serviette chaude tous les soirs, elle ne peut que retrouver son corps. »
« En tout cas, elle est belle ! Elle n'aura pas de mal à retrouver un vrai gars quand elle sera partie en France. »
« Elle veut aller en Afrique du Sud. »
« Oh ! C'est nouveau ! Elle nous bassine avec la France depuis la 6ème ; et tout d'un coup, elle change d'avis. »
« Elle dit qu'elle veut rester proche des petites. »
« Je comprends », fait Jileska. « Ça m'étonne même qu'elle ait le courage de partir. Quand je vois ces deux petites-là, je pense que moi à sa place, j'aurais beaucoup de mal. »
« Pardon, ne lui dis pas ce genre de chose. Elle est déjà assez indécise ! », fais-je en conclusion.
Je regarde les amis qui s'ébattent dans la mère. Miro et Alec sont des nageurs hors pair. Les filles rigolent en faisant des clapotis dans l'eau. Jileska s'approche du lecteur Mp4 de Miro, qui est relié à un mini ampli blutooth. Elle met de la musique et se met à danser comme une folle, sur un son de Jeremih.
« C'est comme ça que tu vas tuer la musique si tu as le bac. », lui fais-je.
« Oh, ça, c'est petit ! Je vais danser nue là au lycée, si je l'ai au premier tour. »
« Tu ne changeras jamais ! », lui fait Gaëlle en riant.

Nous voyons alors Sharonna et Alec qui viennent vers nous en rigolant. Mon Dieu ! Ils sont tellement beaux ensemble, que je suis obligée de me saisir rapidement de mon téléphone et de les prendre en photo.
« Figurez-vous que monsieur ici présent fait des études de médecine. Il va en 3ène année. Vous vous imaginez ! », nous fait Sharonna.
« Je pense, mon cher Alec, que tu t'es tromper de filière ! Tu rendras toutes femmes malades d'amour, très cher. »
« Hey, t'es toujours comme ça où c'est moi qui te mets dans cet état. Est-ce que tu as déjà pensé à t'écrire un one woman show et de monter sur les planches. », répond Alec en riant.
« Pardon, oh ! Le gars-ci est vraiment terrible ! », conclut Jileska.

Nous mangeons en riant. Les garçons nous racontent comment ils se sont connus en
Belgique, il y a près de 6 ans.et je me rends compte que c'est beau de voyager. Eux ils ont la chance d'avoir des parents qui bougent et les incitent à rencontrer des gens d'autres cultures. Moi aussi je veux voyager et m'enrichir des différences des autres !
« Que fais-tu dans la vie, Patrick ? », demande Gaëlle.
« Il travaille à Londres dans une grande banque. Il y est rentré après sa licence en économie, il y a quelques mois. », répond Sunita.
« Cool ! Voilà que mon pote à une impressario à Port-Gentil. », s'exclame Miro.
Tout le monde éclate alors de rire.
« Ales, Patrick, figurez-vous que ces jeunes filles passent le baccalauréat dans quelques jours. Que fait-on si elles le décrochent du coup ? », demande Miro.
« J'ai quelques idées, mais je pense qu'on leur devrait leur réserver une surprise. », fait Alec.
« Mon cher, si la surprise, c'est toi tout nu sortant d'un immense seau à champagne, je te jure que ce bac là, j'en fais mon affaire ! »
« Jileska ! », s'écrie Pupuce qui est dépassée par le sans gêne de ma copine.
« Respire, Marjorie Akendengue. Respire. On appelle ça de l'humour et ça ne tue pas. »
Gaëlle ne peut s'empêcher de rire.
« Il aurait fallu t'inventer, si tu n'existais pas », fait Rita à Jileska.
« Et toi, Pupuce, tu ne parles pas beaucoup ! Que veux-tu faire après le baccalauréat ? », demande Alec.
« Mademoiselle hésite entre une école de commerce et la faculté de langue. Elle veut devenir traductrice. Elle lit beaucoup ! », répond Miro comme s'il voulait vanter les connaissances de ma sœur.
Elle sourit timidement et garde son nez sur son assiette.
« Ah bon ! Et qu'est ce que tu lis ? », demande Alec, fortement intéressé.
« Oh ! Je lis un roman roman intéressant en ce moment. La vérité sur l'Affaire Harry Quebert. Juste comme ça ! »
Elle joue sa modeste ! Le roman en question a bien 400 pages ! Tout pour me donner des maux de tête ! Mais ça marche. Alec et elle se mettent à parler de livres ; et comme par hasard, ils ont lu les mêmes choses ! Comme quoi !
Là, Miro me chuchote dans l'oreille :
« Elles sont cool tes copines ! Vraiment cool ! » 


 

40-

Dernière semaine de juillet, le bac nous bastille. C'est à peine si les gens se serrent encore la main. Qui a envie de prendre la malchance de quelqu'un ? Chacun est là que concentré. Tellement concentré que les têtes chauffent.
Jileska ne veut pas qu'on lui parle. Elle arrête même son téléphone.
Pupuce est plus relax. De même pour Sharonna.
Moi, je passe une partie de la soirée en conversation whatsapp avec Miro. Il m'encourage.
Marc-Elise est dans la salle comme prévu. Elle semble motivée malgré la fatigue. Antoine lui envoie des messages chaque soir pour l'encourager.
A la maison, maman nous fait le petit déjeuner et le repas de midi est toujours prêt. Quand nous rentrons le soir, elle nous demande comment s'est passée la journée.
Papa Jimmy est là pointu tous les soirs pour savoir comment Pupuce a appréhendé chaque épreuve. Le type nous a carrément fait le corrigé de l’épreuve de philosophie, là, dans le salon. Pour rire et faire un peu baisser la tension, maman lui a dit : « dommage que tu ne sois pas le professeur qui corrigera les copies ! » et lui de répondre : « Ils ont intérêt à ne pas faire les imbéciles et à ne pas se venger sur les copies des enfants ! Leurs problèmes d'argent ne concernent pas nos enfants !
Il est en colère contre ces professeurs qui passent la moitié de l'année à manifester, à faire grève.
« Encore faut-il savoir si avec votre fameux bac là, vous n'aurez pas de souci à l'étranger. On dit déjà qu'il n'a aucune valeur ! »
« Humm, à monsieur Mbeng, c'est comme ça que tu encourages les enfants ! », lui fait maman.
Monsieur mon père dit seulement qu'il ne se fait pas de souci pour moi. Il voit déjà mon nom inscrit au tableau des admis. S'il savait seulement combien le stress me tenaille chaque fois que j'approche le portail du centre d'examen ! Je ne sais pas si j'ai déjà ressenti ce genre de chose, mais là, on a l'impression que la vie peut s'écrouler si on ne réussit pas cet examen.
Et mon professeur d'histoire-géo qui vient tous les matins au portail pour nous encourager ! Il a le courage de me lancer :
« Pour vous Tania Akendengue, ce n'est qu'un formalité ! »
Aka ! Si c'est une formalité, pourquoi mon cœur bas chaque fois que je me retrouve en salle ?
Le jour de notre dernière épreuve, Sharonna, Gaëlle, Jileska, Jacques, Fidolin et moi rentrons à la maison à pieds. Nous rigolons pour faire baisser la pression. Pupuce a encore un oral à passer le lendemain. Elle bosse dessus avec sa copine Sunita.
Nous, nous décidons d'aller faire un tour à la plage à SOGARA.
Arrivé là, j'enlève mes chaussures et je vais traîner mes pieds dans l'eau. À côté de moi, Sharonna me dit :
« Mon père a déposé sa demande de divorce. Ma mère est toujours en Espagne. Elle a pris un mois et demi de congé. »
« Oh ! C'est définitif alors ? Il ne changera pas d'avis. »
« Non, je ne pense pas. Mes grands frères ont appelé de Washington histoire de demander à papa de réfléchir encore. Il a dit qu'il préfère en rester là. Il est complètement dépité d'autant que maman semble bien se foutre de tout ça. »
« Elle vit une seconde jeunesse, apparemment. »
« Comme tu dis. C'est vraiment triste. Je ne m'attendais pas à ce qu'ils se séparent. J'étais loin de me douter qu'elle n'était pas heureuse avec nous. »
« La vie est pleine de surprises ! Et finalement, où vas-tu après le baccalauréat ? »
« Je vais en Afrique du Sud. La sœur de Gaëlle m'a envoyé des informations sur l'université de technologie du Cap. Papa a dit que je vais y passer mon bachelor et ensuite, j'irai rejoindre mes grands frères aux USA. L'essentiel pour lui est que je devienne ingénieur comme lui, comme maman. Ça m'arrange un peu. Ça me permet de rester proche de lui. Il dit qu'il s'en remettra, mais je sens que son orgueil de mâle a été touché. »
« Et donc, ta mère est réellement amoureuse de Peter. »
« Oui, apparemment ! Sinon, elle ne serait pas allée le rejoindre, non ? »
Gaëlle nous rejoint en nous annonçant que les garçons veulent qu'on aille prendre un verre au Petit Kawa, histoire de respirer avant d'avoir les résultat la semaine prochaine.
Je suis la meute, et nous arrivons au bord de mer à pieds, malgré la distance. Nous avons discuté tout le long du chemin. Arrivé à notre destination, c'est Jacques qui nous offre des jus. Après une heure à discuter, je prends congé.
Il est 20 heures quand j'arrive à la maison. Maman, est assise dans le salon. Elle est en pleine discussion avec Kaba.
« Bonsoir mesdames », leur fais-je en allant vers le couloir des chambres.
« alors, comment s'est passé la journée ! »
« Oh, tranquille. Les sujets étaient abordables », fais-je à maman.
« Pas la peine de trop parler ! On attend seulement les résultats ! », me lance Kaba.
La femme-là a quel problème ! Pardon ! Je préfère aller dans ma chambre.
J'y trouve Pupuce.
« Salut ! Pourquoi tu restes dans la chambre. »
« La femme qui nous a mises au monde me saoule ! Ça la tuerait d'être un peu positive et de m'encourager ??? »
« Laisse-la de côté. Tu sais comment elle est. Garde l'esprit positif. Tu as oral demain. »
« C'est pour cela que je reste dans la chambre. Je la ferai taire en lui mettant mon relevé de notes sous le nez. Car ce bac, je vais l'avoir. Ensuite, elle ne me verra plus qu'en photo ! »
« Ça ira. Elle va changer. »
« C'est toi qui le dis. »
Je me couche sur le lit avec l'intention de me lever deux heures plus tard pour prendre ma douche. Mais, impossible de fermer l’œil, car le téléphone de Pupuce vire toutes les deux secondes.
« Avec qui es-tu en train de chatter ? Ton téléphone n'a jamais autant vibré. »
« Oh ! je...je... Bon, je chatte avec Alec. »
Yo !!!! Depuis quand ? »
« Euh, excuse-moi ma curiosité, mais, comment as-tu eu son numéro de téléphone ? »
« Très drôle Tania ! Je te signale que c'est Miro qui lui a refilé mon numéro. Tu ne penses tout de même pas que je suis assez courageuse pour faire le premier pas !!! »
« Ok ! Et de quoi discutez-vous ? »
« Oh ! On discute surtout littérature. C'est tout. », fait-elle avec un sourire espiègle.
Je la regarde sans rien dire ; puis, je me recouche. J'aurais bien le temps après les résultats, de parler de tout ça.
« Au fait, comment tu as trouvé les épreuves ? »
« Abordables ! », lui fais-je en m'endormant.

Il est minuit quand je me réveille. Je vais prendre une douche. Ensuite, je m'installe sur le canapé en chemise de nuit. Je me câble sur Novellas TV pour voir la rediff de La Patrona. Je vais rester là jusqu'au matin pour regarder la télévision. Ça fait tellement longtemps que je m'en prive.
Ainsi, dans quelques jours, nous aurons le verdict qui soit nous rendra heureux, soit nous condamnera à revenir l'an prochain dans les murs de Raponda. Pour ma part, j'ai tellement pas envie de revoir la bouille de mes professeurs, que je prie au plus profond de moi, pour décrocher cet examen. Un peu plus et je sors en vampire pour avoir les résultats avant le jour J. Tchooooo !!!
Le matin venu, je vois Pupuce qui sort de la maison pour aller à son oral d'anglais. La go est habillée d'un tailleur.
« Mais, là, tu as 20/20 sans ouvrir la bouche ! »
« Tu penses ! Je suis trop sapée, c'est ça ! »
« Mais non, c’est du bon. Allez, courage ! »
J'entends une voiture démarrer. Hummm ! Qui est venu chercher cette fille !!! Depuis quand a t-elle un chauffeur. Je serais bien sortie en courant pour voir la fameuse voiture, mais comme je suis en chemise de nuit...
Quand elle revient à midi, mademoiselle prend son sac. Elle y fourre tous ses cahiers et va les mettre à la poubelle.
« Ça ne te va pas, Pupuce ? Et si tu es admissible. »
« Oh ! Non ! Ce bac, je l'ai d'office. Je ne veux plus voir ces cahiers. Fini le lycée. Ouf, ça fait du bien. »
« Yo !!! Donc ton nom est écrit d'office sur la liste des admis, c'est ça ! »
« Oui ! J'ai confiance. »
« Ne m'insulte pas, sister ! Moi, je préfère attendre de voir. Je ne suis sûre de rien. C'est vrai qu'avec les moyennes que tu as toujours eues, il faudrait vraiment un sacré coup de malchance pour le rater, cet examen ! »
« Et oui ! Maintenant, je vais prendre une bonne douche et dormir. Tu t’occupes des filles ce soir ? Je suis invitée dîner. »
« Quoi ? Tu sors dîner ? Avec qui ? »
« Euh ! C'est la police qui demande ? Est-ce que je n'ai pas le droit de m'offrir un dîner tranquille, avec ma frangine Sunita ? On va décompresser au Coppa Cabana. Y a quoi même ! »
« Hummmm ! Marjorie Akendengue, arrête de mentir. Ton nez s'allonge. »
Elle sourit et m'abandonne dans le salon. Je la rattrape dans la chambre et lui demande :
« Je te trouve un peu changée depuis 3 jours. Quel chapitre ai-je manqué ? »
« Aucun. Y a rien. Enfin, euh !!! »
« Arrête de faire durer le suspens. Crache le morceau. »
« Bon ! Un très beau jeune homme m'a demandé si je veux passer la soirée avec lui. J'ai voulu dire non, j'ai trouvé des excuses. Et là, madame Bernadette ta mère, m'a arraché le téléphone des mains. Elle m'a fait la leçon en trois chapitres : je suis jeune, c'est pas parce que j'ai des enfants que ma vie doit s'arrêter, et je ne perds rien à essayer. Tu sais comment elle sait se montrer persuasive, cette femme. Donc, voilà comment j'ai dit oui à ce jeune homme. Le reste, à la suite de l'épisode. »
« Et puis-je savoir qui est ce jeune homme ? »
« Oh ! C'est... »
Au moment où elle veut me lâcher l'affaire, les petites se mettent à hurler comme si elles n'ont pas mangé depuis des jours ! 


 

41-

Le lendemain, Jileska, Gaëlle et moi sommes ensemble chez Jileska, à salsa. Nous sommes assises dans le salon et on s'ennuie en regardant une série télé. Il est 14 heures. Nous n'avons rien de spécial à faire, si ce n'est d'attendre encore quelques jours pour avoir les résultats du bac.
Sûrement les jours les plus longs de nos vies ! Jileska apporte un Scrabble et nous nous mettons à jouer sans grande conviction. La tête est dans l'attente des résultats.
« Sinon, l'école c'est quand même bien, quoi ! Parce que je vois la manière dont Sunita déboule l'anglais au téléphone avec ce Patrick, là ! Je suis que dépassée. On dirait qu'elle a passé 10 ans au Ghana ! »
« Jileska et le sens de l'exagération ! Comme ça, la petite travaille son dossier auprès de Patrick ? », demande Gaëlle.
« Tu veux dire les petites ? Figure-toi que Pupuce et elle nous ont grillé la politesse. Elles auraient pu nous laisser la place, mais non ! Hier, elles étaient au resto avec les types. Et quel resto !? »
« Elles sont efficaces, ces filles ! Elles ont négocié l'affaire comme ça, alors que nos têtes étaient en plein dans l'examen. », fait Gaëlle.
« C'est ce que tu dis petit comme ça ! Depuis le jour à la plage, Sunita joue l'affaire très serrée. Elle ne laisse pas une minute de répit au pauvre type. Je lui ai demandé pourquoi elle veut à tout prix mourir là, et vous savez ce qu'elle m'a répondu ? Elle me dit carrément qu'on ne sait pas de quoi est fait demain. J'ai préféré enlever ma bouche là dedans. »
Gaëlle et moi éclatons de rire.
« J'ai entendu Pupuce et maman discuter ce matin. Elle lui racontait la soirée. Paraît que ce soir, ils sortent encore ensemble. Ils vont jouer au billard ensuite, ils vont au Karaoké ! », fais-je.
« Hummm ! En tout cas, elles s'enjaillent ! Au moins elles ! »
« Comme tu dis. Il y en a qui ont de la chance ! Moi avec qui oh ! »
« Arrête, Jileska. Ton tour arrive. L'an prochain, c'est l'université ! Tu vas forcément trouver le prince charmant là-bas. », fais-je.
« Yo ! Ça c'est quel prince charmant que tu me souhaites ! Donc je vais m'embourber à l'USTM et je vais encore me fatiguer avec un sans espoir comme moi ! Yooooo ! Pardon, autant rester célibataire., fait Jileska.
« Mais sois positive ! Qui dit que tu ne vas pas tomber amoureuse d'un fringant jeune homme, jeune diplômé, tout juste embauché dans une banque ou autre ? À Libreville, tout est possible ! », fait Gaëlle.
« Laisse ça, la go ! La chance n'a jamais été de mon côté. Bref, je suis là pour accompagner les autres. Personne ne me regarde jamais autrement qu'en bonne potesse ! »
« Tu es trop pessimiste, Jileska », conclut Gaëlle.

Samedi 8 août, c'est Miro qui me réveille à 6 heures du matin.
« Comment te sens-tu ? », me demande-t-il au téléphone.
« Je me sens endormie, mon chéri. Je te signale que le soleil se lève à peine. »
« Désolé, je pense que je suis trop nerveux depuis hier soir. Les résultats c'est pour aujourd'hui ma belle ! »
« Merci pour la pression, mais on ne saura rien avant cet après-midi ! »
« Ok. Rendors-toi. Je t'embrasse très fort. »
Je ne peux pas me rendormir. Je me lève et abandonne Pupuce dans le lit.
Dans le salon, maman est assise dans le canapé et donne le biberon à Jade.
« Hello ! »
« Hello à toi. C'est le grand jour. »
« Moi, je n'y vais pas. Les autres me raconteront.
« Comment ça ! Et si on te fait une mauvaise blague en te disant que ton y est alors que ce n'est pas vrai ! »
« J'ai pas envie d'y aller, maman. Mon cœur bat tellement vite que j'ai l'impression qu'il peut lâcher à tout moment. »
« Espèce de poltronne. Reste assise à la maison ; tes résultats viendront te suivre ici. », me fait maman.
« Et si je ne l'ai pas ! »
« Ce n'est pas la fin du monde. Tu le repasseras l'année prochaine. »
Nous continuons de discuter de tout et de rien, lorsqu'arrive Pupuce, lavée, coiffée, maquillée.
« J'ai raté un épisode, ou il n'est que 8 heures du matin. C'est quoi toute cette beauté ? Tu veux tuer qui ? », lui fais-je.
« Rabat-joie ! Je veux juste être au meilleur de ma forme aujourd'hui. Je te signale qu'on aura bientôt les résultats. »
« Oui, cet après-midi. Ça ne justifie pas que tu sois déjà pimpante à 8 heures. »
« Oh ! Je me suis faite belle parce que je vais faire un tour. »
« Tu vas faire un tour ? Où ? »
« C'est la police qui demande ? », me répond Pupuce.
« Y en a qui ont pris du galon, dis donc. Heureusement que les petites ont une grand-mère, n'est-ce pas ? »
« C'est fait pour ça les grand-mères », conclut Pupuce avec un sourire espiègle.
« Arrête d'embêter ta sœur, Tania. Elle a l'occasion de s'aérer l'esprit, il faut la comprendre ! », fait maman.
« Faites comme si je n'avais rien dit. », fais-je en allant vers la salle de bains.
Je prends une douche en écoutant sur mon téléphone, le morceau Photograph de Ed Sheeran. Ce morceau me fait penser à Miro. Je me demande ce qu'il adviendra de nous sitôt que j'aurais mes résultats du bac. Ce soir, c'est le soir fatidique.
Je me prélasse sous le jet d'eau comme si je n'avais rien d'autre à faire que rêver.
Mon téléphone sonne. Je regarde l'appelant. C'est l'élu de mon cœur. Je laisse sonner et me contente de m'essuyer.
Il appelle de nouveau dix minutes plus tard.
Je réponds. Il m'annonce qu'il est là dans dix minutes et m'emmène prendre le petit déjeuner au Méridien. Je n'ai pas faim ; mais comme j'ai envie d'être dans ses bras, je réponds ok.
Je vais dans la chambre et je pique à Pupuce une de ses robes paysannes qu'elle ne porte plus depuis longtemps. Je me fais belle en lissant mes cheveux courts qui ont plutôt poussé. Je vais dans la chambre de maman lui piquer du parfum : eau de Kenzo.
C'est bon ! Je me sens fraîche et belle pour attaquer la journée. Miro est là comme promis. Après avoir dit bonjour à maman, il lui annonce qu'elle ne me reverra qu'en début de soirée.
Yo ! Il a prévu quoi pour me tenir occupée ?
Nous allons effectivement prendre ce fameux petit déjeuner. Il y a tellement de choses au buffet, que j'en ai le tournis.
« Et si tu souriais un peu, beauté ! », me fait-il alors qu'il s'assoit en face de moi.
Je lui fais mon plus beau sourire.
« Alors, les filles sont prêtes pour le verdict ? »
« Toutes sauf Jileska qui est en panique. Je pense qu'elle n'a pas dormi de la nuit. C'est tellement important pour elle. »
« Pourquoi ? »
« Oh ! Elle se met la pression depuis qu'elle a eu son enfant en 5ème. Elle se dit qu'il lui faut à tout prix réussir, car ses parents ont eu une charge en plus. C'est psychologique ! Elle se sent redevable envers eux et a hâte d'avoir un diplôme d'études supérieures pour trouver un travail digne de ce nom, et venir en aide en retour à ses parents. »
« Je comprends. C'est très africain cette idée de prendre soin de ses parents dans leurs vieux jours. Je dois dire que j'en ai appris beaucoup sur les traditions en 3 années au Gabon. En France, on a tendance à être plus égoïstes. »
« On ne peut pas se permettre ce luxe ici. Tu as vu tout ce que l'on transporte comme famille ! »
« Je vois ça ! Et je suis impressionné chaque fois que je vienne te voir et que je me rende compte que ta grand-mère est là et qu'elle prend soin des filles de Pupuce. Moi, la mère de mon père va skier en hiver en suisse, elle fait le shopping au printemps à New York. Et elle bronze l'été à Maldives. Ce n'est pas elle qui arrêterait sa vie pour prendre soin de son arrière-petit-fils. »
« Ça me fait tout drôle de t'entendre dire cela. Tu ne me parles jamais des parents de ta mère. »
« Oh ! C'est qu'elle ne m'a jamais emmené au Congo. Ces 5 frères sont tous réfugiés en Belgique. Sa sœur aînée a épousé un Allemand et vit au Luxembourg. Il n'y a plus personne à Lubumbashi. »
« Oh ! Ça fait drôle de savoir qu'elle n'y met plus les pieds. Je n'arrive pas à imaginer un instant ne plus jamais revoir le Gabon. Mais, à chaque famille son histoire. »
« Comme tu dis. Mas dis moi, Tania Akendengué, où vivrons-nous une fois que je t'aurais épousé ? »
Sonnée, je ne sais quoi répondre.
« Tu n'as jamais réfléchi à ce genre de choses ? », fait Miro étonné.
« Je te suivrai partout où tu iras. Ma maison sera là où tu seras. », fais-je pour rattraper le coup. Jamais je n'ai pensé à tout ça.
Monsieur a tout prévu pour moi. Il m'emmène au salon de beauté Cuttie Hair pour une séance de massage intégral. Ensuite, nous achetons une pizza et deux canettes d'orangina et allons manger au bord de la mer à SOGARA. Le temps passe tellement vite que je ne me rends pas compte quand l'heure de la sentence tombe. Il est 14 heures quand il me dit :
« Les filles sont devant le portail du lycée depuis deux heures déjà. Il faut y aller. »
Nous arrivons là-bas. La foule est compacte devant le lycée. J'entends quelqu'un qui me crie : « Tania Akendengué admise d'office ! » 


 

43-

Il est 18 heures quand j'arrive à la maison après avoir longuement discuté avec monsieur mon père.
J'ouvre le portail, j'ouvre la porte d'entrée. Et qui je vois, bien assis dans le salon !!!
Pardon, je suis obligée de me mordre la langue pour m'empêcher de crier.
Donc, le salon est envahi par Patrick et Alec, qui discutent avec Sunita et Pupuce. Patrick porte Jade dans les mains, tandis que Sunita a Ruby. Une véritable photo de famille, juste bien trouvée pour illustrer un magazine. Je les salue et demande où se trouve maman.
« Elle est dans la cuisine », me répond Pupuce, trop occupée à manger Patrick des yeux.
Yo !!!
Je vais dans la cuisine et trouve maman derrière les fourneaux.
« Ta fille a eu le bac, ma petite maman. »
« C'est quand même ma fille. Dieu ne s'est pas trompé en te mettant dans mes bras. Oh, comme je suis fière de toi ! », me fait-elle en m'embrassant. « Tu as appelé ton père ? »
« Je reviens de chez lui. Nous avons discuté un peu. »
« Ok. Ta sœur est tellement dans le love, comme vous dîtes, qu'elle a préféré annoncer la nouvelle à monsieur Mbeng par téléphone. Il est en train de boire le champagne là-bas. Ta grand-mère est dans la chambre. Va lui annoncer la nouvelle toi-même. »
« Ok, je vais le faire. Mais dis-moi, maman, ils font quoi là au salon ? Tu étais au courant depuis le début, en fait. Moi ne tombe des nues. »
« Oh ! Ne va pas embêter ta sœur avec tes questions. Tu es trop cartésienne. Laisse-la vivre son bonheur. Je préfère la voir comme ça épanouie plutôt que triste en enlaidi par l'amour fou qu'elle ressentait pour Peter. »
« Maman ! C'est toi qui arranges maintenant le coup à tes filles. »
« Oh ! Ils sont venus me dire bonjour hier. Ils m'ont dit qu'ils veulent manger des plats typiquement gabonais. C'est pour ça que tu me vois dans la cuisine. J'ai fait un bouillon de carpe, un plat de poisson salé aux aubergines, des feuilles de manioc aux crevettes. Et bien sûr, du poulet fumé à l'Odika. Ils mangeront ici ce soir. Il y aura aussi ton frère Julien et cette petite blanche là, Pamela-Jo. Elle s'en va définitivement demain. »
« Maman ! Tu arranges le coup à tes enfants ! » , fais-je pour la taquiner.
« Mais pourquoi pas ! Si c'est le seul moyen que j'ai pour leur montrer que vous n'êtes pas des filles quelconques, je ne vois pas pourquoi je ne le ferais pas. »
« Ok, mamounette ! Heureusement que Dieu t'as créée. Tu es trop cool ! », lui fais-je en la serrant dans mes bras.
« Mais, demande à Miro et aux filles de se joindre à eux. Il y a assez à manger pour 20. »
« Ok. Je vais l'appeler. Il sera content de venir. Les filles aussi. »
« Au fait, la mère de Peter Malonga était là ce matin. Elle nous a apporté deux paquets de manioc. Vous les mangerez au repas de ce soir. »
« Oh ! »
Je sors de la cuisine et me dirige vers la chambre de maman où se repose grand-mère. En omiènè, je lui annonce ma nouvelle.
« Agnambiè, Akéwa ! (Dieu merci)», fait-elle en levant les mains au ciel.
Là, elle dénoue un pan de son pagne et me dit :
« Tiens. C'est pour toi. Fais-en bon usage. Je suis heureuse pour toi. Et si ce jeune homme te demande en mariage, dis oui. Tu réfléchiras après. »
Je l'embrasse en prenant les 100 mille francs qu'elle m'a remis. Je vais dans ma chambre pour passer des coups de fil. J'appelle d’abord
l'oncle Alexandre, le frère aîné de maman qui vit à Libreville. Il n'arrête pas de crier au téléphone, tellement il est content. J'appelle ensuite, Albert, le meilleur ami de maman. Lui de même ; il est heureux pour moi. Quand j'appelle monsieur Mbeng, c'est Kaba qui répond au téléphone. Elle reçoit la nouvelle avec joie et me lance :
« Vraiment, c'est Bernadette la plus heureuse dans cette affaire ! »
Comme je n'ai vraiment pas envie de m'étendre en discussion avec elle, je lui demande de me passer Papa Jimmy.
Il prend le téléphone et me dit :
« Vraiment ma fille, félicitations. Bernadette a vraiment eu raison de se battre pour te payer Raponda chaque année. Je suis fière de toi ! Tu t'imagines ! Pupuce a eu mention bien. »
Yo ! Pourquoi l'ai-je appelé ? J'avais oublié que ce n'est pas mon père !

J'envoie un message Whatsapp aux filles pour les inviter au repas à la maison, à 20 heures. J'appelle ensuite Miro. Il répond au bout de 5 sonneries.
« Désolé beauté, j'étais sous la douche. »
« Ok, pas de souci. Je voulais juste te dire qu'est invité ce soir par ma mère. Elle a préparé un menu entièrement gabonais. »
Cool ! Je viendrai à 21h. Je dois accompagner mon père à un cocktail officiel dans quelques minutes. Je fais juste acte de présence et ensuite, je suis à toi. »
« À tout à l'heure, alors. Je t'aime. »
« Moi, dix fois plus, beauté. »
je raccroche et compose le numéro de Jileska qui m'a répondu « Appelle ».
« Oui, qu'il y a t-il mademoiselle. »
« et ben ! Il se trouve que je ne serai pas avec vous ce soir. Je... »
« Tu vas au restaurant avec Jacques donc tu n'a pas notre temps. Ça se comprend, on ne t'en veut pas, tu sais. »
« La go, ce que j'aime avec toi, c'est que tu comprends vite. Il m'a dit qu'il m'emmène dans un vrai restaurant. Le Copa Cabana c'est fini, oh !!!! »
« Encore toi-même ! Tu le mérites, frangine. Bisous. »
« Bisous. »
Je me couche sur le lit, histoire de me relaxer avant que les invités n'arrivent. Un quart d'heure plus tard, Pupuce entre dans la chambre. Elle ouvre le placard et se parfume. Son parfum embaume la chambre.
« C'est quoi ce parfum ? », lui fais-je, surprise par cette agréable odeur.
« Ça s'appelle Libertine. C'est du Vivienne Westwood. Sunita et moi, nous nous sommes ruinées pour en acheter avec une collègue de Papa Jimmy qui revient de France. C'est sensuel, n'est-ce pas ? »
« Je ne te connaissais pas des goûts si prononcés pour tout ce qui est SENSUEL ? », lui fais-je.
« Est-ce que ça te tuerait d'être un peu heureuse pour moi ? Je te signale que c'est la première fois qu'un garçon s’intéresse réellement à moi. Il me fait sentir belle, désirable. Contrairement à ce Peter de malheur qui n'est sorti avec moi que parce qu'il avait besoin de quelqu'un pour lui faire ses devoirs de maison ! Pfffffff! »
« Désolée Pupuce. Je suis heureuse pour toi. Bonne chance. C'est juste que je me dis qu'il est juste de passage. »
« Et alors ! C'est tante Bernadette qui a raison : peu importe s'il s'en va après, j'aurais vécu de beaux moments. »
« Tu as raison. Je devrais arrêter de trop réfléchir. Dis, comment es-tu arrivée à lui parler des petites ? Il n'a pas été choqué ? »
« C'est Sunita qui s'en est chargée. Et comme ma combi sait y faire, le type n'a rien trouvé à redire. Tu crois ça toi ? »
« Je le vois et je me dis que tu as de la chance ! »
« Comme quoi, c'est bien cette folle de Kaba qui avait raison : j'aurais dû marcher avec toi dès le début. Je n'aurais pas fondu bêtement pour Malonga. »

Je l'a regarde sans rien dire. Donc, Kaba a trouvé quelque chose de bien à dire sur moi ?
« J'ai pensé au début que c'était Alec qui te plaisait. », lui dis-je.
« No way ! Tu as vu comme il est beau on dirait qu'il veut tuer les filles d'un seul regard ! Et c'est moi qui allais tomber là ! Pardon, j'ai eu mon lot avec Big Wave. Je , ne me voyais pas sortir à nouveau avec une gravure de mode. Partout où on va, les filles se retournent sur lui et toisent Sunita. Pardon, j'ai mis mon cœur à l'abri. »
Elle s'en va comme elle est arrivée et je me dis qu'elle en fait du chemin, ma chère Pupuce. 


 

44-

Il est 20h lorsque Sharonna arrive en compagnie de Stephen, son petit frère. Du haut de ses 17 ans, il va en terminale B au lycée Ambourouet Avaro. Tous deux m'aident à dresser la table.
« Tu t'imagines que j'ai du fuir le vieux. Il avait des plans, le type. Il voulait qu'on aille au restaurant et tout. Je lui ai demandé de me laisser sortir étant donné que monsieur a déjà payé les billets pour Dubaï. On y va en vacances dans dix jours. Juste le temps d'effectuer les démarches à Libreville pour récupérer mon diplôme »
« Comme je t'envie ! Vous resterez combien de jours ? », lui fais-je.
« Oh ! On y restera deux semaines. Ensuite, Stephen et moi allons passer deux semaines à Cologne chez ma marraine. »
« C'est beau de pouvoir voyager. J'imagine, déjà faire le tour du monde, plus tard, quand je travaillerai. Je serais aussi class et professionnelle que ta mère. Et je voyagerai avec mes enfants et mon époux. »
« Oh ! En parlant de maman. Elle m'a appelée. Elle vous passe ses félicitations. Elle a osé me supplier de ne pas la juger. Elle m'a dit que l'amour ne prévient pas et qu'elle me souhaite de vivre la même chose. J'ai cru que j'allais vomir quand elle m'a dit ça ! »
Je me contente de rire devant la mine dépitée de Sharonna.
« On en rira dans dix ans, tu verras ! »
« Oh ! Ça ne risque pas d'arriver ! », fait Stephen. « Elle est enceinte, vois-tu ? Nous allons sûrement avoir un petit frère. Difficile de rire une fois que le petit sera là. »
Les assiettes que j'avais dans la main atterrissent par terre.
« Tu rigoles, Stephen ! Sharonna, dis-moi qu'il rigole ! Ta mère va avoir 49 ans. À cet âge on souhaite se débarrasser de ses enfants et vivre une nouvelle vie avec son époux et non pas pouponner de nouveau. »
« On se calme, Tania. Tu t'imagines ce que j'ai pu ressentir en apprenant la nouvelle ! Je n'ai même pas eu le courage de le dire à mon père. Je ne sais même pas comment annoncer la nouvelle à mes grands frères Josselin et Michaël. », me fait Sharonna.
« J'ai besoin d'un efferalgan ; Excusez-moi, j'arrive. », fais-je alors que Pupuce et maman sortent de la chambre, intriguées par le bruit des assiettes.
Alec, Patrick et Sunita qui sont partis acheter à boire chez Azockry, reviennent quelques minutes plus tard. Dès lors, Pupuce ne quitte pas le bras de Patrick. Sunita, elle, a dû mal à éloigner sa bouche de celle d 'Alec. Elle semble s'être transformer en masque à oxygène, tend il semble qu'il a excessivement besoin d'elle comme de l'oxygène pour vivre.
À cela, Sharonna rit et lance :
« personne ne va te le voler ici, Sunita. On respire ! »
La petite de Jileska, du haut de ses 17 ans, répond simplement :
« Si tu savais, Ya Sharonna. Si tu savais ! »
Bref, il semble que la petite soit en train de vivre Noël avant l'heure.
Gaëlle arrive en compagnie de Marc-Elise.
« Les consignes de Nazaire Ontala et d'Elisabeth Ogoula sont les suivantes : ramenez leur fille à la maison sitôt que nous avons fini de manger. Ils m'ont dit qu'il est hors de question qu'elle nous suive en boîte de nuit. », me fait Gaëlle en rigolant.
« Ah, ces gens là, quand je vais les barrer ils vont bien s'ennuyer dans leur maison. Ce n'est pas moi qui leur ai dit de ne faire qu'un enfant ! », s’énerve Marc-Elise.
« Oh, le bijoux de maman Élisabeth se fâche ! Ma go, tu vas juste là a Libreville. Ce n'est pas comme si tu quittais le pays. Tu seras toujours leur bébé. », lui fais-je.
« Peu importe. Au moins, j'aurai un peu d'indépendance. Je vais me prendre une chambre. Et j'espère vraiment réussir le concours de l'Afram ! Mais d'abord, cet oral de rattrapage du Bac»
« Et t'as des nouvelles d'Antoine », lui demande Sharonna.
« Il m'a envoyé un message de félicitations, mais je n'ai pas envie d'en parler, » répond-elle simplement.
Les filles n'insistent donc pas. Nous nous mettons à rire en voyant Julien qui essaie d'échapper aux griffes de Pamela-Jo. Je me demande pourquoi il l'a invitée.
Maman arrive avec Ruby dans les bras alors que Jade dort déjà. Elle nous souhaite à tous un bon appétit en nous félicitant encore pour notre réussite au bac.
Avant de repartir dans la chambre, elle m'appelle dans la cuisine et me donne des consignes.
« Si vous sortez, tu gardes Pupuce à l’œil. Tu l'emmènes en boîte de nuit et tu la ramènes à la maison, d'accord ? Je ne veux pas que vous consommiez d'alcool, on est d'accord. Et bien sûr, Julien ne sort pas avec vous, quelques soient ses supplications. Amusez-vous bien. Et bonsoir à Miro. »
Sur ce, elle s'en va dans la chambre en souhaitant bonne soirée à tout le monde.
Nous mettons à manger dans la bonne humeur. Je regarde ma montre et suis impatiente de voir Miro arriver. Patrick demande à goûter du piment, malgré les mises en garde de Pupuce. Il met en mets un peu dans son plat et devient aussi rouge qu'une tomate, quand le piment agit dans son organisme.
« Mais, c'est un suicide ! Comment faites-vous pour manger ce truc ? »
« Ce n'est pas pour les poltrons », lui lance Julien.
« Je veux bien être poltron si cela doit me garder en vie. », répond Patrick en essayant de rire.
Gaëlle lui demande alors de nous raconter la vie à Londres. Il se met à parler de la ville dans laquelle il a étudié et vit depuis cinq ans.
« Je suis né à Nairobi. Mon père y était conseiller économique à l’ambassade de France. Ma mère et lui s'y sont rencontrés. Elle était professeur de Lettres à l'université. Je suis le deuxième enfant du couple. Ma sœur cadette étudie à Lille. », nous fait-il.
« Et toi, Alec. Comment es-tu arrivé en Belgique ? », questionne Sharonna.
« Oh, c'était un compromis entre l’Allemagne où vivent mes parents et la Suède où vivent encore mes grands-parents. Rien de bien original. Je suis en Suède. J'ai grandi entre Dakar, New York, Bruxelles et Düsseldorf. J'avais l'embarras du choix quant au lieu où j'allais effectuer mes études. »
« Ok. Intéressant tout ça ! », conclut Gaëlle.

Miro arrive finalement à 22 heures 30 alors que nous mangeons encore. Il semble exténué.
« J'ai serré tellement de mains, et tellement souri aux gens, que j'ai bien envie de me glisser dans mon lit. », me fait-il alors que nous sommes tous les deux devant le portail.
« Impossible, tu as promis aux filles de nous emmener danser. », lui fais-je.
« Ok, ok ! Viens, allons retrouver les autres. »
Quand nous rentrons au salon, j'entends alors Pamela-Jo demander à Pupuce :
« Dis, tu seras à Toulouse en septembre ! On pourra s'y voir, alors ? »
« Non, je serai à Paris. J'ai été accepté dans une école de commerce qui a une branche dans 5 villes de France. Je préfère Paris, finalement. Mon avion décolle de Libreville le 1er septembre, je crois. Enfin, c'est mon père qui se charge de tout. »
Gaëlle et Sharonna me regardent l'air de dire : mais finalement , cette Pupuce, elle reste en Afrique où elle va en France ?
Moi, je ne m'en préoccupe pas plus. Je ne serai sûre de son itinéraire que lorsque je verrai son avion décoller. Car, même assise dans la salle d'embarquement à l'aéroport international Léon Mba, elle serait capable de rater l'avion exprès, en allant s'enfermer dans les toilettes !
Et écoutez-là rajouter.
« Et c'est tellement plus pratique d'être là. En un saut, tu peux rapidement prendre le train pour Londres, l'Allemagne, la Belgique. Je veux voyager, tu comprends ! »
Ça c'est sûr que le message est passé ! Paris est tellement SI PROCHE de Londres où travaille Patrick. Pas besoin de nous faire un dessin.
Je sers à manger à Miro, qui préfère s'en tenir aux feuilles de manioc, que ça mère lui a déjà fait manger plusieurs fois. Assis à mes côtés dans le canapé, sa tête ne tarde pas à tomber endormie sur mon épaule.
« Il semble épuisé ! », me fait Sharonna.
« Ce n'est pas grave, les filles. Qu'il reste dormir dans les bras de sa chère et tendre. Et Pascal et moi, nous vous emmenons en boîte de nuit. »
Les filles sont d'accord avec ce programme. Moi, je réfléchis quelques secondes à mon sort. Monsieur mon chéri va dormir ici. Où vais-je l'installer. Dans mon lit au matelas peu confortable ou ici dans le canapé. Pupuce me sort de l’embarras en me murmurant dans l'oreille :
« Je vais piquer de beaux draps à la vielle et vite arranger le lit et la chambre. T'inquiète. »
Pour une fois, la télépathie entre nous a bien marché.

À 23h 30, alors que Miro dort couché sur le canapé, Julien et moi, accompagnons les amis vers les voitures conduites par Patrick et Alec. Nous leur disons au revoir.
« Désolée de devoir vous laisser tomber ; », fais-je à mes copines.
« T'inquiète ; nous allons nous amuser. On te raconte demain », me fait Sharonna.
« Bonne nuit à toi Marc-Elise. Maman Élisabeth t'attend à la maison. », fais-je à ma copine.
« Très drôle, Tania Akendengué. J'adore ton humour. »
J'ai eu le temps de dire à Pupuce de bien prendre soin d'elle en boîte de nuit et de rentrer tranquillement à la maison après s'être amusée.
« T'inquiète », m'a t-elle dit. « J'ai retenu la leçon. »
Ils s'en vont, même si Pamela-Jo a un énorme pincement au cœur et les larmes aux yeux en disant au revoir à Julien.
« Enfin partie ! J'ai bien cru qu'elle n'allait jamais me lâcher. », me confie mon frère.
« Dis la vérité. Tu l'aimes quand même un peu, cette fille. »
Il me regarde sans rien répondre.

J'arrive à traîner Miro jusque dans la chambre. Je le débarrasse de sa veste de costume, le couche sur le lit et lui enlève ses chaussures. Il est tellement sonné, qu'il ne boude pas un instant. Il arrive à m'emprisonner dans ses bras. Et à me murmurer dans l'oreille : Viens avec moi à New York, Tania.
Je me redresse pour être sûre d'avoir bien entendu, mais le sommeil l'a déjà transporté bien loin au pays des rêves. 


 

45-

Il est 5 heures du matin quand j'entends les petites pleurer pour leur biberon du matin. Je me lève doucement du lit où Miro dort encore et me glisse furtivement dans la chambre de maman.
« Ce sont de véritables horloges, ces petites. Pas besoin de réveil ! », me fat maman. « Comment s'est passée votre sortie ? »
« Euh ! Miro s'est endormi, donc j'ai dû l'installer dans mon lit. Les autres sont partis sans nous. », lui fais-je.
« Tu as laissé Pupuce sortir toute seule ? Oh ! Et elle n'est pas encore rentrée ? », me demande maman ;
« Apparemment, non. Mais t'inquiète, je suis sûre que nous pouvons lui faire confiance. »
« Ok ! L’essentiel c'est qu'elle s'amuse comme une fille de son âge. Voilà, le biberon de ces dames est prêt.
Nous donnons à manger aux petites qui ne tardent à se rendormir. J'installe tranquillement Ruby dans son berceau alors que Jade décide comme à son habitude de rester dans les bras de maman.
« Nous avons bien mangé, cette nuit. Les garçons étaient contents. », dis-je à maman.
« Je suis heureuse de l'entendre. Vous pouvez respirer maintenant que votre bac est en poche. L'atmosphère est plus agréable. Et bientôt, il n'y aura plus personne dans la maison pour mettre l'ambiance comme le font tes copines. Vous serez toutes éparpillées un peu partout. »
« Oh ! C'est que tu me chasses. Je ne sais pas encore où je vais atterrir, maman. Gaëlle ne s'envole pour Cape Town qu'au mois de décembre. Sharonna, elle s'en ira en janvier si tout va bien. »
« Oh ! Elle va finalement aux USA comme prévu ? »
« Non, son père a décidé de l'envoyer en Afrique du Sud, en attendant qu'il se remette à flot. Le départ de leur mère a mis un cran d'arrêt à ses grands projets pour elle. »
« C'est vraiment dommage ! Mais l'essentiel c'est qu'elle fasse les études qui lui plaisent.
« Comme tu dis. Au fait, sa mère est enceinte. »
« La mère de qui ? De qui parles-tu, Tania ? »
« Euh ! La mère de Sharonna est enceinte, maman. »
« Enceinte de qui ? »
« Euh, de Peter Malonga. Elle a annoncé la nouvelle hier à Sharonna. »
« Dieu ! A 50 ans ! C'est une blague ! Qu'ont-ils fait boire à cet enfant à sa naissance ? Comment fait-il pour être aussi fécond ? Il enceinte toutes les femmes qu'il touche !!! »
« Maman ! »
« Pardon, je préfère penser à autre chose ! Ce n'est pas possible. Je vais me recoucher. J'irai à la messe de 10 h aujourd'hui. Ce n'est pas possible ! Enceinte ! »
Je laisse maman se remettre du choc de cette nouvelle. Je me demande comment les grands frères de Sharonna accueilleront la nouvelle.
Je reviens dans ma chambre et trouve Miro éveillé, qui tient en main, un livre de Pupuce.
« Bonjour bel homme ! »
« Bonjour belle dame ! J'ai l'impression que quelqu'un m'a gardé prisonnier cette nuit ! »
« J'aurais fait plus si tu n'étais pas aussi fatigué, qui sait Tu te serais réveillé tout nu ce matin? »
« Oh ! Tu aurais pu faire de moi ton esclave sexuel que je n'aurais rien trouver à dire. Viens là », me fait-il en m'emprisonnant dans ses bras.
« Tu vas à New York, Miro ? »
« Pour quoi faire ?, me répond t-il intrigué.
« Non, rien. Rien. »
Il sourit et me dit :
« Il faut que je m'en aille. Je ne veux en aucun cas que ta mère pense que j'ai abusé de sa confiance. »
« Elle sait que t'as dormi dans mon lit. Je le lui ai dit. »
« Oh ! Dans ce cas, je me dépêche de m'en aller avant que ton frère ne pète un plomb. »
Il sort du lit et prend sa veste et ses chaussures en mains. Je l'accompagne jusqu'à sa voiture et il m'embrasse avant de s'installer au volant. Il baisse après avoir mis le contact et me lance :
« Au fait, fais ton sac. Je t'enlève pour la journée, pour la nuit et peut-être pour la vie, si tu veux bien de moi ! »
Il s'en va avant même que je n'ai le temps de lui poser des questions !
Je mets quoi dans ce sac ? Il m'emmène où ? Quand vais-je revenir chez moi ? C'est quoi ces plans ?
Je reviens dans la maison et vais dans la chambre pour me remettre les idées en ordre. Je n'arrive pas à penser sainement parce que le baiser de monsieur me reste là sur les lèvres. Je fais quels bagages et pourquoi. Je... Aïe ! Je viens de poser mes fesses sur le lit et sans m'en rendre compte, je me suis assise sur quelque chose. Je me lève pour voir ce que c'est et... SURPRISE.
« Euh ! Tu devrais peut-être l'ouvrir au lieu de rester là la bouche ouverte ! Tu vas finir par gober une mouche ! »
« Très drôle, Julien. C'est toi qui me fait cette blague ! », fais-je à mon frère qui se tient debout devant ma porte.
« J'ai un très grand sens de l'humour, tu le sais. Mais, je pense quand même que mes blagues valent un peu moins cher que le billet d'avion à l’intérieur de cette enveloppe. Et t'as vu la bague que ce type est capable de payer ! Pardon, il faut vraiment que je réussisse mes études supérieures. Je pourrais ainsi faire planer la future femme de ma vie ! »
« De quoi parles-tu, Julien ? »
« Arrête de poser des questions et ouvre donc cette enveloppe ! Bon, moi je sais déjà ce qu'il y a à l’intérieur. Ouvre au lieu de rester là à me regarder. »
Je m'exécute comme une automate.
Il y a une carte de vœux dans cette enveloppe A5. Il y est écrit : FÉLICITATIONS POUR CE BAC !
Il y comme l'a dit Julien, une réservation pour un billet Libreville/Paris/New York au nom de Akendengue Tania. Et avec ça, un écrin. J'ouvre et je me trouve en face d'une jolie petite bague. Il y a un mot qui accompagne le tout.
~mon cœur t'appartient pour la vie  .~

Je reste là à regarder tout ça. Et mon esprit semble complètement ailleurs, sur une autre planète.
« Tu as perdu ta langue, sister. Je comprends, le choc est trop fort, c'est ça ! Tu as du mal à imaginer la go du château d'eau de Port-Gentil, là-bas à New York. Je compatis à ton trouble ma chérie. Je compatis », me fait Julien avec son rire espiègle.
« Tu étais au courant ? Tu... »
« Y a quel problème ? Il m'a remis le truc hier. Il m'a un peu briffé et puis voilà ! Est-ce que y a quelque chose à discuter, là. Tu montes simplement dans l'avion et c'est tout ! »
« Oh ! Je...je... »
« Pardon Tania ne nous insulte pas. Y a pas à réfléchir, là. Qu'est-ce que tu ne comprends pas ? Prends une douche froide si tu en as besoin, mais s'il te plaît, fais-moi ces bagages et on n'en parle plus. N'oublie pas de me ramener tous les Dvds collector de Hip Hop que tu trouveras là-bas, ok. »
Comme je ne réagis toujours pas, Julien me secoue fermement et appelle maman à la rescousse :
« Bernadette, ta fille va tomber dans les vap' »
Maman sort rapidement de sa chambre et nous trouve là, dans ma chambre, moi toujours sans voix et Julien exaspéré.
« Que se passe t-il ? », demande t-elle.
« Il se passe qu'on emmène ta fille à New York. Madame veut rester à côté de toi pour sucer le sein. Il est temps de la sevrer, maman ! C'est pas possible. »
c'est quoi cette histoire. Montre-moi voir ça », fait-elle en m'arrachant des mains le papier que je tiens encore. « Oh ! Vous partez dans 3 semaines. Donc il était sérieux quand il me parlait de ses projets ! C'est quoi le problème Tania. »
« Rien, je suis juste émue. Je ne m'y attendais pas. C'est que... »
Et là, je me mets à pleurer. Je ne sais pas si c'est l'étonnement, la joie où l'incertitude qui l'emporte. Je pleure simplement.
« On t'offre un billet d'avion et ça te fait pleurer. J'ai raté un épisode ou quoi ? »
« Non, non ! Elle fait sa star, tu comprends, maman. Elle ne savait pas qu'elle tomberait sur un type qui serait tellement fou d'elle qu'il dépenserait tout son argent pour elle ! C'est tout. Et pour ta gouverne, mademoiselle ma sœur chérie, c'est l'argent de son job d’état de l'année dernière qui a payé ton billet d'avion et la bague. C'est comme ça chez les blancs, il paraît. Ici pour se marier, y'en a qui comptent sur les poches des autres. Lui, son père qui est pourtant riche l'oblige à travailler toutes les vacances depuis qu'il a 14 ans. Oh, rien de compliqué comme ici où on va décharger les camions chez les commerçants libanais. Non, il travaille dans l’entreprise de son oncle, quelque part à Dijon. Bref, plus j'en sais un max sur ce type, plus je l'apprécie. Vraiment ! »
Toujours avec le même sourire espiègle, Julien s'en va en sifflant. Maman m'assied alors sur le lit et me serre dans ses bras.
« C'est comment mademoiselle Akendengué. C'est bien la première fois que je te vois perdre tous tes moyens. »
« J'suis bête, n'est-ce pas ? »
« Non, c'est normal. Maintenant, prépare-toi. Je crois que quelqu'un doit venir te chercher, non ! »
« Parce que ça aussi vous l'avez comploté dans mon dos ! »
« Ma chérie, tant qu'il est poli et correct avec toi, je ne vois pas pourquoi je mettrais des barrières entre vous. Mais, dis-moi, il va être 7 heures. Où est ta sœur. »
« Je n'en ai aucune idée, maman. »
Je regarde de nouveau la réservation d'avion. Départ le lundi 31 août à 22h 35. retour le dimanche 20 décembre.
« C'est loin New York, maman ? Je sais pas ! Même quand je dis que je veux aller au Ghana je n’imagine même pas comment je vivrai sans toi. »
« ça s'appelle devenir adulte, ma chérie. Je serai toujours là. Tu ne dois pas t'empêcher de profiter de la vie. Et n'oublie pas que lorsque tu seras mariée, tu ne m’emmèneras pas dans tes bagages ! »
« ça fait tout drôle, tu sais. »
« Oui, j'imagine. Mais, s'il te plaît, garde la nouvelle pour toi. Tu le diras à tes copines et à ta sœur, quand tu auras ton visa la semaine prochaine. Pas avant, compris ? »
« D'accord, maman. D'accord. » 


 

46-

Maman me laisse et sort de la chambre. Je prends mon téléphone et compose le numéro de Miro.
« Mon cœur a failli lâcher. Vraiment merci pour la surprise, monsieur mon chéri ! »
« Je savais pas comment tu allais le prendre. Je veux pas te forcer la main. C'est juste que j'ai ce stage de trois moi là-bas. Et je ne m'imagine pas un instant partir sans toi. Tu vas bien, t'es sûre ! »
« Je t'aime, Miro. »
« Et moi, je suis dingue de toi. Notre avion décolle à 18 heures. Tu as rendez-vous à l’ambassade des USA mardi matin. »
« Tu as pensé à tout, n'est-ce pas ? »
« Oh ! Ton frère m'a grandement facilité la tâche, tu sais ! »

Il raccroche et je vais sous la douche. Je me mets à imaginer la tête que feront les filles en apprenant la nouvelle. Je me demande ce que dira mon cher papa. Et Kaba, comment réagira-t-elle. » Et je me mets à danser en chantant tout bas : je vais à New York, je vais à New York.
La vie ne peut pas être plus belle ! La fille du Kwat va voir la grosse pomme. Yo ! Qui donc a écrit mon histoire ! Vraiment, Dieu, tu es bon !
Il est 9 heures et je viens de passer la serpillière dans toute la maison. Les assiettes sont nettoyées, je peux me reposer un instant et regarder la télévision. Je ne me suis même pas rendu compte que Pupuce n'est toujours pas là. Mais cette fille-là est où ?
Au moment où je m'apprête à l'appeler, elle rentre dans le salon en souriant :
« Je vous apporte des croissants pour le petit-déjeuner. J'ai pas appelé pour ne pas vous embêter. Mais soyez sans crainte : Je n'ai pas fait de bêtises. Alors, tout va bien. »
Maman qui est devant la porte de la cuisine se contente de sourire.
« Tu t'es souvenue du chemin de la maison, Pupuce ? Comment a été ta nuit ? »
« Huummmm ! Tante Bernadette. Tu veux vraiment les détails ? »
« Oui, je suis curieuse. Où étais-tu ? Qu'as-tu fait ? Où as-tu dormi ? »
« Oh ! Je ne dirai pas que j'ai dormi. On a dansé jusqu'à 6 heures du mat'. Ensuite, mon sieur Patrick a voulu aller voir le coucher du soleil au bord de mer. Voilà qu'on y est allé. On avait beaucoup de choses à se raconter, alors, on a pas vu le temps passer. Il vous dit bonjour. Puis-je aller prendre une douche et embrasser les petites. »
Avant même d'avoir une réponse, elle s'en va. Maman se contente de sourire.
« Elle a bien changé, ta sœur ! »
« C'est le fait d'être loin de sa mère qui la rend plus cool ! Elle s’émancipe. »
Maman ajuste son foulard sur la tête et ne dit rien. Elle se prépare à partir à l'église. Son sac fin prêt elle se tourne vers moi et me dit :
« Au fait, j'allais oublier. Il faut que je prenne tes mesures avant de partir. Un instant, je reviens. »
Elle va dans sa chambre et en revient avec un ruban à mesurer. Elle me le met autour des épaules, de la taille, des bras. Elle prend la longueur de haut en bas. Je lui demande pourquoi.
Elle me répond :
« Oh ! C'est juste un cadeau que je compte te faire comme cadeau pour ta réussite. J'ai préféré attendre les résultats pour ne pas être présomptueuse. Tu verras, ça te plaira. »
« Ok, je te fais confiance. »
« Bisou ma chérie. Et surtout, arrête de réfléchir. D'accord. Prends les choses comme elles viennent. Ce type fera de toi une reine. »
« Hummm ! C'est la mère de quelqu'un qui parle ! », lui fais-je.
Elle s'en va en riant.
« On se voit à ton retour, la semaine prochaine. Et comme je te l'ai dit, motus et bouche cousue.
« Ok, c'est compris. »

Je vais dans la chambre voir comment vont les petites. Alors que je me penche dans le berceau où dans lequel dort Ruby et je lui murmure :
« C'est sûr ta sœur et toi vous irez à New York un jour. Vous ferez de brillantes études et surtout, vous rencontrez de beaux jeunes hommes qui n'auront d'yeux que pour vous. Vous êtes tellement jolies ! »
Pupuce qui m'a entendu ajoute :
« Oh ! Je ne doute pas que leur parcours sera différent du mien ! Surtout les filles, faites comme tata Tania et y aura pas de problème. »
« Pourquoi dis-tu cela, Pupuce ? »
« Parce que si elles se montrent aussi futées que toi, Tania Akendengué, elles ne rencontreront pas de Peter Malonga sur leur route ! »
« Oh ! C'est juste ça ! Mais n'oublie pas que de nous deux, c'est toi qui à toujours briller à l'école ! »
« Ouais, ça, heureusement que Dieu me l'a donné ! », conclut-elle en embrassant Jade qui dort pénard sur le lit de maman.
« Je vais me préparer. Miro vient bientôt me chercher. »
« Et où allez-vous ? »
« Oh ! Je sais pas trop. Il me fait une surprise. »
« Cool ! À tous les coups, tu vas encore vivre une aventure qui va nous faire pâlir de jalousie ! Il faut vraiment le faire, hein ! Vivre à côté de Tania Akendengué ! »
« Qu'est-ce que cela veut dire ? », lui fais-je.
« Oh, rien ! C'est juste que le soleil brille tellement au-dessus de ta tête que je me demande dans quelle eau tante Bernadette te lavait quand tu étais enfant ! »
« N'importe quoi, Marjorie Akendengué ! », lui fais-je en refermant la porte de la chambre de maman. »

J'enfile une jupe jean droite, qui m'arrive aux genoux. Au-dessus, j'ai une jolie chemise bleu ciel avec manche ¾ . Je vais dans la chambre de maman lui piquer un peu de parfum.
« Il me fait trop rire, ce Patrick », me fait Pupuce en arrivant du salon. « Il me dit carrément qu'il n'arrive pas à se passer de moi. Il arrive me chercher pour aller manger. J'ai appelé Sunita. On brosse un tour au Pétrolier ! Yes yes yes yes », chante t-elle en allant dans la chambre.
Je la laisse à son petit bonheur et vais embrasser les petites. Je prends mon sac à main et mon petit sac de voyage et je sors de la maison. Devant le portail, Julien discute avec Miro qui est au volant de sa voiture.
« Bon, on se voit la semaine prochaine, sister. Amusez-vous bien. », nous lance t-il avant de refermer le portail.
« Où va t-on », fait à Miro.
« Tu vas d'abord déposer tes affaires à la maison. Ensuite, nous allons manger au Club SOGARA. Ça te va ? Ensuite, une sieste car j'ai la tête encore lourde à cause du cocktail auquel mon père m'a traîné hier soir. »
« Ok ! Ça me va. »

Après le déjeuner au club, nous nous retrouvons tous les deux dans sa chambre.
« Où sont tes parents ? »
« Oh ! Monsieur mon père est sûrement à une partie de golf. Ma mère est avec des copines. Une fois par mois, elles sillonnent les quartiers de la ville pour offrir des vêtements et de la nourriture aux nécessiteux. »
« Oh, c'est cool ce genre d'initiative ! », lui fais-je.
« Oui, elles peinent parfois à recevoir des dons, mais ça va. Enfin, elles sont contentes. Viens là ! Sers-moi fort. »
Je m’approche de lui et l'accueille dans mes bras. Il me murmure dans l'oreille :
« parfois je me réveille et je me rendors en me disant que tu n'es pas réelle ! »
« Et moi alors ! Qu'est-ce que je dirais ! Tu me fais le même effet ! »
« Si on m'avait dit qu'une petite Gabonaise prendrait mon cœur en otage, j'en aurais ri. »
« Et pourquoi ? »
« Oh ! Ma mère a toujours tout fait pour que j'évite les filles black. »
« Et pourquoi ça ? »
« Je n'en ai aucune idée ! Elle a ses raisons. Du coup, je ne suis sortie qu'avec des petites blanches de bonne famille très smart, mais vachement dévergondée en privé ! »
« Je vois ! Et qu'est-ce qui t'a attiré chez la petite Gabonaise qui a pris ton cœur en otage ! »
« Tes yeux ! Il y a quelque chose d'hypnotique dans ton regard Tania. On a forcément envie de te connaître. Et tu faisais tellement la fière dans cette boîte de nuit, ce jour-là, que je me suis mis au défi de te faire mienne. »
« Tu racontes tellement bien ! On dirait un film. Et si on passait aux choses sérieuses ! », fais-je en lui enlevant son polo.
L'on s'embrasse langoureusement. Il me débarrasse très vite de na chemise et de ma jupe. Je me retrouve là, en string et en soutien-gorge. Dieu ! Je suis obligée de me répéter mentalement : ça ira, respire, ça ira.
Il me lève de terre et me conduit dans la salle de bains. Arrivé là, il met le jet de douche en route et en même temps, le robinet de la baignoire.
« Viens, approche. », me fait-il en me tendant la main. »
L'on s'embrasse de nouveau ! Et je perds d'un coup tout encrage avec la réalité. 


 

47-

Sa bouche fait des merveilles sur mon corps et je n'ai pas envie qu'il s'arrête. Comme c'est bon. Il dégrafe mon soutien-gorge et les seins les plus sauvages de la planète, sont libérés. Je sens comme une gêne alors, je veux me blottir contre lui pour mieux contrôler mes impulsions. Mais, il me garde à distance en me murmurant :
« Laisse-moi t'admirer ! »
Je ne saurais dire comment nous nous retrouvons follement enlacés sous un jet d'eau tiède.
« Tu me rends dingue, Tania Akendengué. J'ai rêvé de ce moment pendant des mois. »
« Je dois craindre le pire alors ! », lui fais-je avec un sourire crispé.
« Je ne te ferai pas de mal. Je t'aime, si tu savais. »
« Moi, dix fois plus. »
Hummmm ! J'essaie de faire la fière, mais au fond, je tremble comme une feuille.
« On ira à ton rythme », me murmure-t-il.
Ouais ! C'est beau de s'embrasser ; ça fait du bien de se sentir désirer. Mais, suis-je prête à sauter le pas ?
Je frissonne malgré la douceur de l'eau sur mon corps.
« Viens », me fait-il en arrêtant l'eau. Il m'enveloppe dans un drap de bain tout doux et me mène jusque dans la chambre. Là, couché sur le lit, il entreprend de m'embrasser sur tout le corps. Ensuite, il se redresse et me dit :
« Te souviens-tu de ce que je t'ai dit la première fois que je t'ai embrassée ? »
« Oh ! Je ne m'en souviens pas. Laisse-moi chercher. Non, je ne m'en souviens plus. »
« Je t'ai dit que tu serais ma femme ; et tu es partie dans un grand éclat de rire. »
« Ouais, maintenant je m'en souviens. J'ai juste pensé que tu étais un peu fou ! »
« Tu veux dire que ton charme opérait déjà sur moi, oui ! »
« Et on dira que c'est de ma faute si monsieur est raide dingue ! »
« Je t'aime, Tania Akendengué. »
Alors qu'il dit cela et emprisonne ma bouche par un baiser fougueux, un de ses doigts est déjà parti à la recherche de l'entrée de mon jardin secret. Là, je me dis : respire, Tania, respire. Oh ! Si je pouvais garder les yeux fermés le temps que ça passe. Je n'arrive même pas à décrire la sensation que je ressens au moment où son sexe se met à forcer l'entrée de mon vagin.
« Mords-moi si tu as à mal. Tu peux même m'arracher les cheveux. »
Et voilà comment j'en arrive à hurler tout mon saoul parce que même si Gaëlle et Jileska m'avaient raconté « LE TRUC » en me disant que j'aurai M.A.L, j'ai juste envie d'étrangler le type qui me tient dans ses bras au moment où je perds toute mon innocence. Un flot de larmes s'échappe de mes yeux et je me mets à taper très fort sur le dos de Miro. Mes ongles ont beau griffer très fort, il ne s'arrête pas et me tient serrée dans ses bras.
Bientôt tout s'arrête et je n'ai ni envie de lui parler ni envie de bouger du lit.
Alors que je veux me recroqueviller dans un coin du lit, je vois cette immense tache de sang sur les draps. Et je me mets à hurler :
« T'es qu'une brute. Je te déteste. »
« Viens », me fait-il sans se démonter. « Viens dans mes bras. »
Je m’exécute malgré moi. J'aimerais être ailleurs. J'aimerais avoir moins mal. J'aimerais...
« Ça ira, beauté. La prochaine fois, tu n'auras pas mal. »
« Ah bon ! Parce qu'il y aura une prochaine fois. », fais-je en pleurant.
Là, il sourit et entreprend de m'essuyer les larmes à l'aide de baisers.
Un quart d'heure plus tard, il me lève du lit et me soulève pour aller me déposer délicatement dans la baignoire toute pleine de mousse. Ce bain fait du bien à ma peau et je finis par me calmer alors que lui est sous la douche.
Je fais un petit exercice mental pour me relaxer et laisser passer la tension que je ressens au niveau des jambes. Si seulement je pouvais m'endormir dans cette baignoire ! Je m'y sens tellement en sécurité !
Je ne me rends même pas compte que Miro est sorti. Il revient avec un verre d'eau et m'invite à boire.
« Tu es la plus belle chose qui me soit arrivé, Tania Akendengué. »
Je le toise et me contente de fermer les yeux.
« Hors de question que je sorte de ce bain. », lui fais-je.
« Oh ! Dans ce cas, je vais dans la cuisine chercher les provisions dont tu auras besoin si tu comptes hiberner ici ! »
« Très drôle ! Je bouge pas. Je suis fatiguée, j'ai sommeil, et je veux plus te voir. »
« Tu vas devoir me supporter, parce que je n'irai nulle part sans toi. », me fait-il en posant un baiser sur mon front.
Il me laisse là, et je l'entends s'affairer dans la chambre en sifflotant. Je reste dans l'eau sans bouger. J'aimerais bien mettre un doigt là, dans mon vagin pour voir ce qui a changé, mais je préfère ignorer la partie de mon corps qui commence au-dessous de la ceinture. Et je me mets à espérer que je vais OUBLIER ce moment.
Je me lève et laisse disparaître cette eau qui me gardait doucement. Je me rince et tire un drap de bain dans lequel je m'enroule. Je mets devant le miroir et me regarde en profondeur en me demandant ce qui a changé. Suis-je toujours la même ! Je regarde et ne vois que mes yeux fatigués d'avoir supporté la douleur. Alors, je décide d'arrêter là cet exercice et reste plantée comme un arbre face à la porte qui mène à la chambre de Miro.
Il arrive et me trouve là, silencieuse.
« Viens avec moi. » , me fait-il en m’entraînant dans la chambre.
Quand on arrive là, je vois que monsieur a refait le lit et que là, est posée une robe de chez robe. Elle est colorée avec de belles fleurs de partout. C'est du Desigual tout craché ! Je m'exclame aussitôt :
« Mon Dieu, qu'elle est belle. »
« Pour la plus belle des femmes. Je suis sûr qu'elle tira. Pupuce m'a dit que tu portes du 38. »
« J'en reviens pas ! T'as vu comme elle est belle ! Où l'as-tu acheté. »
« Oh, ma sœur me l'a envoyé des USA. C'est elle la reine du shopping dans la famille. Enfin, quand ma grand-mère est en vacances, quoi. »
« Tu sais vraiment y faire pour m'avoir. »
« Et toi, tu as tout pour me rendre dingue. Souviens-toi toujours que je t'aime. »
Je souris et entreprends d'essayer ma robe.
« Elle est trop belle ! »
« Cela veut dire que j'ai du goût car elle m'a tout de suite plût quand ma sœur m'a envoyé les photos par WhatsApp. »
« Merci. », fais-je en l'embrassant.

Samba nous dépose une heure plus tard à l'aéroport. Là, dans la salle de départ, je repose ma tête sur les épaules de mon amoureux et le monde s'efface autour de moi. C'est comme s'il n’y avait plus que lui et moi. J'ai l'impression que je pourrais le suivre au bout du monde sans jamais avoir de crainte. C'est sûrement ça l'amour.
Avant d’arrêter mon téléphone après l'embarquement, j'envoie un message à maman et à papa. Puis, un autre aux filles pour leur souhaiter une bonne soirée. Ensuite, j'éteins mon téléphone avec l'intention de rester injoignable jusqu'à ce que je n'en puisse plus de mourir d'amour pour Miro. Je m'endors la tête posée sur son épaule.

Quand nous arrivons, la nuit est déjà tombée sur Libreville. Un coursier nous attend à l'aéroport et tend à Miro les clés d'un véhicule garé sur le parking VIP. Il s'agit d'une Toyota Prado. Tout pour que je me sente à l'aise et puisse me reposer pendant le trajet jusqu’à l’hôtel. Nous descendons à la Résidence Nomad. Le confort y est de haut standing et j'ai vraiment l'impression de vivre une vie de princesse.
Alors, je me tourne vers Miro et lui dis :
« Tu me diras quand atterrir, n’est-ce pas ? »
Il me répond en souriant :
« Tu n'es pas en train de planer, chérie. Tu es dans la réalité. »
Je fais le tour de cette studette que nous occupons ; c'est vraiment très chic. Il y a de quoi y rester enfermer des jours sans voir le dehors.
« As-tu faim ? », me demande Miro. « Veux-tu que nous allions manger quelque part. »
« Je connais pas très bien Libreville. Alors, je te suis. Je veux juste une pizza et de la glace. »
« Ok ! Allons au Rivoli, c'est juste à côté. Mais, je te laisse appeler tes parents, avant. »
Je prends le téléphone pour appeler maman et lui dire que je suis bien arrivée à Libreville. La bonne dame me répond :
« Tu n'as pas besoin d'appeler toutes les heures, ok. Je sais que tu vas bien. »
Yo !!!
J'appelle ensuite mon père. Il me répond :
« Amuse-toi bien, ma chérie. Et arrête de réfléchir. »
Ok !!! Je crois que je vais arrêter mon téléphone une bonne fois. Juste le temps d'envoyer un message à Jileska, Gaëlle, Sharonna et Marc-Elise : « me cherchez surtout pas. J'suis à Lbv. Des bisous sucrés. »


 


48-

Nous sommes assis au Rivoli et mes yeux ont du mal à regarder autre chose que le visage en face de moi.
« Tu es sûr que tu as faim ! J'ai l'impression que c'est plutôt moi que tu es en train de manger du regard. »
Je souris.
« Je me demande juste ce que tu ne m'as pas encore dis. », fais-je très espiègle.
« Oh ! Tu veux savoir quel est mon plus grand secret. J'en ai plusieurs. Par lequel commencer ? »
« Arrête de te moquer. Dis-moi un truc que je ne sais pas sur ta famille. Quelque chose que je devrais savoir. »
Avec le plus grand sérieux, il me regarde et hésitant, il me confie :
« Mon oncle Angelo, le frère cadet de mon père, est gay. »
« Oh ! », fais-je manquant de m'étouffer avec une gorgée d'eau. « Tu veux dire que ton oncle...qu'il...euh ! »
« Il aime les hommes, chérie. Je ne sais pas comment tu pourras t'accommoder avec cette situation, mais il va falloir faire un petit effort, car nous allons le rencontrer avec son mari pendant notre séjour à New York. »
« Oh ! Tu veux dire que je vais avoir devant moi deux hommes susceptibles de s'embrasser et tout ??? Euh...je...Tu sais, je sais pas si...ouais, c'est plus qu'un petit effort que je vais devoir faire ! C'est une blague ou ton oncle existe vraiment ? »
« Il existe vraiment, Tania. Il est super génial, mais il est gay. Et on n’y peut rien. »
« Comme tu dis ! On n’y peut rien. Je...je... »
« Parle, je t'écoute. »
« C'est juste que je ne m'attendais pas à ce genre de révélation. Donc ton oncle embrasse d'autres hommes et ils vont ensemble au lit et tout le reste !!! »
« Tania, as-tu un souci avec cela ? Dis-le moi, que je le sache ! »
« Euh !!! Je dois dire que je suis un peu sonnée ! Je...je vais devoir m'habituer à cette idée. J'ai déjà vu des homos, t'inquiète ; mais jamais encore je n'en ai côtoyé. Ça fait tout drôle quand même ! Ça t'a pas surpris la première fois ? »
« C'est mon oncle. Il est né 28 ans avant moi. Donc, il était déjà gay quand je suis arrivé au monde. Et non, ça ne me choque pas. »
« C'est fort quand même. Mais bon, euh... »
« Respire, chérie ! J'ai peur que tu finisses par manquer d'air. Il ne te mordra pas. »
« Ouais ! », fais-je le regard en l'air. « Donc lui, il joue le rôle de la femme, c'est ça ? Ça marche vraiment comme ça pour eux. »
« Changeons de sujet, car je vois bien que tu es mal à l'aise. On en discutera plus tard. Je ne t'imposerai pas sa présence si vraiment, ça doit te rendre malade. »
Je le regarde sans rien dire. Je ne sais que penser, d'ailleurs. Mais bon, il va bien falloir que je rencontre cet oncle si je dois faire ma vie avec Miro.
J'avale une part de pizza pour m’ôter de la tête les images qui y défilent. Miro rompt le silence en me demandant :
« Dis pourquoi as-tu un passeport alors que jamais tu n'as voyagé ? »
« Oh ! Je l'ai fait comme ça pour décorer mon portefeuille ! », fais-je en souriant. « J'rigole ! C'est maman qui prévoyait un séjour au Cameroun avec son groupe de prière de l'église. Au final, elle a dû renoncer à son voyage parce que je suis tombée malade à quelques jours du départ. Voilà ! »
« Ok ! Maintenant, raconte-moi un truc que je ne sais pas de toi. Je t'écoute. »
« Euh...je...je sais pas moi. J'ai rien de particulier à raconter. Ma vie est vraiment banale, tu sais. J'ai toujours vécu avec ma mère. Et voilà ! »
« Fais un effort, tu trouveras bien. »
Là, je cherche. Et je finis par lui dire :
« Mon père est un alcoolique repenti. Quand j'étais à la maternelle, je pleurais beaucoup parce qu'il avait des accès de colère chaque fois qu'il avait bu. Je devais à chaque fois le supplier à genoux pour qu'il ne me crie pas dessus. J'avais 4 ou 5 ans à l'époque. Il faisait des promesses que jamais il ne tenait. Ce n'est que lorsque je suis arrivée en CE2 qu'il s'est résolu à aider financièrement ma mère et à payer pour ma scolarité. Ça été des périodes difficiles parce qu'il lui arrivait de boire au point d'en oublier mon prénom ! »
« Oh ! Jamais je n'aurais imaginé que tu es passé par des moments aussi difficiles ! Je suis désolé si je t'ai rappelé de mauvais souvenirs ! »
« Ça va,», fais-je le regard vague. « J'ai grandi. »
« Ok. Maintenant, dis-moi comment tu imagines notre mariage. »
« Oh ! Je ne savais pas que j'avais dit oui ? Il ne me semble pas avoir entendu de proposition. »
« Bien, disons que tu as déjà dit oui. Où se mariera t-on et comment ? »
« Les pieds dans l'eau, au bord de mer à Port-Gentil. Avec toutes mes copines vêtues de robe couleur écrue ; et mes nièces en demoiselles d'honneur. »
« C'est gentil de vouloir me faire faire des économies, mais je crois qu'une fois que tu auras voyagé, tu auras envie de te marier les pieds dans l'eau à Port-Louis, à Zanzibar, ou à Cape Town, ma chérie. »
« Je suis nulle en géographie, Miro, donc disons qu'on se mariera quelque part les pieds dans l'eau. »
« Ok, ma belle. Mange ; ta pizza va refroidir. »
J'avale encore deux parts de pizzas et ma glace au café. Puis nous levons le camp.

Dans la voiture je lui demande :
« Que ferai-je de mes journées pendant que monsieur sera occupé à travailler ? »
« Oh ! T'as même pas besoin de poser la question. Tu vas très vite trouver à t’occuper. Imagine-toi Port-Gentil en 100000 fois plus plus magique et tu comprendras pourquoi tout le monde rêve d'aller New York. T'as vraiment pas de soucis à te faire. Il y a autant de salles de cinémas là-bas qu'il y a de bars et de maquis à POG. Et puis, il y aura ma sœur avec toi. Elle va se charger de te faire découvrir tout ce qu'il y a de beau là-bas. »
« Je vois que monsieur a pensé à tout », fais-je en souriant.
« Que ne ferais-je pas pour toi, Tania ! », me rétorque t-il.
Nous continuons la route en silence. La ville est belle cette nuit. Les axes principaux sont déjà décorés aux fanions vert-jaune-bleu, à l'approche du 55ème anniversaire de l'indépendance du pays.
« Tu m'aideras à choisir un cadeau pour ma mère. C'est son anniversaire mardi prochain. », fait Miro.
« Oh ! Celui de ma mère c'est 10 jours après. Elle est née le 27 août. »
« Ok ! Alors je te laisse la charge de trouver des cadeaux pour les deux. Je sature en termes d'idée ! », me dit il.
C'est sûr ! Sa mère doit déjà tout avoir.
« Et que veux-tu faire de spécial pour ta mère ? », me demande t-il.
« C'est quelqu'un de très humble. Elle n'aime pas trop ce qui superflu. Donc, je pense qu'un massage et des soins de beauté lui feront plaisir. »
Il se contente de sourire et ne dit rien.
Quand nous arrivons à l’hôtel, nous prenons des cartes de recharge pour nos phones et montons dans notre chambre. Pendant qu'il tente de joindre son père, je me couche sur le lit, les yeux vers le plafond. Je l'entends qui demande des nouvelles de ses amis Patrick et Alec. Apparemment, le père lui dit qu'il n'a pas à s'en faire pour eux, car ils se sont très vite acclimatés au pays.
Il raccroche et vient vers moi. Il me prend par le bras et m’entraîne dans une danse lente, avec le silence autour de nous comme musique. Il finit par m'embrasser sur le front, le nez, la joue. Je me sens bien là. Quand il emprisonne mes lèvres dans un long baiser, j'aimerais que le temps se fige maintenant et que demain ne vienne pas tout de suite.
« Nous allons jouer à un jeu. »
« Et en quoi consiste ton jeu. », lui dis-je.
« Je vais embrasser chaque parcelle de peau de ton corps pour deviner quels en sont les points les plus érogènes. Et interdiction de m'arrêter. Ensuite ce sera ton tour. »
« C'est de la triche ; j'ai bien droit à un joker, non ! »
« Oui, juste un ! Viens là. »
Il me lève de terre et me dépose délicatement sur le lit. Il commence sa prospection sur mon corps, me déshabillant au passage. Et je sais que pour moi, c'est peine perdue, sitôt qu'il pose ses lèvres dans mon cou, puis sur l'un de mes seins.
La nuit défile lentement et nous en arrivons à faire l'amour. Je suis pleine d'appréhension, mais monsieur parvient à calmer mon angoisse en se montrant très tendre et surtout patient.

Le matin venu, nous allons prendre le petit déjeuner à La Librevilloise ensuite, il m'emmène faire des photos d'identité. Puis, nous atterrissons dans un prêt-à-porter appartenant à une amie de sa mère.
« Elle ne connaît pas mal de monde, ta mère ! », lui fais-je.
« Elle entretient très bien son carnet d'adresses. », me répond-il.
Nous entrons et l'une des vendeuses se jette littéralement sur nous, sitôt qu'elle voit Miro.
« Vous désirez, monsieur, madame ? »
Elle a dû se dire que c'est un client à ne pas négliger ! Elles savent y faire dans ce magasin.
« J'attends à la caisse. Je ne fais qu'accompagner ma fiancée. », répond Miro.
Je le regarde histoire de savoir ce que je suis censé acheter.
« Il te faut des robes de soirée. Nous sommes invités à dîner demain chez un couple d'amis de mes parents. Et pour l'anniversaire de ma mère la semaine prochaine, il y aura un dîner. Tu vois le genre ! »
« Ok ! », fais-je peu convaincue.
Je suis la vendeuse qui m'emmène dans un coin où les robes sont plus chères les unes que les autres. J'ai mal à la tête tellement il y a du choix. Puis, nous passons aux chaussures. Ensuite, elle me propose de choisir un parfum et une pochette pour accompagner les robes.
Quand nous revenons à la caisse, je préfère me boucher les oreilles pour ne pas entendre le montant de la facture.
« Allons dans une bijouterie chercher un bijou pour ta mère. », me lance Miro.
Wèèèèèèèè ! Je suis seulement le mouvement.

Il est 14 heures quand nous rentrons à l’hôtel.
Dans la chambre, Miro me demande :
« J'ai remarqué que tu ne portes pas ta bague. Celle que je t'ai achetée il y a tout juste 4 jours. »
« C'est que personne ne me l'a mise au doigt, alors j'ai pensé qu'elle était juste là pour décorer », lui fais-je en souriant.
Il se lève alors du canapé dans lequel il s'était affalé et me demande où se trouve la bague. Je fouille mon sac de voyage et en sors l'écrin rouge en forme de cœur dans lequel se trouve la bague. Avec le plus grand sérieux, il pose un genou par terre et me prend la main.
« Mademoiselle Tania Akendengue, tu seras ma femme avant même de t'en rendre compte. », dit-il avec beaucoup d'assurance.
Là, il me glisse la bague au doigt et me baise la main. 


 

49-
~~~Pendant ce temps à Port-Gentil, mardi soir, 19h 30 chez la mère de Tania~~~

Comme je suis heureuse. Tania vient de m'appeler de Libreville ; elle a obtenu son visa pour les USA. Je peux enfin respirer. Je lève les mains au ciel et m'écrie :
« Merci mon Dieu. Tu es grand ! »
Le sourire angélique de la petite Jade me ramène sur terre. La pauvre petite doit sûrement se dire que sa mamie Bernadette a perdu la boule !
Non, tout va bien pour moi, ma tête aussi. C'est juste que la pression que je me suis mise est quelque peu retombée. Encore quelques nuits à prier fermement et à la fin du mois, ma fille sera dans l'avion pour le USA. Je pourrai alors mieux me reposer.
C'est que depuis le jour où Dieu m'a permis le bonheur d'avoir cette enfant, ma vie n'a tourné qu'autour d'elle. Je suis heureuse d'avoir réussi la part des choses en l'emmenant jusqu’à la réussite de son baccalauréat. Et dans quelques jours, elle sera fiancée. Qu'est-ce qu'une maman pourrait demander de plus ?
Je suis là en train de repenser au passé quand Pupuce arrive en trombe.
« Hey ! Qu'est-ce qui t'arrive ? Où vas-tu en courant ainsi ? », lui fais-je.
« Je viens juste changer de paire de chaussures. Les autres m'attendent dans la voiture. »
« C'est maintenant comme ça, Pupuce ? Tu rentres et tu n'embrasses plus tes filles ? »
« Je suis pressée tante Bernadette. », répond-elle en envoyant des baisers à la volée aux jumelles.
Je préfère ne rien dire, me contentant de la regarder partir. Depuis dimanche, j'ai dû la voir deux heures à la maison. Elle rentre quand je dors et elle sort quand j'ai la tête ailleurs. C'est en coup de vent qu'elle me fait savoir qu'effectivement, elle vit encore dans cette maison. Je me demande ce que tout cela va donner. Je préfère ne pas parler, car elle risque à nouveau de se refermer comme une huître. En la motivant et en l'aidant à reprendre de l'estime de soi, je ne savais pas qu'on en arriverait à ce niveau !
C'est à peine si elle n'a pas oublié comment je m'appelle ! Bref, les petites sont désormais à ma charge. Je suppose que c'est ainsi quand on est grand-mère. J'ai la chance que les petites ne pleurent pas trop. Heureusement que Julien est là chaque nuit.
J'ose quand même me demander ce qu'il adviendra de Pupuce une fois que ce jeune homme sera reparti dans son pays. Elle sait qu'il est là pour ses congés. Elle m'a semblé avoir assez de bon sens lorsque nous avons discuté ensemble. Je prie que leurs au revoir se passent bien.

Je suis là dans mes divagations quand Jileska arrive.
« Bonjour tantine Bernadette ! On dit quoi ? »
« C'est à toi que je dois poser la question. Tu sembles de très bonne humeur. »
« Oh ! Moi ça va. Depuis que j'ai eu ce bac-là, je respire. », répond-elle.
« Ok. Et que comptes-tu faire maintenant ? Tu vas à Masuku ? »
« Jamais ! Y a pas d'avenir là-bas. Je compte aller me chercher du côté de Libreville quitte à changer de voie et faire de la comptabilité à l’Institut de Gestion, pour ne pas subir une année blanche. »
« Bien ! Je suis heureuse que tu aies des pistes. Et Sunita ? », lui fais-je.
« Oh ! Je pense que c'est la faculté de Lettres de l'UOB qui l'attend. Mais pour l'instant, il y a autre chose qui l’intéresse plus. »
« Je vois. », lui fais-je avant de lui proposer à boire.
« Oh, laisse tantine. Je vais aller chercher mon verre d'eau moi-même. Faut pas que ces deux petites disent que je suis venue embêter leur grand-mère. »
Elle se lève du fauteuil dans lequel elle est assise et va chercher un verre et une bouteille d'eau dans la cuisine. Elle boit deux verres et me lance.
« Tantine, n'est-ce pas Pupuce vit maintenant ici, non ? »
« Euh, oui. Pourquoi ? »
« Non, sinon je n'aime pas parler des histoires des autres, mais c'est quand même une bonne chose qu'elle habite ici. »
« Pourquoi dis-tu cela, Jileska ? »
« Ah ! Je...bon en fait, je voulais juste que tu dises à Pupuce que si elle fait bien les choses, tout le monde aura pour lui. »
Je la regarde intriguée, ne sachant pas où elle veut en venir. Et elle comprend que je suis perdue.
« En fait, tu vas redresser Pupuce, parce qu’elle a trop la bouche tordue. », me fait-elle.
« Comment ça ? Que veux-tu dire ? », lui fais-je.
« Ah, je n'aime pas trop parler des choses des autres moi-même j'ai des problèmes sans solutions, mais quand même il faut que je te dise. Hier, j'étais dans la cuisine. Sunita et Pupuce étaient dans le salon en train de se maquiller pour sortir. Elles racontaient aussi. Ce n'est pas bon la manière dont Pupuce parle de Tania. Quand on aime sa sœur, on ne parle pas comme ça. J'ai failli la baffer grave. Elle ose carrément dire que Tania suit Miro à cause de son argent. Elle dit que s'il n'était pas le fils d'un DG, sa sœur n'allait pas le regarder ! »
« Elle a dit ça ? », fais-je vraiment surprise.
« Elle a dit ça et beaucoup d'autres mauvaises choses. Elle parle mal ! Ce n'est pas bon. Chacun a son moment dans la vie. Moi-même j'étais là quand Tania a commencé avec Miro. On est resté là dans le flou pendant 3 mois. Le type nous sortait sous le soleil ou sous la pluie, dans les taxis que tu vois là. Quand on collait le wagon avec Tania, c'était là au Copa Cabana que le gars l'invitait manger les brochettes. On était que debout debout avec lui. Il mangeait le tchèp là avec nous là au grand-village là ! C'est quand il a vu que la fille de Bernadette tenait la route et que c'est une vraie go, qu'il nous a montré la réalité. Quand il est venu la première fois avec son chauffeur, la chercher pour l'emmener chez lui pour manger avec ses parents, on était là Sharonna, Gaëlle et moi ; on a ri en disant qu'il avait peut-être volé cette voiture. Pourquoi ? Parce que le gars s'habillait en destroy et puis qu'il mangeait le pain aux haricots avec nous et buvait le djino avec nous, là debout chez le malien. Maintenant, la petite go de la cité rose là, vient se mettre dans une situation de concurrence avec sa sœur !!! »
« C'est vrai ce que tu me dis là !? », fais-je étonner.
« Hummm ! Pardon, je ne veux pas trop parler, oh ! Mais la fille de Mr Mbeng dit qu'elle va montrer qu’elle aussi elle peut ! Mais qui a dit qu'elle ne peut pas ? », fait Jileska au comble de l'incrédulité. « Je ne vais pas tarder avec elle si elle continue. Je la démarre si elle dit encore des conneries ! C'est comme ça que le vampire commence. »
« Ah, c'est vous-même là-bas. Tout ce que je fais aujourd'hui, je le fais en espérant que chacun réussira tranquillement. Elle rentre, elle sort, je m’occupe des enfants, parce que je me dis que cela lui donne la chance de vivre une aventure heureuse. Si ça peut lui ouvrir les portes du bonheur, tant mieux. Ce que je veux qu'elle comprenne et cela je le lui répète tout le temps, c'est qu'il n'y a pas de fatalité. Ce n'est pas parce qu'elle a eu une expérience malheureuse avec Peter que la vie s'arrête. Je lui ai demandé de garder l'esprit positif parce qu'il le faut pour avancer. J'espère qu'elle m'écoute, parce que tous les conseils que je lui donne sont les mêmes que je donnais à Tania. »
« Ah ! J'espère que ça ira. Je n'aime pas le son de sa voix quand elle commence à se plaindre et dire que sa chance a été détournée... », fait Jileska avant de se rattraper très vite en mettant la main devant la bouche comme si elle regrettait d'avoir trop parlé.
« Que viens-tu de dire Jileska ! Qu'a t-elle dit. »
« Oh, tantine Bernadette ! je...je...Je n'ai rien dit, pardon. »
« Parle, je t'écoute. Qu'a dit Pupuce ? », fais-je en insistant.
« En fait, j'ai voulu la baffer parce que je l'ai entendu dire à Sunita que sa chance a été détournée quand elle était enfant. »
« QU'EST-CE QUE TU ME RACONTES LA !? », fais-je survoltée.
« Ah ! Gaëlle dit toujours qu'il faut que j'apprenne à fermer ma bouche ! Je comprends pourquoi. », fait-elle.
« Excuse-moi d'avoir crier. Je ne m'attendais pas à entendre ce genre de chose. Ça prouve bien que cette fille-là est sotte. Comment peut-on raconter ce genre de bêtises. Sa chance a été détournée par qui ? »
« Ah, elle dit que c'est la grand-mère qui a détourné sa chance quand elles étaient petites pour la donner à Tania. Elle dit que c'est pour ça que Tania a toujours été la préférée de tout le monde dans la famille. »
« Tania est la préférée de tout le monde parce que je l'ai bien élevée et qu'elle écoute quand on lui parle. Je n'ai jamais entendu des bêtises pareilles. Je te donne l'autorisation de la baffer la prochaine fois qu'elle racontera ce genre de chose. Ça lui donnera un peu de bon sens. »
« Sinon, je ne vais rien dire à Tania. Je ne veux pas gâcher l'affaire entre les deux sœurs, oh ! »
« Je ne lui dirai rien non plus. Je prie tous les soirs pour que la fin de ce mois arrive et que Pupuce prenne tranquillement son avion pour la France. Au moins, on aura réussi quelque chose en la soutenant et en la supportant pendant cette année scolaire. »
« Bien, je vais un peu rester pour discuter avec ces deux petites là. De toute manière, je n'ai rien d’intéressant à faire avec ma vie ! », fait-elle en prenant Ruby dans les bras.
« Tu réussiras dans la vie Jileska. Et tu sais pourquoi ? », lui fais-je.
« Euh, pourquoi ? », demande-t-elle. Sceptique.
« Parce que tu arrives à prendre du recul et à rire de toi-même. C'est bien de pouvoir à chaque fois se remettre en question. Ça veut dire que ton cœur est bon. Dieu t'ouvrira les portes. », lui dis-je.
« Pardon, qu'Il les ouvre bien grand parce que là, je me trouve dans une souricière. », conclut-elle.
Cette fille et son sens de l'humour ! Elle a toujours le mot et l'attitude pour faire rire ! 


 

50-

~~~Pendant ce temps à Port-Gentil, mercredi après-midi, 15h 30 dans un magasin au carrefour Banco.~~~

Quand Miro m'a appelée hier soir à 20 heures, j'ai cru qu'il me faisait une bonne blague en m'annonçant que je devais prendre en charge la décoration de la grande salle de l’hôtel Le Méridien. Il fallait l'entendre au téléphone : Gaëlle, tu ne peux pas dire non ! Allez !

Voilà comment, je me retrouve embarquée dans le secret des préparatifs de la fête surprise que monsieur a décidé pour sa belle. Pour leurs fiançailles. Heureusement que cette fille est la copine de mon cœur ! Parce que là, j'ai quand même la pression. Il faut que tout soit beau, tout droit sorti d'un rêve, comme ma chère Tania l'a toujours décrit.
« Vraiment, y a que la fille de Magloire Akendengué pour nous faire tourner comme ça. Les autres auraient seulement dit blanc, rouge ou bleu ! Non, miss Tania vient nous sortir ECRU et LIS DE VIN. Je sais que c'est quoi la différence entre blanc cassé et champagne ? », me fait Sharonna alors que l'on tourne depuis trois quart d'heures dans le magasin.
« Mais c'est toi la future ingénieur en pétrochimie. Les couleurs, ça ne devrait pas te dépasser ! », lui fais-je
« Gaëlle, je te signale que moi je suis une scientifique par défaut. C'est Tania et toi qui étiez chaudes pour la série scientifique. Si mr Nguema n'était pas mon père, autrement, je ferais du Slam tranquillement ! Et j'écrirais des livres pour les enfants. »
« Tu peux devenir ingénieur, faire du théâtre et écrire des livres pour les enfants, Sharonna. De nous toutes, tu as toujours été la plus brillante. »
« Mais pas la plus futée, apparemment. C'est quoi écru ? Je me perds là. C'est du beige, du kaki ou du champagne ? »
« Mélange le blanc et le champagne et tu auras la couleur que tu cherches. », lui fais-je.
« C'est du Tania Akendengué tout craché. Elle a toujours eu le chic de nous faire sortir des sentiers battus. »
« Oui, c'est bien elle. Avec ses histoires à dormir debout, elle va bien nous manquées quand nous serons en Afrique du Sud ! »
« Comme tu dis, Gaëlle ! Tiens, on dirait que c'est bon ! Je pense qu'on a trouvé ce que l'on cherchait. Mais au fait, on l'a tourne quand cette vidéo. Il faut que j'ai le temps d'aller chez la coiffeuse. C'est quand même mon premier grand rôle devant la caméra ! », fait Sharonna en riant.
« Redescends sur terre, ma belle. Nous sommes à Port-Gentil et les caméras ne sont là que pour filmer les fait divers ! », lui dis-je en riant.
« Rabats-joie ! Cela ne va pas m'empêcher de faire le plus bel effet à la caméra. Achète des mouchoirs parce que cette fille là, telle que je la connais, va bien chialer une fois qu'elle aura vu ma prestation ! »
« J'y ai pensé, t'inquiète. Tout le monde connaît déjà les mots de la copine. Elle sera que trop touchée ! », fais-je en riant.
« Ce n'est ce que tu dis petit là. C n'est pas tous les jours que l'on a droit à une fête de fiançailles surprise. Miro m'a tuée quoi ! Comment quelqu'un peut autant surprendre les gens ! Tu te souviens comment je le cassais avant là ! Avec ma bouche là, je disais à Tania que le gars est trop louche et tout et que ça devait être un chanvré. Il ne m'inspirait pas du tout confiance avec sa manière de s'habiller là comme un péquenaud et ses longs cheveux frisés ! Heureusement qu'il les a coupés. »
« Hummm ! La fille de Nguéma là ! Tu as vu qu'il ne faut jamais se fier aux apparences ! »
« Comme tu dis, Gaëlle. Nous voilà maintenant en train de préparer la fête parce que le petit italien a le cœur chaviré par la beauté de la petite gabonaise du château d'eau. C'est quand même une belle histoire ! Il faut que je pense à l'écrire ! »
« Attends qu'ils aient un enfant pour écrire. L'histoire sera plus belle encore. »
« La go, un gars aussi beau, tu lui fait 10 gosses sans réfléchir ! »
« Sharonna ! Tu fais maintenant dans l’eugénisme ! »
« Euh ! Je dis juste qu'ils auront de très beaux enfants, c'est tout ! »
« Je préfère entendre ça ! Viens passons à la caisse. »

Nous arrivons à la caisse avec tout ce que nous avons pu trouvé comme ruban et tulles de couleur écru. Miro nous a chargé de la décoration de la salle pour le repas de leurs fiançailles. Comme je suis l'experte en la matière, je mets un point d'honneur à surprendre la plus cool des filles que je connaisse. Je me souviens encore comme si c'était hier de ce petit bout de femme qui du haut de ses jambes frêles, alors que nous avion 7 ans et étions toutes deux à l'école du Parc, est venue me sauver des griffes, des cassics de l'école, qui voulaient me rosser, un samedi midi, sous le soleil, après les cours. Tania est arrivée et a insulté tout le monde sans se soucier du fait que ces redoublantes qui voulaient me filer la casse, avaient 10 ou 11 ans. Les autres sont parties en riant devant le culot de Tania. Elle m'a donné la main pour me relever du sable où on m'avait jetée comme une feuille de papier. Et depuis ce jour, nous sommes devenues amies. Et plus, car mes étaient bien plus grandes que moi. C'est donc, chez Tania que j'allais passer mes mercredis après-midi et mes samedis. Et aujourd'hui, on se prépare à la voir attachée sa vie à celle de Miro. J'espère juste que nous serons là le jour de leu mariage. Parce que là, dans quelques mois, chacune de nous sera partie où l'appelle son avenir estudiantin.
Je m'envole en décembre pour Cape Town où étudie ma sœur Charline. Elle va me céder son appartement en mai car elle rentre après son Master en finance. Une nouvelle vie nous attend. Ça fait tout drôle de savoir que l'on ne s'entendra plus qu'au téléphone.
En parlant de téléphone, Marc-Elise m'appelle.
« Oui, mademoiselle Ontala, je t'écoute. Donne-moi les nouvelles. »
« Oh ! Mon oral de rattrapage s'est bien passé. Où êtes-vous ? »
Aïe ! Que faire. Vite, j'invente quelque chose.
« Nous sommes du côté de l’hôpital Ntchenguè avec Gaëlle. Nous avons accompagnées madame ma mère pour inspecter les travaux de construction de leur maison. »
« Ok ! Faites-moi signe quand vous revenez à la civilisation. Je veux des beignets brochettes ce soir. On dit quoi ? »
« Oh ! On dit que mes poches sont vides. Je vais voir avec Sharonna ; On te phone à 18h. Bizz. »
« Pourquoi lui as-tu menti ? », me fait Sharonna alors que j'ai raccroché.
« Je sais pas. Je voulais pas parler de tout ça pour respecter le secret, quoi. Comme Miro ne nous l'a dit qu'à toi et moi, je me suis dit que je n'avais pas à divulguer l'affaire. »
« Ok, ok ! Je comprends. Mais on fait comment avec Jileska. Il va bien falloir la mettre dans la confidence. »
« Bien sûr qu'on lui dira. Mais d'abord, il faut que j'achète du sparadrap pour lui cloué la bouche et lui passer l'envie d'aller colporter la nouvelle. Une surprise est une surprise ! »
« Ok. On fera comme tu dis. Maintenant, il faut que j'aille draguer monsieur Nguéma pour qu'il nous file le gain pour allez manger ce soir. On va où ? Je suis fatigué de manger les brochette de Mame ! »
« Oh ! Comme c'est monsieur Nguéma qui paie, on va à Mermoz, tranquillement et on s'enjaille. Ensuite, direction mon lit. Je veux rattraper le sommeil que j'ai perdu en préparant ce bac. », fais-je en montant dans le taxi que Sharonna a arrêté.

Nous arrivons chez moi, à la cité des médecins. Mon cher médecin de papa, le docteur Azizet, est assis dans le salon et lit son journal tranquillement. Il lève les yeux pour regarder qui arrive et se contente de nous sourire.
« Bonjour docteur ? On dit quoi. Vous avez fuis vos patients, on dirait. »
« Je suis en vacances, ma chère Sharonna. Si madame ma femme n'était pas occupée à suivre les travaux de notre maison, j'aurais pris ma pirogue pour aller me cacher un peu au village là-bas. »
« Oh ! Ça ira ! Le plus important c'est que vous arrêtiez votre téléphone et appreniez à ne rien faire. »
« Tu parles ! Ils viennent de m'appeler là. Un cas difficile vient de se présenter à la clinique. Je suis l'affaire à distance. Mais je vais devoir y faire un tour avant la nuit. »
« Hummm ! Ça doit quand même vous faire quelque chose qu'aucune de vos 5 filles n'aient envie de devenir Médecin ! »
« Les femmes de cette maison décident elle-même de leur avenir, n'est ce pas Gaëlle Azizet ? », répond mon père.
« Oh ! Le boss. On ne va pas remettre cette discussion. Je t'ai dit que je ferais un très mauvais médecin. J'ai toujours eu la phobie des aiguilles et tu le sais ! »
« Tu vois, Sharonna ! Le débat est clôt »
Ayant dis cela, monsieur se remet à la lecture de son journal et ma copine et moi nous allons dans ma chambre.
Le dessous de mon lit est ma caverne d'Ali Baba. J'en sors cette grande valise dans laquelle je garde tout mon matériel.
« Voilà la couleur lis de vin. » Nous allons la marié à l'écru. »
« Yo ! Mais c'est du rouge, alors. »
« Sharonna ! Oui c'est un peu ça. Ça fera beau, tu verras. »
« Oh, pour ça, je te fais confiance. Et les pétales de rose pour marquer le chemin, ils seront de quel couleur ?
« Tu verras. Je ne vais pas dévoiler tous mes secrets. »
« Donc, Tania Akendengué va bien pleurer. Je pense qu'on va devoir racheter d'autres mouchoirs. »
« C'est sûr ! Au fait, j'ai trouvé la robe parfaite pour toi quand tu vas chanter. J'étais hier à la fripe. Tu vas halluciner. »
« Montre-voir ! »
je vais mon placard et sort la robe en question. Sharonna manque de s'évanouir en la voyant.
« T'es sûre que tu l'as eu aux fripes, celle-là ! Mais elle est parfaite. Je vais en faire de l'effet, dedans. »
« J'ai tout de suite pensé à toi. Je vois que je ne me suis pas trompée. Au fait, que comptes-tu chanter. »
« La chanson de chez chanson qui va faire dire à mademoiselle Akendengué que vraiment, ces copines l'aiment trop ! »
« Yo ! Pardon ! De ne pas nous faire toutes pleurer parce qu'alors, là, on ne ressemblera plus à rien. Heureusement que je ne ne maquille jamais. Je ne risque pas de salir ma robe avec du mascara qui dégoulinera de mes yeux. »
« En tout cas, vous verrez. Maintenant si l'émotion est trop forte, vous pouvez aller vous cacher aux toilettes. »
« Hummm ! »
« Mais quand même, je pense que tu te trompe de voie. Tu es une merveilleuse coordinatrice et décoratrice. Pourquoi aller t'emmerder en chimie ! »
« Je veux travailler dans l’industrie cosmétique, je te l'ai dit. Créer des produits de beauté, des parfums...etc...»
« Ok, j'ai compris. Ne m'oublie pas quand tu travailleras pour l'Oréal ou Estée Lauder. »
« çà ne risque pas ! N'oublie pas que nous serons toutes deux dans la même université à Cape town. »
« Oh, c'est vrai ! Enfin, sauf si monsieur Nguéma insiste pour que je quitte l'Afrique du sud pour les USA. On est ensemble ! »
« Attends, j'appelle Julien pour qu'on s'arrange à faire le petit film demain. Il faut qu'on boucle l'affaire avant que Tania revienne. »
« Et elle rentre quand ? », me demande Sharonna.
« Oh, tantine Bernadette dit qu'ils seront peut-être là samedi. »
« Ok. Appelle déjà Marc-Elise et Jileska pour leur dire qu'on va ce soir au Mermoz. » 


 

51-

~~~Pendant ce temps à Port-Gentil, vendredi soir, 19h30 chez Sharonna, route Ondimba.~~~

« Non, Jileska, ne me dis pas que ça ne te fait rien. », me fait Marc-Elise.
« C'est comment ! La fille Nazaire Ontala et d'Elisabeth Ogoula ? C'est quoi l'affaire là, aujourd'hui ! »
« Mais, Jileska. Tania se fiance. Regarde-nous. Regarde-nous. »
« Attend, laisse-moi me regarder. Ça va, Je vais bien. Y a quoi même là où tu es maintenant en train de te torturer l'esprit là. »
« Mais Jileska, elle est comme nous. C'est quoi l'affaire là où elle a tout ce dont on rêve et nous nous sommes là comme si le ciel ne nous connaît pas !? »
« Ah, pardon ! Lève-toi et arrête de faire l'enfant. La copine se fiance, c'est sa chance. Pourquoi tu agios comme si tu veux aller maintenant te jeter dans l'océan. »
« Oh ! On marche tous ensemble ! Regarde-moi, regarde-toi ! Qu'est ce qui ne te va pas. »
« Yo ! Je ne savais pas qu'en t'annonçant la nouvelle, tu allais me faire une crise ! Toi aussi, le bonheur de la frangine, c'est le bonheur de nous toute ! »
« Mais dis-moi, moi avec qui ? »
« Pardon ! Tu es allée te perdre là-bas, pendant 3 ans avec Peter Malonga ! Pendant ce temps, y a des chances qui sont passées ! Ça ne veut pas dire que ta vie s'arrête aujourd'hui parce que la frangine se fiance. C'est quoi ça ! »
« Oh ! C'est vrai que j'étais tellement folle amoureuse de ce Malonga que j'en oubliais même de manger. Mais bon ! »
« Dis plutôt que c'est sa bite qui t'empêchait de réfléchir correctement. Maintenant, lève-toi au lieu de faire l'imbécile. Je ne sais pas si tu te crois à Akiéni ou dans le Fernan Vaz, mais à Port-Gentil, les gens ne meurent pas de jalousie. »
« En fait, je suis contente pour elle. Mais des fois aussi, j'aimerais être celle qui épate tout le monde. »
« Tu nous épatera un jour à ta manière ! Tu es encore jeune Marc-Elise ! »
« Eh ! Qui te crois même !! »
« Pardon, arrête avec ta tête de caca et sortons de ces toilettes. Les filles vont commencer à s'inquiéter. »
« Donc, samedi 22 août à 18h, notre copine aura officiellement rompu avec le célibat !! » moi avec qui oh !
« Mademoiselle Ontala Marc-Elise, la ferme ; sinon je te donne deux bonnes giffles et je te fous la tête dans le WC. »
« Pardon, faut pas me parler mal. J'arrive ! Mais parfois, j'ai l'impression d'être venue sur terre pour vous accompagner. »
« Parce que j'ai quoi. Je n'ai pas la beauté de Gaëlle, ni l'intelligence de Sharonna, et encore moins la gentillesse de Tania. Donc, tu arrête tes bêtises sinon je dis aux filles que tu nous fais une crise. »
« C'est bon, c'est bon. Je me calme. »

Nous sortons des toilettes et je me dis que je dois garder l’œil ouvert sur cette fille. Elle est capable d'aller encore nous avaler des boites de médicaments pour mettre fin à sa vie. Y a quoi même ! L'autre se fiance, on danse et c'est tout !
Pardon, on va s’attraper des maux de tête à force de jalousie tout ça pour récolter quoi !
Dieu m'en préserve. J'avance même si la visibilité est nulle devant moi. J'ai envie de faire fête et je vais faire la folle pendant cette fête là. Les gens qui me connaisse n'ont qu'à m’attraper parce que lorsque je vais débouler sur la piste de danse là, personne ne va me reconnaître. C'est comme ça du côté de Cocobeah et d'Esassa, oh ! Quand y a moyen de faire la fête, on fait la fête.
Nous revenons dans le salon où Julien se repasse le film du grand moment de Sharonna. Mademoiselle était habillée comme une reine de beauté et a chanté un morceau hyper touchant pour souhaiter beaucoup de bonheur à Tania et Miro. Bon, je dois l'avoue, j'ai versé une larme. Raison pour laquelle j'ai suivi Marc-Elise dans la salle de bains. C'est maintenant au tour de Gaëlle de se mettre en scène. Je suis épatée face à tout le vocabulaire qu'emploie la copine pour ce moment d'anthologie.
Elle a vraiment le verbe pour faire chavirer les cœurs. Pardon, je dois trouver quelque chose d'original à dire sinon, on va me prendre pour une tarte à la crème.
C'est compliqué de marcher avec des intellos, parce que si on ne suit pas, ça veut vraiment dire qu'on est sur terre pour rien. Alors, je me mets à cogiter.
A côté de moi, j'observe Marc-Elise qui semble avoir l'esprit ailleurs.

Quand nous sommes arrivées elle et moi il y a deux heures, nous ne savions pas à quoi nous attendre. C'est Julien qui nous a mis dans la confidence, car il le fallait pour son petit film qui sera projeté le jour J, c'est à dire samedi 22 août. J'ai failli tomber à la renverse, au comble de la joie. Je suis d'avis que le bonheur des autres, copines ou sœurs, rejaillit forcément sur nous, comme une onction divine. Il me tarde de voir la tête de Tania ce samedi quand une voiture viendra la chercher chez elle pour la conduire au Méridien, dans cette salle où l'attendra tout le monde.
C'est vraiment beau l'amour ! Je suis loin de savoir l'effet que ça fait, vu que le père de mon enfant, que j'ai eu à 14 ans en classe de 5ème, n'a jamais plus donné de nouvelles après la naissance de la petite. Et puis, je n'ai pas envie de parler de lui. Ensuite, il y a eu cet imbécile de Pacheco, ce gars de Sété Cama dont j'étais folle amoureux en 3ème et qui m'a plaquée aussi sec quand j'ai raté mon BECP. Il avait peur que mon échec soit contagieux. Et puis, Aymar est arrivé. C'est mon ex de 1ère. Un charmant menteur invétéré, qui s'est avéré être marié et père du coté de Moabi. Oui, je sais, je n'avais pas à ce moment là les idées en place en allant m'accoquiner avec un fonctionnaire. Mais bon, on apprend de ces erreurs. Et ce que les miennes m'ont appris, c'est qu'il ne faut jamais courir pour faire comme les autres et avancer en fonction de ce que font les autres. Comme ma copine Gaëlle avait un gars vachement branché, jeune ingénieur production chez Perenco Gabon, qui lui mangeait littéralement dans la main et la couvrait de cadeaux alors même qu'elle ne demandait rien, je voulais la même chose. Voilà comment je me suis retrouvée aux bras de mon sacré menteur de fonctionnaire qui venait mendier jusqu'à l'argent du taxi chez moi. Bref, je ne vais donc pas me mettre la pression comme Marc-Elise qui est prête à s'étouffer d'envie tellement elle aimerait être à la place de Tania.

« Sinon, c'est mon tour, hein ! Gaëlle Azizet, tu nous a déjà toutes tuées avec ton gros français. Une fois que tout le monde t'auras entendu et vu Sharonna chanter, y aura plus d'applaudissements pour les autres ! De grâce, laisse-moi aussi briller un peu. », fais-je en me levant.
« Mais la scène est à toi, ma chère ! », me fait Gaëlle en me montrant le chemin jusque devant l'objectif de la caméra que Julien tient en main.
Là, je ne me fait pas prier.
« Musique, s'il vous plaît ! », fais-je.
Sharonna appuie sur le lecteur CD et mon morceau du moment se met à vibrer. Je me casse le corps sur El Pardon de Enrique Iglesias, tellement je kiffe le morceau et tellement je ne comprends rien en espagnol. J'ai bien bossé mon ballet étant donné que je danse sur cette musique tous les jours. Au moins, on ne pourra pas dire que je n'ai pas la danse dans le sang, car ça, c'est un talent que Dieu m'a donnée. Alors, je danse. Et à la fin de ma prestation, j'envoie un baiser à la volée en souhaitant des années de bonheur à la frangine de mon cœur.
« Huuuummm ! Pardon, on met cette séquence à la fin ! Sinon, elle va voler la vedette à tout le monde. Fais doucement, toi aussi Jileska ! Maintenant que tu as dansé comme ça, qu'est ce que je vais bien pouvoir inventer ? », s'insurge Marc-Elise.
« A quel niveau de moquerie ? Pardon, oh ! C'est à ton tour. C'est plus le moment de parler dans le vide là. On veut du concret. », fais-je à la copine.
Elle est toute perdue là, ne sachant plus quoi inventer. Alors, elle se lance sans filet et récite des vers de Shakespeare. Le sonnet 18, dit-elle. C'est celui là qui lui est venue en tête quand elle a appris la bonne nouvelle. Les littéraires, ont vraiment des cartouches romantiques pour vous atteindre en plein cœur.
Tout le monde obligé d'applaudir tellement on ne sait pas qui est ce Shakespeare (lol).
« Eh ! On sent les gens qui sont passés par l'école mixte ! Sinon, l'école c'est bien quoi ! », fais-je aux amis.
« Hummm ! Pardon, l'école on en reparle en janvier. Pas avant », conclut Gaëlle


 

52-

~~~Pendant ce temps à Port-Gentil, samedi, il est 3 heures du matin. Alec et Sunita sont à l'hotel, la Résidence Scott. ~~~



« You've really made this week unbelivable, Sunita ! C'est vraiment cool que vous soyez disponibles Pupuce et toi pour nous accompagner. »
Ce type a quel problème ? J'ai beau lui dire et lui faire comprendre que nous sommes à leur disposition, il n'arrête pas de me remercier.
« Oh, je suis heureuse que Patrick et toi vous soyez contents ! Jamais encore je ne me suis autant amusée »

 « C'est vrai ça ? Tu as pourtant l'air de connaître tous ces coins où nous sommes passés ! »
« Oh, de nom, oui. Je n'ai pas vraiment l'habitude de sortir tu sais. Je le fais maintenant plus librement parce que j'ai mon bac en poche, voilà ! »
« Ok, ok ! Je tombe de sommeil. J'aurais pu te ramener chez toi, tu sais. »
« Oh, j'aurais dormi dehors car mes parents sont déjà au lit. », lui fais-je.
« Ah ! Bien. Moi je préfère ne pas déranger les parents de Miro en rentrant si tard. Alors, nous allons dormir là et je te ramène chez toi au petit matin. »
« Ça me va ! »

Le type se couche. Je vais dans la douche me laver et me préparer pour cette nuit qui à tous les coups, sera chaude. aujourd'hui, je lui fait la totale. Il criera mon nom comme pas la peine ! C'est sûr, je vais graver mon nom au fer rouge sur son cœur. Et il ne risque pas de m'oublier.

C'est bête, quoi ! J'ai au tout début craqué pour Patrick, parce qu'il est blanc et que j'aime la peau blanche. Mais comme le type n'arrêtait pas de me dire qu'il est intéressé par ma sœur Jileska, j'ai zappé. J'ai de suite tenté mon coup avec Alec, avant que quelqu’un d'autre ne lui tombe dessus. Et, j'ai arrangé l'affaire à ma copine pour que Patrick, au lieu d'aller mourir chez ma chère sœur Jileska, aille plutôt réchauffer le cœur de ma combi du cœur, Pupuce. Jileska aura son tour quand elle arrêtera de me faire chier avec ses leçons de moral à la con. Elle me saoule cette grande sœur que Dieu m'a donnée. Et en plus, je lui en voudrais toute ma vie car elle m'a vendu chez la vieille en lui disant qu'elle m'avait trouvé au lit avec Paul-Hector, le mari de notre voisine. Ça fait quoi si je m'envoie en l'air avec lui ! Elle sait comment je fais pour m'offrir tout ce dont j'ai besoin et comment j'entretiens ma beauté ! Si elle a du mal à s’attraper des hommes biens, mon problème est où ?
Après ça, maman m'en a tellement voulu, qu'elle m'a privé de sortie pendant toute l'année scolaire et m'a obligée à la suivre dans son église éveillée, tous les mercredis et tous les dimanches !
J'ai fait semblant d'être docile pendant tout ce temps, histoire de gagner la confiance de la vieille. Mais je dois dire que j'ai franchement détesté Jileska depuis ce moment-là.
Donc, quand j'ai approché Patrick et que le type m'a demandé de lui arranger le coup avec ma chère Jileska, j'ai pris la tangente et j'ai placé ma combi. C'est elle ma vraie sister. Je ne vois pas pourquoi j'aurais agi autrement. Pupuce au moins me comprend. Et nous parlons le même langage.

Donc, j'ai travaillé l'affaire pendant 2 jours et Patrick a cédé face au portrait que je lui ai fait de Pupuce. Ma combi est dix-mille fois plus intelligente que Jileska. Elle mérite d'être heureuse. Et, elle a bien saisi la balle au bond.
Là, monsieur Patrick est sous le charme. Il avale les mots de ma combi. Elle parle anglais pour le faire fondre. Elle a bossé son affaire et ils ont concrétisé il y a deux nuits. Ils sont allés à l’hôtel Le Parthenon et ils ont fait l'amour toute la nuit.Y a quoi même !
Ma combi a droit au bonheur. Je lui ai fait la leçon car elle avait un peu d'appréhension. Comme elle n'avait fait l'amour qu'une fois et était tombée enceinte dès le premier rapport sexuel, je l'ai briffée en lui faisant des démonstrations. Je lui ai appris à faire une pipe ; je lui ai appris à remuer son derrière, à mouner comme on dit chez nous. Par dessus tout, je lui ai appris les mots qu'il faut prononcer et comment les murmurer à l'oreille de Patrick.
Les travaux pratiques ont duré trois heures durant lesquelles je l'ai fait répété pour m'assurer qu'elle fera passer à Patrick, toute envie d'approcher cette imbécile qui me sert de grande sœur.

Le type a tellement aimé cette partie de jambes en l'air, qu'il en a vite reprogrammée une cette nuit. Ils sont dans la chambre juste à côté de la notre. C'est qui le meilleur des professeur ? C'est Sunita ! Et oui. Jileska peut aller se brosser !

Nous avons dîner au Ranch. En une semaine, nous avons fait le tour des restaurants de la ville. Nous les avons emmenés danser un peu partout : au Milenium, à la Villa, au Gallion... partout où l'on pouvait danser et se frotter les uns aux autres. Du moins, tant que je suis avec Alec, c'est bien là mon intention : Faire en sorte qu'il se souvienne longtemps de cette gabonaise qu'il a rencontré à Port-Gentil. Et plus, pourquoi pas. J'ai là en main, un ticket gagnant.

Coté sexe, pour Alec et moi, c'est un peu plus lent. Il embrasse divinement bien. Ses mains font des merveilles quand elles en viennent à me caresser. Mais, il n'y a encore rien eu. En fait, je la joue slow, histoire qu'il pense que vraiment, la petite Sunita, personne ne la touche aussi facilement. Mais, cette nuit, il y a le feu entre mes cuisses et j'ai besoin d'un pompier pour l'éteindre. Monsieur va devoir me montrer de quoi ce beau corps musclé est capable. Et moi en retour, je vais lui faire voir que le feu qu'il y a là, entre mes jambes, avait réellement besoin de son sexe comme arrosoir

N'en déplaise aux personnes qui ne veulent voir en moi que la petite sœur de cette rigolote de Jileska ! D'ailleurs, il faut que je la sorte de mon vocabulaire quand je suis avec ce bel homme qui a tout pour m'envoyer au septième ciel.

Je me suis parfumée avec Libertine, de Vivienne Westwood. C'est fort, c'est sensuel. Cela appelle à des nuits félines. Et comme je n'ai pas l'intention de dormir avant que ce type ait fait de moi sa chienne, tout le monde est d'accord.

J'enfile juste le tee-shirt blanc en col V que j'avais dans mon sac à main. Je mets un nouveau string. Je n'oublie pas de mettre dans la main, 2 préservatifs. Je veux avoir la fièvre cette nuit. Arrêtez-moi si vous pouvez !

J'arrive toute de sensualité vêtue. Je me saisis de mon téléphone posé sur la table et mets de la musique douce.

 « Coucou beau mec, je ne t'ai pas trop fait attendre, j'espère ? »

Il ne répond pas. La chambre est plongée dans une semi-pénombre. J'avance à pas de loup et arrive bientôt sur le lit. J'appelle tout doucement :

 « Alec, j'ai envie de toi cette nuit. »

Rien. Pas de réaction.

Je continue de murmurer des mots doux à son oreille

 « Sweety, are you listinning to me or what ? »

Il ne réagit pas. Merde alors ! Il ne va pas me dire qu'il s'est endormi !

Je monte sur lui à califourchon, histoire de le secouer.

« Chéri, tu m'entends ? »

Il se réveille en sursaut comme s'il sortait d'un mauvais rêve. Il se hisse vers le coin du lit et allume la veilleuse.

 « What are you doing, Sunita ? Je t'ai dit qu'il n y aura pas de sexe entre nous. Je te l'ai encore répété cet après-midi : je n'ai pas l'intention de griller toutes mes chances de me mettre avec Gaëlle. C'est elle que je veux. Je pensais qu'on était d'accord et que tu l'avais compris. »

YO !

Donc, je suis là toute propre, toute belle ! Prête pour me faire secouer. Et le type-ci pense que je vais céder ma place à quelqu'un d'autre ! Mais il même comment ?
Je me mets alors à pleurer.


 

53-

Il est 15 h ce samedi. L'avion qui nous ramène Miro et moi, vient d’atterrir à Port-Gentil. J'ai encore la tête dans les nuages tellement notre séjour à Libreville a été merveilleux. J'attends dans la voiture en pianotant sur mon téléphone tandis que Miro est reparti rapidement s'acheter des journaux.
Il revient et s'installe derrière le volant.
« J'ai l'impression que Port-Gentil m'attendait. Je viens de rater cinq coups de fils. Je rappellerai tout le monde plus tard.
« Ok. Moi je n'ai pas remis mon téléphone en marche. En quatre jours, je pense que la mémoire doit être saturée de messages. «
« Ça, tu peux en être sûre. Je parie que les filles ont du t'envoyer des messages pour te raconter leurs moindres faits et gestes ! »
« On se moque pas des copines ! Elles m'ont trop manquée ! »
« Et tu comptes sortir avec elles ce soir. »
« Non, je vais plutôt rester à la maison avec maman et les petites. »
« d'accord. Je te dépose, alors. J'ai un souci à régler. Je ne sais pas encore de quoi il en retourne. »
« Pourtant, tu supposes que c'est un souci. »
« Oui C'est Alec. Il m'assomme de message depuis ce matin. Je t'en dirais plus quand j'en saurais plus. »
« D'accord. J'ai hâte d'être à la maison. Mais en même temps, je serais volontiers rester dans les bras d'un certain, dont je suis folle amoureuse. »
« Oh ! Et qui t'oblige à l’abandonner ? »
« Oh ! C'est juste qu'il ne faut pas abuser des bonnes choses, voilà tout. »
« Tania Akendengué, t'es vraiment une coquine. », fait-il en souriant.

Pendant le trajet jusque chez moi, son téléphone sonne 3 fois.
« C'est encore Alec. Il s'impatiente. »
« Dis donc, il a vachement de choses à te raconter ton ami ! »
« Je le sens un peu tendu. Je ferais mieux d'arriver rapidement. »
il se gare devant le portail et m'aide à porter les deux valises que j'ai ramener. Dans le salon, nous trouvons maman en conversation avec grand-mère et son amie Georgeline. Elles sont heureuses de nous voir arriver et nous ouvrent leur bras.
Samba. Samba. Samba.
Oui, nous sommes les bienvenus à Port-gentil et dans cette maison en particuliers.
« Comment vont les plus belles dames de Port-gentil ? », fait Miro en souriant.
« Mon cher, tu n'as plus besoin de nous flatter. Tu nous as déjà voler le cœur notre fille ! », lui fait maman.
Il se contente de sourire et prend congé en promettant de passer dans la soirée. Il s'en va après avoir embrassé Jade et Ruby.
Je m'assoie et prend ces deux petites sur mes genoux. Elles ont vachement grandi. Dans quelques jours, elles auront 3 mois. Le temps a passé tellement vite ! Je remarque que Jade est plus en chair que Ruby qui semble plus fine.
« Cette fille veut devenir mannequin ! », fais-je tout haut.
« Je pense plutôt qu'elle veut devenir journaliste. Elle n dort pas autant que sa sœur. Mais elle est bavarde ! »
« Oh ! Les longues nuit à chatter avec elles vont bientôt commencer. Je leur ai acheté des robes. Mais j'ai pris du 6 mois pour être sûr que ça leur irait. »
« Tania n'awan'issè (Tania et ses enfants) ! », fait tendrement grand-mère.
Je lève le regard vers elle pour lui demander pourquoi elle le dit. Elle me répond que ça fait une semaine qu'elle n'a pas vu Pupuce. Pourtant, elle vient chez nous tous les matins.
« heureusement qu'elle n'allaite pas les enfants, parce que je crois qu'elle les a traverser ? »
« Qu'est ce que ça veut dire ? », fais-je étonnée.
C'est Georgeline qui m'explique que Pupuce a repris sa vie sexuelle.
« Ah, d'accord », fais-je sans trop envie d'avoir les détails.

Elles m'observent attendant que je leur raconte mon séjour à Libreville. Les curieuses !
« Vous êtes pires que mes copines, les vieilles ! Y a des choses qui sont privées. »
« Raconte nous au moins quelques trucs. Où étais-tu ? Où avez-vous mangé ? Qui avez-vous vu ? »
je leur raconte comment Miro m'a fait tourner la ville et fait découvrir des endroits que je ne connaissais pas. Je leur raconte les restaurants dans lesquels nous sommes allés et surtout, les trois repas chez des amis de ses parents.
« Oh ! Donc il t'a présentée à tout le monde là-bas ! », s'étonne grand-mère.
« Bien, il m’emmenait dire bonjour et après nous étions invités à venir dîner. C'était cool. Les gens étaient très gentils avec moi. »
« C'est une bonne chose », conclut maman.
Je continue à jour avec les petites quelques minutes dans le salon. Puis, je les soulève pour les emmener dans la chambre. Je les pose délicatement sur le lit et m'assure qu'elles ne risquent rien. J'entreprends alors de défaire mes bagages. Comme j'ai acheter plusieurs robes, j'hésite à toutes les mettre dans mon placard. Je préfère aller les ranger dans la chambre de maman. Dans ma chambre, je ne garde que les vêtements du quotidien. Quand j'ouvre mon placard, je me rends compte qu'il a été fouillé. Je l'avais laissé en ordre en partant, pourtant ! Je ne m'en inquiète pas plus. A partager la chambre avec Pupuce, il va sans dire qu'elle fouille mes affaires de temps en temps. Je continue de ranger en musique. Je danse en chantant à tue-tête. Je prends le sac de voyage dans lequel il y a tous les cadeaux que je réserve à maman et aux copines, et je le glisse sous le lit en espérant que Pupuce ne le découvre pas. Pour elle, j'ai pris une robe e soirée couleur bleue oranger, sa préférée. J'espère qu'elle appréciera.

 
PUPUCE- (tome 1)