Alexander

Write by leilaji

Chapitre 2

 

***Alexander ***

 

Elle me tape franchement sur les nerfs ! Avec ses airs de madame je sais tout, c'est insupportable. Depuis quand des employés peuvent-ils se balader dans cette entreprise sans que je ne sache ce qu’ils y font ? L’air de rien, elle farfouille partout, donne des conseils à qui veut l’entendre.

Ca ne m’énerverait pas autant si je ne me sentais pas étrangement bête dès qu’elle est à moins de dix pas de moi. A vrai dire, ça faisait longtemps que je ne m’étais pas senti aussi "concerné" par une personne du sexe opposé.

Dire qu’elle n’est pas mon seul problème du moment est un euphémisme. J'en suis à un point de ma carrière où je ne sais pas si je dois continuer à me lever chaque matin pour venir travailler ou tout abandonner.

 

Comment en suis-je arrivé là ? J’ai juste suivi mon meilleur ami. On était à Oxford ensemble. Pas besoin de présenter l’école mais je le fais quand même. C’est l’une des plus prestigieuses universités de Grande-Bretagne. Mon meilleur ami Denis, est le fils de l’ancien président de ce pays et cette société est la sienne. L’une des treize qu’il possède sur le territoire et que je dirige pour lui. Sur un plan purement juridique, je suis le directeur général et lui le président du Conseil d’Administration. J’ai très envie de partir mais je lui dois tellement que je me sens obligé de rester et travailler pour lui jusqu’à ce qu’il me laisse m’en aller.

 

Ma famille me manque. Mon pays me manque. Même ma culture à laquelle je ne m’étais jamais vraiment attaché, me manque. Mais malgré tout, je fais ce que j’ai à faire. Je développe l’entreprise à son maximum. On bataille sur tous les fronts. Je veux en faire une réussite. Je ne suis pas d’ici mais ce n’est pas une raison pour ne rien laisser de palpable en partant de mon poste.

 

Je lève les yeux en sentant approcher une personne. La voilà. Aujourd’hui elle porte un tailleur pantalon noir. Ca ne la change pas vraiment des autres jours. Elle ne met que les mêmes couleurs : gris, noir, marron, beige. Aucun bijou n’agrémente jamais sa mise. Cette femme … cette femme ! Je sais pas pourquoi, mes yeux ne peuvent s’empêcher de la suivre partout où elle va.

Je fais semblant de lire un dossier dans le couloir qui mène à mon bureau alors que ma secrétaire m’en a déjà fait un compte rendu concis. Je veux voir si elle va me saluer poliment comme toutes les femmes de cette entreprise ou pas. Je sais que je suis le point de mire des célibataires du coin. Mais je ne chasse jamais là où je gagne ma vie. Jamais.

Elle passe sans même me jeter un coup d’œil. Même pas un battement de cil ? 

Quoi comment ça, elle passe ?! Est-ce qu’elle sait qui je suis au moins ? Franchement vaut mieux que je ne m’occupe plus d’elle. Elle ne mérite pas toute l’attention que je lui porte. Bien malgré moi.

 

***Leila***

 

Non mais quel bouffon ce mec ! Ca faisait longtemps que j’avais traité un mec de bouffon ! Il fait ressortir en moi des mots sensationnels. Monsieur fait comme s’il ne m’avait pas vu, alors que je sens son regard traîner sur mon corps depuis quelques minutes déjà. Je m’engouffre dans l’ascenseur et presse sur le bouton de l’étage réservé au pool comptabilité.

Mais quand même, c’est qu’il est vraiment trop beau ce connard et il le sait en plus. Il le sait forcément vu toutes les femmes qui minaudent à sa vue dans cette entreprise. Il y a des jours comme ça où j’ai juste envie de tout laisser tomber et de me trouver un mec bien à aimer. Un mec comme lui. Pourquoi pas. J’y ai droit aussi non, à un mec de rêve, avec des yeux qui font disparaitre le monde aux alentour quand tu t’y plonges. Quel âge a-t-il ? Début de la trentaine à vue d’œil. Svelte avec de longues mains magnifiques. Elles doivent savoir caresser ces mains. N’est-ce pas ?

 

Construire une famille. Aimer. Oh, réveille toi Leila, c’est vraiment pas le moment.

 

Je presse mes pas vers l'open-space réservé à la comptabilité. J’ai des virements à y vérifier. Concentre-toi triple andouille.

 

***Un peu plus tard.***

 

Il est 21 h 34 à ma montre. Franchement, je ne sais même plus ce que je fais assise à mon bureau. Les chiffres qui défilent devant mes yeux, pour le moment c’est rien que du chinois pour moi. Il faut dire que je suis debout depuis 5 heures du matin.

 

Rentre chez toi Leila, je m'ordonne intérieurement.

 

Je rentre et je fais quoi exactement? Je me replonge encore dans les mêmes dossiers ? Il n'y a personne qui m’attend à la maison. Personne. Ma meilleure amie? Sa vie est tellement différente de la mienne. Elle doit s’occuper de ses trois enfants et de son mari. Je ne peux décemment pas l’appeler à une pareille heure.  Déjà que son mari ne m’aime pas beaucoup ! Et c’est bien normal parce que je le lui renvoie bien. Il m’énerve à toujours vouloir régenter sa vie.

 

J’ai comme qui dirait une réputation assez disproportionnée par rapport à ma toute petite personne. Il parait que j’ai couché avec pas mal de monde. La vérité c’est que tous ces hommes je les ai fréquenté mais de là à conclure avec eux, non. Pas autant de fois qu’on le dit en tout cas. Il y a quelque chose en moi qui les excite tous autant qu’ils sont. Cette espèce d’innocence mêlée à de la froideur que j’affiche. Ce n’est pas de moi cette expression mais d’un de mes regrettés ex petits copains. J’aurai beau me donner un air sévère, je ne pourrai jamais la cacher cette innocence. Ca ne veut pas dire que je suis encore vierge. Loin de là. Mais on ne peut pas non plus dire que je sais réchauffer un lit. Je n’en suis pas particulièrement fière. C’est juste que jusqu’à présent aucun homme ne m’en a donné envie. Aucun.

 

Je suis perdue dans mes pensées quand j’entends un drôle de bruit. Celui-ci est assez fort pour me faire fait sursauter malgré moi. Je regarde aux alentours me demandant si ce n’est pas une unité centrale non éteinte qui fait ce boucan. Mais non. Qu’est ce qui se passe ? Le bruit s’intensifie. Là je commence à avoir un peu peur. Est-ce normal que les murs se mettent à trembler ? J’ai même l’impression de voir les murs… se fissurer. Quelques secondes plus tard, c’est un vacarme assourdissant qui m’engloutit puis c’est le trou noir.

 

***Alexander***

 

On m’a appelé d’urgence pour m’informer qu’une partie du bâtiment qui abrite notre siège social s’est effondré. Il ne manquait vraiment plus que ça !

Je suis sur les lieux et c’est une véritable pagaille. L’air est saturé de poussière, c’est irrespirable. Les dégâts vont se chiffrer à des millions de francs CFA. Heureusement que nous sommes assurés. Les sapeurs pompiers sont là et font de leur mieux pour aider les quelques personnes blessées. Leur intervention rapide est à faciliter car circuler à Libreville, ce n’est pas une sinécure.

 

Il y a un quelques policiers sur les lieux qui essaient de coordonnés les secours et de tenir le peu de spectateurs à distance. Heureusement qu’il est tard et qu’il n’y avait plus personne dans le bâtiment.

 

Je ne sais pas pourquoi, cette phrase réveille un malaise en moi. Je pense automatiquement à la jeune femme qui furète dans le bâtiment. Aujourd’hui, j’ai demandé au service des Ressources Humaines de me faire monter son dossier. Je devrais l’avoir sur ma table demain.

Je sais qu’elle est quasiment toujours la dernière à partir. Je me rapproche du gardien de l’immeuble, un vigile de la SGS, une société de sécurité, qui a reçu des projections de gravier dans l’épaule. Je suis heureux qu’il ne soit pas plus blessé que cela. C’est un homme de l’Afrique de l’ouest très serviable.

 

    Mamadou ? Tu sais si la jeune femme qui conduit une vieille Toyota est partie avant l'accident?

    Je ne sais pas patron.

 

J’inspecte le parking priant pour que sa voiture ne soit plus garée là. Je vois quelques véhicules de marque américaine ou coréenne. Mais le sien n’est pas là. En début de semaine, j’ai remarqué qu’elle conduisait une vieille Toyota en état de décomposition. Mon malaise persiste. Que se passe-t-il ? 

Je ne sais pas pourquoi, je me rapproche du bâtiment. A petits pas mais surement. Un policier essaie de m’en dissuader mais d’un regard je l’éloigne de moi. Puis je franchis la barrière de sécurité installée par les pompiers. Ils finissent par remarquer mon manège et m’interdisent d’aller plus loin. Mais je continue ma marche. Quelque chose me pousse à vérifier par moi-même la partie des décombres accessibles. 

 

Quelques minutes plus tard, alors que mes yeux se sont enfin habitués à l’obscurité, je vois un objet qui scintille à la lumière blafarde de la lune. Je me rapproche. Ce sont les diamants décoratifs  d’une montre !  Puis en plissant les yeux je discerne une main puis un corps inerte.

 

C’est elle. Je sais que c’est elle.

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