Chapitre 10 : REALITES ROYALES

Write by Marc Aurèle

 

RAY

Nous sommes jeudi, plusieurs semaines s’étaient écoulées depuis l’enterrement de Jules. Sam et moi avions repris notre train train quotidien. Maman était venue récupérer son petit fils, car elle avait des sensations que j’allais mal. En tout cas les choses que peuvent sentir les mères, je vous dis pas. Dans mon Royaume, il y plusieurs interdictions, les unes plus idiotes et contraignantes que les autres. Mais j’avoue que je les ignore. Je ne me suis jamais habituée à leur réalité et même si je suis la reine du grand Royaume d’Abokpe et que  je communique régulièrement avec les soit disant esprits, je dois dire que je préfère mon quotidien du commun des mortels.

Selon la tradition, je ne suis pas censée être dans la vie de tous les jours comme vous, mais je devrais être recluse au palais et y vivre jusqu’à la fin de mes jours. Mais, j’ai fait un autre choix. Quoiqu’intronisée et installée dans mes fonctions, j’ai opté pour le monde moderne. Je n’ai pas été élevée au palais et de toutes les façons, mon rôle n’est que celui d’un miroir qui reflète la valeur d’un royaume. Devant mon insistance à m’entêter, les sages et les prêtes d’Abokpè avaient finis par m’accorder de vivre ma vie moderne à la seule exception, que je ne devais jamais me fermer aux esprits dans leurs manifestations. La condition posée était accompagnée des moyens nécessaires pour que mon statut ne soit point dévoilé. C’est ainsi que tout mon trône et son pouvoir devait alors être transféré en moi, ou en un objet que devais porter sur moi. Ainsi, le grand prête d’Abokpè m’avait fait concevoir un anneau spécial qui à lui seul représentait ma royauté et mon trône mais également qui me prévenait des manifestations des esprits. Il faut dire que cela ne s’explique pas, mais lourd est le secret que je porte.

En ces instants de manifestation, mon corps ne m’appartient plus. Je suis en transe, mais sans les convulsions et les cris, je suis comme un transformateur d’énergie et un puissant magnétisme attire ou repousse les gens autours de moi. Ce sont ces instants où je ne parle pas et où je communique mes désirs par la pensée aux personnes autours de moi. Je les regarde et eux ils font ce que je désire. Mon époux n’arrivait jamais à comprendre cela, et même si mes silences de ces instants lui pesaient, il n’y prêtait presque pas vraiment attention. Il faut dire que je réussissais toujours à lui faire penser qu’il ne s’agissait que d’un caprice.

Pour m’en formaliser, je l’avais tenu loin de tout ce qui concerne Abokpe, de toutes les façons, il n’est pas porté vers la tradition et il ne connait même pas les siennes. Je lui avais dit qu’il devait juste respecter mes silences, et moi quand je revenais de ma transe, je faisais tout pour qu’il oubli qu’il en avait eu.

Nous revenions du service. Il était venu me chercher et depuis trente minutes me parle sans réponses. Nous nous étions rendus chez sa grand-mère. Il avait compris que je n’allais pas descendre. Sans mots dire, je le regarde entrer dans la villa.

Il avait mit près de deux heures, mais cela lui paraitra quelques minutes et c’est lui qui s’excusera encore à son retour. Les choses sont ainsi faites, et cette force de sujétion, devenait de plus en plus forte au dedans de moi. J’avais ainsi largement le temps de communiquer avec les esprits et de faire des rituels si nécessité il y avait. Ne cherchez pas à comprendre, car moi non plus je n’y comprends pas grandes choses. J’ai voulu le faire et on m’a dit que je n’y pouvais rien. Ma grand-mère à qui j’ai succédé, n’en avait rien compris et celle avant elle non plus, encore moins celle d’avant.

Le secret du royaume d’Abokpe est détenu par celle qui l’a créé, elle est morte avec son secret et à lié avec elle, toutes les reines qui devaient lui succéder. En ce lien mystérieux réside la force de mon royaume qui malgré tout ce qui se passe à travers le monde reste fort, impénétrable et imprenable face à toute invasion.

La reine que je suis est liée à son royaume pour la vie. Elle ne devrait pas s’en détacher et depuis quelques jours, c’est le message que n’ont cessé de me rappeler les esprits. Je sais que mon choix me met en difficulté, mais je ne peux pas vivre autrement. Je n’ai pas choisi de naitre dans mes conditions, mais je peux choisir la vie qui va être mienne.

Ma mère et mon père furent réunis par le destin, dans une cours commune pour leurs études secondaires. Célestine faisait la seconde, alors que lui mon père était en terminale. Les deux jeunes adolescents tombèrent amoureux l’un de l’autre et consommèrent leur amour en toute insouciance. Je fus, hélas le fruit d’un amour interdit et comme un malheur ne pouvait venir seul, il s’avérait que cet amour interdit donnait naissance à la première fille ainée de la lignée des Reines d’Abokpe. Une réalité avec autant d’exigences que de facilités, autant d’amitié que d’adversité, très tôt j’étais attaqué de toutes part et ma mère décida alors de fuir avec moi le plus loin possible. Elle avait sacrifié son amour pour préserver ma vie. Hélas, alors que j’avais dix huit ans, les manifestations commencèrent. Je ne pouvais les contrôler et toutes les tentatives furent vaines quant à mon exorcisme. Ma mère n’a jamais été vraiment religieuse ou fanatique. Bien que n’étant païenne elle s’en tenait à sa croyance en Dieu. Elle essaya tout ce qui se présenta à elle, mais le dernier recours a été un charlatan. La seule solution qu’il pouvait nous offrir était de me retourner à ma famille paternelle. Et ce qui s’en suivit, vous le savez déjà. J’ai été investie de cette lourde charge royale qui m’horripile. E me voilà aujourd’hui entrain de négocier ma vie avec des esprits. Mais je ne me plierai pas. Je resterai moi, Ray jusqu’à la fin de mes jours. La Nan Djetinde devra souffrir de ne pas pouvoir être, en tout cas pas pendant que j’ai le magnifique homme qu’est mon mari.

 

Je traversais une transe et c’est la raison de mon silence actuelle, le même message de menace, m’est revenu. Je sors de mon état second et je regarde mon mari revenir vers la voiture. Il avait la tête baissée et les deux mains dans les poches. Sa démarche athlétique est une fusion de charme et de grâce. Mon Sam est svelte certes, mais il a des muscles qui couvrent ses os et font de lui un beau spécimen. Je remarque l’extase de la jeune fille qu’il venait de croiser. Je fis un profond soupir.

-          Tu en as mis du temps mon trésor !

-          Tu as raison, j’ai rien compris. J’ai trouvé grandma triste. Il paraitrait qu’elle n’avait pas mangé de toute la journée et j’ai voulu la voir manger avant de revenir. Hélas, je me suis endormi sur la chaise.

-         

-          Je m’excuse, tu serais montée, où tout au moins m’appeler. Il s’asseyait derrière le volant de la voiture. Je regarde son visage, il a les traits tirés.

-          Lol… je crois que je me suis aussi assoupi. Je viens juste de me réveiller. Fis-je en baissant les yeux. Je ne sais pas mentir.

 

Sam démarra la voiture et s’engagea sur la voie pavée. Le mensonge à trop fait de détruire ma vie. Et moi je le tenais à l’écart de moi. Hélas, mon lourd secret, et ma fausse existence, m’obligent à en sortir de temps à autre et chaque fois je me sens sale. J’aurais bien voulu de me plonger dans l’eau du Gange comme les indiens, quoiqu’ils ne le fassent pas forcément pour expier le mensonge.

-          On fait un tour voir junior avant de rentrer ? Sam venait de briser le silence de l’habitacle de la voiture.

-          Bébé nous sommes jeudi, et je doute que mémé soit chez elle. Junior rentre le weekend, patientons juste. Répondis-je

-          Zut, j’avais oublié ce weekend.

-          Quoi….

-          Rien ! que dirais tu d’un tour à Sun City ? fit-il en me faisant un large sourire.

-          Sun City, le fastfood du hall des arts ?

-          Mdr… je suis sérieux, je parle de faire un tour en Afrique du Sud, pas au coin du boulevard.

-          … je suis interloqué, sans voix.

D’où lui sort cette idée. Depuis notre retour d’Europe, nos sorties de couple s’étaient limitées à la découverte du Bénin. Mon homme, voulait tout connaitre de son pays et s’était attelé à faire la liste de tous les sites touristiques qui s’y trouvaient. On en avait une longue liste, et Abokpe en était le premier d’ailleurs. J’étais parvenu, si ma mémoire est bonne à le reléguer au dernier, mon argument fallacieux était qu’il avait Abokpe à la maison.

-          Ray ! Je te parle d’un weekend à deux. Juste toi et moi, sans encombrements. Nous partirons dès demain soir et nous rentrons lundi en soirée. Il affichait toujours ce sourire béat sur le visage. Ces traits d’anxiété avaient disparu.

-          Tu m’étonnes… et ta longue liste des sites du Bénin. Fis-je taquine.

-          Lol… pour changer un peu. Au fait, je dois aussi signer un contrat avec une chaine hôtelière qui veut s’installer au Bénin.

-          Anh, c’est maintenant que tu arrives, bandit ! dit plutôt que tu vas pour le boulot et que tu veux profiter oui…

-          Qui va rater l’occasion de séjourner, tout frais payés dans le plus grand hôtel de luxe de Sun City ! quand même. Toi non plus…

-          En tout cas, je ne dis pas non. Je sentais à chaque argument que mon homme me présentait, son envie d’y être. Cela nous changera de la tristesse, qui pèse depuis dimanche au moins. Avais-je ajouté.

Nous étions déjà chez nous. Sam se tenait à ma hauteur et nous sortions de l’ascenseur. Je le vis s’attrister, me devancer et mettre sa clé dans la porte.

-          Je pense aussi que c’est vrai que cela nous fera du bien. Je n’en oublierai pas pour autant mon frère-ami et les lourdes charges qu’il me laisse, mais je crois que tous les deux nous avons besoin de cette sortie détente.

-          Je vais prévenir au bureau que je vais m’absenter demain et lundi. De toutes les façons, je suis rentrée avec mon lap top. Je pourrai travailler de n’importe où.

-          Ok ca marche, je vais demander à Suzy de confirmer les réservations et de m’envoyer les billets à la maison demain par le chauffeur qui nous conduira à l’aéroport.

Sam bailla et s’étira longuement. Je le vis s’avancer vers notre chambre à coucher. Je connais la suite, l’eau qui va couler une bonne trentaine de minutes, lui qui réapparaitra en peignoir pour s’asseoir devant la télé pour somnoler en attendant le repas. Et si jamais il lui reste de l’énergie, sautera sur moi, comme un prisonnier sorti de geôle après 20ans de réclusion. Et par finir dormira comme un bébé, jusqu’au petit matin. En pensant à la partie sexe, je regarde son joli fessier et j’avalai la salive. De toutes les façons, c’est bien comme cela que j’aime qu’il me prenne mon homme. Plein d’envies, qu’il n’ait pas de retenus, qu’il me donne tout de lui, comme si c’était la première et la dernière fois de sa vie qu’il faisait l’amour. Et cette attitude, Sam savait l’avoir. Il se lâchait toujours comme si sa vie en dépendait et me procurait un nouveau nirvana, à chaque fois qu’il me prenait.

Plusieurs idées émergèrent dans ma tête. Hummm, SUN CITY prépare toi, Ray arrive.

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