CHAPITRE 11 : L’enchantement
Write by delali
En quelques secondes seulement, Mélina parle à l’agent de sécurité. Celui-ci pour en être plus rassuré, demande à ce qu’elle l’appelle de son propre téléphone. Ce qu’elle fait sans hésiter afin qu’il laisse passer Marcus. Ainsi, tout est réglé, et Marcus accède à l’immeuble pour se rendre à l’appartement de Mélina. Celle-ci court rapidement à sa salle de bain se débarbouiller le visage. Elle se le nettoie hâtivement lorsqu’elle l’entend toquer à la porte. En moins de cinq secondes, elle lui ouvre. Ils se retrouvent nez à nez, et Marcus dit :
Eh ben dis donc, ce n’est pas facile de vous voir belle dame !
Elle esquisse un sourire timide et s’efface pour le laisser entrer en lui disant :
C’est parce qu’il est un peu tard.
Oui, je sais, je comprends. D’ailleurs désolé de m’être emporté tout à l’heure, la fatigue m’a mélangé les boulons.
Je comprends aussi.
Elle referme la porte après lui, puis elle s’y adosse presque. Marcus, debout, à quelques centimètres seulement d’elle, balaie du regard la pièce. Mélina n’arrive pas vraiment à déchiffrer l’expression qu’elle lit sur son visage. L’appartement est constitué de sa chambre à coucher et d’une salle d’eau, de la salle de séjour où ils se tiennent actuellement et d’une cuisine. Mélina n’a meublé sa salle de séjour que d’une table du genre table à manger mais qui lui sert de table de travail également, où elle a ranger ses crayons à papier et de couleur. Elle y a ajouté deux fauteuils, une place chacun, au milieu desquels se trouve la table basse sur laquelle elle pose son ordinateur portable pour ses moments de détente. Pour l’occasion, elle a mis un peu d’ordre dans ses affaires. Afin de rompre le silence gênant qui s’est installé entre eux, Mélina s’éclaircit la voix et dit :
Comme on dit chez nous, bienvenue dans ma modeste demeure.
Merci, dit-il d’un ton neutre.
euuuuh… fais comme chez toi, je vais te chercher une tasse bien chaude.
Ah merci beaucoup, cela me fera du bien.
Marcus profite pour poser son sac au dos de fortune sur l’un des fauteuils, et s’assois sur l’autre. Lorsque Mélina réapparait avec le breuvage fumant, elle le lui tend, obtient un merci de sa part, et elle s’empare de son sac en indiquant le chemin de sa chambre.
Je peux ?
Oui, bien sûr !
De retour, elle lui demande :
Tu voudrais quelque chose à manger ?
Euh non, merci, ce dont j’ai envie, c’est d’une bonne douche et d’une confortable couchette.
Elle le conduit à la chambre, et lui indique la salle de bain. Pendant qu’il prenait son bain, Mélina ne savait pas vraiment quel sentiment l’animait. Etait-elle folle de joie ? Surexcitée ? Anxieuse ? Ou tout simplement heureuse ? Elle ne sait vraiment pas quoi répondre. Tout ce qu’elle savait, c’est qu’elle était sur la bonne voie, celle de fonder un foyer comme cela se doit et se veut par les siens.
La sortie de douche du jeune homme la tire de ses pensées. Serviette nouée à la taille, il lui sourit. Elle lui rend son sourire et admire son physique. C’est vrai qu’elle le trouve beau, taillé comme les mannequins de magazine people. Il vient s’asseoir prêt d’elle sur le lit et lui demande
Ta mère t’a appelée ?
Oui, ce soir.
Alors ?
Alors quoi ?
Quelles sont leurs premières impressions à tes parents ?
Oh ! Ils vous ont trouvé bien assez polis et responsables. Et de ton côté, qu’a dit ton frère ? demande-t-elle pour ne pas être plus longue.
Lui, c’est un bon rigolo. Il me dit que j’ai vraiment bon goût !
Ah bon ? Comment ça ?
Au fait, après avoir vu ta mère, il se dit que si malgré son âge, elle est encore une si superbe femme, il imagine alors la fille !
Quoi ! Il est vraiment très dôle, s’exclame Mélina en pouffant de rire.
Cela a pour effet de détendre l’atmosphère, puis Marcus continue :
Ben ouais ! Je lui répondu, que croyais tu ? J’ai du goût moi. Dit-il en lui passant un bras autour du cou et l’entrainant pour l’allonger sur le lit.
Ils sont maintenant allongés côte à côte sur le lit, elle lui demande :
Et quoi d’autres encore ?
Bof, à part cela, j’ai juste remarqué que chez vous les choses à donner pour la petite dot sont plus couteuses que pour la grande dot proprement dite.
Ah bon ?
Oui, mais laissons ça, viens dans mes bras.
Elle se roule sur elle-même pour se hisser au-dessus de lui. Il resserre ses bras musclés autour d’elle. Ils restent ainsi immobiles blottis l’un contre l’autre quand Marcus commence à lui caresser le dos, puis saisir ses lèvres des siennes. Ils s’embrassent un long moment, lorsqu’il renverse la tendance en se roulant au-dessus d’elle. Il étend ses deux bras au-dessus de sa tête et les maintient prisonnier par les siens. Puis il se lance dans un long périple d’exploration de son corps par des baisers langoureux et savoureux. Il l’embrasse dans le cou, puis sur sa poitrine. Il chatouille ses tétons de sa langue jusqu’à ce qu’elle le supplie d’arrêter la torture. De sa main experte il continue les caresses, cette fois ci entre ses jambes. Mélina est gémissante de plaisir, Marcus est satisfait de sa besogne, il la sent complètement prête à le recevoir, il dénoue la serviette qui est autour de sa taille en un tour de main, Mélina le voit déjà tout durcis. En un mouvement lent, il essaie de la prendre, mais en un autre mouvement brusque, mais en douceur, Mélina se retire. Marcus retente encore et la réaction de la jeune femme est pareille. Ayant remarqué sa réticence, Marcus lui demande :
Que se passe-t-il ?
Mélina ne sait comment le lui dire, elle en a bien envie qu’il lui fasse l’amour, mais elle ne peut s’empêcher de penser qu’ils viennent de se rencontrer, et qu’elle ne sait pas grand-chose de lui, mis à part ce qu’il lui a raconté. Tout au moins, pour une première fois qu’ils font l’amour, elle aurait apprécié qu’il mette un préservatif. C’est vrai qu’ils sont en voie d’officialiser leur relation, mais ils ne sont pas tous deux situés sur leurs statuts sérologiques pour ne citer que cela. Devrait-elle le lui dire ? Ne le prendrait il pas mal ? Que doit-elle faire ? Prendre le risque ? Marcus, voyant qu’elle tarde à répondre lui dit :
Si tu ne te sens pas encore prête, ce n’est pas grave.
Heureuse de cette perche à elle tendue, elle répond :
C’est vrai ? Tu ne m’en veux pas ?
Si tu ne te sens pas prête, je ne vais pas te brusquer.
Merci chéri, dit-elle en espérant gagner du temps pour mieux appréhender la situation dans les jours avenir.
Ceci étant, ils restent blottis l’un contre l’autre se faisant des caresses les plus insoupçonnées jusqu’à ce que le sommeil les prenne en otage.
***
Une semaine plus tard à Cotonou
Kenji, Malik et Priscille sont euphoriques en cette soirée. Assis autour d’une table dans un maquis du Stade Général Mathieu Kérekou de Cotonou, ils sirotent chacun une bière. Ils ont commandé des plats d’attiéké au poisson braisé. L’air est frais, et l’esplanade du stade est animée. Pendant que la serveuse dépose sur la table les mets qu’ils ont demandés, Kenji s’exclame :
Malik, tu es sûr de ta dame là ?
Je te dis Kenji, on est déjà venu ici manger moi et Priscille, la dame fait du bon.
C’est vrai Kenji, Malik a raison. Son plat d’attiéké est bon.
Ah ok ! Si vous le dites, parce que toi-même tu sais que c’est l’autre côté seulement que je connais… D’ailleurs, c’est toi qui m’a amené là-bas.
Si c’est attiéké seulement, fais-moi confiance, je maîtrise tout Cotonou là-dessus, reprend Malik
Hum !!! On aurait dû te nommer assistant du maire de la ville hein ! Dit Kenji.
Eh ! Pour faire quoi avec ça ? Noooon, nous c’est la douane, c’est là-bas y’a l’argent.
Ou bien ? renchérit Priscille
Tous les deux tourtereaux trinquent, puis avalent une bonne gorgée de la bière fraiche. Malik s’adresse ensuite à sa chérie :
Mais toi là, je t’ai déjà dit de trouver une de tes amies à mon pote !
Oui, je… Commence Priscille
Kenji les interrompt aussitôt :
Eh ! Eh ! Stop ! Malik, je t’ai déjà dit que je ne suis pas pressé.
Toi là même, tu sais pas que ça rend malade.
Ce n’est pas grave. Comme toi-même tu l’as dit, quand je serai à la douane, je prendrai l’argent là pour me soigner !
Ils éclatent tous de rires aussi cristallins les uns que les autres. En effet Kenji et Malik se retrouvent en cette soirée pour festoyer le fait qu’ils avaient réussi chacun à rassembler les sous nécessaires pour s’acheter l’admission à leur concours de douane. Le chef gradé que connaissait Malik, leur a assuré la réussite lorsqu’ils lui ont remis les sous. Alors très confiant d’un lendemain meilleur pour eux même et leur famille, ils ont décidé de passer un moment joyeux ensemble autour d’un repas comme avant-gout de leurs vies futures. Pour ce faire, ils ont choisi l’un des coins les plus animés de la ville de Cotonou, tant en journée qu’en soirée, l’esplanade du stade anciennement appelé stade de l’amitié. L’endroit est un vrai brassage culturel, ce qui fait qu’il est toujours vivant en monde, en nourriture, en boisson, mais aussi en son et en lumière.
Après avoir gouté la première fourchette du plat, Kenji déclare :
Ouais, ce n’est pas mal.
Mon frère, dépose la fourchette et prend la main comme moi, c’est là on déguste le vrai et le bon attiéké.
Non, c’est bon. Je ferais comme Priscille, doucement avec ma fourchette. C’est toi l’ivoirien ici.
Après une courte minute de silence, Kenji reprend :
Mais, ce n’est pas croyable ! Donc avec de l’argent on peut tout avoir quoi ? Et si on en avait pas ?
Attends, tu ne savais pas ? Partout est verrouillé. D’ailleurs même, j’ai une chanson ici qu’un groupe ivoirien qui s’appelle ‘’Espoir 2000’’ a chanté, je vais donner au DJ, il va nous jouer ça. Ecoute bien les paroles, et là où ils disent ‘’Abidjan’’ dans la chanson, remplace ‘’Abidjan’’ par ‘’Cotonou’’ seulement et tu verras la différence. Finissons de manger, on va même faire le show en même temps.
Ok.
Ils terminent tous les trois leur repas presqu’au même moment. Malik se dirige alors vers le disque jockey, il s’entretient avec lui quelques minutes et revient vers ses amis. Mais au lieu de s’asseoir, il se créer de la place en poussant un peu les chaises non occupées qui sont dans les parages.
Mais tu fais quoi ? lui demande Kenji.
Le show frangin. De là où je viens, on appelle ça « ambiance facile ».
Puis il fait signe au DJ, qui balance la mélodie. Malik, avec un rythme harmonisé commence à poser les premiers pas de la danse. Petit à petit, il devient l’objet de plusieurs regards. Kenji se laisse vite emporter par cette ambiance, quand subitement il se rappelle qu’il devait faire attention aux paroles de la chanson. Il entend alors distinctement le chanteur dire :
« ….
Aujourd’hui Abidjan, relation est mieux que diplôme. Ecole n’est pas mauvais, mais quel que soit ton niveau, ton papa n’est pas docteur, tu peux pas être infirmier. Tu veux, tu veux pas, le pays est dirigé.
Refrain : Abidjan, on n’a pas le choix, Abidjan vraiment on est serré, Abidjan, on n’a pas le choix oh, Abidjan vraiment on est serré.
Abidjan est possédé par des propriétaires terrain, ils ont déjà tout partagé, ils n’ont rien oublié, depuis les départements, en passant par les parties. A la place des ministres, on parle de conseil ethnique. ….
Refrain…
Pour faire un petit papier, tu vas taper deux semaines. Tu es dans l’immeuble à 6 heures, le gardien vient à 10 heures, le directeur vient à midi, midi quinze il est parti. Si tu es trop fâché, faut plus faire ton papier. C’est vrai on cherche travail, mais on n’aime pas les foutaises. On passe des concours où les admis sont connus. On nous fait payer dossier, on nous fait payer l’argent. Souvent même tu dois payer, parce que tu as échoué. A la place des emplois, c’est que des licenciements, arrêtez de nous former, sinon on sera musclés….
Refrain…
Dans ce domaine, c’est les femmes qui ont la chance. Elles ont toujours le dessus grâce à leur dessous. Dans la loi du plus offrant, c’est nous on n’est pas chanceux, parce qu’on a les fesses dures, on a tous les problèmes. On n’a trop espéré, les millénaires ont changés, on a compté sur Dieu… »
Kenji est ramené à la réalité par le petit groupe de jeune gens qui s’est joint à Malik. Ils poussent des cris de joie et tiennent le lieu en ébullition. Kenji n’a pas hésité aussi à se joindre à eux. Il n’a eu à exécuter quelques pas avant que la chanson s’estompe. Son ami et lui reviennent s’asseoir à leur table, tout essoufflés. Au bout de quelques minutes, ils reprennent leur souffle et Kenji dit en premier :
Tu sais faire la fête hein toi là ! J’imagine quand tu seras douanier.
Lol ! Tu as écouté la chanson ?
Oui, ça date de quelle année ?
1999, 2000 par là.
Mais franchement, ils ont tous dévoilé hein. L’affaire-là, c’est partout quoi ? Même 17 ans après leur chanson, « relation est toujours mieux que diplôme » !
Mais t’inquiète, nous on a déjà trouvé pour nous, c’est nos jeunes frères qui vont continuer le combat.
Looool !
***
Pendant ce temps dans les environs d’Abomey-Calavi
Fabien DEMEDEROS marque une pause dans sa marche, il regarde autour de lui avant de s’engager dans la rue. Puis il fait environs 500 mètres encore dans cette ruelle de la bourgade de Somé, situé à quelques kilomètres après Calavi. Il regarde encore autour de lui, il fait nuit noire, personne n’est sensé le reconnaitre normalement. Il entre dans la demeure, et se dirige vers la seule porte de la concession. Avant qu’il ne toque à la porte, une voix se fait entendre :
Entre Fabien, je t’attendais !
Fabien entre et prend place sur les sièges recouvert de peaux d’animaux. Il fait face au vieillard et lui demande en dialecte :
Comment saviez-vous que je venais ?
Je te l’avais dit Fabien, qu’une fois que tu aurais posé cet acte, une autre longue série allait en succéder.
Ah vieux sage, je ne pouvais pas faire autrement, il me fallait cette cour, sinon ma famille et moi allions nous retrouver à la rue.
Que veux-tu maintenant ? dit-il en agitant le chasse mouche qu’il avait en main.
Le jeune garçon, je vous avais dit de tout faire pour ne même pas qu’il voit le jour…
On a tout fait Fabien, tu le sais bien, mais Dieu est au-dessus de tout.
Voilà qu’il m’empêche de m’accaparer de la cour à présent. il faut faire quelque chose.
Il est trop jeune et innocent, si tu mets son sang sur tes mains, tu risques de payer le prix fort.
Non, je ne veux pas arriver jusque-là.
Qu’est-ce que tu veux cette fois ?
La même chose que pour son père entre temps. Faites-le partir loin d’ici, très, très loin.
Tu sais que c’est juste pour un temps, il finira par revenir un de ces jours, s’il le veut.
Oui, mais s’il pait à Dieu, il mourra là-bas, et nous oublieras.
Ok. Mais j’espère que tu te rappelles que s’il revenait avant ta mort, tu dois vite revenir défaire le sortilège, sinon, c’est toi qui périra ?
Oui, je m’en rappelle bien, comme ce qu’on a eu à faire pour son père.
Très bien.
Après cela, le vieux charlatan sort un objet de derrière son siège, le place devant ses génies. Puis il se met à faire des incantations là-dessus où il prononce le nom de la victime, ainsi que celui du demandeur. A la fin de son rituel, il remet l’objet à Fabien.
Tiens cette eau. Tôt le matin, avant que le soleil ne se lève et avant le premier chant du coq, tu la verseras devant sa porte pour qu’il passe là-dedans. Veille à ce que personne ne te voit faire.
Ok, c’est compris.
Sur ce Fabien, prend congé de son marabout et prend le chemin du retour. La nuit était encore plus avancée, et les bruits des grillons ornaient le silence de la pénombre. Il s’empresse donc de rentrer chez lui sans accorder un regard à ses alentours.
Au bout d’une trentaine de minute, il est à domicile. Il s’enferme à double tour à peine dans ses appartements lorsqu’il entend, le jeune rentrer de sa sortie nocturne. Il s’esquisse un sourire machiavélique à lui-même, avant de s’en aller se coucher.
Il sonne 5 heures tapantes, lorsque Fabien met pied dehors dans la concession. Il regarde à gauche et à droite, personne en vue. Il se dirige sans hésiter devant la porte du jeune homme et y renverse le liquide de couleur neutre, qui se confond aisément avec le sol en béton de la concession, comme le lui a indiqué le féticheur. Puis il s’en retourne chez lui, en restant aux aguets. Deux heures de temps plus tard, il entend, le jeune homme ouvrir la porte de sa chambre. Fabien s’en presse de sortir pour constater de lui-même qu’il passerait dessus. Sous ses yeux, cela fut le cas. Fort heureux de cela, il s’adresse à lui tout gaie.
Kenji, comment vas-tu ce matin ? Tu es lève tôt aujourd’hui hein.
Kenji, surpris de cette brusque attention à sa personne, prend la peine de lui répondre tout de même :
C’est l’heure habituelle à laquelle je sors mon oncle.
Ah ok ! Donc c’est moi qui suis lève tôt aujourd’hui alors.
On dirait mon oncle, dit-il d’un air froid. Je vais dire bonjour à maman avant de partir.
Ok. Bon tu passes une bonne journée hein. RAMENE nous de bonnes choses.
En guise de réponse, Kenji n’a fait que hocher la tête. Il se dirige vers l’appartement de sa mère en disant tout bas :
Espèce de taré va !