Chapitre 12 : Rachidi Tan
Write by Mayei
...Linda...
Je passais la grande partie de ma journée de repos à préparer notre rencontre. C’était vrai que nous avions pour habitude de nous voir mais je me devais de mettre mes qualités de bon hôte en valeur. J’avais donc âpreté les amuse-bouche et les boissons. J’avais pris de l’alcool puisque nous aimions ça en dehors de violette (rire).
Dharan était sorti ce matin pour une séance de travail importante et rentrerait sûrement tard. De toutes les manières, c’était le froid entre nous. Je refusais toute approche tant que nous n’aurions pas eu une bonne et vraie discussion lui et moi.
Je me mis à chercher mon téléphone dans tous les recoins de la cuisine mais ne le trouvais nulle part. Je le retrouvais posé sur la table basse du salon. J’avais reçu plusieurs appels manqués notamment de Dharan mais aussi de Nathanaël. Mon cœur fit un bond dans ma poitrine lorsque je vis le prénom de ce dernier. Depuis le jour où il m’avait raccompagnée jusqu’à chez moi, nous n’avions plus échangé.
J’ignorais les appels de Dharan et rappelais Nathanaël qui décrocha dès les premières tonalités.
Nath : allo ?
Moi (hésitante) : comment allez-vous monsieur Kalou ?
Nath : n’étions-nous pas censés nous tutoyer ?
Moi : c’est vrai, excuse-moi, j’avais omis ce détail. Comment vas-tu ?
Bath : maintenant que j’entends ta voix, je vais beaucoup mieux.
Je perdis mes mots sur le moment, ne sachant que répondre à cette phrase.
Nath : tu es toujours là ?
Moi : euh oui
Nath : je souhaiterais t’inviter à diner ce vendredi...qu’en dis-tu ?
Je me mis à réfléchis aussi vite que je le pouvais ! Il y avait tellement de trucs à prendre en compte dans l’équation. Devrais-je accepter l’invitation ? Dharan serait-il toujours là jusqu’au vendredi ? S’il était là quelle raison allais-je lui donner ? Toutes ces questions me chauffèrent le cerveau et j’en arrivais presqu’a oublier le fait d’être toujours en ligne.
Nath : tu as l’air distraite en ce moment…est-ce que je dérange ?
Moi : excuse-moi, c’est que je dois recevoir des amies du coup je suis un peu tête en l’air. Laisse-moi te rappeler jeudi et te dire si oui ou non ce dîner sera possible.
Nath : pas de soucis j’attendrai avec impatience ton coup de fil. Prends soin de toi Linda
Moi : toi aussi !
Je raccrochais avec le cœur qui battait à vive allure. C’était la première fois qu’il m’appelait par mon prénom et ça me chamboulait de l’entendre m’appeler ainsi. Il occupait de plus en plus mon esprit même si j’essayais de me voiler la face. Son visage, son sourire, sa carrure ne quittaient pas mes rêves. Il avait quelque chose que je ne saurais décrire, mais j’étais sure d’une chose, cela ne me laissait pas indifférente.
Je rangeais tout ceci dans un coin de ma tête en poursuivant le cours de mes actions. Les filles n’allaient plus durer. Je me dépêchais donc de prendre une douche avant de les accueillir.
C’est avec joie que nous nous retrouvions dans mon jardin autour de cette table qui soutenait nos boissons et en cas.
Moi : Salomé tu as l’air vraiment épanouie
Nancy : je ne te le fais pas dire...
Salomé : c’est l’amour les filles...l’amour. Maxime est juste extraordinaire avec moi.
Nancy (grimaçant) : encore ce Maxime
Violette : c’est qui Maxime en fait ?
Nancy : un papa que Salomé a dégoté et depuis elle ne peut plus s’en passer.
Salomé : ce n’est pas un papa Nancy ! Tu ne l’aimes peut-être pas mais ce n’est pas papa n’est-ce pas Linda ?
Moi (souriant) : bon pas tellement papa mais âgé je lui donnerais facilement 38 ou 40 ans.
Salomé : il a juste 40 ans...attends je te montre une photo violette
Elle fouilla dans son sac pour en faire sortir son téléphone qui malheureusement était éteint. Nous nous moquions toutes lorsque Nancy affirma coûte que coûte que le Maxime en question était trop vieux pour Salomé. Cette dernière n’en démordait pas. Elle insistait sur le fait qu’il valait mieux être avec un homme âgé, conscient et bien placé socialement qu’un jeune de son âge qui passerait son temps à tirer sur toutes les filles et à lui donner des chagrins d’amour inutiles. D’ailleurs elle passait toute cette semaine avec lui dans l’appartement de celui-ci.
Nancy : tu ne trouves pas ça bizarre qu’un homme de quarante ans qui travaille n’ait pas d’enfants, vive dans un simple apparemment et tout.
Violette : arrête Nancy ! Si elle se sent bien avec lui c’est l’essentiel et rien de plus.
Salomé : tu vois, au moins une qui me comprend
Linda : et si nous changions de sujet ? Maxime a déjà pris assez de notre temps là.
Violette : je me suis mise au commerce de jus, Bissap et tout afin d’être indépendante de mon mari car cette histoire commence à virer au pire. Je pense que nous sommes sur le point de nous séparer.
Nancy : ne parles pas malheur tout peut s’arranger. Et c’est une bonne idée que tu décides de faire quelque chose. Peut-être que le fait d’être toi aussi occupée apportera moins de monotonie à votre relation. J’espère ne pas te vexer.
Violette : Pas du tout, je comprends ce que tu veux dire.
Moi : je peux te faire des cartes, des affiches que j’imprimerais au boulot.
Salomé : te créer une page Facebook pour que tu puisses te faire connaître un peu partout sur la toile.
Violette (touchée) : c’est tellement gentil de votre part mais mon mari refuse que je vende sous son toit et je n’ai vraiment pas d’autres endroits où le faire ou encore d’argent pour me louer un local pour la vente du coup c’est compliqué.
Nancy : il abuse un peu ton mari, tu ne trouves pas ?
Pendant qu’elles parlaient je me rappelais de mon ancien studio que je louais lorsque je me débrouillais encore. J’avais vécu tellement d’épisodes de ma vie dans cet endroit que j’eus du mal à m’en défaire. Lorsque ma société fut maintenant rentable, je déménageais dans cette nouvelle maison et achetais le studio. Je le mis en location un moment mais depuis que l’ancien locataire avait tout saccagé, je n’avais plus osé le faire et le gardais pour le potentiel enfant que j’aurais. Il me vint alors une idée.
Moi : je pense que je peux t’aider. Si ton mari ne veut pas de ton business c’est qu’il ne veut pas que tu avances dans la vie. S’il ne veut pas que tu utilises votre maison et bien tu le feras ailleurs. J’ai un studio vers l’université de cocody que tu pourras utiliser comme point de vente, avec les étudiants et tout, je pense que ça t’aidera vraiment et te fera une bonne clientèle.
Nancy : et moi j’ai un congélateur qui traine sans être utilisé. Tu peux en disposer comme bon te semble donc le tout est réglé
Elle nous regarda en gardant le silence. Ses yeux se mirent à briller et je devinais aisément qu’elle était au bord des larmes. Violette était beaucoup sensible et cela se reflétait même dans ses gestes qui étaient si tendres.
Salomé : ne pleure pas s’il te plaît violette.
Violette (voix brisée) : c’est que…personne n’a été aussi généreux envers moi au paravent. J’ai pour habitude de donner mais pas de recevoir. Je vous remercie tellement les filles...les mots me manquent.
Moi : les amies sont faites pour ça. Il faut déjà penser à un nom pour ton business...quelque chose d’attrayant.
Nancy : j’ai trouvé, j’ai trouvé Desaltero !
Nous éclations de rire après avoir entendu ce nom absurde que venait de proposer Nancy, elle était toujours à même de faire des blagues celle-ci. On pouvait compter sur elle pour nous détendre l’atmosphère. Nous réfléchissions sur le nom du business de violette. Je vous assure que des propositions hilarantes nous avions entendu. Finalement « juicy land » fut retenu. J’imaginais déjà toutes les belles affiches que j’allais faire. Il me fallait dans un premier temps développer un logo que Salomé utiliserait pour la page Facebook.
Ping ping ping.
Alors que je m’en rendais compte, le gardien courrait déjà ouvrir le portail. Je regardais immédiatement ma montre, vingt heures et deux minutes. Je m’attendais à ce qu’il rentre plus tard, aux alentours de vingt-trois heures. Je gardais cependant un tempérament serein et calme bien que je sois un peu inquiète. Dharan termina sa course bien stationné dans le garage. Il ne pouvait passer sans nous voir alors naturellement il vint dans notre direction. Je me levais pour l’accueillir.
Dharan : bonsoir mesdames !
Elles : bonsoir monsieur !
Moi : chérie je te présente mes amies violette, Salomé et Nancy
Dharan : enchanté mesdames
Moi : les filles je vous présente mon mari Dharan
Elles : enchantées
Dharan : tout le plaisir est pour moi. J’espère que vous êtes à votre aise et que Linda s’occupe bien de vous
Nancy : il n’ y a pas de quoi se plaindre en tout cas
Dharan : bien, dans ce cas je vous laisse entre vous.
Il les salua de nouveau et s’en alla vers la maison. Je m’assis en poussant un ouf de soulagement. Tout s’était bien passé, alors que j’imaginais le pire.
Violette : il est canon le beau frère
Moi (faussement choquée) : oh violette c’est toi qui parle ainsi ? J’aurais parié entendre ça de la bouche de Nancy
Nancy : vraiment ! Nancy ci, Nancy ça ! Tout c’est Nancy hein !
Salomé : eh oui ! Tout c’est Nancy !
Nancy : quitte la vilaine !
Nous restions ensemble un bout de temps puis les filles finirent par demander la route. Dharan était sous la douche donc elles ne m’avaient pas pu lui adresser les salutations avant de s’en aller. Je les accompagnais jusqu’à la voiture de Nancy qu’elle avait laissé dehors et lorsqu’elles furent loin je rentrais chez moi. Je demandais gentiment au gardien de débarrasser la table puisque la fille de ménage était déjà rentrée. Je montais ensuite rejoindre Dharan dans chambre.
Moi (enthousiaste) : les filles te passent le bonsoir, elles sont rentrées !
Dharan (froid) : qu’est-ce qu’on s’était dit sur les amis ?
Je savais, je le savais bien, c’était trop beau pour être vrai. Ce visage du mari jovial qu’il avait présenté plus tôt était bien une mascarade. Je décidais d’ignorer sa réponse et m’assis sur le lit.
Dharan : je pense être en train de te parler Linda !
Moi : que veux-tu que je te dise ? J’ai des amis Dharan tout comme toi d’ailleurs
Dharan : ce n’est pas pareille, on connaît vos amitiés de femmes. Toujours à fouiner dans la vie des autres et créer des problèmes. De plus dès le départ nous avions bien établi une règle par rapport à ça.
Moi : oui et j’avais accepté du fait sur je n’avais pas eu de chance en amitié mais cette fois-ci c’est différent. C’est ce que j’essaie de te faire comprendre mais tu ne saisis pas. Tout évolue Dharan, tout autour de nous évolue sauf nous, sauf ces putains de règles. Il faut être à même faire des concessions tu ne trouves pas ?
Dharan : des concessions comme ?
Moi : comme commencer par me dire des jours avant tes voyages, me laisser te joindre quand j’en ai envie. J’ai de plus en plus besoin de toi Dharan et ces séjours de courtes durées ne m’arrangent plus. J’en veux plus, j’ai besoin de plus.
Dharan : je ne sais quoi te dire...je ne pensais pas que nous aurions cette discussion un jour toi et moi. Je te pensais sûre et ferme par rapport à ce sur tu voulais et voilà que non ! Je ne sais vraiment pas comment faire, comment procéder.
Je restais toute silencieuse à le regarder décrire à quel point tout ceci le chamboulerait. Ce que je compris ce soir-là était que les désirs avaient évolué de mon côté mais pas du sien. Il était resté le même et n’était prêt à faire aucune concession afin d’apporter une quelconque solution à mes nouveaux souhaits. Alors qu’il parlait toujours, je me levais de façon nonchalante et retirais les vêtements que j’avais sur moi. Je me passais de l’eau sur le corps pour me rincer et enfilais ma tenue de nuit. Il n’était plus dans la chambre. Je ne cherchais non plus à savoir dans quelle pièce il se trouvait. Je m’endormis après avoir pris le soin de régler mon réveil à mon heure habituelle.
... ... ...
Je n’en croyais pas mes oreilles lorsque le réveil sonna de façon incessante dans mes oreilles. Il était déjà sept heures ? J’avais dormi à peine. Je me retournais dans le lit pour constater le fait que Dharan n’y était plus. Il était sans doute déjà allé rencontrer son collaborateur. En reposant mon téléphone sur mon chevet, je remarquais cette feuille de papier pliée en deux. Mon intuition se mit en éveil et un mauvais pressentiment m’assaillit. La main tremblante je pris cette feuille et la dépliais.
« Linda, je n’ai pas voulu te déranger tu dormais si paisiblement. Je prends le vol de huit heures pour Abuja. Je rentrerai très vite prends soin de toi. »
Ma main tremblait toujours après avoir lu ces deux lignes. Il m’avait encore fait l’un de ses coups. Il avait préféré fuir plutôt que de trouver une solution à notre problème ou du moins mon problème. Et si je lui avais parlé de mon désir d’enfanter qu’allait-il faire ? J’avais tellement mal que je ne pus m’empêcher de pleurer à chaudes larmes. Je ne me souvenais plus de la dernière fois que j’avais pleuré encore moins pour un homme. Je pleurais un bon coup et en essuyant mes larmes je composais le numéro du bureau.
Tiphaine : imprimerie lumière bonjour !
Moi : bonjour Tiphaine comment vas-tu ?
Tiphaine : je vais bien madame ! Et vous ?
Tiphaine : pas trop bien, c’est pour cela que je t’appelle. Je resterai à la maison tout le reste de cette semaine. S’il y’a quelconque documents à signer fais les moi prévenir par le chauffeur
Tiphaine : bien madame c’est noté
Moi : j’oubliais je te ferai parvenir un e-mail avec tes données s’il te plaît transfère les à monsieur jean. Je n’ai pas les détails du boulot ici.
Tiphaine : d’accord madame
Moi : si j’ai besoin de quelque chose d’autre je te le ferai savoir.
Tiphaine : je reste à l’écoute. Reposez-vous bien madame
Moi : merci Tiphaine.
Je raccrochais mais gardais mon téléphone entre mes mains. Il n’était pas encore huit heures, Dharan n’avait donc pas encore quitté le pays. Je ne l’appelais point après la façon dont il s’était comporté envers moi. S’il voulait jouer à ce jeu, nous allions jouer.
Nath : allo ?
Moi : bonjour monsieur Kalou
Nath : comment vas-tu Linda ?
Moi : bien et j’espère que toi aussi. J’appelais pour confirmer le dîner de ce vendredi
Nath : je suis donc l’homme le plus heureux du pays en ce jour. Laisse-moi t’envoyer le nom de l’endroit et l’heure par message.
Moi : bien...passe une belle journée
Nath : c’est déjà le cas Linda.
...Rachidi Tan...
Depuis que Salomé était sortie de cette maison avec ce monsieur, je n’avais plus réussi à fermer les yeux correctement. Je me réveillais chaque fois en sursaut pour voir si elle était rentée dans la nuit mais non et ça durait déjà trois jours. Il fallait que je me l’avoue, je l’avais dans la peau cette fille et le pire c’est qu’elle n’avait rien fait de spécial pour m’avoir moi qui pourtant étais si compliqué en matière de femme.
Nous nous sommes rencontrés par le biais d’un ami qui l’avait invitée à l’une de nos virées nocturnes. A vrai dire il avait prévu passer à l’acte ce même soir avec elle car selon lui, il avait bien misé sur la petite. Entre les transferts d’unité et les sorties à n’en point finir, il fallait qu’il se rembourse en passant et repassant sur son corps à la sortie de la boîte. Il avait déjà réservé la chambre d’hôtel.
J’imaginais donc déjà le genre de filles qu’elle était. Sûrement celles qui se faisaient entretenir par des hommes friqués et qui se servaient de leurs corps comme monnaie de change. J’avais horreur de ce genre de femmes qui ne se respectaient pas et qui ne cherchaient pas à travailler d’elles même pour avoir leur argent.
Lorsque Salomé mit les pieds ce soir-là, il n’y eut aucun débat. La fille était fort belle avec un corps sublime comme j’aimais. Je ne pus m’empêcher de garder la bouche ouverte.
Julien : tu vois ! Je t’avais dit qu’elle était bonne.
Je fis celui qui ne savait pas de quoi il parlait.
Moi : de quoi parles-tu ?
Julien : si tu veux lorsque je finis avec elle je te fais la passe.
Moi : merci mais non merci ! De plus ce n’est même pas elle que je regardais mais la fille derrière
Julien (rigolant) : si tu le dis !
Il alla accueillir la demoiselle et la plaça juste près de moi puis fit les présentations. Je fus étonné de voir à quel point elle aimait danser. Elle ne s’était assise que lorsque le Dj passait les slows. Julien l’avait même suppliée de danser sur ces sons avec lui mais elle restait catégorique c’était non. Je n’étais pas bon danseur donc je restais toute la soirée à apprécier la musique et à siroter ma boisson.
Comme prévu, à la sortie de la boîte, il essaya d’embarquer la fille mais celle-ci ne se montra pas conciliante. Elle souhaitait rentrer chez elle et nulle part ailleurs. Julien s’énervait de plus en plus et sans réfléchir leva la main sur elle. Il lui asséna une gifle retentissante qui fit sursauter les gens autour de nous. Si d’autres riaient, moi j’avais vu rouge. Je m’interposais immédiatement.
Moi : la fille ne veut pas te suivre laisse la partie tranquillement !
Julien : de quel côté es-tu Rachidi ? Après tous les sous qu’elle m’a fait gaspiller !
Moi : laisse-la simplement partir et rentrons
Julien : sinon ?
Moi (retroussant les manches de ma chemise) : sinon tu seras obligé de m’affronter
J’étais connu pour mes talents de bagarreur. Derrière mon allure calme et tranquille, il ne fallait pas me déranger sinon je ripostais. Julien en avait déjà fait les frais lorsque nous étions encore à l’université. C’était d’ailleurs ainsi que nous étions devenus amis
Julien : tu laisses une femme se mettre entre nous ?
Moi : si tu le prends comme ça
Il s’engouffra dans sa voiture et démarra sur les chapeaux de roue.
Moi (à la fille) : ça peut aller ?
Elle (oui de la tête)
Moi : si ça ne te dérange pas je peux se déposer chez toi.
Elle : ok
Je l’avais déposée chez elle cette nuit-là et le lendemain j’étais passé voir comment elle se portait puis par la même occasion lui présenter des excuses au noms de Julien qui ne regrettait même pas. Pire, il avait décidé de ne plus m’adresser la parole. Un autre jour j’étais passé puis un autre jour et encore un autre. Nous avions fini par devenir amis et j’appris beaucoup sur elle, sur comment elle avait quitté sa famille pour se retrouver toute seule ici afin réaliser son rêve d’être mannequin à plein temps.
Je travaillais dans une société publicitaire de la place comme concepteur marketing. J’avais toujours été attiré par ce métier. J’aimais ça, trouver la bonne formule pour faire marcher un produit. Ne dit-on pas que le métier de marketing consiste à créer la nécessité de posséder le produit chez le potentiel client ? Et bien je me donnais un plaisir fou à créer ce besoin. Mon projet à long terme était de monter ma propre boîte mais avant il me fallait une certaine expérience dans le milieu.
Je n’étais pas riche mais gagnais décemment ma vie. Je louais une maison basse de deux chambres et roulais dans ma petite Toyota Corolla. Je me suffisais et tout allait bien. Je n’avais pas prévu tomber amoureux d’elle. Notre amitié me suffisait surtout que je n’approuvais pas le fait qu’elle sorte avec de ces papas pour arrondir ses fins de mois.
Alors dès que j’avais entendu parler de ce casting, sans hésiter une seconde, je lui en fis part. j’avais même puiser dans mes économies pour soudoyer l’un des responsables pour qu’elle puisse passer, je voulais qu’elle soit complètement indépendante.
Ce soir-là j’étais énervé car sans réfléchi j’avais cru qu’elle avait cédé aux avances de ce même monsieur à qui j’avais remis l’argent. Malheureusement j’avais choisi ce même soir pour l’embrasser mais je ne pouvais plus me retenir. Je l’aimais comme un fou et elle manquait terriblement en ce moment.
Cling cling cling
Je sortis de ma torpeur et regardais autour de moi comme si je voyais ma maison pour la première fois. Ce fut après quelques secondes que je réalisais qu’on sonnait à ma porte. Je me levais donc pour ouvrir le portail et laissais entrer ma grande sœur Sarah. Il y avait tout juste deux années entre nous donc nous étions très complices.
Sarah : on dirait que ce n’est pas la grande forme hein !
Moi : pourquoi cette remarque ?
Sarah : mais regarde toi, tu as perdu du poids là.
Moi : tu exagères, j’ai toujours la même forme. Tu n’as pas mis tes lunettes c’est pour ça que tu vois mal ma chère
Sarah : c’est ça moque-toi de moi, vilain garnement
Moi : je te sers quelque chose à boire ?
Sarah : non ça ira (souriant) je sors d’un dangereux rendez-vous ! oh j’ai bien mangé et bien bu.
Moi : ton mari est-il au courant ?
Sarah : regardez-moi celui-là ! C’est avec lui-même que j’étais pour ta gouverne.
Elle se saisit de la télécommande et zappa les chaînes jusqu’à tomber sur un programme qu’elle affectionnait sûrement. Je restais silencieux de mon côté et encore une fois, Salomé s’imposa à mes pensées. Où pouvait-elle bien être ? Est-ce parce que je ne suis pas plein aux as comme ses papas qu’elle ne veut rien avoir à faire avec moi ?
Sarah : sinon et le boulot ?
Moi : toujours là, j’arrive à joindre les deux bouts.
Sarah : tu sais que si tu acceptais l’offre de papa tu réussirais sûrement à joindre plus de quatre bouts
Moi : je le sais très bien mais je suis bien où je suis. Je n’ai pas envie d’épouser une fille choisie par papa juste pour toucher mes parts de l’entreprise.
Sarah : ce n’est pas aussi mal que ça ! Regarde-moi et mon mari. Au début c’était compliqué j’avoue mais avec le temps tout est devenu plus agréable au point de ne pouvoir m’imaginer vivre sans lui.
Moi : ça c’est ton cas ! Qu’est-ce qui prouve que ce sera la même chose pour moi ? Je ne peux pas épouser Mira car je ne l’aime pas. Je ne veux pas la faire souffrir donc je préfère rester loin de papa et de la société. Je ferai mon bout de chemin de moi-même
Sarah : ok si tu le dis ! (se levant) J’espère qu’il n’y a pas de filles dans ta chambre, je vais me reposer un peu et après je rentre
Moi : ok je serai au salon
Ma famille ? J’étais le second enfant de Adam et Fatiha Tan. Mon père avait fait fortune dans le bâtiment. Il avait décroché les plus gros marchés de construction du gouvernement mais aussi du privé qui avaient participé à l’essor de Tan construction. Contrairement à ma mère qui était tout ce qu’il y avait de plus doux sur cette terre, mon père lui, était un tyran. Il s’immisçait constamment dans la vie de ses enfants et ne nous laissait aucunement faire nos propres choix.
Ne m’avait-il pas forcé à faire des études d’architecture ? Ma mère sans qu’il me le sache m’avait aidé à payer pour mes études de marketing. Il me céderait des parts de l’entreprise à la seule condition que j’épouse la fille d’un de ses amis pleins aux as. Mais j’en avais marre de suivre sa dictature et de la naquirent tous les problèmes entre lui et moi.
Je sursautais en entendant le portail s’ouvrir puis des voix. Je pensais immédiatement à un vol mais reconnu la voix de Salomé. Elle était de retour. Une grande joie envahit mon cœur mais je restais de marbre dans mon fauteuil à attendre qu’elle passe par le salon.
Salomé : Rachidi ? Tu es la ?
Moi : jusqu’à preuve du contraire c’est toujours chez moi...
Salomé : c’est que...en fait...
« Je suis là ma princesse, alors on commence par où avec ce déménagement ? »
Nous nous retournions tous les deux vers ce monsieur qui venait de parler. En le regardant je lui donnerais facilement 40 ans. Qu’est-ce qui m’étonnait encore avec Salomé. C’était le même qui était venu la chercher.
Salomé : chéri tu peux m’attendre dans la voiture finalement je le ferai toute seule ce déménagement.
Moi : ce n’est pas la peine de le foutre dehors. Il est là pour t’aider qu’il le fasse comme ça tu t’en iras plus rapidement d’ici. À toi seule ça te prendra trop de temps et je serai obligé de supporter ta présence plus longtemps.
Elle me regardait outrée, choquée. C’était le but que je recherchais ! Qu’elle comprenne qu’elle me blesse elle aussi. Ramener ce monsieur jusqu’à chez moi soi-disant pour l’aider à déménager. Combien d’affaire avait-elle à part ses deux ou trois sacs d’habits et chaussures ? Cela nécessitait il de l’aide à plus forte raison que son gars entre dans ma maison comme s’il était chez lui !
Salomé : Maxime suis moi s’il te plaît.
Je suis resté assis à supporter les allées et venues de ce monsieur qui ne se gênait même pas. Je ne comprenais pas le comportement de Salomé. Où avais-je mal agi pour qu’elle se dresse contre moi ? N’avais pas assez bien pris soin d’elle ? Je donnais l’impression d’être concentré sur mon programme mais à chaque fois qu’elle passait, mes yeux ne pouvaient s’empêcher d’aller dans sa direction.
Salomé : j’ai fini. Il n’y a plus aucune de mes affaires dans ta maison. Tu ne seras plus obligé de supporter le fait de me voir.
Moi : ok
Salomé : j’y vais !
Moi : Salomé ?
Salomé : oui ?
Moi : tu oublies quelque chose !
Salomé (levant les yeux) : quoi encore ?
Moi : mes clés s’il te plaît
Salomé : oh !
Elle les posa sur la table devant moi et s’en alla sans un merci. Allais-je encore la revoir ? Je ne savais rien. Était-il temps que je retourne vers mon père pour ne plus essuyer ce genre de frustration ? Je n’en savais rien. J’étais pourtant sur d’une chose ! Si j’avais le statut social de ce monsieur, elle aurait sûrement porté un autre regard sur ma personne.