CHAPITRE 21 : L’imprévu

Write by delali


Kady est folle de joie. Enfin l’occasion tant attendue, tant espérée et pour laquelle elle travaille si dure depuis des années est arrivée. Enfin Philippe lui confie sa première mission de travail officielle. C’est la nouvelle qu’il a voulue lui annoncer juste avant l’appel de son fils Mike :
- Vendu fiston ! Je savais que tu finirais par accepter et je suis sûr que tu aimeras cette ville ! Mais attention ! Je t’ai à l’œil tout de même !
- Seeeeee you dad !!!
Sur ce, la conversation s’est terminée. Philippe est redevenu plus sérieux et s’adresse à Kady :
- Bon très chère, on s’est assez amusés ! Il est temps de parler travail.
- Ok ! dit-elle.
Il retourne s’asseoir à son bureau et invite Kady à faire de même. Il sort deux dossiers du tiroir de son bureau, il lui remet une copie et en garde l’autre :
- Tu sais déjà de quoi il s’agit, ce sont les statuts et règlements de la fondation sur laquelle nous travaillons. Et comme tu le sais je prendrai ma retraite dans quelques années, alors il faut qu’on se hâte si on veut que tu prennes la main et que les partenaires soient dans la barque… je veux que tu sois ma main droite sur ce projet, parce que je compte bien profiter de ma retraite !
Pendant qu’il parle Kady le suit très attentivement. Durant toutes les années qu’elle a passé à ses côtés, elle le connait assez bien pour savoir qu’en matière de travail, il est du genre à vouloir vite se faire comprendre et n’aime pas se répéter deux fois sur un même sujet. Il lui fait le compte rendu de sa séance de travail d’avec ses partenaires et bailleurs. En effet, Philippe a eu dans le temps un projet embryonnaire de créer sa propre ONG. Ce projet a toujours été enfoui quelque part dans sa tête et au fond d’un de ses tiroirs. Aujourd’hui grâce à sa rencontre avec Kady, ce projet a pris forme et vu le jour. Dans sa forme initiale, le projet a eu pour objet d’être une organisation d’aide à l’enfance malheureuse, vue qu’il aime tant les enfants et qui plus est, il travaille aussi dans le même domaine. Mais sa rencontre avec la jeune fille lui a fait redéfinir en quelque sorte l’objet de l’organisation. A présent, il a opté pour une Fondation. Il a réussi à convaincre ses amis et partenaires de faire des dons à sa Fondation afin que cette dernière puisse œuvrer dans le sociale, plus exactement auprès de l’adolescence. Le but de la fondation est de mettre à disposition, sur étude de dossier, des fonds nécessaires à toutes organisations, institutions qui militent afin que les adolescents aient accès à l’information et à une aide en cas de difficultés. Après un court instant de silence, Philippe reprend à l’endroit de Kady :
- J’ai beaucoup réfléchi quant au nom qu’on va donner à la fondation…
- A ce sujet moi aussi j’ai quelques propositions à vous faire…
- Je pense que ma décision est murement réfléchie ! Reprend-t-il
- … ah ok ! Si vous le pensez ! Répond Kady se sentant un peu rabrouée.
- On va l’appeler Rowen-Issa.
Kady écarquille les yeux et a la bouche presqu’ouverte, mais aucun son n’y sort. Philippe reprend sur un ton d’ironie :
- Tu risques d’avaler une mouche si tu restes longtemps la bouche ouverte !
- …m …. m…ais vous êtes… sérieux ?!!!
- Oui ! quand j’y pense, ce garçon est le symbole même de notre cause, il devait venir au monde pour que tout ceci se passe !
- Je suis… sans voix !
- Ne dit rien ! je ne te le disais pas pour que tu aies ton avis là-dessus, je t’informais juste !
Après cette information, Kady ne dit presque rien jusqu’à la fin de la séance, elle pense à la réflexion de Philippe. Elle se dit en son for intérieur : « c’est vrai qu’il a dû se battre contre tous pour vivre mon petit. Je dirais que personne ne voulait qu’il voie le jour : d’abord ma mère, ensuite les parents de Chris, Christopher lui-même… et pour couronner le tout moi-même sa propre mère, à un moment je ne voulais plus de lui… heureusement que le sort en a décidé autrement et qu’il est avec moi aujourd’hui… heureusement aussi que maman Claudine était là… » :
- …. Kady ! tu m’écoutes ? demande Philippe qui s’est rendu compte qu’elle n’est plus présente.
- Vous disiez ?? Répond-t-elle en sursautant.
- Tiens voici ta feuille de route, il nous faut louer des bureaux, recruter du personnel et tout le reste. Tu as tout ce que tu as faire là-dessus ! Mais une chose est très importante, il faut que je valide au préalable toutes les décisions que tu prendras.
- Ok.
***
Encore une fois, elle n’a pas pu aller chercher son fils à la sortie de l’école. Ça été bien beau de rêver travailler et tout, mais maintenant qu’elle y est, Kady est à bout de souffle. Elle ne rêve que d’une seule chose, avoir un moment pour elle afin qu’elle puisse le consacrer à son fils. Depuis près de deux semaines, elle ne voit son fils que les weekends, et là encore, c’est quand elle passe en coup de vent à la maison histoire de prendre une douche, se changer pour un autre rendez-vous. Quand elle sort le matin, son fils est encore endormi, et quand elle rentre, elle est tellement épuisée qu’elle est contente qu’il soit déjà endormi. Plus d’une fois, elle s’est réveillée le matin sur le divan. C’est là qu’elle se rend compte que la veille, elle a dû vouloir se reposer quelques minutes sur le fauteuil avant de regagner sa chambre et que le sommeil a dû l’emporter. Mais à chaque fois que cela lui arrivait, elle se réveillait le matin et se retrouvait couverte. C’est l’œuvre de maman Claudine. Ah maman Claudine ! Que fera-t-elle sans elle ? Se demande-t-elle en son for intérieur. Ces semaines où elle est complètement absente, elle ne s’inquiète pas vraiment, parce qu’elle sait que maman Claudine est là. C’est elle qui s’occupe de Rowen tout le temps. D’ailleurs il ne manque pas de lui dire à chaque fois qu’ils se parlent au téléphone :
- Je ne pourrais pas rentrer pour manger avec toi mon chéri !
- yai mangé avè mamie !
Kady sourit à chaque fois, car Rowen n’en fini jamais avec ses « mamie ceci, mamie cela ! ». Mais Kady sait que maman Claudine lui en veut toujours pour la tournure qu’a prise leur dernière discussion, parce que depuis ce temps, elles n’ont plus échangé d’autres mots mis à part les civilités. Quand Rowen veut parler à sa mère, maman Claudine lance l’appel et remet l’appareil à l’enfant. Kady espère pouvoir lui parler quand Rowen finit, mais là encore, elle s’empresse de raccrocher. Kady a plusieurs fois tenté de l’appeler, mais quand Rowen n’est pas à coté, maman Claudine ne décroche pas. Kady s’est donc ravisée de l’appeler. Elle s’est dit de toutes les façons, c’est un sujet assez délicat, qu’elle ne peut pas régler au téléphone. Toutefois, elle accorde un point d’honneur à toujours l’informer par SMS, de sa position ou de l’heure à laquelle elle rentrerait. Mais comme si ce n’est pas de chance pour elle, elle rentre très souvent tardivement.
Même quand maman Claudine n’est pas endormie, elle est enfermée dans sa chambre, et l’ignore complètement. Il faut qu’elle fasse quelque chose pour régler cette situation, elle ne peut pas rester aussi longtemps en désaccord avec elle. C’est comme si le sort même joue contre elle, elle n’a plus une minute à elle. Mais ce jour ci, elle croit que la roue a tourné. Malgré qu’elle ait raté l’école pour Rowen, elle se dit qu’au moins elle rentrera plus tôt que d’habitude. Elle est enfin arrivée à la fin de la feuille de route que lui a donnée Philippe. Elle peut dire qu’elle a fait du bon boulot, puisque Philippe n’a eu de cesse de la féliciter et de la remettre sur le droit chemin quand elle se trompait. A présent, les bureaux sont prêts, l’essentiel du personnel est recruté, et elle a même entamé avec une agence de communication les procédures pour l’élaboration d’un plan de communication propre à la Fondation. Sa journée est terminée, elle est satisfaite, elle ramasse son sac à main comme si elle prenait un boulet et s’avance vers la porte de sortie. Elle passe signaler son départ à Philippe, celui-ci est au téléphone, il lui fait signe d’attendre. Après son coup de fil, il lui dit :
- S’il te plait Kady, rend moi un service : je viens d’avoir un rendez-vous important pour la Fondation que j’attendais depuis un bout de temps. Mais là, il y a Mike qui arrive dans une heure de temps et je ne pourrai pas passer le prendre. Tiens voici son numéro de vol, je te laisse t’en charger !
Kady n’a même pas eu le temps de placer un mot, qu’il a déjà le téléphone à l’oreille, attrape sa veste au passage et sort du bureau. Kady restée seule se laisse tomber dans un fauteuil du bureau :
- C’est po juste ! dit-elle boudeuse au bout de quelque minute.
Elle sort son téléphone pour écrire à maman Claudine de son changement de programme. Puis, elle s’allonge, il atterri dans une heure, elle a encore un peu de temps, elle a bien mérité une demi-heure de répits.
***
- Mademoiselle ! mademoiselle !
Kady se lève en sursaut, regarde autour d’elle, elle est encore dans le bureau de Philippe, tout semble normale, mais pourquoi l’agent de sécurité qui vient de la réveiller semble si embêté ?
- Que se passe-t-il Mr KONE ? demande-t-elle pas encore totalement réveillée.
- Il est très tard ! Tout le monde est parti ! je voulais fermer les bureaux quand je vous ai vue…
- Oh mon Dieu ! Mike ! Il est quelle heure ? demande-t-elle affolée.
- 23h passés mademoiselle !
Elle sursaute attrape son sac, sort du bureau en courant et lance à l’agent de sécurité en coup de vent :
- S’il vous plait monsieur KONE, venez m’aider à attraper un taxi !!!
Au bout d’une quinzaine de minutes, elle est dans un taxi en partance pour l’aéroport. La circulation est fluide, vu l’heure avancée, alors après quelques minutes de voyage, elle arrive enfin à l’aéroport. Elle n’a pas eu beaucoup de mal à retrouver Mike. Elle l’a retrouvé assis dans le hall d’accueil de l’aéroport, un magazine en main. Quand il l’a aperçue, il s’est exclamé, avec une expression assez enjouée :
- Ah ça ! si je m’y attendais !
- Je suis vraiment désolée ! Je voulais juste me reposer pour quelques minutes et je me suis assoupie…
- Je croyais que mon père m’avait oublié…
- Il m’a demandé de passer à sa place … et j’étais trop fatiguée … et…
Kady parlait presque sans s’arrêter tellement elle tient à s’excuser qu’elle ne fait même pas attention à ce que dit Mike. Ce dernier se rend compte qu’elle est confuse et ne risque pas de s’arrêter de sitôt. Il finit par lui mettre la main sur les lèvres :
- Mais du calme jeune dame !!! Je ne suis pas comme mon père ! Je ne vais pas te faire un procès juste parce que tu t’es assoupie à cause de la fatigue.
Kady ne dit donc plus rien, et ils restent ainsi tous les deux sans bouger et sans rien dire, cet instant semble être une éternité pour Kady…

« Alors là..... »




L'enfant de la Honte...