Chapitre 25 : Nouveau départ

Write by Auby88

Margareth IDOSSOU

A l'avant de ma bagnole, je suis. Je me suis déjà remise de la "trahison" de David. Parce que je ne vois pas un autre mot pouvant décrire ce que David m'a fait. J'avais confiance en lui, pendant que lui nourrissait des sentiments malsains à mon égard. De toute manière, je n'ai pas besoin de lui, ni en tant qu'ami, ni en tant qu'homme. J'ai tout de même pu m'en sortir dix ans sans lui ! Alors ma vie continue !


Je sors de la bagnole avec un sac-cadeau en main. Sur mes talons aiguilles, je marche en direction de la demeure des da SILVA. C'est samedi et je suis sûre que Sibelle sera là.


Judith affiche un air déchanté en venant m'accueillir sur la terrasse. Moi au contraire, je souris autant que possible.

- Bonjour Judith. Je n'ai pu m'empêcher de passer. J'ai vu cette magnifique peluche et je me suis dit qu'elle plairait à Sibelle. Je peux la voir, juste quelques minutes ?

Je sens qu'elle hésite un peu.

- Oui, vous pouvez la voir. Elle est dans l'arrière-cour avec son père. Venez. Je vous y conduis.

Je la suis, avec le coeur qui frémit déjà d'impatience. A nouveau, je reverrai le visage doux et angélique de ma fille.


- Tata Margareth ! crie-t-elle en accourant vers moi. Je la soulève de terre et la serre fortement contre moi.

Les da SILVA nous regardent.

Je me résouds à la poser à terre. Nous avançons vers ses parents.

- Margareth, c'est un plaisir de vous revoir, commence Arnaud en me tendant une main.

Je lui réponds en affichant un large sourire. Judith reste crispée.

- Je suis juste passée remettre cette peluche à Sibelle.

Sibelle s'empresse de prendre la peluche, sautillant comme une grenouille.

- Je l'adore, je l'adore. Merci, tata Margareth. Je la mettrai près de moi pour m'endormir chaque nuit.

Je la regarde, les yeux au bord des larmes. Je m'efforce de réprimer mes émotions pour ne point attirer l'attention de Judith et Arnaud.

- Je dois m'en aller, mais sache qu'on se reverra très bientôt, dis-je en restant accroupie devant elle.

Je prends congé des parents et m'en vais, le coeur serré.



Judith da SILVA

Cette femme m'intrigue de plus en plus. Elle est plus envahissante, souhaite plus se rapprocher de Sibelle et cela ne me plaît pas. Peut-être a-t-elle découvert quelque chose sur Sibelle. Je n'en sais rien. Mais si elle le sait, c'est qu'elle cache bien son jeu et qu'elle a quelque chose derrière la tête. J'en parle à Arnaud.

- Dis, mon cœur, tu ne trouves pas que cette femme est bizarre, qu'elle s'amène ici un peu trop souvent, sans même nous prévenir.

- Non, elle et Sibelle s'adorent. Et puis, rappelle-toi, tu rejettes tout le temps ses appels.

- Et si elle savait tout sur Sibelle ?

- Je comprends ta peur, mais je ne pense pas. Et même si elle le sait, crois-moi, tu n'as rien à craindre. Elle ne peut pas nous la reprendre.

- Je l'espère vraiment. Parce que j'en mourrais si je venais à la perdre.

- Ne dis pas de pareilles sottises, Judith ! Détends-toi.

Tout contre mon homme, je me blottis. Mais mon regard demeure inquiet. Je ne suis pas tranquille, en la voyant rôder ainsi autour de nous, telle une louve prête à bondir sur un mouton...



Un mois plus tard

Margareth IDOSSOU


Cela fait presque un peu plus de quatre semaines maintenant que j'ai découvert la vérité sur Sibelle et pourtant, j'ai encore un énorme vide en moi. Cette solitude me pèse au plus haut point. Ces quatre murs de mon duplex sont comme une prison, chaque soir quand je rentre du boulot.

Mon boulot ! Même ça m'ennuie depuis peu. J'ai perdu ma concentration, ma passion pour le Droit. Ces temps-ci, je vais de moins en moins au bureau, reléguant presque toutes mes affaires à mon associé. Je végète vraiment. Je n'ai le coeur à rien, sinon à me morfondre.


Je ne supporte vraiment plus de vivre loin de Sibelle. Je n'arrive plus à me contenter de visites surprises chez les da SILVA ou de rencontres en cachette chaque midi quand elle sort des cours.

Même dans les rues, je détourne mon regard quand je vois une mère heureuse avec son enfant. Si seulement, je pouvais remonter le temps et m'arrêter à cette maudite nuit devant l'orphelinat. Si seulement, je n'avais pas suivi les conseils de cette folle de Christelle, tout serait différent aujourd'hui. Je souffre tellement. Je ne peux plus vivre sans elle.

Je la veux près de moi !!! Je me dois d'agir rapidement.


Le lendemain.

Tôt ce matin, je me suis réveillée et j'ai essayé​ de me mettre quelque chose sous la dent. Ensuite, j'ai pris une valise et mis quelques vêtements à l'intérieur. Je compte partir bien loin. Pour refaire ma vie.

J'attends 11h pour me ruer sur Cotonou. Direction : l'école de ma fille.


La revoir chaque jour me procure une joie indescriptible. J'ai l'impression que mirer son beau visage toujours souriant renouvelle mon quota d'énergie.

- Tata Margareth ! crie-t-elle en accourant vers moi.

Debout contre ma bagnole, je suis. J'ouvre grand mes bras pour l'accueillir.

- Tu es encore là, aujourd'hui ! Oui, je ne peux plus passer un jour sans te voir, ma toute belle.

- Il faudra que j'implore maman pour qu'elle me laisse à nouveau passer une journée avec toi.

- Tu n'as plus à le faire. Je viens juste de l'appeler. Elle est d'accord pour que tu passes l'après-midi avec moi, dans un cadre paradisiaque.

- Super ! s'écrie-t-elle.

Je lui souris. Je sais que je lui ai menti, mais c'est pour une bonne cause.

- Allez, entre. On y va.

Je regarde de part et d'autre. Personne ne semble regarder dans notre direction. J'entre à mon tour dans la voiture et démarre.

Pour qu'elle ne se doute de rien, je lui ai remis une tablette que j'ai nouvellement acquise pour elle et installé plusieurs jeux très intéressants dessus.

Cela semble fonctionner. Elle est tellement occupée à jouer qu'elle me parle peu, qu'elle ne sait pas qu'on roule depuis plus d'une heure.

Nous nous arrêtons à Allada. J'ai réservé dans un hôtel classe, assez récent donc pas bien connu. Et ce, en attendant de louer un appartement bien confortable. L'hôtel possède une grande piscine et une aire de jeux. Je suis sûre qu'elle s'y plaira.


- Voilà, on y est.

- On est où ?

- Pas très loin de chez moi. Au "Complexe Hôtelier d'Allada". Allez, viens.


Pour ne pas l'affoler, je laisse ma valise à l'arrière de la voiture. Nous profitons de la piscine, des aires de jeux et des spécialités du restaurant. Nous nous amusons comme des folles, courant dans tous les sens, parlant comme des pies.

A la nuit tombante, je la sens un peu angoissée.

- Quand est-ce qu'on rentre, tata Margareth ?

- A ce propos, il faut que je te dise que j'ai appelé ta mère et elle te laisse dormir avec moi.

- Mais …

- Si tu es inquiète pour tes cours, sache que nous nous réveillerons très tôt demain pour retourner à Cotonou. J'ai moi aussi du travail en attente, dis-je en m'efforçant d'être calme. Tu es rassurée ?

- Oui. J'aime être avec toi.

- Moi aussi.


Nous restons là, à regarder la télé. Vers 20h30 déjà, elle se met à bâiller et insiste pour que je lui raconte une histoire. Je plonge dans mes souvenirs et me rappelle deux contes que ma feue mère aimait me raconter. Puis lovée dans mes bras, elle finit par s'endormir.

Plutôt que de dormir, je reste là à la contempler, émerveillée. C'est la première fois que j'ai ce privilège. C'est la première fois que je l'ai si près de moi. Je pleure… de joie.

"Demain est un nouveau jour pour elle et moi". Je soupire longuement. Demain, je devrai tout lui expliquer. Peut-être qu'elle ne me pardonnera pas mais tant pis. De toute façon, je me dois de lui expliquer pourquoi elle ne retournera jamais plus chez les da SILVA, pourquoi elle restera dorénavant avec moi...


Au petit matin, je la regarde s'étirer. Il est 7h par là. Le petit-déjeuner vient de nous être servi.

- Bonjour, mon ange ! As-tu bien dormi ?

- Oui, fait-elle en s'étirant longuement.

- Allez, file prendre une douche. Ensuite on petit-dejeunera. Tu trouveras tout le nécessaire dans la salle de bain. Préviens-moi si tu as besoin de mon aide.

- D'accord Tata.  

Elle marche doucement, en baillant, vers la salle de bain. J'entends l'eau couler.

Quelques minutes plus tard, elle revient vers moi, avec sur elle une odeur de rose, le parfum du gel de douche.

- Tata. Où est mon sac d'école ?

- Garde ton peignoir et viens d'abord manger.

- Il fait déjà jour. Je risque d'être en retard pour l'école.

- Fais-moi confiance, dis-je. Viens t'asseoir pour profiter de tout ce qu'il y a de délicieux dans ce plateau.


Je sais qu'elle a un examen à passer, mais il reste encore du temps. Je trouverai un moyen de l'inscrire dans une nouvelle école ou de lui faire prendre des cours intensifs à domicile. Je n'ai pas son acte de naissance mais je verrai comment m'arranger. De toute façon, je ne tiens pas à ce qu'elle perde son année scolaire.


Je souris en la voyant mordre à pleine dent dans les friands ou les tremper dans son café au lait.


- J'ai enfin fini ! s'exclame-t-elle. On peut y aller maintenant.


L'heure de vérité pour moi a sonné.

- Je regrette Sibelle, mais tu ne pourras pas aller à l'école aujourd'hui.

- Mais pourquoi ? demande-t-elle. Tu m'avais dit que … Qu'est-ce qui ne va pas, tata ?

- J'ai quelque chose d'assez particulier à te dire. Et j'aimerais que tu restes calme.

Elle garde la bouche ouverte. Elle doit être perdue.

- David et Judith da SILVA ne sont pas … tes vrais parents.

- Quoi ! C'est faux. Ce sont mes parents !

- Non, Sibelle. Crois-moi ! dis-je en prenant sa main. Ils t'ont adoptée dans un orphelinat, tu comprends, quand tu étais encore un bébé.

- C'est faux. Tu te trompes.

- Je n'ai aucun intérêt à te mentir. Tes parents n'ont pas eu le courage de te le dire, alors je le fais à leur place.

- Donc, je suis un enfant abandonné ! conclut-elle.

Des larmes coulent sur ses joues.

- Sache que ta vraie maman a été contrainte de le faire.

- Elle ne m'aimait sûrement pas !

- Ne dis pas cela. Elle t'aimait plus que tout. Tu ne peux imaginer toute sa douleur.

- Comment toi tu le sais alors ?

- Parce que ... je suis ta ... vraie maman.

Je lâche ces mots tandis qu'elle lâche brusquement ma main et se lève.

- Je veux rentrer chez moi.

- Sibelle, ma fille.

- Je veux rentrer chez moi. Tu n'es pas ma maman ! me crie-t-elle.

- Ne me dis pas cela. C'est moi ta mère, celle qui t'a portée dans son ventre et t'a mise au monde. C'est moi.


Elle secoue vivement la tête.

- Non. Ma maman est et restera Judith da SILVA. Je n'en veux pas d'autre. Je veux rentrer chez moi.

- Tu es en colère contre moi, c'est normal. Cependant, je regrette de ne pouvoir exaucer ton voeu. Tu es ma fille et je ne compte pas te laisser retourner chez les da SILVA.

- Tu ne peux pas me forcer à rester avec toi.

- Donne-moi une chance, je t'en prie. Tu m'adorais avant alors pourquoi tu me fuis maintenant, pourquoi tu t'éloignes de moi ?

- Parce que tu es une menteuse, tu n'es pas la bonne personne que je croyais. Je te déteste !

- Ne me dis pas cela.

J'essaie de l'approcher. Elle recule. Je parviens à la retenir dans mes bras. Elle n'esquive pas. Nous restons là, l'une contre l'autre à pleurer...

Au moins, le pire est passé.





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