Chapitre 26

Write by WumiRa

Comme elle l'avait dit à son mari la veille, Maya commença à travailler chez Lincoln-Prod, en tant que secrétaire. C'était toujours mieux que de devoir inlassablement chercher du travail. Son nouveau patron lui avait énumérées les tâches qui seraient dorénavant les siennes et à sa plus grande déception, ce ne n'était pas grand chose, comparé aux responsabilités qui allaient sûrement devenir les siennes le jour où son père déciderait de lui céder les rênes de sa société. 


Si lui comme Malik avaient été plus attentifs, ils auraient peut-être compris qu'elle ne comptait pas travailler uniquement pour de l'argent. Elle n'ignorait pas que son père aurait voulu avoir un garçon, c'est pourquoi depuis l'adolescence, elle s'était efforcée de combler ce vide et d'occuper la place qui aurait dû revenir au fils que sa mère n'a jamais eu.


- Mademoiselle Fall ?


Les yeux rivés sur son ordinateur, elle était en train d'écrire un texte, quand la porte s'ouvrit et qu'une voix lui fit redresser la tête. C'était le comptable de Lincoln.


- C'est l'heure de la pause, fit-il remarquer, en souriant de toutes ses dents.


C'était quoi cet air niais ? Ce n'était pas le premier à lui sourire sans raison, mais en plus, la plupart chuchotaient entre eux à son passage, à croire qu'elle était l'une de ses créatures étranges, que l'on voit rarement. Une bête de foire.


- Oh... J'avais carrément la tête ailleurs, dit-elle. Je n'ai pas vu l'heure passer. 


- C'est toujours comme ça, une fois qu'on est à fond dans le travail. C'est ta première fois ?


- Euh... Quoi déjà ?


- C'est la première fois que tu occupes ce poste ?


Mais c'était quoi son problème si elle était novice ? Mêle toi de ce qui te regarde, frère.


- Non, pourquoi ? répondit-elle, plus froidement que nécessaire.


Il dût piger.


- Désolé si je t'importune hein, dit-il encore. Nous n'avons pas l'habitude de travailler avec de jolies femmes.


Et mince. Elle se maudit d'être venue travailler avec une jupe qui lui arrivait à peine aux genoux. Le « jolies femmes » devait être dû ça. Mais ça c'était parce qu'elle n'avait toujours pas trouvé le temps d'aller se dénicher des vêtements plus appropriés à ce nouveau travail. Elle n'avait pas l'intention de se convertir en nonne, mais vu les regards qu'elle avait réussi à attirer, celui du boss y compris, il allait falloir qu'elle revoie son code vestimentaire. Les deux autres et uniques femmes qui travaillaient dans la boîte semblaient avoir eu la même idée, puisqu'elle était toujours vêtues de la tête au pied. Pitoyable. 


Elle se leva et prit son sac.


- Les autres et moi allons manger chez notre vendeuse habituelle, tu viens ? demanda "monsieur colgate".


C'était comme ça que l'avait surnommé Maya, le premier jour qu'elle l'avait vu, c'est à dire dix jours plus tôt, lorsqu'elle était venue pour l'entretien d'embauche. Il lui avait sourit durant tout le temps qu'elle avait passé à attendre qu'Osé Lincoln la reçoive.


- Non, désolée, je dois déjeuner avec une amie, mentit-elle, sans le moindre remord. Une autre fois ?


Le sourire de son interlocuteur ne disparut pas pour autant.


- Super, fit-il.


Puis il s'en alla.


La première chose que fit ensuite Maya, fut d'envoyer un message à Malik. 


« Tu es à ton travail ? »


Elle attendit pendant des minutes, sans qu'aucune réponse n'apparaisse, alors elle envoya autre chose.


« Tu as encore fui ce matin »


Cette fois, un bip sonore lui signala l'arrivée d'un nouveau message.


« Ton boss est-il au courant que tu envoies des textos durant tes heures de travail ? »


Sans s'en rendre compte, elle sourit.


« Tu vois pourquoi je ne pourrai jamais travailler pour toi ? Il est midi. Pause-déjeuner »


Elle attendit encore pendant de longues minutes, sans qu'il ne daigne répondre. Elle décida donc d'aller se chercher à manger et de revenir terminer ce qu'elle faisait un moment plus tôt, lorsque la sonnerie de son téléphone portable retentit. 


C'était lui. 


Inexplicablement, le cœur de Maya fit un bond joyeux. Mais sans se préoccuper de cette nouvelle réaction de sa part, elle prit une profonde respiration et décrocha.


- Allô ?


- Allô, fit-il, de cette voix grave, à l'accent cultivé, qu'elle connaissait par cœur. 


Pas d'exagération, Maya !


- Ça va ? 


Elle eût l'impression qu'il souriait à l'autre bout du fil. Mais pourquoi aurait-il sourit ? Après ce tout ce qu'il lui avait confié la veille, son égo devait horriblement souffrir, non ? 


- Tu as l'air essoufflée, dit-il. Toi, ça va ?


- Je vais bien. Je comptais aller déjeuner.


- Lincoln n'exploite donc pas ses employées ? 


Elle haussa les épaules.


- Tant qu'il paie bien.


- Alors c'est purement une question d'argent.


Elle se rassit  et lissa sa jupe.


- Quoi d'autre ?


Il se tut un moment et elle entendit une autre voix d'homme. 


- Tu es occupé ? demanda t-elle.


- Tu veux passer ? demanda t-il.


Sans vraiment être consciente de son geste, elle se mit à se ronger les ongles.


- Tu n'as pas répondu.


- Je ne peux pas quitter mon travail pour...


- C'est bien la pause ?


- Oui, mais pour un premier jour de travail, il faudrait quand même que je fasse bonne impression. On se voit ce soir... à la maison ? 


Silence. 


- Ne rentre pas tard.


Elle raccrocha ensuite.


***


Malik reposa son téléphone sur son bureau.


- Tu n'es pas censé voir ce négociateur hollandais aujourd'hui ? demanda t-il, à l'intention d'Umar qui le regardait du coin de l'oeil. Et cesse de me reluquer comme ça.


Son ami se mit à pianoter sur la table de bureau. 


- Je me rappelle de comment la sœur Léa te regardait quand tu me filais tes repas. Alors c'est sérieux avec... Comment dois-je l'appeller ? Madame Sylla ou plan B ? Je viens de t'entendre lui parler et on croirait presque que tu es amoureux.


Malik leva les yeux au ciel.


- Je plaisante, dit ensuite Umar. Mais tu y pensé ?


- Pensé à quoi ? 


- Que tu pourrais succomber à ses airs d'innocente.


- Heureusement qu'elle n'en est pas une, répondit Malik.


Elle avait grandi sous l'influence d'un père tel que Fall, songea t-il. Impossible d'avoir une mentalité pour le moins, indemne. 


- En toute franchise, je trouve que ton mariage est une bonne chose, même si ce ne sera que pour un temps.


Malik haussa les sourcils, surpris.


- Tu es le plus grand solitaire de tous les temps et tu travailles comme un forcené. Il était temps qu'un changement, même minime, survienne.


- Quand on pas la chance d'avoir des parents riches, on est obligé de travailler. Tu l'as oublié ?


- Les tiens l'étaient, répliqua Umar. Ils sont juste morts trop tôt. Et c'est toujours mieux que de ne même pas savoir à quoi ils ressemblent.


Des coups resonnèrent à la porte et la tête de la secrétaire de Malik apparût dans l'entrebâillement. 


- Monsieur Sylla, une femme demande à vous voir, mais elle n'a pas pris de rendez-vous. 


Il jeta à Umar, un regard en biais. Une femme ? Quelle femme ? Ce n'était pas Maya, il en était certain, parce qu'elle serait directement montée jusqu'à lui.


- Qui est-elle ? demanda t-il. 


- Une certaine Inaya Sako. 


***


AU MÊME MOMENT CHEZ LES DIARRA.


- Monsieur le ministre est en train de tr...


- Ôte-toi de mon chemin ! s'écria Awa, en poussant le garde de corps de son mari. 


Elle réussit à passer et ouvrit en grand, la porte du bureau de ce dernier. Comme à son habitude, il était assis devant son ordinateur, un verre dans une main. 


- Espèce d'ivrogne, comment as-tu osé ?!


Ne s'étant sûrement pas attendu à ce que sa toute dernière épouse débarque dans "son" bureau à l'improviste et de cette manière, il déposa son verre et se leva, l'air surpris. 


- Que se passe t-il ? demanda t-il.


Alors qu'il ne s'y attendait pas, elle se rua sur lui et empoigna son habit. 


- Mais...


- Tu as anéantis mes efforts, pauvre vieillard. Tu as tout gâché ! 


La porte était demeurée ouverte et le garde de corps apparût. 


- Vous, dehors, ordonna le ministre Diarra. Et fermez moi cette foutue porte ! 


Dès que ce fût fait, il dit à sa femme :


- Tu me fais honte.


Toujours suspendue à son habit, elle ne fit que le regarder d'un œil mauvais, le visage rouge de la colère.


- Qu'en aurait-il été si tu m'avais trouvé avec des...


- Je m'en fous de si tu avais été avec qui que ce soit, Thiam, rends moi ce que tu m'as pris. 


Il la regarda à son tour avec mépris. 


- Pourquoi ne pas appeller les choses par leurs noms ? Dis simplement que tu veux que je relâche ton amant.


Elle se mit à renifler de plus en plus fort.


- Tu ne sais pas ce que tu fais, Thiam, relâche le. Relâche le, je te dis ! 


- Pour que tu continues à me cocufier ? Tu as perdu la tête.


Elle le relâcha. 


- Sais-tu qu'à cause de toi, j'ai définitivement perdu la trace de mon fils ? 


- Il ne fallait pas le vendre, madame, il y'a des erreurs qui ne peuvent être réparées, même quand on est femme de ministre. Jamais cet enfant ne voudra de toi.


Elle se mit subitement à genoux et joignit ses mains devant elle, le visage ruisselant de larmes.


- Je t'en supplie Thiam, ne fait pas ça. J'ai changée, je te le jure. 


Las de discuter avec elle, il se laissa tomber dans son fauteuil.


- Souviens-toi que c'est grâce à moi que tu as pu gagner les élections, je t'ai toujours soutenu. 


- En me donnant la réputation du plus grand cocufié de Dakar ? Tais-toi, femme. Et pour que tu n'ailles pas te faire des idées, sache que ton cher Wally sera jugé et condamné pour détention de drogue. Je vais personnellement m'assurer qu'il y croupisse. 


Awa se révéla.


- Quant à toi, tu peux déjà commencer à faire tes valises, je ne veux plus te voir. 


- Tu crois vraiment que vivre avec toi c'est le paradis ? le nargua t-elle. Toi ?


- Je t'accorderai le divorce, mais tu n'emporteras rien de chez moi.


- Tes femmes avaient raison ! Tu n'es qu'un imbécile, un espèce de parano, tu n'es qu'un ingrat ! 


Il balaya tout ce qu'elle dit, d'un geste de la main.


- Tu me sembles plutôt moins inquiète, pour une femme qui ne sait même pas si l'enfant auquel elle a donné naissance est une fille ou un garçon. Je regrette amèrement le jour où je t'ai sorti de la misère, croyant avoir trouvé l'amour. Sors de chez moi. 


Elle pâlit.


- Qu'est-ce que tu racontes ? 


Il cria pour appeller son garde de corps. Quand celui ci apparût, il dit :


- Sors-moi cette femme d'ici.


Awa insista.


- Qu'as-tu dit ? Mon fils...


- Ta fille, rectifia t-il. La même que tu as vendue avant même de l'avoir mis au monde et que tu as refusé de serrer dans tes bras, à sa naissance. 


Il secoua la tête.


- Tu es vraiment parvenue à me dégoûter. 


Figée sur place, les yeux écarquillés, la bouche ouverte, elle ne réussit à opposer aucune résistance, quand le garde de corps de son futur ex mari vint l'entraîner hors de la pièce.



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