Chapitre 28

Write by sokil

En voyant l’expression de mon visage, je sais que Bill meurt d’envie de pouffer de rire ; je le devine très bien par ce sourire discret mais très accusateur qu’il affiche. Malgré tout, sa main rassurante n’a fait que m’encourager à y aller… J’ai fermé les yeux, et le cœur battant nous sommes montés à bord de ce truc géant.

- N’aies pas peur … Fais-moi confiance, je suis sûr que tu vas aimer !

Je n’ai même pas eu le temps de placer un mot que nos ceintures bouclées et bien calés, la machine s’est lancée … J’ai encore fermé les yeux, je n’ai rien senti, à part la puissance de cette machine et la vitesse avec laquelle elle fonce dans le vide tout en défiant l’une des forces de la nature qu’est le vent. Ensuite tout le reste devient impressionnant, magique et beau... J’ai quand même gardé les yeux fermés, jusqu’à l’arrivée…

- C’est fini ! T’as vu ? Rien de grave !

- Oui … Rien de grave, c’est plutôt magique !

- Je te l’avais bien dit !!!

Surprise de constater qu’inconsciemment ma main a agrippé fortement la sienne pendant tout le trajet, gênée et confuse, je l’ai retirée poliment tout en continuant la conversation. En m’aidant à sortir de l’engin, il m’a encore pris la main et je me suis laissée faire, comme une petite fille. Il s’est par la suite penché vers moi et m’a demandé.

- Ça t’a plu ?

- oooh oui beaucoup !

- C’est bien ! j’aime ça ! Il faut savoir affronter ses peurs parfois....On va rejoindre les autres ? Je sens qu’ils meurent tous d’envie d’essayer !

Ils sont excités comme des puces et n’attendent que ça, Ashley, mais surtout les deux garçons qui veulent monter à leur tour…Bill prend congé de nous, et juste avant que je ne remonte avec Ashley et les garçons, il s’excuse et me dit en aparté.

- Je vais rejoindre mes amis, un couple ami ! Ils ont amené leur petite fille ; je leur tiens compagnie…Mais si jamais vous voulez vous joindre à nous, tu n’as qu’à me faire signe !

- Merci c’est gentil, mais après ça nous allons rentrer !

- D’accord ! Amusez-vous bien !

Confortablement installés avec Rick à mes côtés, Ashley et son fils sont assis devant nous ; je suis encore surprise du changement et du courage qui se sont opérés en moi ; c’est à cause de Bill, par sa manière toute simple de me faire comprendre et affronter les choses qui me semblent les plus difficiles… Je souris un peu et avant de décoller, mon regard croise brusquement le sien… Il n’était pas encore parti et il nous a regardés monter ; rassuré, il finit par détourner son regard avant de s’en aller.

Toute cette semaine Bill est absent ; il est parti en Californie et en a pour deux semaines pleines. Rassurée et en même temps un peu malheureuse de ne pas le savoir parmi nous, j’ai continué à penser qu’il fallait que je me focalise sur autre chose, que je m’occupe de mon fils que je vois grandir à vue d’œil ; il a cinq ans et commence à me poser de drôles de questions.

- M’man ? Où est daddy ?

- Qui ça ?

- Mon daddy ! Il est où ?

- Euh… ton … ton daddy… Il … il est parti !

- Pourquoi ?

- Eh bien parce que… il … il a choisi de partir ! Il n’a pas voulu rester !

- Il va revenir ? Pourquoi il est parti ?

- Un jour peut être… Mais moi je suis là ! Je serai toujours là pour toi ! Maman ne te laissera jamais tomber d’accord ?

Il a juste secoué la tête, comme si il a très bien compris. Je sais que ce n’est que partie remise, il reviendra à la charge avec tout un lot de questions auxquelles je devrai tout le temps faire face et répondre avec franchise. A le voir grandir de la sorte me fait prendre conscience tous les jours des nouveaux défis et des enjeux auxquels nous seront tous les deux confrontés ; en l’observant parfois à la dérobée, je peux deviner les quelques traits de ressemblance qu’il a avec son père, et je prie tous les jours qu’il ne prenne rien de lui question habitudes… Je pense que je ne m’y habituerai pas non plus. Mais bon qu’est ce vous voulez, la génétique est ce qu’elle est, on y peut rien. Il leur manque beaucoup à mes parents qui ne ratent pas un week – end sans prendre des nouvelles.

- Comment il va ? Me demande ma mère au téléphone. Il nous manque, c’est terrible !

- Il va très bien, il grandit, et pose trop de questions !

- C’est normal, c’est de son âge !

- Oui, mais c’est très tôt il devient de plus en plus conscient de ça !

- C’est … à propos de son… Père ? Justement je voulais…

- Oui…. Ça devient très récurrent ; aujourd’hui il me pose une question, demain c’est deux et ainsi de suite… J’ai beau lui expliquer mais il n’arrête pas de me demander où est son daddy et pourquoi il n’est pas avec nous, ou encore il demande quand est ce que son daddy viendra aussi le chercher pour l’amener jouer au foot - ball, des trucs comme ça !

- Justement je voulais te dire que…

- Oui maman je sais ! Tu vas me dire de toujours être franche avec lui et tout ça, c’est ce que je fais tout le temps ! Mais que veux-tu que j’y fasse ? Je suis sa mère et je peux très bien jouer les deux rôles crois-moi !

- Non ! Je ne parle pas de ça, c’est…c’est son père …

- Son père reste son père, je suis très d’accord, mais son père n’a jamais été là !

- Écoute-moi Klariza ! Son père est là !!!

- Qui ? Steve ???

- Qui d’autre ? Je te parle bien de lui ! Il est venu me voir au bureau avant-hier !

- Il … sort… d’où ?

- Apparemment il serait rentré définitivement ici au pays ; il dit qu’il aurait espéré de te voir, toi et le gosse ! Je ne suis pas comme Claude, mais j’ai vraiment été impolie ! Tu te rends compte ? Non seulement il a débarqué au ministère, mais il a fait tout un tapage avant d’entrer dans mon bureau, mais avec un de ces culots! Il m’a fait comprendre qu’il a réussi sa vie et qu’il ne vient pas demander l’aumône ! Il veut juste entrer en contact avec toi et le gosse point barre, le reste il ne gère pas ! Voilà ses propos ! Je lui demandé de sortir en toute vitesse à moins de vouloir écoper d’une bonne baffle !

- Je …ne … veux … pas … de … contact !!! Qu’il reste là où il est, et qu’il vous fiche la paix !

- C’est ce que je lui ai dit !

- Je ne veux même pas de ses miettes ! Il était où quand j’accouchais ? Il a la mémoire très courte !

- Ne t’en fais pas ! Il ne peut rien, même s’il dit qu’il a tous les droits de récupérer son fils !

- Aie ! Seigneur !!! Il va seulement me passer sur le corps je te jure !!!

- Reste sereine, nous nous en chargeons ! Il ne peut rien faire !

Cette nouvelle a fini par me saper le moral. Le simple fait d’apprendre que Steve aurait refait surface, me tourmente à un tel point que je ne parviens pas à rester concentrée ! J’ai commencé à imaginer le pire ; j’ai commencé à faire des cauchemars certaines nuits, le voyant Steve m’arracher Rick, me le prendre de force et me couper entièrement de lui. Toutes les nuits, je me suis réveillée pour aller le voir sur son lit ; toutes les nuits je me suis assise près de lui le regardant dormir, toutes les nuits je me suis posé milles et une question, car je sais que les jours à venir, dans un futur très proche Rick se retrouvera face à ses propres choix et non les miens ; je sais que je ne pourrai pas lui imposer toute sa vie de ne pas se rapprocher de ce père lâche ! Je sais que lui Rick prendra ses propres décisions sans me consulter. C’est là que réside ma grande crainte si je parvenais ne serait-ce qu’à l’éloigner de Steve aussi longtemps que possible. Car si aujourd’hui à l’heure qu’il est Rick me pose des questions sur son père, demain il voudra peut être le voir de ses propres yeux son père…

Je passe presque des nuits blanches à cogiter sans cesse sur cette réapparition soudaine de Steve. Bien que la distance nous sépare, ne dit-on pas que seules montagnes ne se rencontrent elles pas ? D’un autre côté je suis quand même rassurée qu’il soit si loin de moi, de Rick…

- Ne t’en fais pas, il ne viendra pas t’enquiquiner là-bas ! Le salopard !!!

- Je t’assure Christelle ! Il a intérêt à rester loin de nous ! Sinon, Il va voir la vraie sauvagerie des filles de Yaoundé ! Laisse !

- C’est un malade ! Il est toujours marié à la fille du maire là ? La fille métisse aux yeux gris ou verts ou multicolores ! Tsuip !!!

- Aka ! Aux yeux bleus ! Oui toujours ! Ma mère me l’a confirmé ! Je ne sais pas ce qu’il veut ! Il parle de vouloir voir son fils…Qu’il n’a pas eu le cran de voir à sa naissance, c’est maintenant que le bon monsieur veut jouer les pères modèles !

- Eh pardon ! Qu’il fiche la paix ! C’est sûr qu’il n’a pas pu en faire avec elle, l’autre là !

- Je ne veux même pas le savoir, ça les regarde, mais qu’il laisse mon enfant en dehors de tout ça !

- Si seulement tu avais un vrai gars eh !!!

- Bof c’est pas la fin du monde ! J’ai fini par comprendre que ces choses ne se forcent pas !

- Tu as raison ! Tu as fini par passer à autre chose … C’est bien ! Il va comment au fait ton Bill ? J’allais oublier ! Il n’est toujours pas rentré ?

- Non ! Je pensais que ce n’était qu’une simple mission de quelques jours, mais j’ai fini par comprendre qu’on l’a peut être retenu de ce côté !

- Où ça encore ?

- En Californie !

- Mais c’est tant mieux alors! tu pourras facilement l’oublier ! Loin des yeux, près du cœur !

- C’est vrai !

- Assia ! (Patience !)

Bill a effectivement été retenu de ce côté et ce pour une longue période ; il en aurait pour 6 mois environ. Même si l’ambiance au travail est toujours constante avec le même rythme effréné, je dirai que l’absence de Bill se fait bien ressentir ; celui qui le remplace provisoirement a tôt fait de se faire démarquer par son pédantisme criard, surtout pendant les réunions du personnel. Dans ma tête il ne l’égalera jamais et ne saurait pas faire régner la bonne ambiance entre collègues. Tous les jours c’est la même rengaine, le même train-train quotidien ; mais mon chef, pour une fois me fait sortir du lot, il veut que nous nous rendions sur plusieurs sites pour faire quelques repérages.

- Klariza ? J’ai besoin de toi demain vendredi très tôt à partir de 6h ! Me dit-il. Nous allons faire des repérages à Pineville, Belmont et Matthews ! On y passe le week – end avec toute l’équipe, et nous rentrerons lundi !

Je jubile intérieurement, il s’agit là de ma première vraie mission ; je suis si contente que j’ai envie de le crier sur tous les toits, mais je me ravise ; ce n’est qu’avec Monsieur Bill Morrison que j’aurais pu le faire ; bien qu’il soit mon supérieur, je crois que j’aurai eu le cran d’aller frapper à son bureau et le lui annoncer comme ça tout de go, que oui, pour une fois je sens que j’avance, et ce grâce à ses précieux conseils.

J’ai pris toutes les dispositions et j’ai laissé Rick chez Ashley ; Dieu merci elle est là et la solidarité africaine à ce moment – là est bien précieuse.

- Merci Ashley ! Thank you so much ! Je ne sais pas ce que je ferai sans toi !

- On se serre les coudes sista ! Toi aussi tu m'aides souvent quand je suis absente. Heureusement que je suis de repos ! Aller file ! Je m’occuperai bien de Rick !

Je l’embrasse mon fiston, et je lui promets de vite rentrer.

- Tu reviens avec daddy ? Tu m’as dit qu’il allait revenir et m’amener jouer au foot – ball !

- Ce qui est sûr c’est qu’on ira jouer au foot –ball, ça je te le promets ! Bisous mon cœur !

- Bisous !

Pineville, Belmont et Matthews sont des petites villes avoisinantes, toutes situées à quelques kilomètres de Charlotte. Le trajet n’est pas très long. Nous sommes arrivés très tôt ce matin à Pineville et aussitôt le travail a commencé. Mon boss, nous le connaissons tous, chiant à souhait et jamais satisfait, il ne lésine sur rien ; alors étant donné que le travail se fait avec beaucoup de tact et de minutie, il voit bien et sent la différence, surtout venant de moi. Au bout du troisième jour, nous somme sur le point de boucler tout le travail ici à Matthews, la troisième ville en question ; Mon boss, il s’appelle Jerry, Il prend quand même la peine de nous mettre à l’aise et commander à tort et travers des amuses gueules, et j’en passe ; ça vient de partout, des subways en passant par les fast – food. Pour une fois l’ambiance est très bonne enfant, le courant passe. Je suis si concentrée pendant une des dernières prises que je ne sens pas vite la main qui m’effleure l’épaule ; au moment de me retourner je sursaute et je souris ; mais quelle surprise …

- Monsieur Morrison !!!

- Chuuut pas si fort !

- Que faites-vous ici ? Et la Californie ?

- Je suis venu à Charlotte pour deux ou trois jours, je retourne à Los Angeles Mardi ! J’ai appris pour ta mission et je me suis dit pourquoi ne pas y faire un tour ! La petite équipe me manque !

- Vous aussi vous nous manquez !

- Et toi ? T’ai-je manqué ?

- Moi ? Eh bien… je …

- Je rigole ! Je vais voir ton boss ! A tout de suite…

Bill n’a fait que me surprendre tout au long de la journée ; déjà le fait qu’il soit venu jusqu'ici et ensuite le fait qu’il soit là présentement entrain de me lorgner sans cesse ; pour la première fois je le vois sourire timidement et baisser de temps en temps son regard comme s’il avait honte de lui ; pour une fois que je le vois et le sente un peu faible, ce qui n’enlève en rien le sex appeal qui émane de lui, au contraire je ne fais que l’apprécier intérieurement. C’est l’heure de la pause, bien évidemment il est aux côtés de mon patron, chose très normale, mais cela ne l’a pas empêché de revenir vers moi tout naturellement et me chuchoter encore discrètement à l’oreille.

- On dîne ce soir ? Ça te dit ? Seras- tu disponible ? Ne t’en fais pas c’est dans un cadre purement professionnel ! Et cette fois ci c’est moi qui choisis le lieu !

- D’accord je serai disponible !

- A ce soir alors ! Je passe te prendre à l’hôtel !

Il me fait un clin d’œil, je souris, et à mon tour je baisse timidement la tête, on se comprend bien à demi-mots. La mission tirant à sa fin, nous avons bossé comme des malades, même ce dimanche ! En soirée, c’est chacun qui est donc libre de vaquer à ses propres distractions. Moi, Bill m’invite, incognito ! Je pense et j’espère qu’il a choisi un coin bien discret, loin de tout ce beau monde, je pense que ça sera ni vu, ni connu, et cela m’arrangerait bien.

Il est venu me prendre à l’heure exacte comme convenue. J’ai eu le temps de d’enfiler une longue robe décolletée et des escarpins… Il est en bas, il m’attends, je me presse un tout petit peu, je jette un dernier coup d’œil dans la glace ; mon maquillage est assez léger, ce qui me satisfait, ma tenue est adéquate j’aime bien, je me tourne et me retourne devant le miroir et je me pose des tout un tas de questions à propos de mon physique, à savoir si je suis assez attirante pour lui ; est - ce que mes rondeurs sont comme il faut, etc…d’un mouvement des lèvres j’ajuste mon rouge à lèvres et je murmure en solo.

- Pfff ! Je suis quand même trop maigre ! Non j’ai quand même un fessier digne d’une femme africaine ! Et puis quoi encore ? Allons – y ! Zut j’ai oublié l’élément principal, le parfum ! Hum ! Je vais quand même pas sentir le bouc pendant toute la soirée! Ca va le faire fuir ! Oh Klariza ! Tout ça pour un mec qui ne veut rien d’autre que coucher avec toi ! Ça saute aux yeux ! Ah ! On verra bien ! Allons d’abord !

Une fois au parking, je l’y rejoins, il est adossé sur le capot de sa voiture les bras croisés, il ne me voit pas vite arriver ; lorsqu’il tourne la tête, je distingue la prunelle de ses yeux, elles brillent dans la pénombre… Contente de savoir que je lui fais aussi un effet particulier, même si je sais de prime abord que tout cela n’est purement que physique, rien d’autre.

- Bonsoir… Monsi…

- Non ! Appelle-moi, Bill ! Appelle moi dorénavant comme ça, du moment que nous ne sommes pas dans la compagnie ! Je ne suis pas ton Directeur ce soir… Je suis ton ami ! Tu veux bien ?

- Oui… Bill !

- Je n’aime pas ces formules toutes plaquées, mais permets moi de dire que tu es ravissante !

- Merci !

- On y va ?

Il m’ouvre galamment la portière ; heureuse de constater que ce soit lui-même qui conduise et non son chauffeur. Plus on roule, plus je me rends compte que nous sortons de la ville, je reconnais bien la route puisqu’il y a quelques heures nous avons débarqué ici en empruntant le même trajet avec toute l’équipe. Bill a vite remarqué mon inquiétude, et avant même que je ne pose la question il me prend de cours.

- La ville est trop petite, je n’aime pas beaucoup, nous retournons à Charlotte !

- Je l’ai bien deviné !

- Oui ! Ce n’est pas bien loin, juste une vingtaine de minutes ! Nous serons de retour le plus tôt possible!

Il a eu raison, c’est encore plus cool ici à Charlotte, loin de tout ce beau monde, mon équipe! Surtout loin de Jerry mon parton grincheux ! Bill avait déjà réservé à l’avance, il a eu raison, l’endroit affiche comble ! C’est un milieu très fréquenté par les noirs surtout et de tous les horizons ! Il reconnait plusieurs d’entre eux, qui viennent vers lui et lui font une chaleureuse accolade.

- Mon frère ! Mon frère !!! William ! William Morrison ! Long time !

- Je suis là mon frère comment vas-tu ? Oh tiens ! Je te présente mon amie, Klariza ! Klariza je te présente aussi un grand ami, il est comme un grand frère pour moi !

- Enchanté ! Elle est surtout très mignonne ! S’exclame son ami.

- En effet oui ! Regarde juste sans toucher … C’est une propriété privée ! Reprend Bill.

Bill ? ou William ? Il me tient par la main depuis que nous sommes descendus de la voiture. Pas une fois il ne m’a lâchée, et pas une fois il n’a omis de me présenter à tel ou tel, tout en se pavanant un peu. Une fois installés dans ce grand club, où l’on sert à boire et à manger mais où l’on y diffuse également de la bonne musique bien rythmée de tous les quatre coins du continent, il n’a fait que me mettre à l’aise et sur un piédestal. J’avoue qu’au départ j’appréhendais un peu, du fait qu’il m’amène à ce genre d’endroit assez populaire, mais j’ai vite fait de me rendre compte que loin de cette apparence de grand directeur, Bill n’est en fait qu’une personne normale et comme tout le monde.

Je me suis attendue à voir toutes ces femmes, ses conquêtes, ou même encore ses prétendues fiancées surgir de nulle part et venir lui faire une scène bien mémorable… J’en sais bien quelque chose pour avoir été la copine de Steve…Alors je suis en permanence sur le qui-vive, en même temps détendue et par moment stressée et anxieuse. Bill, lui par contre est détendu et fait la conversation de temps en temps avec ses amis et très souvent avec moi ; il me parle beaucoup à l’oreille, me demande si je veux encore boire ou autre ; de temps en temps il s’oublie et pose sa main sur mon genou, comme si nous étions un couple dont la relation a été consommée bien longtemps à l’avance ; en gros Bill me met juste en confiance, ce qui me détend et me rassure un peu.

- Viens on va danser…

- Moi ? Oh non Bill… je sais vraiment pas danser !

Il sourit et se penche vers moi et me dit droit dans les yeux.

- C’est pas vrai ! N’est ce pas ? Et si c’est le cas, je vais te guider, je préfère ça ! Donne-moi la main !

- Bon tu as gagné !

Il assure grave ; il m’épate à mort ce Bill, quel que soit le registre, il s’en sort pas mal et bien mieux que moi. Pendant deux ou trois slows il m’enlace amoureusement, je me laisse bercer, la chaleur de son corps, sa respiration et tout, son parfum enivrant me fait oublier le son de la musique; je n’entends plus rien du tout à part le battement de son cœur ; tout se passe en fait dans ma tête ; je me laisse juste guider ; je ne sens plus rien du tout, sauf le baiser qu’il dépose discrètement sur mon cou … j’ai un léger frisson, je le regarde, et pendant que nos regards qui se croisent en disent long sur toute la ligne, il me dit dans la mêlée.

- Et si on allait prendre un peu d’air ?

Je ne réponds pas, j’acquiesce tout simplement de la tête. Je ne sais même pas où j’en suis, ni où donner de la tête, mais tout ce que je sais c’est que j’ai juste envie de profiter de ce bon moment avec lui, même si ça ne dure qu’une nuit. Je ne sais rien de lui, ni son âge, ni d’où il vient réellement, je ne sais pas s’il m’a menti à propos de ces origines camerounaises ou autre, mais j’ai juste envie d’être là avec lui, je me fou qu’il soit mon directeur, mon supérieur hiérarchique, mon collègue ou autre, je n’ai pas besoin de ça ce soir. Ce soir ce que je veux c’est m’éclater un peu…

- Ça va chérie ?

- Comment ?

- Je dit, ça va ma chérie ?

- Ça va Bill…

Il s’approche de moi, et il m’effleure la bouche de ses lèvres ; hésitante, je finis par me laisser faire au fur et à mesure que ce baiser évolue, mais ça ne dure qu’un court instant… Il n’insiste pas trop ; il finit par m’enlacer par derrière, et tout en déposant de temps à autre des petits câlins par ci par là, il essaie de me parler, de me rassurer.

- N’aie pas peur ! Je ne te ferai aucun mal et sache que je ne profiterai jamais de toi ! Sur ce coup - là, tu peux me faire confiance !

- Je suis juste intriguée, je comprends tout à fait ce que tu dis, je suis juste un peu … En fait même je ne sais pas où j’en suis…Mes choix, je fais toujours des mauvais choix en ce qui concerne mes relations amoureuses alors … Je ne voudrai pas créer une sorte de…

- Tu ne vas rien créer du tout ! Ne t’inquiète pas…Depuis le début ça se passe comme ça dans ma tête, je t’ai vue et … je t’avoue que je fais preuve de beaucoup de maîtrise de soi ; nous sommes collègues, je suis ton supérieur, ça ne devrait peut-être pas arriver, mais voilà, c’est arrivé, c’est entrain de m’arriver à moi, on ne peut pas lutter longtemps contre ça, parce que chez moi ça vient du fond du cœur, je le ressens ! Tu vas me prendre pour un fou mais j’ai envie de te dire …de te demander…Enfin bref, tu comprends !

- Je comprends tout à fait, tu veux avoir une aventure !

- Mais nooon !!! Je veux plus que ça !

- Ahahahah ! Quoi ?

- Tu ne me prends pas au sérieux n’est-ce pas ? A 36 ans, tu penses que je j’ai encore envie de m’amuser ?

- J’ai pas dis ça ! On se connait à peine, tu ne sais rien sur moi et moi non plus je ne sais rien sur toi !

- Je te connais ! Tu t’appelles Klariza Sama et tu viens du Cameroun en passant par la France, tu as 26 ans et tu es maman d’un petit garçon âgé de 5 ans ! Ensuite je vais te demander où se trouve le père de Rick tu vas me répondre qu’il t’a abandonnée seule avec le bébé, ou alors vous avez du vous séparer par la force des choses, classique ! Sinon tu ne serais pas là entrain de te faire baratiner par moi ! Encore qu’il faille que je te prouve que je ne suis pas un mauvais garçon ! Les apparences sont parfois bien trompeuses !

- Oh si que tu es un vrai bad boy ! Déjà ton nom, c’est Bill ou William ? Et d’où vient que tu te fasses appeler Morrison ? Alors que tu prétends être camerounais !

- Ok je vais te dire… Bill n’est autre que le diminutif de William ! Je suis camerounais et mon c'est William Tsoungui Morrison…

Je tressaillis un peu ; j’ai cru ne pas avoir bien entendu… Je crois m’être trompée, ou alors il ne s’agit que d’une pure coïncidence ; les Tsoungui au Cameroun il y en a des centaines.

- Tsoungui ? Tu… tu t’appelles …Tsoungui ???

- Oui ! Voilà, c’est mon nom complet !

- Tu… tu peux me dire comment s’appelle ta maman ? Juste … son prénom, c’est suffisant !

- Ma maman ? Elle s’appelle Carine ! Pourquoi ?

Je me dégage brusquement de lui.

- Carine Abessolo !

- Exact ! Mais comment l’a connais – tu ?

Une lumière dans les...