Chapitre 4 : De mal en pire
Write by Alexa KEAS
Alice Makafui DEKOU
Le visage à moitié couvert par le journal que je fais semblant de lire, je les observe. Je bouillonne de rage et veux me lever pour aller gifler cette femme, mais ma copine Fanta me somme d’attendre encore un peu. Aujourd’hui, je donne raison à la personne qui a dit que les hommes sont des cochons. Tu auras beau les laver et les bichonner, ils iront toujours à la boue. Entre la chose que je vois aux côtés de mon mari et moi, c’est le jour et la nuit. De un, elle ne sait même pas s’habiller. En second lieu, elle est aussi plate qu’une spatule. Pour finir, malgré la tonne de maquillage sur son visage, elle ne m’arrive pas à la cheville. Je suis doublement déçue par Lucien. Il aurait quand même pu choisir une adversaire de taille !
Encore un quart d’heure à supporter cette torture et je jette le journal sur la table avant de me lever. Fanta essaie de me retenir mais je suis plus rapide et avance vers la table de Lucien en mode furie. Nos regards se croisent avant que je n’atteigne son niveau. Il se lève prestement et joue à l’agréable étonné quand je rejoins leur table.
-Oh chérie, mais que fais-tu là ?
Je veux ouvrir la bouche, dans le but de lui demander qui est cette « pute », mais le geste qu’il effectue me paralyse. Monsieur m’embrasse à pleine bouche et garde son bras autour de ma taille. Il procède aux présentations ensuite, me faisant me sentir plus ridicule que le mot. Confuse, je garde le silence et fixe le vide.
-Sabine, je te présente ma femme. Dit Lucien à l’épouvantail devant lui.
-Enchantée madame, répond la Sabine en me tendant la main.
Mais que je suis obligée de prendre. Fanta nous rejoint au même moment.
-Ah, je vois que tu es avec ton amie ! S’exclame Lucien.
Il fait la bise la Fanta pendant que moi je jure de tout casser s’il ne procède pas à la seconde partie des présentations. Comme s’il lit dans mes pensées, il poursuit.
-Chérie, je te présente Sabine, elle est la nièce de Victor. Elle vit avec eux actuellement et Victor m’a demandé de m’entretenir avec elle à propos de certains faits.
Je me retiens de lui demander pourquoi son ami Victor lui demanderait de s’entretenir avec sa supposé nièce. Depuis quand vit-elle d’ailleurs avec Victor et sa femme ? Et pourquoi ne l’a-t-il pas invité à la maison, au lieu de l’emmener dans un restaurant ?
Je leur fais un faux sourire tout en me promettant de vérifier les propos de Lucien. Ma confiance en lui est mise à rude épreuves depuis l’épisode du sous-vêtement féminin qu’il avait sur lui. Monsieur a maintenu sa version des faits et je n’ai eu d’autres choix que de faire semblant de le croire. J’ai donc décidé de mener ma petite enquête et sa secrétaire a été ravie de me filer quelques informations. Selon elle, je devais tomber sur Lucien et sa supposé maitresse dans ce restaurant, ce midi. Mais, voila qu’il me sert la sauce de nièce de Victor et cette fille qui garde une attitude si normale que j’en perds mon latin.
-Voulez-vous vous joindre à nous ? Demande Lucien.
J’ai la gorge tellement serrée qu’après plusieurs secondes de silence, c’est Fanta qui répond finalement.
-Oui, bien sûr, Lucien.
Ce dernier me tire la chaise pour que je m’asseye pendant que Fanta se propose d’aller chercher nos sacs.
Je prends place mais mon esprit est absent de cet endroit.
Je n’arrive toujours pas à articuler le moindre mot. C’est Fanta qui passe ma commande. Lucien se comporte normalement comme celui qui n’a rien à se reprocher. La petite aussi s’est murée dans un silence de cimetière.
Au milieu du repas, que je n’arrive pas à apprécier, je décide de briser le silence.
-Chéri, tu sais que ça fait un moment que nous n’avons plus invité Mélanie et Victor à manger chez nous ?
-Oui, c’est vrai. Répond Lucien.
-Pourquoi ne pas organiser un petit truc ce weekend ?
-Bonne idée. Dit-il sans s’arrêter de manger.
-Sabine, dis-moi. Charlène et Sonia ne sont plus trop collées à ton oncle j’espère.
-Oh non Tanti, comme je suis là maintenant, elles passent beaucoup de temps avec moi. Réplique-t-elle en souriant.
‘’ERREUR’’. Je lance un regard incendiaire à Lucien qui me supplie du regard. La salope vient de me faire comprendre qu’elle n’est pas la nièce de Victor. Ce dernier n’a qu’un fils en fait, et il n’a que neuf mois.
Je repousse mon assiette et pose mon coude sur la table en fixant cette fille qui n’a aucune dignité. Sous la table, Fanta me tape avec son pied pour me dire de ne faire aucune réaction. Sabine balance son regard de Lucien à moi, attendant certainement un signe qui lui ferait réaliser son égarement. Sans un mot, je me lève et lui assène une gifle.
-Oh Tanti ! Grogne-t-elle.
-Ta mère, tanti. Ehontée ! Hurlé-je.
-Alice, arrête. Dit Lucien.
-Oh toi, tu ne m’adresses pas la parole.
-Tu te donnes en spectacle, Alice ! Gronde Fanta.
Je fais un pas en avant, en tendant ma main pour donner une seconde gifle à cette salope, mais elle devine mon geste et prend la poudre d’escampette. Je me tourne vers Lucien et la lui donne à la place de sa pute, avant de me saisir de mon sac et sortir du restaurant.
Fanta me rejoint et me prend la main.
-Je t’avais dit que c’était une mauvaise idée de venir. Me dit-elle. Regarde l’état dans lequel tu te trouves maintenant ! En plus de t’être donnée en spectacle. Mon Dieu, Alice.
Effectivement, je tremble de tout mon être et mes larmes coulent sans que je puisse les retenir. Fanta me prend la main et nous parcourons les quelques mètres jusqu’au bord de route, dans le silence absolu. Elle arrête un taxi et nous montons dedans. Tout le long du trajet jusqu’à mon boulot, je garde la tête baissée et pleure en silence.
Le temps de la pause n’est pas encore terminé alors, c’est le vide et le silence par ici. Fanta m’accompagne jusqu’à mon bureau et me console du mieux qu’elle peut.
-Je sais que ce n’est pas facile mais il va falloir que tu sois forte.
-Toi-même tu as vu la fille, tu peux me dire ce que Lucien lui aurait trouvé ? Que ne fais-je pas à cet homme ?
Me poser ces questions me fait encore plus pleurer.
-Pourquoi ne prends-tu pas ton après-midi ? Il est clair que tu ne pourras pas travailler dans un tel état.
-Non, il est hors de question que je me laisse abattre par ce chien de Lucien. Affirmé-je en effaçant mes larmes.
Je m’excuse auprès de Fanta et me rends dans les toilettes. Je pleure un bon coup avant de me rincer le visage. Je fais un exercice de respiration avant de rejoindre Fanta dans mon bureau.
-Il va falloir que j’y aille. Avance-t-elle.
-D’accord, merci pour tout.
-C’est normal.
Elle me prend dans ses bras avant de s’en aller. Une fois seule, je me refais une petite beauté. Le résultat arrive à masquer un tant soit peu mes cernes mais en repensant à la situation, je me remets à pleurer. Je ne compte plus le nombre de fois que je vais me rincer le visage avant la reprise du service. C’est Fanta qui a raison, malgré mes efforts, je n’arrive pas à me concentrer sur le travail. Je me rends donc à l’infirmerie et prétexte une terrible migraine. L’infirmier me donne des produits et une fiche de repos.
Je remballe donc mes affaires et me rends chez ma mère pour récupérer ma fille. Ma mine triste n’échappe à maman qui me demande aussitôt la raison de cet état d’être.
-Lucien me trompe, lui avoué-je.
-Comment tu l’as su ?
Je lui raconte pour le sous-vêtement, mes soupçons, mes enquêtes et la scène au restaurant de midi.
-Qu’est-ce que tout ça t’a apporté ?
-Pardon ?
-Tu m’as bien entendu Alice. Qu’est ce que jouer à Colombo ou à l’agent OO7 t’a apporté ?
-Mais maman, c’est quoi cette question ? Je te dis que mon mari me trompe et c’est tout ce que tu trouves à me dire.
-Oui, c’est tout ce que je peux te dire car tu n’aimes pas la paix.
Je la regarde, les yeux écarquillés et mon être complètement abasourdi par ses propos.
-Défendrais-tu Lucien ?
-M’as-tu entendu le défendre ? Je t’ai posé une simple question Alice. Dis-moi ce que tu as gagné, en menant des enquêtes qui t’ont conduit à voir ce à quoi tu as assisté ce midi.
-Je ne vois pas où tu veux en venir et je crois qu’il vaut mieux que j’y aille. Je ne veux pas m’énerver davantage. Dis-je en me levant.
Je me mets à crier le prénom de ma fille qui joue dans le couloir.
-Jeune fille, tu te calmes.
-Comment pourrais-je me calmer maman?
-Tu rentres où au fait ? Chez Lucien ?
Je l’interroge du regard.
-Pas la peine de me regarder comme ça, dit-elle. Je pensais que tu allais me parler de divorce ! C’est bien la condition sine qua non à l’infidélité !
-Jamais je ne vais laisser mon mari à cette fille ! Déclaré-je avec détermination.
-Ah ! Si tu savais d’ores et déjà que tu ne divorcerais pas de lui, même s’il te trompait, pourquoi es-tu allée enquêter sur ce qu’il fait, en dehors de chez vous ? Avant que tu ne te méprennes sur mes propos, laisse-moi te dire que tu es celle qui souffre en ce moment.
-J’avais besoin de savoir. Il fallait que je comprenne, maman.
-Et maintenant que tu sais, tu es satisfaite ?
-Non mais c’est bien mieux que le doute dans lequel je subsistais.
-C’est toi qui le dis.
Maman s’abstient de tout commentaire sur le sujet par la suite et nous parlons d’autre chose. Finalement, je passe toute la soirée avec elle et ne rentre qu’aux environs de vingt-et deux heures avec ma fille. Pensant que Lucien serait rentré depuis, je suis étonnée de constater qu’il n’a pas pointé le bout de son nez. Ma colère remonte d’un cran au point où je crie sur Maeva pour un rien. Cette dernière se met à pleurer. J’essaie de prendre sur moi et la berce jusqu’à ce qu’elle s’endorme.
Lucien ne franchit le seuil de notre appartement qu’à vingt-trois heures sans m’adresser la moindre parole.
-D’où sors-tu ? Ne pus-je m’empêcher de lui demander.
-Je n’ai pas de compte à te rendre.
-Pardon ?
*
*
Lucie Yayra MEDEDJI
Je sers l’oreiller tout contre moi, en pensant au fait que celui que je veux prendre dans mes bras, c’est Ephraïm. Chaque matin, je me réveille avec un cœur remplit d’espoir et chaque soir, je m’endors avec le cœur remplit de désespoir. Je veux juste avoir des nouvelles de lui, savoir qu’il est en vie et qu’il va bien. Cette histoire va finir par me rendre folle. Notre enfant grandit en moi chaque jour qui passe et ma prière est que son père réapparaisse avant qu’il ne vienne dans ce monde. J’égrène une prière muette à Dieu avant de me laisser basculer dans le sommeil.
Sentant une présence dans la chambre, j’ouvre les yeux. Dans la pièce, plane l’odeur d’un parfum que je reconnaitrais entre mille.
J’appuie sur l’interrupteur se trouvant au chevet du lit et fais jaillir la lumière.
-Ephraïm ! Appelé-je, le cœur battant la chamade.
J’entends des pas dans le couloir et bondis hors du lit. Je suis animée par un sentiment de peur, mitigé à celui d’appréhension. Je continue de crier son prénom en avançant vers la porte. L’odeur de son parfum est présente dans le couloir également.
Je cours dans le couloir et atteins le salon. Cette odeur est partout ! Je saisis la poignée de la porte principale et elle cède sans que je ne fasse tourner la clé. Je l’avais pourtant fermé à clé, cette porte ! Je jette un œil sur la montre murale avant de sortir de la maison. Il est deux heures trente du matin. Je crie le nom du gardien qui ne réagit qu’après cinq minutes. Monsieur semble sortir d’un profond sommeil. Et c’est lui qui est censé veiller sur la maison et sur moi y compris.
-Où est monsieur ?
Il me regarde, l’air plus que surpris, par ma question.
-Je t’ai posé une question !
-Désolé madame mais je n’ai plus revu monsieur depuis…
Il suspend sa phrase, en se disant certainement qu’évoquer le jour de notre mariage me ferait de la peine. Déjà, je dois avoir l’air d’une folle en lui posant une telle question, à deux heures du matin. Mais je n’ai pas rêvé, l’odeur de son parfum planait dans toute la maison. Je balaie la cour de regard et demande au gardien d’aller vérifier l’état du portail. Il revient un petit moment pus tard, me dire que le portail est bien fermé. Je lui demande de faire le tour de la maison. C’est peut-être ridicule mais je ne vois pas ce que je pourrais faire d’autre.
-Suis-moi, dis-je au gardien.
Nous nous rendons à l’intérieur et je lui demande s’il ne sent rien. Il hausse les épaules. Effectivement, l’odeur s’est dissipée. Mais il en reste quelques effluves et moi je les sens.
-Bien, tu peux partir.
Il s’en va et je ferme la porte derrière lui. Je prends place au sol, les deux mains posées sur ma tête, le visage baigné de larmes. Ma santé mentale est encore fiable, me répété-je.
*
*
Marie KENOU
Fabrice concentre toute son attention sur son téléphone, comme si je n’existais pas.
-Chéri ! Appelé-je en tentant de lui caresser la cuisse.
Il dégage violemment ma main et me tourne le dos. Je m’allonge derrière lui et tente à nouveau de le toucher.
Cette fois, il se dégage rudement et se lève du lit en me jetant un regard noir. Monsieur se dirige vers son armoire et l’ouvre. Je me redresse du lit sans le quitter du regard. Il prend des vêtements et les pose sur le lit. Il s’abaisse ensuite et tire une paire de baskets sous le lit. Il se met à s’habiller ensuite, m’ignorant royalement. J’essaie de garder mon calme et le regarde faire. La sonnerie de son téléphone se met à retentir et il s’en saisit. Son visage s’illumine quand ses yeux se posent sur l’écran. Il décroche et parle d’une voix mielleuse.
-Allô ma chérie ! L’entendu-je dire.
Mon cœur rate un battement.
-Oh oui ma belle, je serai là dans un petit moment…
Je me mets à secouer nerveusement mes jambes.
-Surtout, ne porte rien en dessous…
Là, je vois tout rouge. Je me lève prestement et lui arrache le téléphone que je balance ensuite je ne sais où dans la pièce. J’ai droit à une gifle aussitôt qui me propulse au sol.
-Tu es malade ? Hurle-t-il.
Je me relève et me jette sur lui alors qu’il s’est abaissé pour ramasser le téléphone. Il se lève, avec moi accrochée sur son dos et me renverse sur le lit. Il se retourne ensuite et me fait face. Mes bras immobilisés au dessus de ma tête avec une de ses mains, il se met me cogner avec l’autre sans y mettre trop de force.
-Je vais t’apprendre à respecter les gens, Marie.
-Lâche-moi ! Crié-je en me débattant.
C’est mal connaitre Fabrice qui m’assène une gifle qui me donne l’impression que ma joue a triplé de volume.
-Tue-moi si tu veux mais tu n’iras pas rejoindre ta pute. Dis-je en larmes.
-Je ne suis pas ta propriété Marie. Ce n’est pas ma faute si tu te révèles être une incapable. Voilà qu’une autre veut faire ce que tu ne peux pas alors tu me lâches les baskets.
-Merde Fabrice, je t’ai remis de l’argent, il n’y a même pas un mois ! Tu crois que je chie des billets ?
Il me relâche de suite et se place sur le côté.
-Lève-toi et sors d’ici Marie.
Je me mets à pleurer de plus belle.
-Je t’ai dit de te lever, merde !
Je me place sur mes genoux et commence par le supplier.
-Tu sais que je t’aime !
-Je ne mange pas l’amour, madame. J’ai de sérieux problèmes à résoudre. Alors, merci de ne pas m’en rajouter davantage.
-Je te trouverai l’argent d’ici demain.
-Je n’en veux même plus.
-Ne va pas rejoindre cette fille, mon bébé. Tu sais que je peux tout faire pour toi !
Je me heurte à son silence. Quelques instants après, je remarque que son visage se détend peu à peu et ose le toucher de nouveau. Il ne réagit pas, me donnant le courage de continuer.
-Je vais te trouver l’argent demain, mon chéri. Ne te fâche pas contre moi.
Il détourne son regard de moi. J’aventure ma main vers son entrejambe et commence par lui masser le sexe. Bizarrement, son membre était déjà dur. Penser qu’il allait rejoindre une autre me met en rage. Je déboucle donc sa ceinture et sors son sexe de sa cachette. Son téléphone se remet à sonner quelque part dans la pièce et il veut se lever mais je le cloue sur le lit en prenant le petit bonhomme dans ma bouche.
-Marie ! Appelle-t-il sur un ton plaintif.
Je fais celle qui n’entend rien et enfonce le bonhomme bien au fond de ma gorge, en manquant de m’étouffer. Avec mes techniques si savamment apprises, Fabrice oublie son téléphone qui ne s’arrête pas de sonner. Je ne le laisserai pas sortir tant que je ne l’aurai pas vidé. La salope au bout du fil ne perd rien pour attendre.
Après ma petite gâterie, Fabrice me renverse sur le lit et ôte mes vêtements sans réelle douceur. Il me bâillonne les pieds et les mains avec des foulards avant de me posséder. J’oublie mes enfants, mon statut de femme mariée et même mon prénom quand il me culbute. Fabrice me le donne comme j’adore. Il me fait tellement crier de plaisir qu’à la fin, j’ai la voix enrouée.
Je lui laisse tout ce que j’ai comme argent dans mon sac, en lui promettant de lui trouver la somme qu’il désire demain, avant de m’en aller. Ce n’est qu’une fois dans ma voiture que je daigne sortir mon téléphone du sac pour vérifier les appels en absence. Je vois des appels en absence de ma cousine, à qui j’ai demandé de rester avec les enfants. Elle m’avait dit qu’elle devait sortir aussi et voilà que j’ai mis plu de temps que prévu. Ma belle-mère arrive demain et il fallait bien que je vienne faire le plein de plaisir. Avec elle dans les parages, je ne pourrais plus voir Fabrice fréquemment. Je réfléchis rapidement à ce que je pourrais raconter à mon mari pour qu’il m’envoie de l’argent. En pleine circulation, une idée me vient à l’esprit. Je me gare sur le côté et l’appelle aussitôt. Il décroche à la cinquième sonnerie de sa voix toujours joviale.
-Chéri ! Crié-je, en feignant de pleurer.
-Que se passe-t-il ? Demande-t-il d’une voix paniquée.
-Je viens de me faire voler. Oh mon Dieu !
-Calme-toi et raconte-moi ce qui se passe. Mais, j’entends le bruit des voitures, tu es au bord de route ?
-Oui chéri, je revenais de la banque et j’ai eu une crevaison… Eh Seigneur, comment allons-nous nous en sortir, ils m’ont tout pris.
-Calme-toi, Marie et dis-moi comment ça s’est passé.
Je renifle un peu avant de poursuivre.
-Je voulais me rendre au grand-marché pour acheter quelques vivres, surtout que maman arrive demain. En quittant le marché, j’ai pris la route de la plage et j’ai malheureusement eu une crevaison. Je me suis donc arrêtée et c’est là où deux jeunes hommes sur une moto se sont approchés de moi. Je pensais qu’ils voulaient me proposer leur aide… ils ont sorti, l’un un pistolet et l’autre un couteau…
Je me lance encore dans une partie de pleurs.
-Ecoute, je vois que c’est bien trop dur pour toi de revivre la scène en me la racontant. Ils ne t’ont pas fait du mal, j’espère ?
-Non chéri !
-Dieu merci. Les enfants n’étaient pas avec toi non plus ?
-Non. Tout s’est tellement vite passé que j’ai l’impression de rêver…
-Combien-t-ont-ils volé?
-Tout, absolument tout ce qui restait de l’argent du mois. J’ai commis l’erreur de tout retirer.
-Ok, je vais voir ce que je peux faire. Connaissant le système policier de notre cher pays, je n’ose pas te dire de te rendre à la police. Maintenant, comment vas-tu faire pour rentrer ? Le pneu est-il remplacé ?
-Non, je suis dans la voiture actuellement et j’ai verrouillé les portières. Heureusement que le téléphone ne se trouvait pas dans le sac mais dans ma poche plutôt…
Je poursuis avec mes fausses larmes un petit moment encore. Mon mari se montre tellement désolé et compatissant à mon ‘’traumatisme’’. Il me demande de laisser la voiture sur place et de rentrer. Je jubile après avoir raccroché. J’envoie un message à Fabrice pour le supplier de ne pas aller rejoindre l’autre fille. Je l’aime et je lui trouverai l’argent.
*
*
Nathalie AYEDON
-Alors ? Me demande maman.
-Il est positif.
Sans plus dire un mot, elle prend son téléphone et compose un numéro. Je prends place sur le fauteuil en face d’elle, l’esprit complètement chamboulé. Je prenais pourtant mes précautions pour ne pas tomber enceinte.
-Oui, c’est pour une IVG (Interruption Volontaire de Grossesse). L’entendu-je dire.
Piquée au vif, je me redresse dans le siège, en espérant qu’elle ne soit pas en train de parler de moi. Sa conversation dure une minute de plus, avant qu’elle ne raccroche.
-Bien, je viens de prendre rendez-vous pour toi. M’annonce-t-elle.
-Tu blagues j’espère.
-En ai-je l’air ?
-Mais enfin, maman, je suis une femme mariée !
Elle pousse un long juron et détourne son regard du mien.
-Tu ferais mieux d’annuler le rendez-vous. Je n’irai nulle part. Je suis une adulte, en plus d’être une femme mariée.
-Et il est où ton mari ? Nathalie, dis-moi où se trouve ton mari actuellement.
-Tu sais bien que c’est par ta faute qu’il a dû rentrer chez sa mère.
-Celui ou plutôt la chose que tu appelles mari n’est qu’un vaut-rien.
-Maman, je ne te permets pas.
-Ah oui ? Eh bien, je me le permets moi-même. Parfois je me demande si on n’a pas échangé mon bébé à l’hôpital. Tu es trop bête, Nathalie. Comment tu as pu trouver le moyen de tomber enceinte de Paul-Arthur dans de telles conditions ?
Je me lève et quitte le salon sous les cris de consternation de ma mère. Je vais m’enfermer dans la chambre et laisse mes larmes couler.
*
*
Alexa KEAS