Chapitre 53
Write by Auby88
Aurore AMOUSSOU
Avec leur aide, je viens d'enfiler ma robe de mariée. Je l'ai conçue moi-même en m'inspirant des créations de Camille Boillet pour mariée en fauteuil roulant. Elle est en deux parties, un bustier et un jupe, afin de pouvoir être portée facilement. Quant au voile — qui sera accroché sur le diadème qui orne mes mèches vierges relevées en chignon — je l'ai fait suffisamment court pour qu'il ne se coince pas dans les roues de mon fauteuil décoré en blanc pour la circonstance.
Actuellement, je me fais maquiller par une professionnelle.
- Je veux un maquillage effet très naturel. Donc pas de fard de couleur vive, juste des tons qui se confondent avec ma carnation.
- Ok, mademoiselle. Ne vous inquiétez pas. Vous serez satisfaite par le résultat.
- Aurore, me précise Sandrine, c'est bon. On t'a assez entendue !
- Oui, tais-toi un peu et laisse la dame travailler. Ne me dis pas que tu prends au sérieux les paroles de ton mec !
- Laura, tu ne sais combien il peut être imprévisible !
- Et c'est vrai ! renchérit Olayinka, la sœur de Femi.
Toutes éclatent de rire.
* *
*
C'est la panique parmi mes supposées SUPER demoiselles d'honneur. Donc y a pas que moi qui commence à stresser oh ! (Rire).
A travers le miroir, je les regarde courir à gauche et à droite.
- Mes chaussures, où sont-elles ?questionne Fumilayo.
- Mon chapeau bibi, il est où ? demande à son tour Fifa.
J'aimerais bien les taquiner, mais je me ravise. Il vaut mieux rester concentrée devant la maquilleuse.
Heureusement, l'impertubable Paula est là. Elle vient de rentrer à l'instant avec la photographe.
- Fumilayo, regarde sous le lit et toi Fifa, ton chapeau est déjà sur ta tête !
Tout le monde pouffe de rire. Je suppose que si Paula reste autant sereine, c'est parce que son emploi de secrétaire du DG l'a déjà préparée à travailler sous grande pression.
- A présent, dépêchez-vous, les filles. C'est mou, c'est lent ! Rapidité !
Encore une fois, elle vient de répéter cette phrase qu'elle a retenue de son professeur de Biologie au Collège.
- On démarre pour l'Eglise dans trente minutes, poursuit-elle. Vous avez compris ?
- Oui, Paula.
- Et toi, Aurore ? T'es presque prête ?
- Oui, il me reste juste à mettre les parures et le voile. C'est maman qui s'en charge.
- Est-ce que quelqu'un sait où se trouve la mère de la mariée ?
- En bas. Baï est déjà partie la chercher.
- C'est parfait.
Puis se tournant vers la photographe, elle lui murmure :
- Assurez-vous que mon parfum sorte hein, sinon… !
Paula ! Je souris malgré le stress qui m'envahit progressivement.
* *
*
Maman est actuellement dans la pièce avec moi. Je lui fais face. Elle a demandé à rester seule avec sa fille. Elle me regarde, avec les yeux pleins de larmes.
- Qu'est-ce que t'es belle, Aurore !
Dans ses bras, elle me prend et nous restons ainsi quelques secondes.
- A présent, il faut qu'on se dépêche. Nous aurons tout le temps pour cela.
J'acquiesce.
- Tourne-toi, que je te mette tes parures.
Je m'exécute.
- Maman, l'écrin est là devant moi.
- Aujourd'hui, tu ne mettras pas ces bijoux-là.
- Pourquoi ? demande-je toute intriguée.
-Tu les porteras à une autre occasion, mais pas aujourd'hui.
- Et je mets quoi ?
- Je te mettrai d'autres bijoux.
- De ta préférence, c'est ça ? Maman, je te rappelle que c'est mon mariage. Donc …
- Tu parles un peu trop aujourd'hui ! Ferme les yeux.
- Maman !
Elle est entrain d'en rajouter à mon stress avec tout ce mystère.
- Ferme-la un peu et obéis.
- Ok.
Malgré moi, je rabats mes paupières et je sens ses mains sur mon cou. J'essaie de toucher le collier, mais elle me donne une tape sur la main.
- Aïe, maman !
- Patiente encore un peu, le temps que je finisse de te mettre les boucles d'oreilles.
- D'accord, maman, réponds-je malgré moi.
J'ai bien hâte de découvrir "sa surprise"…
* *
*
- Ça y est, ma fille, ouvre les yeux !
Avec hâte, j'ouvre mes paupières. Je n'arrive pas à croire ce que mes yeux découvrent. Mon cou scintille de mille feux avec ce mélange de diamant et d'or en forme de feuillage.
- Le feuillage de cette création antique est inspiré du rameau d'olivier. C'est le symbole de la force et la victoire, de la sagesse et la fidélité, de l’immortalité et l’espérance, de la richesse et l'abondance.
- Maman ! Tout ça ! C'est … magnifique. Je ne sais pas quoi dire tellement c'est … beau … Merci maman. Mais où as-tu déniché une merveille pareille ?
- Ce cadeau ne vient pas de moi.
- Pas de toi ? demande-je étonnée. De qui alors ?
- De ton père !
- Papa !
- Oui, il tenait à ce que tu le mettes pour cette occasion si spéciale.
- Où est-ce qu'il a acquis ça ? Ce doit être hors de prix !
- Je suppose que oui. Il l'a acquis à une vente aux enchères lors d'un voyage d'affaires en Grèce. Tu sais ma chérie, on pourrait faire un roman entier des extravagances de ton père ! Néanmoins, je dois reconnaître que ce collier te va à ravir. C'est comme s'il t'était destiné depuis toujours.
Je souris en me mirant une fois encore dans le miroir.
- Mon papa chéri ! Il me manque tellement. Si seulement il était encore là ! Si seulement je pouvais le revoir, ne serait-ce qu'une seconde !
Maman pose une main sur mon épaule.
- Moi aussi, je donnerais tout pour le revoir. Mais c'est impossible. Mais je suis certaine qu'il aurait été vraiment fier de te voir, de pouvoir t'accompagner jusqu'à l'autel.
Je suis tellement émue. Je m'efforce de ne pas pleurer. Parce que si je m'y mets maintenant, je vais traîner ça jusqu'à l'Eglise.
- Oui maman. J'aurais vraiment été heureuse d'entrer à l'Eglise à ses bras.
- De toutes façons, où qu'il soit, il veille sur toi.
- C'est sûr.
Une dernière fois, je contemple la parure à mon cou.
- Mais pourquoi ne suis-je jamais tombée dessus, durant toutes ces années ?
- Parce que ce bijou est toujours resté dans les coffres d'une banque. Ton père était certes très dépensier, mais pas assez idiot pour laisser un trésor pareil à la maison !
Je souris, en repensant à mon père et à tous les moments vécus avec lui.
* *
*
Des minutes plus tard.
C'est sur l'Ave Maria de Schubert que j'entre dans l'Eglise. L'un de mes oncles maternels, debout à ma droite, tient ma main et nous avançons lentement vers l'autel.
Mon cœur bat à 100 à l'heure.
Devant nous, Arabella et Yves parsèment le sol de pétales de rose.
Derrière nous, se trouve maman, suivie de mes demoiselles d'honneur.
J'évite de regarder de part et d'autre de l'allée. Mes yeux demeurent droit devant moi. Le chemin me semble une éternité...
Il est là, je le vois, l'homme à qui je me lierai devant Dieu et devant les hommes pour toute ma vie. Il me sourit et me prend la main.
- Tu es divine, Aurore !
- Tu trouves ?
- Oui. En plus, tu ne sembles même pas maquillée. J'adore !
- Merci, mon cœur. Je peux en dire autant sur toi. Tu …
Les premiers mots du prêtre se font entendre. Il est temps de rester concentrés sur la cérémonie...
* *
*
Les versets de "L'hymne à la Charité" résonnent dans mes oreilles. J'écoute avec grand soin ce passage biblique qui m'édifie tant.
"(…) L’amour prend patience ; l’amour rend service ; l’amour ne jalouse pas ; il ne se vante pas, ne se gonfle pas d’orgueil ; il ne fait rien de malhonnête; il ne cherche pas son intérêt ; il ne s’emporte pas ; il n’entretient pas de rancune ; il ne se réjouit pas de ce qui est mal, mais il trouve sa joie dans ce qui est vrai ; il supporte tout, il fait confiance en tout, il espère tout, il endure tout. L’amour ne passera jamais (…)
1 Co 13, 1-13"
Mes yeux croisent ceux de Femi. Nous nous sourions. Nos mains se cherchent, se trouvent et ne se lâchent pas.
* *
*
Pour l'échange des consentements, j'ai droit à une petite surprise : Femi qui accompagne la Chorale sur le chant "Oui devant Dieu". Je suis émue jusqu'aux larmes.
Quand vient l'échange des alliances, Femi me passe la bague au doigt, sans effort. Mais quand vient mon tour, c'est le contraire qui se passe. Je stresse à nouveau. Je ne sais même pas pourquoi. La bague coince.
- Femi, je n'arrive pas à te mettre la bague ! lui murmure-je. Qu'est-ce qui se passe ?
- Détends-toi, Aurore.
L'Assemblée a les yeux rivés sur nous. J'ai bien honte de moi...
- Enfin ! dis-je quand je parviens à lui enfiler sa bague. (Sourire )
********
Femi AKONDE
Nous sommes sur le parvis de l'Eglise. Je suis si heureux. Sur monsieur et madame AKONDE, pleuvent des confettis. Mon épouse et moi, prenons chacun une colombe blanche entre les mains. Nous les relâchons au même moment vers le ciel. La colombe blanche symbolise la paix et l'amour fidèle.
Vers ma moitié, je me penche.
- Enfin, nous sommes mariés, liés pour la vie et même au-delà.
- Oui, monsieur mon mari.
- S'il n'y avait pas cette réception, je t'aurais volée d'ici sans que personne ne le sache.
- Tu en es sûr ?
- Oui. En tout cas, j'ai bien hâte que nous soyons tous deux pour fêter notre mariage comme il se doit !
- Encore un bisou ! Encore un bisou ! crie la foule en liesse.
- Han, je ne savais pas qu'ils continuaient de nous épier ! Tout ça, c'est de ta faute, Aurore !
Je l'entends rire.
- Même si tu es Superman ou Flash ou je ne sais quel super-héros, je doute qu'aujourd'hui tu puisses me "kidnapper" sans que quelqu'un s'en aperçoive !
- Encore un bisou ! Un bisou ! continuent-ils de clamer.
Je regarde en direction des invités et remarque Paula bien en avant.
- On prend notre temps, nous ! Patience !
J'entends les rires des uns et des autres. Sur le front d'Aurore, je dépose un bisou. Là, on me hue.
- Messieurs, mesdemoiselles et mesdames, ce sera tout pour aujourd'hui. Le reste se fera dans la plus stricte intimité familiale, c'est-à-dire uniquement entre mon épouse et moi. N'oubliez pas qu'il y a des enfants parmi nous !
Des éclats de rire retentissent dans l'air...
*********
Aurore AMOUSSOU
C'est le moment des embrassades. Femi me lorgne ouvertement. Je fuis son regard...
- Aurore, si ça doit continuer ainsi durant la réception, je m'enfuis et je te laisse gérer tout toute seule. Je n'ai pas envie d'avoir les joues perforées au final !
- Femi, voyons ! C'est un jour spécial !
- T'aurais juste invité dix personnes qu'on aurait déjà fini. Mais au lieu de cela, il a fallu que tu convies tout un régiment ! En tout cas, t'inquiète, tu me dédommageras pour tout ça tout à l'heure ! Prépare-toi bien pour toute la nuit et les jours suivants aussi ! Crois-moi, tu n'auras même pas le temps de te promener dans les rues ivoiriennes !
Je pouffe de rire, rien qu'à voir son visage. S'il parle des rues de Côte-d'Ivoire, c'est parce que c'est là-bas que nous irons en lune de miel, gracieusement offerte par ma seconde maman : la mère de Bella. Et j'ai grand hâte de revoir ma terre adoptive.
- Donc tu seras actif durant toute la lune de miel ?
Femi hoche la tête.
- T'es fou, oui !
- Je suis sérieux, Aurore !
- Comme si tu pouvais !
- Ne me tente surtout pas ! Tu seras surprise, je t'assure !
- T'es malade, oui !
- Exact. D'ailleurs, c'est toi mon remède ! achève-t-il sur un ton sérieux tandis que moi, je m'exclaffe encore et encore.
**********
Femi AKONDE
Aurore tient à lancer son bouquet de fleurs sur le parvis de l'Eglise. Je n'ai jamais compris cette superstition qui dit que celle qui l'attrapera sera la prochaine mariée...
J'éclate de rire quand je vois celle qui a reçu le bouquet.
- Non, sérieux ! Paula !
Je ris si fort que Paula se ramène vers moi et me donne de petits coups. J'ai bien envie de riposter, mais ce n'est pas le moment. Les photographes nous attendent...
* *
*
Enfin ! Séance photos finie. Tout à l'heure, j'ai vraiment cru que j'étais devenu un mannequin. J'imagine ce qu'était la vie d'Aurore avant avec tous ces flashs dans les yeux.
Nous venons d'arriver sur le lieu de réception, un large espace aménagé pour la circonstance. Devant le grand chapiteau que nous avons loué, se trouve un géant poster d'Aurore et moi sur lequel est écrit "Mr & Mrs AKONDE". Les invités, qui le souhaitent, pourront y inscrire des mots à notre endroit.
Pour réaliser le poster, nous avons détourné l'affiche du célèbre film "Mr & Mrs Smith". Nous nous faisons dos. Moi debout dans mon smoking. Aurore, assise dans son fauteuil et en robe de mariée. On n'est pas n'importe qui hein ! (Rire).
A l'intérieur du chapiteau, nous attendent la deux fois plus que centaine de gens que ma trop généreuse épouse s'est sentie obligée d'inviter. (Ironie oui). Il y a plein de visages que je ne connais pas et que je doute encore rencontrer après aujourd'hui. Sacrée Aurore, avec ses rêves de gamine ! Bah ! Qu'est-ce que j'y peux ? Je l'aime oh ! Je l'aime, ma blessure sucrée. Alors, je subis. (Rire).
* *
*
C'est sur une séquence de "All you need is love" — thème musical du film culte "Love actually"— qu'Aurore et moi foulons le long tapis rouge installé pour l'occasion, sous les feux de projecteurs et sous une pluie d'ovations. Les invités sont debout. Les flashs crépitent de partout sur nous. On se croirait vraiment au Festival de Cannes ! (Sourire)
Ensuite, sur le titre dansant "Iyawo mi" de Timi Dakolo, nous procédons à notre première danse. Nous bougeons allègrement. Elle, dans son fauteuil et moi debout. Très originale comme manière de danser ! Je suis tellement joyeux que je tourne le fauteuil d'Aurore dans tous les sens. (Rire). Nous dansons également avec nos parents et notre adorable fille...
Nous venons de prendre une pause pour rejoindre la table d'honneur.
Sur notre table ainsi que sur les autres, se trouvent des objets décoratifs en rapport avec le thème cinéma de notre mariage : Claps, caméras, pellicules, dragées en forme de bobines…
Dans un angle de la pièce, il y a un coin photo VIP avec une caméra, une chaise de metteur en scène et plein d'accessoires de cinéma. Les invités pourront y poser comme des stars.
En ce qui concerne la disposition des convives, nous avons préféré opter pour une disposition normale (chaises autour de tables) plutôt qu'une disposition de salle de cinéma pour leur permettre d'être bien à leur aise.
Quant au gâteau de mariage, dessiné par Aurore, il s'agit d'une grande pièce montée blanche et noire, avec une cascade de roses rouges comestibles. Sur chaque palier, se trouvent des figurines de nous deux : assis ; moi poussant son fauteuil ; moi la tenant dans mes bras ; nous deux nous embrassant ; etc. Il y a même une figurine spéciale où nous tenons Arabella.
Que d'imagination mon épouse a ! J'avoue que je suis encore bluffé. C'est à croire qu'elle préparait son mariage depuis le ventre de sa mère ! (Rire)