Chapitre 6

Write by leilaji

The love between us


Chapitre 6


Est-ce que tu m’aimes est l’une des questions les plus pernicieuses du monde. On ne peut pas ne pas y répondre clairement. C’est oui ou non. Mais je ne peux pas dire oui ni non. Je ne me suis jamais posé la question jusqu’à maintenant. Ce n’est pas comme dire : « je t’aime » et se taire. Dire tout simplement je t’aime c’est mettre ses sentiments à nu, avouer quelque chose qu’on ressent et c’est tout. On prend le risque seul, on ne s’impose pas à la personne aimée. Mais demander à l’autre est-ce que tu m’aimes, c’est insister pour que lui se mette à nu. Alors qu’il n’est peut-être pas prêt à le faire. 


Demander à l’autre est-ce que tu m’aimes, est d’une violence contrôlée. Et je n’aime pas ça. 


Je pose ma main sur la sienne. En sens la chaleur, la douceur, rien à voir avec mes mains abimées par mon travail de garagiste. Je détache sa main de mon corps et me prépare à répondre lorsqu’un de nos amis communs entre dans la pièce. Sauvée par le gong, apparemment. 


Il est déjà salement éméché et tangue sur ses jambes. Il ouvre le frigo pour en sortir des bières fraiches.


— Alors, on se cache pour se peloter avant que l’autre ne se marie ? nous demande-t-il d’une voix trainante rendue incompréhensible par l’alcool.


Mais on est tellement sur la défensive, tellement crispés qu’il comprend qu’il vient de créer un malaise et claque le frigo en nous regardant droit dans les yeux. 


— Just chill les potes, je blaguais! 


Les bouteilles en main, il continue de nous regarder avec suspicion. Je ne comprends pas pourquoi je me sens fautive, comme si je volais Idris à quelqu’un. Pourtant, il m’a toujours appartenu. Je déraille. Je le regarde d’un œil nouveau. Est-ce qu’il m’a toujours appartenu ?  


— Oui ? Tu as besoin d’autres choses ? demande calmement Idris.


Son calme n’est qu’apparent. Je vois les muscles de sa mâchoire tressauter. Ce que j’aime le calme de cet homme. Cette manière d’être toujours serein, au contrôle quand les choses sont sérieuses. 


— Vous êtes best-friend forever n’est-ce pas ? Moi j’ai toujours dit que l’amitié entre fille et garçon ça n’existe pas. Il y en a toujours un qui veut se faire l’autre. 


L’alcool délie les langues à ce que je vois. Il est vrai qu’au tout début beaucoup de gens nous le disait. Mais au fil du temps, ses amis sont devenus les miens et les miens les siens, de sorte que tout le monde s’est habitué à toujours nous voir ensemble. Et plus personne n’a douté du lien d’amitié qui nous unissait. 


— Tu sais qu’on avait parié sur vous, reprend-il avant même que l’un de nous deux n’intervienne. Genre quand est-ce qu’ils vont coucher ensemble ? Mais Idris, le père ci est tellement … Tu aurais dû vivre dans le pays des ayatollahs. Façon tu aimes ta religion là.  Moi à ta place j’aurais collé la petite depuis. De toute manière si elle est bizarre on s’en fout. Même l’eau sale éteint le feu.

— Ta gueule ! Va cuver ta bière ailleurs Harold. 


Plutôt que de s’en aller. Il se rapproche de moi l’air très énervé.


— Tu ne me parles pas comme ça Manu ! 

— Tu m’insultes et tu veux que je t’applaudisse ? Tu te crois où là ? 

— Idris, retiens ta chienne avant que je ne m’énerve. 


Le genre d’Harold c’est le genre de mec qui ne mérite pas qu’on prenne des pincettes avec lui. Il me traite de chienne aujourd’hui en oubliant les textos enflammés qu’il m’envoyait l’année passée pour que je couche avec lui. Harold c’est le genre de mec qui devant tout le monde fait celui qui n’est pas vraiment intéressé par toi alors qu’au fond il meurt d’envie que tu lui accordes une chance. 


— C’est l’alcool qui parle. Mais si toi moi-même en ton âme et conscience tu estimes que tu es un homme et que tu assumes ce que tu viens de dire… Répète.

— Quoi ? 

— Est-ce que tu peux répéter ce que tu viens de dire ? 


Harold se met à rire stupidement avec un air crane. L’insulte a déjà quitté ses lèvres. Il ne la répétera pas mais il s’en vantera à coup sûr. Ça m’énerve tellement que je plie les poings de fureur. Surtout venant d’un pauvre type comme lui. Je crois qu’il n’est pas aussi saoul qu’il essaie de nous le faire croire. 


— Viens Manu on y va, s’interpose Idris. 


J’ai envie d’effacer ce sourire idiot du visage d’Harold. Vraiment envie. Depuis toute petite je me bats contre les garçons. Donc une bagarre de plus est-ce que ça changera quelque chose à ma réputation ? Non. Je m’approche d’Harold en détendant mes épaules. Mon genou dans ses roubignoles, il va bien le sentir passer. Je ne suis peut-être pas aussi forte que lui mais je suis très rapide. Un coup bien placé et il est K.O. je vais tenter ma chance parce que j’ai trop envie de le voir se rouler de douleur par terre à mes pieds. 


— Manu ! aboie Idris.


Je sursaute légèrement comme sortant de ma transe. 


— J’ai dit on y va. 


C’est ce que je déteste avec Idris. Cette manière qu’il a de pouvoir canaliser mes débordements en une seule phrase. Comme s’il avait un pouvoir magique sur moi. Il me tend la main et sourit pour gommer toute tension de mon visage. Je saisis sa main et il nous sort de la cuisine. Je m’en vais, le majeur levé en signe d’au revoir à Harold. 


Un silence confortable s’installe entre nous jusqu’à ce qu’on arrive chez moi. J’ai conduis prudemment comme je le fais toujours lorsqu’Idris est dans la voiture.  Il a encore les clefs de mon studio alors c’est lui qui ouvre. Je balance mes affaires sur la table basse et m’assois dans mon fauteuil. Il commence à montrer des traces d’usure, il va bientôt falloir penser à en acheter un autre. 


Je préfère ne pas réfléchir, juste fermer les yeux puis les ouvrir, le regarder et répondre aussi naturellement que possible à la question qu’il m’a posée avant qu’on ne soit interrompu. Ce qui sortira de ma bouche ne pourra qu’être pure vérité n’est-ce pas ? Qu’il n’y ait rien de calculé, de prémédité dans ma réponse est, ce que je veux. 


— Toi tu ne dis rien et c’est à moi de te dire si je t’aime ? 

— J’ai cru un moment que tu avais oublié ma question. 

— Comme si tu me laisserais oublier une question pareille, je marmonne en refermant de nouveau les yeux.

— Je ne voulais pas te brusquer ou t’imposer quoi que ce soit. 

— Tu passes ta vie à me ménager et voilà là où nous en sommes. 

— Je ne suis pas doué pour dire ces choses-là. C’est tout. Mais au fond de toi tu le sais bien que je t’aime.

— Je suis encore moins douée que toi Idris. Et ça toi aussi tu le sais. 

— Ça ne répond pas à ma question.


J’allume la télé pour qu’on se sente moins en tête à tête. Il ouvre les placards, observe les trésors cachés à l’intérieur, sort quelques ustensiles. La cuisine c’est le lieu préféré d’Idris dans une maison. Il s’y sent toujours à l’aise où qu’il soit. 


— Est-ce que tu as mangé aujourd’hui ? demande-t-il en me souriant


Je lève un sourcil interrogateur. C’est ce qu’on appelle passer du coq à l’âne ou je ne m’y connais pas. Mais il ne semble pas nerveux en me posant la question. Il est juste lui-même, souriant été détendu. 

 

— Des biscottes le matin. Après je n’ai pas eu seule minute à moi, je finis par répondre en posant les coudes sur la table. 


Alors il ouvre le frigo et sort des œufs, du beurre, du jambon cru. D’un geste précis et naturel, il casse les œufs, les bat, ajoute une flopée d’herbes, sale et poivre au moulin. Puis il fait tiédir doucement du beurre et l’incorpore aux œufs battus. Il remet la poêle sur le feu et dès qu’elle est chaude verse sa préparation. Je tends le cou pour voir. L’omelette grésille, s’assèche sur les bords tout en restant moelleuse au centre. Avec dextérité, il la pose sur les tranches de jambon avant d’enrouler le tout comme un gros sushi. il se lave les mains, cherche dans les placards un bref instant puis reviens avec un paquet de cure-dents. Il coupe des tranches enroulées qu’il scelle avec les cure-dents. Puis il préchauffe le gril du four, s’empare de la miche de pain posée sur la table, la coupe en tranche. J’ai du mal à suivre tellement il va vite. Dans un bol transparent, il mélange le reste de beurre, de l’huile d’olive, de l’ail et de l’origan. Puis il sale et poivre en deux tours de moulin. Avec un pinceau de cuisine, il tartine généreusement les tranches de pain. Il enfourne 5 minutes puis retire du four pour parsemer le pain de la mozzarella qu’il vient de râper. 


Tout d’un coup je me rends compte à quel point j’ai faim. Il dispose le tout sur un plateau et s’assois à mes pieds. Je l’y rejoins et on mange en bavardant, reprenant de manière naturelle nos bonnes vieilles habitudes. Il sort son téléphone de sa poche et le pose près de lui pour être installé plus confortablement. 


Cette omelette est putain de bonne. Carrément divine. 


— Tes doigts sont magiques avec une marmite. Ce truc avait l’air super simple mais c’est trop bon, je lui fais constater la bouche pleine. 


Je me lève et nous prends deux petite bouteilles d’eau Andza dans le frigo car Monsieur se méfie de l’eau du robinet. On boit au goulot et repose nos bouteilles sur la table basse. Le dos posé sur l’un des pieds du fauteuil et la nuque sur l’assise, il scrute le plafond comme s’il allait lui révéler les secrets de l’univers. Moi je une demi fesse posée sur l’accoudoir et je le regarde. 


— Comme quoi tu vois, toi et moi on est pareil. Sauf que moi je n’ai pas le courage de vivre de ça. 

— Je n’en aurais pas eu le courage non plus si j’avais des diplômes en autre chose. Crois-moi Idris, tu ne démérites pas. 

— Si. Parce que si je veux être tout à fait honnête avec toi. Je me serai peut-être déclaré si je gagnais aussi bien ma vie que toi.

— De quoi tu parles ? 

— Je ne peux pas être ton homme si je ne peux pas prendre soin de toi. J’en ai rien à faire de combien toi tu gagnes. Mon problème c’est combien moi je gagne, si ce n’est pas suffisant pour prendre soin de toi, te rendre heureuse c’est que je ne suis pas à la hauteur. Et c’est un truc qui me tue. Je travaille comme un fou pour une femme puissante qui me paie en monnaie de singe mais refuse de me laisser partir. Elle connait tout le monde et chaque fois que j’ai osé déposer mon dossier ailleurs, ça n’a jamais mordu parce qu’elle court-circuite ma candidature. 


J’éclate de rire en le découvrant tout d’un coup sous un autre jour. Il ne m’avait jamais semblé être gêné par le fait que je gagne plus que lui grâce au garage. 


— Je n’ai pas vraiment besoin qu’on prenne soin de moi tu sais, je lui dis pour le rassurer.

— Oh que si. Mais tu  ne le sais pas encore c’est tout. Moi je le ferai. 


Il a dit : « moi je le ferai » avec une telle conviction dans la voix que je le crois. Qu’est-ce qui pourrait m’empêcher d’être heureuse avec cet homme ? La peur de tout gâcher entre nous. Je ne le mérite pas, ça c’est sûr. Mais c’est lui qui veut tenter sa chance avec moi alors peut-être que quelque part dans tout le méli melo de ma vie quelque chose vaut la peine qu’un homme comme lui s’y intéresse.


— Est-ce que tu m’aimes Idris ?

— Est-ce que tu en doutes ?

— Je n’en sais foutrement rien… je lui dis d’une voix rendue hystérique par la peur.

— Approche je vais te montrer quelque chose…


Sa voix semble lointaine, comme s’il tombait de sommeil et qu’il ne lui restait de l’énergie que pour me montrer une seule et dernière chose.  Alors je quitte l’accoudoir pour me rapprocher de lui et il en profite pour me tirer de telle sorte que je tombe à califourchon sur ses longues jambes. Son pouce caresse mes lèvres. 


— Tu es tellement belle aujourd’hui, murmure-t-il d’une voix sourde.


Le désir brule dans ses yeux. Je porte un tricot de coton et un vieux jean usé jusqu’à la corde. Putain qu’il sent bon. Il me sourit, de son sourire qui m’a fait craquer pour lui à notre première rencontre dans mon garage. Et cette peau si lisse qui appelle la caresse. J’ai presque envie de lécher son visage. 


Son regard glisse sur mon cou, puis sur ma poitrine, en faisant dresser les pointes sans même les toucher. C’est la première fois qu’il éveille de telles sensations en moi. Et dire qu’on se connait depuis 5 ans. Il prend mon visage en coupe et lèche ma lèvre inférieure avec une lenteur déconcertante. Je gémis, m’abandonne pour ne pas réfléchir plus en avant sur le contrôle qu’il a de la situation alors que moi je patauge et m’enfonce tout doucement dans un sentiment de bienêtre et de plénitude qui jusque-là m’était inconnu. A mesure que son baiser se fait plus profond, la vague de désir qui s’est formée en moi, s’intensifie et semble vouloir balayer toute pensée cohérente de mon esprit. Sa langue tourne autour de la mienne, la taquine. Je colle mes seins à son torse. Glisse mes mains sous son tee-shirt pour sentir sa peau frémir à mon contact. Je le griffe légèrement, il me serre plus fort dans ses bras. Nos lèvres s’éloignent l’une de l’autre pour qu’on puisse reprendre notre souffle. Nos regards se croisent de nouveau, conscient que nous venons de franchir une ligne que nous ne pourrons plus jamais effacer. 


Mais ce qui se passe dans mon corps est trop bon, trop bon pour être mal n’est-ce pas ? Il se penche à nouveau vers moi et se fige lorsque son téléphone vibre. Nous tournons tous les deux la tête et lisons le nom en même temps. Zeina… Comment ai-je pu l’oublier ? Il coupe l’appel. Mais c’est trop tard car la magie de l’instant s’est déjà envolée. Il s’éclaircit la gorge et tout d’un coup sans que je ne sache pourquoi, je me rappelle de lui disant à la fête que j’étais vulgaire. 


A quoi on joue ? il est sur le point de se marier merde. Comme s’il lisait dans mes pensées, il met rapidement les choses au clair. J’essaie de me lever mais il m’en empêche me maintenant fermement sur ses cuisses. 


— Tu n’as qu’un mot à dire Manu, et je mets fin à cette mascarade. 

— N’est-ce pas toi qui me disais que l’argent que je gagnais t’empêchait de te déclarer. 


Il me sourit de nouveau, comme un enfant prêt à montrer son nouveau jouet surprise. 


— Le deal avec ma mère c’est que je me marie et je prends la tête de l’entreprise de BTP laissée par mon père. Jusqu’à maintenant c’est elle qui la dirigeait mais, elle est fatiguée et elle veut prendre sa retraite. 

— Ta mère dirige une entreprise de BTP ? 

— C’est une longue histoire. Je te la raconterai un jour. Mais le plus important c’est que mon salaire sera plus que décent et je pourrais prendre soin de toi comme tu le mérites. 

— Et dans ton joli monde de bisounours tu oublies que : Ta mère ne m’aime pas. 

— Ma mère ne t’aime pas parce qu’elle ne sait pas à quel point moi je t’aime. Je vais lui parler et tout va rentrer dans l’ordre. Je te le promets. 


J’ai tellement envie de le croire. Alors lentement j’hoche la tête pour lui dire que je suis partante. Je veux découvrir ce qui se passe entre nous, laisser une chance à ce que je ressens pour lui de grandir et de murir. 


— Je n’ai plus besoin de répondre à ta question alors ? 

— Non


*

**


Idris a tenu à ce qu’on y aille ensemble pour donner du poids à ce qu’il dira. Zeina est absente car elle a du rejoindre sa sœur qui vient d’accrocher un second diplôme à sa penderie.  J’étais là quand Idris lui a dit qu’ils avaient à parler à son retour. Et maintenant, il faut en finir et tout expliquer à sa mère. 


La mère d’Idris est une femme imposante d’une cinquantaine d’années qui traine avec grâce, ses kilos en trop. Ses traits fins sont soulignés par le voile qui encercle sa tête. Elle le porte aucun signe extérieur de richesse. Et ses vêtements sont sobrement coupés. Le rictus bloqué sur sa bouche depuis qu’elle m’a vu arriver au bras de son fils n’augure rien de bon. Mais Idris ne plie pas. Son entêtement habituel, je crois que c’est d’elle qu’il l’a hérité. Parce que malgré tout ce qu’il dit, elle secoue négativement la tête et cite le nom de Zeina à chaque phrase comme s’il s’agissait d’une ponctuation. 


Alors ils se mettent à parler en langue et elle me jette de petits coups d’œil méprisants. Le ton monte entre eux. Mais la main d’Idris ne lâche pas la mienne.


Sa mère s’éclaircit la voix, prête à mettre fin au débat. 


— Selon le Prophète, que la prière d’Allah et Son salut soient sur lui : « Les meilleurs de vos femmes sont celles qui sont aimantes, fécondes et obéissantes si elles pratiquent la Taqwa d’Allah. Et les plus mauvaises de vos femmes sont les moutabarijat orgueilleuses, ce sont elles les hypocrites. » 


Soudain, alors que depuis le départ, elle s’adresse à son fils, elle m’inclut dans la conversation. 


— Tu sais ce qu’est une Moutabarijat ma fille ?


Je suis tellement étonnée que je mets du temps à lui répondre. Que dois-je dire ? Maman, madame ? je choisis le mot le plus neutre. Je n’ai pas envie de l’agacer encore plus. 


— Non madame. 

— Ce sont les femmes qui sortent de chez elles ou sont vues par des hommes étrangers  alors qu’elles sont habillées d’une manière qui n’est pas conforme à l’islam. 

— Maman ! 

— Je suis désolée Idris. Je sais qui j’ai élevé. Un homme bon et profondément respectueux de sa religion. Pourquoi voudrais- je que tu gâches toutes tes chances d’aller au Paradis en épousant une telle femme ?

— Je l’aime. C’est à moi de décider, non ? 

— Que sait-elle faire de ses dix doigts ? Saura-t-elle s’occuper de toi, de vos enfants. C’est toi-même qui m’a dit les rares fois ou tu as parlé d’elle qu’elle ne saura jamais le faire. Tu l’aimes ? Mais qui t’as dit qu’on bâtit un mariage durable sur : je l’aime. Ton père je l’ai épousé sans l’avoir jamais vu auparavant et si notre mariage a marché c’est parce qu’on a appris à se connaitre, à se respecter et surtout nous étions unis par la même religion. Qui te respectera dans notre famille si tu épouses une telle dévergondée ?


La main d’Idris sert la mienne plus fort. Je détourne la tête. Je n’ai qu’une envie, me lever et partir. Mais je ne le  fais pas. La main d’Idris accrochée à la mienne ne me le permet pas. Je suis comme condamnée à écouter cette femme parler de moi comme si j’étais la pire chose qui puisse arriver à son fils.  


— Tu l’aimes… Ok. Tu veux sacrifier la réputation de la famille pour elle, et laisser de côté une femme méritante pour elle, ok. Ca prouve à quel point tu l’aimes. C’est peut-être le monde moderne qui veut ça, qu’on tombe amoureux pour se marier. Soit ! Je peux m’y faire. peut-être suis-je trop vieille pour comprendre ces choses-là. Soit ! 

— Je n’ai jamais dit que tu étais trop vieille pour comprendre maman. 

— Et elle ? Qu’est-elle prête à sacrifier pour être à toi ? Dis le moi. 

— Arrête maman. Ce que tu dis là n’est pas digne de toi. Apprends à la connaitre d’abord et juge là sur ses actes. C’est tout ce que je te demande. 

— Ce que tu me demandes c’est de faire entrer cette femme qui est comme un homme dans ma famille. Je le ferai. Je le ferai mon fils si c’est vraiment ce que tu veux. Mais je n’aurai qu’une seule condition.


Est-elle en train de céder ? Je n’y crois pas. Est-ce la fin du tunnel ? Ca va faire deux heures qu’ils discutent sans relâche. La mère est-elle en train de céder à la volonté de son fils ? Vais-je vraiment me marier avec Idris ? 


— Quelle est ta condition ? 

— C’est à elle de me poser la question. 


Je regarde Idris et il penche légèrement la tête pour m’indiquer de jouer le jeu. Je soupire et me lance. Sa mère à raison, je peux moi aussi sacrifier quelque chose n’est-ce pas ? il parait que c’est ça le mariage. Concession sur concession. Autant se mettre dans le bain tout de suite. 


— Que dois-je faire ? 

Que veut-elle de moi ? Que je sois plus féminine, que j’apprenne à cuisiner, à repasser ses chemises ? Je peux le faire, du moins il me faudra y mettre de la volonté mais ce ne m’est pas impossible. 


— Si tu aimes mon fils, convertis-toi. Et je m’inclinerai.

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