chapitre vingt-huit

Write by Pegglinsay

Comme je voulais rentrer le même jour a Léogane, je suis allée directement chez Djamal après avoir fais un arrêt dans un petit resto pour prendre mon déjeuner. Malheureusement j’ai du passer plus d’une heure dans les embouteillages avant d’arriver enfin chez lui. 

J’étais devant la porte et je sonnais. Un vigile est apparu ;

- Bonjour monsieur !

- Bonjour mademoiselle ! kisa ou vle ? ( Qu’est-ce-que vous voulez ?)

- J’aimerais voir madame Louis. Elle est ici ?

- Elle vous attend ? sinon ou pap ka rantre (sinon vous ne pourrez pas rentrer)

- Je viens de loin pour la voir alors s’il vous plait allez lui dire que Kara est là. 

- D’accord… (il marque une pause) désolé mais je ne fais que mon travail.

- Je comprends.

Il vient m’ouvrir une minute plus tard et me dit :

- Elle vous attend dans le salon. Veillez me suivre.

- Ne vous inquiétez pas, je connais le chemin, dis-je en souriant.

Je me dirige vers la maison et rentre pour trouver la mère de Djamal au salon entrain de mettre une petite nappe sur la petite table basse.

- Bonjour Man Louis !

- (elle se retourne et vient me prendre dans ses bras) ma chérie ! Ca fait longtemps oh !!

- Un bon moment, dis-je en la dévisageant en voyant son mine fatigué. J'ai rencontré votre mari tout à l’heure et je me suis dit que je devais passer avant de rentrer chez moi.

- C'est Dieu qui t'envoie !!!

Elle paraissait fatiguée et avait de gros cernes sous les yeux. Elle semblait vieillir de dix ans et avait perdu du poids. Je me souviens qu’elle était plus ronde et  cela me fit de la peine.

- Prends place Kara !! Tu ne vas faire comme si tu étais une étrangère voyons.

- (je souris et m’assois près d’elle sur le grand canapé) comment vous allez ?

- Comme tu peux le voir ma fille (elle marque pause et laisse échapper un soupir qui en dit long) J’essaie de ne pas me laisser aller… de rester forte pour lui. Mais (sa voix tremble un peu et ses yeux se remplissent peu à peu de larmes) mais parfois je me laisse aller et perd la foi (elle essuie rapidement ses larmes) Dis-moi, toi ça va ?

- Ça peut aller. Je travaille et les filles vont bien, dis-je faiblement.

- Kara tu m’as laissé tomber…je pensais qu’on allait rester en contact ma fille ?

- J’ai changé de numéro depuis…le jour ou j’ai laissé Port-au-Prince, murmurai-je tout en me sentant coupable.

- Je comprends ma fille. 

Un ange passa.

- Il est là ? réussis-je à demander. 

- Tu lui as parlé depuis votre (elle marque une pause) …

- On s’est vu une ou deux fois au boulot pendant ses supervisions. Cela remonte à quatre mois je dirais.

- Hmmmmm Je suis sur le point de perdre mon Djamal…notre Djamal (puis elle éclate en sanglot) 

- … (je la prends dans mes bras sans rien dire)

J’avais une boule à la gorge et ne pouvais parler. Cela me faisait beaucoup de peine de voir la mère de Djamal ainsi et là j’ai compris qu’il allait vraiment mal. Touchée par tant de tristesse, j’essayais tant bien que mal de la consoler. Dix minutes plus tard on se rendait dans la cuisine où elle comptait préparer un bouillon de féculents et de viande de cabri.   

- Il est dans sa chambre ?

- Oui mais… il n’est plus le Djamal que tu connaissais. 

Je logeais le couloir et me trouve devant la chambre de Djamal. Je respire profondément et frappe à la porte. Je n’entends rien et refrappe à nouveau.

- Il dort mais tu peux quand même rentrer, crie sa mère depuis la cuisine. 

J’ouvre la porte doucement  et rentre à pas de tortue dans la chambre pour tomber sur une vision qui me fendit le cœur. 

- Oh mon Dieu ! (par reflexe je mis une main sur ma bouche et mes yeux se remplirent de larmes)

Non là je suis entrain de faire un cauchemar. Je fais les cent pas dans la pièce et éviter de regarder Djamal sur le lit. Je m’arrête un moment puis je me tourne vers lui.  Il est méconnaissable !!! Il a perdu tous ses cheveux et est si squelettique… non ce mot est trop faible pour le décrire ; il est était un tas d’os ambulants. Il était recroquevillé sur lui-même et je pouvais voir les os de sa cage thoracique et sa colonne vertébrale. Je m’avance lentement vers le lit et m’agenouille près du lit. Il dort mais laisser échapper des plaintes comme si il souffrait. J’essuies tant bien que mal mon visage et passe une main sur le tien. Il n’avait plus de joues et les os de ses pommettes étaient assez visible chose qui me fendit le cœur. Ce n’était plus l’homme que je connaissais. Ce n’était plus ce Djamal qui débordait de vitalité et de joie.  

Je regardais la poche de sérum accroche à sa main gauche et soupire. 

- Qu’est-ce-qu’il a fait pour mériter cela Seigneur !!!   

Je ne pouvais plus retenir mes larmes devant cette vision qui me semblait tout droit sortir d’un film d’horreur. Je m’assois par terre et adosse mon dos au lit. Je plies mes jambes de façon à ce que je puisse déposer ma tête sur mes genoux et laisse couler librement mes larmes. Je n’arrivais toujours pas à croire que c’était Djamal ; l’homme que je continue à aimer malgré tout.

Je ne sais pas combien de temps je suis restée dans cette position mais c’est la voix de la mère de Djamal qui m’a fait sortir de cette état d’inconscience. Je me suis levée avec peine pour aller dans la salle de bain attenante à la chambre pour me rincer le visage. 

Je sors et vais trouver Man Louis à la cuisine pour l’aider. Elle me vit avec les yeux rouges et le visage morne mais ne dit rien et continue à préparer les féculents. Je prends un couteau et commence à éplucher les pommes de terre pour les mettre au feu. 

Dix minutes s’écoulèrent sans que personne n’ose ouvrir la bouche.

- Et Denise ? demandai-je en brisant le silence. 

- (elle me regarde étonnée) toujours à l’hôpital.

- Co…comment ça ?

- Non, tu ne sais pas qu’elle a eu un accident ?

- (moi étonnée) non !!!! Depuis que j’ai laissé Port-au-Prince on a plus été en contact. Elle a eu cet accident quand ?

- Il y a de cela deux semaines et (elle marque une pause) elle était enceinte de Djamal…

- (j’écarquille les yeux) enceinte !?

- Oui, mais elle a perdu le bébé et est en coma en ce moment. 

- Mon Dieu !!!! 

- Que des malheurs qui s’abattent sur nous ma fille. 

- Djamal le sait ? demandai-je.

- On a tout fait pour qu’il ne le sache pas mais la mère de Denise l’a mis au courant et cela l’a encore plus infecté.

- Mais elle est malade celle-là !

- Je ne te fais pas le dire !

Un ange passa.

- Il souffre de quoi ? demandai-je sans lever les yeux vers man Louis.

- C’est là se complique la chose. On a consulté plusieurs médecins et chacun nous a donné des pronostiques différentes. 

- … vous n’avez pas pensé à aller ailleurs ?

- Bien sur que oui ! on aurait du être aux Etats-Unis depuis le mois dernier mais Djamal voulait que sa « Denise » nous accompagne alors que celle-ci n’avait même pas de passeport, n’en parlons même pas de visa !!! maintenant qu’elle est dans le coma, il ne veut plus se déplacer.

- Mais quelle histoire !!! on doit agir sinon…

- Quand on se voit impuissant face une telle situation c’est…(elle marque une pause)  

- S’il faut  qu’il parte ligoter vous devez le faire.

- Hmmmmm. Oui… ou va devoir passer à une autre phase. Parce que je te dis ma fille cette maladie n’est pas simple… franchement !

- Mais qu’est-ce-que gagnera quelqu’un à vouloir faire souffrir un homme comme Djamal !??

- Qu’est-ce-que j’en sais ?

- (je lui touche l’épaule) On doit garder la foi Man Louis. Dieu peut tout ! 

J’ai passé environ deux heures à aider man Louis avec quelque tache ménagère. La vielle semblait dépasser par les évènements et cela me faisait tellement mal. Il était déjà seize heures et je devais rentrer malgré moi. Je faisais la vaisselle et rangeais les couverts quand Man Louis est venu me trouver avec le visage défait.

- Il est réveillé ? demandai-je en passant une chiffon sur la table.

- Oui...(elle marque une pause) Il ne veut voir personne.

Je ne sais pas où j’ai puisé la force de rester debout en entendant que Djamal ne voulait pas me parler. D’un côté je le comprends, il ne veut peut être pas que je le vois ainsi. Je soupire et prends tout sur moi. 

- Man Louis je crois que je vais vous laisser…

- Ma chérie, tu ne pourrais pas passer la nuit avec nous ?

- J’aurai bien aimé mais j’ai les filles et…

- Je comprends ma fille. Mais tu vas me donner ton numéro hein !

- Je le ferai (je souris)

- Si tu savais comme j’aimerais que tu reviennes vivre ici ! 

- (je baisse la tête un peu gênée)

- Prie pour nous Kara. 

- Je n’ai jamais cessé de le faire. 

- Mercie ma fille ! (elle me prend dans ses bras) Je me demande comment mon fils a pu se passer de toi !

- … 

Je lui donne mon numéro et l’embrasse une dernière fois. J’aurais bien aimé revoir Djamal une dernière fois mais je voulais respecter sa décision à ne pas me parler. C’est la mort dans l’âme que je suis rentrée chez moi. Non… il fallait faire quelque chose ! Dieu n’abandonne jamais ces enfants. 


*** 

Une semaine s’écoula depuis ma dernière visite chez Djamal. Chaque soir je dormais mal, hantée par l’image de Djamal dans cette chambre et à chaque fois je priais pour lui. Là maintenant j’étais à genoux devant mon lit, entrain de lire des psaumes avant de faire ma prière nocturne. Je ne pouvais accepter que Djamal part et le pire dans cet état. Je sais qu’il n’était pas un saint mais je voudrais que Dieu opère un miracle dans vie.

 Je passai une heure à prier quand je me suis laissée aller par un léger sommeil dans lequel j’ai vu j’ai fait un rêve étrange. J’ai vu Djamal enchaîné son lit et souffrait le martyre. Je sursaute et décide de redoubler de prière. Oui, je viens d’avoir la réponse que je voulais ; mon combat pour le moment n’est d’ordre spirituel et ne fait que commencer. 

                                  

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