CHAPITRE XIII
Write by Samensa
SAFI
Ma tante prend la parole en
parlant bien fort pour que tout le monde puisse l’entendre.
-Maitre Karim Cissé, je viens la
déposer chez toi ! Tu l’as mise enceinte, tu vas t’en occuper !
Je dois surement avoir mal
entendu. Mes oreilles me jouent des tours. Je faufile parmi les invités pour
être plus proche d’elles. Non, j’ai mal entendu. Ça ne peut être que ça.
-Mais que diantre faites-vous
ici ? demande Karim.
-Je suis venue déposer ma fille
chez toi. Tu l’as mise enceinte alors tu dois t’en occuper. Réponds ma tante.
Je n’admettrai pas que tu ne prennes pas tes responsabilités. Alors, je prends
tout le monde à témoin, ici, aujourd’hui.
Je me tourne vers Karim qui évite
de me regarder. Il a les traits crispés et quelques gouttes de sueurs perlent
sur son visage. Mon cœur se met à battre de manière anormale lorsque je me
rends compte que jusque-là, il n’a rien nié.
Victoire se met à crier comme une
folle.
-Quoi ? Karim, tu as mis
cette fille enceinte ? Moi qui croyais que tu te tapais la métisse !
Ou bien tu te tapes les deux pétasses ?
-Je ne vous permets pas de me
traiter de pétasse ! crie Maya.
-Oh toi tu la fermes ! Pute
va !
-Non mais… pute toi-même !
On ne se connait pas donc ne m’énerve pas !
-Mais c’est qui elle
d’ailleurs ? demande ma tante.
-La vieille sorcière, on ne t’a
rien demandé.
Au milieu de ces cris, je me
contente d’observer Karim. J’ai besoin qu’il dise un mot pour arrêter tout cela
mais il ne fait rien. Pourquoi il ne fait rien ? Mon Dieu, faites qu’il
dise quelque chose. La voix du père de Karim tonne.
-Ça suffit !
Tout le monde se tait et se
tourne vers lui.
-A tous les invités, mes excuses.
Vous ne savez pas à quel point j’ai honte de vous mettre face à cette
situation. S’il vous plait, veuillez continuer la fête et faire abstraction de
cette fâcheuse situation…. Et vous ?
Il nous pointe tout à tour du
doigt : Karim, Maya, ma tante, Victoire, moi.
-Suivez-moi !
Nous suivons M. Cissé accompagné
de sa femme jusqu’à la pièce qui sert de bureau à Karim. Nous trouvons chacun
une place où s’assoir et il prend la parole.
-Mademoiselle ? S’adresse-t-il
à Maya. Avez-vous une relation avec mon fils ?
-En quelque sorte oui.
-Je ne vous comprends pas. Merci
de nous expliquer tout cela clairement.
Maya explique tout ce qui s’est
passé avec Karim. A la fin de son récit, je suis anéantie. Victoire bondit de
son siège et attrape les cols de la chemise de Karim.
-Tu as osé me faire ça ? Tu
as osé Karim ? dit-elle en pleurs.
Maman Djenebou arrive à faire
lâcher prise à Victoire qui continue de pleurer. Karim lui reste assis et ne
dit mot.
-Karim, qu’as-tu à répondre face
à ce qu’elle dit ? Es-tu le père de cet enfant ?
Je retiens mon souffle.
-Il se pourrait papa.
-Il se pourrait ? Fils, je
n’ai pas élevé un irresponsable donc réponds moi correctement. Tout ce qu’elle
raconte, est-ce la vérité ?
-Oui papa.
Je sens une force me quitter le
corps alors que je m’affaisse dans mon siège.
-Alors, l’affaire est close. Tu
as mis cette fille enceinte, tu assumes.
Ma tante et sa fille jubilent. Je
me lève et vais me poster devant Karim.
-Karim, c’est ma cousine. Comment
tu as pu faire ça ? Je lui demande doucement.
Il lève les yeux vers moi et
essaie de ma tenir les mains sans succès puisque je ne le laisse pas faire.
-Je suis désolé.
-Moi aussi.
Je me dirige vers la sortie
lorsque j’entends Maya pouffer de rire. Je fais volteface et la surprend en
train de me toiser. La distance entre nous, je la parcours en quelque seconde
et lui assène une gifle qu’elle n’oubliera pas de sitôt. Ma tante essaie de lever la main sur moi mais
je l’attrape au vol. Les deux sont tellement surprises qu’elles restent la
bouche ouverte.
-Si tu n’étais pas enceinte Maya,
je t’aurai tué.
Je sors de la pièce en claquant
la porte, faisant fi des commentaires de tous ceux qui sont à l’intérieur.
Je traverse le salon sous les
regards et les murmures des invités. Mike essaie de me retenir mais je lui fais
comprendre gentiment que j’ai besoin d’être seule.
Sur la plage, je marche en laissant mon esprit erré dans des scénarios de toutes sortes.
MAYA
Couchée dans le lit de la chambre
qui m’a été attribuée, je savoure ma petite victoire. Cet enfant que je porte
est mon jackpot, mon passe partout. Grâce à lui, j’aurai le beau millionnaire.
Ça va être certes un peu compliqué car j’ai pu constater qu’il est un homme à
femmes. Même ma cousine y est passée. C’est évident qu’ils sortent ensemble
mais ce n’est pas un problème. Et cette petite peste me paiera chère la gifle
qu’elle a osé me donner.
Je n’entends plus de bruits en
bas. La fête est surement terminée. Je dois avouer que cette fête a été une
aubaine pour moi. Quand Safi m’a envoyé l’invitation, j’ai préparé mon coup
minutieusement. Grâce à elle, toutes les connaissances de Karim savent qui je
suis et qu’il est sérieusement occupé maintenant. Ma mère, couchée près de moi,
m’a aussi été d’une grande aide. De toute façon, dès qu’elle entend le mot
« argent », elle est prête à tout. Cependant, je n’ai pas envie de
l’avoir dans les pattes. Demain, je la fais retourner à Abidjan.
Je caresse mon ventre en pensant
à tout ce que ce bébé va m’apporter.
KARIM
-Ali, tu ne l’as toujours pas
vu ?... ok.
Je raccroche le téléphone. C’est
la quatrième fois que je demande après Safi. Il est 3 heures du matin et
personne ne l’a vu. Je ne peux demander à ma mère encore moins à Bintou car
elles me boudent. Je les comprends ; je suis un idiot.
Je me remémore cette soirée qui a
viré au cauchemar en moins de 5 minutes. De la honte devant mes amis jusqu’à la
colère de Safi en passant par les reproches de ma famille, j’ai été servi.
J’aimerais pouvoir dire que cet
enfant n’est pas le mien mais je ne peux pas car je ne sais pas ce qui s’est
réellement passé cette nuit. Toujours est-il que je me suis réveillé nu dans
son lit. Toute cette histoire me fatigue.
Des pas dans les escaliers
attirent mon attention. Je m’y dirige et vois Safi en train de les monter. Je
la suis jusque dans sa chambre et ferme la porte après être entré derrière
elle. Son air calme me bouleverse. Assise sur son lit, elle se contente de me
regarder. Je vais m’agenouiller jusqu’à elle et pose la tête sur ses genoux.
-Princesse je suis désolé.
Pardonne-moi.
Comme elle ne répond pas, je
continue.
-Elle m’a piégé. Je
t’assure ! Elle…
-Karim non ! Ne trouve pas
d’excuses à tes erreurs ! Assume-les bon sang ! Un enfant ne se fait
pas par accident… vous allez avoir un enfant ensemble. Moi je ne peux pas me
battre contre cela. J’ai vécu sans mes parents alors je sais ce que c’est. On
ne peut plus continuer cette relation.
-Quoi ? Safi qu’est-ce que
tu racontes ?
-C’est fini entre nous Karim.
Je ne saurais dire comment, ni à
quel moment mes larmes ont afflué, mais elles se sont mises à couler. Je
n’imagine pas ma vie sans elle.
-Non, non tu ne peux pas me faire
ça Safi.
Des larmes me tombent sur la
tête, les siennes.
-Je ne peux pas rester avec toi
en sachant ce que tu as fait avec ma cousine.
-Mais ça n’a aucune
importance ! Et puis c’était bien avant que nous soyons ensemble !
-Mais tu m’as caché tout
cela !
-Bébé… fais-moi tout ce que tu
veux ! Frappe-moi ! Mais je t’en prie, ne me quitte pas. Je n’en
survivrai pas.
-Je ne peux pas.
Je lui prends le visage dans les
mains.
-Mon amour, je t’aime.
-Karim, c’est la première fois
que tu me le dis. Dit-elle en sanglotant. Mais, ça ne change rien, c’est fini
entre nous.
Oui, c’est la première fois que
je le dis parce que je me rends compte aujourd’hui que je suis amoureux d’elle,
follement amoureux. Je l’ai dans la peau, jusque dans mon âme.
-Oui bébé, je t’aime. Laisse-moi
le temps de te le dire encore et encore, je t’en supplie !
Elle se lève, me repousse et va
ouvrir la porte.
-Va-t’en ! S’il te plait. Si
tu m’aimes comme tu le dis si bien alors laisse-moi tranquille.
Elle reste ferme sur sa position
jusqu’à ce que je sorte de sa chambre.
SAFI
Ma mine est à effrayer un fantôme
tellement j’ai mal dormi. Je descends à la cuisine me faire un café pour avoir
le regain d’énergie dont j’ai besoin.
Les traitresses y sont attablées.
Il n’y a pas pire pour mal démarrer la journée. Lorsqu’elles m’aperçoivent,
elles démarrent une conversation dans le seul but de m’enrager.
- Vraiment ce n’est pas facile
d’être une femme trompée ! déclare Maya.
-Je te le dis ma fille. Réponds
sa mère en riant.
-Et le pire c’est lorsque ton
homme fait un enfant dehors. Ça prouve que tu n’as aucune importance.
-Ce n’est rien ça ! Imagine
quand tout le pays le sait !
Les deux éclatent de rire en se
tapant dans les mains. Puis Maya reprend la parole.
-Ce qui me fait encore plus mal,
c’est lorsque ce genre de femmes trompées n’ont aucune dignité et reste
toujours avec l’homme ! Franchement ça m’écœure.
Je mentirai si je disais que
leurs paroles ne m’atteignent pas. Cependant, je sais où elles veulent en
venir, m’amenant ainsi à reconsidérer ma position : est-ce que je dois
quitter Karim, leur faisant plaisir ou rester avec lui juste pour les
embêter ?