CHAPITRE XV

Write by Bicht

Le soir venu, devant la télé, et mon plat d’igname bouillie accompagné d’omelettes (ouhm comme ça m’avait manqué ce genre de connerie), je regardais le mail envoyé par la secrétaire de Lapine. Bon le séminaire se fait au Zanzibar. Ok. Il y aura sûrement de belles plages avec l’eau à perte de vue, et de la nourriture locale. Voyage et découverte assurés. Je continuais mon exploration quand quelqu’un se mit à sonner avec insistance à la porte.

-          Qui est ce ??

-          C’est moi Madame. C’est Issa. L’autre Madame, il souffre, on dirait il couche*.

-          Et puis moi où est mon affaire dedans ??

-          Ahhh Madame, missiè* il n’est pas là

-          Issa, je n’aime pas ça. Je suis en train de travailler, tu viens me fatiguer avec une affaire qui ne me concerne pas. Elle ne peut pas prendre un taxi ??

-          Eeeeh, madame, il se fait tard ; votre quartier de boss là, y a pas cien* dehors. Je trouve le taxi par quelle magie ???

-          Je m’en fous, débrouillez-vous.

-          Eeeeh, madame, tu conduis, pardon viens la prendre pour l’emmener à l’hôpital.

-          Issa, demain, je me lève tôt. Tu sais très bien à quelle heure je quitte la maison. JE suis fatiguée, alors, JE vais dormir, pour être en forme demain. Qu’elle se débrouille ; elle s’est arrangée pour tomber enceinte de MON mari sans mon aide. Qu’elle accouche sans moi.

-          Pardon Madame pour le dérangement.

Je me retournai au salon, bien énervée. Elle va accoucher, vas appeler sa belle-mère ou sa mère ; c’est moi, tu viens emmerder. J’appelai Ketsia.

-          On dit quoi la go ??

-          Je suis bien énervée si tu savais.

-          Y a quoi ??

-          Ce n’est pas l’autre femme là. Elle est sur le point d’accoucher, et c’est moi qu’Issa a vu pour demander de l’accompagner à l’hôpital. Tu vois les choses ??

-          Tu n’es pas sérieuse ??

-          Toi-même tu es choquée non ??

-          Je suis plus choquée par ton comportement.

-          Ayiiii

-          Oui, crie bien. Cet enfant qui vient au monde a quoi à voir dans vos histoires de couple ?? Il vient déjà dans un monde pourri, ne veux-tu pas permettre que sa venue se fasse dans de meilleures conditions ??

-          K

-          Non, écoute moi. C’est facile à dire quand on ne se retrouve pas dans la même situation. Mais je t’en prie, fais-le pour le Seigneur. Le carburant que tu vas gaspiller je te le rembourse ; mais ne laisse pas cette femme en travail seule comme ça ; son mari n’est pas là. Et si sa mère n’est pas là, c’est qu’il y a une raison. Va l’accompagner, s’il te plaît.

-          Ouuuhm, mais je n’ai pas envie.

-          Depuis quand es-tu devenue si mauvaise ??

-          Ayiiiii ??

-          Ayyyyiiii quoi ?? Tu es méchante. Si tu étais à sa place, n’aurais tu pas voulu que quelqu’un te secoure ?? Ou te facilite la tâche ??

-          La fille m’a volé mon mari Kaykay

-          Ne t’en prends pas à elle ; c’est ton Ahmed là le fautif. Va accompagner la fille. Après si tu veux, tu lui fais la peau à TON Ahmed.

-          Ouhmmm je le fais vraiment à contre cœur, je ne sais même pas pourquoi je t’écoute.

-          Oui, Dieu te le rendra t’inquiète.

 

 Elle était sur le pas de sa porte, à souffrir comme jamais. Finalement, cet accompagnement allait être plus jouissif que je le pensais. Sa fille de ménage lui tenait une main, tandis qu’Issa avait l’autre. Elle avait les larmes plein les yeux, et s’empêchait de crier. Le spectacle était plus que réjouissant ; aucune compassion ne vint faire coucou à mon petit cœur. L’accompagner, je ne l’aurais jamais fait si Ketsia ne me l’avais pas chaudement demandé. Cette pimbêche, s’est permise de s’immiscer entre Ahmed et moi. Et aujourd’hui, elle lui donnait ce que je n’arrivais pas à lui offrir depuis bientôt 5 ans, en seulement quelques moi de mariage, même si en mon fort intérieur, je suis parfaitement consciente que les galipettes ont commencé bien assez tôt. Comment ne pas ressentir une pointe de jalousie, quand je sais que tout ce qu’elle vit actuellement, je l’ai toujours voulu ??C’est comme si, elle me balance à la figure mon échec. Et je devrais le supporter, juste parce qu’elle en travail ?? Non, pour ce petit être innocent qui ne demande qu’à sortir, et voir les ténèbres qui jalonnent notre monde. Pour lui, je supporterai sa mère. Quoique, non. Cela ne sera pas un supplice ; je me délecterai de chacune de ces expressions faciales de douleur.

 

J’ai déverrouillé les portières :

-          Montez, je vous dépose à l’hôpital.

Elle a écarquillé les yeux avant de vouloir refuser quand elle fut secouée par une contraction. Elle ne criait pas…. Par contre Issa et la fille ont hurlé. C’était drôle tout ça.

-          Montez je vous dis.

-          Ok.

Ils l’ont installée comme ils pouvaient. Sur le chemin, elle n’arrêtait pas de gémir fortement. Je ne ressentais toujours rien qui ne ressemblait à de la compassion. On arriva rapidement à la Polyclinique de l’Indénié*, et elle fut vite prise en charge par les infirmières. Apparemment, tout était réglé, ils attendaient tous le moment de la délivrance. La jeune fille et moi étions dans les couloirs de l’hôpital ensemble. Elle priait, moi je me plaignais de mon sort à Dieu. Tous les jours il y a des femmes qui accouchent. Est-ce que moi je mérite moins qu’elles d’avoir des enfants ?? « vous n’êtes pas stérile Madame, armez-vous juste de patience » me répétait sans cesse mon médecin traitant à chaque fois que j’allais me plaindre auprès de lui, quand, après des jours et des jours, à me faire prendre sans en avoir envie, à rester les jambes en l’air malgré la fatigue après l’amour, à me piquer encore et encore les hanches, tout ça pour maximiser mes chances de concevoir, et que mes règles accouraient comme si elle n’avaient que cette hâte ces pestes ; sortir et me narguer, me dire que mon corps n’est pas fait pour ça ; je ne suis pas stérile, alors pourquoi pas une seule fois, je n’ai eu ne serait-ce qu’un retard ?? PAS UNE SEULE FOIS BORDEL ?? J’allais craquer d’un moment à l’autre, quand une infirmière en blouse accourra et me dit :

-          Votre sœur vous réclame.

-          Pardon ?? Je n’ai pas de sœur ici

-          Mais si, la dame que vous avez emmenée tout à l’heure. Elle a peur et refuse de pousser. Vous devriez venir et la rassurer.

-          Mais je vous dis qu’il ne s’agit pas de….

-          Allez on y va. Le bébé est déjà en route. Si on ne se dépêche pas, il pourrait mourir asphyxier.

Elle m’entraîna de force avec elle. Elle me força à porter une blouse, des gants et un masque, tout cela, malgré mes récriminations, et me poussa dans la salle. Dès que j’entrai, je la vis, les yeux pleins de larmes et qui criait son mal être à qui voulait l’entendre ; elle pleurait sa mère qui était absente. Je ne voulais pas me retrouver ici ; ça puait tellement l’alcool, le sang ; mes frustrations remontèrent. L’infirmière me poussa vers elle, j’étais comme pétrifiée. Tout ce sang me répugnait. J’avais la nausée

-          Placez vous de ce côté. Vous ne verrez rien. Encouragez la svp. Sinon nous allons le perdre.

Ah en plus, c’est un garçon.

-          Mais madame, tenez-lui la main. Dites-lui quelque chose. On attend depuis trop longtemps.

-          Bon écoute moi, lui dis en lui prenant la main. Un enfant c’est un cadeau. Tu ne peux pas mettre ainsi sa vie en danger. Ne veux-tu pas le voir ?? Voir s’il te ressemble ou s’il a pris la vilaine tête d’obus de son père ?? Elle me sourit à travers ces larmes. Bon dans ce cas détends toi. Tu voudrais l’appeler comment ??

-          Ismaël.

-          Oh, c’est très beau. Dans ce cas, tu vas prendre ton courage à deux mains, et dépasser cette douleur qui te terrasse, et poussez de toute tes forces, car, l’adage dit que lorsque tu vois la petite bouille sucrée de ton bébé, toute douleur ressentie, même celle d’avant l’accouchement te quitte pour laisser place à un bonheur sans nom. Comment t’appelle-tu ??

ANELIA