Donan et Dodji venaient de raccompagner Maître Dossou  et s’affalèrent tous  deux sur le grand canapé du salon dès leur entrée. Cette discussion avec l’avocate les avait démoralisés encore plus. Aucune issue ne semblait s’offrir à eux. Ils dépendaient purement et simplement du bon vouloir de Karl. Et dans ce cas, ils savaient que l’issue ne serait en aucun cas favorable pour eux. Ils semblaient tous deux dépités, cependant à des degrés divers.

Dodji ne montrait pas trop son désespoir mais il était le plus désespéré des deux. Être dans une telle situation de crise alors qu’il n’en avait plus pour longtemps le démoralisait  terriblement. A quoi bon avoir travaillé dur, réussir à faire prospérer son entreprise, si au moment de quitter cette vie on laissait sa famille dans le dénuement. Il ne s’en faisait plus  pour lui-même. Sa situation, il était arrivé à l’accepter avec philosophie, surtout depuis qu’il avait su l’histoire de Karl et de sa mère. Cette dernière était morte d’une tumeur cérébrale, et il en mourrait lui aussi. Il ne pouvait s’empêcher de se dire que c’était la juste punition de la vie pour ce que ses parents avaient fait à cette dernière. Il ne pouvait pas non plus en vouloir à Karl de vouloir se venger. Mais il ne digérait pas le fait qu’il soit vraiment entrain de tout perdre du jour au lendemain et que sa petite famille allait devoir en payer les frais puisqu’il ne serait plus présent.

Il jeta un coup d’œil à Donan qui semblait aussi perdue dans ses pensées. « La pauvre, pensa ‘il, elle n’avait pas eu beaucoup de chance avec lui. Il ne lui avait apporté que des problèmes et des tourments. Non ! Il ne pouvait décemment par partir le cœur tranquille en la laissant, ses filles et elle dans cette situation catastrophique, pensa-t’il.  Mais que faire ? Comment convaincre Karl, puisque le dernier mot lui revient et qu’ils sont à sa merci ? Devrait ‘il le supplier ? Le prendre par les sentiments en lui parlant de sa maladie ?

Serait ‘il sensible à sa situation ? Tant de questions qu’il se posait dans son coin.

Donan quant à elle n’en était pas moins perturbée. Devoir tout perdre comme ça du jour au lendemain ? Elle n’en revenait pas. Comment un seul homme pouvait avoir autant de pouvoir et détruire plusieurs vies en un seul claquement de doigt ? Elle comprenait Karl au début, mais là, il allait trop loin. Son mari n’était pas coupable dans cette histoire et ses filles et elle encore moins. Comment Karl ne pouvait ‘il comprendre cela ? Elle  était là assise dans ce fauteuil, apparemment calme, mais elle bouillait à l’intérieur ; tellement révoltée par ce que Karl  leur faisait subir. Il ne pouvait tout de même pas être si tant aveuglé par sa vengeance au point de commettre pareil injustice ? Il fallait qu’elle le voie ! Elle devait lui parler ! Il devait entendre raison, et elle était la seule à pouvoir  le convaincre, puisqu’elle était un élément neutre dans cette histoire. Karl ne lui en voulait pas, au contraire, il avait dit l’aimer et cela devait pencher dans la balance. Elle  devait trouver un moyen de le joindre. Se souvenant qu’il avait fourni un dossier au moment de son recrutement, elle se leva de suite et dit à Dodji qu’elle devait  aller bureau.

-Mais pour quoi faire ? On est en week-end, lui demanda Dodji perplexe.

-J’ai des choses à régler.

-Quelles choses ?

-Des documents importants que je devais signer.  J’avais oublié, je viens de m’en souvenir.

Dodji semblait perplexe mais n’insista pas.

Donan s’en voulu de ne pas lui faire part de ses intentions, mais elle était convaincue que s’il s’en mêlait toute tentative de pourparler avec Karl échouerait. Karl lui en voulait et pire était amoureux d’elle donc le voyait comme un rivale. Non, elle devait mettre toutes les chances de leurs côtés vu la gravité de la situation se dit ‘elle en démarrant sa voiture.

Elle ne tarda pas à arriver au bureau et fit sortir le dossier de Karl de l’un des tiroirs.

Elle  fût déçue de ne trouver aucun autre numéro à part ce qu’elle avait. Mais  trouva quand même une adresse mail. Elle se connecta et lui écrivit de suite un mail :

Bonjour Karl,

IL faut qu’on parle, c’est urgent !!!!!!

Donan

 

Elle alla s’installer sur le canapé, pour lire quelques courriers en attente. Quelques minutes plus tard, son téléphone sonna. Ne connaissant pas le numéro, elle répondit d’une voix hésitante.

-A..llo ?

-Bonjour madame, je suis  un assistant de Mr Mensah. Il vous donne rendez-vous dans une heure chez lui. Je vous envoie l’adresse par SMS.

Etonnée Donan mit quelques secondes de plus qu’il n’en faut avant de pouvoir répondre. Apparemment Karl avait déjà lu son mail. La voix à l’autre bout du fil la ramena à la réalité.

-Allo Madame, vous êtes toujours là ?

-Oui, oui, bafouilla t’elle. C’est d’accord.  

Ce dernier raccrocha après un dernier ok et Donan reçu le SMS à peine une minute plus tard.

L’adresse indiquée semblait être à l’écart du centre ville. Elle calcula qu’il lui faudrait une quarantaine de minutes en voiture pour y aller.

Elle était tout de même perplexe et se posait pleins de questions : Pourquoi n’avait ‘il pas appelé lui-même ? Pourquoi  lui avoir donné rendez-vous chez lui ? Était ‘il toujours à Amazonia pendant tout ce temps où ils n’avaient pas eu de ses nouvelles ? Certes personnellement, elle n’avait encore jamais essayé de le contacter depuis leur dernière rencontre. Mais Dodji avait essayé de le faire sans succès. Se souvenant que le rendez-vous était dans une heure, elle se leva prestement. Elle se rendit compte que sa tenue était un peu négligée, puisqu’elle n’avait pas prévu ce rendez-vous en sortant. N’ayant plus le temps de se changer, elle haussa les épaules,  prit son sac et sortit.

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