Dans le noir...

Write by Solène D'Almeida

Vu son état, j’arrive à la convaincre de me laisser la conduire.

Dix minutes plus tard, après une toilette sommaire, nous partons “fouiller” la ville à la recherche de sa “star de frère”...

Elle habite au Haut de gué-gué et m’explique que son frère vit à la Sablière, je décide donc d’aller d’abord de ce côté là.

En dix minutes, nous sommes sur la grande voie du quartier présidentiel! Et alors que nous venons de dépasser le Beach Club (lieu de loisir), elle pousse un cri et me demande de m’arrêter, à peine je réussis à trouver une place plus ou moins sécure qu’elle sort et du rétroviseur je la vois rejoindre quelqu’un qui est assis au bord de la route.

Je ne l’avais même pas vu. Après quelques échanges, je la vois qui aide le gars à se lever, puis l’aide à marcher. Quoi, il est saoul?

Ils arrivent à mon niveau, elle l’aide à monter, puis s’installe à son tour.

Bêh dis donc, bravo la politesse le grand frère…


-Ethan?


-...


-C’est Mélinda qui conduit.


-Wooh. Désolé Mélinda, bonjour


-Heu, bonjour.


-Mélinda, je te présente Ethan, mon grand frère.


-Enchantée.


-...


Ook… Belle ambiance.


Moins de 5 min après, nous pénétrons dans la résidence du “salopiaud” comme je l’ai surnommé in petto…

A peine ai-je garé que, intriguée, je vois Alice se précipiter pour aider son frère à descendre.

Je n’y comprends rien. Il m’a pourtant l’air lucide, je n’ai relevé aucune odeur d’alcool ou autre substance illicite. Ses lunettes de soleil m’empêchent de voir l’expression de son regard, pourtant il a l’air de se tenir bien droit. Alors pourquoi cet empressement?


Ils avancent lentement vers la maison, je les suis, elle l’aide à s’installer sur la terrasse où il y a un charmant salon en rotin, et s’excuse auprès de moi en me faisant signe d’y prendre place.


Dans les secondes qui suivent, je l’entends qui pètent un câble à l’intérieur.


Je l’entends qui crie, manifestement sur la fameuse Clotilde et il est question de son inconscience, des diplômes qu’elle ne mériterait pas… Bref, Alice est dans tous ses états et je ne comprends toujours pas pourquoi.


Et son frère qui reste là, assis comme un enfant puni, lunettes de soleil toujours visser sur le nez.


Plus je le lorgne et moins je retrouve en lui le trader prodigue de la City*

Après quelques hésitations, je me lance:


  • Vous allez bien? Fais-je d’une voix mal assurée.

  • Ethan? Dis-je à voix plus haute.


Il sursaute et fronce les sourcils et demande:


  • Qui est là?


J’ai à peine le temps de m’interroger sur l’incongruité de sa question que je vois une femme débouler de l’intérieur une valise à la main avec un air courroucé, Alice sur ses talons.


  • Espèce de malade va! Lui crie Alice


  • Que se passe-t-il? Interroge Ethan.


  • Je viens de virer cette folle.


  • Tu ne crois pas que tu exagères un peu?


  • Exagérer Ethan? Exagérer? Et s'il t’était arrivé quelque chose?


Je suis de plus en plus perplexe, surtout que je la vois fondre en larmes.

C’est à ce moment que je reçois un coup de poignard en voyant Ethan tâtonner dans l’air, visiblement à la recherche d’Alice. Je réalise qu’il n’y voit rien.

Je me souviens en même temps qu’un an plus tôt, Alice a du partir du jour au lendemain pour le Royaume-Uni car son frère avait eu un accident grave.

Elle a été absente longtemps mais elle était tellement perturbée qu’elle ne m’a jamais vraiment explicitée ce qu’il avait eu.

Je suis abasourdie. Ça doit être un grand drame pour eux.

Il est son seul parent direct vivant. Leurs parents sont décédés il y a 12 ans dans un crash d’avion.

Je ne sais plus trop quoi faire ou dire, alors j’essaie de me faire toute petite dans mon fauteuil.

Après quelques minutes d’intense émotion, Alice se reprend et propose que nous allions au frais à l’intérieur, ce que nous faisons. Je me sens vraiment conne pour mes pensées négatives de tout à l’heure, je n’ai pas un instant pensé qu’il ne me voyait tout simplement pas.


Déjà qu’être aveugle est un grand handicap, je n’ose imaginer le calvaire pour quelqu’un qui avait la vue pendant une bonne trentaine d’années et la perd…


Je ne suis pas à l’aise de rester en présence de Nathan alors je me propose d’aider Alice en cuisine car nous avons tous un creu.


Elle installe confortablement son frère dans le salon, mets de la musique classique, à sa demande, puis après lui avoir servi un jus d’orange, nous allons en cuisine.


Je me lance dans la préparation de pancakes pendant qu’elle fait une omelette géantes avec bacon, fromage, tomates…

Ni tenant plus, je lui demande:


  • Pourquoi tu ne me l’as jamais dis?


C’est d’abord un pesant silence qui me répond, puis, elle finit par parler:


  • J’ai du mal à l’accepter Mel, j’ai du mal admettre que mon héros soit si diminué. Tu sais, il est mon tout, sans lui, je ne serais pas debout aujourd'hui. Il a pris les coups pour nous deux au moment de la tempête, quand la famille de mon père a tenté de tout nous arracher et nous foutre dehors, du haut de ses dix-huit ans, il s’est imposé et à sauver tout ce qu’il a pu. Sans lui, je n’aurais peut-être pas pu suivre des études supérieures, je n’aurais même peut-être pas finie le collège…


  • Je comprends.


  • Merci.


Nous retombons dans le silence mais cette fois si, il n'est pas chargé de gène, juste ce besoin d'assimiler tout ce qui vient de se passer.


Après avoir partagé ce délicieux petit-déjeuner, je les ai laissés afin d'aller récupérer des affaires pour Alice qui se voit obligée de s'installer un temps chez son frère vu que chez elle rien n'est adapté pour lui.


Ça me prend une bonne heure avant de revenir lui remettre ses affaires puis je rentre finalement chez moi. Bien-sûr la maison est toujours aussi vide. Aucune trace d'un quelconque passage de Diel.


Je suis épuisée du coup. Bien heureusement, nous sommes samedi, alors je vais m’allonger dans notre chambre mais au bout de 5 min le parfum de Diel me chatouille les narines, alors je me réfugie dans la deuxième chambre.


En fin de journée, alors que je suis en train de me faire à manger, je reçois un coup de fil, elle me convie à manger avec eux le lendemain.

Malgré ma réticence, elle me donne rdv à 13h.


Contre toute attente, j'ai passé un plaisant moment avec le frère et la sœur. J'étais nettement plus à l'aise, certainement le fait de savoir que finalement ce n'était pas contre moi son attitude…


Je me suis spontanément occupée de lui, c'était presque naturel.


Je suppose que c'est ce qui a encouragé Alice a me faire cette requête:


Prendre soin de son frère le temps qu'elle honore une de nos prestations sur Malabo.


Après réflexion, je réalise qu'en réalité, elle me ménage en prenant le prétexte de mon “entente” avec son frère, car je suis certes très douée pour les évaluations psychologiques, pour amener les gens à en dire plus qu’ils n’en souhaiteraient mais le vrai coach c’est elle, alors de nous deux, c’est elle qui doit impérativement être sur le terrain.


Je décide donc d’accéder à sa requête. Son frère à beau encore un peu me stresser, il faut que je prenne sur moi, pour ces deux semaines. Ce n’est tout de même pas la mer à boire…

Tout ce qui brille n...