Episode 33
Write by Annabelle Sara
#KIKI_DU_237
#EP17_S02
Nous étions dans la voiture, Jules et moi, il me parlait de son partenaire, il ne tarissait pas d’éloge sur lui. Comment il avait réussi, comment il était honnête, intègre, travailleur surtout il soutenait ceux de la jeune génération comme lui.
Je l’écoutais et j’avais mal ! Mal pour lui parce que ce qu’il allait découvrir sur ce « mentor » allait le faire redescendre de son nuage et surtout regretter d’avoir cru en lui.
J’avais observé les deux hommes tout à l’heure, il y avait définitivement un truc entre eux ! Jules était en admiration devant lui, j’ai aussi remarqué que son partenaire évitait soigneusement de croiser mon regard, je faisais de mon coté comme si je ne savais pas qui il est. J’espère juste que mon jeu d’actrice est au point, sinon les choses risques d’escalader avant que je n’ai eu le temps de trouver la bonne stratégie pour faire tourner la table sur lui.
Jules : Tu ne m’écoutes pas ! Qu’est ce qui t’arrive ?
Il me regardait avec des yeux inquiets.
Moi : Si, si juste que je suis un peu fatiguée…
Jules : Il y a du nouveau dans l’enquête de ton ami ?
Moi : Il y a plutôt du nouveau dans ma vie ! On va jusqu’à la maison avant d’en parler ?
Jules : Ok ! Ça m’a l’air important…
Nous avons échangé un regard, pendant que moi je lui forçais un sourire lui restait préoccupé par mon attitude inhabituelle.
Nous sommes arrivés chez moi, et je me suis dépêchée d’aller dans la salle de bain pour me mettre à l’aise et surtout pour me démaquiller, tout en réfléchissant à la façon dont j’allais entamer le sujet crucial dont je devais parler avec Jules ce soir.
Ce sujet allait déterminer la suite de notre relation. En sortant de la salle de bain, je l’ai trouvé assis dans le canapé en train d’inspecter ses messages dans son téléphone. Il avait une mine fermée, comme s’il sentait que ce dont je voulais lui parler allait changer beaucoup de chose.
Moi : Ça va ? Tu n’as besoin de rien ?
Je me suis installée à ses côtés, il a pris quelques secondes pour se débarrasser de son téléphone et se tourna vivement vers moi.
Jules : Tu veux me dire ce qui ne va pas ?
Moi : Droit au but ? D’accord !
J’ai pris un moment pour respirer.
Moi : J’ai été remerciée par ma boite !
Jules : Pardon ? Comment ça remerciée ?
Moi : Un client s’est plaint de moi et Tony a fait un rapport accablant qui est remonté à la direction et ils m’ont annoncé que ma promotion était annulée !
Il semblait réellement étonné par cette nouvelle.
Jules : Mais attends je ne comprends pas, tu viens de leur faire signer un contrat d’une valeur de plusieurs dizaines de millions de Francs et ils te renvoient à cause d’une plainte d’un client mineur ? Je ne comprends pas et puis comment ton manager fait pour t’accabler connaissant la valeur de ton travail ? C’est absurde !
S’il faut déballer alors je vais déballer, même les détails les plus sordides.
Moi : Tony m’a fait des avances… et j’ai dit non ! Alors il a trouvé le moyen de me le faire payer !
Jules eut un rictus, il secoua sa tête.
Jules : C’est vraiment petit de sa part ! Mais ça reste idiot qu’une boite d’une telle envergure se débarrasse d’un bon agent qui fait du chiffre comme toi, alors qu’elle vient de leur apporter l’un de leur plus gros contrat…
Moi : Il se trouve que le client qui s’est plaint n’est pas un individu mais une entreprise…
Jules : Ah bon ? Laquelle ?
Moi : Ton entreprise !
Le mouvement de recul de Jules démontrait sa surprise, sauf s’il était le meilleure acteur non dévoilé du cinéma camerounais.
Jules : Attends… Castor, c’est n’importe quoi ! Qui t’a raconté des histoires pareilles ? Pour quelle raison mon entreprise irait… Moi j’irais porter plainte contre toi auprès de ton employeur ?
J’ai souri !
Moi : C’est aussi ce que je me suis posée comme question lorsque j’ai confronté Tony par rapport au rapport de plainte qu’il a rédigé sans me parler, et qu’il m’a balancé à la figure que je devrais te demander de quoi tu te plaignais au juste…
Jules : Il raconte n’importe quoi je n’ai jamais déposé de plainte contre toi…
Moi : Il m’a montré la fiche de plainte client…
J’ai laissé un temps de suspens juste pour observer sa réaction face à mon accusation, il semblait complètement perdu.
Jules : Je n’ai jamais vu de fiche… je ne savais même pas que ça existe ! Et si j’avais eu un problème avec notre contrat pourquoi me plaindre après la signature et en plus sans t’en parler directement ?
Moi C’est aussi ce que je me demandais ! Pourquoi Jules irait se plaindre alors qu’on se voit et se parle tout le temps ?
Jules : Bébé… sérieux… je suis…
Je lui ai tendu la fiche que j’avais dans mon sac, elle était pliée en 4, alors j’ai observé ses gestes pendant qu’il l’a dépliait, il semblait être pressé de voir ce qu’elle contenait.
Jules : Déjà cette fiche date du week-end… je n’étais pas à Yaoundé…
Moi : Et en la parcourant on voit bien que ce n’est pas ta signature en bas…
Jules : C’est celle de Fabrice ?
Moi : Fabrice Etoa… Le gars qui m’a abandonné devant le maire !
Jules leva directement les yeux sur moi ! Son regard s’était rétréci, c’est un homme intelligent je pari que son cerveau était en train de recomposer le puzzle que je venais moi de reconstituer. Il reporta les yeux sur la fiche qui portait la signature de mon ex.
Jules : Tu es l’ex de Fabrice ? Ton ex c’est Fabrice Etoa ? ce Fabrice Etoa ?
Il n’en revenait pas.
Moi : Oui, la fille pour qui il avait divorcé de sa femme ! Celle qui a mis un terme à sa relation avec l’un des commissaires divisionnaires les plus intègres que compte notre pays, pour l’homme le plus ignoble sur la face de la terre!
Jules : Gérôme ! Je me disais bien que son regard sur toi dépassait celui d’un simple ami… Et puis quoi de mieux que de reconnaitre le neveu de son ex !
Moi : Il est mourant ! Il n’a pas de famille et il voulait qu’un fils puisse profiter de sa pension lorsqu’il ne sera plus là !
Une pointe de désolation teinta les iris de Jules.
Jules : Il souffre de quoi ?
Moi : Un cancer, il était en rémission mais la maladie est de retour ! Je ne l’ai appris que récemment !
Jules : Hum… je comprends !
Il retourna la fiche vers moi !
Jules : Lui là, qu’est-ce qu’il te veut ? Pourquoi après tout ce temps et surtout ce qu’il t’a fait pourquoi il revient te faire envoyer au chômage ?
Moi : Tu me demandes pourquoi le fils de ton partenaire veut me faire souffrir ? J’ai arrêté de me poser cette question quand il m’a planté une deuxième fois et cette fois là avec fracas !
L’homme à la montre de luxe n’était personne d’autre que le père de Fabrice. Je l’avais reconnu au premier regard et a voir son regard fuyant il sait qui je suis, mais il ne s’attendait pas à me voir aujourd’hui !
Jules se remit à lire les documents je savais qu’il allait voir l’autre chose bizarre que j’avais vu et qui m’avait fait comprendre qu’il n’avait rien à voir avec cette plainte.
Jules : Kiki, est-ce que Fabrice aussi a encore des vues sur toi ?
La question était simple mais elle portait beaucoup de poids.
Moi : Je l’ai cru aussi ! Mais je me suis rappelée que Fabrice à part lui-même aime une seule chose… L’argent !
Jules : Si c’est lui qui a signé ce document alors je crois qu’il me vole…
Moi : Ils te volent tous les deux ! C’est le père le cerveau !
Jules : NON !
Moi : Jules, Fabrice ne fait rien sans l’accord et l’avis de son père. Son mariage était l’idée de son père…
Jules : Bébé c’est grave !
Moi : Je ne suis même pas encore arrivé sur ce qui est grave ! Ecoutes je sais que c’est difficile à croire, mais mon ex s’est marié avec une jeune femme de bonne famille pour profiter de l’argent de sa femme, exactement comme son père l’avait fait…
Jules : J’ai remarqué des irrégularités il y a des mois, mais ils ont réussi à me prouver qu’il n’y a rien de bizarre…
Il se leva et se mit à tourner en rond.
Jules : J’aurais dû suivre mon instinct !
On sentait la déception dans sa voix.
Jules : Mais si c’est juste pour l’argent pourquoi t’embarquer dans cette histoire, il pouvait juste monter un justificatif financier… Pourquoi s’attaquer à toi ? S’il n’en a plus rien à faire ?
Moi : Tu connais la nationalité de l’ex femme de Fabrice ?
Jules : Gabonaise ! Je crois !
Moi : Où est-ce qu’ils aiment aller pour traiter affaire ?
Il m’observa comme s’il ne voyait pas où je voulais en venir.
Jules : Au Gabon, mais…
Ses yeux s’ouvrirent, j’aimais faire cet exercice avec lui, il avait un esprit rapide comme l’éclair.
Jules : Ne me dis pas que c’est Samuel ! C’est Samuel le père de Loïc ?
Samuel Etoa, le père de mon ex est le père de l’enfant que j’ai reconnu avec mon ex.
Si on vous explique ma vie et que vous comprenez faites moi une note pour que je comprenne aussi.
J’ai hoché la tête, il s’est rassis à coté de moi. Il était dépassé, je le voyais.
Jules : C’est sérieux ?
Moi : J’ai cru un moment que c’était toi, quand j’ai eu la fiche mais Alfred m’a dit que tu ne me connaissais pas avant notre rencontre et ma sœur avait pris une photo de la montre du père de son enfant… Ton mentor est un fin connaisseur en montre de luxe.
Jules me prit les deux mains et les serra fort.
Jules : Quand je pense que je viens de te mettre en présence de ce monstre ! Attends… Je me souviens que ce n’est pas Fabrice qui avait demandé le divorce à sa femme ! Il y avait des rumeurs comme quoi sa femme ne s’était pas remise de la mort de leur bébé et elle aurait demandé le divorce !
Ça je n’en avais aucune idée !
Moi : Ah bon ?
Je ne sais pas si cette nouvelle me faisais mal ou ça me soulageait de savoir que je n’étais pas la cause du divorce de deux personnes unies devant Dieu et devant les hommes.
Jules : Ils font ça depuis… J’ai mangé à la même table que ces deux hommes ! Seigneur ! Samuel m’aurait lessivé jusqu’au dernier centime si je n’avais pas croisé ta route…
Et moi je n’aurais jamais sut qui se cache derrière la menace qui plane sur mon neveu.
Jules : Mais ça… Ils se sont attaqués à la mauvaise personne… Ils ne vont pas comprendre ce qui va se passer !
Moi : Tu vas faire quoi ?
Jules : Si je te demande de quitter le Cameroun avec ton fils tu vas refuser ?
Moi : Mon fils n’est plus dans le pays ! Et je ne n’ai pas l’intention de bouger sans avoir confronté ces types…
Jules : Kiki…
Moi : N’insistes pas s’il te plait ! Je sais que c’est dangereux, mais moi mieux que personne connais comment frapper ces deux hommes ! Les deux en même temps !
Jules : Tu vas faire quoi ?
Moi : Tu le sauras bien assez tôt ! Mais j’ai besoin de ton aide ! Tu es de leur monde, donc tu dois porter le premier coup afin que moi j’apporte le coup fatale !
Nous avons échangé un regard complice, il me sourit et éclata de rire.
Jules : J’ai intérêt à ne pas m’amuser avec toi sinon tu me le feras gravement payer n’est-ce pas ?
Moi : Et tu n’as encore rien vu !
Il m’attira dans se bras et m’embrassa. Etre dans ses bras était une source indéniable de force pour moi.
Jules : On ne va pas les laisser s’en tirer ! Moi aussi je suis redoutable lorsqu’on s’attaque à ceux qui me sont chers, personne ne va te faire du mal et je vais croiser les bras… On va s’occuper de leur cas !
C’était une promesse qu’il scella avec un baisé langoureux !
Nous avions un plan, une stratégie d’attaque mais tout de suite nous avions besoin plus de l’un et de l’autre.
Nous avons fait l’amour cette nuit comme s’il s’agissait d’un nouveau départ, une nouvelle fois que nous nous rencontrions, je savais que je ne retrouverais jamais ce que j’avais avec lui d’ailleurs je ne voulais pas le chercher ailleurs.
Au petit matin nous avons parlé de tout sauf du sujet qui nous hantait tous les deux l’esprit, je voyais bien à certains moment son regard se noircir pendant qu’il prenait une gorgée de café. Je me savais redoutable quand il fallait planifier la descente aux enfers de quelqu’un mais à voir Jules et connaissant son tempérament j’imaginais ce qu’il prévoyait en représailles contre son partenaire et son fils.
Avant de partir il me serra fort dans ses bras en me regardant droit dans les yeux.
Jules : Je veux que tu le saches, il ne faut pas que tu tombes dessus et que tu paniques, j’ai installé un traceur GPS dans ton téléphone…
Moi : Comment…
Jules : Avant de te fâcher saches que je veux savoir où tu te trouves à tout moment donc ce n’est même pas la peine de discuter et ne t’avises pas de le désactiver ! C’est clair ?!
Il ne me demandait pas mon avis, alors j’ai fait oui de la tête !
Jules : Et oui… je connais ton mot de passe ! Je t’appelle tout à l’heure !
Il me fit un bisou avant de sortir de mon appartement comme une tornade. Il allait pleuvoir des flammes sur Yaoundé aujourd’hui.