JAMES

Write by princesse tia

JAMES 

_Gela, à ton retour de l’école ce midi tu vas accompagner ta grand-mère au marché faire quelques emplettes pour son voyage. 

_Ah ! Mémé voyage ? 

_Oui elle va à Accra dans deux jours.

Véro était entrain de s’apprêter pour prendre sa douche pendant qu’Angéla rangeait son sac pour l’école. 

Elle avait bien grandi maintenant, à 13ans elle était déjà une belle jeune fille. Élancée, taille fine avec un beau teint noir. Ses formes se développaient déjà très bien et cela inquiétait parfois sa mère de la voir grandir si vite. Cette dernière avait ouvert une gargote avec l’argent que lui avait donné quelques années auparavant. L’activité ne lui faisait pas gagner des millions mais assez pour s’occuper de ses enfants et de sa mère qui était revenue s’installer avec eux après le décès de leur père au Ghana. Ils vivaient toujours dans la villa dont Thomas leur avait fait cadeau. Naomi également était revenue et servait comme baby-sitter dans une maison, afin d’économiser pour commencer une formation de coiffeuse. Elle rentrait à la maison tous les weekends. Marguerite elle avait un petit garçon maintenant et vivait avec le père de son fils. 

Comme tous les midis, la gargote de Da Véro comme tous ses clients l’appelaient, était animée. Elle-même était aux commandes, aidée de ses deux journalières. 

_Da Véro bonjour, dit une voix qu’elle connaissait bien. 

C’était Mr Jean, un de ses client très régulier. Il était mécanicien et avait son garage pas très loin de la gargote de Véronique. 

_Bonjour Mr Jean, répondit celle-ci tout sourire en levant les yeux de la marmite de riz. Comment ça va aujourd’hui ? Et la famille ?

_Ah ! Tout le monde va bien grâce à Dieu et de ton côté ?

_Je rend grâce à Dieu également. Je vois que tu es accompagné aujourd’hui. 

_Oui je te présente mon ami James, il est arrivé du Bénin, il va m’aider au garage. 

L’ami en question n’arrêtait pas de regarder Véronique. C’était un homme d’environ une quarantaine d’années, très grand de taille, de teint noir et barbu.

_Ah ! C’est bien. Bonne arrivée Mr James, j’espère que vous serez aussi régulier ici que votre ami. Installez vous, on vient prendre vos commandes tout de suite.

Monsieur Jean revient avec son ami chaque midi pendant deux mois. James était à son tour devenu un habitué de la maison.

 Un soir vers 19h alors que Véronique se préparait à partir, il arriva tout seul. 

_Bonsoir Da Véro, lança t il avec un sourire timide. 

_Ah ! Mr James, nous sommes entrain de fermer, vous auriez dû arriver plus tôt. 

_Non je ne suis pas là pour manger rassurez vous. Je….. je voulais juste vous voir. 

Véronique s’étonna. 

_Moi ? Il y a un problème ?

_Non non non, rien de grave. 

_Bon d’accord attendez que je prenne mes affaires et je viens.

Elle confia la fermeture aux filles, prit son sac et se mit en route. 

_Ma maison n’est pas vraiment loin d’ici alors chaque soir je fais le trajet à pieds. Ça me permet d’économiser de l’argent, de souffler et de réfléchir alors si vous voulez bien faire le trajet avec moi ce serait bien. À moins que vous ne souhaitiez qu’on se pose quelque part.

_C’est très bien de faire le trajet à pied, ça me va. 

Ils marchaient lentement en causant de tout et de rien. Quelques minutes plus tard, Véronique demanda :

_Alors pourquoi vouliez vous me voir ? 

_Euh ! Ça va te paraître un peu bizarre mais je ne sais pas j’avais juste envie de passer un peu de temps avec toi. Tu sais je ne connais personne ici à part Jean et les gens du garage, en plus tu me rappelles ma petite sœur que j’ai laissé au Bénin. 

Véronique sourit légèrement. Il semblait tellement nostalgique. 

_Elle s’appelle comment ta petite sœur ?

_Elle s’appelle Sidonie. À part elle j’ai 5 grandes sœurs et un grand frère. Notre père est décédé lorsque j’avais 15ans alors nous n’avons que notre mère. 

Il lui raconta un peu sa vie et à la fin de leur trajet, elle le connaissait un peu mieux. C’était juste un homme loin de son pays et qui se sentait seul. 

Ils devinrent amis et commencèrent à passer beaucoup de temps ensemble. Ils s’appelaient  affectueusement grand frère et petite sœur. Véronique lui offrait pratiquement tous ses déjeuners parce qu’elle avait découvert qu’il avait du mal à joindre les deux bouts. Ce qu’il gagnait sur les quelques prestations au garage, lui permettaient tout juste de payer son loyer. Il venait également à la maison parfois et tout le monde le connaissait bien, pour tous c’était l'affectueux tonton James. 

_Tu sais Véro je crois que je suis amoureux de toi, lui dit il un soir où il l’aidait à faire la vaisselle de fin de journée à la gargote. 

Véronique laissa tomber le bol en aluminium qu’elle tenait et s’écria :

_Quoi ? Tu plaisantes là James. Pardon rince vite les choses pour qu’on rentre, j’ai eu une dure journée. 

_Non je suis sérieuse Véro. Je crois que tu es la femme de ma vie, je veux t’épouser. 

Véronique continua ce qu’elle faisait tout en répondant. 

_Tu connais très bien ma réticence envers les relations amoureuses, je ne veux plus de ce genre de choses dans ma vie. 

_Je connais ton histoire Véro, ça fait maintenant un an qu’on se connaît, je connais tes blessures et crois moi je ne te ferai pas plus de mal. Je sais que je n’ai pas grand-chose à t'offrir mais je saurai penser tes blessures. S’il te plaît Véronique laisses moi une petite chance, je t’en supplie. 

_Non je refuse, trancha t elle d’un air buté. 

Ce soir là il ne dit plus rien à ce propos. Mais pendant les trois mois qui suivirent, il la poursuivit de ses assiduités, allant même jusqu’à voir sa mère pour lui faire part de ses sentiments. 

Finalement après plusieurs plaidoiries de la part de sa mère, de Mr Jean et de James lui-même, Véronique fini par accepter d’essayer à nouveau une relation amoureuse, plusieurs années après Joseph. Au début elle fit en sorte de s’investir le moins possible dans la relation, mais au fil des mois elle se mit à avoir les mêmes sentiments pour lui. Certes il n’avait pas beaucoup de moyens financiers mais il la faisait rire, il l’aidait jusque dans les tâches ménagères, il faisait tout son possible pour qu’elle soit heureuse.

_Tu sais ma belle, j’ai une idée qui me travaille depuis des mois. 

_Ah ! Oui ? Dis moi donc. 

Ils étaient blottis l’un contre l’autre sur la natte de la minuscule pièce que louait James. C’était dimanche et ils avaient passé la journée ensemble. Les enfants étaient partis en weekend au village avec leur grand-mère.

_Tu sais que je n’aime pas la mécanique et que je le fais parce que c’est ce que mon grand frère avait choisi pour moi et je n’avais pas le choix. 

Après le décès de son père, sa mère n’avait plus eu les moyens nécessaires pour leurs scolarité, il s’était arrêté en 3e.

_Oui je le sais, toi tu es passionné par la couture, le stylisme, répondit Véro.

_Voila. Alors je veux finalement ouvrir mon atelier. 

Véronique se redressa et le regarda dans les yeux. 

_Mais James tu n’as aucune formation en la matière. 

_J’en suis conscient et c’est pour cela qu’en ouvrant l’atelier, je vais embaucher des ouvriers déjà tailleurs professionnels chez qui je vais me former. Tu suis un peu l’idée ? 

Véronique hochait la tête d’un air sérieux. 

_Oui je vois, c’est une bonne idée mais avec quel argent vas-tu ouvrir cet atelier James ? 

_C’est là que tu interviens ma chérie. Toi aussi tu as une formation en couture alors je voudrais que ce soit notre projet à tous les deux. Je voudrais te demander de me faire un prêt avec lequel je vais lancer le projet et au fur à mesure que ça avance je te rembourserai. Je crois en ce projet, je suis sûre qu’il va marcher. 

Véronique resta silencieuse un long moment.

_C’est beaucoup d’argent ça James, si j’ose toutes mes économies vont y passer. Mes enfants ont un père invisible et je suis la seule à pouvoir assurer leur avenir, je ne peux pas tout hypothéquer ainsi tu vois ? C’est compliqué. 

_Je sais que c’est compliqué, je le sais bien mais crois en moi je t’en supplie, ça va marcher. Ce sera notre projet à tous les deux. 

Elle soupira profondément et lui dit :

 _Je vais y réfléchir. 

Elle y réfléchi en effet pendant des jours et des nuits. Ça avait l’air d’être un bon projet et elle avait vraiment envie de l’aider mais d’un autre côté elle avait très peur. Néanmoins, elle décida de le soutenir, comme il l’avait dit ce sera leur projet à tous les deux et puis parfois il faut savoir prendre des risques, se dit elle. 

_J’ai prit pratiquement toutes mes économies pour commencer, ça fait 900000. On peut louer un petit local avec ça en attendant et prendre une machine. Le reste nous allons le financer au fur et à mesure. Je m’étais promis de ne pas toucher à cet argent, c’était pour mes enfants, au cas où nous devrions subir une période de disette. Mais je te fais confiance, je sais que tu es un homme ambitieux et plein de talents, ne me déçois pas. Pilote ce projet jusqu’à bon port, lui dit elle en lui remettant l’argent. 

_Merci Véro, tu es une personne formidable, je t’aime. 

Petit à petit, le projet se mit à prendre vie. James était un homme vraiment créatif et bosseur. En moins de 6 mois, il trouva un local dans son quartier à un prix vraiment formidable qu’il retapa de ses propres mains, il acheta 3 machines d’occasion  et pour finir, embaucha un vieux tailleur professionnel retraité dont il s’était lié d’amitié dans le quartier. Ils mirent d’accord pour qu’il apprenne le métier à James et à son tour il prenait la moitié des revenus de toutes les prestations de l’atelier. Leur contrat avait été établi sur 2ans. Pendant ce temps, Véro travaillait dur à la gargote et soutenait James de son mieux. 

_Un jour je te revaudrai tout ça, je te traiterai un jour comme tu le mérites, comme une reine, lui répétait il chaque jour, le regard plein de sincérité. 

Un soir après avoir fini à la gargote, Véronique arriva à l’atelier de James qui s’apprêtait à fermer aussi. 

_Ça va ma belle ? Tu sembles fatiguée, remarqua James.

Il tira une une chaise et s’assit près d’elle.

_Je suis enceinte de toi James, annonça t elle de but en blanc. 

_Quoi ? Tu es enceinte ? Oh ! Mon Dieu. 

_Oui je suis enceinte et j’aimerais que tu me dises en même temps si tu n’as pas l’intention de t’en occuper, si tu as l’intention de disparaitre à un moment. Comme ça je me prépare mentalement pour élever ce bébé toute seule en plus de mes deux autres enfants. 

James se rua sur elle et la prit dans ses bras. 

_Mais non tu racontes quoi mon amour ? Je suis content d’avoir cet enfant avec toi. Je serai présent pour vous, je serai là et on l’aura ensemble cet enfant. Je ne compte pas disparaitre Véro. 

_Tu es sûr ? J’ai déjà vécu tout ceci James, je ne……

_Chut ! Ne dis rien, l’arrêta t il. Je serai présent je te le jure. Écoutes dès demain j’appelle ma mère pour qu’elle contacte mes oncles, ils viendront reconnaître la grossesse officiellement et faire tout ce qu’il faut d’accord ? Oh ! Mon Dieu elle sera si contente, ce sera mon premier enfant, à 41ans. Véronique tu es mon porte bonheur. Je t’aime. 

Ainsi qu’il l’avait dit, sa mère, son grand frère et leurs oncles vinrent connaître la famille de Véronique au cours du troisième mois de grossesse. Ils apportèrent tout ce qu’exigeait la coutume pour reconnaître la grossesse. Comme James l’avait prédit sa mère fut très heureuse. 

_Je pensais à un moment qu’il était impuissant ma fille, vraiment merci de faire de lui un homme à part entière, avait elle dit à Véronique. 

Elle continua son activité à la gargote jusqu’au huitième mois de grossesse. James l’avait convaincu de mettre fin à la l’activité à son accouchement pour venir travailler à l’atelier avec lui. Elle irait également vivre avec lui à l’arrivée du bébé, avec Luc dans la nouvelle pièce un peu plus spacieuse, qu’elle avait loué avec lui. Angela avait voulu rester avec sa grand-mère, sa tante Naomi et sa tante Magui qui était venue s’installer là avec son fils à la suite de problèmes avec son homme. 

_Toi tu marque le début d’une nouvelle vie de joie pour moi, mon bébé de la joie, dit elle les yeux pleins de larmes le jour de son accouchement au bébé tout potelé qu’elle tenait dans les bras. C’était un gros garçon qu’ils décidèrent d'appeler Gilles_David. 


Véronique ou une vie...