Jour 26 : La dernière crise
Write by Owali
JOUR 26
*** Massa Ndira ***
Je me suis réveillée en sursaut ce matin. Cette nuit, je n’ai pas arrêté de faire des cauchemars. Ça faisait longtemps que ça ne m’était pas arrivé.
Je courais encore et encore pour échapper à une menace invisible à croire que même dans mes rêves, Rach me poursuit.
Cet enfer que nous vivons semble ne pas avoir de fin. Depuis quelques temps, il n’y a que des morts en cascade comme si notre détracteur avait décidé qu’il en avait fini de jouer… qu’il voulait passer à autre chose.
Je me lève lentement et regarde autour de moi. Je n’ai pu dormir paisiblement qu’aux aurores alors tout le monde est déjà debout. Je sors de la grotte en me frottant les yeux pour chasser le reste de sommeil de mon visage et marche un peu pour retrouver les autres sur la plage.
Les filles sont toutes regroupées dans un coin, en silence tandis que je vois Charles s’en aller un peu plus loin, d’un pas furieux.
Je me demande distraitement ce qui a bien pu encore se passer.
Ces derniers temps, au lieu d’être beaucoup plus soudés, nous passons notre temps à nous disputer et à nous accuser les uns les autres. C’est vrai que cette histoire est louche mais, moi qui suis de nature très naïve je dois admettre que j’ai du mal à penser que l’un d’entre nous soit derrière tout cela.
Chacun des membres ici présent à réussi sa carrière d’écrivain. D’autres ont quelque peu changé de direction dans leur parcours professionnel mais nous n’avons rien à nous envier mutuellement. Chacun a plus ou moins eu ce qu’il voulait dans la vie alors oui, je suis quand même un peu sceptique.
Je m’approche lentement du groupe que forment les filles et fronce les sourcils en voyant leurs mines défaites et des larmes couler sur les joues de Solène.
-Qu’est-ce qu’il y a ?
-Massa… dit Solène dans un sanglot
-Quoi ? Qu’est-ce qu’il y a ?
-C’est Nathalie me dit Sissi des sanglots dans la voix
-Quoi Nathalie ? Qu’est-ce qui lui est arrivé ?
-Charles l’a retrouvée pendue à un arbre au milieu de la nuit me répond froidement Delomè
-Oh mon Dieu fais-je en me mettant à pleurer… Ce n’est pas possible, pas Nathalie... Où… Où est-elle ?
-Les garçons l’ont déjà enterrée me répond Sissi
Je m’affale près de Solène, qui pleure toujours silencieusement.
Je n’arrive pas à y croire.
Alors c’est comme cela ?
On se réveille un matin pour retrouver une de nos amies morte ? Je ne comprends pas… C’est tellement insensé que cette personne nous en veuille autant !
Qu’est-ce qu’on a bien pu lui faire bon sang !
-Où est-ce qu’ils l’ont enterrée ?
-Près de Noémie me dit Solène
Je me lève les yeux remplis de larmes et me dirige lentement vers ce qui est devenu « la dernière demeure des membres du cercle ».
Depuis qu’on s’est retrouvés, tout devient plus compliqué. Et plus on avance, plus il semble que cet endroit se remplira de nos dépouilles.
Rentrerons-nous jamais chez nous ?
Quand j’y suis, je vois en effet un deuxième amas de terre tout près de celui de Noémie.
Je me mets à genoux entre mes deux amies et mes larmes baignent tout mon visage maintenant, mes sanglots se font de moins en moins discrets.
Je ne peux pas mourir ici… Je ne veux pas mourir comme ça. Encore moins être enterrée sans ma famille pour ne serait-ce que me faire un éloge funèbre.
Je pleure un long moment et plus mes yeux s’attardent sur ce spectacle plus que désolant plus je décide que je dois m’en sortir.
Mon enfant, mon fiancé, ma famille… Ils m’attendent tous.
Sur le chemin du retour, après avoir dit un mot à l’endroit de chacune de ces superbes femmes parties trop tôt, je suis un peu plus calme. Quand je retrouve les autres, ils sont en pleine discussion et ça semble assez important.
En même temps vu notre situation…
-Ah Massa, te revoilà. Ça va mieux ? me demande Charles
-Vu les circonstances je dirais oui. Quelqu’un a entendu ou vu quelque chose ?
-Non. Je l’ai juste trouvée là, me fait-il en pointant un endroit en face de nous. J’allais faire mes besoins et… c’est tellement subit
-Vraiment trop subit renchérit JK avec un sous-entendu assez évident
Solène lui lance un regard comme pour lui dire de se calmer et il n’ajoute plus rien.
-Il y avait le mot "Courtine" écrit sur un bout de papier que… que l’assassin a enfoncé dans la bouche de Nathalie me dit Adam
-Oh mon Dieu… donc c'est...
Je n'ose pas finir la fin de ma phrase. La seule évocation de son nom me donne la chaire de poule.
-On essayait de trouver ce que ça pouvait dire. Tu as une idée toi ?
-Non, du tout… je ne vois pas. Je sais que c'est le nom donnée au rideaux qu'on utlise pour décorer les lits ou les berceaux mais... ça n'a pas de sens la...
-Oui... en tout cas en voilà une autre qui est innocentée trop tard... lâche Delome
Je soupire profondément et nous continuons à parler de cela jusqu’à ce que le soleil soit très haut dans le ciel et que les filles et moi nous retirions pour faire à manger.
Quand nous finissons de cuisiner, tout le groupe, enfin ce qu’il en reste, se retrouve pour manger.
L’atmosphère est tendue, personne ne parle et ça me met plus que mal à l’aise. Si l’on arrive même plus à rester soudés c'est sur Rach nous egorgera tous aussi facilement que des motons le jour de la tabaski.
-Ecoutez, je pense qu’on fait carrément fausse route là
-Qu’est-ce que tu racontes Massa ? me demande JK
-Je raconte que… nous sommes tous paumés ici. Que ce soit le fait de l’un d’entre nous comme vous semblez le croire ne changera rien au fait que nous diviser de la sorte ne nous rend que plus faciles à abattre.
-Elle n’a pas tort renchérit Sissi
-Il faut tout de même reconnaître qu’il y a de drôles de coïncidences fait JK en regardant Charles
-JK ! Tonnai-je
-Okay c’est bon ! Je ne dirai plus rien
-Je sais que c’est compliqué mais nous devons rester soudés. Vous êtes avec moi?
Ils hochent tous la tête et nous finissons de manger avant que chacun ne reparte à ses occupations et à ses discussions.
Solène part se reposer à l'ombre des arbres, Delomè disparait pour faire je-ne-sais-quoi dans la forêt et JK, Jude et Charles sont en train de discuter non loin de moi. Ils essaient encore de comprendre tous les indices.
Je rejoins Adam et Sissi qui se tiennent un peu à l'écart en train de faire des messes basses qui m'intriguent.
Je m'approche lentement d'eux et j'entends Sissi murmurer, avant de se rendre compte de ma présence:
"Moi je pense qu'on devrait lever l'encre ce soir Adam. Tu ne vois pas vois pas comment tout s'accélère ? Si on attend encore qu'est-ce qui te fait dire que nous serons tous les deux en vie demain ? Travaillons à terminer ce radeau cet après-midi et on pourra s'en aller."
-Vous partez ?! dis-je sans m'en rendre compte
Ils sursautent tous les deux et Adam me fait signe de parler moins fort et m'entraîne discrètement un peu plus loin tandis que Sissi nous suit.
-Qu'est-ce qui se passe ? demandais-je
-Sissi et moi on a décidé de partir seuls cette nuit me répond Adam
-Quoi ? Mais... vous voulez nous abandonner ?
-Ecoutes Massa, c'est notre meilleure chance de nous en sortir me répond Sissi. Rach ne nous laissera jamais tous partir. Pendant qu'il sera occupé à chercher sa prochaine cible, nous on profite pour partir d'ici. Tu peux venir avec nous ?! Il y a de la place pour 3 personnes.
-Hein moi ? Hors de question, on doit resté soudé!
-Chuutt... moins fort! M’intime Sissi. Tu ignores que les arbres ont des yeux et des oreilles ici? Réfléchis bien, une chose est sur c'est qu'on ne survivra pas tous. Seules les plus malin s'en sortirons et irons rejoindre les leurs. Regarde, fait-elle en sortant une photo de sa poche. C'est notre bébé à Adam et moi, on ne peut pas mourir ici, il doit connaitre son père... N'as-tu pas toi aussi un bébé? c'est une chance inestimable de retrouver ta famille tu ne trouves pas?
-Je ...
Retrouver mon fils, mon fiancé, mes parents... Oh mon Dieu. Je regarde les autres discuter au loin et j'ai un pincement au coeur parce que je sais déjà quel est mon choix. Je n'ai même pas à y réfléchir. Il faut que je parte d'ici. Ma famille avant tout.
-Ok, je viens avec vous!
Sissi soupire de soulagmeent et me dis de continuer à faire comme si de rien et qu'elle me donnera le signal. Une fois entendu je tourne les talons et de m'éloigne pour m'aérer l'esprit.
Je pars m’asseoir près de Solène pour me reposer parce que j’ai la tête qui bourdonne.
Toutes ces nouvelles informations... c'est trop pour moi. Nous parlons un peu de cette folie dans laquelle nous sommes, de nos peurs, du reste de notre espoir et je finis par somnoler la tête sur ses cuisses.
Je ne sais combien de temps est passé quand nous nous levons en sursaut en entendant un cri de douleur provenant apparemment de la forêt.
Les garçons passent devant nous tandis que nous nous dirigeons vers l’endroit où la personne crie toujours.
Quand nous y arrivons, nous trouvons Jude suspendu dans les airs, la chevilles droite prise dans un étau en fer.
Plus son poids le tire vers le bas, plus les dents du dispositif s’incrustent dans sa chair. C’est affreux, il n’arrête pas de crier.
Adam se met à grimper à l’arbre auquel il est suspendu et Dieu merci, il arrive assez rapidement à attraper le t-shirt de Jude et à le ramener vers lui.
Prudemment, il le fait redescendre et les garçons l’aident à retirer l’étau de sa cheville. Quand c’est fait, un silence de mort s’abat tandis qu’ils ont tous le regard fixé sur la cheville de Jude.
-Quoi ? Qu’est-ce qu’il y a ? demandais-je
-Je… sa cheville répond Adam
Jude ne fait que se tordre de douleur et la peur au ventre, les filles et moi nous approchons pour découvrir avec horreur le chiffre 7 incrusté dans sa chair juste au-dessus de sa cheville.
Adam nous tend ensuite l’étau et nous lisons dessus "A qui le tour?" .
Le moment de stupeur passé, les plaintes de Jude nous ramènent à la réalité.
Le bas de son pantalon est plein de sang et l’état de son pied fait peur à voir. Adam et Charles ramènent Jude dans la grotte pour que les filles puissent prendre soin de sa blessure.
Moi, je reste plantée sur place.
JK tourne autour de moi l’air de chercher quelque chose mais je ne prête pas attention à lui.
Je suis dans un état de panique complet. Ça aurait pu être moi ! Mon Dieu ça aurait pu être moi ! Pourquoi ça nous arrive à nous mon Dieu qu’avons-nous fait ?
Plus je pense à tout ce qui se passe depuis le début, plus ma panique augmente. Je n’arrive pas à me calmer et sans m’en rendre compte je me mets à marmonner mes peurs et mes angoisses liées à cette histoire.
-Je ne veux pas mourir mon Dieu… mon fils m’attend fais-je en pleurant. Il ne peut pas grandir sans moi… et je dois me marier ? Hein que je dois me marier ? Maman et papa doivent être fiers de moi alors oui je dois rentrer me marier, élever mon enfant et écrire ce putain de roman. Faut que je parte ! Faut que je parte !
-Massa ! Massa putain mais calmes toi ! me crie JK en me secouant
-Quoi ? Quoi ?
-Hé, calmes toi je te dis, espèce de névrosée ! Tu crois vraiment que c’est le moment de faire ta barge ? me lance JK sur un ton de dédain avant de s’éloigner
Sa phrase me calme soudain mais réveille une colère noire en moi.
De quel droit me parle-t-il de cette façon ce petit con prétentieux ? Ils auraient dû laisser ce fichu rat lui manger ses couilles tiens !
Sans y réfléchir je marche furieusement vers lui et le pousse si fort qu’il tombe violemment par terre.
Il me regarde comme si j’avais perdu la tête et se relève doucement le regard menaçant.
-Espèce de…
Je ne le laisse pas terminer sa phrase et le pousse encore une fois. Cette fois-ci il m’attrape la main et me tire vers lui. Il me secoue vigoureusement en me criant tout une armada d’insultes et la colère monte plus grande en moi tandis que j’essaie de me dégager.
Quand il me relâche enfin violemment, je perds l’équilibre et tombe de la petite colline sur laquelle nous étions.
La descente est pénible et je ferme les yeux le temps que les cailloux, branches et autres ne finissent de meurtrir mon corps.
La panique me prend soudain aux tripes quand ma course se termine dans une source d’eau qui était cachée sous des arbustes.
Je ne sais pas nager mon Dieu ! Je ne sais pas nager !
Je veux commencer à me débattre quand je me rends compte que la nage n’est pas mon plus grand problème.
Cette eau est... brûlante… mais pas que… j’ai l’impression qu’elle me… me…
-AHHAHAHHAHAHHHH !!!. Ça brûle ! aïe ! aïe ! ça brûle oh
Je vois JK dévaler la colline à toute vitesse mais c’est fini, je suis prise au piège… je vois de grosse cloque apparaître sur ma peau, ou du moins ce qu'il en reste car ma chaire se met à brûler en dessous… ma poitrine, de l'air, je manque d'air... nager... battre les pieds... je ne sens plus rien... la douleur s'est volatilisée… je me sens bien... je vois le visage de mon fils, il me sourit... je veux lui tendre les bras mais... TROU NOIR.
Mon Dieu! Mon bébé… mon bébé…