L'avertissement
Write by Farida IB
Debbie…
T’es tombée love d’un voyou
T’es tombée love d’un voyou
T’es tombée love d’un voyou
Ça doit finir entre nous
J’suis tombée love d’un voyou...
C’est Armel qui appelle. Je cherche le téléphone à tâtons autour de moi. Lorsque je le trouve, je décroche rapidement.
Moi la voix ensommeillée : allô ?
Armel : ne me dites pas que vous dormez encore Miss Diapena.
Je risque un regard vers Junior qui dort paisiblement dans son lit d’hôpital.
Moi maugréant : ça va, c’est bon je me suis juste assoupie quelques minutes. Je n’en ai plus le droit ?
Armel : calm down, je viens en paix. Je m’inquiétais pour toi, tu n’as pas donné signe de vie depuis notre dernier échange. Je t’ai appelé plusieurs fois et laissé des messages.
Moi (prenant mon souffle) : excuse-moi, j’ai eu un après-midi mouvementé et tard dans la nuit il fallu que j’amène Junior à l’hôpital.
Armel : qu’est-ce qu’il a ?
Moi : il me fait de la fièvre depuis deux jours en plus il n’a pas arrêté de se plaindre d'un bobo à l'anus.
Armel : les hémorroïdes ?
Moi : manifestement, enfin le pédiatre penche aussi pour cette hypothèse. On en sera plus sûr toute à l’heure lorsque j’irai récupérer le résultat de ses analyses.
Armel : vous êtes où ?
Moi : Source de vie (une clinique pas loin du quartier)
Armel : ok j’arrive.
Moi : ce n’est pas la peine, je pense qu’ils ne vont pas tarder à nous libérer.
Armel : je viens quand même !
Il raccroche et je passe les vingt-cinq minutes restant avant l‘ouverture du labo à essayer de dormir un peu, mais c’est peine perdue. C’est comme ça que je me retrouve à être la première devant le guichet du labo ensuite, j’attends que le médecin généraliste sortant fasse la transmission au nouveau pour connaître le diagnostic.
Docteur après lecture : bien ! A priori, il ne s’agit pas d’une crise hémorroïdaire. Du moins pas en externe. Nous allons procéder à un autre type d'examen plus tard lorsque les douleurs vont s’estomper. Pour l’instant (prenant l’ordonnancier) je vais vous prescrire un anti-inflammatoire pour la fissure anale et un laxatif (me passant l’ordonnance) il doit être constipé.
Moi le saisissant : d’accord.
Docteur : il a encore le suppo que je lui ai prescrit la dernière fois ?
Moi : oui oui
Docteur : bien, tu l’associeras au traitement. N’oublie pas de respecter la dose prescrite.
Moi : sans faute, merci docteur.
Docteur me souriant : je t’en prie, tu diras bonjour à ta mère de ma part.
Moi : je ne manquerai pas.
Je sors de là et descends au rez-de-chaussée pour me rendre à la pharmacie. Dans le hall, je croise Armel qui me cherchait visiblement.
Armel : t’es là ? Comment va-t-il ?
Moi : il y a du mieux. Je dois passer à la pharmacie, je reviens. Nous sommes au premier, chambre 22.
Armel : laisse-moi y aller, qui est à son chevet ?
Je lui remets le papier sans me faire prier.
Moi : je suis venue seule.
Armel : ok vas-y, je reviens vite.
Je hoche la tête et on se sépare en prenant des directions opposées. Lorsqu’il arrive, il nous trouve prêts à lever le camp. C’est lui qui porte Junior et je marche derrière eux jusqu’à la voiture de son grand frère. Il installe Junior dans le siège auto avant de faire le tour pour s’installer au volant pendant que je monte à l’avant puis entreprends de mettre la ceinture de sécurité. Il démarre à peine que je tombe dans un sommeil profond. Je me vois un moment après devant un salon de thé d’où nous nous rendons directement à la maison. Je les suis à nouveau avec le sac en plastique personnalisé du salon de thé et pendant qu’on se dirige vers ma chambre, je vois mon père sortir d’une dépendance avec un pagne attaché autour de la taille. Il s’avance vers sa vieille moto lorsque nos regards se croisent. Je le salue juste tout comme Armel et passe mon chemin.
Armel me chuchotant : où est-ce que je le pose ?
Nous venons d’entrer dans la chambre où nous avons trouvé une bande de squatteurs dans mon lit. Noémie s’est endormie avec le bébé sur son torse et les autres l’entourent de part et d’autre. Je ramène simplement une couette pour coucher Junior au salon et il m’incite à prendre nos distances d’avec lui, tout cela à bas-bruit.
Armel : je dois y aller, il faut que je ramène la voiture à Bradley.
Je réponds par hochement de tête avant de le raccompagner à la voiture.
Moi : merci, pour tout.
Armel : pas de quoi, pense à te reposer.
Moi : je le ferai (le fixant) toi ça va ?
Armel : oui (regard interrogatif) pourquoi tu demandes ?
Moi : tu n’en as pas l’air pourtant.
Enfin ça fait une semaine qu’on ne s’est pas vu, mais il affiche tout autant la même mine soucieuse que la nuit où il s’est introduit dans ma chambre. Je garde le sourcil arqué en attendant qu’il ajoute autre chose. Pendant ce laps de temps, on entend le bruit de la porte de leur garage qui s’ouvre. Je lève mes yeux sur lui pour les poser sur sa mère qui émerge de l’entrée principale en même temps qu’il tourne son regard dans la même direction. Elle répond gaiement à ma salutation et passe sans la moindre attention pour le fils alors que le père lui lance un regard courroucé depuis le volant de sa voiture.
Moi (lorsqu’ils partent) : Armel qu’est-ce que tu as encore créé ?
Il souffle en passant sa main sur le visage avant de répondre.
Armel : rien qu’on ne puisse régler.
Moi : ça doit être grave pour que ta mère en vienne à t’ignorer aussi royalement comme elle vient de le faire. J’espère que ça rien à voir avec ta fortune mystérieusement soudaine.
Armel soufflant : tu ne lâches pas l’affaire ?
Je remue la tête, il souffle encore une fois.
Armel : je dois vraiment y aller, je t’en dirai davantage après.
Moi : ok
Il actionne d’ouvrir la portière, mais se ravise.
Armel : je sais que le moment est mal choisi, mais samedi, je voudrais t’inviter. Une petite escapade en guise de remerciement pour avoir pris soin de ma mère et j’en profiterai pour te dire pourquoi elle m’a snobé toute à l’heure. Ce serait aussi une bonne manière d’enterrer la hache de guerre.
Moi (faisant ma mauvaise foi) : qui a dit que je voulais l’enterrer ?
Armel biaisant : j’aimerais vraiment passer la journée du samedi en ta compagnie.
Moi : laisse-moi le temps de penser à ça.
Armel ton suppliant : Debbie s’il te plaît.
Moi : ok ok tu n’as pas besoin de chialer pour ça (il fait un sourire contrit) je vais voir si mon programme me le permet, mais je ne te promets rien. Enfin, comme tu dois t’en douter, je travaille le samedi (précisant) toute la journée.
Armel : tu veux que je m’arrange avec ma belle sœur ?
Moi : non, je ne veux pas de traitement de faveur. Bon laisse-moi m’en occuper personnellement et je te le confirme avant samedi.
Armel : c’est dans deux jours.
Moi hochant la tête : je le sais.
Armel : ok fait un effort.
Moi : c’est si important pour toi ? (oui de la tête) Et je peux savoir pourquoi ?
Il m’a lancé un drôle de regard quelques secondes, je vous jure jamais il m’a regardé comme ça. Je ne sais pas comment le décrire, un mélange de détresse, de pitié et du supplié. Ah là c’est chaud ! Ça m’a ému deux secondes, mais j’ai continué à faire genre.
Moi : hein ?
Armel : rien de spécial.
Moi : hmmm si tu le dis.
Je garde un sourire triomphant sur les lèvres jusqu’à ce qu’il disparaisse de mon champ de vision, sourire qui se fige à la vue de mon père qui sort de la concession calé sur sa moto. Je soupire intérieurement.
Moi (dans ma barbe) : voilà les ennuis !
Papa s’arrêtant à ma hauteur : Deborah ça va ?
Moi : oui merci.
Papa : tes sœurs m’ont dit que Junior ne se sent pas bien, il a quoi ?
Moi : le docteur a dit que ça doit être des hémorroïdes.
Papa : ça c’est plus le domaine du traditionnel.
Moi : oui, j’attends la confirmation pour prendre des dispositions.
Papa : ok, prenez soin de vous. Je vais t’appeler ce soir pour prendre de ses nouvelles (cherchant quelque chose dans ses poches) je suis déjà en retard pour le boulot.
Il sort sa trousse de clé dans la poche arrière de son pantalon pour débloquer sa moto. Ouais, c’est ça rêve toujours ma fille.
Papa : dis-moi le fils de Fulbert et toi, c’est toujours le voisinage comme ça ou il y a autre chose que vous cachez ?
Je roule des yeux exaspérée.
Moi : il n’y a rien !
Papa : je l’espère pour toi parce que tu risques de t’attirer les foudres de son père.
Je ne réponds pas, je le regarde simplement démarrer sa carcasse qui met quelques minutes à se laisser faire. On sent que la moto rend l’âme avec le bruit qu’elle fait au démarrage. Ce qui est tout à fait normal, il l’avait bien avant de partir d’ici. Remarque que depuis lors, tout à l’air de stagner dans sa vie. On ne sait guère dans quoi ni où ses revenus passent parce qu’il ressemble de plus en plus à un clochard avec le front toujours creusé sous des rides soucieuses. Mais ça ce n’est fichtrement pas mon problème, que chacun porte sa croix.
En passant dans la grande cours, je trouve Noémie en plein ménage de routine et Sophie qui sort de ma chambre avec un sac-poubelle. Je reste un bref moment à papoter avec elles avant d’aller trouver ma mère qui borde Junior sur le lit.
Moi : il s’est réveillé ? Ça tombe bien, il doit manger et prendre ses médicaments.
Dada : ok, laisse-moi m’en charger.
Elle s’y met sous mon regard attentif.
Dada : pourquoi tu ne m’as pas réveillé quand tu partais pour l’hôpital ?
Moi : tu l’aurais su toi-même si tu n’étais pas occupée à autre chose.
Elle me jette un coup d’œil, mais ne dit rien. C’est lorsqu’on s’attable à la véranda plus tard pour prendre le petit-déjeuner à notre tour toutes les deux qu’elle aborde le sujet.
Dada : Deborah, je sais que tu abhorres l’idée que je reçoive toujours ton père, mais quoique tu en dises, il demeure votre père et je reste sa femme. Et par-dessus tout ici, c’est chez lui. Je continuerai à le recevoir tant qu’il n’a pas mis mes sachets bleus dehors.
Moi rictus sardonique : lol tu es drôle, très drôle même je dirai (posant mon sandwich avec un geste d’agacement) à tous les coups cette discussion finira par une prise de tête et je ne suis pas d’humeur à me disputer donc je vais tranquillement dormir, je suis exténuée.
Dada soupirant : ok, repose-toi bien, je vais prendre le relai avec Junior.
Moi : tant mieux.
Je veux partir lorsque je me souviens d’un détail.
Moi : il y a une chose par contre (elle arque le sourcil) je présume que tu prends tes précautions parce que si tu as la fâcheuse idée de tomber enceinte de nouveau, j’arrête tout.
Elle lève brusquement les yeux pour me regarder.
Dada : comment ça tu arrêtes tout ?
Moi : oui j’arrête tout, je ne m‘occuperai plus de personne. Je ne paierai plus rien (comptant avec mes doigts) notamment les études, les habits, les factures, les soins, les provisions, RIEN !!! À la moindre caque moi, je décroche.
Dada ton surpris : tu ne ferais pas ça !?
Moi avec conviction : je ferai bien plus, je me casse d’ici et je vous laisse dans vos conneries. (la regardant bien en face) Commence déjà même à réapprendre à être une mère dans tous les sens du terme parce que de toute évidence, c’est ce qui finira par arriver.
Je la laisse là toute pantoise pour regagner ma chambre quand l’idée me vient de tirer cette histoire de libido précoce au clair avec Caroline. Je n’ai pas pu le faire hier avec notre sortie improvisée après quoi nous sommes rentrés K.O. ensuite vous savez. Je l’amène donc avec moi, on parle d’autres choses un moment avant que je n’introduise subtilement le sujet.
Moi ton doucereux : Caro bébé dis moi, tu as vraiment fait ce dont Fo-Yéma t’accuse ? Tu es allée voir le vieux monsieur ?
Elle hésite un instant avant de hocher la tête positivement.
Moi toujours posée : pourquoi tu as fait ça ? Je t’ai dit que ce monsieur est un peu méchant, qu’il ne faut pas partir lorsqu’il t’appelle non ?
Caroline tête baissée : il voulait me commander.
Moi : ok ok ce n’est pas grave, tu n’auras qu’à l’éviter la prochaine fois d’accord ?
Elle hoche la tête.
Moi : et tu fais beaucoup beaucoup attention à Junior quand il s’amuse dehors.
Elle fait encore oui de la tête.
Moi : maintenant je vais moi même te donner ton bain et changer ton pansement. Tu veux bien ?
Elle me répond toujours par un signe un de tête.
Moi plissant les yeux : qu’est-ce qu’il y a ? D’habitude, tu es toute contente qu’on te lave (silence) Hey , ma puce tu as encore mal quelque part ?
Elle garde le silence un moment puis sans que je m’y attende elle éclate en sanglots. Je la ramène contre moi en lui frottant le bras.
Moi : arrête de pleurer, qu’est-ce qu’il y a ? Dis tout à la mama (surnom que mes sœurs m’ont donné) on est bien d’accord qu’on ne se cache rien n’est-ce pas ?
Elle hoche la tête en reniflant.
Caroline : il m’a fait mal.
Moi : qui ? Le vieux Yao ?
Caroline secouant la tête : Fo-Yéma, il me fait mal à chaque fois qu’il vient ici et maintenant, il le fait à Junior aussi. Junior pleure beaucoup.
Moi (l’incitant à me regarder) : il ne le fera plus, shhuutt arrête de pleurer il ne va plus vous taper. Je te le promets ma puce.
Caroline : je ne veux plus qu’il vienne ici.
Moi : il ne viendra plus ne t’inquiète pas.
Je mets quelques minutes à la calmer, je m’occupe ensuite d’elle et de moi-même avant de m’allonger pour dormir d’un sommeil réparateur.
Je me réveille en début d’après-midi pas du tout motivée à aller travailler. Je reste un moment à me tourner dans le lit avant de me décider à aller me préparer. Je fonce sous la douche et reviens consulter l’heure sur mon téléphone lorsque je tombe sur des appels en absence d’Armel et de Tina en plus d’une notification de message de la part de cette dernière. Je le lis avec empressement.
SMS Tina : bonjour ma chérie, j’espère que tu tiens le coup. Armel m’a expliqué, ne te déranges pas pour venir ce soir. Prends même tout le temps qu’il te faut. Bisou et à bientôt.
Signé Tina A. Elli.
Je lis le message et la rappelle aussitôt pour décliner la proposition, mais elle est apparemment décidée.
Moi soufflant : tata, j’ai vraiment l’impression d’abuser de ta largesse là.
Tina : tu n’abuses rien ma chérie, je suis une mère et je sais ce que c’est d’avoir un enfant malade.
Moi : ma mère et mes sœurs sont…
Tina me coupant net : ta mère est déjà débordée avec le bébé et en tant que grande sœur, ta présence serait plus précieuse.
Moi débitée : hmmm d’accord, merci. C’est trop aimable de ta part.
Tina : mais de rien ! Aller prend soin de ton petit frère et reviens nous en forme.
Moi : je compte bien le faire.
C’est sur cette note qu’on se raccroche. Je dois reconnaître qu’Armel vient de m’enlever une épine du pied. En parlant de lui, je pense qu’il serait grand temps pour moi de lever sa punition. Je ne veux pas qu’on soit en froid à son anniversaire. Parce que oui, je sais que samedi, c’est son anniversaire. Mais bon, ce n’est pas la seule raison pour laquelle je veux enterrer la hache guerre. Il me manque, voilà je l’ai dit. Et je crois qu’il a compris la leçon, même s’il faut que je mette une dernière fois les points sur les ″I″.
Armel…
Tina (depuis le vestibule) : tu me dois une bouteille de J.P. chenet, la grande. Je viens de t’arranger le coup pour samedi.
Je lève mes yeux vers elle avec le sourire.
Armel : elle a accepté ?
Tina : disons que je ne lui ai pas laissé le choix.
Je me lève pour aller la prendre dans mes bras.
Moi : toi, tu es trop ma bonne grande.
Tina : lol.
Bradley (qui arrive à ce moment) : que se passe t-il ici ?
On se détache et retourne pour le regarder perplexe.
Bradley (voix tendue) : c’est ce que vous faites quand je ne suis pas là ?
Tina et moi parlons tous les deux en même temps.
Tina (s’avançant vers lui les yeux plissés) : faire quoi ?
Moi largué : grand de quoi tu parles ?
Bradley me fixant : de toi qui colle ma femme comme une sangsue. Tu ne te contentes plus de t’accaparer d’elle, tu passes carrément à l’action.
Tina : oh ? (se tournant vers moi) Il parle de quoi ?
Je hausse simplement les épaules, les choses de mon frère.
Tina s’adressant à lui : d’ailleurs même, tu fais quoi à la maison à une heure pareille de la journée ?
Bradley : ce n’est sûrement pas pour vous surprendre dans cette position, tu n’étais pas censée être là non plus.
Moi : rooh grand arrête, ce n’est pas ce que tu crois. C’était juste une étreinte pour la remercier.
Bradley : donc c’est pour la remercier que tu es obligée de l’étreindre de cette façon ?
Tina a ouvert sa bouche choquée.
Tina : toi, tu es vraiment à plaindre.
Elle s’en va comme une furie pendant que Bradley se pose sur un fauteuil. Je fronce les sourcils et le fixe pendant qu’il ôte sa veste qu’il met sur un accotoir avant de fixer un regard interrogateur sur le mien.
Bradley : quoi ??
Moi : ne me dis pas que tu me crois capable d’une telle chose ?
Bradley (d’un geste évasif) : je connais ton penchant rédhibitoire pour les femmes.
Moi stupéfait : mais c’est ta femme ? Je peux tout faire sauf toucher la femme d’autrui, encore plus la sienne.
Bradley : vu la manière que tu la squattes, j’en doute. Et puis quand est-ce que tu retournes chez les parents ? Vous n’avez toujours pas réglé vos différends ?
Moi : non non non, ne déplace pas le débat, je…
Bradley m’interrompant fermement : tu rentres quand je demande ? Tu commences à être de trop ici.
Je garde les yeux plissés un moment avant de me passer la main sur le visage.
Moi calmement : ça ne saurait tarder.
Bradley : je veux une précision.
Moi : laisse-moi encore deux jours.
Bradley se levant : deux jours, pas plus.
Moi lui lançant : ça me vexe beaucoup que tu penses qu’il peut y avoir quelque chose entre ta femme et moi. Tina est la grande sœur que je n’ai jamais eu.
Bradley (se tournant à demi) : ça, c’est ton problème.
Il monte sans crier gare, je souffle en me passant la main sur le visage. Ça c’est le pompon de la semaine, mon frère qui me soupçonne avec sa… Non, c’est impensable. (soupire) Je me reconnais volage, mais sortir la femme d’autrui, c’est mon totem. Enfin, avec toutes les filles célibataires et disponibles à Lomé, je cherche quoi à boire dans le marigot d’une autre personne ? Pfff.
Je dois dire que je traverse une zone de turbulence en ce moment. Entre ma mère qui ne veut plus me voir en peinture, mon père qui n’arrête pas les chantages. L’autre jour à son bureau, si ce n’était l’intervention de sa secrétaire particulière, on s’en serait venu aux mains. Et maintenant Bradley qui vient ajouter son grain de sel ! Bon lui, je ne sais pas ce qui lui arrive, mais il ferait vite de retrouver ses esprits.
D’habitude, c’est Debbie ma meilleure alliée dans ce genre de moments, mais elle a n’a pas fini de faire la miss de son côté. J’avais déjà dit que je réglerai son cas et j’attends samedi pour le faire. Enfin si confirmation, elle me donne.
En ce qui concerne l’affaire du entre guillemets vol, je n’ai rien trouvé comme parade jusqu’ici pour la régler. Tout ce que je sais, c’est que je ne rendrai pas le moindre sou à mon père. J’attends juste qu’une petite faille se glisse entre nous pour en profiter. Ça ne manque jamais, c’est Fulbert Elli après tout. Le roi des quatre cent coups.
Vous l’aurez sûrement compris, je n’ai pas commencé ses stages. Je ne sais même pas à quoi ces stages me serviront dans mon choix de filière, si ce n’est mon père et ses lubies.
Je suis perdu dans mes pensées lorsque Bradley arrive et récupère sa veste puis sort de la maison comme il était venu. Je soupire, il est même sérieux celui-là ? Je reste à ruminer l’affaire, je prends même mon téléphone pour me plaindre à Eddie en sachant que ce n’est pas gagné d’avance. Lui c’est monsieur grognon, il n’y a qu’avec sa crush qu’il se détend. Je lance un appel vers son numéro. Il le rejette ainsi que plusieurs autres, mais finit par décrocher avec mon insistance.
Eddie passif-agressif : qu’est-ce que tu veux ?
Moi : vous vous êtes passé le mot aujourd’hui en fait.
Eddie : c’est-à-dire ?
Moi : j’ai l’impression que tout le monde a une dent contre moi.
Eddie : je suis sûr qu’ils ont tous une bonne raison, tu fais chier parfois.
Moi : quand bien même, je ne m’enticherai jamais de la femme de mon frère.
Eddie : qui a dit ça ?
Moi : Bradley même en personne.
Flottement.
Eddie reprenant : il a sûrement une bonne raison de le penser.
Moi : ne t’y mets pas toi aussi.
Eddie : Armel franchement, tu tombes mal. Je te rappelle plus tard pour qu’on en discute de long en large.
Moi : tu ne rappelles jamais.
Eddie : promis cette fois, je te rappellerai. Je suis vraiment occupé là, à plus.
Click !
Weh sympa !! Lui quand c’est pour passer des heures à me saouler avec son amour en cachette, il a tout le temps du monde tchuiipp.
Quelques minutes, je me suis mis à zapper les chaînes à la télévision, juste pour me changer les idées. Finalement, je décide de faire un tour sur le net histoire de prendre les nouvelles de mes autres copines. Il faut dire que je les ai négligé ces derniers temps. Je passe donc les minutes qui suivent à faire le joli cœur à qui veut bien.
Tina : je te quitte seulement trente minutes et déjà, tu te retrouves à mentir à d’autres filles.
Je quitte l’écran des yeux pour la voir adossée à l’encadrement de la porte.
Moi : c’est comme ça que ton type se retrouve à être jaloux de moi.
Tina (balayant l’air d’un revers de main) : il a dû passer une mauvaise journée.
Moi : je l’espère bien.
Je la suis dans la cuisine où elle sort des légumes et du poulet à décongelé et d’autres ingrédients. En gros tout un arsenal qui pourrait desservir une cour royale.
Moi : on fête quelque chose ce soir ?
Tina (se tournant vers moi) : rien de particulier. Ton frère a commencé la guerre, je riposte.
Moi riant : chic riposte.
Elle a un rire de gorge.
Tina : je pensais que tu devrais te concentrer sur Debbie dorénavant ?
Moi : pour ça, il faut d’abord qu’elle ramène la balle à terre.
Tina : bien vu ! Au passage, tu l’emmènes où pour votre sortie ?
Moi (m’accoudant au plan de travail) : je n’arrive pas à me décider entre la bastille, Riviera Beach ou O ‘Lodge.
Tina : pourquoi pas Pure plage ? C’est un chalet romantique par excellence, sans doute la destination parfaite pour une sortie en amoureux le week-end.
Bradley entre dans la cuisine au même moment avec mes neveux qui se ruent sur moi en uniforme d’arts martiaux. Bradley nous lorgne et fait demi-tour vers les chambres sans un mot.
Moi soupir : il va faire ça longtemps ?
Tina évasive : ça va lui passer.
Elle s’attelle à sa préparation et je me retire au salon avec les garçons. On se fait des dessins animés manga jusqu’à l’heure du dîner qui se passe dans une atmosphère très tendue, je dois avouer. Ce qui fait en sorte que le lendemain, je me fais tout petit dans la maison, et même le jour d’après. C’est tard dans la nuit du vendredi que Debbie consent à m’envoyer un message de confirmation. Je souris et l’appelle direct.
Moi (lorsqu’elle décroche) : mi amor tu viens de faire ma journée là.
Debbie : sous réserve que nous rentrons à temps pour que j'aille travailler à la cave.
Moi : tu es obligée d’y aller ?
Debbie : oui
Moi : bon, c’est déjà bien que tu acceptes mon invitation.
Debbie : ok bonne nuit.
Moi : mais attends je…
Elle me raccroche au nez et je reste un moment à regarder à l’écran. C’est le bip d’une notification snap qui me fait réagir à nouveau. Je clique sur ça et vois qu’elle a posté des photos et des vidéos de nous dans sa story privée. C’est un compil de nos moments uniques, il y a même nos photos d’enfance avec un long texte romantique pour me souhaiter un joyeux anniversaire. C’est à ce moment que me rend compte qu’il est 00 h 01. Donc on est samedi là ? Ça y est, c’est mon jour, it's my birthday ! Deux décennies sur terre, ce n'est pas rien inh. Année-1 pour la majorité civile. Vous ne pouvez même pas imaginer le sourire que j'ai tapé en dormant.
King du 14 juillet ????????