Le repas
Write by Saria
***Cotonou***
***Chez Maïté***
***Anya***
J’observe ma fille, oui depuis toutes années, toutes les galères par lesquelles nous somme passées je considère Maïté comme ma fille… Je sais ce qu’elle fait comme métier et même si je n’approuve pas je comprends. C’est une bonne enfant que la vie n’a pas épargné mais elle avance, le sourire aux lèvres. Ce soir je la voyais agir comme un automate, l’air absent. J’essuie mes mains contre mon tablier et m’assois à la table de la cuisine.
Moi : Et si tu me disais ce qui te tracasse ?
Maïté : Il m’a invité à manger
Moi (dépassée) : Qui ça ?
Maïté : Le nouveau docteur du Centre Spécialisé…et j’ai accepté !
Moi : Quoi ?!
Maïté : T’inquiète je suis la première surprise ! Je ne sais pas d’ailleurs pas pourquoi…Je n’arrive pas à me l’expliquer...
Moi : Ah ça ! J’ai hâte de rencontrer ce garçon…Il faut qu’il m’explique comment il a réussi cet exploit !
Elle me regarde d’un air faussement exaspéré et sors de la
cuisine en balançant sa tête. Elle fuit la discussion comme à chaque fois qu’on
en arrive à parler de sa vie. J’espère que ce jeune homme est bien comme il
faut, je ne voudrais pas la ramasser à la petite cuillère comme avec l'autre vaurien là.
***Une semaine plus tard***
***Maïté***
Je n’avais toujours pas précisé à Tobi un jour pour notre fameux déjeuner. Toute la semaine j’ai senti son regard sur moi mais il s’est abstenu de tout commentaire. Je me suis dit qu'il a zappé et c'est tant mieux pour moi.
Je venais de finir ma dernière animation avec les tous petits (3 à 5 ans), on était samedi. Et les samedis je consacre juste ma matinée au centre, l’après-midi je pouvais vaquer à mes occupations. C’est donc heureuse que j’attrape mon fourre-tout, je n’avais pas pris la voiture car Loan était à la maison. En me retournant je bute sur un torse, je me dégage rapidement en reconnaissant la personne…Tobi
Moi : Mais que faites-vous ici un samedi ?
Le médecin du centre ne travaille pas ce jour-là.
Tobi : Je suis venu vous emmenez manger comme convenu
Moi : Mais…
Tobi : Je vous ai laissé le loisir de choisir mais c’était comme si vous aviez été frappé d’amnésie…donc j’ai choisi
Moi : Et si je refuse de vous suivre
Il me fait un large sourire et une lueur que je n’ai encore jamais vue dans son regard s’allume, il avance d’un pas et moi je recule…
Tobi : Je vous porterez sur mon épaule et traverserez tout le centre ainsi…Je ne suis pas sûre que vous vouliez donner un tel spectacle…Non ?
Moi : Pff ! C’est bon on y va !
Il me guide vers sa voiture sur le parking et me tient la portière. Eh ben ! Je m’installe confortablement et monsieur me demande si la température me convient, je hoche la tête décidée à ne pas lui parler. Il démarre direction le centre-ville de Cotonou. Nous arrivons devant une maison cossue au quartier résidentiel pas loin de la Pharmacie Camp Guézo. Je descends, il sonne et un jeune homme vient ouvrir. Tobi me prend par la main et me guide dans l’allée qui monte vers la maison.
C’est une vieille maison pleine de plante et de fleurs, le séjour était bien décoré avec des meubles anciens, de jolis tableaux accrochés au mur, le plafond était très haut mais tout était propre et bien entretenue. Il me prévient qu’il me laisse quelques minutes seule. Intriguée je regarde autour de moi avec de grands yeux. Je me sens bien ici, la maison est agréable et surtout chargée d’histoire. Mon hôte revient et nous passons à la salle à manger, un peu en hauteur para rapport à la salle de séjour. Au menu de la salade, du riz, de la banane plantain cuit au four, du poisson braisé, une sauce au oignons et du piment vert. Je me sers et Tobi attend que je prenne la première bouchée et quand il réalise que j’aime il souffle un grand coup.
Moi : A voir votre réaction on dirait que c’est vous qui avez cuisiné
Tobi (sérieux) : C’est moi
Moi : lol
Tobi : Pourquoi ? Sachez jeune fille que je suis un cordon bleu !
J’éclate de rire tellement il semblait vexé par ma remarque. Il me regarde la bouche ouverte comme s’il était choqué de m’entendre rire.
*** Tobi***
Wow ! Son rire est divin ! J’étais comme subjugué. Ainsi, elle a de l’humour j’aime ça.
Moi : Maintenant j’ai gagné le droit de te tutoyer
Maïté : Pourquoi ?
Moi : 1 Tu as accepté de venir chez moi, et 2 tu viens de te payer ma tête…Voilà pourquoi !
Maïté : Ok
Moi : Ok ? Juste ça ? Pas de palabres, ni d’arguments c’est étrange!
Maïté : C’est parce que je voudrais savourer mon repas en paix…J’adore la banane plantain sous toutes ses formes
Moi : Gourmande va !
Pour toute réponse elle me tire la langue et hausse les épaules. Hum ! Et avec ça elle n’avait pas encore bu du vin… le repas se passe dans une bonne ambiance. On en était au dessert lorsqu’elle oriente les questions sur le plan personnel.
Maïté : La maison est vraiment belle…elle est ancienne n’est-ce pas ?
Moi : Oui…J’y ai passé toute mon enfance…avec ma mère.
En fait mon père est un riche commerçant nigérian qui a épousé ma mère en
seconde noces… Nous le voyons très peu mais quand il était là c’était un père
génial. Je suis fils unique…Elle est restée dans l’ombre de cet amour toute sa
vie. Elle est morte il y a 10 ans. Alors je suis parti j’étais incapable de
faire mon deuil ici. J'ai parcouru le monde, vu et fait des choses...Puis le destin m'a ramené ici.
Maïté : Je suis désolée
Moi : Il ne faut pas…J’ai reçu énormément dans ma vie en termes d’amour et de tendresse… Mon seul regret c’est qu’elle ne puisse pas voir l’homme que je suis devenu.
Maïté : Et ton père ?
Moi : Il est très vieux maintenant, il vit au Nigéria. Nous nous voyons rarement même si on se parle au téléphone assez souvent. Et toi ?
Maïté : Moi…Il n’y a rien à dire…Sur mes origines je ne sais pas grand-chose, je suis un mélange qui a grandi à l'orphelinat... Ma famille aujourd’hui se résume à Anya et Loan.
Moi : Et le père de Loan ?
Maïté : Parti avant sa naissance, il n’en voulait pas…Trop marier je crois.
Elle passe rapidement dessus. Alors j’insiste
Moi : Il aide au moins à la prise en charge du petit
Maïté : Non ! Je travaille et cela me permet de bien m’occuper de mon fils.
Je la sens mal à l’aise et commence à se refermer comme une huître. Je ne pouvais pas laisser ça se faire. Il n’a pas été facile de l’amener à ce niveau. Pris d’une inspiration je me lève et lui tend la main.
Moi : Viens…Je vais te montrer quelque chose
Elle me regarde d’un air dubitatif avant de placer sa main dans la mienne…Nous traversons le jardin luxuriant, la végétation est presque à l’état sauvage, on entendait le chant de quelques oiseaux. Nous débouchons sur un patio il y avait des fauteuils en rotin et…une petite fontaine, quelques pigeons venaient barboter dans l’eau. Je l’entends s’exclamer :
Maïté : Wow ! C’est beau !
Moi : Tu aimes ?
Maïté : Oui beaucoup !
Moi : C’était le coin préféré de ma mère, alors j’y ai fait faire une fontaine. C’est apaisant, ici je suis tranquille, en harmonie avec le monde.
Elle se tourne vers moi rayonnante, nos regards se croisent, l’air se charge d’électricité. Je me rapproche d’elle et pour une fois elle ne recule pas. Je murmure pour moi-même
- C’est con d’avoir donné ma parole que ce serait juste un repas…sans plus
Maïté (chuchotant) : Moi je n’ai rien promis.
Elle se hisse sur la pointe des pieds et pose ses lèvres sur les miennes. Alors je lui prends la nuque pour approfondir le baiser. Je lui mordille la lèvre inférieure, elle gémit alors j’introduis ma langue dans sa bouche. Elle passe ses bras autour de mon cou. Combien de temps nous restons ainsi, je n’en sais rien. Mais je suis au paradis et le reste ne compte pas.
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