Monsieur Konaté Khalil
Write by Les Chroniques de Naty
Chapitre 24
—Bonjour monsieur !
S’il vous plait je suis à la recherche de la pharmacie Notre Dame de la
Providence. Pouvez-vous me l’indiquer ?
Le concerné me regardait un petit sourire aux lèvres.
—Ah ma vieille mère si je te montre le coin là tu vas me là
hein (donnez quelque chose en retour dans le jargon ivoirien)
—Bien sûr que tu auras quelque chose en retour. Répondis-je.
Si tu me donne le renseignement dont j’ai besoin il n’ya pas de problème.
—D’accord ! Mais c’est un peu loin hein.
—Dans ce cas monte et tu m’indiqueras à partir de la
voiture. Parce que je ne maitrise pas trop le quartier, alors je préfère que tu
viennes avec moi.
—Ya pas drap (il n’y a pas de soucis). Et puis qui est fou
pour refuser de monter dans une si belle voiture ; dit-il en éclatant de
rire.
Il prit place sur le siège passager. Ce jeune homme me
faisait bien rire. Il est comme la plus part des jeunes ivoiriens, prêt à
rendre service mais jamais gratuitement. En principe un renseignement ou une information de ce genre
est gratuite, mais chez nous les ivoiriens tous les moyens sont bons pour se
faire un peu de sous.
Tout compte fait, il m’indiqua ladite pharmacie, et 20
minutes plus tard je me garais à l’entrée. Je lui remis un billet de 2000fcfa.
Il me remercia avec effusion et s’en alla. J’aurai bien proposé de le redéposer
mais la situation était tout autre.
Je priais pour que ce Konaté soit là ! Je parcourrais
la pharmacie du regard, elle a une belle façade. L’extérieur est très bien
entretenu avec de petites plantes poussant çà et là. L’intérieur est encore
plus joli et agréable ; il se dégage de bonnes odeurs. L’endroit ressemble
plus à une parfumerie qu’a une pharmacie ; il ya plusieurs rayon. Par
ailleurs les vendeuses et auxiliaires en pharmacie sont toutes plus belles les
unes que les autres. Décidément cet endroit ressemble à tout sauf à une
pharmacie ; et à voir leur maquillage et leur accoutrement, ça me fait
penser à une agence de mannequinat.
Je m’approchais de l’une d’elle pour demander après le
pharmacien.
—Monsieur Konaté n’est pas encore arrivé madame, mais que pouvons-nous
faire pour vous aider ?
—En fait c’est au pharmacien que je voulais parler. Euh dites-moi
il en a pour longtemps ?
Elle regarda sa montre bracelet avant de répondre.
—Je ne crois pas ! Mais si vous tenez tant à le voir,
vous pouvez patienter.
Elle me montra un siège sur lequel je pris place en
attendant l’arrivée de ce cher monsieur. Pendant ce temps je me mis à lire un
magazine de santé pour essayer de tuer le temps. Après une bonne trentaine de
minutes d’attente, j’entendis la voix de la jeune dame m’ayant reçu m’appeler.
—Madame ! Madame ! Le pharmacien vient d’arriver.
Je vis un homme grand de teint noir s’approcher de moi. Ça
doit surement être le monsieur en question pensais je intérieurement.
—Bonjour madame lança-t-il en asseyant à mes côtés. Anna m’a
dit que cela fait un bon bout de temps que vous m’attendez déjà ! Que puis-je
faire pour vous ?
Il me tendit une main bien manucurée que je serais. Je
comprends un peu pourquoi ma sœur est tombée amoureuse de lui. C’est un bel
homme, bien entretenue de surcroit. Il a une voix grave, qui en même temps est
rassurante. Son teint d’un noir ébène est très brillant, il se dégage de lui un
charme fou. Et quand il sourit, deux belles fossettes se creusent sur ses
joues.
Il ne ressemble vraiment pas à un lâche, encore moins à un
irresponsable qui fuit devant les problèmes. Alors pourquoi avoir enceinté ma
sœur et refuser d’assumer la paternité ? Mais comme le dit si bien l’adage,
l’habit ne fait pas le moine ; cela dit un loup peut bien revêtir la peau
d’un agneau mais il restera toujours loup donc agira en tant que tel.
—Bonjour monsieur Konaté. Répondis-je avec mon plus beau
sourire. Oui en effet je vous attendais depuis. Je veux vous parler d’un sujet
important. Il s’agit de Mouna.
Dès qu’il entendit ce nom, son visage blêmit, et toute son
assurance le quitta.
—Qui est Mouna ? Je… je ne connais pas de Mouna dit-il
en bégayant.
—Evitez de jouer à ça avec moi. Je suis sa sœur, et je sais
pertinemment ce qui se passe ou ce qui s’est passé entre vous. N’avez-vous pas
honte d’avoir gâchée la vie d’une pauvre innocente en voulant satisfaire votre
libido de vieux pervers ?
—Ecoutez madame, l’endroit et le moment sont assez mal choisis
pour discuter de ce genre de chose. Alors nous pourrons si vous le voulez bien
prendre rendez-vous un autre jour pour en parler plus calmement. Essaya-t-il de
négocier.
—Vous vous foutez de moi n’est-ce pas ? Est-ce que vous
avez eu honte de jouer avec les sentiments de ma sœur ? Vous avez non
seulement brisé son cœur, mais vous êtes allez plus loin en lui gâchant la vie.
La mettre enceinte et prendre ensuite prendre la poudre d’escampette comme un lâche.
Dis-je hors de moi. Et le pire c’est que vous êtes marié, mais votre statut
matrimonial ne vous a pas empêchez de vous abaissez à ce genre de bêtises.
Alors épargner moi votre charabia. Je n’irai nulle part, toute cette histoire
se réglera ici et aujourd’hui même.
Je commençais à élever la voix et les clients de la
pharmacie ainsi que le personnel nous regardaient en coin. Il me suppliait du
regard et voulus négocier avec moi.
—Je vous en conjure ne faites pas de scandale ici ;
nous en parleront aujourd’hui mais pas ici s’il vous plait. Je suis un homme
marié et j’ai des enfants. En outre nous sommes sur mon lieu de travail et la
plupart des membres de mon personnel connait bien ma femme. Alors je vous en
prie allons-nous en d’ici. Implora-t-il.
Je savais bien que je l’avais à ma merci. Et je comptais
bien en profiter ; j’ai promis de lui gâcher également la vie comme il l’a
fait avec ma sœur. Alors je ne compte pas m’arrêter en si bon chemin ; il
devait payer cher ce qu’il a fait à Mouna. Non seulement elle compte avorter,
mais après ça elle ne sera plus jamais la même. Elle deviendra une toute autre
personne ! Elle sera déçue des hommes et sera à coup sûr aigris. Mais le
pire dans cette histoire, c’est qu’elle pourra garder des séquelles durant
toute sa vie.
A cet âge on est sensé profiter de sa jeunesse, sortir avec
ses amis et avoir un petit copain avec qui on partagera tous nos délires. Mais
ce vieux pervers a privé ma sœur de tous ces petits plaisirs de la vie ;
car elle ne verra plus jamais les choses de la même manière.
—Si vous pensez que vos paroles en l’air me feront changer
d’avis alors c’est que vous me connaissez très mal monsieur Konaté. Je compte
bien vous faire regretter votre lâcheté. Espèce de vieux dégueulasse criaient
je pour que tout le monde puisse bien m’entendre. Ce monsieur que vous respectez
tous ici n’est qu’un salopard qui a osé enceinter ma petite sœur qui a 18 ans.
Et il a pris le soin de lui cacher qu’il est marié et déjà père de deux
enfants. Et pour couronner le tout, il refuse la paternité de la grossesse en
lui disant d’aller chercher le père de son batard ailleurs.
L’assemblée écoutait bouche bée. Les gens adorent ce genre
de mélodrame et je suis certaine que cette histoire sera leurs choux gras
pendant un bon moment, et je pourrai également jurer que sa femme entendra
parler de cette infidélité.
Toujours est-il qu’il gardait la tête baissée et ne disait
rien.
—Vous voyez bien qu’il ne peut pas parler, renchéris-je.
C’est tout simplement dû au fait que ce que je dis est la pure vérité. C’est un
gros pervers dégoutant. Et j’espère bien que sa femme aura vent de cette
histoire, pour qu’elle sache à quel genre d’homme elle a affaire. Et puis
monsieur Konaté dis-je en me retournant vers lui, ma sœur a décidé de se faire
avorter, alors prier Dieu pour qu’il ne lui arrive rien de bien grave sinon croyez-le
ou non, vous en payerai les frais. Et quand je parle de frais je ne fais même
pas allusion au matériel, je veux juste dire que vous serez l’unique
responsable de ce qui lui arrivera. Quoi qu’il en soit, vous aurez l’avortement
de Mouna sur votre conscience, et j’espère que vous en ferez des cauchemars.
Sans plus un regard pour lui, je sors de la pharmacie.
J’entendais les gens murmurer ; et j’étais satisfaite. Voici une bonne
chose de faite.
*
**
***
Nous sommes le 18 Août aujourd’hui. Et c’est le jour du départ
de mon Léon pour les Etats-Unis. Son vol est prévu pour 22h30 et je dois être à
l’aéroport à 18h. Ces derniers jours ont été des plus stressant pour moi, il ya
d’une part ma sœur qui me fait la tête parce qu’elle a su le scandale que
j’avais provoquée à la pharmacie de cet idiot, et elle aussi comme une vraie
idiote le défend. Elle oublie que je fais tout ça pour elle ; ce lâche n’a
pas hésité à l’appeler pour lui raconter tout ce qui s’est passé. Mais même après
tout ça, il n’a pas reconnu la grossesse ; il reste cantonné sur sa
position. Toute cette histoire me met vraiment hors de moi. Après le départ de Léon,
c’est promis je chercherai la maison de cet homme et là c’est son mariage que
je prendrai plaisir à bousiller.
Et puis il ya Aly qui rentre à des heures vraiment indues ;
et j’ai remarqué que c’est depuis que ‘’ son amie’’ est venue qu’il a pris
cette mauvaise habitude. Je me demande bien ce qu’il fait dehors pour rentrer
aussi tard. Il m’a présentée son amie en question. C’est une métisse ivorio-tunisienne
avec laquelle il a fait ses classes en Tunisie. Elle est venue en prospection
en Côte d’Ivoire où elle aimerait bien étendre ses activités de ventre de
produits de beauté fait à base de plantes naturelles.
Donc c’est Aly qui s’est chargé de lui faire connaitre les
potentiels rouages du terrain. Il passe le plus clair de son temps avec cette dernière ;
elle aussi est toujours collée à son dos. Je ne la supporte vraiment pas. Elle
ne fait que lui tourner autour en minaudant comme une chatte en chaleur. Et le
comble, c’est qu’il avait même proposé qu’elle vienne rester à la maison avec
nous, cela lui évitera de payer l’hôtel et lui ferra des économies. J’ai bien
faillir avoir une attaque lorsqu’il m’en a parlé ; je m’y suis opposer.
Elle a de la famille à Abidjan, alors à défaut de loger à l’hôtel
elle peut bien vivre chez ses parents ou autres connaissances. Pourquoi venir
troubler ma quiétude ? Je sens bien que je ne tarderai pas à la remettre à
sa place. Elle va jusqu'à appeler mon mari par des petits noms comme ‘’mon
chou’’ ou encore ‘’habibi’’ (mon amour en arabe). Et ce dernier ne semble
nullement gêné par cette situation, au contraire ça l’amuse beaucoup. Mais pour
l’instant je n’en fais pas cas ; ils vont souvent jusqu'à se parler en
arabe devant moi. Et ça m’énerve encore plus dans la mesure où je ne comprends
rien à cette langue ; alors je pense qu’ils me critiquent, surtout quand
ils éclatent de rire comme deux complices, j’ai l’impression de ne pas exister.
Mais tout ceci prendra fin bientôt, parce que je compte bien lui faire clairement
savoir qu’elle n’est plus la bienvenue chez moi.
J’étais prête pour l’aéroport, et j’essayais d’appeler Léon,
mais on me disait toujours que mon correspondant ne peut être joint. Je pense
que c’est surement un problème de réseau. Je ne pouvais pas me rendre à l’aéroport
sans avoir convenue de quelque chose avec lui. Je sais seulement que nous
devons y être à 18h et il est déjà 17h…
« Votre correspondant ne peut être joint, merci de
laisser… »
Je coupe énervée ; déjà 30 minutes que j’essaie de le
joindre en vain. Bon je ne peux pas non plus rester là à ne rien faire. Je décide
alors de me rendre chez lui ; peut-être qu’il est trop occuper à ranger ses
affaires et qu’il n’a pas eu le temps de charger son téléphone. Ou encore
celui-ci s’est éteint sans qu’il ne le sache. Je me rends alors chez lui ;
à mon arrivée, je ne vois aucune lumière. La porte est fermée à clef et la
maison semble vide. Heureusement que j’ai un double de clef, mais lorsque
j’essayais de l’introduire dans la serrure, je n’y arrivais pas. J’insistais
pendant encore un moment quand je me rendis compte que la serrure a été
changée.
Mon cœur fit un bon dans ma poitrine. Mais que se passet-il ?
Je passe une main fiévreuse sur mon visage et je me rendis compte que je
transpirais malgré la douce fraicheur du soir. Je restais là à regarder la
porte comme si j’attendais qu’elle réponde aux questions que je me posais.
Je sursaute de peur lorsqu’une main se posa sur mon épaule.
—Désolé de vous avoir fait peur madame ! me dit le
jeune homme en face de moi. Mais depuis je vous vois arrêtez ici et j’ai eu
peur donc je viens aux nouvelles. Vous cherchez quelqu’un ?
—Oui en effet je cherche quelqu’un. Le jeune homme qui
habitait ici, il s’appelle Léon vous le connaissez ?
Son sourire s’élargit quand il entendit le nom de Léon !
Je remerciai Dieu intérieurement, cela sous entends qu’il le connait.
—Bien sûr que je le connais. Dit-il. Je suis le nouveau locataire
de ce studio, l’ancien c'est-à-dire Léon n’est plus là.
Mon cœur battait de plus en plus fort ; j’eus peur de
comprendre et je ne voulais pas savoir la suite. Mais je me surpris à demander
s’il a une idée de l’endroit où Léon pouvait bien se trouver.
—Ah mais il est parti aux States (Etats-Unis).
—Depuis quand ? Ce fut la seule chose que je pouvais
demander.
—Hum je ne sais pas quand exactement, mais je pense que ça
peut valoir une semaine qu’il est parti. Il m’a permis d’emménager bien avant
parce qu’il ne dormait plus trop dans la maison. Et j’ai même pu profiter…
Je n’écoutais plus ce que me disait le jeune homme. Je lui
donnais dos et marcha vers ma voiture. Mon cerveau refusait d’assimiler
l’information. Je ne voulais rien entendre ni comprendre quoique ce soit. Il
fallait que j’en aie le cœur net. Il faut absolument que je puisse bien me
renseigner et savoir si ce que je viens d’apprendre est faux ou… vrai.
Il ne faut vraiment pas que cela soit vrai sinon je risque
de faire un infarctus. Mais pour l’instant je décide de me calmer. Je conduisis
comme une malade jusqu’au domicile de l’oncle de Léon. Ce dernier fut surpris
de me voir, mais me salua néanmoins avec respect et considération. Et à la
question de savoir où était Léon, sa réponse me fit l’effet d’une douche froide
en plein mois d’hiver.
—Eh ma fille il parait que Léon est parti aux Etats-Unis.
Dit-il avec douleur. Moi-même je ne le savais pas hein. C’est dans la bouche
des gens que je l’ai appris. Sinon il ne m’a rien dit, même pas un petit au
revoir. Après tout ce que j’ai fait pour lui, c’est comme ça que ce petit
ingrat m’a remercié. Vraiment les hommes de maintenant ne savent pas être
reconnaissants envers ce qui les a aidés quand ils étaient dans le besoin. Mais
dis-moi vous étiez toujours ensemble, comment se fait-il que tu n’en sache
rien ?
Je regardais le vieux sans le voir. Je ne pus répondre à sa
question, car sans le savoir il venait de tout dire. L’ingratitude dont
certaines personnes font preuve est parfois déconcertante. Je n’en croyais ni
mes oreilles ni mes yeux. Ainsi donc Léon est parti sans me voir, sans même me
dire adieu.
Il m’a abandonnée…