Part I. Un rêve qui devient réalité

Write by Owali

Fabrice Mbiwa


Je tournai à fond la poignée d’accélération de ma mobylette en remontant à vive allure l’avenue Boganda pour me rendre à l’Hotel Bangui où m’attendait un client.


PIN PINNNNNN


Je klaxonnai sur le chauffard de taximan qui s’est arrêté brusquement devant moi. Après avoir réussi à manœuvrer pour éviter la collision juste à temps, je le dépassai en l’insultant copieusement.


Quelques minutes plus tard je garai dans le parking de l’hôtel et me dirigeai vers la chambre qui m'avait été indiquée. Je cognai et fus invité à entrer. En poussant la porte je tombai sur un homme en costume et lunette de soleil qui me demanda de lever mes mains pour effectuer une fouille au corps. Je m'exécutai et après m’avoir palpé et s’être assuré que je n’étais pas armé il me laissa passer en m’indiquant le siège où je devais m’installer en attendant que le « Boss » arrive. 

Je posai mon sac à dos sur la table et sortis mon téléphone pour m’occuper.


Malgré les problèmes de réseau qu’il y avait au pays, j’arrivai tant bien que mal à me connecter à internet et allai tout de suite consulter mes mails pour voir si de nouvelles proies avaient mordu à l’hameçon.


BINGO !


Deux femmes que je travaillais depuis quelques mois déjà m’avaient envoyé leurs premiers westerns et une autre « habituée » m’avait fait un Moneygram.

Bien, très bien !

Je sortis mon carnet et notai toutes les infos car j'avais bien l'intention de récupérer l’argent tout de suite après ce rendez-vous.

 

« Bip Bip »

 

11.21 [Ange] : La baleine a mordu, ta vie va changer mon frère !


Mon visage s’illumina à la lecture de ce message que je n’espérais plus. Je m’apprêtai à le rappeler sur le champ mais le bruit de la porte qui s’ouvrit derrière moi me rappela à l’ordre. Je me levai d’un bond et me retournai vers la personne que j’étais venu voir en prenant soin de bien ranger mon téléphone dans ma poche.


— Bara âla, boss ! (Bonjour Boss)

— Singîla ! Töngana nye ? (Merci ! Comment vas-tu ?)

— Innn ! Mbï yeke sêngê ! Singîla ! (Je vais bien, merci !)

— Bien est-ce qu’on peut faire vite là, je suis un peu pressé aujourd’hui.

— Oui oui il n’y a pas de problème. On avait dit quoi déjà, le double c’est ça ? Demandai-je en récupérant mon sac à dos.

— C’est bien ça !


Il claqua des doigts et son espèce de garde du corps apporta une mallette, qu’il ouvrit et tourna dans ma direction pour me permettre de compter les liasses qui s’y trouvaient. En 5 min c’était plié, il faut dire que depuis le temps je commence à être habitué.


— Le compte est bon, vous avez une deuxième mallette je suppose.


Il claqua à nouveau des doigts et un deuxième attaché case fut ouvert à côté du premier.

Je sortis les billets qui se trouvaient dans mon sac à dos et après lui avoir tendus une liasse pour qu’il s’assure de leur parfaite ressemblance avec les vrais, je procédai au transfert des 6 millions de Francs Fca.


Une fois la transaction terminée, je sortis de cette chambre sans demander mon reste. 

Un coup d’œil dans les alentours, il ne semble pas y avoir de guet-apens mais n’étant jamais trop prudent, je récupérai mon arme que j’avais au préalable planqué derrière le pot de fleur qui se trouvait à deux pas de la porte.


Je me sentis plus rassuré. Je sautai sur ma mobylette et démarrai en trombe pour aller rapidement mettre les sous en lieu sûr au QG situé à Gobongo. Une fois ma course terminée et ma commission récupérée, je m’arrêtai dans les agences pour récupérer les sous qu’on m’avait envoyé avant de reprendre la route et traverser toute la ville afin de me rendre au domicile de Ange à Pétévo. 

Avec la nouvelle qu’il venait de m’annoncer, ça valait le coup que gaspille mon carburant pour l’entendre de vive voix.


Après 2 h heures de bataille dans les embouteillages pour ne parcourir que dix petits kilomètre, je garai enfin devant sa cour où je trouvai ses quatre enfants en train de jouer au foot avec les voisins. Je les salue et rejoins leur père confortablement installé sur sa terrasse, un verre à la main.


— Aaahhh cher ami ! Je ne m’attendais pas à te voir ci tôt ! Je me demande bien quel bon vent t’emmène ? Me lança-t-il en souriant de toutes ses dents.

On se salua chaleureusement en se cognant les têtes puis il m’invita à m’installer à ses côtés.

Kangoya ? (Vin de palme) Me proposa-t-il

— Non non, de l’eau c’est bon pour moi, je dois retourner travailler.

— Ah ! Bientôt tu n’auras plus besoin de faire tout ça ! Francinneeee


Il appella sa deuxième femme qui apparut quelques minutes plus tard, uniquement vêtu d’un tricot qui laissait entrevoir les pointes de ses seins et d’un pagne ne dissimulant rien de ses courbes généreuses. 

Je détournai mon regard à cette vue.


— Iiinnhh Ange ? Oh Balaô Fabrice?

— iinnhh tôngasô ! Répondis-je distraitement.

— Apporte lui un verre d’eau s’il te plait, lui demanda son mari.


Elle disparut aussitôt avant de se représenter avec un plateau sur lequel était couché un verre et une bouteille d’eau. Elle se mit à genoux près de moi et me servit en faisant exprès de laisser sa bouche entrouverte et gonfler sa poitrine à chaque mouvement de sa cage thoracique. Ses gestes qu’elle voulait innocents étaient loin de l’être mais visiblement j’étais le seul à y faire attention car son mari, concentré sur son téléphone ne remarqua rien de sa comédie.

 

— Singîla ! Lui indiquai-je pour qu’elle arrête de me servir.

Elle me lança un regard plus que suggestif avant de se relever et de disparaître dans la maison, en ne manquant évidemment pas de se déhancher outrageusement. Pfff cette femme est le diable en personne !

 

— Regarde ça mon ami ! Me lança Ange en me tendant son téléphone.


Je remontai le fil de la conversation du jour et là je découvris que ce que nous préparions depuis de long mois était enfin en train de se concrétiser.

Dès que je suis tombé sur son profil meetic, je ne sais pas pourquoi mais j’ai tout de suite eu un flash, quelque chose me disait que celle-là c’était la bonne.

Célibataire, la trentaine, un peu mal dans sa peau et désespérée au point que sa présentation ne se résume qu’à un « cherche tout simplement mon âme-sœur », je n’ai pas voulu prendre de risque et ai mis mon meilleur pote sur le coup pour être sûr de l’avoir.


Ange, on le surnomme « 1% » car c’est son pourcentage d’échec en matière de drague. Il est très cultivé et sait emballer toutes sortes de femme grâce à tous les livres qu’il lit. Moi ayant cassé la craie en classe de 5ème je n’aurai eu aucune chance pour séduire une femme de cette catégorie. Alors je lui ai demandé de se faire passer pour moi, de me présenter sous un beau jour quitte à m’inventer une vie pour que je puisse enfin réaliser mon rêve : Quitter ce pays qui ne m’a apporté que des malheurs et aller enfin me reconstruire loin de toute cette misère.


— Farânzi ! Je vais vraiment aller à Farânzi !

— Oui mon ami ! Elle a informé son amie et est en train de faire les démarches pour avoir une date pour votre mariage.

— Woaw ! 1pourcenttttttt ! Non tape la mon ami, tu es trop fort !!


On s’enlaça en riant aux éclats avant de trinquer à cette bonne nouvelle.


— Bon maintenant il va te falloir faire rapidement les démarches pour avoir ton passeport, faire ton visa et payer ton billet !

— Ouii non mais ça ce n’est même pas un problème, je suis dans le système, je passe seulement un coup de fil et mon passeport sort à la minute avec ma photo sans que je n’ai eu a leur donner ça ! Kiakiakia


On plaisanta encore un moment puis je pris congé de lui en lui laissant un sa commission pour son travail.


Le sourire aux lèvres, je démarrai en pensant à ma futur femme Margot…

J’avais à peine quitter la cour de Ange et roulai entre celles des maisons voisines quand j’aperçu la silhouette d’une femme, les mains aux hanches me barrant la route. A son accoutrement, je n’eus pas de mal à deviner de qui il s’agissait. Je ralentis et elle vint à ma rencontre d’un pas lent et hésitant.

Pfff qu’est-ce qu’elle me veut encore ?


— Fabrice pourquoi ne réponds-tu plus à mes appels ? Me demanda-t-elle une fois arrivé à mon niveau

— Pourquoi je devrai t’appeler ?

— Mais je ne sais pas, pour quoi se voit encore comme la dernière f…

— Eshh ! Ferme ta bouche ! Lui intimai-je en mettant ma main sur sa bouche tout en scrutant les environs pour m’assurer d’aucun curieux ne nous avait entendu. Ce qui s’est passé était une erreur, continuai-je en parlant moins fort. Ça ne doit plus se reproduire, tu as compris ?!

— Mais…

— Plus un mot à ce sujet, tu m’as bien entendu ! Efface de ta mémoire tout ce qui a pu se passer entre nous, je dois voyager moi, je vais aller en France !

— Han ?! Tu vas m’emmener avec toi ?!? Demanda-t-elle avec un large sourire.


Non mais qu’elle rêveuse ! Elle croit que je vais emmener une villageoise comme elle où ça ???


— Pardon Francine, laisse-moi passer, je dois aller travailler ! Fis-je en la poussant sur le côté et en redémarrant ma mobylette.

— Mais mais… réponds moi au moins… tu ne vas pas m’abandonner ici alors que je porte ton enfant quand même !

 

Je bloquai net dans ma lancée. Elle a dit QUOI ?!?

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