PROLOGUE

Write by Owali

PROLOGUE


Margot Bonnat


« Chatelet – Les Halles, Attention à la marche en descendant du train… Please mind de gap between the train and the platform… »


Je me levai, m’assurai que mon sac était bien fermé avant de le porter à mon épaule et de jouer des coudes pour pouvoir sortir de la rame. Je remontai les marches, traversai les longs couloirs et tapis roulants, descendis des marches, tournai à gauche, remontai sur l’escalier roulant et me retrouvai enfin à l’extérieur.


Samedi 10h. 


Les échoppes ouvraient à peine et on pouvait encore admirer l’alignement désordonné des  pavés sur le sol. Dans quelques heures, ce sera noir de monde ici et les odeurs de fritures des fast-food mêlées aux fumés de cigarettes plus ou moins légales auront remplacées l’air frais et pur que je respirai en ce moment même. 


Enfin, frais et pur… relativisons la chose. Nous étions à Paname tout de même et non dans mon village natal du fin fond de la Creuse. Disons alors que l’air était juste respirable sur cette rue piétonne que je traversai pour me rendre dans le café rue des Lombards où Sophie ma meilleure ami m’attendait sur la terrasse, une cigarette à la main.


— Tu devrais arrêter ces cochonneries ma puce, ça te tuera un jour ! Lui lançai-je en guise de salutation en lui faisant deux bises.

— Tu devrais apprendre à être à l’heure, ça te jouera des tours un jour, me répondit-elle du tac au tac.

— Pfff désolé j’ai un  peu traîner au téléphone avec Fab, j’ai pas vu le temps passer.

— Hum ! Encore et toujours ce Fab, ça t’arrive de passer un jour sans lui parler ?

— Non et d’ailleurs tu me fais penser qu’il faut que je lui dise que je suis bien arrivée hihihi

— N’importe quoi ! Vas-y je vais demander à ce qu’on nous serve. Je ne veux pas me prendre la tête avec toi en ayant le ventre vide.

 

Sans plus faire attention à ses propos, je sortis mon téléphone et me connectai sur whatsapp pour envoyer un message à mon doudou. Il me répondis dans la minute qui suivit et sans  nous en être rendu compte nous nous étions lancé dans une de ces discussions d’amoureux dénuées de sens mais faisant tellement de bien au cœur et au corps que s'en était quasiment devenu une drogue.


— …et toi ? Eh ho ! Margot tu m’écoutes ?!?

— Hein ? Hein ? Quoi ? Pardon, fis-je en détachant ma tête de mon écran tout en laissant mes doigts continuer à taper sur mon clavier.

— Qu’est-ce que tu prendras ? Me demande Sophie d’un air agacé

— Heu… comme d’habitude hamburger, frite, bacon, œufs brouillés, jus d’orange... la total quoi, dis-je du traite au serveur avant de reporter mon attention sur mon téléphone.

— Ce serait trop te demander d’être avec moi la ?

— Deux minutes s’il te plait…


Je m’excusai auprès de Fab en lui promettant de le recontacter très vite. 

Il comprit et me souhaita de passer un bon moment… rho il est vraiment trop chou !

C’est avec un large sourire sur les lèvres que je me résignai à ranger mon téléphone pour enfin me concentrer sur mon brunch.


— Voilà ! Je suis là, contente ?


Sans me répondre, elle écrasa son mégot dans le cendrier et me regarda d’un air grave.

— Margot, il faut vraiment que tu te ressaisisses. Cette situation ne peut plus durer.

— De quoi est-ce que tu parles ?

— Je te parle de cette histoire de Fabrice. Regarde toi, tu passes toute ta vie sur ton téléphone depuis que tu l’as rencontré. Il faut que tu arrêtes ton délire, c’est du vrai n’importe quoi tout ça!


J’arquai un sourcil de surprise.


— Je peux savoir ce que tu lui reproches au juste ? Tu n’as même jamais pris la peine d’essayer de le connaitre…

— Dans quel intérêt tu peux me le dire ? Si tu as envie de te bercer d’illusion ça te regarde, moi je ne suis pas là pour t’encourager dans les bêtises ! Tu as 30 ans ma vieille, il serait temps que tu envisages d’avoir une relation sérieuse pour une fois dans ta vie, une vraie je veux dire, pas un de tes cyber plan foireux.

— Jalouse !

— Ah ah ah ! Et de quoi au juste ? Regarde comment tu es magnifique, tu pourrais avoir n’importe quel homme a tes pieds au lieu de ça...

—  Tu es jalouse de mon bonheur ! Ça te fait mal de me savoir heureuse alors que toutes tes relations ne se soldent que par des échecs. Moi mes hommes je les rencontre certes sur internet mais au moins j’apprends à les connaitre avant de passer au pieu avec, contrairement à certaines !


Elle parut vexée par ma remarque et sortis une deuxième cigarette qu’elle alluma avec empressement avant de tirer une grande bouffée.


— Tu apprends à les connaitre et alors ? Ça ta mené où jusqu’à présent ? Il n’y a aucune différence entre les mecs que tu rencontres sur meetic et ceux que je croise en boite de nuit, ils te racontent ce que tu veux entendre pour mieux te sauter et quand même te jeter en définitive.

— Tu vois c’est la que tu te trompes lourdement. D’abord ma rencontre avec Fabrice n’a rien à voir avec un de ces plans culs à peine voilés dont tu parles. Il n’a rien de ces pervers qui n’ont pas assez de couilles pour draguer une fille dans un bar. Notre histoire n’a rien à voir avec tout ce que tu imagines. Internet à ce pouvoir magique de casser les frontières, de raccourcir les distances et de permettre à des âmes sœurs de se rencontrer...

— Ames-sœurs ?!?

— Oui Fabrice est mon âmes-sœur ! Je ne me suis jamais autant sentie en osmose avec un autre homme que lui…

— Margot, tu es en train de me parler de quelqu’un que tu n’as jamais vu de ta vie, c’est bien ça ? Me demande-t-elle complètement abasourdi.

— Si je l’ai déjà vu. Enfin, j’ai vu ses photos et celles de sa famille mais qu’importe ! Je n’ai pas besoin de le voir pour savoir que nous sommes faits l’un pour l’autre. D’ailleurs c’est pour ça que j’ai tenu à ce qu’on se voit aujourd’hui…


Je marquai une pause et pris chacunes de ses mains dans les miennes. Je soufflai profondément avant de me lancer un large sourire pour faire passer facilement la nouvelle.


— Fabrice et moi allons-nous marier !

— QUOI ?!?

— Oui moi aussi j’ai eu la même réaction que toi lorsqu’il m’a fait sa demande mais après réflexion j’ai décidé d’accepter…

— Tu te fout de moi ou quoi ?!? Accepter quoi ? Tu as réfléchis sur quoi ? Sur le faite que ce n’est qu’un de ces escrocs africains qui cherche désespérément un moyen d’avoir des papiers pour venir en France. S’il te plait Margot, ouvre les yeux !

— Pfff arrête tout de suite, Fab n’est pas comme ça !

— Ah oui ? Tu n’as donc jamais lu ou suivis d’émission sur ces escrocs de l’amour ? Ils te font croire monts et merveilles, te racontent des histoires à dormir debout pour te soutirer des sous et…

— IL N’EST PAS COMME CA JE TE DIS ! Il ne m’a jamais rien demandé ! Au contraire, c’est lui qui m’envoie des sous pour m’aider de temps en temps. C’est un homme honnête qui vient de créer sa propre start-up chez lui, à Bangui. Donc il n’est aucunement question qu’il vienne s’installer en France mais plutôt que moi je le rejoigne là-bas en Centrafrique !

— De mieux en mieux ! Mais tu as complètement perdu la tête ma parole tu te vois toi, Margot Bonnat quitter tout ton confort, ton boulot d’infirmière et ta famille pour aller à l’aventure au milieu de nulle part ???


Je ne répondis pas mais me contentai de la regarder droit dans les yeux pour qu’elle comprenne que ma démarche était plus que sérieuse.

— Margot ne me regarde pas comme ça ! Je n’aime pas ça !

— Veux-tu être mon témoin de mariage Sophie ?

— Ton.. ton… ??? Putain Mag ne fait pas ça !

— Ma décision est déjà prise, je te repose la question pour la dernière fois et fais attention à la réponse que tu me donneras car elle déterminera la nature exacte de notre relation…

— La nature exacte de… ?!? Quoi tu me menaces ? Tu es prête à foutre en l’air plus de 20 ans d’amitié à cause de ce vendeur de rêve ???

— Dois-je considérer que ta réponse est non ?


Elle parut complètement déboussolée face à ma froideur.

— Je… heu… je ne sais pas Mag… tu me prends de court la… c’est, c’est prévu pour quand d’abord ?

— Nous n’avons pas encore fixé la date à vrai dire. Je suis déjà allée à la mairie pour faire la demande de date mais je pense que ce sera dans deux ou trois mois tout au plus car j’ai déjà envoyé mon préavis pour l’appart et j’ai déjà déposé ma démission au boulot.

— Seigneur ! Margot tu n’as pas fait ça… me dit-elle d’un air complètement dépité. Et tes parents ? Ils sont au courant ?

— Bof pour mes parents ce ne sera pas un problème. Ils sont dans leur village et je ne les vois que 2 fois par an tout au plus alors que je sois ici ou là-bas…

— Oh la la…

— Bon je vais te laisser le temps d’encaisser la nouvelle, je dois aller préparer les papiers pour la banques et tout ça. On se voit plus tard.

 

Je me posai un billet sur la table et lui fis une bise avant de m’en aller en sortant mon téléphone pour faire à Fab mon compte rendu.


Ah la la ! Pourvu que le temps passe vite et que je rencontre enfin l’homme de mes rêves : Fabrice Mbiwa.

 

Du virtuel au réel