Partie 3

Write by Ornelia de SOUZA

Le portier m'ouvrit la porte et me débarassa des effets qui occupaient mes bras. Il semblait nerveux mais je n'y fis pas vraiment attention car il abusait souvent de l'eau de vie alors j'attribuai sa nervosité à cette forte boisson. En réalité mes pensées étaient totalement ailleurs. Depuis cette matinée je n'arrivais pas à me sortir cette effrontée de Mélaine de l'esprit. Elle m'avait menacé. Je n'avais jamais apprécié cette fille à cause de ses airs provocateur et volage mais jamais je ne me serais attendu à ce qu'elle me tienne tête comme aujourd'hui. Elle n'était pas comme les autres. Elle avait la langue bien pendue et le corps en alerte. Elle m'aurait plu si elle ne me défiait pas sans cesse. J'aurais aimé être comme elle dans ma jeunesse. Cela m'aurait évité bien de choses. Bien de choses comme cette misérable vie que je menais. Cette vie sans but et sans fondements. Si j'avais été aussi alerte que Mélaine dans ma vie, jamais je n'aurais gardé l'enfant de mon époux et je ne me serais jamais retrouvé dans cette triste vie. Cette vie que je haïssais chaque seconde, à chacune de mes inspirations et à chacune de mes expirations.

Madjidath, ma fille aînée m'accueillit avec une mine qui en disait long sur son état. J'en déduis qu'elle venait encore de se disputer avec sa jeune sœur mais ses premiers mots contestèrent rapidement mes pensées.


-Papa a ramené une de ses maîtresses à la maison! lâcha t-elle sans prévenir


Quoi? Non, cela n'était pas possible. Kayodé n'avait jamais eu de maîtresse. J'y avais veillé au grain toutes ses années. Cela faisait longtemps que je ne l'aimais plus mais je n'allais pas risquer de sacrifier l'avenir de mes filles. Je n'allais pas risquer de gâcher cette vie pour laquelle j'avais tout perdu alors j'avais toujours veillé. Aucune femme ne l'avait jamais approché de trop près et il m'aimait bien trop pour me trahir. Madjidath se trompait sûrement.


-Qu'est-ce que tu dis?

-Maman, cette fille est installée dans votre chambre conjugale. Papa a fait déplacer tes affaires dans une autre chambre parce que cette fille lui a exigé qu'elle voulait ta chambre. Il m'a même fait venir pour me la présenter. Maman, tout ça va trop loin. 

-Ooooooh tais-toi idiote! Un enfant ne parle pas autant. Tu dis trop de conneries alors tais-toi avant que je ne te gifle une bonne fois.

-Très bien maman! fit ma fille offusquée. Si tu ne me crois pas, vas-y et constate de tes propres yeux.


Au fond de moi, j'espérais vraiment que cela ne soit qu'une blague. Ma vie ne pouvait pas se transformer en chaos en une journée. Mais d'autre part, Madjidath n'avait pas pour habitude de faire de telles blagues. Ma fille ne mentait pas. Si Kayodé pensait me faire ça après avoir fichu toute ma vie en l'air, il se trompait lourdement. D'un pas décidé, je me dirigeai vers la maison suivit par Madjidath et par le portier. Là dans la salle de séjour, une femme était allongée dans le plus grand canapé et avait la tête posée sur les cuisses de mon époux. Le sang me monta rapidement à la tête. En deux enjambées, j'étais à leur hauteur. Je saisis les jambes frêles de la femme que je jetai par terre pour l'obliger à se redresser. À cet instant précis, je reçus un coup en plein cœur. Sous mes yeux, Mélaine ma serveuse agrippait mon mari. La stupéfaction me paralysa un instant mais très vite, la colère reprit le dessus. Je saisis les jambes de Mélaine et je la tirai violemment vers moi. Je la saisis par le bras prête à la battre lorsqu'un méchant soufflet me calma. Kayodé qui s'était levé entre temps venait de me frapper. Décontenancée je lâchai Mélaine. Je ne m'attendais pas à ça. Mon mari malgré toutes mes frasques m'avait toujours respecté. Il n'avait jamais osé lever la main sur moi alors je ne sus comment réagir. Une deuxième gifle me ramena les idées en place. Mon mari me battait. Il me battait pour Mélaine, ma serveuse.


-Calme-toi harpie! ordonna mon époux. C'est la dernière fois que tu poses tes mains sur Mélaine sinon crois-moi, tes propres parents ne te reconnaîtront pas.

-Kayodé, qu'est-ce que tu racontes? Que fait-elle ici chez moi? C'est ma serveuse et je l'ai viré aujourd'hui alors pourquoi est-elle dans mon salon?

-Je n'ai aucune explication à te donner ma chère

-Tu vas m'en donner Kayodé! criai-je de plus belle. Tu vas me donner une explication valable sinon je vais sortir cette fille de ma maison par les cheveux

-Essaye Anta! dit calmement Kayodé. Essaye et tu verras comment moi je vais te jeter dehors comme une malpropre. Sache que je ne te dois aucune explication mais je vais quand même t'en donner pour que tu arrêtes de beugler comme une vache. Mélaine ici présente ; fit-il en la prenant par le bras; est ma seconde femme.

-Hein?!! hurlèrent en cœur le portier et ma fille.

-Oui Madjidath; continua mon mari en s'adressant à notre fille. Elle sera ta deuxième maman...

-Quelle stupidité ! Elle est à peine plus âgée que moi donc elle ne peut être ma mère à aucun niveau.

-Attention à ton langage impolie! siffla mon époux. Quand à toi Anta, je ne veux pas que tu poses un seul doigt sur ma femme ici présente car elle porte mon fils.


La nouvelle sonna comme un gong dans nos oreilles respectives. Les yeux de Madjidath s'embuèrent mais je la connaissais assez pour savoir que cela n'était pas dû à la tristesse mais à la colère. Mélaine m'observait silencieusement une lueur de triomphe dans le regard. Il y a quelques minutes encore, je pensais avoir gagné notre affrontement mais elle venait de me prouver qu'elle avait plus d'un tour dans son sac.


-Donc Kayodé, tu me trompes avec mon employée jusqu'à l'enceinter? KAYODE!!!

-Tais-toi femme! hurla Kayodé irrité. Ne sais-tu pas qu'on a des voisins? D'ailleurs c'est moi qui discute encore avec toi. Madjidath va te montrer la chambres où tes affaires ont été déplacées. Ma femme et mon bébé ont besoin de confort alors je l'ai installé dans la plus grande chambre. Sur ce, passe une bonne nuit chère Anta.


Sur ces derniers mots, Mélaine et lui quittèrent le salon d'un pas pressé. Je m'agripmai à un canapé car ma vision s'embrouillait. Kayodé et Mélaine venaient de me portée un coup fatal. Il me trompait donc tout ce temps avec mon employée. Quelle humiliation ! Quelle défaite ! Les moqueries et toutes les mauvaises langues résonnèrent dans ma tête. J'imaginais déjà ce que les gens diraient. Moi la grande Anta, femme de caractère trompée et bafouée par son époux pour une petite jeunette. Je ne pouvais pas supporter cet état des choses.


-C'est l'une de mes serveuses; dis-je sanglotant en me retournant vers ma fille. C'est mon employée !

-Je suis désolé Madame ; murmura le portier avant de se retirer.

-Maman, sois forte ! fit Madjidath en me prenant dans ses bras

-Je vais partir d'ici tout de suite. Pas une seconde de plus, je ne supporterai cette humiliation.


Mes mots reflétaient ma pensée. En y réfléchissant bien, c'était l'occasion où jamais de me libérer de cet homme que je détestais par-dessus tout depuis des années. Il voulait m'humilier après avoir détruit ma vie? Il n'y arriverait pas. Après tout, j'avais ma famille, mon gagne-pain et mes filles. Je n'étais pas démuni et j'allais lui faire payer ses actes en lui prenant ce à quoi il tenait le plus. Ses filles!


-Viens Madjidath ! ordonnai-je en me relevant soudainement. Où se trouves ta sœur ? Nous allons partir de cette maison.


Samirath ma seconde fille entra dans la pièce à cet instant précis. Elle n'etait point au courant de ce qui se déroulait dans sa maison alors son expression lorsqu'elle constata que sa sœur et moi étions en larmes ne m'étonna guère.


-Que s'est-il passé ? Pourquoi pleurez-vous? Qu'est-il arrivé à papa?


Samirath aimait son père par-dessus tout. Et il n'y avait aucune raison pour que ce soit le contraire. Il l'avait toujours choyé sans regarder à la dépense. Kayodé aimait ses filles et ses filles l'aimaient alors la question de Samirath était légitime. Je n'eus pas la force de lui répondre. Je laissai à Madjidath le soin de lui expliquer la situation et la décision que je venais de prendre.


-Et donc, vous allez partir ainsi? demanda Samirath après les explications de sa sœur. Moi en tout cas, je ne m'en irai pas. Je ne vais pas laisser une petite serveuse me voler ma vie. Voyons!

-Qu'est-ce que tu racontes? On doit soutenir maman! tenta de la raisonner sa sœur aînée.

-Je sais et là n'est pas la question mais je ne suis pas d'avis que l'on s'en aille sans se battre. Cette Mélaine ne peut pas gagner aussi facilement. Elle porte un fils et alors? C'est toi l'épouse de papa devant la loi alors tu n'as pas à lui céder la place. Et d'ailleurs, je connais mon père. Jamais il ne ferait ça ! Moi je suis sûre qu'elle l'a envoûté et si c'est le cas nous ne pouvons pas abandonner papa à son triste sort.


Madjidath me lança un regard empli d'interrogations mais je ne savais plus quoi dire. Samirath avait toujours été plus forte et plus réfléchie que tout le monde malgré son jeune âge. Elle avait peut-être raison. Kayodé ne m'avait jamais maltraité. Il ne m'avait jamais donné auucune raison de me plaindre et du jour au lendemain, il en est arrivé à me battre. Mélaine l'avait peut-être envoûté comme le pensait Samirath. On n'avait que trop entendu parler de ces genres de pratiques sur nos terres. Des femmes qui arrivaient à arracher les maris d'autrui grâce aux gris-gris.


Les rouages de mon cerveau fonctionnaient à vive allure. Mélaine avait donc osé s'aventurer sur mon territoire. Elle n'allait pas s'en tirer ainsi.


-Ne t'inquiète pas maman! me réconforta Samirath. J'ai une petite idée mais pour l'instant allons nous reposer.


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