Partie 63 : Dilemme
Write by labigsaphir
- Merci, c'est gentil de l'avoir ramassé.
- Mais de rien, Rustine.
- Humm.
- Le monde est vraiment petit. Je n'ai imaginé te rencontrer à nouveau et surtout, dans ces conditions.
- Huhum. Bon, je vais y aller.
- Attends, attends, Rustine.
- Quoi, Maiwenn ?
- Tu vois, je savais que tu te souvenais de mon nom.
- Tu n'as vraiment pas changé, fais-je en me tournant à nouveau.
- Attends, attends, Rustine.
- Je dois vraiment y aller. Je n'ai aucune envie de rater mon vol.
- Moi aussi, rassure-toi.
- Tant mieux !
- Ecoute, je sais que je ne peux revenir en arrière et effacer le mal que je t'ai fait, il y a de cela deux décennies.
- C'est déjà oublié, dis-je en mentant effrontément.
- Rustine, je te connaissais mieux que quiconque.
- Tu fais bien d'utiliser le passé, remarquai-je.
- Rustine, si je pouvais remonter le temps et tout effacer, je l'aurais fait.
- Ok, maintenant que c'est dit, je dois y aller.
- Rustine, attends, attends. Je dois prendre le vol pour Paris et toi ?
- Aussi ; je ne sais même pas pourquoi, j'ai répondu.
- Peut-être aurons-nous le temps de discuter dans l'avion.
- Je ne crois pas, non.
- Puis-je au moins avoir ton numéro de téléphone ?
- Pour quoi faire ?
- Te contacter, pardi.
- Si tu ne m'avais pas vue ici, l'aurais-tu fait ?
- Tu sais, cela fait longtemps que je te cherche.
- ...
- Dean m'avait dit ne pas savoir comment faire pour avoir ton contact.
- Ah bon ? Demandais-je étonnée par sa réponse.
- Mais oui, Dean et moi, sommes en contact permanent.
- Voyez-vous ça !
- S'il te plait Rustine, voici ma carte de visite et au dos, le numéro que j'aurai en France.
- Ok, merci.
- Je suis là pour deux semaines. Je serais heureux de te rencontrer afin de discuter avec toi et surtout, m'excuser. Je reconnais avoir été vache avec toi.
- C'est clair.
- Je suis vraiment désolé pour tout ce qui s'est passé, même si c'est avec près de 25 ans de retard.
- Huhum.
Je le laisse et vais m'asseoir dans le box des VIP et attends sagement le vol, n'ayant aucune envie de discuter avec lui comme si nous sommes des amis. Je crois que cette relation a changé ma vie à tout jamais et pire, je n'éprouve aucune aménité en le regardant, aucun regret de lui avoir caché que nous avons un enfant. Par contre, regrette d'avoir abandonné mon enfant à cause de ce qu'il m'a fait. Avec le recul, je reconnais que je n'étais pas assez mature.
QUELQUES HEURES PLUS TARD...
- Bonjour maman, fait-elle simplement.
- Bonjour, répondis-je en fondant en larmes.
Je n'aurai jamais pensé un jour, qu'elle m'appelait maman. Le Seigneur est bon, je rends grâce au Seigneur en la prenant dans mes bras.
- Merci Seigneur, merci, fais-je en essuyant les larmes coulant sur mes joues.
- Je suis une vraie madeleine en ce moment, tu sais. Si tu commences, je vais t'emboiter le pas et ne plus pouvoir m'arrêter.
- Surtout pas et dans ton état, non, non et non.
- Qu'est-ce qui sent le poulet fumé comme ça ?
- Jen !
- Quoi, maman ? J'ai faim et la petite veut la nourriture épicée.
- Voici ta valise, pleine à craquer de bouffe.
- Ah ça ! Je vais me régaler, c'est certain.
- C'est limite si je ne suis pas devenue invisible devant toi.
- Ha ha ha ha laisse-tomber, je 'arrive plus à me contrôler quand il s'agit de bouffe.
- Allons-y, Jen.
- Non, attends maman, je fais rapidement un tour au pipi-room.
- Les aléas de la grossesse.
- A qui le dis-tu ?
Elle me tend les clés et disparaît, je me retourne et la regarde en souriant. Et dire que je serai bientôt grand-mère, je suis la plus heureuse des mamans. J'imagine la joie d'Augustin et de ses frères, quand ils verront le bébé. Je me mets sur le côté et attends qu'elle revienne patiemment.
PENDANT CE TEMPS...
[ LOUHANN ]
Je vais m'occuper du petit et le laisse dans la chaise haute pour aller guetter Elric, il dort encore. Ce n'est pas bien grave. Réfléchis Lou, réfléchis...réfléchis. Je sais combien Elric est attaché aux enfants et ne peut laisser son sang se perdre. Sérieux, je ne sais trop quoi penser des récents événements. L'enfant que l'autre cruche porte est surement celui d'Elric. Si je ne me trompe pas, ce serait là, une formidable occasion pour elle de renouer avec lui. Non, non, je ne peux pas laisser faire ça, j'ai assez souffert comme cela pour le récupérer.
Je ne peux plus sortir la carte mariage car il prendrait rapidement peur et pourrait s'en aller. Je ne peux que lui sortir la carte enfant mais finement. Si elle lui fait un enfant, il faut que j'en ai deux de manière à toujours avoir une longueur d'avance. Je donne le bain à Alden et vais rapidement le laisser chez la nounou.
- Mon amour, dis-je en me collant à lui sous la couette.
- Mmmmm.
- Le petit n'est plus, nous avons l'appartement pour nous.
- Ah bon ?
Il se retourne vers moi, me tire à lui et m'installe sur son ventre. Je souris et pose mes mains sur son torse.
- Bébé, te sentirais-tu bien ici ?
- Mais oui, pourquoi ?
- Comme ça.
- Toi, je te connais, Lou. Qu'y a-t-il ?
- Tu aimes notre enfant ?
- Mais bien sûr que j'aime Alden. Quelle question !
- Et l'enfant de Jen ?
- Quoi, l'enfant de Jen ?
- C'est aussi ton enfant, chéri.
- Mais d'où tires-tu cela ?
- Cet enfant a été conçu durant vos vacances au Cameroun, si je me réfère aux dates.
- Ah bon ? Les camerounais, vous n'arrêterez jamais de m'étonner.
- Pourquoi ?
- Vous aimez trop lire les lettres dans l'enveloppe.
- Tu parles, tu parles mais ne répond pas à la question.
- Que ne comprends-tu pas, Lou ? L'enfant que porte Jen n'est pas le mien, point barre !
- Ah bon ?
- Mais oui. Tu crois que revenir vers toi a été facile pourquoi ?
- Ah bon ? Donc je suis ton deuxième choix ? Demandai-je en glissant sur le côté.
- Non, excuse-moi, je sais qu'entendre la vérité n'est pas facile toute vérité n'est pas bonne à dire. Lou, que nous sommes dits en nous remettant ensemble ?
- De ne rien nous cacher.
- Voilà ! Pourquoi vous les femmes, aimez que l'on vous mente ?
- ...
- Oui, j'ai aimé Jen comme un fou et alors ? Cela peut arriver à tout le monde, la preuve, toi avec Mintak.
- ...
- Oui, nous avons rompu parce qu'elle voyait un autre.
- En es-tu certain ?
- Mais oui, que vas-tu encore chercher ?
- Je ne sais pas. Es-tu certain de ne pas l'aimer ?
- Oui.
- Mais pourquoi te protèges-tu toujours ?
- Je ne parle pas du fait que tu sois toujours sur la défensive lorsqu'il s'agit d'elle, mais du fait que nous fassions toujours l'amour avec des préservatifs.
- Lou,
- Oui, bébé.
- Tu m'as trompé et avec Mintak, mon meilleur ennemi.
- Je t'ai déjà demandé pardon, bébé. Pourquoi éprouves-tu toujours le besoin de remettre cette affaire sur le tapis ?
- Je ne remets rien sur le tapis, Lou, je ne fais que répondre à tes questions.
- Pourquoi éprouves-tu le besoin de te protéger alors que nous avons déjà fait tous les examens ?
- Simple réflexe, ma chère. Tu peux encore décider sur un coup de tête de rentrer dans les bras de Mintak.
- Non, je te promets, non.
- Humm.
- Pourquoi ne me fais-tu pas confiance ?
- ...
- Elric, si tu veux faire ta vie avec moi et te marier, tu seras obligé de me faire confiance.
- Je le sais mais la confiance se gagne. C'est plus difficile, lorsque tu l'as perdu en quelqu'un.
- C'est vrai, mais...
- Mais quoi ?
- Faire l'amour avec un préservatif n'est pas la même chose que faire sans.
- Tu veux parler du fameux corps à corps, dit-il en mettant un doigt en moi.
- Oui, c'est à cela que je fais allusion.
- Bien, je vois. S'il te plait, déplace-toi.
- Pour aller où ?
- Descend, s'il te plait, je vais aller me doucher, prendre le petit-déjeuner et je pourrais m'occuper de toi.
- Pourquoi est-ce pareil à chaque fois que nous devons faire l'amour ?
- Quoi, je ne comprends pas ; il arrête son mouvement et se tourne franchement vers moi.
- Pour faire l'amour le matin, tu as maintenant besoin de prendre la douche, ensuite le petit-déjeuner et digérer une demi-heure.
- Lou, je change avec l'âge et crois-moi, faire l'amour est un art.
- Et depuis quand fais-tu autant de chichis.
- Depuis que j'ai compris que les femmes sont des reines et s'en occuper est un honneur.
- Humm.
- Arrête de bouder, alleeeeeeeeeeeez ; il me tire à lui et m'embrasse avec fougue, je ne peux que fondre et y répondre.
- Ok, c'est bon, dis-je avant d'éclater de rire ; Elric est tout bonnement en train de me chatouiller.
Nous nous séparons deux minutes plus tard, il me fait un clin d'œil avant d'entrer dans la salle de bain et fermer à double-tour derrière lui. J'ouvre le tiroir contenant des préservatifs, prends une aiguille sur ma coiffeuse et perce tous lesdits préservatifs. Cela fait quatre mois que je le fais et ne suis toujours pas enceinte. Mais qu'est-ce qui n'a pas marché ? J'ai déjà tout fait, ce n'est pas possible. Qu'est-ce qui cloche ? J'ai envie d'appeler maman, mais cela pourrait attirer l'attention d'Elric. Pfff...Quelle guigne !
Une heure plus tard, comme convenu, Elric et moi, engageons un corps à corps. Je suis là de corps mais pas d'esprit. Il me faut à tout prix, trouver une solution à ce problème et vite. Heureusement que j'arrive à tenir Mintak à distance, sinon cela deviendrait ingérable. Suite à la mort de notre enfant, j'ai demandé à ce que nous fassions un break.
PENDANT CE TEMPS...
[ RUSTINE ]
- Rustine, je veux dire maman, fait-elle en bousculant avec douceur.
- Ah oui, oui, ma chérie. Que disais-tu ?
- Excuse-moi, je ne voulais pas t'effrayer.
- Non, tu n'as rien fait, rassure-toi. Ce n'est pas toi, j'étais loin.
- Ah bon ? Et où ?
- Loin, laisse-tomber, ce n'est pas important.
Je la regarde et me perds dans mes pensées, je ne sais pas, je ne sais plus. Au bout d'un moment, je vois juste ses lèvres bouger. Je la regarder et essaie de retrouver les traits de Maiwenn en elle et cligne des yeux en constatant que la main de Jen, se balade devant mes yeux.
- Eh oui, oui, ai-je juste le temps de dire.
- En es-tu certaine ?
- Oui, oui, crois-moi.
- Ah bon ?
- Mais oui, je suis certaine que même le bébé est d'accord.
- Maman, je viens de dire que j'avais envie de faire du saut en parachute.
- Quoi ? Mais tu es folle, ma parole.
- Et pourtant, tu viens de de dire oui.
- Pfff ...Ok, j'avoue, je n'écoutais. Tu es vraiment comme Mai....
- Ma...quoi ?
- Rien, rien...Alors, que voudrais-tu faire aujourd'hui ?
- Et si nous allions nous promener du côté de la gare ?
- Pourquoi pas ?
Elle se lève si rapidement que j'en tremble. Elle est vraiment guillerette pour une femme enceinte, je ne sais où elle tire de l'énergie. Je vais prendre une douche et à la sortie, elle est assise sur mon lit en train de feuilleter l'album-photos que j'ai ramené.
- Il faudrait que j'appelle mamy, n'est-ce pas ? Demande-t-elle en levant la tête.
- Je le pense aussi ; je m'assieds près d'elle et entoure ses épaules de mon bras.
- J'y suis allée un peu fort la dernière fois, désolée.
- Il n'y a pas de soucis, je te comprends.
- Je t'en ai voulu, c'est indéniable mais tel n'est plus le cas.
- Cela fait quelque temps que je suis là, mais nous n'avons jamais discuté.
- C'est vrai. Ecoute maman, il faut que je te dise. Je regrette vraiment toutes les vacheries que je t'ai dites. Je crois que je ne réalisais pas ou n'ai-je tout simplement pas souhaité me mettre à ta place.
- Huhum.
- J'ai failli faire comme toi, voire pire ; elle baisse les yeux et se met à se ronger les ongles.
- Ne te sens pas obligée de m'en parler, si tu ne le sens pas.
- Non, il le faut. J'ai failli avorter parce qu'Elric m'avait quittée.
- Ah oui, je comprends. Humm, étant passée par-là, je te comprends parfaitement. L'erreur que nous faisons souvent, est de penser nous et non, à nos enfants.
- C'est vrai et...
- Et ?
- J'en suis toujours meurtrie mais malgré cela, j'ai appris à aimer ma fille ; elle se caresse le ventre en retenant à grande peine les larmes.
- N'ais pas honte de pleurer devant moi. Je suis ta mère et une maman, sert à cela, écouter son enfant. Je suis aussi là pour panser tes bobos.
- Maman, tu sais, je fais la grande devant tout le monde. Je fais celle qui ne ressent rien mais en vérité, j'ai vraiment mal. Lorsque je croise Elric avec sa copine dans le magasin ou la rue, j'ai si mal.
- Tu as mal, comme une grosse boule dans l'estomac.
- Oui, maman, oui.
Elle éclate en sanglots, je la prends dans mes bras et la berce. Elle parle, parle durant dix minutes sans interruption ; je comprends qu'elle en avait gros sur le cœur. Elle se met à hoqueter et se redresse en me regardant dans les yeux.
- Pourquoi aimer fait-il si mal ?
- Parce qu'en amour, rien n'est certain. Jen, tout est aléatoire. Les sentiments et le temps sont des données que nous, humains, ne pouvons maîtriser.
- Maman, pourquoi est-ce si difficile d'aimer et de se faire aimer ?
- Je crois tout simplement qu'il est difficile de rencontrer la bonne personne.
- Avec Augustin, j'ai pourtant eu l'impression que vous vous entendiez.
- C'est vrai, Augustin est vraiment ma moitié. Tu sais, ma chérie, rien n'est donné dans la vie. Les débuts avec mon mari, ont été des plus chaotiques.
- Ah bon ?
- Comme tout bon camerounais, c'était un coureur de femme, un Nicky Larson des temps modernes.
- Ha ha ha ha si je te dis que je comprends, je mentirais. Je ne sais pas comment font les africaines pour accepter que leur homme les trompe et revienne tranquillement vers elles.
- Humm, Jen, c'est compliqué. Les africains sont pour la plupart, des cavaleurs. Je ne dis pas que je cautionne mais l'on apprend avec le temps, à relativiser. Pour ma part, je flique toujours Augustin, même si j'avoue, il s'est calmé avec le temps.
- Il est beau, ton mari.