Partie IV

Write by Ornelia de SOUZA

Plusieurs heures après cette altercation,Inès s'était retrouvé au chaud dans un vieux bus avec son bébé bien blottie dans ses bras. Au près d'elle,le postier du village conduisait. Le silence était pesant et de temps en temps, ils échangèrent un regard mais sans plus. Bientôt elle aperçut la ville. Le sol n'était plus fait de sable mais de goudron. Les pneus de la voiture crissait sur le bitume provoquant une sensation désagréable aux oreilles d'Inès. Mais le vent caressait son visage et elle se surprit elle-même à prendre une grande bouffée d'air. Elle se rendit aussitôt compte que l'air de la ville n'avait rien à avoir avec l'air de son petit village.


La route était bondé de motos et de voitures toutes plus impressionnantes les unes que les autres. À chaque feu d'arrêt, elle observait les vendeurs qui criaient et essayait d'écouler leurs différentes marchandises. Des peulh et leurs enfants s'approchaient pour quémander un peu de sous. Elle s'en étonnait et remarquant leurs beautés et celles de leur chevelure,elle se hasarda à les toucher. Observant la scène, le postier chauffeur se résolut à intervenir.


-Ne les toucher pas ! ordonna t-il faisant sursauter Inès

-Mais ils sont si beaux...

-Et si sales...

-Je n'aurais jamais cru que les gens de l'autre monde aussi pouvaient être pauvres.


  Face à cette remarque et à la petite moue naïve d'Inès, le postier éclata de rire.


-Ma fille, ils ne sont pas de l'autre monde. Ils sont de notre monde ceux là 

-Ah bon? Et pourquoi ont-ils la peau si clair? demanda Inès hébétée

-Ah ça Dieu seul le sait mais ils ne sont pas pauvres comme tu crois

-Comment ça ils ne sont pas pauvres? Vous les avez bien vu comme moi... Ils quémandaient...

-Par ici les gens disent qu'ils sont très riches dans leurs villages, qu'ils possèdent des hectares de terre et d'énormes troupeaux de bœufs mais qu'ils aiment bien dépouiller les pauvres gens de la ville pour agrandir leurs patrimoines.

-Mais c'est malhonnête ! s'exclama Inès

-Ah ici tu vas vite grandir et tu te rendras compte que la ville n'est pas comme ton village et que tout le monde n'est pas honnête.


  Inès se retourna et aperçut un énorme immeuble dont elle avait du mal à percevoir la fin. Elle voulait s'exclamer car elle n'avait jamais vu un immeuble aussi grand mais elle se retint car elle ne voulait pas donner au postier l'impression de n'être qu'une simple villageoise.


-Nous sommes arrivés ma fille! Tu peux descendre !


Inès s'exécuta. Une fois descendue avec bagages et bébé en main, elle observa les alentours. Des immeubles par ci et par là mais des maisons plus basses entre elles. Un plein d'étalages de ventes de produits de toutes sortes. On aurait dit un marché s'i n'y avait pas toutes ces maisons.


-Mais qu'est ce que je fais maintenant ? demanda t-elle au postier apeurée

-Appelle un zém(taxi-moto) et il te déposera à l'adresse...

-Et si je me perds? Je ne connais pas la ville moi.

-Écoute, moi je suis en retard. J'ai dû faire un détour pour te déposer ici. Je ne peux pas t'aider plus.


Sans plus de mots il démarra et s'en alla laissant la jeune mère en plan. Comme un malheur n'arrive jamais seul,Safi qui était endormi depuis bien longtemps se réveilla et se mit à crier de toutes ses forces attirant l'attention de toutes les personnes aux alentours. Certaines femmes même se permettaient d'apostropher Inès et de l'insulter copieusement. Devant tant de déchaînement Inès prit sa valise et s'éloigna au pas de course de cet endroit. Mais plus elle s'éloignait, plus les cris de Safi s'intensifièrent et plus elle attirait l'attention des passants et des vendeuses. Au bout d'un petit moment, elle aperçut un attroupement de zém. Elle se dirigea vers eux et interpella l'un. Elle lui tendit l'enveloppe et il déchiffra l'adresse qui y était mentionné. Elle chevaucha la moto. Au bout de dix minutes de conduite effréné,il la déposa devant une grande église.


-Maintenant qu'est-ce que je fais ? demanda la jeune mère

-C'est l'adresse qu'il y a sur votre enveloppe; lança le zém avant de redémarrer.


Inès en avait vraiment marre et il se faisait de plus en plus tard. Elle appela les dieux de son père à l'aide. Et ils l'entendirent car une petite dame grassouillette s'approche de la jeune mère.


-Petite femme! cria t-elle

-Bonsoir Madame; répondit Inès

-Vous êtes perdu? demanda la femme

-Oui,je cherche la maison Kérékou. Je cherche un oncle.

-Ah bienvenue ma fille. Je suis la femme de ton oncle. Viens donc avec moi.


L'énorme sourire de la femme rassura tout de suite Inès. Elle l'aida avec sa valise et la conduisit dans la maison du frère de Funkè. La femme posa la valise d'Inès au beau milieu de la cour et lui apporta un petit tabouret et un verre d'eau.


-Tu es qui exactement ? interrogea la femme

-Je suis la fille de Funkè...

-Ah Funkè! s'exclama la femme en hurlant. Moi je suis la femme de ton oncle. On m'appelle tanti Adéossi


Inès sourit aux mots et à l'accueil chaleureux de la tante Adéossi. Elle voulut aussi donner son prénom mais le portail grinça laissant apparaître un homme efflanqué. Il avait un teint clair tel le teint de Maman Funkè. Inès se dit aussitôt qu'il devait être l'oncle en question.  Il affichait une mine renfrognée et il dépassa les deux femmes sans même un petit regard. Tanti Adéossi frappa dans ses mains deux fois et le suivit. Ils disparurent tous les deux derrière la porte de l'unique construction de la maison. Des bribes d'un dialogue violent parvenait à Inès qui se morfondait en imaginant le pire. Son attente fut de courte durée car d'un pas menaçant, l'oncle sortit et se dirigea vers Inès. Elle sursauta et manqua de tomber lorsqu'il s'arrêta net devant elle.


-Tu es qui? Et que fais-tu ici? brailla t-il

-Mon oncle; bafouilla Inès. Je suis la fille de Maman Funkè. Elle m'a envoyé ici et elle m'a remit ça.


Elle tendit la lettre que Maman Funkè lui avait remise à son oncle. Il déchira l'enveloppe et lut la missive de sa soeur. Dès qu'il eut finit,il froissa la feuille avec colère et la jeta au loin. Il jura de colère contre sa sœur et s'adressant finalement à Inès.


-Elle a cru quoi elle? Que chez moi c'était un village SOS pour mère et enfant ? La vie est dure ici! Trop dure pour que j'entretienne une mère et son enfant. Et ton mari?

-Il m'a jeté dehors! répondit sèchement Inès.

-Ok alors tu ramasses tes affaires et tu retournes au village pour vivre avec ton père.

-Mais... Il m'a aussi jeté dehors.

-OHHH! hurla t-il agacé. Je m'en fous mais tu ne resteras pas chez moi.


À cet instant,tanti Adéossi choisit d'intervenir. Elle tira son mari au loin et une violente dispute éclata entre les deux. Inès supplia les dieux d'adoucir le coeur de cet homme pour qu'il puisse la laisser vivre ici même si ce n'était que temporaire parce qu'elle n'avait plus nulle part où aller. Au bout d'un moment la dispute prit fin. L'homme se retourna, toisa Inès avant de disparaître dans la chambre où il était quelques minutes plus tôt. Tanti Adéossi rejoint la jeune femme avec un sourire énorme. Elle prit un tabouret et s'assit auprès d'elle.


-Ma chérie ne t'inquiète pas ! Tu peux rester ici aussi longtemps que tu voudras. Je me sens tellement seule ici. Dis moi tu as faim?


Cris de femmes