Portraits de femmes : Marie Diall - 2

Write by Pullar Debô

  • Bonsoir chéri.

  • Dépose la petite.

Oumou continuait de pleurer et de gratter ses yeux avec ses mains.

  • Elle est fiévreuse. Je ne pense…

  • Dépose-la !

Il a crié si fort, que je sursautais. Oumou s’arrêta de pleurer, mais repris de plus belle et avec plus de ton. Elle avait pris peur.

  • Cheick ?

  • Pour qui tu te prends ? Tu es qui pour tenir tête à ma mère ? Toi Marie ?

  • Lui tenir tête ? Oserais-je ?

  • Oh, quelle entêtée tu aimes faire Marie ! je t’ai choisi envers et contre tous, et c’est ta façon de m’être reconnaissante ? Tu fais de moi un lâche aux yeux de mes parents ? C’est sa une épouse parfaite ? Tu n’es pas foutue d’être une bonne chrétienne, je me demande comment tu comptes t’y prendre pour être une femme musulmane accomplie !

  • Tu m’écœures ! Tu dépasses trop les bornes Cheick…

  • C’est ça, fais la victime. Tu ne fais aucun effort ! Ils avaient bien raison dès le départ. Quel idiot, je fus !

Il se saisit de la carafe en verre remplie d’eau qui se trouvait sur la table basse, et la jette vers ma direction. Je l’évite de justesse et elle s’écrase sur le mur. Le sol est recouvert d’eau et de débris de verre.

  • Nettoie-moi ça, et fait en sorte que elle se taise.

Oumou pleurait toujours. Je la sers fort contre moi, et je dis une prière à voix basse. Je tremble. J’ai peur… Ce n’est pas seulement la carafe qui s’était brisée, quelque chose en moi, avait subi.

Fifi, dame de ménage s’empresse de venir nettoyer. Le regard compatissant.

  • Vous me donnez la petite après, je vais m’en occuper…

  • Non, ça va aller. Merci Fifi. Peux-tu sortir la viande du réfrigérateur, pour moi ?

  • Oui, bien-sûr.

Je m’assoie sur l’un des canapés et prépare son biberon. Elle se calme et pose sa tête sur moi. Entre-temps, un bip sur mon téléphone. Message d’Antoinette : « Est-ce que ça va ? ». Je souris et lui envoie : « Oui. Il va se calmer, ça va lui passer. Merci, t’es la meilleure. Des bisous ».

Ce soir, ce sera froid. Tendue, mais demain est un autre jour. Je garde mon mal en patience. Il finira bien par se lasser de tout ça et on pourra tenir une discussion sans qu’il ne puisse la fuir.

Il s’est couché en me tournant le dos, si seulement il savait mon sommeil plus précieux que des câlins, il aurait réfléchit à deux fois à comment me faire mal.

A cinq heures son réveil a sonné, pour la prière de Fajr. D’habitude, il l’éteint tout juste après pour éviter de réveiller toute la maison, mais pas cette fois. Il l’a laissé sonner.

Il est allé se brosser les dents, prendre sa douche, ses ablutions, étaler son tapis de prière avant de daigner l’éteindre. Il avait reçu son coup, puisqu’il sait que j’ai un sommeil léger. Mais je reste allongée, en attendant qu’un bip signale les six heures du matin.

Quand finalement, je me réveille. Je prends une douche vite fait et file en cuisine pour le petit-déjeuner. Oumou est déjà assise sur sa longue chaise de cuisine et tape dans sur son pot de fruits Bledina.

Des œufs brouillés, de l’avocat et du café pour monsieur. Je me fais un thé, accompagné de pain tartiné au beurre léger. Je ne l’ai pas entendu arriver. Il fait un bisou à sa fille qui semble allé mieux et pose un regard bref sur moi.

  • Bonjour chéri. Ça va ? Tu as bien dormi ?

  • Ça va. Sers-moi tu veux ?

  • Oui bien-sûr « Ché-ri » et je vais bien aussi…

Je lui avance son assiette et réchauffe le café pour lui. Nous mangeons en silence quand mon téléphone se met à sonner. Atta.

  • Docteur Diall ?

  • Oui, Atta. Bonjour.

  • Bonjour. Désolée de vous déranger.

  • Ce n’est pas grave.

  • Pourriez-vous caler dans votre agenda d’aujourd’hui un rendez-vous ?

  • Ça dépend. De quoi s’agit-il ?

  • Une vieille dame, elle est assez âgée, s’est cassé le pied en tombant des escaliers chez elle.

  • Oh mon Dieu, la pauvre.

  • Elle avait malheureusement opté dans un premier temps, pour un traitement traditionnel et ça n’a pas marché.

  • Quoi ? Tu m’étonnes que ça n’ait pas marché ! A son âge ? Vraiment Atta, certaine femme vieillisse sans leur cerveau ! (Cheick me lance un regard)

  • Elle est vraiment mal en point et se plaint de douleur extrême…

  • D’accord. J’ai un temps libre entre onze heures et midi-et-demi. Ça doit pouvoir le faire. Fais-lui passer d’abord des radios avant, tu veux bien ?

  • Elle a ses anciennes radiographies de la clinique qui a fait le premier soin…

  • Non. Je veux de nouvelles, faites par nos médecins. Je préfère.

  • D’accord. Tu es la meilleure !

  • Je passerais à l’hôpital vers 10h. Je dois amener Oumou voir son pédiatre.

  • Oh qu’elle se rétablisse vite ma jolie poupée. Bisous à vous.

  • Ciao.

D’accord. La partie du cerveau, c’était un pic matinal. J’aurais pu m’en priver, mais c’était si tentant.

  • Je n’aime pas ce type.

  • Qui ?

  • Le pédiatre. Il te regarde toujours comme un morceau de viande…

  • Tu y es allé deux fois et tu ne l’as rencontré qu’une seule fois. Ce ne peut-être qu’une impression… Et puis, il est marié et a trois enfants. Aucun de nous deux n’a le profil type de quelqu’un qui pratiquerait l’adultère. Alors, oublie.

  • Tu devrais changer de pédiatre. Non, en fait, je veux que tu changes de pédiatre.

  • C’est lui qui fait son suivi depuis qu’elle est née !

  • Et alors ? S’il meurt demain, il n’y aura plus de pédiatre à Bamako ?

  • Je préfère ne pas me disputer ce matin… J’ai eu ma dose hier.

  • Pour hier, tu iras présenter tes excuses à ma mère avant de te rendre à l’hôpital.

  • Tu m’as entendu tout à l’heure, j’ai une patiente pour cette heure-là. Je passerais à la fin de la journée.

  • Marie. Ne considères-tu pas ma mère comme tienne ?

  • Elle m’a dit hier que je n’étais pas sa fille… Cette patiente, c’est la mère de quelqu’un. Tu sais Cheick, j’aime tous ce qui se rapporte à ta personne. Tu sais pourquoi ? Parce que je t’aime et ça, ça n’a pas changé pendant ces trois années de mariage. Je passerais à la fin de la journée lui présenter mes excuses et non, on ne changera pas de pédiatre.

  • De cette façon-là ?

  • De cette façon-là, oui. Aussi, Tata… Qu’elle sache comment me parler, et qu’elle évite de m’insulter. Huit ans nous sépare, je ne suis pas sa camarade.

Je me lève de table avec Oumou. Ça, il ne s’y attendait pas du tout…

            Birame est un médecin très efficace et doué avec les enfants. Je l’ai connu grâce à Antoinette. Il m’a rassuré que ce n’était rien de grave et qu’elle faisait juste une petite fièvre, qui devrait vite passer avec un sirop. Je suis soulagée.

            Afin de rejoindre l’hôpital, je fais un crochet à la maison de mes parents, pour y déposer leur petite-fille. Ma mère est une merveilleuse femme. Un être avec un grand cœur toujours prête à pardonner et ma meilleure conseillère.

  • Oh, elle m’a manqué cette petite.

  • Je te l’amène pour qu’elle te mène un peu la vie dure. Tu paresses trop à rester à la maison et à ne rien faire…

  • Mon bébé… (En posant sa main sur ma joue) Tu as encore perdu du poids…

  • Je suis un régime. Maman, mon Dieu, mon ventre ! J’ai l’impression que ça va exploser. J’ai donc décidé de revoir mon alimentation et de …

  • Tu as fini d’essayer de berner ta propre mère ?

  • Maman… Je vais bien, je t’assure.

  • Ah vraiment ?

  • Oui. Vraiment.

  • Et ta belle-mère ?

  • Elle se porte bien. Un amour !

  • Ah Marie (En riant). Ça doit être un miracle !

  • Je dois y aller. Et surtout si elle t’épuise, appelle-moi, je viens la chercher.

  • Faut bien qu’on m’épuise et autant que ce soit elle qui le fasse. Va mon enfant, tu as toute ma bénédiction et mon amour, ma douce Marie…

  • Je t’aime maman. Merci.

J’ai perdu mon père, un mois après mon mariage. Ça a été dur. Et vue que je suis enfant unique, je m’accroche à la seule famille qui me reste : ma mère, Oumou et Cheick. Et oui, Cheick !

La journée est vite passée. Après la femme, j’ai juste reçu des quelques personnes pour leur contrôle après opération.

Alors que je quitte mon bureau pour regagner celui d’Atta, j’entends qu’on m’interpelle.

  • Marie ? C’est bien toi ? Marie Diall ?

  • Euh oui ? Et vous, vous êtes ?

  • Sacrée Marie. Tu n’as pas changé d’un iota ! Enfin, c’est moi, Jean. Au collège, plus de cheveux, des lunettes ?

  • Oh mon Dieu ! Jean ! Jean Diarra ?

  • C’est ça !

A ça, je ne m’y attendais pas du tout. On s’embrasse et se regarde longuement. Jean ! C’est bien lui. Mon amour de jeunesse, mon tout premier.

La vie est cruelle des fois. On rencontre des gens, on apprend à les connaître, à les aimer. Puis un beau jour, vous cessez d’être proches. Vous parlez moins, vous vous voyez moins et bientôt, vous vous oubliez. Et voilà, le film est terminé.

  • Quelle surprise ! Dix ans, c’est ça ?

  • Ah ça oui ! Je n’arrive pas à y croire… Toi, là en face de moi. Qu’est-ce que tu fais ici ? Est-ce que tu es malade ?

  • Non. Non, du tout… Ma petite fille est malade. Je l’ai accompagné voir son pédiatre. Et toi, tu as finis docteur après tout ce temps ? (En désignant ma blouse)

  • C’est ça…

  • On peut, peut-être déjeuner ensemble demain ? Parler du bon vieux temps…

  • Ce serait bien, oui. Tiens je te donne ma carte.

  • Marie Diall. Chirurgienne. (En la lisant). Tu as réussi. Tu as réalisé ton rêve.

  • Tu y es pour beaucoup… Je te laisse rejoindre ta fille. On se voit demain ?

  • Oui. J’ai été très heureux de te revoir…

  • Moi aussi. Et bon rétablissement à elle.

Une vague de nostalgie venait de s’emparer de moi. Jean. Il était le plus doux, le plus gentil. Le premier à s’excuser pour nos disputes, le premier dans tout. Et, il m’a aimé. Comment, pourquoi nous nous sommes séparés ?

Je ne sais pas. J’ai bien envie de parler de la distance, mais est-ce seulement vrai ? Nous étions pourtant si amoureux. Nos familles se connaissaient, nous fréquentions les mêmes personnes, nous avions le même grade d’ambition…

Après le BAC, mes parents m’ont envoyé en France pour les études. Lui, Antoinette et tous les autres sont restés à Bamako.

Je suppose que toutes les relations longue distance finissent de la sorte. Au départ, vous vous accrochez l’un à l’autre, vous vous aimez et ça ne saurait être autrement. Et ensuite, le décalage horaire, les emplois du temps qui ne collent plus, les centres d’intérêt qui ne matchent pas, le manque disparait petit-à-petit et vous vous habituez à l’absence de l’autre, jusqu’à ce vous arrivez au stade où la seule conversation qui vous lie se tient à une fois par semaine, puis deux, ou un mois. Vous ne vous direz plus que c’est fini, mais chacun a déjà pris ses distances et est passé à autre chose.

Et un beau jour, dix ans après, surement vous croisez dans un hôpital… Non, cette partie, c’est Jean et moi.

J’oublie Atta et retourne à mon bureau. Beaucoup de questions en suspense. Nous nous attendions si bien, comment ça aurait été si nous avions tenu ? Serons-nous mariés aujourd’hui ? Des enfants ? Heureux ?

Il a une petite fille, peut-être est-il marié ? Quel âge a-t-elle ? D’autres enfants ? Divorcé ? Et que fait-il ? Qu’est-il devenu ? Je décide d’appeler Antoinette.

  • Oh Jean ! Seigneur, vous alliez si bien ensemble ? Je n’ai jamais compris ce qui n’avait pas marché… Est-il toujours bel homme ?

  • Très bel homme et sans ses cheveux ! Plus de lunettes. J’ai failli ne pas le reconnaitre.

  • J’ai bien envie de le voir aussi ! On s’est tellement perdu de vue… Tu lui passeras mes salutations.

  • Il t’appelait Netty. Et tu détestais ça (En riant)

  • Ah, seulement le souci, Charles me donne le même surnom, finalement j’ai aimé !

A la descente, je pars récupérer Oumou chez maman. Elle a repris ses couleurs. J’ai parlé de Jean à ma mère et elle s’est rappelée de lui. « Il était si charmant et très poli ! Je suis ravie qu’il aille bien ! ». A bien fait de le rappeler, il était aimé.

Je n’ai nulle envie de me disputer avec la mère de Cheick, et je sais que cette histoire d’aller lui faire des excuses, c’est lui donner l’occasion de finir avec ce qu’elle a commencé.

Je porte une robe trois-quarts, en wax et tissu. Encore mon habillement sera un autre débat. Je me gare. Oumou avec ses petits pieds se pressent d’entrer. Elle est accueillie par son grand-père. A défaut de m’aimer, moi sa mère, il est fou de cette petite.

  • Bonsoir papa.

Oumou dans ses bras, il me considère un moment, puis baisse les yeux et hoche la tête en signe de réponse. C’est déjà ça.

  • Il ne parlera pas à une femme mariée qui s’habille ainsi.

Tata. Aïe. Ma main me démange quand il s’agit d’elle. C’est indéniable. Si seulement, elle savait, elle saurait qu’il ne faut pas me chercher.

  • Un peu de respect Tata. Viens porter Oumou, je n’ai plus trop la force de la tenir. Elle grandit trop vite Masha’Allah.

Mon beau-père qui intervient. Décidément, c’est mon jour de chance. Quand Tata a disparu pour rejoindre certainement maman tigre dans le salon, de dos, il me lance :

  • Ma fille n’a pas été polie. Mais ce n’est certainement pas une tenue descente pour une femme qui se respecte, en plus d’être celle d’un bon musulman. Tu devrais revoir cet aspect de ta vie. Entre, ta mère est dans le salon.

Je retire le couteau pour mieux te l’enfoncer. Voilà, ce qui venait de se passer. Je fais oui de la tête comme s’il pouvait me voir et rejoins ma chère belle-mère. Son cou est gonflé de rage, comme si elle avait avalé l’ours en peluche d’Oumou.

  • Bonsoir maman.

  • Sors de chez moi.

  • Je suis venue vous présenter mes excuses pour mon comportement d’hier. Je suis navrée d’avoir été « malpolie » comme vous aviez pu le souligner à votre fils et de vous avoir manqué de respect.

Maman se lève et me fait face. Vous savez comme un combat de boxe. Elle me pointe avec son doigt.

  • Cheick, m’a manqué de respect, pas toi. Quand il a décidé de t’épouser, il l’a fait. Que la femme de l’homme que j’ai porté et élevé, puisse agir de la sorte, c’est que c’est mon fils, qui n’a pas endossé ses responsabilités. Mais toi, Marie, écoute-moi bien et retiens ceci : il va te foutre à la porte, ou soit il prend une deuxième femme. C’est moi qui le dis.

  • Maman. C’était pour te présenter mes excuses. Je suis désolée. Pardonne-moi.

  • Hypocrite ! Tu es venue parce qu’il te l’a demandé…

  • Ah donc, finalement il endosse ses responsabilités ? Maman, j’ai tout fait. Vous ne m’aimez pas. Dites-moi, ce que je peux et dois changer en moi, pour que ça change…

Elle se tait un moment. Croise ses mains et me regarde. Cette femme, souvent je me dis qu’elle n’a aucune bonté en elle, que le Seigneur me pardonne un tel jugement.

  • Convertis-toi. Repens-toi. Adopte nos valeurs, et sois l’une des nôtres.

Le père de Cheick était arrêté au pas de la porte. Ce qu’il dit me glace le cœur.

  • Papa… Ma religion fait-elle de moi, une mauvaise personne ? Je n’ai jamais manqué à mes devoirs envers vous en tant femme de votre fils. Je suis née avec des valeurs et des principes, en accord avec ma foi chrétienne. Je n’ai jamais volé, je n’ai jamais trahi. Je suis désolée… Mais je suis incapable de faire ce que vous me demandez.

  • Dans ce cas, j’ai bien peur que cette situation n’évolue pas en s’améliorant…

  • Je vous ai présenté mes excuses pour hier. Je vais rentrer.

Je tends la main à Oumou, elle court la saisir et on quitte la maison.

Aujourd’hui, je prends conscience que mes efforts pour essayer de m’intégrer ne donneront jamais. Et ça me brise le cœur de voir que les personnes qui comptent pour l’homme que j’aime, ne m’accepteront jamais. Je ne m’en veux pas de n’être pas facilement malléable. Et je refuse de changer ce qui fait de moi, celle que je suis pour assouvir leur bon-vouloir.

Quand on s’est rencontré, Cheick m’a aimé malgré ma religion. Il a voulu de moi en tant que femme, malgré ma religion. Il m’a choisi telle que je suis. Et pour cette raison, et parce que ma foi est mienne, je refuse de tomber aussi bas.

Le soir, au diner, Cheick semblait joyeux. Il est agent de recouvrement dans une société de la place. Il m’a dit qu’il avait réussi à encaisser une somme importante. Nous parlons rarement de boulot. Parler de ça, pour lui, c’est un rappel constant du fait que je gagne plus que lui, et que je l’aide plus qu’il ne faut pour nos dépenses. Mais pour moi, le mariage, ce n’est pas une question de biens propres. C’est plus que ça.

Je pars coucher Oumou dans sa chambre et le rejoins dans le salon. Il regarde une chaine d’informations. Je m’assoie près de lui et il m’invite m’allonger près de lui. Ce ne sont pas des moments rares. Mais souvent, on joue la carte de la distance. Dans l’intimité ? C’est parfait, c’est l’extase, c’est le pied ! On ne rate presqu’aucun jour ! Eh oui, c’est intense à ce point.

Malgré ce calme, je décide tout de même de lui parler.

  • On peut parler ?

  • Oh. Oh. Marie, on est "bien" là. Tous les deux… Laisse-ça à demain…

  • Demain, c’est encore loin.

Il fait sa mine, genre il me boude puis il me regarde en souriant.

  • Je sens que je ne vais pas aimer, mais que tu ne lâcheras pas non plus. Alors vas-y, je t’écoute.

  • Désires-tu que je me convertisse ?

  • Marie ?

  • Oui ou non ?

  • Oui. C’est indéniable. Je le veux. Mais je ne t’ai jamais forcé en rien…

  • Mais tu n’as jamais aussi arrêté de m’y pousser… Ce que je veux que tu comprennes, c’est que Cheick, je t’aime. Et je ferais tout pour toi, pour que tu sois heureux… Seulement ça, ce n’est pas possible. Je ne changerais de religion pour personne.

  • Marie, c’est quoi ça ?

  • La vérité. C’est ce que je ressens. Sais-tu tout ce que je fais pour appartenir à ta famille ? Parce que toi, tu appartiens la mienne. Tous ces efforts, au final ne servent à rien. Ton père, ta mère. Ce qu’ils attendent de moi, je ne peux le leur accorder.

  • Mes parents ? Tu ne veux plus faire d’efforts pour mes parents ? Ceux qui m’ont fait ?

  • Et les efforts qu’ils doivent faire pour toi, leur fils ? Ne peuvent-ils pas considérer le fait que je suis ta femme et m’aimer en retour ? Marie, par-ci, Marie par-là… Marie est à bout et elle dépose les armes.

  • Je t’entends, mais je ne t’écoute pas. Ce sont de ma mère et de mon père dont tu parles. Marie, tu feras des efforts, et crois-moi, tu n’es pas à bout.

  • Cheick ?!

  • Je suis très sérieux. Je te l’ai dit : je t’aime. Je t’ai choisi toi et pas une autre. J’ai fait ma part en me tenant devant eux, pour t’épouser. Ça, Marie, ce que tu vis là, c’est le prix à payer pour… Alors supporte ! Je ne veux plus rien entendre.

Fin de la conversation, monsieur a toujours le dernier mot. Il se lève et rejoint la chambre. Assise la tête entre les mains, j’ai l’impression de me noyer.

Je m’agenouille près de la table du salon et prend appui sur mes coudes :

  • Seigneur, Tu connais mes craintes et mes peurs. Donne-moi la force et le courage de les dominer. Je reconnais que Tu peux tout et que c’est Toi, qui me rends capable. Eternel, fais preuve de Grâce envers nous. Sois notre force chaque matin et notre salut lorsque nous sommes dans la détresse. Accorde-moi la force et la patience. Guide mon cœur et mes choix. Amen.

Une histoire de femm...