Semaine 10
Write by Miss Nana
9 MOIS, 40 SEMAINES ET 1 BEBE
By Nana Técla
Semaine 10
_« Tous les organes et systèmes vitaux sont maintenant partiellement formés. Les ongles commencent leur développement. Dans le cerveau, les cellules nerveuses se multiplient, elles se relient entre elles en créant de nombreuses synapses. Le fœtus a maintenant certains réflexes. Il mesure 6cm de la tête au coccyx et pèse environ 14g ». Source : naitreetgrandir.com_
J’étais dans mon troisième mois de grossesse et pour le moment les nausées étaient mon pire cauchemar. A part les subites envies culinaires que j’avais de temps à autres, plus rien ne restait dans mon ventre. Le gynéco m’avait prescrit des médicaments mais j’évitais tant que je le pouvais de les prendre, je ne savais pas quel effet cela aurait sur le bébé. J’avais fondu et surtout j’étais stressée par la situation. Mon père ne me parlait plus que pour me demander comment j’allais. Il était froid avec moi. Seule ma mère et mes sœurs restaient égales à elles-mêmes. Depuis quelque temps, impossible de passer un moment d'intimité digne de ce nom avec Thierry aussi, submergé qu'il était par le travail disait-il. Nous déjeunions quelques fois quand il avait un peu de temps libre. Il me manquait, j’avais besoin d’être avec lui, de discuter de la situation et de ce qu’il fallait faire en ce qui concernait nos deux familles. Il fallait qu’on parle de tout ça et qu’on prenne une décision ensemble sur la conduite à tenir. Je sortis mon téléphone de mon sac et l’appelai.
-Allô chérie ?
-Bonjour mon cœur. Je n’ai pas eu de tes nouvelles de la journée.
-Oui excuses-moi. Une dure journée que ça a été. Comment tu vas toi?
-Ça va couci-couça.
-Mon fils va bien ?
-Qui t’a dit que c’était un garçon ?
-C’est moi qui ai mis, donc je sais.
-Ayooo, si tu le dis. Chéri il faut qu’on parle. Depuis quelques semaines on n’a plus de temps pour nous, or tu sais qu’il y a des choses importantes dont nous devons discuter.
-Oui je sais. Ce n’est pas comme si je pouvais oublier non plus.
-Je ne dis pas ça, mais trouve un moment pour que nous parlions sérieusement. J’ai l’impression que tu me fuis.
-Comment tu peux dire ça Yabo ? Ecoutes, je suis occupé OK ? j’ai des responsabilités, ce n’est pas comme si je faisais la belle vie sans toi non plus. Je travaille OK ?
-Ne t’énerve pas voyons !
-Je ne suis pas énervé. Mais depuis quelques temps tu te comportes comme une petite fille. Avant tu n’étais pas autant sur mon dos.
Je restai sans voix quelques secondes. Depuis quand Thierry me parlait comme ça ?
-Ok, excuses-moi alors dis-je en inspirant pour me calmer. Quand tu trouveras le temps de discuter de notre avenir, fais-moi signe.
Je lui raccrochai au nez. Non mais franchement ! Moi je faisais des gamineries ?! Hmmm. Normal. Ce n’est pas lui qui vomissait à tout va, ce n’est pas lui qui ne dormait pas la nuit. Monsieur vivait sa vie tranquille pendant que je me démerdais avec la situation chez mes parents, et après on dit que je fais des gamineries. Cette discussion avait miné toute ma journée. J’avais attendu qu’il rappelle, mais rien. Même pas un texto pour s’excuser. J’étais rentrée énervée pour m’enfermer dans ma chambre. Vers 22 heures des éclats de voix m’attirèrent dehors.
-Ce n’est pas juste, s’écriait Nina. C’est juste une soirée avec des amis Papa !
-Ce n’est pas toi qui commande dans cette maison, répliqua mon père. Tu n’iras pas un point c’est tout !
-Mais papa ! tu les connais, c’est Mélanie qui fête son anniversaire. je ne suis plus une petite fille, je suis à l’université putain !
-Tu surveilles ton langage avec moi jeune fille ! Université ou pas, tu ne sortiras pas !
Ma mère regardait sa télé tranquillement comme si de rien n’était. Inès et Nina étaient habillées pour une sortie, mais apparemment Papa posait son véto. Inès qui était d’un naturel plus douce et plus respectueuse que Nina, tira sa sœur par le bras en lui disant de se calmer.
-C’est ta faute s’écria Inès dès qu’elle m’aperçut dans le couloir. C’est à cause de toi qu’on nous interdit de sortir maintenant. Comme si on allait toutes tomber enceinte ! Franchement je ne sais pas ce que ton Thierry et toi vous attendez ! Va vivre chez lui qu’on puisse respirer enfin merde !
Au début de sa tirade j’avais juste été surprise, ensuite j’ai vu le regard que mon père me lançait et je me suis sentie comme une pestiférée. Comme si j’avais commis un péché. Je me suis juste retournée pour retourner à ma chambre. Dès que je m’affalai sur le lit les vannes s’ouvrirent. Je pleurais de rage, de frustration et surtout de déception. Je me sentais seule face à tout ça. On toqua à la porte mais je n’ouvris pas, je n’avais pas envie de parler à qui que ce soit. Je ne voulais voir personne. La personne insista un bon moment puis reparti. Je pleurai jusqu’à ce que je me sente soulagée de tout ce poids qui m’oppressait la poitrine. Un peu plus tard ma mère vint toquer, elle ne se gêna pas pour me menacer et je lui ouvris.
-Tu as quoi à t’enfermer dans ta chambre ? et si quelque chose t’arrivait, comment on saurait? Hein ?
-…
-Effaces moi ces larmes-là. Une femme enceinte ne pleure pas. Tu veux faire du mal à mon petit fils ?
-…
-Yabo, vient t’asseoir.
Je m’assis le plus loin possible d’elle. Je lui en voulais autant qu’à tous les autres.
-Yabo, Yabo, Yabo, combien de fois je t’ai appelé ?
-Trois fois maman.
-Yabo, ton père et moi nous t’aimons énormément. Nous ne voulons que ton bien ma fille. Sais-tu pourquoi tu te prénommes Yabo ?
-Non maman.
-Sais-tu ce que signifie ton prénom ?
-Oui maman. Ça veut dire « mère est revenue » ou bien « mère est rentrée ».
-Humm. Tu as raison. Quand je suis tombée enceinte de toi, ton père était encore étudiant. A l’époque je faisais la lessive dans les maisons pendant les vacances pour me faire de l’argent de poche. C’est en faisant ça que j’ai connu ton père. Je faisais la lessive pour ses parents. Nous nous sommes rapprochés et je suis tombée enceinte peu de temps après. Il aurait pu refuser la grossesse, j’avais été imprudente. Mais il a non seulement assumé la grossesse, il s’est aussi opposé à son père qui voulait que j’avorte. Ton grand père a jeté son propre fils dehors. Ton père a été recueilli par son oncle paternel qui s’est occupé de la grossesse jusqu’à ta naissance. Pendant ce temps ton père a laissé les études et s’est lancé dans le commerce. Nous en avons bavé, mais ton père ne s’est jamais défilé. Je n’ai manqué de rien. Le huitième jour après ta naissance, le jour de ta sortie comme on le dit chez nous, il a tenu à ce que nous allions chez son père. Au début, ton grand père avait refusé de nous voir. Mais son petit frère, l’oncle qui nous avait recueilli a tellement insisté qu’il a cédé. Dès qu’il a posé les yeux sur toi il a fondu en larmes. Il a dit « Yabo » ce qui signifie « mère est revenu ». Tu ressembles trait pour trait à sa mère. A partir de ce jour il s’est réconcilié avec son fils.
J’étais stupéfaite. Je ne connaissais rien du passé de mes parents. En tout cas pas cette partie-là. Ma mère avait fait des travaux ménagers pour subvenir à ses besoins, mon père avait abandonné ses études pour prendre soin de sa femme et de moi sa fille. Je regardai ma mère avec un regard nouveau. Cette femme était forte et digne. Et mon père avait fait ce que beaucoup d’hommes n’auraient pu faire dans les mêmes conditions.
-Tu es la prunelle des yeux de ton père Yabo. Il ne veut pas qu’on profite de toi, il veut juste te protéger ma fille.
Me larmes recommencèrent à couler.