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Ecrit par Lilly Rose AGNOURET

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"Mais dis moi Tania, comment se passe la grossesse de ta sœur?"

"Oh, ça va le boss, ça. Tout le monde s’occupe d'elle, maman, Mamie. Tranquille quoi."

"Ah! Et elle va régulièrement à l'école, j'espère."

"Oui, de ce côté-là, ça va."

"Et si tu me parlais du côté qui ne va pas!"

"Ah, toi aussi monsieur Akendengue! Je ne suis pas là pour parler des choses des autres!"

"Je t'écoute Mademoiselle Akendengue. Je t'écoute."

"Non, y a rien. C'est juste que le type qui l'a engrossée, attend deux enfants en même temps."

"Il a de l'énergie, ce type! Il travaille où?"

"Il est avec nous à Raponda. Il passe le bac en même que nous."

"Ah! C'est un lycéen! Ok, au moins, elle a choisi quelqu'un de son âge."

"Ouais, ouais...", fais-je en regardant dans le vide.

"Tu vas cracher le morceau ou faut-il que j'aille voir Agnès Mbeng pour qu'elle me déballe tout ce qu'elle a sur le cœur ! Figure-toi qu'elle m'a menacé la semaine dernière au marché du grand-village. J'achetais tranquillement ma sardine fumée et elle s'approche de moi pour me dire que ta sœur va finir comme moi, parce qu'elle ne sait pas viser haut!"

"Oh! Et qu'est-ce qu'elle voulait dire par-là?"

"Ah, vous les femmes et la manière que vous avez toujours de comparer les hommes en ne tenant en compte que leurs poches. Elle ose me balancer que si j'ai un peu de chance, peut-être que le mari que Pupuce nous ramènera sera capable de sortir 5mille cfa pour la dot!"

"Non, papa! Elle a osé dire ça!"

"C'est la vérité que je te dis. Je suis resté là ébahi! Cette femme n'a pas changé. Mais de là à dénigrer sa fille à ce point ! C'est pour cela que je te demandais des informations sur ce jeune homme. Peut-être que mme Mbeng aurait préféré qu'elle fasse l'enfant avec un pétrolier ou alors le fils d'un PDG ou d'un ministre."

"En tout cas...Dans cette histoire, tout le monde va mettre sa bouche, car nous sommes tous dépassés. Mais, sinon, on est obligé de rester positif."

"Dis-moi, elle était pressée de pouponner, ta sœur? Elle est la meilleure de sa classe depuis des années. Elle a les clés pour un avenir brillant ! Qu'est-elle allée faire dans le lit d'un homme sans protection ? Dans les livres qu'elle lit, on ne parle pas de la pilule ?"

"Le boss, cette histoire-là, je ne veux plus en parler, parce que bientôt, on dira que c'est moi qui l'ai enceinté."

"Tu as beaucoup d'humour, ma fille. Bien, voilà une enveloppe. Il y a cent mille francs à l’intérieur. Donne-la à ta mère. Elle saura quoi faire avec. C'est pour acheter la layette de votre futur bébé."

"Ok, le boss. Vraiment, cet enfant-là n'est pas encore né, mais tout le monde l'attend avec impatience."

"Vous voulez nous faire vieillir trop vite, on va encore faire comment !"

 

Arès avoir fait le ménage et ranger un peu la maison, je m'en vais de chez mon père avec un sourire aux lèvres. Il a réussi à me mettre de bonne humeur, ce type. Et je suis heureuse de le voir plus en forme que la dernière fois. Quand j'arrive à la maison, il est 19h. Je trouve maman assise dans le canapé en train de lire le quotidien L'Union. Elle me sourit en me voyant rentrer.

"Miro était là, il y a tout juste dix minutes."

"Oh! Il a dû m'appeler, mais ma batterie est complètement à plat."

"Ah! Il a laissé deux livres de philosophie pour toi."

"Chouette, chouette, chouette. On les étudie en classe et on a dû mal à les trouver ici. Son père a dû les acheter quand il était de passage à Paris."

"y en a vraiment qui ont de la chance", me fait-elle en souriant. "Dis-moi, mademoiselle Akendengué, où as-tu rencontré ce jeune homme?"

"La vieille, toi aussi, je vais pas me mettre à te raconter mes petits secrets!!!"

"Arrête ton char et réponds à ma question."

"Bon, on s'est rencontrée à la plage, à SOGARA un dimanche. Mais, t'inquiète, ce n'est as mon corps en maillot de bain qui l'a attiré, parce que j'étais encore tout habillée quand il m'est entré dedans."

"Menteuse! Et dis-moi, il n'a pas un ami qui aurait pu voler le cœur de Pupuce. Au lieu de ça, on se retrouve avec ce Peter qui me fous des mots de tête à chaque fois qu'il ouvre la bouche !"

"Ah, non, la vieille. Que les choses soient claires entre nous à partir d'aujourd'hui. Je ne gère pas les affaires de ma sœur. Je veux bien me confesser et reconnaître qu'elle était la nuit où ils ont conçu leur enfant, mais ce n'est pas moi qui l'ai envoyée. Qu'on ne me parle plus de cette affaire sinon, je pense que ma tête va exploser."

 C'est ça la nouvelle génération ? Je suis simplement dépassée. Le type vient de me dire que le père de Miro lui a trouvé un job pour les grandes vacances. Il va travailler 3 mois pleins à Maurel & Praum, et lorsque je le félicite en disant qu'au moins, il pourra s’occuper un tout petit peu de son bébé, il me réponds que cet argent, c'est pour payer son billet pour la France. Il me dit qu'il a déjà ses plans et tout! Qu'est-ce qui ne va pas chez ce type. Il fait les enfants comme ça pour le plaisir ? C'est ça la nouvelle génération ?"

"Maman, je ne sais même pas pourquoi tu te prends la tête! C'est toi-même qui veut les maux de tête parce que c'est toi qui le laisse venir lorgner dans tes marmites et manger à sa guise."

"Mais, je le fais en me disant qu'à force de venir ici et de nous fréquenter, il changera un peu! Et je pense que ta sœur aussi à besoin de l'avoir à ses côtés."

"Huummmm, Bernadette! Tu es vraiment une maman moderne. Faut supporter, ça ira. L'enfant sera là en juin. Après, tu pourras t'occuper d'autre chose que la bêtise de Peter."

"Mon Dieu! Moi qui pensais que l'arrivée du bébé pouvait changer les choses, tu es en train de m'ôter mes illusions !"

"Maman, il a déjà 4 gosses. Quelle différence y a t-il entre eux et celui qu'aura Pupuce. Il n'a que des filles et Pupuce attend une fille."

"Tu penses que si elle attendait un garçon, il réagirait autrement."

"Je pense que c'est un égocentrique qui ne connaît pas la valeur d'un enfant ; et je crois qu'il vaudrait mieux, pour l'équilibre mental de tout le monde, que l'on agisse comme si cet enfant n'a pas forcément besoin de "ce" père-là."

"Ben dis donc ma chérie, tes cours de philosophie te font vraiment mûrir !"

"Non, je pense que ce qui me fait cet effet-là, c'est de savoir qu'un type comme Magloire Akendengue est capable de me traiter comme si c'était lui qui avait planté la graine dans le jardin de Kaba. C'est ça être père. Élever un enfant et l'aimer envers et contre tout. C'est facile d'être distributeur de sperme ; c'est plus difficile d'être père Tiens, voilà une enveloppe que papa m'a demandée de te remettre. C'est pour l'arrivée du bébé. Il s'inquiète lui aussi pour Pupuce."

"Oh! C'est vraiment gentil de sa part. Comment va t-il."

"Il ne boit plus, maman. Il semble plus lucide. Et je croise les doigts pour qu'il ne replonge plus."

"Je croiserai les doigts avec toi, alors."            

PUPUCE- (tome 1)