7 - Edinson

Ecrit par ACLIRL

Coucou à tous! Tout d'abord merci de continuer à lire cette histoire !  Je suis ravie de l'attrait de certains pour mon histoire !! 

 Retrouvez Edinson et découvrez une part de sa vision de Yacine!  Question : que pensez-vous d'Edinson et de son comportement avec Yacine? Je serai ravie de le découvrir!  Bises (et bonne fête des mères si certaines mères lisent cette histoire). _ ACLIRL

***

Dans le monde qu’est le nôtre, vivent des êtres qui, en raison de leurs habitudes sont appelés les « lève-tôt ». Au grognement que je lâche, lorsque quelqu’un ouvre mes volets, on pourrait croire que je n’ai pas connaissance de ce terme. 

 

-       Tiens, tiens. D’où peux-tu bien tirer une telle fatigue ?

Elle choisit vraiment mal son moment. Pour le lui faire comprendre, je relève ma couverture et me cache en dessous. Elle n’insiste pas pour que je lui donne une réponse.

-       Pas de ça chez moi, viens. Le petit déjeuner est prêt, me dit-elle.

Je cesse de bouger. Qui sait ? Elle s’en ira peut-être si elle pense que je me suis rendormi d’un coup.

J’attends quelques secondes et on dirait que cela marche. Elle se dirige vers la porte et la ferme. Rapide et efficace : voilà qui correspond bien à ta réputation Ed. Soulagé je relève ma couverture. Grossière erreur. Zana est devant la porte, les bras croisés, un sourire aux lèvres.

-       Une minute pour te lever, ou je récupère mes clés de voiture. Pas de portable à table.

Elle ouvre la porte et s’en va. Je lâche un grognement dès qu’elle est hors de ma vue. Je relève la couverture, pour de bon cette fois-ci, avant de me diriger vers la salle de bain.

  

Quelques minutes plus tard je sors de ma chambre et donne une tape sur l’épaule de Gilda, mon éternelle manière de lui dire salut. Devant, la télé, je savoure le doux liquide du véritable Or Noir : le Café. C’est en observant l’heure qui s’affiche sur la box TV que je me demande pourquoi Gilda et Zana sont habillées à cette heure-ci. Elles ont l’air d’être prêtes pour une journée de travail pour Tata et d’école pour Gilda.

Lorsque nous arrivons à bout de ce petit-déjeuner, je pose la question qui me trotte dans la tête.

-       Vous allez quelque part ? demandé-je sans montrer d’intérêt particulier.

-       Maman m’emmène voir une de ses anciennes amies du kick-boxing qui est devenue photographe, me répond Gilda.

-       Oh je vois.

Depuis quelques années, Gilda est devenue obsédée par la photographie. Elle a toujours au moins un portrait des personnes qu’elle apprécie. Elle a dédié une partie de sa chambre à cette passion. Elle y met ce qu’elle appelle ses « masterpiece ».  Lorsque je vois le talent qu’elle possède et les photos qu’elle prend, je me sens incompétent. Apprendre quelque chose qui nous passionne, c’est le rêve. Je me retrouve un peu en elle.

-       Profite un max de ta journée. Si tu apprends deux-trois trucs, tu pourras peut-être prendre enfin une photo potable, la taquiné-je.

-       J’y compte bien. Dis-moi maman ? Elle sait faire des montages ton amie ?

Elle questionne ma Tante l’air sournois.

-       Bien sûr ma chérie. Pourquoi ? demande-t-elle les sourcils légèrement froncés.

-       Rien de spécial. Puisqu’Edinson est tellement moche, il pourrait enfin avoir la chance de ressembler à quelque chose sur une photo.

Je lui lance un sourire jaune, qu’elle me retourne bien évidemment. Zana ne fait pas de remarque et empresse Gilda de terminer son petit déjeuner pour qu’elles ne tardent pas. Après avoir lavée ma tasse je me dirige vers ma chambre. Je mets mon ordinateur à charger et m’allonge sur le dos. Ce n’est que lorsque la porte de la maison se referme sur elles que je me décide enfin à me préparer à sortir.

 

***

Je suis devant sa chambre. Je m’apprête à frapper à la porte et m’arrête en plein mouvement lorsque je l’entends parler à quelqu’un.

-       Je ne sais pas trop, un mois peut-être. Mais qu’est-ce que cela change ? dit-il sur un ton (faussement) jovial.

-       Rien pour toi, mais pour moi, pour nous, cela change tout, lui répond une femme.

Est-ce sa femme ? Il ne l’a jamais mentionnée si c’est le cas.

-       Désolé, dit-il le ton beaucoup plus posé que tout à l’heure.

Me sentant de trop, je recule et vais au distributeur. Je m’en vais à pas lents et insère les pièces pour me prendre une barre de snickers, la base. Avant d’ouvrir le paquet, je jette un œil vers la chambre. Une femme qui marche dans la direction opposée à l’air d’en sortir. Elle me fait dos et se dirige vers l’escalier. Je ne parviens pas à voir son visage ou ses mains. Tout ce que je peux dire, c’est que ses mains sont posées sur son visage et les secousses de son dos indiquent des pleurs. Je pense d’abord qu’elle essuie ses larmes, mais en vérité elle bloque sa respiration. C’est sans doute pour que son mari (s’il l’est) ne l’entende pas.

 Seules quelques personnes font preuve d’un tel courage. Même si je ne la connais pas, j’ai immédiatement un immense respect pour elle. Au lieu de m’avancer, je reste bloqué quelques secondes, mon snickers dans la main. Je ne parviens pas à faire le moindre pas.

Une infime partie de moi, se manifeste. C’est celle qui me crie dans un coin de ma tête, qu’un jour, peut-être, j’aurai la chance de connaitre ça : une personne qui se soucie de moi au point de cacher ce qu’elle ressent pour ne rien rajouter à ma peine. Quelqu’un qui pense trouver une place sur ses épaules pour m’aider à supporter mes problèmes, quels que soient les siens.

Tous radotent toujours que l’amour doit être prouvé. Peut-être la meilleure des preuves se fait elle en l’absence de l’être aimé. Pas vrai ?

Sur cette interrogation, je me remets en mouvement et avance enfin vers la porte. Je frappe doucement et entre lorsque l’on me l’autorise.

-       Fiston, comment vas-tu ? me dit-il.

S’il était secoué par sa discussion avec sa femme, il ne laisse rien paraître. Je tente d’agir le plus normalement possible.

-       Je ne suis pas à plaindre. Et vous ? Comment allez… euh… comment vas-tu tonton ?

Il sourit.

-       Tu sais te reprendre ! Haha, s’exclame-t-il.

-       Il y a des erreurs à ne pas répéter, lui répond-je.

-       Je te l’accorde, on ne peut vraiment pas dire le contraire, me sourit-il.

Je m’installe, comme les jours précédents. Je me saisis de mon ordinateur à la batterie pleine.

-       Ça sent le vécu, je me trompe ?

Comme à chaque fois qu’il ouvre la bouche, je tente de pousser la discussion. Tout le monde n’est pas aussi intéressant que lui.

-       J’en ai faites des erreurs crois-moi, me dit-il le ton amusé.

Près à l’écouter, j’active le dictaphone de mon téléphone et me prépare en même temps à saisir les histoires croustillantes qu’il s’apprête à me conter.

-       S’il y en a une que tu devrais recommencer, pour la dernière fois, ce serait laquelle ? lui demandé-je en lui accordant toute mon attention.

Sans hésiter il me répond immédiatement :

-       M’enfuir avec la moto d’Alassane.

-       Elle coûtait cher cette moto ?

-       Non, cette moto ne ressemblait absolument à rien. Tout ne repose pas sur l’argent, fiston. Alassane n’était pas n’importe qui. Personne ne touchait sa moto dans le quartier. Il la laissait parfois même devant chez lui, ce que personne ne faisait à l’époque. Et puis, j’étais plus jeune de 4 ans que lui. Mais, ce que j’ai fait personne ne l’a fait avant moi. Sans compter que je n’étais pas seul.

J’écris les premières ébauches puis m’arrête car cette histoire semble loin d’être finie.

-       Tu t’es baladé avec tes amis ?

Il sourit, nostalgique, un air… espiègle ? Soudain il lâche un petit rire étouffé.

-       Non, j’ai pris la moto, et je suis parti avec sa sœur.

Et dire que je me pensais dérangeant. Les histoires de nos anciens sont toujours les meilleures. On a beau penser faire des conneries, ceux qui nous les interdisent ont une excellente raison : ils ont de l’expérience.

Je ferme l’ordinateur pour profiter de son récit.

-       Raconte-moi tout.

 

***

Putain ce qu’il fait chaud !

A peine sorti, je rentre de nouveau dans la maison pour déposer mon T-shirt et décide de courir torse nu. J’entends mon portable vibrer à l’intérieur. Je regarderai ça plus tard.

Je débute mon footing et redécouvre le paysage qui m’est assez familier. Je commence à connaitre les environs. Je cours et en plein chemin, je revois une petite ruelle qui mène à un endroit que je reconnais. J’emprunte la ruelle étroite. Je sens peser sur moi le regard de certaines personnes. Elles savent probablement que je ne suis pas d’ici. La dernière fois que je passais ici, c’était avec Gilda.

En quelques minutes seulement, j’arrive à l’endroit voulu.

Je pars sur de plus grandes foulées pour extérioriser l’énergie qui brûle en moi. Cela me fait maintenant deux nuits de quasi-insomnie. Hier nuit fut la pire. Ce soir, lorsque je me coucherai, je veux être épuisé pour ne me réveiller qu’au petit matin. En fait, je veux dormir comme un bébé. Voilà mon objectif. C’est mon fuel pendant les 30 ou 40 minutes qui suivent. Je m’en sers pour tenir le cap. 

Comme je l’imaginais hier déjà, courir ici était une excellente idée. Il y a un petit pont et un étang auxquels je n’avais pas prêté attention.

Je repasse près d’un banc ou un vieux monsieur est assis. Je le contourne et aperçois la même Dame qu’hier dans sa petite enseigne : la « Fruitbox ». Lorsque je passe devant, elle me fait un signe de la tête que je lui retourne en m’arrêtant devant elle.

-       Bonjour, dis-je essoufflé.

-       Mon garçon, qu’est-ce qui te ferait plaisir ?

-       De l’eau. Vous auriez de l’eau s’il-vous-plaît.

Elle me sourit et cherche ce que je lui ai demandé pendant que je fouille mes poches.

-       Tu n’es pas d’ici toi, dit-elle une fois que je pose ma pièce sur le comptoir.

-       Ça se voit tant que ça ? lui dis-je.

Elle saisit la pièce pendant que je prends l’eau, et l’insère dans la caisse.

-       Je vis ici depuis toujours c’est tout. Mais je suis sûre que personne ne le remarquera jeune homme, répond-elle en me rendant ma monnaie.

Je sourie poliment et m’en vais en la saluant. Plus loin, j’ouvre la bouteille et me rafraîchis. Je marche vers l’ombre, fier de ma course et comptant décrasser sur le chemin du retour. Je dirige la bouteille vers ma bouche et me renverse de l’eau dessus.

Elle me tourne le dos, mais je sais que c’est elle. Tout le monde n’a pas un tel physique. La tenue de sport qu’elle porte moule tellement bien ses formes… Elle se met se met de profil et se met à faire des fentes. Je la regarde s’abaisser, sachant maintenant d’où elle tient un si eau physique. Elle le travail avec grâce, et tout ce que j’arrive à penser, c’est : ce qu’elle est bonne. Maintenant qu’elle est de profil, je vois la raison de ma quasi-insomnie de la nuit dernière : ses lèvres.

En m’allongeant hier soir, j’ai pensé à ce qui a failli être un baiser. J’y ai pensé, et en l’espace de quelques secondes seulement, je me suis rappelé ses lèvres. Pulpeuses, roses et douces (enfin cette théorie doit être testée). Le reste du temps que j’ai passé éveillé, je l’ai consacré à visualiser toutes les choses possibles et imaginables que je pourrais faire à sa bouche, entre ses lèvres.

Il y a deux jours encore, je me disais que Villy était mon point de départ pour un jour nouveau. Mais Yacine est une tentation dangereuse. Elle stimule l’objet de ma masculinité. Avis aux femmes qui disent que les hommes sont tous les mêmes : vous n’avez pas tort. On ne réfléchit pas toujours avec notre cerveau, mais ne croyez pas que toutes les femmes font cet effet-là. En ce qui me concerne, jamais on ne m’a mis dans un tel état sans être dans la même pièce que moi. Je sens que ces vacances vont être longues. Surtout si je n’agis pas à ce propos.

Je repose mon pied contre l’arbre et consomme mon eau en la matant. Je ne peux pas décrocher les yeux d’elle. Tant pis si on prend pour un stalker. Je veux enregistrer ce moment. Pour mieux m’occuper en rentrant chez moi, me murmure une petite voix dans un coin de ma tête.

 

En dehors de toutes les idées qui me traversent l’esprit – et, oh boy, croyez-moi il y en a – je remarque qu’elle est excellente dans ce qu’elle fait. Je me demande depuis quand est-ce qu’elle travaille ses muscles ainsi. Ses gestuelle est précise et ses mouvements fluides.

Elle n’a rien de ces filles qui ne viennent à la salle que pour faire voir plus de peau que de tissu et en ressortir le maquillage aussi frais qu’en arrivant.

 

Elle est dos à moi et mon désir s’apprête à être visible aux yeux de tous si je n’arrête pas de la mater ainsi.

Yacine, un jour tu me paieras ça. Je m’en fais la promesse. 

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