Ami et Joël, la rencontre (2ème partie)
Ecrit par Dja
La soirée avait fini bien tard avec le feu d’artifice promis aux invités. Ismaël le père de Joël présenta son fils à tout le monde en expliquant qu’il était enfin revenu pour s’installer au pays et travailler à ses côtés. Il en était si fier que sa femme dû venir l’interrompre tellement il s’étalait dans son discours.
Contrairement à son ami, Ismaël partageait avec sa femme une complicité qui les avait toujours rapprochés. Ils prenaient ensemble les décisions les plus importantes. Et même en cas de désaccord, Grâcia et son mari parvenaient à trouver un terrain d’entente.
Espagnole de père et sénégalaise par sa mère, elle tirait avantage de son métissage. Ses parents s’étaient connus alors que son père fuyait la guerre civile en Espagne. Il ne retourna dans son pays qu’après la mort du Général Franco. Cependant, la grand-mère de Joël ne pu suivre son mari, car elle se devait de rester auprès de sa mère malade. Elle n'avait plus qu'elle comme famille, après avoir été chassée de son foyer car elle ne donnait pas de garçon à son mari. Elles étaient donc allées vivre à la capitale et c’est à Dakar que la grand-mère de Joël avait rencontré celui qu’elle suivra à la mort de sa mère. Quelques jours après la fête, Oumar avait convoqué sa fille dans son bureau. Il avait été averti par les triplés des avances de Joël. Il la tança de ne plus revoir ce garçon avec un discours cinglant. Mais, allons savoir pourquoi, ce jour là, Ami lui tint tête et affirma qu’elle était assez grande pour savoir ce qu’elle faisait. Elle cria si fort sur son père avec l’insolence propre aux adolescents que celui-ci la gifla encore plus fort qu’elle en perdit l’équilibre. Jamais encore il n’avait levé la main sur elle. Elle sa fille chérie, son enfant adorée. Aminata baissa les yeux, mais en son for intérieur elle ruminait des idées sombres. Elle en voulait à ses frères qui avaient raconté des mensonges à leur père. Elle en voulait encore plus à ce dernier pour le geste qu’il venait de faire. Elle se promit de se venger de ce qu’elle appelait désormais « la tyrannie des Traoré». Elle ne savait pas encore comment, mais elle finirait bien par se venger de tous ces hommes qui voulaient lui dicter sa conduite. Elle allait avoir 19 ans. Elle se sentait assez grande et responsable pour savoir ce qui était bon ou pas pour elle. Et l’occasion de la vengeance arriva bientôt. ***************** Des mois étaient passés depuis la fête. Joël avait bien pris ses marques dans le cabinet de son père. Il lui arrivait de repenser à Aminata qu’il n’avait plus revu depuis. Il avait bien tenté de rentrer en contact avec elle, mais sa mère lui avait demandé de refréner ses ardeurs. Aussi, plongé dans le travail, il n’avait plus pensé à elle. De plus, il avait accompagné son père dans différents voyages à travers le pays. Ce qui ne lui laissait pas beaucoup le temps pour se concentrer sur la jeune fille. Il en voyait d’autres de temps en temps avec qui il entretenait le genre de relations structurées auxquelles il tenait. Fatoumata avait également dû remettre ses projets de mariage à plus tard. Aminata était en pleine période d’examens de fin d’année et de préparation du baccalauréat. Elle ne voulait pas que quoi que ce soit perturbe sa fille. Pas même son souhait de la voir se marier. Un matin de juin, dans un supermarché, alors qu’il allait régler ses achats, Joël aperçu Ami qui entrait avec sa mère. Il remit rapidement toutes les courses dans le chariot et couru les retrouver dans un rayon, en faisant semblant de s’y trouver là par hasard, occupé à choisir des céréales. Ce fut Fatou qui le vit la première : « _ Ho ! Bonjour Joël, comment vas-tu ? _ Bonjour Yaye Fatou. Je vais bien, merci. Et vous ? Bonjour Aminata ! _ Bonjour ! (elle lui répondit en marmonnant) _ Ca va très bien ! Aminata, tu pourrais te montrer plus polie. Ne fais pas attention, elle est souvent comme ça quand elle ne trouve pas ce qu’elle cherche. _ Ce n’est pas grave ! _ Alors, tu es venu aussi faire des courses ? Aminata voulait certaines choses de filles qu’elle ne trouve pas. _ Yaye ! Tu n’es pas obligée de lui parler de ça. _ Mais il n’y a pas de quoi avoir honte. » Il faut dire que sous ses dehors de femme soumise, Fatoumata loin du regard de son mari se laissait aller. Ce n’était plus la femme effacée et toujours d’accord qui acquiesçait à tout et ne discutait pas ses décisions. Psychologue de formation, elle avait eu la permission d’Oumar de travailler comme professeur dans un lycée. Là-bas, elle se donnait à cœur joie et laissait libre cours à ce qu’elle appelait « sa folie ». Ses élèves appréciaient beaucoup ses cours qu’ils ne rataient pour ainsi dire jamais. Elle leur apportait toujours des souvenirs des voyages d’avant son mariage. Même si elle aimait tous ses enfants, elle avait beaucoup plus de tendresse envers sa dernière qu’elle avait attendue très longtemps. A chacune de ses grossesses, elle avait espéré que le bébé annoncé soit une fille. Elle sortait de chaque échographie déçue et anxieuse par rapport à Oumar qui, même s’il ne le disait pas lui en voulait de ne lui donner que des garçons. Jusqu’au jour où la bonne nouvelle était tombée et que désormais son mari n’avait plus cherché une héritière en dehors du foyer. Il avait reconnu tous ses enfants hors mariage. Ils étaient trois au total. Malgré le respect qu’elle avait pour son mari, elle tint bon quand il se fut agit de faire venir vivre ces enfants à la maison. Elle alla jusqu’à menacer de divorcer s’il insistait. Son beau-père toujours d’accord avec lui ne le suivi pas pour cette fois. Oumar dû donc laisser ses fils or de chez lui. Mais, il subvenait à leur besoins ainsi qu’à ceux de leurs mères respectives. Il aurait pu se marier à nouveau s’il l’avait souhaité, la tradition le permettait. Mais, il ne souhaitait pas perdre la notoriété qu’il avait en étant marié à Fatoumata dont le père avait fait fortune en tant que fermier. En effet, grâce à elle, il était le premier interlocuteur de plusieurs autres fermiers et grands producteurs de la région. Touchant le bras de sa mère qui s’était mise à rêvasser, Aminata lui indiqua la direction de la caisse. Elle souhaitait partir tout de suite et ne voulait surtout pas que Joël finisse ses emplettes avec elles. Mais, celui-ci demanda à Fatou de leur accorder quelques minutes afin de s’entretenir rapidement avec sa fille. La mère ne se le fit pas répéter et elle les devança à la caisse en leur demandant néanmoins de se dépêcher. Restés seuls, Aminata regarda Joël avec une once d’agacement. Que lui voulait ce garçon ? « _ Pourquoi me fuis-tu ? _ Je ne te fuis pas. Seulement, je t’ai déjà expliqué que tu ne m’intéresse pas. _ Ha bon !? Et pourquoi ? _ Pour toutes les raisons que je t’ai données l’autre jour. Et puis, je ne veux pas que mes frères te cassent ta si jolie figure (elle ajouta cela avec une pointe de moquerie dans la voix). _ Ecoute, oublions tes frères pour le moment. Même si je tiens à te dire que je suis ceinture noire de judo et que je n’ai pas peur d’eux. Mais bon, bref ! Pourrions-nous simplement nous voir de temps en temps ? Tu me plais beaucoup tu sais. _ Ha ? On ne dirait pas dis donc. Depuis la nuit de ta fête, je n’ai plus eu aucune nouvelle de toi. _ Je t’ai donc manqué. (il souriait) _ Non ! Je n’ai pas dit ça ! Simplement, tu m’avais l’air empressé et tu as tout de suite disparu. _ Bon, alors, laisse-moi la possibilité de me rattraper. _ Hum ! _ S’il te plaît ! _ C’est d’accord. Mais, cela ne veut pas dire que je sors avec toi. Je veux juste que nous soyons amis. _ C’est bien cela. Merci ! _ Très bien ! Allons retrouver ma mère à présent _ Je peux te faire un bisou sur la joue ? _ Ne pousse pas trop loin stp _ Je rigolais. Tu es toujours aussi sauvage ? _ Hum !!! Allons-y !». Joël était heureux. Il pourrait enfin la courtiser tranquillement. Si elle pensait qu’elle serait son amie, elle se trompait lourdement. Il avait à certains moments longuement parlé d’elle avec sa mère. Et son père n’était pas contre une union. Il la connaissait depuis qu’elle était petite. Mais il savait qu’Oumar n’accepterait pas aussi facilement de les laisser se fréquenter. Aussi, pourquoi ne les laisseraient-ils pas se voir innocemment ? Cela pourrait faciliter les choses. Ami de son côté s’était finalement souvenu de la gifle que son père lui avait donnée. Elle avait également entendu son père et sa mère se disputer une fois au sujet de Joël. Son père ne voulait pas entendre parler de lui et elle se disait donc, qu’elle tenait là sa revanche. Son père et ses frères regretteraient toutes les privations et humiliations qu’ils lui avaient fait subir. Elle avait pris sa décision : elle sortirait avec Joël.