
Chapitre 14
Ecrit par Verdo
Je décidai de tout raconter à Cynthia. Assis à table, je lui fis écouter l’enregistrement que j’avais pris de Yawavi. Sa voix était claire, pleine de menaces et de reproches infondés. Cynthia écoutait en silence, ses mains jointes, ses yeux rivés sur moi.
« Elle est vraiment allée trop loin cette fois, » murmura-t-elle finalement. Elle est cinglée !
« Je sais. C’est pour ça que je pense qu’il faut agir, » répondis-je calmement.
<<Il faut que ça s'arrête Thierry ; ou ça risque de mal finir.>> Dit-elle.
Après une longue discussion, nous décidâmes d’apporter l'enregistrement à la direction générale de l'entreprise, étant un groupe. Bien que nous ne travaillions pas dans la même entité, Yawavi et moi étions sous le même groupe Heidelberg cement, ce qui signifiait que le problème relevait également de leur juridiction.
Quelques jours plus tard, je pris mon courage à deux mains et me rendis à la direction du groupe qui n'est rien d'autre que Cimtogo. J’avais préparé une copie de l’enregistrement et m’assurai de garder l’original en sécurité. Quand j’entrai dans le bureau du DRH, je sentis un mélange de nervosité et de détermination.
« Thierry, que puis-je faire pour toi ? » me demanda-t-il en m’invitant à m’asseoir.
Je pris une profonde inspiration. « Monsieur, je suis ici pour vous parler d’un problème sérieux. »
Je lui expliquai toute l’histoire, depuis les premiers jours où Yawavi avait commencé à me harceler, jusqu’à ses menaces répétées contre Cynthia et moi. Puis, je sortis mon téléphone et lançai l’enregistrement.
Il écouta attentivement, le visage grave. Quand l’enregistrement prit fin, il leva les yeux vers moi.
« Thierry… Merci de m’avoir apporté ces preuves. Je te promets que cette affaire sera tirée au clair. »
Il marqua une pause, hésitant, puis ajouta :
« Il y a quelque chose que je dois te dire. Tu sais, c’est Yawavi elle-même qui nous avait rapporté ta relation avec Cynthia. C’est à cause de ses déclarations que nous avons dû intervenir. »
Cette révélation me laissa sans voix. Je m’étais douté que Yawavi était derrière nos problèmes, mais l’entendre de la bouche du DRH confirmait l’ampleur de sa manipulation.
Avant de partir, il me serra la main et me promit que des mesures seraient prises.
Quelques jours plus tard, je reçus un appel du DRH. Il m’informa que Yawavi avait été mise à pied pour une durée de trois mois. Ce n’était pas une solution définitive, mais c’était déjà un soulagement de savoir qu’elle n’était plus dans les parages pour l’instant.
Je rentrai chez moi ce soir-là avec un peu plus de sérénité. Cynthia m’accueillit avec un sourire et m’embrassa. « Alors ? » demanda-t-elle.
« Elle a été suspendue pour trois mois, » lui répondis-je.
Elle hocha la tête. « C’est un début. »
Mais le répit fut de courte durée. Quelques jours plus tard, alors que je rentrais à Lomé, je trouvai Sena devant chez moi. Elle semblait furieuse, les bras croisés, prête à exploser sans aucune honte.
« Thierry ! » cria-t-elle dès que je m'arrêtai au portail avec la voiture.
Je restai immobile, surpris par son attitude.
« Tu oses harceler ma sœur et la faire suspendre ? N'as-tu pas honte de toi? Tu n'as pas pu t'occuper de moi, penses-tu t'occuper d'elle? Espèce de lâche ! » Elle me lança ces mots sans retenue, ses yeux flamboyant de colère. Les badauds arrivèrent et nous regardèrent.
Cynthia, qui était dans la maison,sortit, alarmée par le ton de Sena. Elle voulut intervenir, mais je levai une main pour lui demander de rester en dehors.
« Laisse-moi gérer, Cynthia, » dis-je calmement.
Je me tournai vers Sena. « Après tout ce que tu m'as fait, tu oses venir ici et m'accuser à tord? N'as-tu pas honte que tu te pointes ici en défendant ta sœur, celle là même qui a ruiné notre mariage? Tu es toujours bête a ce que je vois. »
<<Tu n'es qu'un Don Juan ! Je vois que tu l'as finalement amenée s'installer ici, parlant de Cynthia. Cette pétasse.>>
<<Je ne te permets pas. Que ça soit la première et la dernière fois que tu insultes Cynthia. Tout ce dont tu m'as privé dans notre mariage, je l'ai retrouvé avec elle. Si toi même tu ne sais pas prendre soin de ton couple, tu es toujours à l'écoute de ta famille surtout ta sœur, ne viens pas accuser quelqu'un d'autre. Tu m'as trompé avec presque tout le quartier ici, je n'ai rien dit; ensuite tu as abandonné tes enfants. Dégage de chez moi et va rejoindre ta menteuse et cinglée de sœur !>>
Je m'approchai d'elle.
« Ne m’approche pas avec tes mensonges ! » hurla-t-elle.
Je soupirai, puis me dirigeai vers ma chambre. Je revins avec l’enregistrement que j’avais gardé précieusement. Je pris également un petit amplificateur bluetooth que je connectai.
« Puisque tu viens m'accuser devant tout le quartier que je harcèle ta sœur, ouvre bien tes oreilles et écoute.» lui dis-je sèchement.
Elle hésita, mais finit par obtempérer, toujours sur la défensive. Je lançai l’enregistrement. Ce fut rempli de la voix de Yawavi, ses menaces, ses aveux, tout.
Au fur et à mesure que les mots résonnaient, je voyais l’expression de Sena changer. Sa colère se transforma en confusion, puis en choc. Quand l’enregistrement s’arrêta, elle leva les yeux vers moi, la bouche entrouverte, incapable de parler. Les badauds commencèrent à murmurer. D'autres allaient même jusqu'à insulter Sena et sa famille. Elle l'avait bien cherché.
« Voilà la vérité, Sena. Ta sœur t’a manipulée tout ce temps. Elle a détruit ton foyer et elle a tenté de détruire le mien. Mais comme tu es toujours à ses bottes comme une chienne, tu n'as rien vu venir et tu oses venir dans ma maison pour m'insulter devant tes enfants que tu n'as plus vu depuis belle lurette ! Maintenant dégage de chez moi!>>
Criai-je.
Cynthia sentait que je devenais de plus en plus colérique alors elle s'approcha.
<<Chéri, s'il te plaît, il y a déjà plein de monde qui nous regarde. Donne moi les clés de ta voiture et rentre. Je me charge de la faire entrer. Laissons Sena seule ici avec ses problèmes.>>
Je n'hésitai pas avant de lui remettre la clé.
Sena resta figée, puis pâlit soudainement. Avant que je ne rentre dans la maison, elle s’effondra sur le sol, inconsciente.
« Sena ! » cria Cynthia en se précipitant vers elle.
Les badauds nous aidèrent en l'amenant dans mon salon.Nous l’aidâmes à s’allonger sur le canapé, et je courus chercher de l’eau. Tout le monde s'en alla avec des murmures par ci et là.
Quand elle reprit enfin connaissance, ses yeux étaient remplis de larmes.
« Comment ai-je pu être aussi aveugle ? » murmura-t-elle.
Je ne répondis pas. Ce n’était pas le moment de lui faire des reproches. Nous restâmes tous les trois assis en silence, chacun perdu dans ses pensées. Nous la laissâmes passer la nuit au salon pour qu'elle reprenne des forces avant de s'en aller au lever du jour.
Le lendemain matin, après une nuit chaotique, je trouvai Sena éveillée sur le canapé. Ses yeux étaient gonflés, le visage marqué par une profonde tristesse. Elle leva doucement les yeux vers moi, hésitant à parler.
« Thierry… Je suis désolée, » murmura-t-elle finalement, brisant le silence.
Je la regardai sans un mot, attendant qu’elle poursuive.
« Je m’excuse » continua-t-elle, la voix tremblante. « Je sais que je t’ai fait beaucoup de mal. Mais tu dois savoir que tout ça… ce n’était pas entièrement moi. »
Elle inspira profondément avant de reprendre, les mots semblant lui brûler les lèvres.
« C’est Yawavi qui a tout orchestré. Elle m’a poussée à te mépriser, à ne pas te respecter. Elle m’a dit que tu n’étais pas l’homme qu’il me fallait, que tu ne prendrais jamais bien soin de moi. Elle répétait que je méritais mieux, que je dois continuer mes études, travailler et être autonome. »
Elle baissa les yeux, visiblement honteuse.
« Elle m’a même convaincue de vendre la boutique, de quitter la maison… et… » Elle marqua une pause, ses mains tremblant légèrement. « Et de te tromper. Je pensais qu’elle avait raison vu la belle vie de célibataire qu'elle menait. Mais maintenant je vois qu’elle a détruit tout ce que nous avions construit. Elle s'est juste servie de moi. »
Ses aveux me laissèrent un goût amer. J’avais longtemps cherché des réponses à l’effondrement de notre mariage, et maintenant que je les avais, elles étaient plus douloureuses que je ne l’avais imaginé.
« Sena, » dis-je calmement, « pourquoi ne pas m’avoir parlé de tout ça plus tôt ? Pourquoi avoir écouté Yawavi sans jamais venir vers moi ? Je l'avais présenti depuis belle lurette.»
Elle secoua la tête, des larmes coulant sur ses joues. « Je ne sais pas, Thierry. J’étais perdue. J’ai été faible. Mes parents aussi l'ont encouragée. »
Quelques instants plus tard, Sena demanda à voir Trinidad et Koffi. Je n’étais pas certain que c’était une bonne idée, mais j’acceptai. Je les appelai, et Trinidad apparut en premier.
Dès que Sena tenta de lui parler, Trinidad la regarda froidement et déclara : « Je n’ai rien à te dire, maman. » Puis elle se détourna et partit.
La réaction de Trinidad brisa visiblement Sena. Elle se tourna vers moi, désespérée.
« Elle ne veut même pas me parler, Thierry… »
« Que t’attendais-tu ? » rétorquai-je doucement. « Tu les as abandonnés. Et pendant ce temps, Cynthia a pris soin d’eux, les a écoutés, les a aimés. »
Sena hocha la tête, le visage sombre. Elle avait l’air de comprendre, mais la douleur était palpable.
Cynthia, qui était restée en retrait, intervint à ce moment-là. Elle alla voir Trinidad dans sa chambre et lui parla calmement. Je ne savais pas ce qu’elles se disaient, mais je pouvais entendre la voix apaisante de Cynthia à travers la porte. Quelques minutes plus tard, Trinidad revint dans le salon. Elle ne dit pas un mot à Sena, mais elle s’assit à mes côtés, tenant ma main.
Je pris une profonde inspiration. « Sena, il est temps que tu partes. »
Elle leva les yeux vers moi, blessée. « Thierry, je… »
« Tu as causé assez de dégâts, » dis-je, essayant de rester calme. « Les enfants sont plus heureux maintenant. Ils ont trouvé une stabilité. Et moi aussi. Si j'étais certains hommes, je ne te laisserai jamais m'approcher. Mais ce n'est pas le cas. Il faut que je me libère de tout ce poids que j'ai en te pardonnant. Je ne t'en veux plus. Mais tu n'es pas la bienvenue ici. Laisse du temps aux enfants ; le temps de digérer tout le mal que tu leur as fait. Quand le moment arrivera, ils viendront à toi.>>
Sena baissa la tête, les larmes recommençant à couler. Elle se leva lentement, ramassa son sac, et se dirigea vers la porte. Avant de sortir, elle se retourna une dernière fois.
« Je suis désolée, Thierry. Je suis désolée pour tout. Je vois maintenant que j’ai gâché notre mariage et repoussé mes propres enfants… pour rien. Mais sache que notre histoire est la plus belle que je n'ai jamais eu dans ma vie.»
Elle franchit la porte et disparut dans la lumière du matin.
Je restai debout un moment, immobile, à regarder la porte. Cynthia s’approcha de moi et posa une main rassurante sur mon épaule.
« Ça ira, chéri, » dit-elle doucement.
Je hochai la tête, bien que le poids des événements soit encore lourd sur mes épaules. Sena avait enfin compris, mais à quel prix ? Il ne restait plus qu’à avancer, une étape à la fois, avec ceux qui avaient choisi de rester à mes côtés.
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Quelques mois plus tard…
Le jour tant attendu arriva. J’organisai la dot de Cynthia dans une atmosphère joyeuse et chaleureuse. Toute ma famille était là, de ma mère, rayonnante de bonheur, à mes oncles et tantes qui ne cessaient de plaisanter. Du côté de Cynthia, sa mère était tout souriante, fière de voir sa fille faire un si grand pas.
« Thierry, je savais que tu étais un homme bien, » me glissa sa mère avec un clin d’œil.
Monsieur Gervais, fidèle à lui-même, ne manqua pas de me taquiner. « Thierry, avec une femme comme Cynthia, tu n’as plus le droit à l’erreur. Tu sais qu’elle ne te laissera pas filer. »
Je ris. « Ne vous inquiétez pas, Monsieur Gervais. J’ai bien compris la leçon. »
La fête fut splendide. Musique, danses et éclats de rire animèrent la soirée. Les invités furent généreux : nous reçûmes des cadeaux en abondance, des enveloppes remplies de mots doux et d'argent, ainsi que des objets symboliques pour notre futur foyer. Cynthia, vêtue de son pagne traditionnel, était tout simplement magnifique. Je ne pouvais détacher mon regard d’elle.
Quelques jours après la cérémonie, nous nous envolâmes pour Hawaï. Dès que nous atterrîmes, je fus émerveillé par la beauté des paysages : des plages de sable fin, des eaux turquoise et des montagnes verdoyantes à perte de vue.
« Thierry, regarde cette vue ! » s’exclama Cynthia en se penchant à la fenêtre de notre hôtel.
« Rien n’est aussi beau que toi, » répondis-je en souriant.
Elle rougit légèrement. « Tu sais toujours quoi dire pour me faire fondre. »
Nous passâmes nos journées à explorer les lieux touristiques. Nous fîmes des balades en bateau, le vent caressant nos visages alors que nous admirions les dauphins jouant dans les vagues. Une nuit, après un somptueux dîner dans un restaurant au bord de la mer, Cynthia me regarda avec tendresse.
« Thierry, je n’ai jamais été aussi heureuse. Merci de m’avoir choisi. »
Je pris sa main. « C’est moi qui devrais te remercier, Cynthia. Tu m’as appris ce que signifie réellement aimer et être aimé. L'adage <<pour le meilleur et pour le pire>> avait un sens avec toi. >>
Nous retournâmes à notre hôtel de luxe, où, dans l’intimité de notre suite, nous laissâmes nos corps parler à la place des mots. Hawaï ne fut pas seulement une destination de rêve, c’était le début d’une vie nouvelle et heureuse pour nous deux.
Alors que je contemplais le lever du soleil depuis le balcon, Cynthia, blottie contre moi, murmura : « C’est ça le bonheur, Thierry. Avec toi, je me sens complète. »
Et pour la première fois depuis longtemps, je sentis que ma vie avait enfin trouvé un équilibre parfait.
À suivre…
Écrit par Koffi Olivier HONSOU.
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