Chapitre 16 : Agnès
Ecrit par Mayei
Chapitre 16 : Agnès
...Salomé...
J’étais debout très tôt, bien avant Maxime qui dormait toujours
d’ailleurs. Je voulais vite me rendre à la maison et croiser mes frères. Je
n’arrive toujours pas à croire qu’ils soient à Daloa travaillant à la scierie.
Quelle était la probabilité que leurs vies prennent ce tournant ? Je
serais tentée de dire zéro mais je serais sûrement en train d’usurper la place
de Dieu. Néanmoins j’avais du mal à le croire quelque chose en moi
m’interpellait sur le fait que tout ceci n’était pas correcte. J’étais persuadée
du fait que quelque chose sentait mauvais sous ce tableau-là.
Je me demandais si je devais sortir et prendre le taxi pour me
rendre à la maison familiale ou tout simplement réveiller maxime pour
qu’ensemble nous y allions. Je ne me tracassais pas à réfléchir encore
longtemps puisqu’il venait de se réveiller. Son premier réflexe fut de vérifier
si j’étais toujours dans le lit en glissant maladroitement sa main sur la place
où j’avais dormi hier. Cela m’arracha un sourire.
Moi : je suis là !
Maxime : il est quelle heure ?
Moi : huit heures et deux minutes
Maxime : et tu es déjà apprêtée comme ça ? Tu es sûre de t’être
bien reposée après tout ce trajet ?
Moi : oh oui ! J’allais même t’abandonner seul dans cette chambre
d’hôtel si tu ne t’étais pas réveillé à temps,
Maxime : heureusement que la chance est de mon côté.
Il se dépêcha de prendre une douche et pendant ce temps, je
préparais notre petit déjeuner. Nous n’allions tout de même pas sortir en ayant
le ventre vide ! je devais m’occuper je mon homme. J’imaginais la tête de
Nancy si j’avais dit ça devant elle lol. J’aimais cet hôtel dans lequel nous
séjournions. Il était très bien équipé et il y avait même des couverts. Avec
les courses que nous avions faites pour nous-même, faire le petit déjeuner
était chose aisée. Je pris deux verres dans le placard du haut quand tout à
coup je sentis un mouvement dans mon cœur, comme si l’on m’électrocutait. Cette
sensation était si brusque que je lâchais les deux verres qui se brisèrent en
mille morceaux contre le sol.
Le bruit avait dû alerter Maxime qui se précipita vers moi, la
chemise mal boutonnée.
Maxime : attention à ne pas te faire mal
Il me passa mes chaussures et me fit asseoir à la table.
Maxime : tu me sembles perdue
Moi : mon esprit n’est pas tranquille, je ne sais pas quoi
exactement mais quelque chose ne va pas.
Maxime : reste assise ! Reste calme et commence à manger. De mon
côté je vais nettoyer tout ce qu’il y’a parterre.
J’avais essayé de mettre quelque chose dans ma bouche mais j’avais
tout à coup perdu l’appétit. J’étais fort tracassée et mes sens en éveil.
Qu’est-ce que cela pouvait bien être ? Je pressais Maxime pour que nous
prenions la route pour rejoindre la famille. Il fut obligé de manger à la
va-vite afin que nous nous en allions. Mon cœur battait d’une peur venue de je
ne sais où. Plus nous approchons de la maison plus cette sensation
s’accentuait. A quelques mètres du portail je vis des personnes rentrer en
ayant toutes des mines tristes. Certains avaient les bras qu’ils tenaient dans
le dos, d’autres la tête baissée. Je regardais Maxime. Non ! Ce ne pouvait pas
être ce à quoi je pensais.
Dès qu’il mit le levier de vitesse sur Park, je descendis de la
voiture et poussais le portail. Des gens étaient debout dans chaque coin de la
cour. Je tournais la tête vers la droite, mes frères y étaient tous, tristes et
silencieux. Sur la gauche je voyais Agnès et ses filles qui se lamentaient.
Agnès se trainaient à même le sol et des dames essayaient de lui remonter le
moral.
Non ! Je ne pouvais pas y croire. Non ! Je refusais de l’admettre.
Non ! Je refusais de l’accepter. Je me tenais debout, incapable de faire un pas
de plus. D’ailleurs mes membres eux-mêmes refusaient d’exécuter l’ordre que mon
système leur envoyait. Je voyais maxime s’approcher de moi et me prendre la
main puis George nous retrouva.
George : viens Salomé
Moi : où est papa ?
George baissa la tête et ne donna aucune réponse à ma question.
Moi (calmement) : où est papa George ?
George (prenant ma main) : viens d’abord avec moi nous parlerons
avec Thierry et Albert
Moi (me dégageant) : je t’ai demandé où est mon père !
J’avais tellement crié que tous les regards étaient maintenant
portés sur moi. Je les regardais aussi. Je croisais des yeux des personnes que
je reconnaissais et qui m’avaient reconnue. Ces personnes-là se mettaient à
murmurer se demandant si c’était vraiment moi ou ce que je faisais là. Ceux que
je ne connaissais pas essayaient sûrement de comprendre qui était cette fille
qui criait comme ça. Agnès se mit debout et en tenant son pagne avançait vers
moi en pleurant.
Agnès : ton père oooooh ! Ton papa oooooh ! Mon mari ooooh ! Il
nous a laissées. Gnahoré est parti ooooh Salomé. Il nous laisse avec qui
maintenant ? Il nous laisse avec qui.
Elle se jeta dans mes bras et je n’avais d’autre choix que de la
maintenir et la consoler. C’est à ce moment-là que je réalisais qu’il était
parti. Mon père était mort ! Je l’avais vu hier seulement. J’avais l’intention
de l’envoyer avec moi à Abidjan et faire tout mon possible pour que la maladie
soit régulée. Il n’avait pas attendu, il ne m’avait pas attendue. Mon cœur se
serra et mes larmes inondèrent mon visage. J’avais mal, j’avais tellement mal.
Les dames qui auparavant consolaient Agnès vinrent la retirer de
mes bars et je tombais dans celle de maxime. Ma gorge était nouée, aucun mot
n’arrivait à traverser mes lèvres. Il m’entraîna vers mes frères. Je voyais
Thierry et Albert après cinq années d’absence et c’était dans la tristesse.
C’était dans la douleur. Ils me prirent dans leurs bras mais gardaient la mine
digne. En Afrique un homme ne pleure pas quel que soit la douleur. Nous étions
à l’écart alors que Agnès et ses filles recevaient toute l’attention.
Et si je n’étais pas venue hier ? Et si je n’avais pas insisté
pour voir mon père ? Il serait mort derrière moi. J’allais être anéantie si les
événements s’étaient déroulés de la sorte. J’allais m’en vouloir à jamais. Mais
je pense que des moments plus éprouvants nous attendaient devant. Nous allions
être mener à prendre des décisions par rapport à papa, son enterrement, tout ce
qu’il y avait à faire. J’avais du mal à croire que je prononçais ce mot.
J’étais désormais orpheline de père et de mère.
...Linda...
Je n’étais pas rentrée chez moi la nuit passée. Nath avait laissé
sa voiture au bureau et m’avait fait conduire jusqu’à chez lui, une première
pour moi. Là encore il n’y avait rien d’extravagant. La maison tenait en bon
milieu du terrain et étaient entourée d’une pelouse bien entretenue. Elle était
basse donc aucun escalier ce qui était différent de chez moi. Tout comme son
bureau la décoration était sobre et faite dans des teinte de gris et blancs.
Nous avions passé la nuit ensemble à profiter de nos corps au
point de se réveiller ce matin avec des courbatures un peu partout. Il était
onze heures ! Non ! Je n’avais pas dormi aussi longtemps ! En même temps je
n’avais pas ressenti tout ce bien être depuis fort longtemps aussi. Je pris mon
téléphone qui était sur la table à côté du lit et fus surprise par le nombre
d’appel en absence. Emmy avait essayé de me joindre certainement inquiète du
fait que je ne sois pas encore au bureau et Salomé aussi. Les appels de cette
dernière étaient nombreux alors je la rappelais immédiatement.
Salomé décroche et rien qu’au son de sa voix, je me mis à
paniquer. Elle était toujours joviale lorsqu’on parlait elle et moi au
téléphone.
Moi : qu’est-ce qu’il y’a ? Comment ça va à Daloa ?
Salomé : je viens de perdre mon père ce matin même Linda.
Moi : non ! Non ce n’est pas possible !
Salomé : malheureusement si !
Moi : je suis tellement désolée ma chérie. Tu sais quoi ? Je vais
essayer de contacter les filles et voir si on peut faire le déplacement jusqu’à
Daloa. Vous avez déjà établi un programme ?
Salomé : non pas encore. On s’occupe des premières formalités
d’abord
Moi : ok pas de soucis
Salomé : je vais me reposer un peu
Moi : ok tiens moi au courant ma chérie.
Oh la pauvre chérie. Perdre son père après l’avoir retrouvé. Nath
sortit de la douche et me retrouva assise sur le lit la mine triste. Je lui
expliquais ce qui se passait avec Salomé et il soutint mon idée de faire le
trajet jusqu’à Daloa et être là pour Salomé dans ce moment triste qu’elle
traversait. Il se pencha et m’embrassa à pleine bouche. Nous nous séparions en
souriant.
Nath : tu me rends fou
Moi : je ne suis pas dans les déclarations monsieur
Nath : eh bien je vais vous rendre plus romantique mademoiselle
Moi : ce sera peine perdue
Nath : on verra bien...nous verrons bien.
Je le remplaçais sous la douche pour me tenir prête. J’allais encore
enfiler les vêtements de la vieille puisque je n’avais rien apporté avec moi.
J’ai eu Emmy au téléphone pour lui signifier que je serais au bureau en début
d’après-midi. J’envoyais des messages aux filles afin que nous nous retrouvions
à la buvette de violette pour décider de ce qui serait fait pour Salomé.
Nath : tu passes cette nuit avec moi ?
Moi : je ne pense pas !
Nath : tu es déjà fatiguée de moi à ce que je vois.
Moi : ça n’a rien à voir tu sais très bien que...
Nath : que ?
Moi : rien laisse tomber mais dès le départ je ne t’ai pas caché
mon statut matrimonial. Il faudrait qu’on émette une certaine réserve par
rapport à ça.
Nath : es-tu heureuse avec lui ?
Moi : nous n’allons surtout pas parler de comment je me sens avec
mon mari. Toi et moi c’est juste le sexe Nath. Je ne peux rien t’offrir d’autre
et c’est à prendre ou à laisser. À toi de voir. Je ne veux pas me retrouver
dans une situation compliquée engageant quelconque sentiment. Le sexe et rien
d’autre...si, peut être ta compagnie.
Je le regardais dans les yeux après avoir sorti mon mini discours
qui j’espérais lui avait remis les idées en place. Mon couple avait pris un
coup ces derniers temps mais tout couple traverse des moments difficiles de
temps à autre. Ça ne voulait en aucun cas signifier que ce soit la fin.
J’agissais certainement comme une écervelée mais je voulais juste me détendre,
profiter de quelqu’un qui me témoigne toute l’attention que me refuse Dharan.
Ce n’est pas ma faute si Nath correspond parfaitement à ce que je cherche en ce
moment, au fond de moi je sais très bien que cette idylle entre Kalou et moi
sera passagère.
Nath : si vous décidez d’aller sur Daloa, qui conduira ?
Je vois qu’il change carrément de sujet ! J’allais simplement le
suivre dans sa démarche.
Moi : Nancy ou moi je ne sais pas pourquoi ?
Nath : parce que je vous conduirai jusqu’à Daloa
Je voulus riposter mais il ne m’en laissa pas le temps, se
volatilisant sous mes yeux pour je ne sais quelle autre pièce de la maison.
Chacun de nous rejoignit son boulot et à ma descente j’allais directement chez
violette où elles m’attendaient avec Nancy. Je leur expliquais rapidement que
Salomé avait perdu son père et qu’fallait qu’on se montre présente.
Violette : j’aurais tellement voulu y aller mais richard est
absent, je ne peux donc laisser les enfants tous seuls avec la servante pour
plusieurs jours.
Moi : je comprends et je sais que si nous expliquons la situation
à Salomé elle comprendra aussi
Nancy : moi je suis partante en tout cas.
Deux jours après Salomé nous fit parvenir les programmes pour les
obscènes et la date de notre départ fut décidée. Finalement j’allais avec Nath
dans sa voiture tandis que Nancy elle, était du voyage avec son mari.
...Agnès Gnahoré...
Mon mari sera enterré demain. Je n’avais pas du tout mal qu’il ait
quitté ce monde puisque ces dernières années sa présence était égale à son
absence. Son maigre salaire d’instituteurs arrivait à peine à nous mourir. Si
je n’avais pas eu des sponsors dans cette ville, j’étais déjà morte depuis
longtemps. C’étaient ces sponsors-là qui me remettaient de l’argent avec lequel
je m’entretenais et faisaient profiter mes filles : Amandine 19 ans,
Solène 16 ans et la toute dernière Mireille, qui avait quinze ans.
Il faisait nuit mais je ne trouvais pas le sommeil. J’avais
observé tout ce qui se passait depuis le retour de Salomé dans cette cour.
D’abord son apparence en elle-même. Elle avait développé une certaine classe et
son teint on n’en parlait pas. Sa beauté s’était encore plus raffinée. En un
mot, elle ne passait pas inaperçue. D’ailleurs à chaque fois que je passais
dans la cour je surprenais des chuchotements sur comment elle était belle
comparée à mes filles. D’autres se demandaient si elles étaient vraiment sœurs.
Ensuite le monsieur qui la suivait ! C’était clair qu’ils
sortaient ensemble. L’homme dégageait l’odeur de la richesse. Sa voiture même
parlait pour lui. Les provisions qu’ils avaient emmenées avec eux étaient
conséquentes et il n’hésitait pas une seconde à mettre la main dans la poche
pour aider avec les funérailles. Il avait lui-même proposé de prendre les frais
de la morgue en charge. En d’autres termes, elle avait pêche un gros poisson.
Pour finir ses amis étaient arrivées de la ville. De belles
femmes, classes, respectables aux bras de leurs maris. Les gens qui passaient
s’extasiaient à l’entrée de la cour quand eux tous y étaient. Leurs voitures
étaient garées devant et ça attirait l’attention. Chacun faisait son petit
commentaire. A eux, ils avaient tout pris en charge. Les bâches, la nourriture
après l’enterrement, tout, je vous dis absolument tout.
Je ne pouvais me faire qu’à l’évidence, moi qui pensais qu’elle
allait foncer tout droit dans le mur en quittant ici, se prendre une grossesse
d’un vagabond et finir sa vie pauvre. Voilà qu’elle me montre le contraire et
expose sa métamorphose sous mon nez. Je poussais un long soupire et essayais de
voir un peu plus clair dans le noir alors quelqu’un marchait droit vers moi.
Moi : qui est là ?
« C’est moi maman »
Moi : Amandine ?
« Oui maman »
Moi : approche !
Je la détaillais de la tête au pied. Elle portait une robe qui lui
moulait le corps. Ma fille avait tout pour séduire, pas comme Salomé qui était
mince comme le squelette ou la brindille du balai. Amandine avait son charme à
elle et se débrouillait du mieux qu’elle le pouvait pour s’en sortir à l’école.
Moi : d’où sors-tu comme ça ?
Amandine : j’étais juste devant le portail, je parlais avec un ami
Moi (piquée à vif) : ne me dis pas que tu parlais encore avec ce
vaurien de mécanicien !
Amandine : Armand ! Il s’appelle Armand maman
Moi : qu’il s’appelle Henry je m’en fou !
Elle bouda un instant en frappant le sol du pied pour montrer son
impatience. Je lui ordonnais d’aller prendre le tabouret et de venir s’asseoir
près de moi. Il fallait que nous parlions elle et moi. C’était important voir
impératif.
Amandine : je t’écoute maman
Moi : tu sais amandine, tu es ma fille et je t’aime très fort mais
tu manques parfois d’ambition. Quand tu regardes Armand qu’est-ce qu’il peut
apporter de plus dans ta vie ? Tu es pauvre, il est pauvre. Quelles association
voulez-vous mettre sur pied ? La maison du besoin ?
Amandine : maman ne parle las comme ça ! Il a de l’avenir ! Et je
l’aime
Je ne réfléchis pas à deux fois avant de lui taper la bouche. Elle
poussa un cri puis mis la main sur ses lèvres, se lamentant en me regardant. Je
levais les yeux au ciel. Qu’avais-je fait au bon Dieu pour qu’il me donne une
fille comme amandine qui ne voyait pas plus loin que le bout de son nez ? Il
fallait lui expliquer longtemps avant qu’elle ne comprenne quelque chose qui
était simple et cela m’exaspérait.
Moi : regarde autour de toi ? Regarde bien...tu veux finir dans
cette maison avec trois enfants sans être ni dotée ni mariée ?
Amandine : maman toi aussi n’appelle pas la malédiction sur
ma vie
Moi : c’est ce qui va t’arriver si tu ne quittes pas ce vaurien de
Armand. Je connais son genre tu penses que tu es la seule qu’il monte dans les
vouloir du quartier ? Regarde ta sœur Salomé, regarde le monsieur qu’elle
traîne avec elle. Tu as vu son pouvoir d’achat ? La profondeur de sa poche ? Tu
as vu les amies avec qui elle traîne ? Quand tu la regardes même tu n’es
pas un peu envieuse ?
Amandine : c’est vrai qu’elle tue hein maman. Elle tue grave
même.
Moi : d’idiote ! Au lieu de chercher à tuer aussi tu veux te finir
dans une relation qui n’ira nulle part. Tu veux finir comme moi peut-être ? Tu
ferais mieux de chercher des hommes comme le gars de Salomé. Ça te fera du bien
Amandine : mais les hommes comme ça sont peu à Daloa hein maman.
Ils sont tous à Abidjan. Je fais comment moi pour les avoir ? M’as-tu déjà
payé le transport du car pour me rendre sur Abidjan ?
Je la lorgnais et restais silencieuse un moment à réfléchir à ce
que venait de dire Amandine. Il y avait même quoi ou qui à Daloa ? Ceux qu’on
pouvait viser était dans le cercle du maire ou du député. Ces hommes étaient
connus pour être avares comme tout. Amandine avait raison, il fallait qu’elle
aille sur Abidjan si on voulait avoir une chance de tomber sur un bon parti et
nous faire sortir de cette galère dans laquelle nous sommes.
Amandine était ma porte de secours, sans être mauvaise Solène
n’avait rien du tout qui pourrait rendre fou un homme. Les fesses il n’y en
avait pas, les seins non plus et le visage était banal. On pouvait en croiser à
chaque coin de rue, rien qui pourrait vous marquer l’esprit ou vous hanter.
Mireille ! elle était tellement têtue. Elle se mêlait rarement à nos
conversations et ne supportait pas que je lui impose ma manière de penser ou
une quelconque directive à suivre. Tout ce qu’elle connaissait c’était l’école.
Une ingrate de la dernière génération. Je portais donc tous mes espoirs sur
amandine.
Je réfléchissais à tout ceci lorsqu’une idée germa dans mon esprit.
Il était soir et c’était le moment propice.
Moi : va dans la chambre et mets un boubou, tu m’accompagneras
quelque part !
Amandine : à cette heure de la nuit-là ? Il est vingt et une heure
maman
Moi : amandine ne m’oblige pas à te tirer par la peau du cou vas
te changer nous devons faire vite avant qu’on se rende compte de mon absence.
Elle se dirigea vers leur chambre et j’en fis de même. Je
changeais de vêtement et retrouvais amandine qui m’attendait devant. Je pris sa
main en nous sortions de la maison en refermant le portail tout doucement.
J’étais en veuvage et je ne devais point me présenter dehors toute seule sans
être accompagnée d’autres veuves de la famille. Nous marchions donc vers cette
maison que je connaissais que fort bien. Amandine ne cessait de me poser des
questions sur l’endroit où nous nous dirigions ou souvent elle ouvrait la
bouche pour simplement se plaindre de combien nous avons marché.
Amandine : c’est encore loin maman ?
Moi : aaah Amandine ! nous somme arrivées
Comme toujours sa porte n’était pas fermée. Je regardais de gauche
à droite pour vérifier que personne ne nous avait vues rentrer et tirais
Amandine avec moi. Il était assis comme d’habitude de son côté de la cour. Je
m’avançais avec Amandine jusqu’à lui
Lui : Agnès ça fait longtemps que je ne t’ai plus vu par
ici !
Moi : les problèmes oh les problèmes !
Lui : asseyez-vous !
Nous prîmes place. Amandine ne cessait de me pincer pour sûrement
attirer mon attention mais je ne la regardais pas une seconde.
Lui : que puis-je faire pour toi ?
Moi : je te présente ma fille Amandine...
Je lui expliquais donc ce qui se passait et ce que j’espérais pour
elle. Les désirs de mon cœur pour elle.
Lui ; je comprends mais elle passera la nuit ici et je la
libèrerai demain
Moi : il n’y a pas de soucis
Amandine : mais maman je ne veux pas !
Moi : tais-toi ! Tais-toi Amandine et ne m’énerve surtout pas. Tu
penses que nous sommes ici pour jouer ? Je suis ta mère et je sais ce qui
est bon pour toi (me levant) à demain.
Je sortis de la cour sans regarder derrière moi. Une mère doit
savoir faire des sacrifices pour la réussite de ses enfants et c’est que je
suis en train de faire pour elle comme ça. Elle me sera reconnaissante plus
tard lorsqu’elle aura quitté cette ville pour une vie plus luxueuse. Je
rentrais chez moi et me couchais rapidement dans mon lit. Demain était un grand
jour, nous allions dire Adieu à mon défunt mari.
...Salomé...
Ce matin nous avons dit adieu à notre père. Voir ce cercueil
descendre m’a arraché le cœur. Heureusement que j’avais des personnes autour de
moi sur qui m’appuyer. Mes frères, les filles avaient été formidables. Je ne
saurais les remercier pour leur présence. Elles ont tout laissé pour me
soutenir dans cette épreuve. J’ai compris que Violette n’ait pu faire le
déplacement mais elle avait appelé chaque jour pour prendre de mes nouvelles.
Linda (rentrant dans la chambre) : ça va ma puce ?
Moi (oui de la tête)
Linda : les gens sont en train de partir je crois que dans trente
minutes il n’y aura plus personne.
Moi : je l’espère aussi ainsi je pourrai réunir mes oncles et
Agnès pour leur exposer ma décision. Plus tôt j’aurais fini avec ça plus vite
je nous nous en irons d’ici. Demain je veux dire.
Linda : il n’y a pas de soucis ! Nancy aide un peu avec le service
dès que c’est libre je viendrai te faire signe. Et au fait, tes oncles ont pris
en otage ton cher Maxime
Moi : c’est pour encore le racketter ça c’est sûr
Linda : j’ai seulement entendu qu’on lui demande qui il est pour
toi.
Moi (me levant) : et qu’a t’il dit ?
Linda (se moquant) : ça je te laisse le lui demander hein ! C’est
entre vous les amoureux.
Moi (souriant) : arrêter de me charrier.
Linda : j’ai réussi à te faire sourire au moins. Depuis que nous
sommes arrivés, je n’avais plus revu ce sourire.
C’était vrai en plus. Mais comment sourire dans ce genre de moment
? Linda me laissa et je me recouchais. Je n’avais pas eu envie d’assister à la
réception après l’enterrement. Des oncles que je ne connaissais même pas
étaient présents et pleuraient comme s’ils avaient été très proches de papa.
Entre les cris de Agnès et les pleurs des autres, il y avait de quoi avoir mal
à la tête. Nous étions en deuil oui ! C’était normal d’entendre des cris et des
pleurs oui ! Mais tout me semblait faux. Mes frères et moi étions mis à l’écart
et les condoléances étaient présentes uniquement qu’à Agnès et ses enfants. On
nous saluait juste comme si nous n’étions que de simples spectateurs.
Pourtant tout l’organisation de cet enterrement avait pesé sur
moi. S’il n’y avait pas eu Maxime, les filles et leurs maris mon père aurait
sûrement été enterré dans la honte. Lorsqu’il fallait cotiser ces mêmes oncles
se rappelleraient de tous leurs problèmes. Agnès jurait qu’elle n’avait pas un
centime soi-disant que le traitement de papa avait tout pris. Pourtant ce
dernier m’avait avoué n’avoir fait qu’une ou deux visites à l’hôpital. Je
connaissais la situation de mes frères alors je ne voulus point les embêter
avec ça. Ils s’en voulaient assez de ne pas être en mesure d’agir pour
l’enterrement de leur père. J’allais travailler dur, me faire tous les défilés
sans trier et rembourser cet argent à toutes ces personnes qui m’avaient aidée.
Linda : ça y est tout le monde est parti et j’ai demandé aux
autres de s’asseoir pour t’attendre
Moi : ok j’arrive comme ça
Je mis de l’ordre dans ma tenue et sorti de la chambre.
Agnès : depuis c’est maintenant qu’on te voit ? Tu étais où ?
Je ne pris pas le soin de répondre à sa question. Elle faisait ça
pour attirer l’attention et me créer des soucis. Je n’allais pas lui donner ce
bonheur-là.
Moi (m’adressant à mes oncles et mes frères) : si je vous ai réuni
c’est pour vous faire part d’une décision que j’ai prise à la suite de la mort
de papa.
Oncle Atto : nous t’écoutons alors
Moi : j’ai décidé de prendre Georges avec moi en ville et
m’occuper entièrement de lui. Il ne pourra pas s’en sortir en restant ici.
Thierry : c’est vrai elle a raison
Albert : je suis moi aussi d’accord avec sa décision
Alors que l’oncle allait parler, Agnès quitta son tabouret et se
jeta à même le sol. Nous étions tous dépassés par ce spectacle qu’elle donnait.
Elle se roulait au sol en pleurant appelant le nom de son mari. Les oncles ont
dû se lever pour la calmer mais elle refusait. On lui demanda alors le pourquoi
de ce comportement.
Agnès : est-ce que c’est George seul qui est l’enfant de mon mari
dans cette cour ? Depuis que Salomé est arrivée, je vois comment ils restent
tous à l’écart sans inclure mes filles dans leurs discussions. (Je voyais
Mireille rouler des yeux) Vous pensiez que mon mari aurait apprécié que nous
soyons laissées comme ça à notre triste sort ? Mes enfants aussi ne mérite pas
d’avoir une chance. Pourquoi Salomé ne prend pas amandine en plus de Georges
pour aller avec elle en ville ?
Moi : quoi ?
Maxime passa sa main sur la mienne pour me calmer et nous
regardions tous l’oncle.
On me Atto : Agnès n’a pas tort ! Amandine, Solène et Mireille
sont aussi tes sœurs. Vous n’avez peut-être pas la même mère mais c’est le sang
de votre père qui coule dans vos veines. Vous portez le même nom de famille.
Prends aussi amandine ce sera ma condition afin de pourvoir partir avec George.
Moi : je pourrais prendre Mireille avec moi.
Agnès : Non elle est encore petite ! si elle part à
Abidjan qui va bien s’occuper d’elle là-bas ?
Encore une fois, mon oncle trouva que Agnès avait raison. Je
regardais mon oncle avec déception. Pourquoi m’obliger à aller avec Amandine si
je veux récupérer avec moi mon frère ? J’étais prête à tout pour avoir George
avec moi s’il fallait accepter amandine alors je le ferai. Si c’étaient les
bâtons que Agnès voulait me mettre dans les roues j’allais lui montrer qu’elle
ne me faisait pas peur. J’acceptais donc la condition de mon oncle.
Le lendemain je laissais de l’argent à mes grands frères et promis
de leur envoyer quelque chose chaque fin de mois pour qu’ils ajoutent sur leur
petit salaire de la scierie. Dans la voiture nous n’étions plus deux comme à
notre arrivée mais quatre. J’avais avec moi Georges et Amandine. Cette histoire
de prendre Amandine ne me plaisait pas du tout mais que pouvais-je y faire.
Il fallait voir les larmes de Agnès au moment des au revoir. Cette
femme ne cessera jamais de me surprendre.
Nous quittions Daloa tous ensemble mes amies et moi