Chapitre 17

Ecrit par Spice light





– Joan MUAMBA FOKE –



Je reviens de l’administration universitaire.

J’étais allé voir le recteur pour discuter de la possibilité d’un transfert. Il était sceptique, surtout que les cours touchent à leur fin. Finalement, on s’est mis d’accord : je composerai les examens (dans moins de deux semaines), et ensuite, mon transfert sera validé.


Je déménage pour la capitale. Je veux être plus proche afin de suivre de près les démarches liées à mon voyage. Et au lieu de rester à ne rien faire, aller à la fac me permettra de décompresser un peu.

Mon père n’est pas au courant. Je le mettrai devant le fait accompli.





Deux semaines plus tard



Je viens de terminer le dernier examen de l’année.

En sortant de la salle, je me mets à marcher un peu dans l’enceinte de l’université, histoire de me remémorer les souvenirs.

Perdu dans mes pensées, je bute contre quelqu’un. Je lève les yeux et tombe sur un homme bien bâti.


— Euh… excusez-moi monsieur, j’avais la tête ailleurs.

— La tête ailleurs, tu dis ? Oh non, tu pensais plutôt à comment encore voler, pas vrai ? dit-il avec dédain.

— Je ne vous permets pas de me manquer de respect, ok ?

— J’ai pas besoin de ta permission, tout comme toi tu n’en as pas eu pour voler le portefeuille de Violette !

— Je ne sais pas de quoi tu parles, et maintenant, laisse-moi passer.


Je tente de le dépasser, mais il me retient par les épaules.

— C’est quoi ce cirque ?! je commence à crier, espérant attirer quelques étudiants à la rescousse.


Erreur. Un coup de poing me cueille de plein fouet. Je vacille. Deux autres gaillards surgissent et se jettent sur moi.

On ne m’avait jamais frappé comme ça. Même pendant mes magouilles à l’internat, je n’ai jamais été roué de coups à ce point.




J’ouvre les yeux sans reconnaître l’endroit.

— Où suis-je ? je murmure faiblement.

Personne ne me répond. En regardant autour de moi, je comprends que je suis à l’hôpital. J’appuie sur le bip pour appeler une infirmière.


La porte s’ouvre rapidement.

— Vous êtes réveillé ? Je vais prévenir le docteur.


Elle ne me laisse pas le temps de parler et disparaît aussitôt.

Elle revient avec une jeune médecin.


— Bonjour monsieur. Vous m’entendez ?

Je hoche la tête.

— Bien. Laissez-moi vous ausculter. Vous nous avez fait une sacrée peur. Vous dormiez depuis plus de trois jours.

— Que m’est-il arrivé ?

— Vous avez été violemment agressé. Quand vous avez été amené ici, vous étiez inconscient. L’université a prévenu vos parents. Ils sont venus ce matin.

— J’ai mal partout…

— Je vais vous administrer un anti-inflammatoire si la douleur persiste, mais pour aujourd’hui, on évite.


Je soupire intérieurement.

Comment ont-ils su que c’était moi qui avais volé cet argent ? Cela fait plusieurs semaines pourtant…


Je suis encore perdu dans mes pensées lorsque la porte s’ouvre à nouveau. Mon père entre.


— Je suis très déçu de toi, Joan, dit-il d’emblée.

Je détourne le regard.

— Voler ? Mon propre fils, un voleur ? Tu as tout pour réussir, alors pourquoi salir ton nom comme ça ?

Tu n’imagines pas la honte que j’ai ressentie en apprenant que mon fils s’est fait battre pour avoir volé le portefeuille de la fille du député.

Même aller au travail est devenu une épreuve. Ton université voulait t’exclure sur-le-champ. Et maintenant, j’apprends que tu avais aussi fait une demande de transfert ? Qu’est-ce que j’ai raté dans ton éducation, hein ?


Je le regarde, muet.


— Réponds-moi, Joan FOKE ! crie-t-il.


Pour toute réponse, j’appuie sur la sonnette.


L’infirmière arrive aussitôt.

— Un problème ?

— Oui, je veux rester seul. J’ai besoin de dormir, dis-je calmement.

— Monsieur, vous pouvez patienter dehors, ou revenir demain, dit-elle à mon père.


Il me lance un regard dur avant de sortir.

Je m’en fiche de ses états d’âme.




Après plus d’une semaine à l’hôpital, je rentre enfin chez mes parents.

Papa est venu me chercher. Maman Elsa, je suppose, est au travail.

Il m’aide à m’installer dans mon ancienne chambre.


— Joan, soyons sérieux. Ce qui s’est passé, ce n’est pas normal, dit-il d’un ton ferme.

— Je suis désolé, papa. Je ne sais pas ce qui m’a pris…

— Tu es mon enfant en qui je mets le plus d’espoir. Les filles se marieront. Rolls ne veut rien comprendre. Sun vit dans son propre monde.

Alors toi… c’est toi ma fierté. Ne me déçois plus. Voici ta carte d’épargne. Tu pourras l’utiliser si besoin. Je continuerai à l’approvisionner.

— Merci, papa, dis-je en prenant la carte.




Je me rétablis peu à peu.


Un jour, notre voisine (celle de la parcelle d’à côté) m’appelle pour l’aider avec son téléphone.

Nos parents veulent les smartphones, mais ne savent pas toujours les utiliser.


En entrant, je la vois compter de l’argent. Cette dame n’est ni mariée ni mère. Elle élève les enfants de sa famille.

Il paraît qu’elle a le kodia – une somme d’argent confiée à une personne bien choisie dans la famille, généralement celle qui a “le commerce dans le sang”. Cet argent, une fois intégré à la recette, ferait fructifier les affaires. C’est mystérieux, ce truc. La personne qui le détient est censée veiller sur les siens jusqu’à la fin de sa vie, avant de transmettre ce rôle à un autre.


— Bonsoir maman.

— Ah Joan, bonsoir ! Viens voir un peu mon téléphone, avec vos WhatsApp là. Je comprends rien, et tous les enfants sont sortis, se plaint-elle.


— D’accord, laissez-moi voir.


Elle me tend le téléphone. Je cherche le problème.

— Ah, j’ai oublié un numéro. Attends, je vais le chercher, tu me l’enregistreras.


— D’accord, maman.


À peine a-t-elle disparu que mon regard glisse à nouveau sur l’argent posé sur la table.

Une grosse somme.

Comme si une voix me disait de le prendre.

Je cède. Je prends juste une liasse de 25 000 francs et la cache dans mon jogging.


Elle revient quelques secondes plus tard.

— Ah, je n’ai pas trouvé le numéro.

— D’accord maman. Tenez votre téléphone. C’était un simple problème de mise à jour.

— Ah merci mon fils. Tes parents t’ont bien éduqué.


Je sors de là et file au supermarché le plus proche.

Je prends quelques amuses-bouche et rentre chez moi.




Un mois plus tard, je pars enfin pour la capitale pour poursuivre mon projet.


POUR QUELLES RAISONS...