Chapitre 18

Ecrit par Auby88

Steve ANIAMBOSSOU

Rita dort. Nous venons de faire l'amour. C'était passionné comme d'habitude. Actuellement, je suis sur ma terrasse, un verre de whisky à la main. Si je suis là, ce n'est pas pour admirer la ville, ni pour observer​ les rares engins qui circulent encore à cette heure de la nuit. Si je suis là, c'est simplement parce que je ne trouve pas le sommeil. Revoir Aurore m'a ramené au passé. Pire encore, la revoir avec un autre homme m'a quelque peu troublé.

Je devrais normalement être heureux pour elle, mais je n'y arrive pas. Je ne sais comment qualifier ce que je ressens. De la jalousie ?

Mais non. Ce n'est pas possible car j'aime vraiment Rita.

Je suis sûr que c'est simplement parce qu'Aurore m'a auparavant appartenu, parce que j'ai été son premier homme que l'idée qu'elle puisse avoir une intimité avec un autre que moi me pertube autant.

Bon sang ! Je délire là ! Aurore a le droit de refaire sa vie ! Et puis, ce gars et elle ne sont que des amis. Même si je les ais trouvés trop​ proches pour de simples amis.

Bof, il faut que j'oublie tout cela. Je sors avec l'une des filles les plus canons du Bénin, une fille que tous les hommes voudraient avoir à leurs côtés et dans leurs lits. Que demander de mieux ?

J'avale la dernière gorgée d'alcool, puis rentre à l'intérieur me coucher près de ma fée.



*******

Aurore AMOUSSOU


J'ai les yeux fixés sur les photos de Steve. Je pleure en pensant à lui. Après l'avoir revu en couple avec Rita, mon cœur saigne énormément. J'aurais espéré qu'ils ne soient plus ensemble.


"Tu es une idiote, Aurore !", me dirait-on. Comment peux-tu encore l'aimer alors qu'il t'a vilement abandonnée ? Comment peux-tu être prête à l'accepter encore ?

 C'est simplement parce que je l'aime. Oui, je l'aime tellement.


Maman toque contre ma porte.

- C'est ouvert.

- Qu'est-ce que tu fais ?

- Rien d'important, maman.

J'ai essayé de cacher les photos, mais par maladresse elles ont atterri sur le sol.

- Je suppose qu'il s'agit des photos de Steve que tu gardes sous ton coussin.

Je la regarde, toute étonnée.

- Si je ne t'en ai jamais parlé, c'était pour ne pas te brusquer. Et puis, c'est à toi de décider quand t'en débarrasser.

- Dis-moi, maman, que dois-je faire pour oublier Steve ? Si cela était possible, je m'ouvrirai le coeur pour l'en extirper.

- Mais c'est impossible, Aurore. C'est difficile certes, mais je suis sûre que tu y arriveras.


Je soupire longuement. L'une des infirmières vient toquer contre la porte. Elle m'informe que Femi est là.

J'avais complétement oublié qu'on avait une séance de natation. Je doute pouvoir faire quoi que ce soit aujourd'hui. J'ai le moral à zéro.

- Dis-lui de monter.

- Bien, mademoiselle !

- Je suis contente qu'il soit là, Aurore. Ce garçon a toujours eu le don de te rendre gaie.

- Oui, maman. Mais je ne pense pas que sa magie opérera aujourd'hui.


J'évite d'ajouter que j'aurais du mal à parler d'affaires de coeur avec quelqu'un qui est amoureux de moi. Je risquerais de le blesser en évoquant ce que je ressens pour Steve.

- Qui sait, Aurore ? conclut-elle en souriant.

Un toc retentit contre ma porte. Ce doit être lui.

- Femi, tu peux entrer.

- Bonjour maman, bonjour Aurore !

Nous lui rendons son salut.

- Je vous ai apporté des pommes. Ce n'est pas beaucoup, mais j'espère que vous aimerez.

- Merci Femi, dis-je faiblement.

- Merci mon fils. Je vais m'en occuper tout à l'heure !

- Maman ! Je te rappelle que c'est pour nous deux.

- Oh ! Je t'en laisserai, t'inquiète !

Je lis au coin de ses lèvres un sourire pas net. Ma mère a toujours raffolé de pommes. Elle est bien capable de ne pas m'en laisser.

- Oui, c'est ça ! On se connaît.

- Les jeunes, je vous laisse. J'ai du travail qui m'attend.

Je secoue la tête. Femi sourit. Maman quitte ma chambre.

- Ta mère est adorable !

- Oui, je dois le reconnaître.

- Elle me rappelle ma mère.

- Ah vraiment !

- Oui, ma mère est aussi gentille que la tienne. Même si parfois elle est trop "maman poule". Tu vois ce que je veux dire ?

- Oui, c'est pareil avec la mienne aussi. Pour elle, je suis toujours sa petite Aurore.

 - Ah les mamans ! achève-t-il en souriant.

Je hoche juste la tête. Je ne l'écoute plus vraiment.

- Aurore !

Je reviens à la réalité.

- Oui, Femi.

- A te voir, je devine que tu n'as aucune envie d'aller te baigner.

- Je suis désolée Femi, mais je n'ai pas la tête à cela. J'ai complètement oublié de te prévenir. Excuse-moi de t'avoir fait te déplacer pour rien.

- Ce n'est pas grave. Tu voudrais qu'on parle de ce qui te tracasse ?

- Non ! Je n'ai pas envie de t'ennuyer avec mes problèmes.

- Je suis là pour t'écouter. Ça a un lien avec hier, n'est-ce pas ?

Je préfère être franche avec lui.

- Oui, Femi. Mais je ne peux pas en parler avec toi.

- Pourquoi ? Parce que j'ai des sentiments pour toi ?

- Oui, je n'ai pas envie de te faire de la peine.

- Voyons Aurore ! Cela se voit que tu ne me connais pas suffisamment. Je t'aime certes,  mais tu m'as déjà fait comprendre que tu aimais encore ton ex. Alors, tu peux te confier à moi sans crainte.


Ses yeux sont si sincères. Il est assis face à moi et me tient la main.

- C'était ton ex et sa copine, n'est-ce pas ?

- Oui. J'ai eu tellement mal hier en les voyant ensemble. Steve était le premier homme de ma vie, le genre d'amour qu'on n'oublie pas de si tôt, qui vous marque à vie. Je l'aime, tu comprends. Je l'aime. Je suis même prête à me remettre avec lui s'il revenait, à tout lui pardonner.

Avec un mouchoir, Femi essuie mes larmes.

- Steve est un sacré veinard ! dit-il en me souriant. Il ne sait pas la chance qu'il a, Aurore !

- …

- Sauf que cela ne te servira à rien de continuer à l'aimer si son coeur ne bat plus pour toi.

- C'est possible, Femi. Et si Rita l'avait juste aveuglé ?

- Peut-être, mais ils sont toujours ensemble.

- J'aurais dû me battre pour lui, plutôt que d'accepter ma défaite comme je l'ai fait.

Il me fixe longuement.

- Alors, s'il y a encore un doute dans ton esprit, si tu penses qu'il t'aime encore, ne baisse pas les bras. Bats-toi pour lui. Je serai là pour te soutenir.

- Tu me suggères d'aller le voir, c'est cela ?

- Oui. Ce sera la seule façon pour toi de savoir si tu as encore des chances avec lui.

- Je ne sais si j'en aurai le courage, finalement. J'ai peur.

Je baisse la tête.

- Je viendrai avec toi, Aurore.
Je lève les yeux vers lui.

- Vraiment ?
- Oui.
-  Femi, je ne sais pas ce que je ferais sans toi !

Il me sourit.

- Alors, tu me changes cette triste mine, tu te prépares et on va rendre une visite surprise à ton… homme. Je t'attends en bas.

- Merci Femi, dis-je en souriant grandement.



********

Steve ANIAMBOSSOU

Je reste surpris par l'appel de la standardiste. Je m'attendais à tout sauf à la visite d'Aurore.

- Elle peut monter. J'accepte de la recevoir. Au fait, demandez au vigile de l'aider avec son fauteuil roulant.

- Mademoiselle n'est pas seule.

- Ok.

Je devine que ce doit être son chauffeur qui l'accompagne. Je quitte mon fauteuil et vais l'attendre sur le seuil de mon bureau. Je la vois qui avance vers moi avec… le chanteur. Lui, je ne l'aime pas trop. Il me salue. Je lui réponds sans prêter attention à lui. Aurore ! Elle est toujours aussi belle.

- Je vous laisse. Aurore, fais-moi signe quand tu auras fini. Je t'attendrai en bas.

Elle hoche la tête en sa direction. Il disparaît dans l'ascenseur. Je me propose de l'aider à entrer.

- Non merci, je peux le faire.

Je n'insiste pas. J'ouvre grandement la porte et la laisse s'introduire à l'intérieur.

- Eh bien, tu souhaites me parler ?

- Oui, Steve.

Plus je la regarde et plus je me sens mal à l'aise vis-à-vis d'elle. Je nous revois heureux dans le passé et mon cœur se serre.

- J'avais besoin de te revoir. J'ai beau essayé de t'oublier, je n'y arrive pas, Steve. Je t'aime encore et je te pardonne tout.

Je suis complètement chamboulé par une telle déclaration.

- Je sais que le cadre et le moment ne sont pas propices, mais je me devais d'être là, Steve. Et surtout, j'ai besoin que tu répondes sincèrement à une question.

Je la fixe, appréhendant déjà ses mots.

- Est-ce que tu m'aimes encore ? Réponds-moi sincèrement. J'ai besoin de savoir.

- …

- Steve, s'il te plaît ! Réponds-moi.

Elle est au bord des larmes.

- Je suis désolée Aurore, mais c'est Rita que j'aime à présent. Toi et moi, nous avons connu de beaux jours ensemble mais c'est fini. Je ne ressens plus de l'amour pour toi.

- Parce que je suis en fauteuil roulant, c'est cela ?

- La cause, je ne le saurais le dire. Mais je suis sincère quand je te dis que j'aime Rita.

- Mais cette fille ne t'aime pas, Steve ! Elle joue juste avec toi, avec tes sentiments !

- Non, tu ne la connais pas. La preuve, elle est encore en couple avec moi.

- Mais...

- Aurore ! Tu as voulu que je sois honnête avec toi et je le suis. Il est temps que tu acceptes mon choix et que tu ailles de l'avant, que tu apprennes à aimer quelqu'un d'autre.

- Mais c'est toi que j'aime​ et toi seul que j'aimerai toute ma vie.

Elle essaie d'agripper mon bras. J'esquive.

- Aurore ! Arrête. Grandis un peu et laisse-moi vivre ma vie !

Le ton de ma voix est certes dur, mais c'est la seule manière que j'ai trouvée pour lui ouvrir les yeux.

Elle est là à me fixer. Je fuis son regard et feins de ranger des dossiers.

- A présent, il faut que je travaille. Viens, je te raccompagne.

- Ce n'est pas la peine. Je sais me débrouiller toute seule !

Je m'en veux de l'avoir vexée, mais c'est mieux ainsi.

- Je tiens quand même à t'ouvrir la porte.

- Je peux le faire !

Elle s'y met une ou deux fois mais échoue. Je l'aide et elle s'empresse de sortir.

- Aurevoir, Aurore.

L'écho de ma voix résonne dans le vide. Elle ne daigne pas me répondre.

Elle prend son téléphone pour appeler son "toutou". Parce que je ne comprends pas comment qualifier ce jeune homme qui semble beaucoup tenir à elle, alors qu'il n'y a définitivement rien entre eux.

Il accourt presque aussitôt. La voyant en larmes, il me fusille du regard. Pauvre idiot ! Je rentre dans mon bureau et les laisse là. Je respire profondément puis me remets au travail. Je n'ai pas le temps pour d'autres distractions. J'ai plein de boulot qui m'attend. Les flâneries ne sont pas pour moi.



********

Aurore AMOUSSOU

Je me sens tellement mal. Entendre cette vérité de la bouche de Steve me fait énormément souffrir. J'aurais espéré qu'il ait des doutes dans son coeur, qu'il me dise qu'il m'aime encore même si ce n'est qu'un peu.


- Aurore ! Que s'est-il passé pour que tu sois ainsi ?

- …

J'entends Femi, mais je n'arrive pas à lui répondre. J'ai la gorge nouée. Je repense encore aux propos de Steve qui me trouve immature, qui me demande de "grandir".

- Aurore, tu m'écoutes ?

J'acquiesce en essuyant prestement mon visage ; je regarde Femi droit dans les yeux et lui annonce :

- Steve est désormais "mort" pour moi. Je ne verserai plus aucune larme pour lui. Je ne resterai plus là à me lamenter  par rapport à ce que je ressens pour lui. Aujourd'hui, j'ai compris que je l'ai définitivement perdu. A présent, allons nous-en d'ici !

Il hoche la tête et nous continuons notre chemin.





SECONDE CHANCE